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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4559/2008

ATA/449/2009 du 15.09.2009 ( EXCLU ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4559/2008-EXCLU ATA/449/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 15 septembre 2009

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Nicolas Dinichert, avocat

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

et

FACULTÉ DES SCIENCES ÉCONOMIQUES ET SOCIALES



EN FAIT

1. Madame A______ a été immatriculée à l’université de Genève dès octobre 2005, d’abord au sein de la faculté des lettres, afin d’y suivre les enseignements du baccalauréat universitaire en lettres, avec comme disciplines le français et l’histoire, cette dernière étant remplacée en cours d’études par l’histoire des religions.

2. Le 17 avril 2007, souhaitant changer de faculté, Mme A______ a pris contact avec la conseillère aux études de la faculté des sciences économiques et sociales (ci-après : SES) pour se renseigner au sujet des conditions d’admission.

3. Le 1er juillet 2007, l’intéressée a demandé formellement son admission au sein de la faculté des SES.

Arrivée au terme de quatre semestres en faculté des lettres, Mme A______ s’était rendue compte qu’elle avait pris le mauvais chemin, sans doute par manque de recul. Elle avait en effet perdu son père en mai 2003 et avait dès lors été confrontée à de nombreuses difficultés personnelles et familiales. Elle avait tout de même réussi sa maturité sans problème et avait même reçu un prix de composition française, ce qui l’avait vraisemblablement acheminée vers la faculté des lettres. Au fils des cours, elle avait pris conscience que cela ne répondait pas à ses attentes et, après mûre réflexion, elle avait décidé de changer d’orientation pour suivre une formation dans le domaine de la géographie, qui la passionnait depuis longtemps.

4. Le 27 août 2007, le doyen de la faculté des SES a informé Mme A______ qu’elle était admise à titre conditionnel pour l’année académique 2007-2008 en baccalauréat universitaire de géographie. Son délai de réussite du programme de première partie était impérativement fixé à septembre 2008, sous peine d’exclusion de la faculté.

5. Dès la rentrée de septembre 2007, Mme A______ a suivi les enseignements de la première partie du baccalauréat universitaire en géographie. A la session d’examens de janvier-février 2008, elle s’est présentée dans quatre matières, obtenant des notes de 2,5 à 3,25. Elle avait en outre réussi un séminaire d’histoire des pensées sociales mais échoué en applications statistiques pour sciences sociales.

6. Le 22 avril 2008, Mme A______ a contacté la conseillère aux études afin de savoir dans quelle mesure il lui serait possible de refaire, cas échéant, sa première année. Elle trouvait en effet injuste de ne pas pouvoir redoubler, car elle avait eu de gros soucis familiaux lors de ses années de collège et ses premières années à l’université, suite au décès de son père en 2003, et elle suivait une thérapie. Elle était très motivée. Son échec était dû au fait qu’elle n’avait pas su adapter sa technique de travail à sa nouvelle faculté et elle était un peu désemparée, car elle n’avait pas la possibilité de se réadapter en redoublant.

Il s’en est suivi un entretien téléphonique avec la conseillère aux études, sans compte rendu écrit utile.

7. Lors de la session d’examens de mai-juin 2008, Mme A______ s’est présentée dans trois nouvelles branches, obtenant des notes 2,50 ; 4,75 ; et 5,50. Elle a en outre réussi trois séminaires.

8. Le 30 juin 2008, l’intéressée a eu un entretien avec la conseillère aux études, sans compte rendu écrit utile.

9. Lors de la session d’examens d’août-septembre 2008, Mme A______ a repassé quatre des examens et le séminaire auxquels elle avait précédemment échoué. Elle a réussi ce dernier et obtenu les notes de 1, 3,5, 4 et 4,25. Sa moyenne générale à la fin de l’année était ainsi de 3,75, inférieure à la note de 4 permettant de réussir la première partie de sa formation.

10. Le 12 septembre 2008, la faculté des SES a adressé à Mme A______ sa décision d’exclusion, le délai de réussite étant échu.

11. Le 15 septembre 2008, Mme A______ a demandé à la conseillère aux études comment elle pouvait recourir contre la note d’économie politique, branche dans laquelle elle avait obtenu 1. Elle trouvait cette appréciation injuste car, ayant déjà échoué dans cette matière en février précédent, elle avait travaillé avec une répétitrice pendant tout l’été. En juillet, elle s’était renseignée auprès de l’assistant de la branche pour savoir si l’examen serait sous forme de questionnaire à choix multiples (ci-après : QCM) et elle avait obtenu une réponse positive. Toutefois, deux semaines avant l’examen, les étudiants avaient été avisés que celui-ci revêtirait la forme de six questions ouvertes, alors qu’ils n’avaient pas été préparés à ce genre de questions. Le jour de l’examen, elle avait été complètement désemparée. Elle était prête pour un QCM et des calculs à faire mais pas du tout pour des questions théoriques ouvertes.

La conseillère aux études a aussitôt répondu que le seul moyen possible de contester une note était de formuler une opposition à l’adresse du doyen, par courrier recommandé, dans les 30 jours.

12. Par courriel du 22 septembre 2008, Mme A______ a contacté le professeur d’économie politique, lui demandant une dérogation pour pouvoir repasser son examen, en exposant sa grande motivation. Ce professeur a réagi le même jour en demandant au doyen de permettre une nouvelle tentative.

13. Le 25 septembre 2008, Mme A______ a déposé auprès de la division administrative et sociale des étudiants (ci-après : DASE) une demande de changement de faculté. Elle souhaitait obtenir un baccalauréat en sciences de l’éducation au sein de la faculté de psychologie et des sciences de l’éducation (ci-après : PSE).

14. Le 26 septembre 2008, Mme A______ a sollicité du doyen de la faculté des SES l’autorisation de repasser l’examen d’économie politique en janvier 2009.

15. Le 29 septembre 2008, la conseillère aux études a eu un entretien avec l’intéressée, suite au courrier précité. Il ressort du compte rendu écrit que Mme A______ a été rendue attentive au fait qu’elle devait faire opposition à la décision d’exclusion si elle souhaitait obtenir une dérogation.

16. Le même jour, Mme A______ a rempli le formulaire d’opposition et l’a adressé au doyen de la faculté des SES. Elle contestait son exclusion. Elle reprenait son argumentation antérieure et la complétait en précisant que la première série d’échecs attestait probablement d’une fragilité résiduelle face au stress. Ses résultats s’étaient ensuite améliorés. Elle avait réussi l’ensemble de ses examens à l’issue de la session d’août 2008, à l’exception de celui d’économie politique. Elle sollicitait donc de pouvoir le passer à nouveau en janvier 2009.

A cette opposition était jointe une attestation médicale du Dr S______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, datée du 22 septembre 2008. Ce document indiquait que Mme A______ bénéficiait d’une prise en charge thérapeutique depuis le mois de décembre 2007, motivée par la présence de difficultés d’ordre affectif et anxieux s’organisant principalement autour d’un travail de deuil suite au décès de son père en 2003. Depuis lors, « en raison d’un état affectif fragilisé, certains de ses choix de vie et d’études, notamment les deux premières années d’université, avaient été fortement marqués par cet état de fragilisation de sa thymie et de son estime de soi ». Actuellement, elle faisait d’importants efforts pour réussir ses études dans lesquelles elle s’investissait davantage, en raison de l’amélioration de son état de santé, que lors de ses deux premières années d’université.

17. Le 30 septembre 2008, le conseil décanal de la faculté de PSE a refusé la demande d’inscription de Mme A______, compte tenu de son cursus antérieur. Cette décision n’a pas été contestée.

18. Par décision du 6 novembre 2008, le doyen de la faculté des SES a rejeté l’opposition de Mme A______.

A l’issue de la session d’août-septembre 2008, l’intéressée avait obtenu une moyenne générale de 3,75, avec trois notes inférieures à 4,00 dont une inférieure à 3,00. Admise à titre conditionnel à la faculté des SES, son délai de réussite de la première partie échéait en septembre 2008. L’exclusion était ainsi fondée. Elle se prévalait de circonstances exceptionnelles, à savoir son état de fragilité accrue suite au décès de son père. Survenu en 2003, cet événement ne pouvait toutefois être considéré, aujourd’hui encore comme une circonstance exceptionnelle et extraordinaire ayant eu un effet causal sur son échec. La fragilité résiduelle face au stress ne pouvait l’être davantage. Elle aurait eu toute latitude, vu les problèmes durables dont elle faisait état, de réorganiser sa vie et d’interrompre les études jusqu’à une amélioration sensible. Les périodes d’examens généraient une forte pression chez beaucoup d’étudiants et seules des circonstances particulièrement graves et difficiles devaient amener à retenir une situation exceptionnelle.

19. Le 10 décembre 2008, Mme A______ a recouru auprès de la commission de recours de l’université (ci-après : CRUNI) contre la décision susmentionnée, concluant préalablement à être autorisée à titre provisoire, à se présenter à nouveau à l’examen d’économie politique lors de la session de janvier-février 2009 ; à suivre les cours de deuxième année du baccalauréat en géographie ; à se présenter aux examens de deuxième année lors de la session de janvier-février 2009 ; subsidiairement, à être autorisée, à titre provisoire, à redoubler sa première année de baccalauréat en géographie et à se présenter aux examens de première année lors de la session de janvier-février 2009. Au fond, elle conclut à l’annulation de la décision querellée et à ce que le tribunal de céans dise qu’elle est autorisée à poursuivre son cursus universitaire au sein de la faculté des SES.

Elle reprenait son argumentation antérieure, en mettant en avant l’évolution de son état psychique suite au décès de son père et au traitement entrepris dès décembre 2007, auprès du Dr S______, dans le but de résoudre, « le temps aidant », les difficultés d’ordre affectif et anxieux qui la perturbaient. Les résultats de ce suivi thérapeutique étaient réels, mais progressifs, ce qui se retrouvait dans l’évolution générale de ses prestations aux examens universitaires.

La décision querellée était fondée sur une constatation inexacte des faits, en ne retenant pas que le décès de son père avait eu un impact majeur sur le déroulement de ses études, en particulier les deux premières années universitaires. Le temps écoulé sans qu’elle ait pu faire son deuil avait été une cause aggravante de son mal-être de plus en plus profond, jusqu’au début de son traitement fin 2007. Il y avait donc bien un lien de causalité entre le deuil de son père et l’échec à ses examens de janvier-février 2008, à une période où elle était en situation d’infériorité psychique. Cette situation lui avait en outre valu de ne pouvoir se présenter à armes égales avec les autres étudiants à l’examen d’économie politique qu’à une seule véritable reprise, soit lors de la « problématique » session d’août-septembre 2008. L’examen de cette dernière session devait ainsi être considéré comme son véritable premier échec.

Enfin, si elle ne s’était pas exmatriculée de la faculté des lettres entre 2005 et 2007, alors qu’elle n’était plus motivée par les études suivies, c’était par crainte de perdre la rente d’orpheline qu’elle percevait suite au décès de son père et qui était conditionnée par la poursuite d’études ou d’une formation professionnelle. Dans sa perception d’alors, perdre cette rente signifiait perdre toute chance de pouvoir faire des études.

Parmi les pièces jointes au recours figurait une attestation médicale établie par le Dr S______ le 4 décembre 2008, complétant celle du 22 septembre 2008, qui précisait notamment que l’intéressée avait présenté à la suite du décès de son père en 2003, un état clinique durable compatible avec « une clinique de deuil qui [s’était] caractérisée notamment par une fragilisation durable de son estime de soi, des éléments sub-dépressifs et des comportements probablement de "fuite en avant" afin de se protéger d’un sentiment de tristesse intolérable et qui [avaient] certainement participé à des choix de vie et d’études ». Le médecin ajoutait que l’état clinique et le déni défensif de Mme A______ avaient « certainement participé à des difficultés et ses performances durant ses deux ans dans la faculté de lettres, notamment la deuxième année et ce probablement en raison du déni défensif ». Le traitement entrepris avait permis une amélioration constante de la santé psychique de l’intéressée, preuve en était le meilleur investissement dans les études.

20. La CRUNI ayant cessé d’exister le 31 décembre 2008, elle a transmis le recours au Tribunal administratif pour raison de compétence.

21. Le 14 janvier 2009, le rectorat de l’université de Genève (ci-après : l’université) s’est opposé à la demande de mesures provisionnelles tendant à permettre à Mme A______ de présenter à nouveau l’examen d’économie politique à suivre des cours de deuxième année et à se représenter à des examens. Accorder ces mesures reviendrait à mettre Mme A______ dans la situation dont elle aurait pu bénéficier si elle n’avait pas été éliminée de la faculté des SES, soit à faire droit à ses conclusions au fond avant jugement.

22. Par décision du 22 janvier 2009, la présidente du Tribunal administratif a rejeté la demande de mesures provisionnelles de Mme A______, ses conclusions préalables se confondant avec celles qu’elle prenait sur le fond.

23. Le 29 janvier 2009, l’université s’est déterminée sur le fond du recours, concluant à son rejet.

Mme A______ avait été admise à titre conditionnel en première partie du baccalauréat universitaire en géographie, ce qu’elle n’avait pas contesté. De ce fait elle devait impérativement avoir réussi cette première partie à l’issue de la session d’examens d’août-septembre 2008. Elle ne pouvait pas bénéficier de la possibilité de redoubler en cas d’échec. N’ayant pas obtenu la moyenne à l’issue de sa première année, elle avait donc été exclue.

L’intéressée n’avait pas évoqué sa crainte de perdre sa rente d’orpheline en cas d’exmatriculation de la faculté des lettres avant son recours au Tribunal administratif. Il en allait de même des circonstances ayant entouré l’examen d’économie politique de la session d’août-septembre 2008. Ces nouveaux éléments, pas plus que l’attestation du 4 décembre 2008 du Dr S______, n’étaient pas de nature à modifier sa position. Sur le dernier point, l’université relevait que seul le professeur de l’enseignement concerné était responsable des modalités d’examen et qu’il avait la latitude de prévoir soit un QCM, soit des questions ouvertes. De manière récurrente, les questions ouvertes étaient proposées lors de sessions de rattrapage lorsque des QCM avaient été présentés lors des sessions ordinaires. Il s’était écoulé onze jours entre le moment où Mme A______ avait reçu l’information que l’examen se ferait sous forme de QCM et celui où elle avait été avisée qu’il le serait sous forme de questions ouvertes. L’examen intervenait trois semaines plus tard. Si le niveau de préparation de l’intéressée avait été suffisant, cette différence de modalités n’aurait pas dû la pénaliser à ce point. Aucune plainte de la part des autres étudiants n’avait été enregistrée à ce sujet.

Pour le surplus, les faits avaient été correctement constatés et ils ne constituaient pas des circonstances exceptionnelles justifiant d’annuler la décision d’élimination.

24. Le 25 février 2009, Mme A______, à la demande du juge délégué, a transmis ses observations sur la détermination de l’université. Elle a persisté dans ses conclusions et son argumentation. Si elle avait été autant déstabilisée par le changement des modalités de l’examen d’économie politique, c’était parce qu’elle était encore fragile à cette époque, même si son état s’améliorait progressivement, son traitement étant une affaire de longue durée. Son argumentation relative à la rente d’orpheline n’était pas un nouveau motif à l’appui de son recours mais était destinée à apporter un éclairage supplémentaire sur son état psychique dégradé durant ses études universitaires. Quant à l’attestation du Dr S______, elle venait compléter la première attestation du 22 septembre 2008.

25. Le 3 mars 2009, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 17 mars 2009 pour indiquer quels actes d’instruction elles sollicitaient. Seule Mme A______ a demandé sa comparution devant le Tribunal administratif.

26. Le 7 mai 2009, le juge délégué l’a informée qu’il serait statué sur cette requête dans l’arrêt à rendre.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2009, le Tribunal administratif est seul compétent pour connaître des décisions sur opposition rendues par une faculté de l’université et des demandes en révision de celles-ci (art. 162 al. 3 de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 modifiée le 18 septembre 2008 - LOJ - E 2 05). Les recours interjetés avant l’entrée en vigueur de cette modification et pendants devant une autre juridiction, comme c’est le cas en l’espèce, sont transmis d’office au Tribunal administratif en application de l’article 162 alinéa 4 LOJ.

2. La recourante a sollicité sa comparution devant le tribunal de céans.

Le droit constitutionnel d’être entendu comprend notamment le droit de consulter le dossier, de participer à l’administration des preuves et de se déterminer, avant le prononcé de la décision, sur les faits pertinents (ATF 132 II 485 consid. 3.2 p. 494 ; 125 I 257 consid. 3b p. 260 ; Arrêt du Tribunal Fédéral 2C.573/2007 du 23 janvier 2008 consid. 2.3 et les arrêts cités ; ATA/417/2008 du 26 août 2008 consid. 6a et les références citées). Cela n’implique pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 134 I 140 consid. 5.3 p. 148 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C.212/2008 du 3 septembre 2008 consid. 3.2 et les arrêts cités ; ATA/489 2008 du 23 septembre 2008 consid. 9).

En l’espèce, outre que la procédure devant le Tribunal administratif est en règle générale écrite (art. 18 LPA), le dossier contient les éléments permettant à celui-ci de statuer sans audition de la recourante.

3. Le 17 mars 2009, est entrée en vigueur la nouvelle loi sur l'université (LU - C 1 30) qui a abrogé le règlement sur l'université du 7 septembre 1988 (RU - C 1 30.06). Les faits de la cause étant antérieurs à ces dates-ci, le recours doit être examiné au vu des dispositions légales qui prévalaient alors, soit en particulier l'art. 63D al. 3 aLU, selon lequel les conditions d'élimination étaient fixées par le aRU et le doyen devait, en prononçant l'élimination d'un étudiant, tenir compte des circonstances exceptionnelles telles qu'elles étaient prévues par l'art. 22 al. 3 aRU (ATA/161/2009 du 31 mars 2009 ; ACOM/104/2008 du 11 novembre 2008).

4. Il n’est pas contesté que la recourante, admise à la faculté des SES à titre conditionnel pour l’année académique 2007-2008, avec un délai au 30 septembre 2008 pour réussir la première partie du baccalauréat universitaire de géographie, n’a pas obtenu la moyenne générale nécessaire à l’issue de la dernière session d’examen d’août-septembre 2008. La condition pour la poursuite de son cursus universitaire n’étant pas réalisé, la décision d’exclusion est ainsi justifiée dans son principe (art. 2 al. 2 let. a et 3 et art. 21 al. 1 let. b du règlement d’études du baccalauréat universitaire 2007-2008 de la faculté des SES ; ci-après : le règlement).

5. Reste à examiner si les circonstances alléguées par la recourante peuvent être qualifiées d’exceptionnelles, la jurisprudence développée par la CRUNI demeurant applicable.

a. Selon l’article 22 al. 3 aRU, il doit être tenu compte des situations exceptionnelles lors d’une décision d’élimination. Selon une jurisprudence constante, une situation peut être qualifiée d’exceptionnelle lorsqu’elle est particulièrement grave et difficile pour l’étudiant. Lorsque de telles circonstances sont retenues, la situation ne revêt un caractère exceptionnel que si les effets perturbateurs ont été dûment prouvés par le recourant. Cette jurisprudence est conforme au principe de l’instruction d’office (ACOM/41/2005 du 9 juin 2005 consid. 7c ; ACOM/13/2005 du 7 mars 2005 consid. 5). Les autorités facultaires disposent dans ce cadre d’un large pouvoir d’appréciation, dont la CRUNI ne censure que l’abus (ACOM/1/2005 du 11 janvier 2005 ; ACOM/102/2004 du 12 octobre 2004 et les références citées).

b. De graves problèmes de santé sont considérés comme des situations exceptionnelles (ACOM/50/2002 du 17 mai 2002) à condition toutefois que les effets perturbateurs aient été prouvés et qu’un rapport de causalité soit démontré par l’étudiant (ACOM/119/2002 du 1er novembre 2002). Ainsi, la CRUNI n’a pas retenu de circonstances exceptionnelles dans le cas d’une étudiante invoquant des problèmes de santé mais n’ayant fourni aucune indication concernant la maladie et son impact sur le bon déroulement de ses études (ACOM/71/2005 du 22 novembre 2005). Elle a jugé de même dans le cas d’un étudiant ne s’étant pas présenté aux examens et invoquant par la suite plusieurs arguments, notamment le fait qu’il suivait une psychothérapie (ACOM/23/2006 du 28 mars 2006 ; ACOM/72/2005 du 1er décembre 2005). Enfin, la CRUNI n’a pas davantage admis les circonstances exceptionnelles dans le cas d’un étudiant ayant connu des problèmes de santé, mais dont les effets perturbateurs n’étaient pas établis lors des sessions d’examens concernées (ACOM/75/2005 du 15 décembre 2005). Les circonstances exceptionnelles n’étaient pas davantage réalisées dans le cas d’une étudiante ayant souffert de céphalées et de vomissements avant une session d’examen et ayant par ailleurs produit une attestation médicale faisant mention d’une situation psychologique difficile et d’une fragilité en lien avec sa situation familiale, l’intéressée n’ayant pas démontré que ces problèmes entraient dans la catégorie des effets perturbateurs particulièrement graves (ACOM/87/2008 du 26 août 2008).

En l’espèce, les attestations médicales produites par la recourante décrivent un état clinique de deuil et un déni défensif ayant certainement participé aux difficultés sur le plan universitaire rencontrées au cours des deux premières années académiques, en faculté des lettres, soit en 2005-2006 et 2006-2007. Une amélioration s’est ensuite produite, et aucune des deux attestations n’envisage que l’échec à la session d’août-septembre 2008 soit en relation avec son état de santé, alors même qu’elles sont postérieures à celui-ci. Cela est d’ailleurs confirmé par l’évolution des résultats de la recourante, à l’exception de l’examen d’économie politique.

6. S’agissant de ce dernier, Mme A______ fait état pour la première fois devant le tribunal de céans du changement intervenu dans l’administration de l’examen et des conséquences qu’elle en tire. A cet égard, il y a lieu de rappeler que seule la décision sur opposition est sujette à recours, selon l’article 21 du règlement interne relatif aux procédures d'opposition et de recours du 14 juin 2007 (RIOR). Cette dernière détermine l’objet de la contestation qui peut être déférée en justice par voie de recours et délimite en conséquence le cadre du litige soumis à l’autorité chargée de statuer. Ainsi, celle-ci ne saurait examiner les prétentions et les griefs qui n’ont pas fait l’objet du prononcé de l’instance inférieure, sous peine de détourner sa mission de contrôle, de violer la compétence fonctionnelle de cette autorité-ci, d’enfreindre le principe de l’épuisement des voies de droit préalable et, en définitive, de priver les parties d’un degré de juridiction (ACOM/41/2008 du 9 avril 2008 ; ACOM/28/2008 du 6 mars 2008 ; ACOM/90/2007 du 5 novembre 2007). Le Tribunal administratif ne saurait ainsi entrer en matière sur des circonstances qui auraient pu être alléguées et étayées devant l’instance inférieure, ce d’autant plus que la recourante n’a pas même évoqué cet aspect dans son courriel au professeur enseignant l’économie politique, le 22 septembre 2008, ni dans son courrier du 26 septembre 2008 au doyen de la faculté des SES.

7. Au vu de ce qui précède, le Tribunal administratif retiendra qu’en considérant que les faits allégués par la recourante n’étaient pas constitutifs de circonstances exceptionnelles au sens de l’art. 22 al. 3 aRU, l’intimée n’a pas mésusé de son pouvoir d’appréciation.

8. Mal fondé, le recours sera rejeté. Un émolument CHF 300.- sera mis à la charge de la recourante (art. 10 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 décembre 2008 par Madame A______ contre la décision sur opposition de la faculté des sciences économiques et sociales de l'université de Genève du 6 novembre 2008 ;

 

au fond :

le rejette ;

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 300.- ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Nicolas Dinichert, avocat de la recourante ainsi qu'à l'Université de Genève et la faculté des sciences économiques et sociales.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. a.i. :

 

 

F. Rossi

 

le président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :