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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2337/2024

JTAPI/1220/2024 du 12.12.2024 ( OCPM ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : CAS DE RIGUEUR;DÉCISION DE RENVOI
Normes : LEI.30.al1; LEI.64.al1; OASA.31
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2337/2024

JTAPI/1220/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 12 décembre 2024

 

dans la cause

 

Madame A______ agissant en son nom et celui de ses enfants mineurs B______et C______, représentés par Me Murat Julian ALDER, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame A______, née le ______ 1983, est ressortissante du Nicaragua.

Elle est la mère de deux enfants, B______, né le ______ 2007, ressortissant du Costa Rica et C______, né le ______ 2013, également ressortissant du Costa Rica.

2.             Le 11 mars 2018, Mme A______ a été arrêtée par les gardes-frontières à D______[GE].

Dans le cadre de son interrogatoire, elle a déclaré que ses deux enfants vivaient au Costa Rica avec sa sœur et qu’elle se trouvait en Suisse depuis une année et quatre mois, y étant venue afin d’y trouver du travail. Elle travaillait dans l’économie domestique et n’avait pas d’autorisation de séjour en Suisse. Elle n’avait pas de famille en Suisse. Elle louait un lit chez Monsieur E______ au 1______, F______.

3.             Par décision du 19 avril 2018, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a prononcé le renvoi de Suisse de Mme A______, un délai de départ au 19 mai 2018 lui étant imparti.

4.             Le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) a déclaré le recours de Mme A______ contre cette décision irrecevable par jugement du ______ 2018 (JTAPI/2______).

5.             Mme A______ a été condamnée par ordonnance pénale du Ministère public du 17 mai 2018 pour séjour illégal et activité lucrative sans autorisation.

6.             Par courrier du 31 août 2018, l’OCPM a convoqué Mme A______ pour l’organisation de son départ, un nouveau délai pour quitter la Suisse étant fixé au 30 septembre 2018.

7.             Mme A______ ne s’étant pas présentée à l’OCPM, un contrôle a été effectué au 1______, F______.

8.             Selon le rapport du 28 septembre 2018, l’enquêteur avait eu un entretien téléphonique avec M. E______, lequel lui avait indiqué que Mme A______ n’avait jamais résidé chez lui et qu’il s’était agi d’une adresse de correspondance ; il pensait qu’elle résidait en France.

L’ami intime de Mme A______, Monsieur I______ ne résidait par ailleurs plus à la G______ mais au 3______, H______. Une convocation y avait été laissée mais personne ne s’était manifesté.

9.             Mme A______ a été arrêtée par la police le 20 février 2022 vers 00h30.

Elle a déclaré avoir eu une altercation avec son ex-ami, M. I______ et avait effectivement endommagé sa voiture en cassant les deux phares avant ainsi que le rétroviseur côté conducteur avec les pieds car il lui devait de l’argent. Elle pensait que quelques jours auparavant il l’avait violée.

Elle était arrivée en Suisse pour la première fois en 2017 mais avait quitté ce pays pendant 6 mois pour se rendre en Espagne, sans pouvoir dire quand mais après 2018. Elle n’avait aucun lien avec la Suisse : elle y était venue en vacances, y avait rencontré M. I______ et ils avaient eu le projet de se marier. Ses deux fils de quatorze et neuf ans vivaient avec elle au 4______, J______ ; elle n’avait pas d’autorisation de séjour mais était en cours d’annonce pour elle et ses enfants auprès des autorités. Elle n’avait pas de moyens financiers, ne disposant que d’une allocation familiale.

10.         Par ordonnance pénale du 11 avril 2022, Mme A______ a été condamnée pour avoir, le 20 février 2022, empoigné M. I______, lui causant des égratignures au bras gauche et avoir donné des coups de pied et de poing sur son véhicule, endommageant les deux phares avant et les deux rétroviseurs.

11.         Le 9 novembre 2022, l’OCPM a adressé à Mme A______ une nouvelle convocation à l’adresse 4______, J______, laquelle a été retournée à l’OCPM avec la mention que le destinataire était introuvable.

12.         Par courrier du 5 janvier 2023, Mme A______, sous la plume de son mandataire, a sollicité la délivrance d’un visa urgent pour le Nicaragua, que l’OCPM a refusé de délivrer le 6 janvier 2023.

13.         Par courriel du 26 janvier 2023, le conseil de Mme A______ a indiqué à l’OCPM que sa cliente se trouvait au Nicaragua et qu’elle avait déposé auprès de la représentation suisse une requête en octroi d’un visa de retour : il sollicitait que l’OCPM confirmât qu’elle résidait bien à Genève.

14.         L’OCPM a répondu le 27 janvier 2023 qu’il n’était pas en mesure de délivrer un visa à une personne dépourvue d’autorisation de séjour.

15.         Mme A______ a été auditionnée par le police le 4 avril 2023. Selon le procès-verbal d’audition, elle habitait au 5______, K______.

16.         L’OCPM a adressé à Mme A______, le 2 août 2023, une convocation à l’adresse 5______, K______, pour un entretien le 11 août 2023. Une copie de la convocation était adressée à son conseil.

17.         Par courriel du 4 août 2023, le conseil de Mme A______ a indiqué à l’OCPM qu’une demande de régularisation du statut légal de sa cliente allait être prochainement déposée.

18.         L’OCPM lui a accordé, par courriel du 7 août 2023, un délai au 7 septembre 2023 pour le dépôt de la demande de régularisation.

19.         Dans le délai prolongé, Mme A______ a déposé, le 16 octobre 2023, une demande de régularisation de ses conditions de séjour.

Arrivée en Suisse en 2016, elle était hébergée dans une structure temporaire de L______ avec ses deux enfants, scolarisés. Elle travaillait comme femme de ménage et bénéficiait d’allocations familiales. Elle ne touchait pas de prestations de l’Hospice général.

A l’appui de sa requête, elle a déposé un certain nombre de documents, notamment une attestation d’hébergement de L______, deux certificats de salaire et une fiche de salaire, et une attestation de scolarité pour son fils B______.

20.         Par courrier du 9 novembre 2023, l’OCPM a demandé la production d’un certain nombre de documents complémentaires et la transmission d’informations, avec un délai de réponse au 8 décembre 2023.

21.         A la demande du conseil de Mme A______, le délai a été prolongé au 22 décembre 2023.

22.         Dans le respect de ce délai, Mme A______ a transmis un chargé de 13 pièces, contenant notamment une décision d’allocations familiales pour ses deux enfants à partir du 1er juin 2019 et un document écrit en espagnol par un notaire du Costa Rica. Elle a également indiqué être arrivée en Suisse en novembre 2016, s’être rendue quelques semaines en janvier 2023 au Nicaragua suite au décès de son frère, que son père était mort et que sa mère vivait au Costa Rica, que le père de B______ vivait au Costa Rica et qu’elle ne savait pas où se trouvait le père de C______, n’ayant plus de contact avec lui.

23.         Par arrêt du 9 janvier 2024, la chambre pénale d’appel et de révision a intégralement rejeté l’appel déposé contre le jugement du Tribunal de police du 15 août 2023, rendu suite à l’opposition contre l’ordonnance pénale du 11 avril 2022, par lequel elle avait été reconnue coupable de dommage à la propriété, d’infraction à l’art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et voies de fait et condamnée à une peine pécuniaire de 90 jours-amende et à une amende de CHF 300.-.

Cet arrêt retenait que Mme A______ était célibataire et avait deux fils, nés en 2007 et 2013, avec qui elle vivait et dont elle avait la charge, dès lors qu'elle détenait tant l'autorité parentale sur eux que leur garde exclusive. Elle travaillait en qualité de nettoyeuse pour un salaire mensuel moyen de CHF 1’200.-, auxquels s'ajoutait CHF 600.- par mois d'allocations familiales et CHF 850.- de produit d'une sous-location d'une des chambres de son logement. Elle n'était au bénéfice d'aucune prestation d'aide sociale. Son loyer mensuel s'élevait à CHF 1'890.- et les primes d'assurance-maladie de ses enfants s'élevaient, au total, à CHF 36.60 par mois, étant précisé qu’elle ne disposait pas de couverture d'assurance-maladie pour elle-même. Elle avait des dettes pour un total d'environ CHF 3'000.- et faisait l'objet de poursuites, dont elle ignorait le montant.

24.         L’OCPM a informé Mme A______, le 18 janvier 2024 qu’il manquait certains des documents demandés et qu’un délai au 18 février 2024 lui était imparti pour les transmettre.

25.         Par courriel du 18 février 2024, Mme A______ a transmis un extrait du registre des poursuites - laissant apparaître sept poursuites avec l’indication « impossibilité de notifier » et des actes de défaut de biens - et une traduction libre de l’acte notarié concernant son fils B______.

26.         Mme A______ a encore transmis le 4 mars 2024 deux attestations scolaires concernant ses enfants.

27.         Par courrier du 5 mars 2024, l’OCPM a informé Mme A______ de son intention de refuser d’accéder à sa requête et par conséquent de soumettre son dossier avec un préavis positif au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), et de prononcer son renvoi de Suisse.

Un délai de 30 jours lui était octroyé pour transmettre ses observations et objections éventuelles.

28.         Mme A______ a fait valoir ses observations le 22 avril 2024.

Il ressortait des pièces produites que ses enfants et elle-même étaient pleinement intégrés dans la société genevoise, avaient appris le français et participaient à la vie économique et culturelle du canton, où ils vivaient depuis sept ans. Elle confirmait être la mère de C______ mais ne pas savoir où se trouvait le père de ce dernier.

Elle n’était pas en mesure de produire un extrait vierge de son casier judiciaire et du registre des poursuites. Toutefois, les infractions commises étaient des cas de peu de gravité.

29.         Par décision du 6 juin 2014, l’OCPM a refusé d’accéder à la requête de Mme A______ et de soumettre son dossier avec un préavis favorable au SEM, et a prononcé son renvoi de Suisse avec un délai de départ au 6 septembre 2024.

A la lecture des éléments du dossier, elle ne disposait pas de moyens financiers suffisants à l’entretien d’une famille de trois personnes dans la mesure où elle travaillait seulement 4 heures par semaine et n'avait pas justifié d'autres revenus effectifs.

Elle n’avait pas démontré une intégration socioculturelle particulièrement remarquable. Elle était redevable de dettes, dont une partie n'avait pas encore pu lui être notifiée, pour lesquelles elle n'avait pas justifié effectuer une démarche de remboursement.

Ses revenus étaient très limités dans la mesure où son salaire mensuel se montait à CHF 355.- auquel s'ajoutait les allocations familiales. Force était de constater que son revenu était largement en dessous du minimum vital et par conséquent son indépendance financière ne pouvait être considérée comme pérenne. La copie du contrat de travail fourni ne pouvait être pris en considération dans la mesure où il n'était signé par aucune des parties. Quand bien même cet emploi serait effectif, il serait limité à 11 heures par semaine et le revenu qui s’en dégagerait serait également insuffisant à l'entretien d'une famille de trois personnes.

Elle n'avait pas démontré une situation familiale justifiant une exemption des mesures de limitation. Elle n'avait pas démontré détenir l'autorité parentale exclusive sur C______, ou être en possession d'un document notarié de la part de son père, l’autorisant à vivre en Suisse avec elle. Sa seule déclaration sur l'honneur était insuffisante pour justifier que le père de C______ ne saurait exercer son autorité parentale.

En outre, elle n'avait pas démontré avoir de graves problèmes de santé nécessitant, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales d'urgence indisponibles dans son pays d'origine.

Finalement, elle n’avait pas démontré qu'une réintégration dans son pays d'origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle indépendamment des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires ou scolaires) affectant l'ensemble de la population restée sur place.

S'agissant de la prise en compte de l'intérêt supérieur des enfants, il convenait de retenir qu’ils étaient âgés de 16 et 11 ans et que, bien que B______ fusse adolescent, il n’était scolarisé en Suisse que depuis août 2020, soit moins de 5 ans : elle n’avait fourni aucune preuve de sa présence en Suisse avant cette date. Par ailleurs, aucun document officiel n’avait été fourni attestant que C______ était autorisé par son père à résider en Suisse ; elle n’avait pas non plus fourni d’acte de naissance. Ainsi, leur réintégration dans leur pays d’origine ne devrait pas leur poser de problèmes insurmontables.

30.         Par acte du 8 juillet 2024, Mme A______ (ci-après : le recourante), sous la plume de son conseil, a recouru contre cette décision auprès du tribunal, concluant à son annulation et à ce qu’une autorisation de séjour lui soit octroyée, ainsi qu’à ses deux enfants, sous suite de frais et dépens.

Elle résidait en Suisse depuis presque huit ans, ce qui attestait de très bonnes stabilité, intégration et adaptation à la société suisse. Elle n’avait cessé de manifester son envie de travailler, ayant une volonté de l’intégrer. Elle ne percevait aucune aide financière de la part de l’Hospice général et le fait d’avoir des actes de défaut de biens ne saurait constituer un motif suffisant pour la renvoyer eu égard à son intégration et celle de ses enfants,

Elle avait certes été condamnée pour infraction à la LEI mais on ne pouvait y voir une quelconque volonté de réitération ; de plus, elle n’avait jamais porté gravement atteinte à l’ordre public.

Ses enfants avaient toujours vécu en Suisse [sic] et y effectuaient actuellement leur scolarité : ils avaient parfaitement su s’intégrer dans le cursus scolaire obligatoire et avaient tissé de forts liens avec leurs camarades. Ils étaient par ailleurs tous très appréciés par les gens qu’ils côtoyaient.

Les renvoyer dans un pays dans lequel ils n’avaient pas d’attaches porterait indéniablement atteinte à leur droit au respect de leur vie privée et familiale.

La décision était ainsi arbitraire et disproportionnée, et violait notamment l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

31.         L’OCPM s’est déterminé sur le recours le 9 septembre 2024, proposant son rejet.

Il a rappelé que la recourante avait déposé une demande de régularisation après une décision de renvoi en force à laquelle elle n’avait pas donné suite et qu’elle avait eu des démêlés avec la justice. Elle travaillait à temps partiel dans l’économie domestique. La réintégration de la famille au Costa Rica ne semblait pas compromise.

32.         Dans le délai prolongé, la recourante a informé le tribunal, le 31 octobre 2024 renoncer à répliquer. Elle a produit un certificat de salaire pour l’année 2024 indiquant un salaire brut de CHF 23'000.- et un contrat de travail, ni daté ni signé, concernant une activité de nettoyage auprès d’une personne privée.

33.         Par courrier du 25 novembre 2024, l’OCPM a indiqué ne pas avoir d’observations complémentaires.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             La recourante sollicite d’être mise au bénéfice d’une autorisation de séjour pour cas individuel d’extrême gravité, de même que ses enfants.

6.             La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Kosovo.

7.             Les conditions d’entrée d’un étranger en Suisse sont régies par les art. 5 ss LEI.

8.             Les dérogations aux prescriptions générales d’admission (art. 18 à 29 LEI) sont énoncées de manière exhaustive à l’art. 30 al. 1 LEI ; il est notamment possible de déroger aux conditions d’admission dans le but de tenir compte des cas individuels d’extrême gravité ou d’intérêts publics majeurs (let. b). En vertu de l’art. 30 al. 2 LEI, le Conseil fédéral en a fixé les conditions et la procédure dans l’OASA.

9.             L’art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte, notamment, de l’intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l’état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g).

10.         Le critère de l’intégration du requérant se base sur le respect de la sécurité et de l’ordre public, le respect des valeurs de la Constitution, les compétences linguistiques, la participation à la vie économique ou l’acquisition d’une formation (art. 58a LEI).

Les critères de l’art. 58a LEI, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3), d’autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (ATA/545/2022 du 24 mai 2022 consid. 3e).

11.         Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu’ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l’obtention d’une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; ATA/122/2023 du 7 février 2023 consid. 4b ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3).

12.         Lors de l’appréciation d’un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce, étant relevé que l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée. On ne saurait tenir compte des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place, auxquelles les personnes concernées pourraient être également exposées à leur retour, sauf si celles-ci allèguent d’importantes difficultés concrètes propres à leur cas particulier (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-5341/2020 du 7 février 2022 consid. 6.7 ; F-6616/2017 du 26 novembre 2019 consid. 6.5 et les références citées).

La question n’est donc pas de savoir s’il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d’examiner si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (ATA/ 122/2023 du 7 février 2023 consid. 4d et les références citées).

13.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, l’intéressé possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4206/2021 du 24 novembre 2022 consid. 5.4).

14.         S’agissant de la condition de la durée totale du séjour, elle constitue un critère important de reconnaissance d’un cas de rigueur. Il importe cependant de rappeler que selon la jurisprudence applicable en la matière, le simple fait pour un étranger de séjourner en Suisse pendant de longues années ne permet pas d’admettre un cas personnel d’une extrême gravité. Il s’agit d’un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul (ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7e). En outre, la durée d’un séjour illégal, ainsi qu’un séjour précaire ne doivent normalement pas être pris en considération ou alors seulement dans une mesure très restreinte, sous peine de récompenser l’obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4206/2021 du 24 novembre 2022 consid. 9.1 et les références citées ; ATA/122/2023 du 7 février 2023 consid. 4f). Par durée assez longue, on entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017). Le Tribunal fédéral a en outre considéré que l’on ne saurait inclure dans la notion de séjour légal les périodes où la présence de l’intéressé est seulement tolérée en Suisse et qu’après la révocation de l’autorisation de séjour, la procédure de recours engagée n’emporte pas non plus une telle conséquence sur le séjour (arrêt 2C_926/2010 du 21 juillet 2011).

15.         En ce qui concerne la condition de l’intégration au milieu socioculturel suisse, la jurisprudence considère que, d’une manière générale, lorsqu’une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l’âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d’origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

Il est parfaitement normal qu’une personne, ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers, s’y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l’une des langues nationales. Aussi, les relations d’amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l’étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d’une situation d’extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.3 ; F-1714/2016 du 24 février 2017 consid. 5.3).

L’intégration socio-culturelle n’est donc en principe pas susceptible de justifier à elle seule l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ; C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l’engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d’une intégration réussie, voire remarquable (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2).

16.         Lorsqu’il y a lieu d’examiner la situation d’une famille sous l’angle de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, la situation de chacun de ses membres ne doit pas être considérée isolément, mais en relation avec le contexte familial global. Le sort de la famille formera en général un tout. Il serait en effet difficile d’admettre le cas d’extrême gravité, par exemple, uniquement pour les parents ou pour les enfants. Ainsi le problème des enfants est un aspect, certes important, de l’examen de la situation de la famille, mais ce n’est pas le seul critère. Il y a donc lieu de porter une appréciation d’ensemble, tenant compte de tous les membres de la famille. Quand un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse ou lorsqu’il y a juste commencé sa scolarité, il reste encore dans une large mesure rattaché à son pays d’origine par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socio-culturel suisse n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour au pays d’origine constitue un déracinement complet (ATAF 2007/16 du 1er juin 2007 et les références citées). Avec la scolarisation, l’intégration au milieu suisse s’accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l’âge de l’enfant lors de son arrivée en Suisse et, au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter, dans le pays d’origine, la scolarisation ou la formation professionnelle commencées en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l’école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6053/2017 du 13 février 2020 consid. 8.2.1 ; ATA/404/2021 du 13 avril 2021 consid. 7). L’adolescence, une période comprise entre douze et seize ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6053/2017 du 13 février 2020 consid. 8.2.1 ; ATA/91/2022 du 1er février 2022 consid. 2d).

Sous l’angle du cas de rigueur, le Tribunal fédéral a considéré que cette pratique différenciée réalisait la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant, telle qu’elle est prescrite par l’art. 3 al. 1 CDE (cf. ATF 135 I 153 consid. 2.2.2 ; arrêts 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 et 2A.43/2006 du 31 mai 2006 consid. 3.1 ; cf. aussi arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6053/2017 du 13 février 2020 consid. 8.2.1 ; ATA/404/2021 du 13 avril 2021 consid. 7).

17.         Celui qui place l’autorité devant le fait accompli doit s’attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d’éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (ATF 123 II 248 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1 et les références citées ; ATA/543/2022 du 24 mai 2022 consid. 4c).

18.         Dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son degré d’intégration (art. 96 al. 1 LEI).

19.         Lorsque les conditions légales pour se prévaloir d’un droit à l’autorisation de séjour ne sont pas remplies, les autorités ne jouissent pas d’un pouvoir d’appréciation dans le cadre duquel il y aurait lieu de procéder, conformément à cette disposition, à un examen de la proportionnalité. Admettre l’inverse aurait pour effet de déduire de l’art. 96 LEI un droit à l’obtention ou au renouvellement de l’autorisation, ce qui ne correspond pas à la lettre de cette disposition, qui prévoit uniquement que les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d’appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son intégration (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_30/2020 du 14 janvier 2020 consid. 3.2).

20.         Selon la jurisprudence, un étranger peut, selon les circonstances, se prévaloir du droit au respect de sa vie familiale au sens de l’art. 8 par. 1 CEDH pour s’opposer à une éventuelle séparation de sa famille. Les relations familiales visées par l’art. 8 par. 1 CEDH sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux ainsi qu’entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun. Cependant, une relation hors famille nucléaire peut tomber sous le coup de la vie familiale au sens de l’art. 8 par. 1 CEDH s’il existe un rapport de dépendance particulier entre la personne étrangère et un proche parent au bénéfice d’un droit de présence assuré en Suisse, par exemple en raison d’un handicap - physique ou mental - ou d’une maladie grave dont il souffrirait (ATF 144 II 1 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_22/2023 du 9 janvier 2024 consid. 1.2.1).

21.         Sous l’angle étroit de la protection de la vie privée, l’art. 8 CEDH ouvre le droit à une autorisation de séjour, mais à des conditions restrictives, l’étranger devant établir l’existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d’une intégration ordinaire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_255/2020 du 6 mai 2020 consid. 1.2.2). Lorsque l’étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de présumer que les liens sociaux développés sont à ce point étroits qu’un refus de renouveler l’autorisation de séjour ou la révocation de celle-ci ne peuvent être prononcés que pour des motifs sérieux. Ce « séjour légal » n’inclut pas les années de clandestinité dans le pays. Il convient du reste de ne pas encourager les personnes étrangères à vivre en Suisse sans titre de séjour et de ne pas valider indirectement des comportements tendant à mettre l’État devant le fait accompli. La présomption qu’il existe un droit de demeurer en Suisse après un séjour légal de dix ans ne s’applique ainsi pas dans le cas d’une première demande d’autorisation après un séjour illégal. Cela étant, une personne ayant résidé en Suisse sans autorisation de séjour peut, à titre exceptionnel, se prévaloir d’un droit au respect de la vie privée découlant de l’art. 8 CEDH pour demeurer en Suisse, à condition qu’elle fasse état de manière défendable d’une intégration hors du commun (arrêt du Tribunal fédéral 2C_245/ 2024 du 16 mai 2024 consid. 4.2.1).

22.         Une décision est arbitraire lorsqu’elle contredit clairement la situation de fait, qu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou qu’elle heurte d’une manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité (ATF 144 I 318 consid. 5.4 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_523/2019 du 1er avril 2021 consid. 2 ; 2C_713/2020 du 8 décembre 2020 consid. 2.3).

Il n’y a pas d’arbitraire du seul fait qu’une solution autre que celle choisie semble concevable, voire préférable. Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable ; il faut encore que cette décision soit arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 318 consid. 5.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_26/2024 du 3 juillet 2024 consid. 2).

23.         Après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, force est pour le tribunal de constater que l’OCPM n’a pas mésusé de son pouvoir d’appréciation en considérant que la recourante et ses enfants ne satisfaisaient pas aux conditions strictes requises pour la reconnaissance d’un cas de rigueur.

Il peut être retenu que la recourante est arrivée en Suisse en novembre 2016. Elle a toutefois reconnu, lors d’un interrogatoire devant la police, avoir quitté la Suisse pour se rendre en Espagne pendant 6 mois après 2018 ; elle ne peut dès lors se prévaloir d’un long séjour ni d’un séjour ininterrompu en Suisse. Elle a fait par ailleurs l’objet d’une décision de renvoi en force du 19 avril 2018 à laquelle elle ne s’est pas conformée et, suite à son départ pour le Nicaragua au décès de son frère en janvier 2018, elle est revenue illégalement en Suisse – un visa lui ayant été refusé. Ainsi, son séjour en Suisse s’est déroulé en grande partie dans l’illégalité et se poursuit, depuis le dépôt de sa demande de régularisation du 16 octobre 2023, au bénéfice d’une simple tolérance des autorités. La recourante ne saurait dès lors déduire des droits résultant d’un état de fait créé en violation de la loi. Elle ne peut en tout cas pas tirer parti de la seule durée de son séjour en Suisse, qui doit en l’occurrence être fortement relativisée, pour bénéficier d’une dérogation aux conditions d’admission. Partant, la durée de son séjour ne saurait, en soi, être considérée comme déterminante.

Son intégration socio-professionnelle en Suisse ne saurait par ailleurs être qualifiée de remarquable ou d’exceptionnelle. La recourante fait l’objet d’actes de défaut de biens et de plusieurs poursuites qui n’ont pas pu lui être notifiées du fait certainement qu’elle était introuvable aux adresses qu’elle avait fournies – ce que l’OCPM a pu constater à la suite du rapport d’enquête du 28 septembre 2018 et aussi par le courrier envoyé le 9 novembre 2022 à l’adresse indiquée expressément par la recourante à la police lors d’un interrogatoire et qui lui est revenu avec la mention que son destinataire était introuvable. Son revenu mensuel est extrêmement faible – selon les pièces du dossier, il est de quelques centaines de francs par mois ; même en y ajoutant le montant mensuel des allocations familiales de CHF 600.-, le montant à sa disposition ne lui permet pas de subvenir aux besoins d’un ménage de trois personnes. Enfin, le contrat de travail produit le 31 octobre 2024, non daté et non signé, ne peut être pris en considération. Pour terminer, la recourante a reconnu ne pas avoir contracté d’assurance-maladie pour elle.

Par ailleurs, active dans le domaine du nettoyage, elle ne peut se prévaloir d’avoir acquis en Suisse des connaissances ou des qualifications si spécifiques qu’elle ne pourrait les utiliser dans son pays. Elle n’a pas non plus fait preuve d’une ascension professionnelle remarquable au point de justifier la poursuite de son séjour en Suisse. Enfin, aucun élément ne démontre qu’elle se serait investie dans la vie associative ou culturelle genevoise ou aurait tissé de liens personnels particulièrement forts au-delà du réseau de connaissances pouvant être attendu de toute personne présente en Suisse depuis près de huit ans.

D’autre part, arrivée en Suisse à l’âge de 33 ans, elle a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine. Elle en maîtrise dès lors la langue ainsi que les us et coutumes. Elle y a par ailleurs gardé de fortes attaches. Dans ces circonstances, sa réintégration ne parait pas gravement compromise en soi, étant relevé qu’elle est encore jeune et en bonne santé. En tout état, rien n’indique que les difficultés auxquelles elle pourrait faire face en cas de retour dans son pays d’origine seraient plus lourdes que celles que rencontrent d’autres compatriotes contraints de retourner dans leur pays d’origine au terme d’un séjour régulier en Suisse, étant rappelé que l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce que la recourante n’a pas établi. Il faut enfin rappeler que celui qui place l’autorité devant le fait accompli doit s’attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d’éviter les inconvénients qui en découlent pour lui. Ainsi, au vu de son statut précaire en Suisse, la recourante ne pouvait à aucun moment ignorer qu’elle risquait d’être renvoyée dans son pays d’origine.

S’agissant de B______, il est né au Costa Rica où il a vécu jusqu’à l’âge de 12 ans. Agé désormais de 17 ans, il a été scolarisé à Genève à partir de février 2019 en enseignement spécialisé et a terminé le cycle d’orientation en juin 2024. Aucun élément n’a été fourni concernant la formation qu’il suit actuellement. Il n’a en tout état pas encore atteint un degré scolaire particulièrement élevé et son intégration scolaire et sociale ne témoigne pas d'une ascension remarquable. Les connaissances qu’il a acquises sont avant tout d’ordre général et lui seront donc profitables pour la suite de sa scolarité ailleurs qu’en Suisse. Par ailleurs, venant tout juste d’entamer la période de l’adolescence, on ne saurait traiter sa situation de la même manière que les enfants ayant vécu toute leur adolescence dans le pays et qui peuvent ainsi se prévaloir d’une intégration sociale accrue pour ce motif.

Concernant C______, il est arrivé à 3 ans en Suisse et a terminé sa 6P en juin dernier. Tel que retenu par l’OCPM, la recourante n’a apporté aucune preuve qu’elle serait autorisée par le père de C______ à résider en Suisse avec lui. Par ailleurs, son intégration scolaire et sociale ne peut, comme pour son frère B______, être qualifiée de remarquable. Agé de 11 ans, sa réintégration dans son pays d’origine, accompagné de son frère et de sa mère, ne semble ainsi pas compromise.

Il sera enfin rappelé que l’intérêt supérieur des enfants au sens de l'art. 3 par. 1 CDE est de pouvoir vivre durablement auprès de leurs parents, quel que soit l'endroit où ils séjourneront.

24.         Au vu de ces circonstances, l’appréciation que l’OCPM a faite de la situation de la recourante sous l’angle des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA ne prête pas le flanc à la critique. Dans ces conditions, le tribunal, qui doit faire preuve de retenue et respecter la latitude de jugement conférée à l’autorité intimée, ne saurait en corriger le résultat en fonction d’une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire.

25.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

Le renvoi constitue la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande tendant à la délivrance ou la prolongation d'une autorisation de séjour, l'autorité ne disposant à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation (ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a).

26.         En l’occurrence, au vu de l’absence de délivrance de titre de séjour, c’est à juste titre que l’autorité intimée, qui ne dispose d’aucune latitude de jugement à cet égard, a ordonné le renvoi de Suisse de la recourante et de ses enfants.

Quant à l’exécution de ce renvoi, aucun élément au dossier ne laisse supposer que celle-ci ne serait pas possible, pas licite ou qu'elle ne pourrait être raisonnablement exigée (art. 83 LEI).

27.         Mal fondé, le recours sera rejeté et la décision contestée confirmée.

28.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.-. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

La recourante étant au bénéfice de l'assistance juridique, cet émolument sera laissé à la charge de l’État de Genève, sous réserve du prononcé d'une décision finale du service de l’assistance juridique sur la base de l’art. 19 al. 1 du règlement sur l'assistance juridique et l’indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale du 28 juillet 2010 (RAJ - E 2 05.04).

29.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 8 juillet 2024 par Madame A______ agissant en son nom et celui de ses enfants mineurs B______ et C______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 6 juin 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de Madame A______ un émolument de CHF 500.- ;

4.             le laisse à la charge de l’État de Genève, sous réserve de la décision finale de l'assistance juridique en application de l'art. 19 al. 1 RAJ ;

5.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière