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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/9675/2018

AARP/49/2024 du 01.02.2024 sur JTDP/937/2023 ( PENAL ) , ADMIS

Descripteurs : ESCROQUERIE;TORT MORAL;DISPOSITIONS PÉNALES DE LA LAMAL
Normes : CP.251; CP.146; LAMal.92.al1.letb; CPP.429.al1.letc
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/9675/2018 AARP/49/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 1er février 2024

 

Entre

A______, domiciliée ______, comparant par Me Yaël HAYAT, avocate, HAYAT & MEIER, place du Bourg-de-Four 24, case postale 3504, 1211 Genève 3,

appelante,

 

contre le jugement JTDP/937/2023 rendu le 8 juin 2023 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

B______, partie plaignante,

C______, partie plaignante,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/937/2023 du 8 juin 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnue coupable d'escroquerie (art. 146 al. 1 du Code pénal [CP]), de tentative d'escroquerie (art. 22 al. 1 CP en lien avec l'art. 146 al. 1 CP) et de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP) en lien avec plusieurs complexes de faits et l'a acquittée de ces mêmes infractions pour d'autres. Le TP l'a condamnée à 90 jours-amende à CHF 150.- le jour, avec sursis pendant trois ans, sous déduction de deux jours de détention avant jugement et de 27 jours au titre des mesures de substitution, et a renoncé à révoquer le sursis qui lui avait été octroyé le 12 janvier 2020 par le Ministère public (MP). Il a renvoyé B______ à agir par la voie civile. Enfin, il a condamné A______ au paiement de CHF 3'753.75 au titre des frais de la procédure préliminaire et de première instance, soit 75% de CHF 5'005.-, et a condamné l'État de Genève à lui verser CHF 9'420.20 à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

b. A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant à son acquittement et au paiement en sa faveur par l'État d'une indemnité de CHF 43'432.04 au titre de ses frais de défense et de CHF 15'200.- au titre de son tort moral.

Le MP conclut au rejet de l'appel. [Les assurances maladie] B______ et C______ s'en remettent à la justice.

c. Selon l'ordonnance pénale du 17 décembre 2022, il est reproché ce qui suit à A______ :

Depuis une date indéterminée en 2015 jusqu'au 6 septembre 2021, elle a, en sa qualité d'administratrice [du centre de physiothérapie] D______ SA, sis route 1______ no. ______ à E______ [GE], intentionnellement remis des ordonnances médicales falsifiées à plusieurs assureurs-maladies en vue de remboursement dans le dessein de se procurer, ou de procurer à un tiers, un enrichissement illégitime. Elle a en outre réalisé à de nombreuses reprises des abus dans sa facturation par rapport aux bons de physiothérapie présentés par les patients et commis moult irrégularités quant aux prestations délivrées par D______ SA.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______, citoyenne suisse, née le ______ 1972, a fondé D______ SA avec F______ et en a été l'administratrice avec signature individuelle depuis lors. Il s'agit d'un centre de physiothérapie, d'ostéopathie et autres thérapies complémentaires. Suite à l'octroi d'un sursis concordataire, un concordat par abandon d'actifs portant sur le centre a été homologué par le Tribunal civil le 24 avril 2023. Les actifs de la société ont été transférés à G______ SA contre CHF 395'000.-.

b. Au sein de D______ SA, A______ était chargée, d'une part, de la réalisation des prestations de physiothérapie aux côtés d'autres physiothérapeutes employés par la société et, d'autre part, de la gestion de la facturation avec l'aide d'assistants travaillant en commun au sein du secrétariat.

c. Au stade de l'appel, 15 cas d'irrégularités sont encore reprochés à A______ (la numérotation des cas reprenant celle adoptée par le TP) :

Cas n° 1 (H______)

c.a. Sur une prescription de physiothérapie du 7 avril 2017 et mentionnant en caractères d'imprimerie neuf séances prescrites, a été rajoutée l'inscription manuscrite "+ séance en piscine" suivie d'une signature correspondant à celle de la Dresse I______ (cf. pièce A118). Sur une seconde ordonnance datée du même jour et au contenu strictement identique, y compris la forme et la taille de la signature, la mention manuscrite relative à la piscine semble avoir été effacée et un "9" avoir été écrit à la main en lieu et place du même chiffre en caractères d'imprimerie. Cette seconde ordonnance n'avait, aux dires de Dresse I______, pas été émise par celle-ci (cf. P-C828). Un courrier de la Direction des services des Hôpitaux universitaires de Genève du 23 mai 2019 mentionne cependant : "Les prescriptions sont conformes aux originaux présents dans le dossier des HUG" (cf. P-C819). Dans les notes J______ [site de la caisse des médecins] de D______ SA est inscrit : "Prescription du 7 avril 2017 pour CABINE (Attention une autre pour ttt piscine/ ne pas confondre) K______ [monogramme]" (cf. P-10 du bordereau de pièces d'appel). Cette prestation a fait l'objet d'un règlement par B______ à hauteur de CHF 462.25. La facture relative aux traitement en piscine ayant en revanche été annulée par D______ SA suite à une contestation de l'assurance (cf. P-10 du bordereau de pièces d'appel).

Cas n° 2 (L______)

c.b. Sur une prescription de physiothérapie du Dr M______ figure en écriture manuscrite la date "27.9.2017", alors que, selon celui-ci, la consultation du patient L______ datait du 27 août 2017. Il n'avait pas été sollicité par D______ SA en lien avec un tel changement (cf. P-A173 et C952). Dans les notes J______ de D______ SA est inscrit : "Patient en vacance jusqu'à fin septembre, doit décaler la reprise de ttt. OK avec le cabinetMedical selon tel 31.10.2017changement de date selon tel 31.10.2017 N______ [monogramme]" (cf. P-C647). Cette prestation a été réglée par B______ à hauteur de CHF 308.15.

Cas n° 4 (O______)

c.c. Sur une prescription de physiothérapie du Dr P______ du 22 février 2017 a été rajoutée une mention manuscrite "PISCINE", accompagnée d'une croix (cf.
P-A28/C851). Selon le Dr P______, ce rajout était le fait de la prévenue mais correspondait au but de sa demande de traitement (cf. P-C852). Dans les notes J______ de D______ SA est inscrit : "manque "balneo" sur ordonnance. Q______ 19.5.17 ok renvoyé par email à R______ 28.2.18 avec l'accord du Dr N______ [monogramme]" (cf. P- C701). Cette prestation, d'un montant de CHF 453.70, n'a pas été réglée.

Cas n° 5 (S______)

c.d. Sur des prescriptions de physiothérapie du Dr T______ datées du 27 juillet 2017 (cf. P-A106/C890), du 4 septembre 2017 (cf. P-A107/C892), du 31 octobre 2017 (cf. P-C710) et du 16 novembre 2017 (cf. P-C897) a été rajoutée une inscription manuscrite : "en accord pour 2 traitements par jours", "en accord pour 2 traitement par jour", respectivement "2 ttt possibles par jour". Sur l'ordonnance du 27 juillet 2017, ainsi que sur une autre datée du 18 septembre 2017 (cf. P-C894), la date initiale a en outre été effacée et réécrite. Selon le Dr T______, il s'agissait effectivement d'ajouts, sans qu'il précisât s'il les attribuait à son cabinet ou à D______ SA. En outre, les deux dates précitées avaient été "falsifiées" (cf. P-C899). Dans les notes J______ de D______ SA est inscrit : "facture refaite, avec précision de ttt/jour en accord avec le médecin par tel au secrétariat ; afin que le patient soit couvert lorsqu'il fait ses séances piscine et cabine le même jour K______ [monogramme]" (cf. P-C705), ainsi que : "Tel avec secrétariat med pour avoir accord de spécifier sur toutes ordonnances -2 ttt/ par jour afin de ne pas avoir à chaque fois refus de remboursement puisque patient ( cas complexe) vient pour faire ses ttt cabine et sa balnéothérapie. / ok avec doc/secrétariat-Q______ 20.11.2017" et "ok par tel pour possibilité de 2ttt/par jour Piscine et Cabine N______ [monogramme]" (cf. P-13 du bordereau de pièce d'appel). Ces factures ont été réglées à hauteur de CHF 1'027.20 par B______ et refusées à hauteur de CHF 1'309.65.

Cas n° 7 (U______)

c.e. Sur une prescription de physiothérapie du Dr V______ du 12 avril 2016, figure la mention manuscrite "PISCINE" marquée d'une croix (cf. P-A21/C933). Selon le Dr V______, cette mention avait été rajoutée sans que cela ne fût de son fait, ni qu'une demande en ce sens figurât dans son dossier relatif au patient (cf. P-C934). Dans les notes J______ de D______ SA est inscrit : "accord par tel pour PISCINE RENVOI par MAIL le 23.05.2019 K______ [monogramme]" (cf. P-C690). La facture relative aux prestations de D______ SA, d'un montant de CHF 632.30, n'a pas été réglée.

Cas n° 9 (W______)

c.f. Sur une prescription de physiothérapie de la Dresse X______ du 17 janvier 2017, figure la mention manuscrite "PISCINE" marquée d'une croix (cf. P- C941). Selon la Dresse X______, ces modifications n'étaient pas de son fait et n'avaient pas été réalisées avec son accord (cf. P-C939). Dans les notes J______ de D______ SA est inscrit : "après bilan - demande d'ajout PISCINE sur prescription – ok avec secrétariat Y______ [monogramme] (2 ttt déjà facturés en cabine)" (cf. P-C670). La facture relative à cette prestation, d'un montant de CHF 329.55, n'a pas été réglée.

Cas n° 10 (Z______)

c.g. Sur deux prescriptions de physiothérapie du Dr AA______ du 7 juillet 2017, figure la mention dactylographiée en rouge : "2 traitements possibles par jour (traitement en cabine en parallele)", respectivement "2 traitements possible par jour (traitement en piscine en parallèle)" (cf. P-A108s.). En outre, une prescription, datée du 9 mai 2017, a vu sa date être inscrite ou modifiée manuellement, contrairement aux autres ordonnances. De plus, la case "deuxième ordonnance" est cochée sur cette dernière prescription, alors que cette ordonnance est chronologiquement la quatrième (cf. P-C912). Excepté cette dernière ordonnance, l'ensemble des prescriptions au dossier est signé du tampon du Dr AA______ précédé d'un "p.o.". Selon un courriel de sa secrétaire du 7 novembre 2017 adressé à B______, le précité n'avait jamais ordonné de traitements en piscine et à sec en parallèle ; la patiente devait effectuer deux séances par semaine, une en piscine et une à sec (cf. P-A110). Dans les notes J______ de D______ SA est inscrit : "BON 7.7.2017 (cabine) Patiente qui suit un ttt en cabine et piscine, parfois fait les deux séances le même jour - selon tel avec le Médecin - ok d'ajouter la notion de "2 ttt possible par jour" afin d'être à jour avec chaque prestation reçue. {…} Q______ 19.9.2017" et "bon 7.7.2017 (piscine) idem que bon du 7.7.2017 (cabine) ok avec le med - pour 2ttt par jour. {…} Q______ 19.9.17" (cf. P-C674 à C676), ainsi que "attention suit 2 ttt en parallèle- en cabine et en piscine - demande par tel si possible d'ajouter 2tt/jour afin qu'elle puisse se faire rembourser- ok avec med. idem pour bon piscine AB______ [monogramme] 10.07.2017" (cf. P-16 du bordereau de pièces d'appel). Ces factures ont été réglées par B______ à hauteur de CHF 888.- et refusées à hauteur de CHF 423.70.

Cas n° 11 (AC______)

c.h. Sur une prescription de physiothérapie de la Dresse AD______ datée du 9 mai 2017, figure une date manuscrite où le numéro de mois (5) semble avoir été amendé par rapport à l'inscription d'origine (cf. P-C680/C798). Selon les déterminations des HUG, la prescription d'origine était datée du 9 mars 2017, la patiente n'avait plus été suivie depuis la mi-avril (cf. P-C819). Dans le dossier médical de D______ SA, qui se rapporterait à la patiente, est inscrit : "______ – nous a donné un bon daté trop ancien, je ne l'ai pas scanné car il ne peut pas être pris en compte car trop ancien, la patiente doit demandé pour ce bon l'accord de son médecin pour modifier la date ou lui demander un nouveau bon.10/05 N______ [monogramme]" (cf. P-C658). La facture de D______ SA, d'un montant de CHF 487.90, n'a pas été réglée.

Cas n° 12 (AE______)

c.i. Sur une prescription de physiothérapie de la Dresse AF______ datée du 28 novembre 2017, a été ajoutée l'inscription manuscrite "En accord 2TT/jour", la case "2 traitements par jour" ayant en outre été cochée (cf. P-C-865 et P-C-865-1). Selon la Dresse AF______, cette mention avait été rajoutée par rapport à son ordonnance originelle (cf. P-C864). Dans les notes J______ de D______ SA est inscrit : "ok avec med, accord par tel pour 2tt par jour, en cabine et piscine. Q______". (cf. P-C661) Les factures relatives à ces prestations de D______ SA ont été réglées par B______ pour un total de CHF 915.95.

Cas n° 13 (AG______)

c.j. Sur une prescription de physiothérapie du Dr AH______ datée du 14 juin 2017, la date d'origine apparaît avoir été amendée par rapport à l'ordonnance originale datée du 28 avril 2017 (troisième prescription chronologiquement) ; l'inscription manuscrite "PISCINE" a en outre été ajoutée (cf. P-C1028 à C1030). Selon le Dr AH______, ces modifications n'avaient pas été réalisées par lui-même ou par son assistante (cf. P-C1033). Ses ordonnances des 9 janvier, 24 février et 21 septembre 2017 mentionnent en revanche la nécessité d'un traitement en piscine. Dans les notes J______ de D______ SA est inscrit : "1 Date identique cabine/piscine (30.06.17),appel médecin pour savoir si possible changer date ? ok demande du 29.8.18 Q______ envoi par courrier, si pas réglé, facture à abandonner .Q______ vu avec TTP. 29.8.18 Selon disc avec AI______ [prénom], a priori annuler la facture car docteur soûlé par ces histoire de bons, 0k avec A______ [prénom] pour abandon fact. 5.11.2018" (cf. P-C666). La facture de D______ SA, s'élevant à CHF 423.70, n'a pas été réglée.

Cas n° 14 (AK______)

c.k. Sur une facture de D______ SA du 15 août 2016 adressée à l'assurance[-maladie] AL______ et d'un total de CHF 423.70 sont listées neuf séances de thérapie de groupe en piscine, avec une première date au 23 juin 2016 (cf. P-C30'449s.). Selon un courrier de la patiente adressé à l'assurance, elle n'avait pas encore commencé ses traitements en piscine au 27 septembre 2016, mais avait uniquement vu A______ à une reprise le 20 juin 2016. À cette occasion, elle avait reçu une carte, valable jusqu'au 18 juillet 2017, lui permettant d'accéder à la piscine du centre, possibilité dont elle n'avait pas encore fait usage en raison d'une incompatibilité d'horaire, mais à laquelle elle comptait recourir dès octobre (cf. P-C198s.). Il n'est pas clair si la facture a été acquittée par AL______.

Cas n° 15 (AM______)

c.l. Sur une facture de D______ SA du 11 février 2016 figurent neuf séances de physiothérapie avec supplément piscine (cf. P-C30'041s.). Selon un courrier de la patiente adressé à AL______, seules quatre de ces séances se seraient cependant effectivement déroulées en piscine, les autres ayant été effectuées en cabine. En outre, la séance du samedi 16 janvier 2016 n'aurait jamais eu lieu (cf. P-C30'036s.). Le montant qui aurait été facturé à tort s'élève à CHF 148.72 ([5 x CHF 19.76] + CHF 49.92).

Cas n° 16 (AN______)

c.m. Sur une facture de D______ SA du 14 août 2015 figurent neuf séances de physiothérapie avec drainage lymphatique manuel, dont huit avec supplément piscine (cf. P-C30'034s.). Selon un courrier de la patiente adressé à AL______, les dates de ses séances de piscines ne correspondaient pas à celles figurant sur la facture, bien qu'elle en eût effectivement réalisées quatre. De plus, elle avait bien effectué cinq séances de physiothérapie auprès de D______ SA au 28 septembre 2015, mais seules trois avaient eu lieu avant le 14 août de la même année. Sur la facture contestée annexée à sa missive, elle a toutefois barré uniquement les dates des séances des 23 et 25 juillet, ainsi que des 10 et 14 août 2015, une séance ayant en revanche eu lieu le 12 août 2015 (cf. P-C30'032ss). Le montant qui aurait été facturé à tort s'élève à CHF 299.52 ([80.08 x 3] + [19.76 x 3]).

Cas n° 18 (AO______)

c.n. Sur une facture de D______ SA du 18 août 2016 figure une séance de physiothérapie datée du 5 mai 2016 (cf. P-C30'020), jour férié en raison de la fête de l'Ascension. Selon un courrier de la patiente adressé à AL______, elle n'avait pas eu de traitement ce jour-là ; il devait s'agir d'une erreur de saisie comme celle concernant une autre facture mentionnant un traitement le 25 mai 2015 alors qu'elle avait eu sa séance le lendemain (cf. P-C30'017s.). La surfacturation alléguée s'élève à CHF 51.36.

Cas n° 21 (AP______)

c.o. Sur une prescription de physiothérapie du Dr AQ______ datée du 6 septembre 2021, la date du mois d'établissement semble avoir été modifiée (cf. P-A322). Selon un courriel du précité à B______, cette ordonnance daterait en réalité du 6 juillet 2021, sans qu'il indique si cette modification avait été autorisée par son secrétariat ou lui-même (cf. P-A323). Dans les notes J______ de D______ SA est inscrit : "7311 + 7350 selon app avec le secrétariat le 15.10.2021 ok avec la secrétaire pour changer la date K______ [monogramme]" (cf. P-C773). Selon un courriel du 10 décembre 2021 de D______ SA adressé au Dr AQ______, le secrétariat du centre avait contacté son cabinet le 15 octobre 2021 en vue de faire modifier la date de la prescription en lien avec le délai d'utilisation minimum de cinq semaines, ce qui avait été validé (cf. P-C774). La facture de D______ SA relative à l'ordonnance litigieuse, dont le montant n'est pas connu, n'a pas été réglée.

d.a. Entendue par la police, le MP, le TP et la Chambre de céans, A______ a déclaré que le processus administratif au sein de D______ SA se déroulait comme suit au cours de la période pénale. Les patients étaient accueillis à la réception par l'une des secrétaires. Celle-ci réalisait les démarches nécessaires à la préparation administrative du dossier du patient, et notamment la numérisation des ordonnances médicales (ou "bons de physiothérapie"). Le dossier était ensuite repris par un physiothérapeute qui examinait l'ordonnance et déterminait, sur cette base, les soins à réaliser. La précision du cadre posé par l'ordonnance était largement tributaire du médecin prescripteur et il était parfois nécessaire d'éclaircir certains points avec celui-ci, tâche revenant aux secrétaires. Parfois le médecin se contentait par exemple de prévoir un bon avec le nom du patient et le traitement prescrit, laissant à D______ SA le soin de remplir ce qui manquait. De même, les secrétaires se chargeaient de contacter le cabinet médical ayant délivré un bon si un physiothérapeute considérait qu'il ne couvrait pas les traitements devant être prodigués. Les petites modifications, comme une croix manquante dans une case, se discutaient en principe entre le secrétariat de D______ SA et celui du médecin, en ce sens que le second validait oralement une requête de modification du premier. Lorsqu'une prise en charge complètement différente de celle prescrite était demandée, un physiothérapeute discutait cependant directement avec le médecin. Il n'arrivait que très rarement que ce fût un médecin qui valide personnellement une modification d'ordonnance car ceux-ci n'aimaient pas être dérangés juste parce qu'il manquait le mot "piscine" sur un bon de physiothérapie. Le secrétariat d'un cabinet médical n'allait pas non plus déranger un médecin pour un changement de date. Lesdits secrétariats n'appréciaient d'ailleurs pas non plus devoir émettre une nouvelle ordonnance, préférant autoriser une modification de l'ordonnance originale. Une fois une prestation de soins réalisée par D______ SA, ses secrétaires préparaient la facture. Cette étape nécessitait de réintroduire manuellement les dates des rendez-vous à facturer, car une importation depuis le calendrier professionnel du centre n'était pas possible. Les factures étaient enfin visées par elle-même une fois par semaine, puis transmises électroniquement à la caisse des médecins. Lors de cette validation, elle avait accès à l'ordonnance numérisée et aux éventuelles notes du secrétariat liées au dossier, mais n'effectuait qu'un contrôle rapide dans la mesure où elle faisait confiance à ses secrétaires. Toute la procédure administrative était réalisée par le biais du logiciel J______ de la caisse des médecins.

Elle n'avait jamais demandé à son personnel de modifier une ordonnance sans l'accord d'un médecin ou de son secrétariat. De plus, à sa connaissance, aucun de ses physiothérapeutes ou membres du secrétariat n'avait procédé à une modification de son propre chef, même si elle ne pouvait exclure une erreur. Il était en revanche arrivé que des patients fussent soupçonnés d'avoir modifié la date d'un bon de physiothérapie, le délai pour utiliser celui-ci après délivrance étant en principe de cinq semaines. En outre, lorsque le tampon d'un médecin n'était pas suffisamment lisible, il arrivait que la prise en charge d'une facture fût refusée ; elle avait donc demandé aux secrétaires de repasser au stylo sur un tel tampon afin de rendre visible le nom du prescripteur.

L'accès à la piscine de D______ SA était distinct de celui de la réception, de sorte que c'était le personnel du fitness AR______, où se trouvait le bassin, qui vérifiait l'utilisation de la carte en notant la date et l'heure d'entrée sur celle-ci. Si une carte d'accès n'était pas utilisée en entier, il revenait au patient de la rendre.

D______ SA émettait en moyenne environ 200 à 400 factures mensuellement. Dès 2018, le centre avait connu des difficultés avec [les assurances] B______ et C______ qui avaient suspendu leurs remboursements, ce qui avait conduit à des impayés dépassant CHF 100'000.-. Elle avait formé ses secrétaires à ne rien lâcher lors des demandes de remboursement aux assurances, contrairement à certains confrères. Dans le cas de B______, il était même arrivé aux membres du centre de conseiller à leurs patients de changer d'assurance. D______ SA n'avait pas facturé de prestations qui n'avaient pas été réalisées. Elle n'avait en particulier jamais demandé à son personnel d'entrer des dates aléatoires dans le dossier des patients.

d.b. Selon AS______, secrétaire réceptionniste à D______ SA, c'était A______ qui s'occupait de la facturation du centre. Le personnel de la réception recevait de la part du patient son bon de physiothérapie, le tamponnait et signait, puis le joignait à la facture ouverte dans le dossier informatique avec la fiche d'information relative à chaque patient. Le nombre de séances prévues était entré manuellement, tout comme un arrêt du traitement avant la fin de celles-ci. En cas d'annulation, un rendez-vous était comptabilisé uniquement si celle-ci n'avait pas eu lieu plus de 24 heures à l'avance. Le contenu des soins était déterminé par le thérapeute en charge du patient après un premier rendez-vous qui avait pour fonction de faire un bilan. Les positions destinées à la facturation étaient ensuite communiquées par ledit thérapeute à la réception qui les inscrivait dans le dossier, tout comme les dates de traitement. Elle n'avait pas connaissance d'inscription réalisée par A______ ou un autre thérapeute. Les factures étaient établies par cette dernière sur la base du dossier et de l'agenda des physiothérapeutes. C'était également elle qui mettait informatiquement les factures à disposition des assurances, en principe lorsque les séances étaient terminées et après qu'elle en avait vérifié les données.

Les membres du secrétariat ne procédaient pas à des modifications de prescription sans accord des médecins ou de leur secrétariat. En cas d'accord, soit le cabinet médical transmettait une nouvelle ordonnance par fax, soit, normalement, le secrétariat de D______ SA ajoutait une mention ou une croix sur le bon de physiothérapie. Il arrivait aussi que le secrétariat du centre remplît le nom et prénom du patient lorsque ceux-ci ne figuraient pas sur le bon. Le secrétariat ne procédait pas à des modifications de date. Il arrivait en revanche relativement fréquemment qu'un patient suivît deux séances le même jour dans le cas où il disposait de plusieurs prescriptions liées à des pathologies différentes.

d.c. D'après AT______, secrétaire au sein de D______ SA, les secrétaires entraient dans le programme informatique du centre, à savoir J______, les dates fixées avec les patients et les positions tarifaires. Une fois la dernière séance réalisée, A______ s'occupait de mettre informatiquement à disposition les factures. Cette dernière avait accès aux positions tarifaires, tout comme sa sœur, AU______, chargée du contentieux, mais pas les physiothérapeutes. Les dates des séances fixées dans l'agenda ne se retrouvaient pas automatiquement sur la facture mais devaient faire l'objet d'une insertion spécifique, distincte de celle du dossier et de l'agenda du centre.

Elle avait déjà modifié une ordonnance en rajoutant "2 traitements par jour" ou en modifiant une date, mais toujours en accord avec le médecin prescripteur ou son secrétariat. À de rares reprises, elle avait ajouté le terme "piscine" sur une ordonnance car le physiothérapeute jugeait nécessaire que le patient fût suivi en piscine. Elle n'avait jamais eu vent de falsification d'ordonnances pour rajouter des séances.

d.d. Selon AV______, secrétaire à D______ SA, le secrétariat était compétent pour préparer la facturation en remplissant le dossier des patients sur la base des informations fournies par celui-ci, notamment via sa carte d'assuré, et de l'ordonnance du médecin. Si un problème était détecté à ce stade, le patient était renvoyé vers celui-ci, sauf si un rendez-vous avait déjà été agendé au préalable, auquel cas D______ SA réalisait la séance fixée. Lorsqu'un ou plusieurs rendez-vous prévus étaient annulés, il fallait modifier manuellement et séparément à la fois l'agenda du centre et le dossier du patient. Les factures étaient validées par A______ qui les envoyaient ensuite électroniquement aux assurances. AV______ ne pensait pas qu'un contrôle de toutes les factures fût possible vu leur nombre. Les membres du secrétariat ne procédaient pas à un nouveau contrôle avant envoi. Le processus informatique était réalisé par le biais d'un site de la caisse des médecins appelé J______.

Jusqu'à environ fin 2017, le secrétariat s'était contenté d'un accord oral pour modifier une ordonnance. Depuis lors, il demandait aux cabinets médicaux un duplicata amendé écrit. Toute modification d'une ordonnance était validée par le médecin prescripteur, par exemple s'agissant d'une modification de date. Elle n'avait pas souvenir d'un médecin ayant refusé une modification demandée. Elle n'avait pas connaissance qu'une ordonnance eût été amendée intentionnellement sans l'accord du médecin ou de son secrétariat. Elle n'avait pas non plus connaissance que des séances qui n'avaient pas effectivement été réalisées eussent été facturées. En revanche, il arrivait qu'un patient suive plusieurs séances le même jour en présence de pathologies différentes, si le médecin avait donné son accord.

d.e. AW______, secrétaire réceptionniste au sein de D______ SA, a expliqué que le secrétariat était chargé de créer les dossiers des patients, y compris une copie numérisée de son bon de physiothérapie, et de les compléter avec les dates et les codes des traitements au fur à mesure des séances. Une inscription de l'ensemble des séances au début d'un traitement était aussi possible selon les souhaits du patient. A______ vérifiait ensuite les informations et mettait la facture y relative à disposition des assurances.

Il lui était arrivé de compléter des prescriptions, notamment pour rajouter un complément piscine, mais toujours avec l'accord téléphonique du médecin ou de son secrétariat. Ces prises de contact étaient fréquentes, du fait du caractère incomplet des bons de certains médecins. Concernant les rajouts d'un traitement en piscine et de la possibilité d'un double traitement journalier, le cabinet médical était systématiquement contacté. Pour un complément de date, il arrivait en revanche au secrétariat de se fonder sur les indications du patient quant à la date de sa consultation. Il ne lui avait jamais été demandé de modifier des dates de séances afin que des prestations de D______ SA soient remboursées. De même, elle n'avait jamais eu connaissance de la confection de fausses prescriptions par le centre.

d.f. Selon AX______, secrétaire à D______ SA jusqu'au 30 septembre 2018 suite à un licenciement, le secrétariat entrait dans J______ la date des séances en parallèle de leur inscription dans l'agenda commun, ainsi que les positions tarifaires, sur indication des physiothérapeutes, même si A______ était principalement responsable de la saisie de ces dernières. C'était également elle qui mettait la facture du centre à disposition de la caisse des médecins une fois la dernière date de traitement passée.

Sur indication de A______, il lui était arrivé, à la demande des physiothérapeutes, d'ajouter le terme "piscine" sur une ordonnance. En effet, même si le principe était d'obtenir une nouvelle ordonnance du médecin pour modifier une prescription, la plupart du temps, ni celui-ci ni son secrétariat n'étaient atteignables ou ne prenaient l'initiative d'amender un bon. À la demande de la précitée, il lui était également arrivé une ou deux fois de modifier une date sur des bons de physiothérapie lorsqu'un médecin ne pouvait être joint, même si en principe elle essayait d'obtenir un nouveau bon. Il pouvait en outre arriver que deux séances, respectivement une séance et demi de physiothérapie fussent décomptées d'un bon et effectivement remplacées par une séance d'ostéopathie ou d'acupuncture ; une date de séance fictive était alors introduite dans le dossier du patient pour compenser. Il était en revanche fréquent que des patients réalisent deux séances de physiothérapie le même jour lorsqu'ils disposaient de plusieurs ordonnances pour des pathologies distinctes. Tout avait été fait pour rendre service aux patients et à la demande de A______ dans but d'avoir un maximum de rendez-vous. Elle n'avait en revanche pas eu connaissance de la confection de fausses ordonnances.

d.g. AU______, chargée du contentieux au sein de D______ SA depuis mai 2017, a précisé que sa sœur envoyait les factures du centre aux assureurs. Elle lui avait conseillé de contrôler chaque facture avant envoi mais savait que tel n'était pas le cas au vu de la quantité à traiter. À son arrivée, les cas de retour de factures de la part des assureurs étaient très nombreux, la situation s'étant ensuite améliorée. Les refus de prise en charge étaient notamment liés à des tampons médicaux illisibles ou à des dates de soins mentionnées à double, ce qui résultait en particulier de la recopie manuelle des dates, inscrites dans le dossier du patient, en vue de la facturation et de la pratique du secrétariat consistant à inscrire initialement neuf séances pour un patient et à oublier ensuite de noter leur annulation, en tout ou en partie, avant facturation. Les assurances demandaient également des précisions lorsque plusieurs bons de physiothérapie étaient datés du même jour. Il était également arrivé qu'une séance annulée moins de 24 heures avant un rendez-vous fût, par erreur, facturée à une assurance. Il y avait également eu des problèmes liés à la pratique de D______ SA, désormais largement abandonnée, de consentir à débuter un traitement en l'absence de production immédiate d'un bon de physiothérapie, confiance étant faite au patient pour qu'il remît ultérieurement son ordonnance au centre, ce qui n'était pas toujours fait et déclenchait un refus de prester des assurances.

La modification d'ordonnance suivait le principe du consentement du médecin, à tout le moins oral. Il était en revanche arrivé que les secrétaires ou elle-même repassent manuellement sur une date ou un tampon d'un médecin pour le rendre plus lisible. Il arrivait également que des patients le fissent directement. De manière générale, des erreurs avaient pu être commises dans la facturation mais aucun faux intentionnel n'avait été réalisé à D______ SA.

d.h. Entendue par le MP, AY______, responsable régionale de la Caisse des médecins, a mentionné qu'elle avait connaissance de problèmes de gestion au sein de D______ SA, lesquels résultaient notamment de facturations alors que le nombre de séances prévues sur un bon de physiothérapie n'avait pas encore été épuisé. Ce n'était pas la seule fois qu'elle avait rencontré ce genre de problématique mais ce n'était pas un problème récurrent.

e. Dans le cadre de la présente procédure, A______ a été arrêtée le 13 novembre 2018 à 8h45 et libérée le lendemain à 17h10. Dès lors et jusqu'au 12 août 2019, elle a été soumise à des mesures de substitution aux termes desquelles elle devait en particulier cesser son activité en lien avec D______ SA et avait interdiction de se rendre dans ses locaux, de contacter ses employés et son associé, d'évoquer la procédure avec sa sœur et d'exercer une quelconque activité lucrative en lien avec des prestations de santé.

C. a. La Chambre d'appel et de révision (CPAR) a tenu audience le 16 novembre 2023, audience au cours de laquelle A______ a été entendue. Ses déclarations dans ce cadre ont, en substance, été rapportées ci-avant.

b. Par la voix de son conseil, A______ avance en premier lieu que le raisonnement du TP est juridiquement erroné. En effet, les modifications des bons de physiothérapies délivrés par les médecins qui, selon l'accusation, auraient été réalisées sans leur accord, ne pouvaient être de son fait. En effet, elle était uniquement chargée de valider les factures liées aux prestations de D______ SA avant leur envoi aux assurances et il n'existait pas d'élément laissant penser que, dans ce cadre, elle savait que des bons avaient été modifiés ou qu'elle eût ordonné de telles modifications. Les modifications en cause pouvaient d'ailleurs être le fait de demandes issues d'autres physiothérapeutes ou d'erreurs de ses assistantes, ou encore avoir été réalisées directement par les patients. Il était de surcroît possible que certains des médecins ayant affirmé qu'ils n'avaient pas modifié les bons concernés se trompassent, en particulier lorsqu'ils étaient contredits par les notes J______. À ce titre, il était frappant qu'aucune confrontation entre ces médecins et/ou leur secrétariat et la prévenue n'eût été tenue et qu'aucune investigation visant à vérifier la crédibilité de leurs affirmations n'eût été entreprise. Il fallait enfin tenir compte du peu de factures concernées sur le total traité par D______ SA. Eu égard, en second lieu, aux infractions d'escroquerie et de violation de l'art. 92 let. b de la loi fédérale sur l'assurance-maladie (LAMal) qui n'étaient pas liées à une accusation de faux dans les titres, elles n'étaient pas convaincantes en fait ou en droit, notamment faute de dommage et s'agissant d'erreurs involontaires.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (ATF 148 IV 409 consid. 2.2 ; 145 IV 154 consid. 1.1 ; 127 I 38 consid. 2a).

Le principe de la libre-appréciation des preuves implique qu'il revient au juge de décider ce qui doit être retenu comme résultat de l'administration des preuves en se fondant sur l'aptitude de celles-ci à prouver un fait au vu de principes scientifiques, du rapprochement des divers éléments de preuve ou indices disponibles à la procédure, et sa propre expérience (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1295/2021 du 16 juin 2022 consid. 1.2) ; lorsque les éléments de preuve sont contradictoires, le tribunal ne se fonde pas automatiquement sur celui qui est le plus favorable au prévenu (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1295/2021 du 16 juin 2022 consid. 1.2 ; 6B_477/2021 du 14 février 2022 consid. 3.1 ; 6B_1363/2019 du 19 novembre 2020 consid. 1.2.3). Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe de la présomption d'innocence interdit cependant au juge de se déclarer convaincu d'un fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve recueillis laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence d'un tel fait ; des doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent en revanche pas à exclure une condamnation (ATF 148 IV 409 consid. 2.2 ; 145 IV 154 consid. 1.1 ; 144 IV 345 consid. 2.2.3.2 et 2.2.3.3). Lorsque dans le cadre du complexe de faits établi suite à l'appréciation des preuves faite par le juge, il existe plusieurs hypothèses également probables, le juge pénal doit choisir la plus favorable au prévenu (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_477/2021 du 14 février 2022 consid. 3.2).

3. 3.1.1. Selon l'art. 251 ch. 1 CP, se rend coupable de faux dans les titres quiconque, dans le dessein de se procurer un avantage illicite, crée ou fait usage d'un titre faux pour tromper autrui.

L'art. 251 CP vise la confection ou l'utilisation tant d'un faux matériel, lorsque l'auteur réel d'un document ne correspond pas à l'auteur apparent, que d'un faux intellectuel, qui consiste dans la constatation d'un fait inexact, en ce sens que la déclaration contenue dans le titre ne correspond pas à la réalité (ATF 146 IV 258 consid. 1.1 ; 142 IV 119 consid. 2.1 ; 138 IV 130 consid. 2.1 ; 132 IV 57 consid. 5.1). Le document faux doit constituer un titre au sens de l'art. 110 ch. 4 CP, à savoir un écrit, signe ou enregistrement destiné et propre à prouver un fait ayant une portée juridique, ce qui peut résulter de la loi ou des usages commerciaux (ATF 142 IV 119 consid. 2.2 ; 132 IV 57 consid. 5.1 ; 123 IV 61 consid. 5a). Le caractère de titre d'une chose doit être analysé séparément pour ses différents aspects (ATF 146 IV 258 consid. 1.1 ; 142 IV 119 consid. 2.2).

En cas de représentation cachée, soit lorsqu'un titre est signé ou modifié par une personne autre que son auteur apparent mais avec l'accord de celui-ci, il n'existe un faux matériel que lorsque les personnes directement concernées par un titre peuvent objectivement attendre que son rédacteur ou signataire corresponde à son auteur apparent, ce qui est en principe le cas lorsque la loi prévoit la forme olographe (ATF 128 IV 265 consid. 1.1.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1161/2021 du 21 avril 2023 consid. 7.2.3.2 ; 6S.276/2004 du 16 février 2005 consid. 3.3).

Comme la confiance que l'on peut avoir à ne pas être trompé sur la personne de l'auteur est plus grande que celle que l'on peut avoir à ce que l'auteur ne mente pas par écrit, le seul fait qu'un document soit un titre ne suffit pour que le mensonge soit punissable comme faux intellectuel ; il est nécessaire que ce titre ait une capacité accrue de convaincre soit en raison de la nature du titre lui-même qui présente certaines garanties objectives de véracité, notamment en raison d'un devoir légal de vérification de l'auteur (1), soit en raison de la relation de confiance particulière existant entre l'auteur d'un titre et la personne induite en erreur par celui-ci (2) ; le simple fait que l'on se fie usuellement à un type de titre dans la pratique ne suffit pas (ATF 146 IV 258 consid. 1.1 et 1.1.2 ; 144 IV 13 consid. 2.2.2 et 2.2.3 ; 121 IV 131 consid. 2c). Un médecin se trouve dans une telle position de confiance envers les caisses-maladies s'agissant de ses prestations couvertes par celles-ci lorsqu'il en demande le remboursement (ATF 146 IV 258 consid. 1.1.2 ; 103 IV 178 consid. IV ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_807/2021 du 7 juin 2022 consid. 3.1.3 ; 6B_1096/2015 du 9 décembre 2015 consid. 3.3.2) ; il n'est en effet en principe pas possible à une telle assurance de contrôler chaque position tarifaire alléguée au vu de l'ampleur des demandes de remboursement qu'elle se doit de traiter (ATF 103 IV 178 consid. IV ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_589/2009 du 14 septembre 2009 consid. 3.2.4). Ce raisonnement doit valoir mutatis mutandis pour tous les fournisseurs de prestation couverts par l'art. 35 al. 2 LAMal, et notamment les physiothérapeutes qui prodiguent des soins sur prescription ou sur mandat médical (cf. art. 35 al. 2 let. e LAMal). De manière générale, une facture constitue, par exception, un titre avec une force probante accrue si elle est destinée à la comptabilité commerciale de son destinataire (ATF 146 IV 258 consid. 1.1.1 ; 138 IV 130 consid. 2.4.3).

Sur le plan subjectif, le faux dans les titres est une infraction intentionnelle. L'intention doit porter sur tous les éléments constitutifs ; le dol éventuel suffit (ATF 141 IV 369 consid. 7.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_261/2020, 6B_270/2020 du 10 juin 2020 consid. 4.2 ; 6B_891/2018 du 31 octobre 2018 consid. 3.5.1). Ainsi, l'auteur doit être conscient que le contenu du titre concerné ne correspond pas à la vérité et avoir voulu utiliser le titre en le faisant passer pour véridique, ce qui présuppose l'intention de tromper autrui (ATF 141 IV 369 consid. 7.4 ; 138 IV 130 consid. 3.2.4 ; 135 IV 12 consid. 2.2). L'art. 251 CP exige de surcroît un dessein spécial, qui peut se présenter sous deux formes, soit le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui ou le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite (ATF 138 IV 130 consid. 3.2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_223/2012 du 14 décembre 2012 consid. 2.4).

3.1.2. L'auteur direct est celui qui réalise lui-même l'ensemble des éléments constitutifs d'une infraction tandis que l'auteur médiat se sert pour ce faire d'une autre personne sans intention coupable qu'il contrôle comme un instrument
(ATF 149 IV 57 consid. 3.2.1 ; 120 IV 17 consid. 2d). Pour qu'il existe une coactivité, il est nécessaire que le coauteur joue intentionnellement (1) un rôle déterminant (2) dans la réalisation d'une infraction ; il n'est pas nécessaire que son rôle soit prémédité, le coauteur pouvant s'associer à une infraction en cours de réalisation (ATF 149 IV 57 consid. 3.2.2 ; 148 IV 188 consid. 3.6 ; 143 IV 361 consid. 4.10).

3.2.1. En l'espèce, il ressort des pièces produites à la procédure, ainsi que de l'ensemble des témoignages que des ordonnances médicales ont été modifiées par les membres du secrétariat de D______ SA, la question de savoir si ces modifications étaient illicites étant en revanche litigieuse.

De telles ordonnances ont incontestablement le statut de titre et peuvent donc être l'objet d'un faux matériel, notamment lorsqu'elles sont fournies en annexe à une facture renvoyée à une assurance afin de prouver le caractère remboursable d'une prestation. Il ressort en outre de l'art. 51 de l'Ordonnance sur les médicaments (OMéd) a contrario que la signature d'une telle ordonnance doit être réalisée par son auteur apparent. Les autres informations contenues sur celle-ci, soit notamment sa date de rédaction, ainsi que le nom de la préparation ou du principe actif, son dosage et ses prescriptions d'utilisation (cf. art. 51 al. 1 OMéd) peuvent en revanche être rédigées par un tiers, et notamment par un secrétariat, pourvu que cela ne se fasse pas à l'insu de l'auteur apparent, à savoir le médecin prescripteur. Si cette disposition ne trouve pas directement application aux ordonnances autorisant la réalisation d'une prestation médicale sujette à remboursement, au sens de l'art. 25 al. 2 let. a ch. 3 LAMal et de l'art. 5 de l'Ordonnance sur les prestations de l'assurance des soins en lien avec l'art. 33 LAMal, il n'existe pas de motif de prévoir des exigences plus strictes s'agissant d'un bon de physiothérapie dont la dangerosité intrinsèque est par nature inférieure aux ordonnances permettant la délivrance de médicaments ou de stupéfiants. En conséquence, lorsque la date ou le contenu d'une ordonnance pour des séances de physiothérapie est modifié avec le consentement oral du médecin prescripteur, le document amendé ne constitue pas un faux matériel. Il en va de même d'une modification autorisée par le secrétariat de ce médecin, pour autant qu'il s'agisse d'une modification mineure pouvant, dans la pratique usuelle entre physiothérapeutes et médecins, être validée par ledit secrétariat, comme une modification de date ou le rajout d'une mention "deux traitements par jour" sans que le nombre total de traitements soit modifié et que le physiothérapeute n'ait pas eu connaissance d'une pratique contraire d'un médecin particulier. Seules les modifications de bons de physiothérapie par le secrétariat de D______ SA sortant de ce cadre peuvent donc constituer des faux matériels.

Le seul élément de preuve tendant à indiquer que l'appelante aurait ordonné, ou à tout le moins validé expressément ou par actes concluants, la modification d'ordonnances sans l'accord du médecin prescripteur ou de son cabinet par les membres du secrétariat de D______ SA est le témoignage de AX______. Celle-ci a en substance affirmé qu'il lui était arrivé, avec l'accord ou à la demande de la prévenue ou d'un autre physiothérapeute, de modifier une date sur une prescription ou d'y rajouter la mention "piscine". Le fait que la précitée ait été licenciée par l'appelante et qu'elle puisse donc avoir un intérêt à lui nuire, ne suffit pas pour écarter la force probante de ses déclarations. En revanche, le fait qu'elle n'ait jamais été confrontée à l'appelante et aux autres secrétaires est problématique, alors même que, lors de son audition le 29 mai 2019, la prévenue a affirmé que les déclarations de la témoin étaient fausses et qu'elle s'était rétractée. Si, comme l'a souligné le MP à cette occasion, il existait une certaine discrépance entre le témoignage de AX______ et celui des secrétaires encore en emploi auprès de D______ SA, cela justifiait d'autant plus l'organisation de confrontations. En leur absence, on ne saurait écarter les témoignages concordants de AS______, AV______, AT______ et AW______, dont aucune n'a affirmé que l'appelante avait autorisé, et encore moins demandé, la modification de prescriptions médicales sans le consentement d'un médecin ou de son secrétariat, même si AT______ a mentionné avoir, à de rares reprises, rajouté la mention "piscine" à la demande de physiothérapeutes. La témoin AU______ a également affirmé que les modifications d'ordonnance sans validation médicale ne correspondaient pas à la pratique de D______ SA.

Au vu de ce qui précède, la Chambre de céans n'a pas acquis l'intime conviction que l'appelante avait connaissance du caractère de potentiel faux matériel de certaines ordonnances annexées à ses factures envoyées aux assurances. En conséquence, l'élément d'intentionnalité fait défaut en matière d'usage de faux éventuels. Il en va de même de sa qualité de coauteure ou d'auteure médiate quant à la confection de faux puisque ces modes de participation requièrent la volonté que les éléments constitutifs objectifs de l'infraction soient réalisés.

Il s'ensuit que les conditions d'une infraction de faux matériel dans les titres ne sont pas remplies eu égard aux modifications éventuelles de prescriptions médicales sans le consentement du cabinet du médecin prescripteur.

3.2.2. En ce qui concerne les factures relatives à des prestations dont la réalité est contestée, soit les cas AK______, AM______, AN______ et AO______, celles-ci sont susceptibles de constituer des faux intellectuels, étant donné le rapport de confiance existant entre un prestataire de soins et un assureur LAMal.

La plupart des irrégularités dans ces quatre cas proviennent de la gestion de l'accès à la piscine par D______ SA. En effet, les séances en bassin s'effectuaient dans le fitness AR______, dont les locaux étaient distincts de ceux du centre, et une carte d'accès direct pour un nombre déterminé de séances était remise aux patients. Si un contrôle d'accès pour éviter un usage non-autorisé était effectué par le personnel du fitness, rien n'était en revanche prévu pour détecter les éventuelles sous-utilisations des séances en piscine ou les changements de dates impromptus par les patients, si ce n'était de compter sur le fait qu'ils remettraient le cas échéant leur carte d'accès inutilisée au centre. Il s'agit là d'une négligence de la part de l'appelante qui devait s'assurer que des séances piscines planifiées mais non effectivement réalisées ne fussent pas facturées aux assurances LAMal, par exemple en ordonnant aux physiothérapeutes en charge des séances en bassin de prendre note d'éventuelles absences en comparaison avec les dates des séances prévues dans le dossier de chaque patient. Au vu des faibles montants en jeu et du nombre réduit de cas finalement recensés, on ne peut en revanche conclure qu'il s'agissait là d'une pratique intentionnellement organisée au sein de D______ SA en vue de s'enrichir ou de nuire aux intérêts pécuniaires des assurances. Une telle pratique aurait d'ailleurs nécessité le consentement préalable, à tout le moins tacite, des clients concernés, alors que l'inverse ressort des écrits des patientes AK______, AM______, AN______ et AO______ à AL______. Or, l'infraction de faux dans les titres est une infraction intentionnelle qui exige de surcroît un dessein spécial.

En ce qui concerne les quelques séances de physiothérapie n'ayant pas eu lieu, ou pas aux dates mentionnées sur les factures de D______ SA, elles ne suffisent pas non plus pour retenir la création intentionnelle de faux intellectuels dans les titres, étant donné que le centre émettait 200 à 400 factures par mois et que la période pénale porte sur environ 68 mois, soit un total approximatif de 13'600 à 27'200 factures. À cet égard, la Chambre de céans déplore que le nombre total de factures contrôlées par les assurances-maladies par rapport à celui de l'ensemble des factures qui leur a été adressé par D______ SA ne ressorte pas de l'instruction, ni qu'aucune comparaison avec d'autres centres de physiothérapie comparables en Suisse n'ait été effectuée. Ces informations semblaient pourtant appropriées pour distinguer de simples erreurs involontaires d'un système intentionnel de surfacturation. Une telle analyse est d'ailleurs fréquemment pratiquée en matière de répression de la polypragmasie (cf. par exemple pour des cas traités à Genève par Tribunal arbitral des assurances : ATF 136 V 415 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_322/2018 du 20 février 2019 consid. 4.2 ; 9C_121/2012 du 22 août 2012 consid. 3.2.2).

Au vu de ce qui précède, l'élément d'intentionnalité fait défaut s'agissant des infractions de faux intellectuel reprochées à l'appelante.

3.2.3. En conclusion, aucune infraction de faux matériel ni intellectuel ne peut être reprochée à l'appelante, qui doit être acquittée des accusations en ce sens portées à son encontre. Le jugement entrepris sera réformé sur ce point.

4. 4.1.1. Selon l'art. 146 CP, se rend coupable d'escroquerie quiconque, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, induit astucieusement en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou la conforte astucieusement dans son erreur et détermine de la sorte la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.

Sur le plan objectif, l'infraction d'escroquerie suppose ainsi que l'auteur ait eu un comportement astucieusement trompeur (1), qu'une personne (la dupe) ait, de ce fait, été induite en erreur ou confortée dans une erreur préexistante (2) et enfin que cette erreur ait eu pour conséquence que la dupe elle-même ou un tiers ait subi un préjudice patrimonial (3) (en ce sens : ATF 128 IV 255 consid. 2e/aa ; 119 IV 210 consid. 3 ; 118 IV 35 consid. 2). S'agissant, en premier lieu, du comportement trompeur, il est constitué par un comportement qui vise à donner à autrui une perception incorrecte d'un fait qu'il est possible d'établir avec une certitude suffisante (ATF 147 IV 73 consid. 3.1 ; 143 IV 302 consid. 1.2 ; 140 IV 11 consid. 2.3.2 ; 135 IV 76 consid. 5.1). Comme mentionné par la lettre de l'art. 146 CP, ce comportement trompeur peut se présenter sous la forme d'affirmations fallacieuses, de dissimulation de faits vrais ou encore de l'exploitation d'une erreur préexistante de la dupe. Pour qu'il y ait escroquerie, une simple tromperie ne suffit toutefois pas, il faut qu'elle soit astucieuse. Une fausse déclaration de sinistre à une assurance privée constitue en principe une tromperie astucieuse (ATF 143 IV 302 consid. 1.3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_725/2017 du 4 avril 2018 consid. 2.3.2). En deuxième lieu, la tromperie astucieuse doit être la cause d'une erreur chez la dupe en ce sens que celle-ci doit être partie du principe que l'état de fait présenté par l'auteur était correct
(ATF 118 IV 35 consid. 2c ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_219/2021 du 19 avril 2023 consid. 4.2 ; 6B_570/2018 du 20 septembre 2018 consid. 3.1). En troisième et dernier lieu, l'erreur dans laquelle la tromperie astucieuse a placé ou conforté la dupe doit avoir déterminé celle-ci à accomplir un acte préjudiciable à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers (ATF 147 IV 73 consid. 6.1 ; 133 IV 171 consid. 4.3 ; 128 IV 255 consid. 2e/aa).

Sur le plan subjectif, l'escroquerie est une infraction intentionnelle, l'intention devant porter sur tous les éléments constitutifs objectifs de l'infraction (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1185/2022 du 30 juin 2023 consid. 3.1.4 ; 6B_697/2022 du 21 juin 2023 consid. 2.1.5). L'auteur doit en outre avoir agi dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, correspondant au dommage de la dupe (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1185/2022 du 30 juin 2023 consid. 3.1.4 ; 6B_697/2022 du 21 juin 2023 consid. 2.1.5 ; 6B_372/2022 du 1er mars 2023 consid. 1.2.2).

4.1.2. Selon l'art. 92 al. 1 let. b LAMal, quiconque obtient pour lui-même ou pour autrui, sur la base de la présente loi, une prestation qui ne lui revient pas, par des indications fausses ou incomplètes ou de toute autre manière est punissable, si son comportement n'est pas constitutif d'une infraction plus grave prévue par le CP.

Cette infraction correspond à celle d'escroquerie tout en ne requérant pas que l'auteur ait réalisé une tromperie astucieuse (S. DE VITO BIERI/M. DANNACHER, Basler Kommentar KVG/KVAG, 2020, n. 9 ad art. 92 LAMal ; G. EUGSTER, RBS KVG, 2ème éd. 2018, n. 1 ad art. 92 LAMal). Elle couvre les fournisseurs de soins (S. DE VITO BIERI/M. DANNACHER, Basler Kommentar KVG/KVAG, 2020, n. 9 ad art. 92 LAMal ; G. EUGSTER, RBS KVG, 2ème éd. 2018, n. 1 ad art. 92 LAMal). Il s'agit d'une infraction intentionnelle ; le dol éventuel suffit (ATAS/688/2018 du 16 août 2018 consid. 6c ; S. DE VITO BIERI/M. DANNACHER, Basler Kommentar KVG/KVAG, 2020, n. 9 ad art. 92 LAMal).

4.1.3. Selon l'art. 148a al. 1 CP, est punissable quiconque, par des déclarations fausses ou incomplètes, en passant des faits sous silence ou de toute autre façon, induit une personne en erreur ou la conforte dans son erreur, et obtient de la sorte pour lui-même ou pour un tiers des prestations indues d'une assurance sociale ou de l'aide sociale. Il s'agit également d'une infraction subsidiaire de l'escroquerie ne nécessitant pas une tromperie astucieuse (ATF 149 IV 273 consid. 1.5.8 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_161/2022 du 15 février 2023 consid. 2.2).

4.1.4. Lorsqu'elles sont d'importance mineure au sens de l'art. 172ter CP, les atteintes à la propriété constituent une simple contravention. Une infraction au patrimoine est d'importance mineure lorsque la valeur concernée ne dépasse pas CHF 300.- (ATF 149 IV 273 consid. 1.5.1 ; 142 IV 129 consid. 3.1 ; 123 IV 113 consid. 3d). À cet égard, seul l'état subjectif de l'auteur est déterminant, en ce sens qu'il doit avoir intentionnellement visé un élément patrimonial d'une valeur maximale de CHF 300.- (ATF 123 IV 155 consid. 1a ; 122 IV 156 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_68/2022 du 23 janvier 2023 consid. 2.2).

4.2.1. D'emblée, il faut constater que le dommage allégué de l'assurance dans les cas AM______, AN______ et AO______ est inférieur à CHF 300.-. Dans le cas AP______ le montant du préjudice est inconnu, de sorte qu'il convient de retenir l'hypothèse la plus favorable à l'appelante qui est celle d'un dommage n'atteignant pas ce plancher. Or, il n'est pas possible de faire fi de l'existence de plusieurs complexes de faits, respectivement d'un concours réel, uniquement parce qu'un chef d'accusation concerne juridiquement une même infraction. Excepté en présence d'une infraction par métier (cf. ATF 145 IV 377 consid. 2.3.3), un concours réel ne peut en effet être retenu qu'aux conditions strictes de l'unité naturelle d'action
(ATF 133 IV 256 consid. 4.5.3 ; voir également : ATF 149 IV 240 consid. 3.1). Les éventuelles infractions susmentionnées sont donc à qualifier de contraventions au sens de l'art. 172ter CP en lien avec l'art. 146 CP.

La poursuite de contraventions se périmant par trois ans (cf. art 109 CP) et les faits reprochés relatifs aux cas susmentionnés étant antérieurs au 8 juin 2020, les accusations d'infractions y relatives sont en tout état prescrites.

Il s'ensuit que la procédure sera classée s'agissant des chefs d'accusation d'escroquerie d'importance mineure dans les cas AM______, AN______, AO______ et AP______.

4.2.2. Eu égard aux onze autre cas, la Chambre de céans n'est pas convaincue par le raisonnement du TP consistant à écarter la force probante des notes J______ rédigées par les membres du secrétariat de D______ SA au motif qu'elles auraient pu être rédigées a posteriori pour les fins de la cause, alors que rien dans le dossier ne vient soutenir cette hypothèse. Il faut de surcroît souligner que l'appelante a fourni son accès J______ aux autorités de poursuite le jour de son arrestation (cf. PV du 13 novembre 2018, p. 76 [pièce C76]) et que toute activité en lien avec D______ SA lui a ensuite été interdite pendant plusieurs mois. Il n'est ainsi pas possible de lui reprocher la potentielle fausseté de notes internes dont la véracité n'a pas été contrôlée à brève échéance par le MP alors qu'il en avait la possibilité et que les informations contenues dans J______ étaient manifestement essentielles dans une enquête portant sur des soupçons de surfacturation organisée, ce qui est conforme aux déclarations de la grande majorité des secrétaires entendues.

De même, la Chambre de céans ne peut suivre l'argumentation du premier juge lorsqu'il accorde une force probante accrue aux déclarations écrites des médecins en se fondant sur le fait que ceux-ci n'avaient aucun intérêt à ne pas dévoiler la vérité. En effet, le fait qu'ils n'eussent pas désiré mentir ne signifie pas encore qu'ils se rappelassent plusieurs années après les faits ne pas avoir autorisé oralement une modification de date, la réalisation de deux séances par jour ou l'ajout d'un traitement en piscine, avec suffisamment de certitude. Cela vaut d'autant plus qu'il s'agit là de modifications mineures susceptibles d'avoir été déléguées à leurs secrétariats afin d'éviter qu'ils soient trop fréquemment interrompus dans leurs activités quotidiennes, comme cela ressort de l'ensemble des témoignages de la présente cause. S'il est évident qu'une telle pratique comporte des risques non-négligeables de refus de prester par les assurances LAMal, celles-ci étant fondées à s'assurer qu'un traitement a bien été ordonné par un médecin avant de le rembourser, il faut souligner que, dans ce cadre, le fardeau de la preuve pèse sur le prestataire de soins, alors qu'en matière pénale, il pèse sur l'accusation. À cet égard, il est surprenant que celle-ci n'ait procédé à aucune recherche pour déterminer si la pratique de faire valider des modifications mineures de bons de physiothérapie par les cabinets médicaux était plus fréquente chez D______ SA que chez d'autres centres de physiothérapie dépendant de médecins externes et qu'aucun médecin ni aucun secrétariat médical n'ait été interrogé sur cette pratique ou confronté aux notes J______ ou aux secrétaires de D______ SA. Ces manquements de l'instruction réduisent grandement la force probante des réponses écrites des médecins à la procédure. Cela vaut d'autant plus que nombre de celles-ci sont ambigües en ce sens que le praticien affirme ne pas avoir procédé ou validé lui-même à la modification, mais sans se prononcer sur la possibilité que son secrétariat l'eût fait. Seuls les cas Z______ (Dr AA______) et AG______ (Dr AH______) contiennent des précisions sur ce point. Or, même en présence d'informations divergentes, aucune confrontation n'a été ordonnée. Enfin, comme mentionné plus haut, il est impossible de savoir si le nombre de modifications d'ordonnances était en tant que tel disproportionnellement élevé chez D______ SA en comparaison avec des centres de physiothérapie suisses de même genre, alors même que les assurances plaignantes devaient être en mesure de fournir des informations pertinentes à cet égard et qu'une telle analyse est couramment pratiquée en procédure sociale arbitrale (cf. supra consid. 3.2.2 in fine).

Au vu ce qui précède, la Chambre de céans n'est pas intimement convaincue que les modifications mineures d'ordonnances dans les cas H______, L______, O______, S______, U______, W______, Z______, AE______ et AG______ ont été effectuées sans l'autorisation du médecin prescripteur ou de son secrétariat. Au vu des notes J______ affirmant le contraire, cette dernière hypothèse apparaît tout autant plausible. Il s'ensuit qu'un comportement trompeur de l'appelante dans sa facturation, lié à des modifications non-autorisées de bons de physiothérapie, n'est pas établi. Pour le surplus, la seule possibilité, mentionnée par les témoins AW______ et AX______, que des membres du secrétariat aient procédé à des modifications non-autorisées de prescriptions lorsqu'ils ne parvenaient pas à joindre un cabinet médical ne permet pas encore de retenir que l'appelante aurait eu un dessein d'enrichissement illégitime au moment où elle a procédé aux facturations des prestations susmentionnées, de sorte que cet élément constitutif subjectif de l'infraction d'escroquerie fait également défaut. À cet égard, l'affirmation de l'autorité précédente selon laquelle toutes les irrégularités commises dans la facturation lui seraient imputables personnellement parce qu'elle avait formé son personnel à ne rien lâcher et l'avait appelé à remplir le planning est insoutenable.

S'agissant du cas AC______, il appert que la date d'un des bons de physiothérapie a été modifiée afin de respecter le délai de cinq semaines pour en faire usage. Au vu de la note au dossier J______ du 10 mai 2017, selon laquelle une prise en charge avait été refusée à cette date en lien avec un bon trop ancien (une prestation ayant en revanche pris place le 19 mai 2017), l'hypothèse selon laquelle la cliente aurait modifié elle-même l'ordonnance apparaît plus plausible que celle selon laquelle un membre du secrétariat aurait procédé à un tel amendement. Dans un tel cas, la première séance aurait en effet probablement eu lieu le 10 mai, et non seulement le 19 mai 2017. En tout état de cause, on ne saurait reprocher à l'appelante d'avoir consciemment utilisé un faux dans le cadre de sa facturation.

Eu égard enfin au cas AK______, il est établi que des séances de physiothérapie en piscine ont été facturées à tort. Comme susmentionné plus haut, cette surfacturation résulte toutefois d'une négligence dans la gestion des cartes d'accès à la piscine, négligence qui ne peut fonder une escroquerie, celle-ci devant nécessairement être intentionnelle.

Au vu de ce qui précède, aucune infraction d'escroquerie ne peut être reprochée à l'appelante. Elle doit donc être acquittée des accusations en ce sens portées à son encontre, et le jugement entrepris sera réformé sur ce point.

4.3. Eu égard aux infractions aux art. 92 al. 1 let. b LAMal et 148a CP, elles requièrent toutes deux une tromperie intentionnelle sur le modèle de l'infraction d'escroquerie. Les développements du considérant qui précède sont donc applicables mutantis mutandis. Une condamnation de ces chefs doit ainsi également être écartée. Dans ces circonstances, les questions de savoir si l'art. 148a CP trouve application aux fournisseurs de soins et si les cas d'espèce devraient être qualifiés de peu d'importance au sens de l'art. 148a al. 2 CP (cf. ATF 149 IV 273 consid. 1.5.5, 1.5.7 et 1.5.9), ce qui aurait pour conséquence leur prescription, peuvent rester ouvertes.

En conclusion, l'appelante doit être acquittée de l'ensemble des charges portées à son encontre et le jugement du TP réformé en conséquence.

5. S'agissant des conclusions civiles de B______, l'appelante, assistée d'une avocate, n'a pas demandé qu'elles soient rejetées sur le fond en lieu et place de leur irrecevabilité, respectivement de leur renvoi à la procédure civile, auquel a procédé le TP. Sur ce point, son jugement est donc entré en force (ATF 148 IV 89 consid. 4.3 ; 147 IV 167 consid. 1.2)

6. 6.1.1. Selon l'art. 428 al. 3 CPP, si l'autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l'autorité inférieure.

Selon l'art. 423 al. 1 CPP, les frais de procédure sont mis à la charge du canton qui a conduit la procédure, sous réserve d'une autre règle d'imputation prévue par le CPP. Lorsque le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent néanmoins être mis à sa charge s'il a, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci (art. 426 al. 2 CPP). Une condamnation aux frais sur la base de cette norme n'est admissible que si le prévenu a causé les frais en cause en violant fautivement une règle juridique proscrivant un certain comportement ; le juge peut prendre en considération toute norme de comportement écrite ou non écrite résultant de l'ordre juridique suisse pris dans son ensemble, en application par analogie des principes découlant de l'art. 41 CO, mais l'acte reproché doit constituer une violation claire de la norme de comportement en cause (ATF 144 IV 202 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_74/2022 du 4 mai 2023 consid. 1.1.3 ; 6B_162/2022 du 9 janvier 2023 consid. 2.1). Le juge ne peut fonder une décision d'imputation des frais sur l'art. 426 al. 2 CPP que si les faits justifiant cette imputation sont incontestés ou clairement établis (arrêts du Tribunal fédéral 6B_997/2020 du 18 novembre 2021 consid. 1.2 ; 6B_1090/2020 du 1er avril 2021 consid. 2.1.1).

6.1.2. L'appelante a certes fait preuve de légèreté dans la gestion de la facturation de D______ SA en tolérant des modifications d'ordonnances sur la base du seul consentement oral de médecins ou de leur secrétariat. Si cette problématique relève principalement du remboursement des prestations couvertes par la LAMal, ce comportement pourrait, en théorie, être de nature à fonder l'ouverture d'une enquête pénale pour s'assurer qu'aucune infraction n'a été commise et engendrer ainsi la responsabilité de l'appelante en matière de frais. Cependant, dans le cas d'espèce, il faut tenir compte du fait que le MP a rapidement disposé des moyens de confirmer ou d'infirmer ses soupçons initiaux puisque la précitée lui a fourni un accès à J______ le 13 novembre 2018, soit au début de l'instruction, laquelle aurait, selon les dires du MP, été précédée d'une enquête de plusieurs mois (cf. P-C137), bien que le dossier soit à cet égard succinct. Or, dès le second semestre 2019 et jusqu'à l'ordonnance pénale du 17 décembre 2022, il n'a été procédé qu'à de rares actes d'instruction, essentiellement des auditions de la prévenue. Malgré la pandémie de covid-19, cette durée de près de 50 mois, alors même que l'appelante faisait initialement l'objet de sévères mesures de substitution constituant une atteinte particulièrement grave à sa liberté personnelle et économique, n'est pas justifiée et constitue une violation de l'art. 5 CPP. Dans ces circonstances, on ne saurait reprocher à cette dernière d'avoir rendu plus difficile la conduite de la procédure.

Il s'ensuit que l'ensemble des frais de la procédure préliminaire et de première instance sera laissé à la charge de l'État.

6.2. L'appel ayant été admis, il ne sera pas perçu de frais en relation avec la procédure y relative (art. 428 CPP a contrario).

7. 7.1. La question de l'indemnisation doit être tranchée après celle des frais. Dans cette mesure, la question du règlement des frais préjuge de celle de l'indemnisation (ATF 147 IV 47 consid. 4.1 ; 145 IV 94 consid. 2.3.2 ; 144 IV 207 consid. 1.8.2).

L'art. 429 al. 1 let. a CPP prévoit que s'il est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, le prévenu a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

L'État ne prend en charge les frais de défense que si l'assistance d'un avocat était nécessaire compte tenu de la complexité de l'affaire en fait ou en droit et que le volume de travail, et donc les honoraires, étaient ainsi justifiés (ATF 142 IV 45 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_380/2021 du 21 juin 2022 consid. 2.2.1). L'État doit en principe indemniser la totalité des frais de défense, ceux-ci devant toutefois demeurer raisonnables compte tenu de la complexité et de la difficulté de l'affaire (ATF 142 IV 163 consid. 3.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_380/2021 du 21 juin 2022 consid. 2.2.2). L'indemnité doit correspondre au tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule ; l'État n'est pas lié par une convention d'honoraires passée entre le prévenu et son avocat (ATF 142 IV 163 consid. 3.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_380/2021 du 21 juin 2022 consid. 2.2.2). La Cour de justice applique un tarif horaire maximal de CHF 350.- pour les avocats collaborateurs (AARP/177/2023 du 25 mai 2023 consid. 7.1 ; AARP/52/2023 du 20 février 2023 consid. 6.2.2). Ces montants s'entendent hors TVA ; ainsi, lorsqu'un avocat facture à son mandant des prestations aux tarifs maximaux susmentionnés hors TVA, celle-ci doit être ajoutée en sus, pour autant que lesdites prestations y soient effectivement assujetties (AARP/383/2023 du 3 novembre 2023 consid. 8.1).

7.2.1. Eu égard à la procédure préliminaire et de première instance, l'appelante requiert l'indemnisation de 103 heures et cinq minutes de travail à CHF 376.95 de l'heure (TVA comprise). Ce total se compose de 16 heures et 15 minutes d'audiences et vacations y relatives, de 67 heures et 55 minutes d'étude du dossier, recherches juridiques, rédactions d'actes de procédure, préparations d'audiences et conférences avec l'appelante, et enfin de 18 heures et 55 minutes de communications diverses.

Le total de 16 heures et 15 minutes relatif aux audiences et aux vacations apparaît fondé, de sorte qu'il y a lieu de l'indemniser entièrement. En revanche, les près de 68 heures consacrées au travail de fond du dossier sont excessives s'agissant d'un dossier d'une complexité moyenne sur le plan factuel et juridique. Il ressort de surcroît de la note de frais produite par l'appelante que l'étendue de ce total résulte notamment de la succession de trois avocats collaborateurs sur le dossier, laquelle engendre nécessairement des coûts supplémentaires liés au besoin d'en prendre connaissance. Il s'agit là d'un risque entrepreneurial propre à une étude d'avocat qui n'a pas à être supporté par un mandant, et encore moins par la caisse publique. Dans le cas d'espèce, un total de 34 heures, hors audiences et communications, est suffisant à une préparation minutieuse de la cause par une étude notoirement expérimentée en droit pénal. Enfin, un total de 10 heures pour l'ensemble des téléphones, courriels et courriers (hors rendez-vous en présentiels) apparaît comme le maximum nécessaire à une défense utile.

Il en résulte que la durée de l'activité à indemniser s'élève à 60 heures et 15 minutes à CHF 376.95 de l'heure, correspondant à un montant de CHF 22'711.25, TVA comprise. Il convient de rajouter à ce total les débours (frais de photocopies) s'élevant à CHF 495.-, soit une indemnité totale de CHF 23'206.25 en lien avec la procédure préliminaire et de première instance.

7.2.2. Pour la procédure d'appel, l'appelante requiert l'indemnisation de 34 heures et 15 minutes de travail, hors audience d'appel, soit une heure de communications diverses et 33 heures et 15 minutes de travail de fond sur le dossier, y compris les conférences avec la mandante et la préparation de l'audience d'appel.

Ce total est excessif dès lors que l'audience d'appel a eu lieu moins de six mois après l'audience de première instance, que seule l'appelante a été entendue dans ce cadre et que le dossier de la cause n'a pas subi de modification notable dans l'intervalle. Il convient donc de le réduire à 14 heures de travail de fond sur le dossier, outre l'heure consacrée aux communications avec la prévenue. À cette durée doivent cependant s'ajouter les quatre heures et 45 minutes de l'audience d'appel.

Il en résulte un total de 19 heures et 45 minutes de travail à CHF 376.95 de l'heure, pour l'ensemble de la procédure d'appel, correspondant à une indemnité de CHF 7'444.80, TVA comprise.

8. 8.1. Il y a détention excessive, au sens de l'art. 429 al. 1 let. c CPP, lorsque la détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté ont été ordonnées de manière licite dans le respect des conditions formelles et matérielles, mais que cette détention dépasse la durée de la privation de liberté prononcée dans le jugement, c'est-à-dire dure plus longtemps que la sanction finalement prononcée, seule la durée de celle-ci étant ainsi injustifiée ; la détention ne sera qualifiée d'excessive qu'après le prononcé du jugement (ATF 149 IV 289 consid. 2.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1090/2020 du 1er avril 2021 consid. 2.3.1). S'agissant spécifiquement d'une détention excessive, un montant journalier de CHF 200.- par jour en cas de détention injustifiée de courte durée constitue une indemnité appropriée, dans la mesure où il n'existe pas de circonstances particulières qui pourraient fonder le versement d'un montant inférieur ou supérieur ; ce taux journalier n'est toutefois qu'un critère qui permet de déterminer un ordre de grandeur pour le tort moral, il convient ensuite de corriger ce montant compte tenu des particularités du cas, et notamment de la durée de la détention, ainsi que du retentissement de la procédure sur l'environnement de la personne concerné et de la gravité des faits reprochés (ATF 149 IV 289 consid. 2.1.2 ; 146 IV 231 consid. 2.3.2 ; 143 IV 339 consid. 3.1). Le juge peut également tenir compte les répercussions de la détention sur la vie privée, sociale et professionnelle de l'intéressé (ATF 149 IV 289 consid. 2.1.4).

L'indemnisation des mesures de substitution à la détention, au sens de l'art. 237 CPP, qui se révèlent infondées suite au prononcé du jugement suit en principe les mêmes règles que celles relatives à la détention (en ce sens : AARP/161/2022 du 25 mai 2022 consid. 2.2.5.3). Il convient toutefois de tenir compte du caractère bien plus restreint de l'atteinte à la liberté d'une telle mesure, en particulier s'agissant d'une interdiction de contact avec des personnes qui ne sont pas des proches du prévenu ou d'une obligation hebdomadaire de pointer à un poste de police, en comparaison avec celle engendrée par une détention (arrêts du Tribunal fédéral 6B_990/2020 du 26 novembre 2021 consid. 2.5.1 ; 6B_147/2021 du 29 septembre 2021 ; 6B_772/2020 du 8 décembre 2020 consid. 3.3).

8.2. L'appelante a été détenue pendant deux jours, puis a été soumise pendant 271 jours à des mesures de substitution aux termes desquelles elle avait en particulier interdiction de se rendre dans les locaux de D______ SA, de contacter les employés et son associé, d'évoquer la procédure avec sa sœur, de cesser son activité en lien avec le centre et d'exercer une quelconque activité lucrative en lien avec des prestations de santé.

Les deux jours de détentions subis doivent être indemnisés à hauteur de CHF 200.- chacun, soit CHF 400.- au total. L'État sera donc condamné à verser à l'appelante la somme de CHF 400.-, avec intérêts à 5% l'an dès le 14 novembre 2018 (date moyenne).

Les mesures de substitution subies par l'appelante doivent être qualifiées de gravement attentatoires à sa liberté personnelle. Si les mesures empêchant tout contact avec D______ SA et son personnel dans un but d'éviter une collusion pouvaient se justifier sur une brève période, il est difficilement compréhensible qu'elles aient été maintenues aussi longtemps alors même que l'ensemble du personnel du secrétariat du centre avait été entendu en novembre 2018 et que les autorités de poursuite disposaient de l'accès à J______. L'interdiction de toute activité liée à la délivrance de prestations de santé constitue quant à elle une restriction particulièrement incisive, d'emblée insoutenable puisque le fait d'être physiothérapeute n'avait pas de lien avec les soupçons pesant contre l'appelante et n'apparaissait apte ni à prévenir une collusion, ni à prévenir une récidive et encore moins à prévenir une fuite.

Dans l'ensemble, la gestion de l'instruction par les autorités de poursuite, en particulier le procureur en charge, souffre de multiples manquements à tel point qu'elle n'est plus défendable à l'aune des principes de l'art. 3 al. 1 CPP.

Au vu de ce qui précède, il se justifie d'octroyer à la prévenue, outre les CHF 400.- susmentionnés, une indemnisation de CHF 14'800.- – vu ses conclusions – à titre de tort moral, ce qui correspond à quelque CHF 55.- par jour de mesures de substitution. Ce montant portera intérêts de 5% l'an dès le 8 avril 2019 (date moyenne).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/937/2023 rendu le 8 juin 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/9675/2018.

L'admet.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Classe la procédure eu égard aux chefs d'escroquerie s'agissant des cas AM______, AN______, AO______ et AP______.

Acquitte A______ d'escroquerie (art. 146 al. 1 CP), de tentative d'escroquerie (art. 22 CP en lien avec l'art. 146 al. 1 CP) et de faux dans les titres (art 251 ch. 1 CP) s'agissant des autres cas.

Renvoie B______ à agir par la voie civile.

Laisse les frais de la procédure préliminaire et de première instance à la charge de l'État.

Laisse les frais de la procédure d'appel à la charge de l'État.

Alloue à A______ un montant de CHF 23'206.25, TVA comprise, à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits au cours de la procédure préliminaire et de première instance.

Alloue à A______ un montant de CHF 7'444.80, TVA comprise, à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits au cours de la procédure d'appel.

Condamne l'État de Genève à payer à A______ CHF 400.-, avec intérêts à 5% l'an dès le 14 novembre 2018, et CHF 14'800.-, avec intérêts à 5% l'an dès le 8 avril 2019, à titre d'indemnité pour son tort moral résultant de la procédure pénale.


 

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

La greffière :

Lylia BERTSCHY

 

Le président :

Vincent FOURNIER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.