Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/279/2025 du 18.03.2025 ( LCR ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 18 mars 2025
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dans la cause
Monsieur A______, représenté par Me Jean-Yves HAUSMANN, avocat, avec élection de domicile
contre
OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES
1. Monsieur A______, né le ______ 1983, titulaire d’un permis de conduire de la catégorie B délivré le ______ 2001, a été impliqué dans un accident de la circulation qui s’est déroulé le 27 octobre 2023 à 22h14, au niveau du n° 57 de la route de Florissant à Genève.
2. Entendu par la police le jour même, il a indiqué avoir consommé une bouteille de vin à deux au souper. Avant cela, il avait participé à un apéritif où il avait bu du vin. Il avait consommé son premier verre le 27 octobre 2023 vers 18h00, et son dernier verre le soir même vers 21h00. Questionné sur les circonstances de l'accident, il a répondu ne pas pouvoir expliquer exactement les raisons de celui-ci.
La police lui a indiqué que le résultat de l’éthylomètre était positif à hauteur de 1,32 milligramme par litre d'air expiré (ci-après : mg/l).
3. Dans un document daté du 27 octobre 2023, intitulé « Résultat de l’éthylomètre / ordre de prélèvement », il était indiqué que le résultat de l’éthylomètre était de 1,32 mg/l.
4. Le 28 octobre 2023, la police a saisi le permis de conduire de M. A______ et lui a notifié une interdiction de circuler. Le rapport relatif à cette saisie mentionnait un résultat positif à l’éthylotest à hauteur de 1,33 mg/l.
5. Par décision du 3 novembre 2023, l’office cantonal des véhicules (ci-après : l’OCV) a prononcé un retrait du permis de conduire à titre préventif à l’encontre de M. A______ pour une durée indéterminée et lui a ordonné de se soumettre à une expertise visant à évaluer son aptitude à la conduite, réalisée par un médecin de niveau 4.
L’infraction retenue était une conduite en état d’ébriété en présentant un taux d’alcool qualifié, soit avec une concentration d’alcool minimum dans l’air expiré de 1,33 mg/l à l’éthylotest, avec accident, le 27 octobre 2023 à 22h14, sur la route de Florissant.
6. L'expertise médicale d'aptitude à la conduite d'un véhicule à moteur a été réalisée le 14 mars 2024 par la B______, médecin spécialiste SSML de niveau 4.
Il ressortait du rapport d’expertise que M. A______ était inapte, d’un point de vue médical, à conduire des véhicules à moteur du groupe 1.
L’expertisé affirmait avoir respecté, au cours des trois mois antérieurs, une stricte modération de son recours à l’alcool, en ayant consommé, depuis le 31 décembre 2023, entre cinq et six verres standard de vin et deux unités standard de bière. Toutefois, le résultat de l’analyse capillaire effectuée dans le cadre de cette expertise n’était pas compatible avec ses déclarations, puisqu’il mettait en évidence une concentration d’éthylglucuronide (ci-après : EtG) à hauteur de 91 pg/mg pour le segment proximal, parlant en faveur d’une consommation chronique et excessive d’éthanol au cours des deux à trois mois ayant précédé le prélèvement du 14 mars 2024.
Malgré l’expertise imposée et en dépit du courriel d’information concernant les modalités d’expertise, M. A______, qui ne semblait pas ou peu avoir perçu le caractère pour le moins nocif de son mode de consommation d’alcool actuel, avait manifestement continué à boire de manière régulière et/ou n’avait pas réduit son recours à l’alcool de manière suffisante pour que le résultat de l’analyse capillaire reflétât cette modération.
Au vu de l’incohérence importante existante entre ses déclarations et les résultats de l’analyse toxicologique, il était difficile de dire si M. A______ sous-estimait volontairement les consommations d’alcool qu’il avait entretenues au cours des mois ayant précédé le prélèvement capillaire ou s’il se trouvait dans une situation de déni par rapport à son mode d’usage éthylique. Il ressortait des éléments d’appréciation à disposition qu’il entretenait actuellement un mode de consommation d’alcool régulièrement excessif, dont il n’était pas totalement conscient et/ou qu’il minimisait dans le cadre de la présente expertise.
Par ailleurs, un syndrome de dépendance à l’égard de l’alcool ne pouvait être exclu puisque plusieurs critères de la CIM-10 pouvaient être retenus à son encontre, tels que des difficultés à contrôler son usage d’alcool, une tolérance augmentée aux effets de l’alcool et une poursuite de la consommation malgré les conséquences négatives engendrées par l’infraction routière qu’il avait commise et les enjeux de la présente expertise.
7. Par courrier du 15 avril 2024, se référant au rapport d’expertise précité, l’OCV a imparti un délai au 3 mai 2024 à M. A______ pour lui faire parvenir ses éventuelles observations.
8. Par courrier du 2 mai 2024, le conseil de M. A______ a demandé à l’OCV que le dossier soit mis à sa disposition dans leurs locaux et, par voie de conséquence, à ce que, le délai initialement imparti à son mandant soit prolongé au 17 mai 2024, ce à quoi l’OCV a donné son accord.
9. Par courrier du 16 mai 2024, sous la plume de son conseil, M. A______ a transmis ses observations à l’OCV.
À titre liminaire, il apparaissait que les pièces constituant le dossier à ce stade comportaient des inexactitudes, des incohérences, ainsi que des éléments insuffisamment déterminés, et que des mesures complémentaires devraient venir palier. La police confondait les termes éthylotest et éthylomètre sans qu’il n’existât de certitude quant à l’appareil qui avait véritablement été utilisé et de la nécessité de procéder à une prise de sang à la suite du contrôle de son haleine. De plus, alors que le résultat de l’éthylomètre tel que reporté dans le document idoine indiquait 1,32 mg/l, toutes les autres pièces au dossier faisaient - manifestement faussement - état d’un taux de 1,33 mg/l.
Ainsi, le résultat du test effectué par la police le 27 octobre 2023 n’était pas clairement démontré, ni correctement déterminé, et il en découlait que ce résultat ne pouvait être considéré comme une base valablement établie pour la suite de la procédure administrative dont l’OCV était chargée, viciant d’emblée les actes qui en découlaient.
Le rapport d’expertise concluait à son inaptitude, notamment au vu des résultats sur une mèche de cheveux prélevée le 14 mars 2024, dont le taux d’EtG était de 91 pg/mg. Dans le cadre de cette expertise, l’OCV lui avait indiqué qu’une longueur de cheveux d’au minimum 3 cm devait pouvoir être prélevée et l’experte lui avait également recommandé de respecter au cours des trois mois précédant l’expertise au moins une modération significative de sa consommation d’alcool, voire une abstinence totale. Lors du prélèvement de cheveux, deux échantillons de 5 cm avaient été prélevés, mais selon le rapport toxicologique, seul un segment de 3 cm avait été soumis à l’analyse. Il n’était ainsi pas établi quelle partie du segment avait été analysée, ce qui était déterminant. Ainsi, le résultat du test toxicologique ne saurait être considéré comme objectivement représentatif de sa consommation d’alcool au cours des trois mois précédant le prélèvement. L’expertise toxicologique devrait être répétée sur un nouveau prélèvement à l’échéance d’un délai de trois mois ou complétée par des analyses de sang effectuées une fois par mois durant les trois prochains mois. Subsidiairement et dans la mesure où l’analyse d’ores et déjà effectuée avait porté sur l’échantillon de cheveux n° 2 uniquement, l’analyse devrait être répétée sur l’échantillon de cheveux n° 1, tout en précisant que le segment choisi devra concerner celui correspondant à sa consommation d’alcool la plus récente, au besoin en le séquençant par segment de 1 cm pour déterminer sa consommation mensuelle.
Il avait affirmé avoir respecté au cours des trois mois antérieurs au prélèvement, une stricte modération de son recours à l’alcool en ayant consommé, depuis le 31 décembre 2023, entre cinq et six verres standard de vin et deux unités standard de bière. Cette déclaration devait toutefois être comprise comme une consommation le 31 décembre 2023 de cinq à six verres standard de vin, puis deux bières consommés le 8 janvier 2024, respectivement dix jours avant le 14 mars 2024. Il était restaurateur et avait l’habitude de consommer une bière, une à deux fois par semaine et un à deux verres de vin une fois par mois en accompagnement de certains repas. Il lui arrivait également de boire dans des proportions abusives deux fois par années environ, le dernier excès se situant le jour de l’accident. Par ailleurs, bien que cela ne ressortisse pas du rapport, il avait consommé des verres de vin dans la limites des trois verres par semaine durant la semaine avant Noël.
Son médecin traitant n’avait jamais posé de diagnostic interférant avec la conduite automobile chez lui. Il avait également remis à l’experte les résultats d’un bilan sanguin effectué le 21 septembre 2023, soit un mois avant les faits démontrant des niveaux strictement normaux, en particulier l’indice des Famma- glutamyltranspéptidase (GGT). Il apparaissait ainsi hautement problématique qu’en septembre 2023 ses marqueurs sanguins de l’alcool se situaient dans des zones faibles à moyennement faibles et qu’au moment du prélèvement capillaire et alors qu’il savait pertinemment qu’il devait modérer sa consommation voire s’abstenir, ses marqueurs EtG étaient largement supérieurs aux seuils tolérés.
Le prélèvement de cheveux avait été initialement fixé au 25 mars 2024 avec l’experte. Toutefois, il avait fait part à cette dernière de sa volonté de pouvoir l’effectuer aussi rapidement que possible puisqu’il avait scrupuleusement respecté ses recommandations. L’experte avait ainsi proposé un créneau pour le 14 mars 2024, date confirmée par ce dernier. Il aurait donc été curieux d’accepter une date de prélèvement plus tôt que celle initialement prévue si sa consommation d’alcool avait été problématique durant les trois mois précédant ledit prélèvement. Cela était d’autant plus vrai que si l’on remontait trois mois avant le 14 mars 2024, le segment de cheveux analysé débutait le 14 décembre 2023, accentuant par-là le phénomène de persistance au vu des éléments relevés ci-avant et incluant en sus les verres du 31 décembre 2023.
Il avait pu adopter par le passé une consommation modérée d’alcool durant une longue période, soit près de vingt ans. Comme déjà indiqué précédemment, il avait admis avoir consommé des verres d’alcool dans la limite stricte des recommandations de l’experte avant Noël, soit dans les trois mois ayant précédé le test capillaire du 14 mars 2024. Ces consommations récentes couplées à une consommation modérée sur plus de vingt ans étaient donc de nature, selon la définition du phénomène de persistance, à produire ledit phénomène dans son cas.
Enfin, s’agissant de sa situation personnelle, il était le propriétaire du restaurant « C______ » à D______. À ce titre, c’était à lui qu’incombait la responsabilité de la visite aux fournisseurs pour la sélection des produits, les livraisons et en particulier la recherche de nouveaux produits auprès d’autres fournisseurs. La conduite d’un véhicule faisait donc partie intégrante de sa vie, en particulier en sa qualité de restaurateur situé en campagne. En outre, il n’avait jamais fait l’objet de la moindre infraction ou mesure administrative en lien avec sa conduite auparavant.
10. Par courrier du 22 mai 2024, l’OCV a informé M. A______ qu’il ne s’opposait pas à ce que le deuxième échantillon de cheveux prélevé le 14 mars 2024 soit analysé par la Dre B______. Les frais liés à cette évaluation complémentaire, ainsi qu’à la rédaction d’un éventuel rapport complémentaire seraient à sa charge. En annexe se trouvait le rapport d’analyse relatif à l’échantillon de mèche ayant déjà été analysée, dont le résultat avait été pris en compte dans le rapport d’expertise du 15 avril 2024.
Il se déterminerait sur les autres points exposés dans son courrier du 16 mai 2024 à réception des résultats de cette analyse complémentaire.
11. Par courrier du 28 mai 2024, M. A______, sous la plume de son conseil, a informé l’OCV qu’il partait du principe que l’analyse serait conduite par le Centre universitaire de médecine légale (ci-après : CURML) et non par la Dre B______ directement, comme indiqué dans son courrier.
12. Selon le rapport d’analyse rendu par la E______ du CUMRL le 17 juin 2024, les trois segments de 1 cm de cheveux soumis à analyse montraient un taux d’EtG de moins de 7 pg/mg dans le segment de cheveux de 0- 1 cm, de 32 pg/mg dans le segment de 1-2 cm et de 210 pg/mg dans le segment de 2- 3 cm, tout en retenant que le seuil décisionnel était de 7 pg/mg.
13. Par courriel du 18 juin 2024, la Dre B______ a informé l’OCV que la segmentation montrait que M. A______ avait entretenu une consommation d’alcool chronique et excessive jusqu’à trois à quatre semaines avant l’expertise. Par conséquent, l’intéressé n’ayant clairement pas respecté les recommandations relatives au maintien d’une consommation strictement modérée d’éthanol pendant une durée minimale de trois mois avant son rendez-vous d’expertise, sa position ne changeait pas au sujet de son inaptitude à la conduite.
14. Par courrier du 19 juin 2024, l’OCV a informé l’intéressé des résultats toxicologiques complémentaires, reprenant entièrement les propos de la Dre B______ et lui transmettant en annexe une copie de l’expertise toxicologique du 17 juin 2024. Un délai au 1er juillet 2024 lui était accordé pour lui faire part d’observations complémentaires.
15. Par courrier du 10 juillet 2024, M. A______, sous la plume de son conseil, a transmis ses observations à l’OCV.
Il était patent que sa consommation d’alcool avait, durant le délai de trois mois précédant le prélèvement, chuté de manière spectaculaire pour venir se situer au-dessous du seuil limite de 7 pg/mg d’EtG, ce qui avait pu être démontré dans le cadre de la seconde expertise toxicologique. Sa consommation d’alcool avait subi un arrêt total, exception faite de quelques verres résiduels durant cette période de trois mois. Les résultats observés dans le rapport du 17 juin 2024 ne pouvaient ainsi s’expliquer que par un phénomène de persistance évident.
Dans ces conditions, son aptitude devrait être reconnue et des mesures pourraient être mises en place pour la contrôler. Si l’OCV l’estimait nécessaire, il était prêt à se soumettre à tout test ou suivi à ses frais, pour récupérer son permis de conduire.
Si, par impossible, tel ne devait pas être le cas, un nouveau prélèvement dans trois mois devrait avoir lieu.
16. Par courriel du 16 juillet 2024, la Dre B______ a indiqué à l’OCV que, si chez le précité, le résultat de la segmentation de la contre-analyse capillaire reflétait une réduction importante de sa consommation d’alcool au cours des trois mois antérieurs, elle ne parlait toutefois pas en faveur d’un changement suffisant et suffisamment prolongé dans son rapport à l’alcool permettant de garantir qu’il ne présentait pas une problématique éthylique de l’ordre d’une dépendance, d’autant que le taux d’alcool qu’il présentait lors de son interpellation du 27 octobre 2023 dénotait clairement une tolérance à l’alcool très importante. Par ailleurs, selon elle, ni le phénomène de persistance lié à la vitesse de croissance des cheveux au cours des mois ayant précédé le prélèvement capillaire du 14 mars 2024, ni les dosages dans les normes de la GGT et des transaminases hépatiques (correspondant à des marqueurs moins sensibles et moins spécifiques que l’EtG) de l’analyse de sang réalisée le 21 septembre 2023 n’apparaissaient comme des éléments remettant en cause la présomption liée à l’existence actuelle d’une problématique éthylique chez l’intéressé.
17. Par décision du 18 juillet 2024, l’OCV a retiré le permis de conduire de M. A______ pour une durée indéterminée.
Le rapport d’expertise du 15 avril 2024 concluait que l’intéressé était inapte à la conduite des véhicules à moteur. Par conséquent, pour des raisons de sécurité, il y avait lieu de l’écarter de la circulation routière pour une durée indéterminée.
Une nouvelle décision ne pourrait intervenir que sur présentation d’un rapport d’expertise établi par un médecin de niveau 4, lequel devrait se déterminer favorablement quant à son aptitude à la conduite. Cette nouvelle évaluation de son aptitude pourrait être mise en œuvre pour autant qu’il respectât les conditions prévues dans le rapport concluant à son inaptitude à la conduite. Pour toute question relative au suivi de ces conditions, il devait s’adresser à l’auteur du rapport.
18. Par acte du 13 septembre 2024, M. A______ (ci-après : le recourant), sous la plume de son conseil, a interjeté recours contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant principalement à son annulation, à ce que son aptitude à la conduite soit constatée, à la restitution de son permis de conduire et à la radiation de l’inscription dans le SIAC, subsidiairement, à ce qu’un complément d’expertise soit ordonné, et qu’on lui donnât le droit de se déterminer sur ce dernier, le tout sous suite de frais et dépens.
Dans le cadre de la première expertise toxicologique, seul un taux moyen de 91 pg/mg d’EtG avait été décelé dans une partie de l’échantillon n°2 de ses cheveux, sans que l’on put déterminer précisément quelle partie de l’échantillon était concernée dans ce segment. L’absence de prise en compte du phénomène de persistance ne pouvait ainsi conduire qu’à des résultats partiaux et partiels, partant arbitraires. En refusant ou en omettant d’ordonner aux experts de déterminer l’ampleur du phénomène de persistance et l’effet de celui-ci sur les taux observés sur l’échantillon de cheveux n° 1, l’autorité intimée avait constaté les faits de manière incomplète et inexacte. Au surplus, moins de six mois avant le prélèvement de ses cheveux, l’indice GGT observé dans son sang faisait état de taux parfaitement normaux, ce qui n’était contesté ni par les experts, ni par l’autorité intimée.
L’absence de tout examen du phénomène de persistance et son effet sur les résultats était également problématique. L’autorité intimée n’avait rien dit de son refus, dans la décision attaquée, respectivement justifié d’une quelconque manière les raisons pour lesquelles l’administration d’une preuve aussi capitale n’avait pas été effectuée. De plus, aucune prise de position n’avait été faite sur son bilan sanguin parfaitement normal au mois de septembre 2023.
L’autorité intimée justifiait la décision de retrait du permis de conduire pour une durée indéterminée par le fait que l’experte aurait conclu à son inaptitude à la conduite de véhicules à moteur. Le succinct raisonnement de l’autorité ne pouvait être suivi. Cette dernière n’avait aucune idée de la manière dont le phénomène de persistance avait pu impacter les résultats présentés par l’expert toxicologique forensique puisque ni celui-ci ni l’experte médicale n’en avaient fait état. Le phénomène de persistance et le bilan sanguin n’ayant même pas été mentionnés, le rapport d’expertise ne pouvait être qualifié de probant.
Le fait de ne pas avoir été abstinent pendant les trois mois précédant le prélèvement de cheveux n’était par ailleurs pas une condition ressortant d’un texte légal ou de la jurisprudence et ne pouvait être retenu comme seul motif pour constater une inaptitude : il fallait prendre en compte l’ensemble des circonstances et, en l’espèce, au vu du bilan sanguin de septembre 2023, les taux d’EtG relevés dans l’échantillon n° 1 auraient dû être mis en perspective, ce que l’autorité n’avait pas fait. Pour ces mêmes raisons, l’experte ne pouvait affirmer sans détour qu’il ne présentait pas les garanties pour conduire, alors qu’il était parfaitement capable de séparer sa consommation d’alcool à la conduite de véhicules à moteur. Ainsi, le tribunal ne devait accorder aucune force probante aux commentaires de l’experte si ce n’était pour constater qu’ils étaient infondés dans les faits et qu’une dépendance à l’alcool ne pouvait être retenue en l’espèce.
19. Par courrier daté du 15 novembre 2024, l’OCV a transmis ses observations au tribunal et a produit son dossier, concluant au rejet du recours, subsidiairement à la comparution personnelle de la Dre B______.
De manière générale, si l’aptitude à la conduite soulevait des doutes, la personne concernée faisait l’objet d’une enquête dans les cas énumérés de manière non exhaustive à l’art. 15d al. 1 let. a à e LCR. En l’espèce, l’examen précité avait été ordonné et réalisé, et l’inaptitude à la conduite du recourant avait été confirmée par rapport d’expertise du 15 avril 2024. S’il mettait en œuvre une expertise, il était lié par l’avis de l’expert et ne pouvait s’en écarter que s’il avait de sérieux motifs de le faire. Les examens nécessaires à l’appréciation du cas du recourant avaient été effectués sous l’égide d’une praticienne spécialisée dans son domaines d’expertise et les pièces composant le dossier administratif du recourant avaient bel et bien été prises en compte, tout comme ses propres déclarations. Il avait de surcroit donné suite à sa requête visant à faire analyser la deuxième mèche prélevée, et ce, avant même de rendre la décision faisant l’objet du litige. L’expertise médicale menée par l’experte apparaissait dès lors conforme aux exigences de la jurisprudence sur le plan de la méthode mise en œuvre et ne semblait pas prêter le flanc à la critique.
Par ailleurs, il convenait de souligner que la seule à disposer de la reconnaissance de niveau 4 requise en l’espèce était l’experte. Dès lors, seule cette dernière lui semblait compétente pour se prononcer sur les résultats toxicologiques ainsi que sur l’application et l’interprétation des directives émises par la SSLM produites par le recourant.
20. Par ordonnance pénale du 20 novembre 2024, M. A______ a été condamné pour conduite en état d’ébriété avec un taux d’alcool qualifié (art. 91 al. 2 let. a LCR). Cette ordonnance est entrée en force.
21. Le 10 janvier 2025, le recourant, sous la plume de son conseil, a fait parvenir au tribunal sa réplique.
Il avait débuté, le 6 septembre 2024, un suivi spécialisé en alcoologie auprès de l’Unité de dépendances – Médecine de premier recours des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : UMDPR). Dans ce cadre, il avait d’ores et déjà été soumis à trois analyses sanguines, les 22 octobre, 15 novembre et 6 décembre 2024, telles que requises dans les conclusions du rapport d’expertise, soit par analyse du dosage du phosphatidyléthanol (PEth). Il ressortait de ces analyses qu’il n’avait jamais dépassé les seuils requis, ce qui permettait de conclure que ces résultats étaient compatibles avec une abstinence lors des deux à trois semaines avant chaque prélèvement. Dès lors, il avait démontré sur une période significative n’avoir aucune problématique liée à une consommation excessive d’alcool, cela de manière parfaitement contraire aux conclusions de l’expertise.
Dans ses observations du 15 novembre 2024, l’autorité intimée se référait à une prise de position par courriel de l’experte datée du 16 juillet 2024. Pourtant, la pièce en question ne lui avait jamais été transmise afin qu’il puisse se déterminer à son sujet, alors que l’autorité intimée s’était à l’évidence et de son propre aveu, fondée sur cette pièce pour rendre la décision attaquée deux jours plus tard. Il ressortait également du bordereau de pièces produit par l’OCV qu’un courriel de l’experte du 21 mai 2024, ainsi que sa pièces jointe, ne lui avaient pas été transmis.
22. Par duplique du 13 janvier 2025, l’OCV a persisté entièrement dans les termes de sa décision et conclu au rejet du recours.
Le contenu des échanges relatifs à la prise de position de l’experte du 16 juillet 2024 n’avait en aucun cas influencé la décision du 18 juillet 2024, laquelle reposait exclusivement sur les conclusions du rapport d’expertise du 15 avril 2024. La décision contestée n’avait été rendue que le 18 juillet 2024, soit trois mois après la réception du rapport d’expertise. Ce délai considérable avait offert au mandataire du recourant amplement le temps pour examiner en profondeur le contenu du dossier et se positionner en toute connaissance de cause, bien avant que toute décision ne soit prise à l’égard de son client.
Dans ces circonstances, le grief de violation du droit d’être entendu invoqué par le recourant apparaissait disproportionné et contraire aux règles de la bonne foi, et ne saurait être admis.
23. Les parties ont été entendues par le tribunal lors de l’audience du 18 février 2025.
M. A______ a indiqué confirmer les termes de son recours et ne pas avoir de questions à poser à la Dre B______ concernant l’analyse faite sur le prélèvement de ses cheveux. Il avait entrepris un suivi spécialisé en alcoologie aux HUG, il s’y était rendu à cinq reprises et le prochain rendez-vous allait avoir lieu le 20 février prochain. Une attestation lui serait délivrée au terme de ce dernier rendez-vous. Il avait également procédé à cinq analyses de sang, la sixième devant elle aussi intervenir le 20 février prochain. Ces deux démarches étaient concomitantes et en adéquation avec les conclusions de l’expertise du 15 avril 2024. Les trois mois précédents le 14 mars 2024, soit la date de l'analyse capillaire, il avait bu de manière modérée, soit tous les deux-trois jours jusqu'au 25 décembre 2023. Il avait ensuite bu le 31 décembre 2023, mais il ne se souvenait pas de la quantité, puis un galopin de bière le 8 janvier 2024 pour son anniversaire et un verre aux alentours du 4 mars. A ce sujet, il renvoyait le tribunal à ses déclarations lors de l'expertise. Il n’avait, à sa connaissance, aucun problème hépatique. Il a indiqué ne plus avoir consommé d’alcool depuis une fête de mariage qui s’était déroulée fin août 2024.
Le tribunal a entendu la Dre B______. Elle a déclaré qu’un résultat de concentration d'EtG de 91 pg/mg tel que relevé dans le prélèvement du 14 mars 2024 n'était pas en faveur d'un phénomène de persistance puisque celui-ci n'était que de quelques semaines. Cette concentration était trois fois supérieure à la valeur définie par la société suisse de médecine légale et correspondait à une consommation chronique excessive d'alcool : elle se référait au rapport d’analyse toxicologique du 17 juin 2024, point II, qui décrivait l’analyse des trois segments du cheveu. Elle estimait ainsi que le recourant n’avait pas arrêté suffisamment sa consommation d’alcool les trois mois précédant l’expertise. Le phénomène de persistance aurait légèrement teinté quelques millimètres du segment distal ; or, le résultat de ce segment soit 210 pg/mg n'était pas compatible seulement avec le phénomène de persistance. Le résultat du segment du milieu qui reflétait la consommation entre un et deux mois avant l'expertise était également au-dessus de la norme. Le prélèvement le plus probant était le prélèvement capillaire pour estimer un mode de consommation d'alcool car il permettait, par exemple, d'établir la consommation des trois mois précédents ; un prélèvement sanguin ne permettait de remonter que les trois semaines précédentes. Elle estimait que l'arrêt de la consommation d'alcool de M. A______ n'avait pas été abrupt mais progressif puisque l'EtG restait élevé dans le segment du milieu. Un résultat de plus de 30 pg/mg montrait une consommation chronique excessive d'alcool. En référence au résultat d'analyse du 21 septembre 2023, elle indiquait que le Gamma GT était un paramètre qui reflétait la consommation d'alcool de manière indirecte. Son résultat pouvait être dans les normes même en présence d'un consommateur excessif d'alcool si ce dernier ne présentait pas de souffrance hépatique ; même en cas de souffrance hépatique, dans 50% des cas, le taux pouvait rester inférieur à la norme. Dans le résultat de laboratoire du 21 septembre 2023, le niveau du volume globulaire moyen (MCV) était supérieur à la référence située entre 79 et 96 um3 ce qui démontrait une consommation excessive d'alcool. Elle n’était pas surprise que M. A______ ait pu totalement stopper sa consommation d’alcool depuis les six derniers mois. Elle a demandé à être indemnisée à hauteur de CHF 300.-.
La représentante de l’OCV a persisté dans la décision du 18 juillet 2024.
24. Le détail des écritures et des pièces produites sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal des véhicules (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
3. Le recourant fait tout d'abord grief à la décision litigieuse d'avoir été prise en violation de son droit d'être entendu, reprochant à l’autorité intimée d’avoir fait fi de ses demandes concernant la prise en compte du phénomène de persistance et de ne pas avoir été informé du courriel du 16 juillet 2024 de la Dre B______ se prononçant sur le précité phénomène.
4. Le droit d’être entendu, garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), comprend notamment le droit pour les parties de s’expliquer avant qu’une décision ne soit prise à leur détriment, de produire des preuves pertinentes et d’obtenir qu’il soit donné suite à leurs offres de preuves pertinentes ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; ATF 142 II 218 consid. 2.3).
5. Le droit d’être entendu implique aussi l’obligation, pour l’autorité, de motiver sa décision afin que le destinataire puisse la comprendre, l’attaquer utilement s’il y a lieu et afin que l’autorité de recours puisse exercer son contrôle. L’autorité doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l’ont guidé et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l’intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l’attaquer en connaissance de cause. Elle n’est pas tenue de discuter tous les arguments soulevés, mais peut se limiter à l’examen des questions décisives pour l’issue du litige. La motivation peut être implicite et résulter des différents considérants de la décision. Savoir si la motivation présentée est convaincante est une question distincte de celle du droit à une décision motivée. Dès lors que l’on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l’autorité, le droit à une décision motivée est respecté, même si la motivation présentée est erronée (arrêts du Tribunal fédéral 6B_762/2020 du 17 mars 2021 consid. 2.1 et les références citées ; 1C_415/2019 du 27 mars 2020 consid. 2.1 ; ATA/447/2021 du 27 avril 2021 consid. 6b).
6. Une violation du droit d’être entendu peut être réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s’exprimer devant une autorité de recours jouissant d’un plein pouvoir d’examen, pour autant que celle-ci dispose du même pouvoir d’examen que l’autorité inférieure. Si une telle réparation dépend de la gravité et de l’étendue de l’atteinte portée au droit d’être entendu et doit rester l’exception, elle peut cependant se justifier même en présence d’un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure. En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; ATA/782/2022 du 9 août 2022 consid. 2b ; ATA/447/2021 du 27 avril 2021 consid. 6c et les références citées).
7. En l’espèce, le recourant a pu faire valoir ses arguments concernant le phénomène de persistance et l’OCV lui a répondu. Le 18 février 2024, le tribunal a entendu la Dre B______ qui s’est exprimée sur ce phénomène. Concernant le courriel du 16 juillet 2024 qui n’avait pas été transmis au recourant, il sied de constater, qu’en tout état, le recourant a eu accès au dossier de l’OCV et que les échanges auxquels les parties ont pu procéder dans le cadre de la présente procédure ont largement permis à chacune d’elles d’exprimer clairement leur position de sorte qu’il y a lieu de considérer qu’une éventuelle violation du droit d’être entendu a été réparé devant le tribunal de céans, notamment par l’audition de la Dre B______ qui s’est exprimée sur cette pièce et à qui le recourant a pu poser des questions.
Le grief sera donc rejeté.
8. Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi, non réalisée en l’espèce (art. 61 al. 2 LPA).
Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole les principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2).
9. Le recourant conteste la décision de retrait du permis de conduire pour une durée indéterminée prononcée à son encontre le 18 juillet 2024. Il considère que l’autorité a constaté de manière inexacte les faits quant à son inaptitude à la conduite retenue dans l’expertise conduite le 14 mars 2024.
10. Selon l'art. 14 al. 1 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01), tout conducteur de véhicule automobile doit posséder l’aptitude et les qualifications nécessaires à la conduite. Est apte à la conduite, aux termes de l'art. 14 al. 2 LCR, celui qui a atteint l’âge minimal requis (let. a), a les aptitudes physiques et psychiques requises pour conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. b), ne souffre d’aucune dépendance qui l’empêche de conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. c) et dont les antécédents attestent qu’il respecte les règles en vigueur ainsi que les autres usagers de la route (let. d).
11. Aux termes de l'art. 16d al. 1 let. b LCR, qui met en œuvre les principes posés aux art. 14 al. 2 let. c et 16 al. 1 LCR, le permis de conduire est retiré pour une durée indéterminée à la personne qui souffre d'une forme de dépendance la rendant inapte à la conduite.
12. L'existence d'une dépendance à l'alcool est admise si la personne concernée consomme régulièrement des quantités exagérées d'alcool, de nature à diminuer sa capacité à conduire des véhicules automobiles, et qu'elle se révèle incapable de se libérer ou de contrôler cette habitude par sa propre volonté. La dépendance doit être telle que la personne intéressée présente plus que tout autre automobiliste le risque de se mettre au volant dans un état ne lui permettant plus d'assurer la sécurité de la circulation. La notion de dépendance au sens des art. 14 al. 2 let. c et 16d al. 1 let. b LCR ne recoupe pas la notion médicale de dépendance à l'alcool, dans la mesure où la première permet déjà d'écarter du trafic les personnes qui, par une consommation abusive d'alcool, se mettent concrètement en danger de devenir dépendantes au sens médical (ATF 129 II 82 consid. 4.1; arrêts du Tribunal fédéral 1C_131/2022 du 18 avril 2023 consid. 4.3 ; 1C_139/2023 du 11 août 2023 consid. 3.1).
13. Cette mesure constitue un retrait de sécurité (cf. ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 122 II 359 consid. 1a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1 ; 1C_384/2011 du 7 février 2012 consid. 2.3.1), en ce sens qu'elle ne tend pas à réprimer et ne supposent pas la commission d'une infraction fautive à une règle de la circulation, mais est destinée à protéger la sécurité du trafic contre les conducteurs inaptes (cf. not. ATF 133 II 331 consid. 9.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_819/2013 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3a ; 6A.114/2000 du 20 février 2001 consid. 2).
14. La décision de retrait de sécurité du permis pour cause d'inaptitude à la conduite au sens de l'art. 16d al. 1 let. b LCR constitue une atteinte grave à la personnalité et à la sphère privée de la personne intéressée ; elle doit donc reposer sur une instruction précise des circonstances déterminantes (ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C 139/2023 du 11 août 2023 consid. 3.1 ; 1C_459/2022 du 9 mars 2023 consid. 3.1). L'autorité compétente doit, avant d'ordonner un tel retrait, éclaircir d'office la situation de la personne concernée.
15. Si elle met en œuvre une expertise, l'autorité est liée par celle-ci et ne peut s'en écarter que si elle a de sérieux motifs de le faire (ATF 142 IV 49 consid. 2.1.3 ; 140 II 334 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C 139/2023 précité consid. 3.1 ; 1C_294/2018 du 21 septembre 2018 consid. 5.1). Il faut que les points litigieux aient fait l'objet d'une étude circonstanciée, que le rapport d'expertise se fonde sur des examens complets, qu'il ait été établi en pleine connaissance de l'anamnèse, que la description du contexte médical et l'appréciation de la situation médicale soient claires et enfin que les conclusions de l'expert soient dûment motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 125 V 351 consid. 3a; arrêts du Tribunal fédéral 1C 139/2023 précité consid. 3.1 ; 1C_152/2019 du 26 juin 2019 consid. 3.1).
16. Le rôle du médecin, en particulier du médecin-expert, est de décrire l'état clinique d'un intéressé et en aucune manière de se prononcer sur l'opportunité ou la nécessité de retirer son permis de conduire. La chose est d'autant plus vraie que certains concepts de la médecine n'ont pas la même portée en droit de la circulation routière. Cette considération doit toutefois être nuancée lorsque l'autorité compétente, administrative ou judiciaire, comme en l'espèce, demande au médecin de se prononcer également sur l'aptitude à conduire d'un conducteur. Il n'en demeure pas moins qu'il appartient fondamentalement à l'autorité administrative, respectivement au juge, d'apprécier les éléments médicaux du rapport du médecin, puis de répondre à la question - de droit - de savoir si l'aptitude de l'intéressé est ou non donnée. L'autorité administrative, respectivement le juge, apprécient librement les preuves figurant au dossier ; cette considération est toutefois relativement théorique, dans la mesure où la liberté de l'autorité trouve sa limite dans l'interdiction de l'arbitraire : si le juge n'est en principe pas lié par les conclusions de l'expert médical, il ne peut s'en défaire, sous peine de violer l'art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) (protection contre l'arbitraire), qu'en exposant les motifs déterminants et les circonstances bien établies qui lui commandent d'agir de la sorte. Par contre, lorsque les conclusions médicales paraissent insuffisantes ou lacunaires, le juge se doit de les faire compléter (Cédric MIZEL, "Aptitude à la conduite automobile, exigences médicales, procédure d'examen et secret médical", AJP/PJA 2008 p 596 ; cf. aussi ATF 133 II 384 consid. 4.2.3 ; 118 Ia 144 consid. 1c ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_359/2008 du 23 février 2009 consid. 2.2).
Concernant la valeur probante d'un rapport médical, il importe en particulier que les points litigieux aient fait l'objet d'une étude circonstanciée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il ait été établi en pleine connaissance de l'anamnèse, que la description du contexte médical et l'appréciation de la situation médicale soient claires et enfin que les conclusions de l'expert soient dûment motivées ; au demeurant, l'élément déterminant pour la valeur probante n'est ni l'origine du moyen de preuve ni sa désignation comme rapport ou comme expertise, mais bel et bien son contenu (ATF 125 V 351 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_137/2013 du 22 juillet 2013 consid. 3.1). Les questions posées doivent faire l'objet d'une étude détaillée et complète, fondée sur des éléments médicaux et de fait (arrêt du Tribunal fédéral 1C_359/2008 précité consid. 2.2).
17. En l'occurrence, ayant conçu des doutes quant à l'aptitude à la conduite du recourant après l’infraction de conduite en état d’ébriété en présentant un taux d’alcoolémie qualifié, soit avec une concentration d’alcool minimum dans l’air expiré de 1,33 mg/l, qu’il avait commise le 29 octobre 2023, l'OCV a retiré à titre préventif le permis de conduire de M. A______ afin d’élucider la question de son aptitude à la conduite, et ordonné une expertise par un médecin de niveau 4.
Dans son expertise rendue le 15 avril 2024, la Dre B______ a conclu à l’inaptitude du recourant à la conduite des véhicules à moteur du groupe 1. L’analyse effectuée sur un segment proximal de 3 cm d’une mèche de cheveux prélevé le 14 mars 2024 avait mis en évidence une concentration d’EtG à 91 pg/mg ; ce résultat était fortement compatible avec une consommation chronique et excessive d’alcool éthylique au cours des deux à trois derniers mois ayant précédé le prélèvement ; M. A______, malgré l’expertise qui lui avait été imposée, avait manifestement continué à boire de manière régulière et/ou n’avait pas réduit son recours à l’alcool de manière suffisante pour que le résultat de l’analyse capillaire reflétât cette modération.
A la demande du recourant, une analyse de la seconde mèche de cheveu prélevée le 14 mars 2024 a été effectuée ; il en ressortait une concentration d’EtG de 201 pg/mg pour le segment distal – soit la consommation d’alcool entre deux et trois mois avant le prélèvement – et de 34 pg/mg pour le segment du milieu – soit la consommation d’alcool entre un et deux mois avant le prélèvement.
Le recourant estime que l’experte n’a pas pris en compte le phénomène de persistance, ni le bilan sanguin qu’il avait effectué le 21 septembre 2023, lequel démontrait des niveaux tout à fait normaux des marqueurs de la consommation d’alcool. Il considère qu'il n'a pas été établi qu'il était dépendant à l'alcool et donc inapte à la conduite de véhicules à moteur et, implicitement, qu'il ne présente aucun risque de se mettre au volant dans un état ne garantissant pas une conduite sûre.
Pour fonder ses conclusions, l'experte s'est basée sur les résultats de l’analyse de la mèche de cheveu prélevée le 14 mars 2025 qui présentait un taux d’EtG de 91 pg/mg, ainsi que les dires du recourant sur sa consommation d’alcool les trois mois précédant l’expertise ; l’expertise de la seconde mèche de cheveu a confirmé une consommation excessive d’alcool les trois mois précédant l’expertise selon les taux de l’EtG retrouvés. Ces résultats n’étaient pas compatibles avec les dires du recourant quant à sa consommation d’alcool avant l’expertise, laquelle n’avait pas totalement cessé en décembre 2023. Vu les taux très élevés d’EtG présents dans la mèche de cheveu, l’experte a retenu que le phénomène de persistance ne pouvait à lui seul expliquer ce taux, mais que le recourant n’avait pas arrêté suffisamment sa consommation d’alcool les trois mois précédant l’expertise, et que cet arrêt n’avait pas été abrupt mais progressif puisque l’EtG restait encore élevé dans le segment de mèche du milieu.
Il découle de ce qui précède que l'expert a effectué une étude circonstanciée, s'est basé sur des examens complets, notamment une anamnèse, un test capillaire, lequel a été répété le 17 juin 2024, et un entretien avec le recourant pour parvenir à des conclusions dûment motivées, lesquelles ont encore été explicitées et complétées tant dans le courriel de l’experte à l’OCV du 16 juillet 2024 que lors de l’audience du 8 février 2025, notamment en ce qui concernait les résultats d’analyse d’urine faites par le médecin traitant du recourant le 21 septembre 2023 et le phénomène de persistance.
N'ayant aucun motif sérieux de s'écarter de cette expertise claire et concise, l'OCV a, à juste titre retenu une dépendance à l'alcool du recourant, le rendant inapte à la conduite.
Dès lors, l'autorité intimée a prononcé la seule mesure prévue par la loi, laquelle dispose que, dans de telles circonstances, le retrait de sécurité est obligatoirement prononcé pour une durée indéterminée (art. 16d al. 1 LCR).
Il sera rappelé que la mesure pourra être levée sur présentation d'un rapport d'expertise favorable établi par un médecin de niveau 4.
18. Mal fondé, le recours sera dès lors rejeté.
19. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 1’000.-, lequel comprend l’indemnité de CHF 300.- versée à la Dre B______; il est partiellement couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 13 septembre 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 18 juillet 2024 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 1’000.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Sophie CORNIOLEY BERGER
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.
Genève, le |
| La greffière |