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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2013/2023

JTAPI/906/2024 du 12.09.2024 ( LCI ) , REJETE

recours terminé sans jugement

Descripteurs : ZONE AGRICOLE
Normes : LAT.24c; OAT.34
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2013/2023 LCI

JTAPI/906/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 12 septembre 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Damien BOBILLIER, avocat, avec élection de domicile

contre

Monsieur B______, représenté par Me Karin ETTER, avocate, avec élection de domicile

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

 


EN FAIT

1.             Le ______ 1988, l'autorisation de construire DD 1______ a été délivrée à Monsieur C______, ancien propriétaire de la parcelle n° 2______ de la commune de D______ (ci-après: la commune), sise en zone agricole, en majorité en surface d'assolement. L'autorisation de construire précitée visait la construction d'une pépinière avec serres tunnel, vestiaires et bureau de vente.

Depuis le 23 novembre 2000, Monsieur B______ est propriétaire de la parcelle n° 2______.

2.             Monsieur A______ a exploité cette parcelle sous la dénomination « E______» jusqu'à sa mise en faillite le 9 novembre 1995. Cette entreprise a été radiée du registre du commerce à la clôture de la procédure de faillite le ______ 2004.

Depuis décembre 2020, M. A______ exploite une entreprise individuelle en tant que pépiniériste et horticulteur. L'entreprise est également active dans le conseil et la création d'espaces verts, dans le conseil en environnement, dans le suivi de chantier et dans tout commerce de gros et de détail.

3.             Le ______ 2022, par le biais de son mandataire, M. A______ a sollicité du département du territoire (ci-après: le département) la délivrance d'une autorisation de construire pour l'édification de locaux, serres et couvert pour pépinière sur la parcelle n° 2______.

4.             Dans le cadre de son instruction, plusieurs instances de préavis ont été sollicitées, notamment :

-                 le ______ 2022, la direction des autorisations de construire (ci-après: DAC) a requis la production de pièces complémentaires et la modification du projet, notamment pour le mettre en conformité au règlement concernant l'accessibilité des constructions et installations diverses du 29 janvier 2020 (RACI – L 5 05.06) ;

-                 le 11 mai 2022, la commune s'est prononcée favorablement au projet, sans observations ;

-                 le 1er juin 2022, la commission d'architecture (ci-après: CA) s'est prononcée favorablement au projet, sous conditions ;

-                 le 7 juin 2022, l'office cantonal de l'agriculture et de la nature (ci-après : OCAN) a rendu un préavis défavorable sur la base du fait que M. A______ n'exerçait pas la profession d'agriculteur/horticulteur à titre principal et n'avait pas démontré être à la tête d'une exploitation agricole ou horticole, ni l'existence d'une telle structure. De plus, il n'était pas propriétaire de la parcelle et n'était pas au bénéfice d'un droit de superficie. Enfin, des constructions et installations destinées à fournir des services horticoles (activités de jardinier-paysagiste) n'étaient pas conformes à l'affectation de la zone ;

-                 le 9 août 2022, l'office de l'urbanisme (ci-après: OU) a émis un préavis défavorable, estimant que les aménagements projetés n'étaient pas conformes à l'affectation de la zone agricole et que les constructions projetées entraînaient une perte de près de 800 m2 de surfaces d'assolement. Les aménagements projetés ne pouvaient pas non plus bénéficier de la garantie de la situation acquise et ne répondaient pas aux principes de l'aménagement du territoire ou aux conditions de l'art. 24c al. 4 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700).

5.             Le 6 septembre 2022, en réponse aux préavis défavorables précités, M. A______ a produit le « formulaire A (Q1) : ouvrage pour une exploitation agricole », indiquant qu'il n'exerçait pas la profession d'exploitant agricole mais avait une activité de pépiniériste à 90%. Il a également expliqué qu'il avait repris l'ancienne activité de pépinière, qu'il était présent sur le site depuis 1988 et que les infrastructures, chemins et serres étaient déjà autorisés par la DD 1______. Il avait l'intention de reprendre une partie des cultures en méthode biologique pour élever des plantes indigènes. Les constructions projetées, dont le changement d'affectation était requis, étaient toutes existantes sur place depuis la DD 1______ (dalle, serres et chalet), de sorte qu'il n'y avait pas de perte de 800 m2 de surfaces d'assolement.

6.             De nouveaux préavis ont été sollicités, notamment:

-                 le 14 septembre 2022, la DAC a requis la modification du projet, toujours pour le mettre en conformité au RACI ;

-                 le 21 septembre 2022, la CA a émis un préavis favorable, avec dérogation selon l'art. 70 de la loi sur les constructions et les installations diverses du
14 avril 1988 (LCI - L 5 05) ;

-                 le 6 octobre 2022, l'OCAN a requis la production de pièces complémentaires. Le requérant devait démontrer l'existence d'une exploitation horticole et la viabilité économique de celle-ci en fournissant un business plan détaillé avec un concept de production et la séparation des éventuels revenus provenant de l'activité de paysagisme, celle-ci n'étant pas conforme à la zone. Il devait aussi démontrer que l'investissement prévu ne mettrait pas en péril la viabilité de l'exploitation, expliquer le besoin pour l'exploitation des diverses structures envisagées et les raisons pour lesquelles celles déjà autorisées n'étaient pas suffisantes. La production de divers justificatifs (copie du bail à ferme ou du droit de superficie, liste du parc machines avec indication de leur emplacement sur les plans et une copie de l'autorisation DD 1______) ;

-                 le 17 octobre 2022, l'OU a rendu un second préavis défavorable, considérant qu'aucun élément nouveau n'avait été apporté.

7.             Le 7 février 2023, M. A______ a fourni plusieurs justificatifs, soit notamment un business plan, un tableau de prévisions financières, des bilans 2020 et 2021 ainsi que la liste du parc de machines et les plans de leur emplacement.

8.             Sur la base de ces éléments, de nouveaux préavis ont été sollicités, notamment :

-                 le 8 février 2023, la DAC a requis la modification du projet, la rampe devait être conforme à l'art. 6 RACI (palier de 140 x 140) et le chalet devait être accessible ;

-                 le 3 mars 2023, l'OCAN a émis un préavis défavorable. La surface avancée en pépinière et le business plan présenté ne suffisaient pas à justifier une activité rentable de pépiniériste. De plus, le requérant n'exerçait pas la profession d'horticulteur à titre principal, son activité de paysagisme étant prépondérante. Il n'avait pas non plus apporté la preuve quant à la maitrise foncière de la parcelle et les constructions et installations destinées à fournir des services horticoles (paysagisme) n'étaient pas conformes à la zone ;

-                 le 7 mars 2023, l'OU s'est prononcé défavorablement au projet. Le requérant n'exerçait pas la profession d'horticulteur à titre principal et les aménagements n'étaient pas conformes à l'affectation de la zone. Seuls les aménagements extérieurs présents au 1er juillet 1972 pouvaient bénéficier de la garantie de la situation acquise. En outre, vu que les constructions existantes avaient été réalisées sous la DD 1______, délivrée le ______ 1988, elles ne pouvaient bénéficier de cette garantie et aucune modification ou agrandissement ne pouvait être autorisé.

9.             Le 15 mai 2023, faisant siens les préavis de l'OCAN et de l'OU précités, le département a refusé de délivrer l'autorisation de construire sollicitée.

10.         Par acte du 14 juin 2023, sous la plume de son conseil, M. A______ (ci-après: le requérant) a formé recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) concluant, à titre préalable, à ce que le tribunal l'autorise à compléter son recours, à titre principal, à l'annulation de la décision précitée, et subsidiairement au renvoi du dossier au département pour suite d'instruction et nouvelle décision, le tout sous suite de frais et dépens.

La situation du recourant était similaire à celle ayant fait l'objet de l'arrêt de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après: la chambre administrative) du 19 janvier 2021 (ATA/69/2021), dans lequel une autorisation de construire portant sur des installations d'un pépiniériste exerçant également la profession de paysagiste avait été confirmée. En reprenant intégralement les préavis défavorables de l'OCAN et de l'OU, le département apportait une solution complètement opposée et arbitraire.

Il était titulaire d'un CFC d'horticulteur, avec spécialisation dans les pépinières et il était actif dans les milieux associatifs des horticulteurs, dont le projet « Genève en Vert » visant à permettre, à terme, une rationalisation et une mutualisation des centres d'horticulture. Sa société F______ SA était active à la fois dans les pépinières, mais aussi dans les activités de paysagisme. Il avait déclaré qu'il souhaitait recentrer et développer ses activités dans les pépinières sous son propre nom, raison pour laquelle la demande d'autorisation de construire avait été déposée en son nom. La conclusion selon laquelle il n'exerçait pas la profession de pépiniériste à titre principal, respectivement que les constructions projetées serviraient à des activités de paysagiste, ne reposaient sur aucun élément concret et relevaient du procès d'intention.

En outre, hormis la référence toute générale à la surface prétendument insuffisante, ni l'OCAN ni le département n'avançaient la moindre critique du business plan ou n'évoquaient de motifs indiquant que l'activité n'était pas viable, alors qu'il avait produit un business plan démontrant le contraire, chiffres à l'appui, selon une approche très conservatrice.

Les constructions projetées prenaient place à l'emplacement prévu pour les constructions autorisées en 1988, de sorte qu'elles n'impliquaient pas de diminution des surfaces agricoles.

En conséquence, le département aurait dû s'écarter des préavis défavorables de l'OCAN et de l'OU, lesquels ne reposaient sur aucun motif concret ou étaient contredits par les pièces versées au dossier. Le département avait ainsi commis un excès négatif de son pouvoir d'appréciation, ainsi qu'une violation du principe d'égalité de traitement en traitant de manière différentes des situations identiques.

Compte tenu du dernier préavis de la DAC sollicitant la poursuite de l'instruction, en cas d'admission du recours, le dossier devrait théoriquement être renvoyé pour suite d'instruction. Cependant, la dérogation mentionnée par la DAC avait été admise par la CA et il s'engageait, en tant que de besoin, à ce que la rampe fût mise en conformité avec l'art. 6 RACI et que le chalet fût accessible, voire à faire inscrire une mention au Registre foncier.

11.         Le 18 août 2023, le département a transmis ses observations, accompagnées de son dossier. Il a conclu au rejet du recours.

Le recourant n'avait aucunement apporté la preuve de ses qualifications professionnelles ou de la maîtrise foncière, alors que cela lui incombait.

Dans le cadre de son analyse, l'OCAN s'était basé sur les documents produits par le recourant, en particulier sur le business plan, le tableau de prévision des finances et les bilans de 2020 et 2021. Il en ressortait que son activité était axée pour une partie prépondérante sur la prestation de services, soit l'achat et la vente de marchandises, et non sur la production de végétaux. Par exemple, dans ses bilans 2020 et 2021, le recourant avait chiffré à CHF 1'800.-, respectivement à CHF 0.-, le produit de la vente de marchandises par opposition à CHF 15'056.- et CHF 22'228.- pour le poste de vente de prestations. Il en était de même au niveau des prévisions pour l'année 2024, où la vente avait été chiffrée seulement à CHF 15'000.- et il était indiqué clairement que « ce chiffre [serait] complété par le commerce de plantes (achat/revente) pour un montant en 2024 de CHF 415'000.- ». Il ressortait également du site internet de son entreprise F______ SA, dont le siège se trouvait à l'adresse de la parcelle, au chemin G______, que l'activité principale s'articulait en majorité autour de la prestation de divers services de paysagisme (transplantation d'arbre, plantation et création de jardins, entretien, élagage, …). Son activité s'apparentait ainsi majoritairement à celle d'un jardinier-paysagiste, ce qui n'était pas conforme à l'affectation de la zone, comme l'avait retenu l'OCAN.

S'agissant de la surface suffisante qui devait être disponible, le recourant reconnaissait que la moitié de la parcelle était en friche. Ainsi, le chiffre de 1 ha qu'il avançait dans le formulaire A n'était pas représentatif de la réalité.

L'OCAN avait également pu constater que le recourant n'avait pas démontré que l'exploitation pourrait survivre à long terme. Un élément allant dans ce sens était les charges en personnel avancées, qui étaient beaucoup plus importantes par rapport aux revenus prévus. Dans le même sens, le fait que le recourant n'avait fourni aucun justificatif relatif à la maîtrise foncière ne permettait pas d'assurer la pérennité future de l'exploitation, ce d'autant que selon ses déclarations, la parcelle avait dû être vendue à M. B______ à la suite de la faillite de son entreprise. Au surplus, pour satisfaire aux exigences de conformité à la zone, il faudrait démontrer une production effective et non simplement intentionnelle, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

Le recourant n'avait pas non plus démontré en quoi les constructions projetées étaient nécessaires à l'exploitation ou qu'il n'était pas possible de poursuivre l'activité dans les bâtiments déjà autorisés dans le cadre de la DD 1______.

Il n'était donc pas possible d'affirmer que le préavis de l'OCAN ne se basait pas sur des éléments concrets ou n'était pas suffisamment motivé. Il en était de même du préavis de l'OU. Une analyse minutieuse du dossier avait été effectuée et le refus était ainsi pleinement justifié.

Sous l'angle de l'égalité de traitement, dans l'arrêt de la chambre administrative ATA/69/2021 cité par le recourant, l'OCAN avait fondé son préavis favorable sur le fait que le requérant exerçait l'activité de pépiniériste et exploitait environ 3.6 ha de pépinière, que son exploitation serait reprise par sa fille durant les années à venir, que la surélévation projetée servirait notamment au stockage du matériel de la pépinière et était nécessaire au bon fonctionnement de l'exploitation, raison pour laquelle la chambre administrative avait retenu que les exigences de l'art. 34 OAT étaient remplies. Or, la situation du recourant était différente, que ce fût au niveau de la maîtrise foncière de la parcelle, de la pérennité de l'exploitation ou de la compatibilité de son activité avec la zone d'affectation.

12.         Le 16 octobre 2023, le recourant a répliqué, persistant dans ses conclusions et son argumentation. Il a conclu à ce que le tribunal ordonne son audition personnelle ainsi que celle de M. B______ pour confirmer l'existence d'un contrat de bail oral depuis plus de 30 ans.

Les pièces produites durant la procédure démontraient sans ambiguïté sa formation, ses compétences et son expérience, depuis plus de 30 ans, en tant qu'horticulteur et pépiniériste. Au surplus, dans le cadre de la DD 1______, l'OCAN, alors dénommé le service de l'agriculture, avait émis une attestation certifiant les qualifications et l'expérience du requérant, mentionnant expressément la parcelle n° 2______.

Dans son appréciation des éléments financiers, le département omettait que le business plan précisait que la pépinière avait pour objectif de vendre des haies et des arbres, principalement à des professionnels. Ces plantes n'atteignaient pas leur taille optimale en 1 ou 2 ans, raison pour laquelle il avait expliqué qu'une transition aurait lieu sur une période de 5 à 10 ans et que l'activité de pépiniériste représenterait à terme au moins 90% de l'activité. Il omettait également que le recourant avait requis l'autorisation litigieuse en son nom propre, et non en celui de sa société et qu'il exploitait déjà la parcelle comme pépiniériste sous une raison individuelle. Le siège de la société F______ SA serait à terme déplacé et refuser l'autorisation de construire pour ce motif serait disproportionné. Au demeurant, la condition de l'activité principale pouvait, le cas échéant, faire l'objet d'une condition dans la décision d'autorisation de construire permettant d'assurer son respect.

L'argument lié à la démonstration d'une production effective et non d'une production intentionnelle reviendrait à exclure de facto tout nouvel agriculteur ou horticulteur qui souhaiterait démarrer une nouvelle activité. Or, c'était seulement lorsque les installations adéquates étaient disponibles qu'une activité pouvait réellement être lancée et qu'une production effective pourrait être démontrée. Actuellement, les serres et le chalet d'accueil existaient. La dalle en béton de la DD 1______ avait été coulée mais les couverts, hangar et bâtiments n'avaient pas été érigés. Les machines agricoles étaient dès lors exposées aux intempéries et la parcelle faisait régulièrement l'objet d'effractions avec pour résultat des dégradations du matériel et des plants et semences entreposés à l'air libre.

Le préavis défavorable de l'OU partait uniquement de la prémisse que les installations visées seraient utilisées pour des activités de paysagisme et non pour celles de la pépinière, ce qui relevait du procès d'intention. Sachant que le même type de construction avait été autorisé en 1988, au même endroit avec la même implantation, avec une diminution d'emprise au sol (absence de réfectoire/vestiaire au nord de la parcelle), ce préavis était en contradiction avec l'autorisation de construire DD 1______.

Il était au bénéfice d'un bail oral pour la parcelle depuis plus de 30 ans et rien ne permettait de présager une modification de cette situation pour l'avenir. Le propriétaire actuel pourrait le confirmer.

Sous l'angle de la nécessité des constructions, le département partait de l'idée que les bâtiments autorisés par la DD 1______ avaient été construits, alors que son mandataire avait exposé dans son courrier d'accompagnement de la demande d'autorisation de construire que le projet litigieux visait à construire une partie des bâtiments autorisé dans la DD 1______ mais non réalisés, hormis la dalle en béton. Hormis les trois serres destinées à la culture et le chalet d'accueil, il n'y avait donc aucun bâtiment permettant d'entreposer à l'abri le matériel, les machines, le produit de la culture ou encore les semences et les plants. La pépinière s'étendrait au final sur 1.15 ha. Un telle surface impliquait de pouvoir engager du personnel – et donc de disposer des infrastructures nécessaires à leur assurer des conditions de travail décentes – mais également l'utilisation de machines horticoles et agricoles. La nécessité des constructions litigieuses était ainsi évidente.

S'agissant de la pérennité économique de l'exploitation, son développement et la réhabilitation des friches impliquaient de pourvoir disposer des bâtiments projetés et le business plan faisait état d'un développement progressif dans la durée, entraînant en parallèle une réduction des marchandises achetées. La viabilité de l'exploitation devait par conséquent être examinée sur le long terme et rien ne laissait à ce stade présager qu'elle serait en péril. Il convenait de prendre en compte que la surface totale à sa disposition dépassait 1 ha (1.15 ha) et dans l'arrêt ATA/69/2021, la surface devant accueillir les bâtiments était uniquement de
6'403 m2, bien que l'exploitant concerné disposât de cinq parcelles pour un total de 3 ha. Enfin, les circonstances d'une faillite, 30 ans auparavant, alors que les bâtiments n'avaient pas pu être construits peu de temps après l'acquisition de la parcelle, ne pouvaient préjuger de la réussite d'une nouvelle exploitation dans des circonstances différentes.

Sa situation et celle objet de l'arrêt ATA/69/2021 étaient identiques. Dans cet arrêt, le recourant utilisait lui aussi des serres et tunnels pour son activité de paysagisme, subissait régulièrement des vols et des dégradations, et achetait également des plants en plus de sa propre production, avec une activité de pépiniériste se déroulant sur plusieurs sites pour atteindre 3 ha. En outre, contrairement à la situation objet de l'arrêt précité, âgé de 57 ans, le recourant n'envisageait pas de stopper son activité avant au moins une décennie et sa succession et la pérennité de l'entreprise serait examinée ultérieurement. Il employait également uniquement quatre employés. Au besoin, il sollicitait du tribunal qu'il ordonne au département la production du dossier de l'autorisation de construire objet de l'arrêt ATA/69/2021.

Le département ne fondait plus son refus sur l'art. 24c LAT. Au demeurant, les constructions existantes bénéficiaient de la garantie de la situation acquise, tant en vertu de la DD 1______ qu'au vu du changement de loi annoncé dans la 2ème étape de révision de la LAT (inscription de la prescription trentenaire en zone agricole).

13.         Par courriers séparés des 7 novembre 2023, les parties ont d'entente sollicités du tribunal qu'il prononce une suspension de la procédure pour une période de trois mois afin d'entamer des discussions et tenter de trouver une solution à l'amiable.

14.         Par décision du 23 novembre 2023 (DITAI/518/2023), le tribunal a prononcé la suspension de la procédure pour une durée de trois mois.

15.         Par courrier du 23 février 2024, le recourant a sollicité une nouvelle suspension de la procédure de six mois, des discussions étaiant encore en cours.

16.         Le 11 mars 2024, M. B______, sous la plume de son conseil, a informé le tribunal s'opposer à une nouvelle suspension de la procédure.

Le département lui avait intimé l'ordre de remettre en état la parcelle n° 2______ par décision du 18 décembre 2020, notamment par l'évacuation d'un certain nombre d'objets qui s'y trouvaient. Il avait mis en conformité la partie de la parcelle qu'il occupait et avait répercuté auprès du recourant le reste de la décision ordonnant la remise en état de la partie nord de la parcelle louée à ce dernier. Il lui avait demandé de s'exécuter dans le délai imparti, faute de quoi le bail serait résilié. En l'absence d'exécution, le bail avait été résilié par formule officielle le 21 mai 2021. Le recourant avait alors contesté le congé et la procédure était en cours par devant le Tribunal des baux et loyers. Il devait répondre à la constatation de la nullité du congé, en annulation du congé et en prolongation du bail d'ici au 18 mars 2024. Il avait envoyé une preuve photographique de la remise en état de la partie de la parcelle qu'il occupait et avait obtenu des délais pour les travaux encore à réaliser. En raison de l'absence de mise en conformité de la partie de la parcelle occupée par le recourant, le département lui avait infligé une amende de CHF 500.- et menaçait de continuer à lui en infliger d'autres le cas échéant. Puisque le département refusait de suspendre sa demande de mise en conformité, malgré les explications fournies, une nouvelle suspension de six mois n'était pas admissible.

17.         Le 21 mars 2024, le département s'est déterminé sur la nouvelle demande de suspension formulée par le recourant.

La procédure d'infraction I-3______ à l'égard de M. B______ et la décision de refus d'octroi de l'autorisation de construire litigieuse étaient distinctes et indépendantes. En outre, la décision de remise en état du ______ 2021 – laquelle avait annulé et remplacé la décision du ______2020 – était aujourd'hui en force, de sorte qu'il était impossible de mettre en place un moratoire portant sur les nouvelles amendes prononcées en lien avec cette procédure d'infraction pendant la durée de la suspension. Enfin, la position de M. B______ impliquait que la suspension ne pouvait être maintenue.

18.         Le 2 avril 2024, M. B______ a proposé que les éventuelles amendes à venir fussent adressée directement au recourant. Il joignait également un plan de la parcelle précisant les parties occupées par lui et le recourant.

19.         Le 10 avril 2024, dans le cadre de la demande de suspension de la procédure, le recourant a indiqué au tribunal qu'une partie des constructions visées par la procédure d'infraction (par exemple la dalle en béton) faisait précisément l'objet de la demande d'autorisation de construite litigieuse et visant leur régularisation. Si le département refusait la suspension des amendes ultérieures, il s'engageait à s'acquitter de leur montant et elles pourraient lui être directement adressées. Il avait remboursé à M. B______ le montant de l'amende déjà infligée en date du 21 mars 2024.

20.         Le 10 avril 2024, le département s'est opposé à une nouvelle suspension de la procédure et a sollicité la reprise de l'instruction.

21.         Par courrier du 27 mai 2024, le tribunal a prononcé la reprise de l'instruction.

22.         Le 18 juin 2024, M. B______ a transmis ses observations finales. Il ne s'opposait pas au principe de la suspension, pour autant qu'il ne fut pas accablé par de nouvelles amendes et demandes du département. Au fond, en tant que propriétaire de la parcelle, il n'avait pas d'objection de principe quant à la demande d'autorisation de construire litigieuse.

23.         Le 18 juin 2024, le département a dupliqué, persistant dans ses conclusions et son argumentation.

Les conditions de l'art. 34 OAT n'étaient pas remplies. Le recourant ne démontrait toujours pas que la situation de son exploitation était pérenne au niveau financier, ce d'autant qu'il était âgé de 57 ans et qu'il n'indiquait pas que quelqu'un serait à même de reprendre son activité.

Par ailleurs, la modification de la LAT ne lui était d'aucun secours, car celle-ci n'était pas encore en vigueur. En outre, il n'existait pas d'intérêt public à une application immédiate de la nouvelle loi, de sorte que l'autorité de recours devait appliquer le même droit que celui appliqué par l'autorité précédente pour prononcer la décision litigieuse.

S'agissant de sa formation, il prenait bonne note des nouvelles attestations produites. Ces pièces n'étaient en revanche pas de nature à modifier la situation actuelle, dès lors que le recourant ne remplissait pas les autres conditions relatives à une exploitation agricole.

Concernant sa proposition d'imposer au titre de condition assortie à l'autorisation de construire que les constructions autorisées ne pourraient servir qu'à l'exploitation de pépinière, à l'exclusion des activités de paysagisme, cette manière de procéder avait été expressément exclue par la jurisprudence, la condition de l'activité exercée en zone agricole étant un élément essentiel au sens de l'art. 34 OAT, qui devait être réalisée au moment de la délivrance de l'autorisation et non lors d'un examen ultérieur, une fois l'autorisation de construire octroyée.

24.         Le détail des écritures et des pièces produites sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Pour qu'un recours soit - ou demeure - recevable, il faut notamment que son auteur ait un intérêt digne de protection à ce que la décision attaquée soit annulée ou modifiée, ce qui suppose notamment que ledit intérêt soit actuel et pratique (art. 60 al. 1 let b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 LPA - E 5 10 ; ATF 138 II 42 consid. 1 ; 135 I 79 consid. 1 ; 131 II 361 consid. 1.2 ; 128 II 34 consid. 1b ; ATA/201/2017 du 16 février 2017 consid. 2).

L'existence d'un intérêt actuel s'apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours, étant précisé que s'il s'éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement rayé du rôle (cf. ATF 139 I 206 consid. 1.1 ; 137 I 23 consid. 1.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 4D_1/2016 du 19 janvier 2016 ; 2C_120/2014 du 18 juillet 2014 consid. 1.2).

3.             En l'espèce, s'il semble, d'après les différents courriers du propriétaire de la parcelle, que le bail du recourant a été résilié, il convient cependant de considérer que ce dernier conserve un intérêt digne de protection à l'admission du recours, dès lors que l'issue de la procédure devant le Tribunal des baux et loyers est incertaine et pourrait potentiellement arriver au constat d'une résiliation injustifiée du bail. À cela s'ajoute que le propriétaire de la parcelle a expressément indiqué dans son courrier du 18 juin 2024, qu'il n'avait pas d'objection de principe quant à la demande d'autorisation de construire litigieuse. Partant, le recourant conserve ainsi un intérêt actuel et pratique à l'admission du recours, ce qu'aucune des parties ne conteste.

4.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

5.             À titre préalable, le recourant sollicite sa comparution personnelle ainsi que l'audition de M. B______ dans le but de clarifier l'existence de son bail oral depuis plus de 30 ans. Il sollicite également du tribunal qu'il ordonne la production du dossier de la DD 1______.

6.             Le droit d’être entendu, garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), comprend notamment le droit pour les parties de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Ce droit ne s’étend toutefois qu’aux éléments pertinents pour décider de l’issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n’empêche pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3).

Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit d'être entendu oralement (cf. not. art. 41 in fine LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_668/2020 du 22 janvier 2021 consid. 3.3 ; 2C_339/2020 du
5 janvier 2021 consid. 4.2.2 ; ATA/1637/2017 du 19 décembre 2017 consid. 3d), ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2019 du 12 septembre 2019 consid. 4.1 ; 2C_1004/2018 du 11 juin 2019 consid. 5.2.1). Ces principes s’appliquent également à la tenue d’une inspection locale en l’absence d’une disposition cantonale qui imposerait une telle mesure d’instruction, étant précisé qu’une telle disposition n’existe pas en droit genevois (ATF 120 Ib 224 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_243/2013 du 27 septembre 2013 consid. 3.2.1 ; ATA/285/2021 du 2 mars 2021 consid. 2b).

7.             En l'espèce, concernant la demande de comparution personnelle des parties, il sera relevé que le recourant, tout comme le département, a eu l’occasion de s’exprimer par écrit, d’exposer son point de vue et de produire toutes les pièces qu’il estimait utiles à l’appui de ses allégués par le biais des écritures usuelles. Il ne précise pas, à l'appui de sa demande d'audition, quels types d'explication devraient encore être données oralement, qu'il n'aurait pas été en mesure de développer par écrit. Par ailleurs, les documents versés au dossier, notamment les plans de l'autorisation de construire contestées et les éléments financiers, permettent de visualiser les constructions concernées et leur caractéristiques particulières. Concernant en particulier l'audition de M. B______, ce dernier a indiqué dans son courrier du 18 juin 2024 qu'il n'avait pas d'objection de principe quant à la demande d'autorisation de construire litigieuse. Son audition est demandée par le recourant afin de clarifier l'existence d'un bail à ferme oral entre ce dernier et M. B______. Or, comme il sera discuté ci-après, cet élément n'est en soi pas décisif à lui seul pour trancher l'issue de la cause et peut souffrir de rester en l'état indécise.

Concernant la demande de production du dossier complet de la DD 1______, le dossier contient déjà les plans visés ne varietur de cette autorisation, ce qui suffit pour permettre au tribunal de céans de statuer en pleine connaissance de cause des constructions précédemment autorisées par cette autorisation de construire délivrée en 1988.

Partant, il n’y a pas lieu de procéder aux mesures d’instruction requises, celles-ci n'étant au demeurant pas obligatoires.

8.             Le recourant prétend que les conditions de l'art. 34 OAT seraient remplies.

9.             Selon l'art. 1 al. 1 let. a de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), nul ne peut, sur tout le territoire du canton, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation. De même n'est-il pas possible de modifier, même partiellement, le volume, l'architecture, la couleur, l'implantation, la distribution ou la destination d'une construction ou d'une installation sans autorisation (art. 1 al. 1 let. b LCI).

10.         Selon l'art. 22 LAT, aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente (al. 1). L'autorisation est délivrée si : la construction ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone (let. a) ; le terrain est équipé (let. b, al. 2). Le droit fédéral et le droit cantonal peuvent poser d'autres conditions (al. 3).

11.         Selon l'art. 16 al. 1 LAT, les zones agricoles servent à garantir la base d'approvisionnement du pays à long terme, à sauvegarder le paysage et les espaces de délassement et à assurer l'équilibre écologique; elles devraient être maintenues autant que possible libres de toute construction en raison des différentes fonctions de la zone agricole et comprennent (let. a) les terrains qui se prêtent à l'exploitation agricole ou à l'horticulture productrice et sont nécessaires à l'accomplissement des différentes tâches dévolues à l'agriculture, ou (let. b) les terrains qui, dans l'intérêt général, doivent être exploités par l'agriculture. Il importe, dans la mesure du possible, de délimiter des surfaces continues d'une certaine étendue (art. 16 al. 2 LAT). Dans leurs plans d'aménagement, les cantons tiennent compte de façon adéquate des différentes fonctions des zones agricoles (art. 16 al. 3 LAT).

12.         Sont conformes à l'affectation de la zone agricole les constructions et installations qui sont nécessaires à l'exploitation agricole ou à l'horticulture productrice (art. 16a al. 1 LAT) et qui servent au développement interne d'une exploitation agricole ou d'une exploitation pratiquant l'horticulture productrice sont conformes à l'affectation de la zone (art. 16a al. 2 LAT).

Aux termes de l'art. 20 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30), la zone agricole est destinée à l'exploitation agricole ou horticole. Ne sont autorisées en zone agricole que les constructions et installations qui sont destinées durablement à cette activité et aux personnes l'exerçant à titre principal (let. a) ; respectent la nature et le paysage
(let. b) ; respectent les conditions fixées par les art. 34 ss OAT (let. c).

13.         La zone agricole est en principe inconstructible. Aussi, le fait qu'une construction soit reconnue conforme à l'affectation de la zone ne signifie pas encore que le permis doit être délivré. En effet, l'autorité compétente doit examiner en premier lieu si la nouvelle activité peut être réalisée dans les locaux existants; si tel n'est pas le cas, elle doit en outre vérifier que la nouvelle construction n'est pas surdimensionnée par rapport à l'utilisation envisagée et les besoins de l'exploitation et qu'aucun intérêt prépondérant ne s'oppose à l'implantation du nouveau bâtiment à l'endroit prévu (art. 34 al. 4 OAT ; ATF 129 II 413 consid. 3.2, arrêt du Tribunal fédéral 1C_631/2019 consid. 2.4.5).

14.         L'art. 34 OAT précise que sont conformes à l'affectation de la zone agricole les constructions et installations qui servent à l'exploitation tributaire du sol ou au développement interne (al. 1). Sont en outre conformes à l'affectation de la zone les constructions et installations qui servent à la préparation, au stockage ou à la vente de produits agricoles ou horticoles (al. 2) : si ces derniers sont produits dans la région et que plus de la moitié d'entre eux proviennent de l'exploitation où se trouvent lesdites constructions et installations ou d'exploitations appartenant à une communauté de production (let. a) ; si la préparation, le stockage ou la vente ne revêt pas un caractère industriel (let. b) ; et si l'exploitation où se trouvent lesdites constructions et installations conserve son caractère agricole ou horticole (let. c). Selon l'al. 4 de cette disposition, une autorisation ne peut être délivrée que : si la construction ou l'installation est nécessaire à l'exploitation en question (let. a) ; si aucun intérêt prépondérant ne s'oppose à l'implantation de la construction ou de l'installation à l'endroit prévu (let. b), et s'il est prévisible que l'exploitation pourra subsister à long terme (let. c).

En exigeant que la construction soit nécessaire à l'exploitation en cause, l'art. 34 al. 4 let. a OAT (qui reprend la condition posée à l'art. 16a al. 1 LAT) entend limiter les constructions nouvelles à celles qui sont réellement indispensables à l'exploitation agricole ou viticole afin de garantir que la zone agricole demeure une zone non constructible. La nécessité de nouvelles constructions s'apprécie en fonction de critères objectifs. Elle dépend notamment de la surface cultivée, du genre de cultures et de production (dépendante ou indépendante du sol), ainsi que de la structure, de la taille et des nécessités de l'exploitation (arrêt du Tribunal fédéral 1C_618/2014 du 29 juillet 2015 consid. 4.1 in RDAF 2015 I p. 499). En définitive, les constructions doivent être adaptées, notamment par leur importance et leur implantation, aux besoins objectifs de l'exploitation en cause (ATF 129 II 413 consid. 3.2 ; 125 II 278 consid. 3a ; 123 II 499 consid. 3b/cc ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_58/2017 du 18 octobre 2018 consid. 5.3.1; 1C_457/2017 du 25 mars 2019 consid. 5). Le critère de la nécessité implique aussi que les intérêts en présence soient appréciés et mis en balance. L'implantation et la conception architecturale de la construction ne doivent contrevenir à aucun intérêt prépondérant (art. 34 al. 4 let. b OAT). L'appréciation doit se faire à l'aune des buts et principes énoncés aux art. 1 et 3 LAT (arrêts du Tribunal fédéral 1C_618/2014 du 29 juillet 2015 consid. 4.1, in RDAF 2015 I p. 499 ; 1C_170/2019 du 9 avril 2020 consid. 3.1). Dans tous les cas, vu l'important intérêt public à éviter la dispersion des constructions, les bâtiments et installations doivent être regroupés autant que possible
(« Konzentrationsprinzip » ; ATF 141 II 50 consid. 2.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_341/2019 du 24 août 2020 consid. 3.1.3 et les références citées).

15.         L'art. 34 al. 1 et 2 OAT, s'appuyant sur la législation agricole, définit ce qui relève de l'agriculture et de l'horticulture productrice, à savoir : la production de denrées se prêtant à la consommation et à la transformation et provenant de la culture de végétaux et de la garde d'animaux de rente ; l'exploitation de surfaces proches de leur état naturel ; la préparation, le stockage ou la vente de produits agricoles ou horticoles. Pour être conforme à la zone agricole, l'horticulture doit, comme l'exploitation agricole, être axée sur la production. Du point de vue de l'aménagement du territoire, elle ne constitue qu'un secteur de l'exploitation agricole : celui de la culture végétale agricole. Ne tombe pas sous le coup de l'art. 16 al. 1 let. a LAT, l'horticulture qui relève, non pas de l'exploitation agricole, mais du secteur de la construction (activité de jardinier-paysagiste ; Alexander RUCH/Rudolf MUGGLI, Commentaire pratique LAT : Construire hors zone à bâtir, 2017, n. 21 et 23 ad art. 16 LAT et n. 12 ss ad art. 16a LAT).

En d'autres termes, l'horticulture productrice - il s'agit de la même notion que celle figurant aux art. 3 al. 2 de la loi sur l'agriculture du 29 avril 1998 (LAgr - RS 910.1) et 7 al. 2 de la loi fédérale sur le droit foncier rural du 4 octobre 1991 (LDFR - RS 211.412.11) - est une activité basée sur la culture de végétaux. Les exploitations pratiquant l'horticulture productrice sont des exploitations dans lesquelles on sème, plante et fait croître de végétaux. L'horticulture productrice est à distinguer des entreprises actives dans les secteurs de transformation, de vente et de services en rapport avec l'horticulture (Office fédéral du développement territorial ARE, Explications relatives à l'OAT et recommandations pour la mise en œuvre (200/2001), version au 23 février 2007, p. 28).

Seul peut être conforme à l’affectation de la zone ce qui sert aux besoins de construction de ces activités (RUCH/MUGGLI, ad. Art. 16a LAT n. 12). Les constructions et installations destinées à fournir des services horticoles ne sont pas conformes à l’affectation de la zone agricole, quand bien même de nombreux agriculteurs pourraient exercer une telle activité à titre accessoire (RUCH/MUGGLI, ad. Art. 16a LAT n. 15; Waldmann/Hänni, Handkommentar RPG, art. 16a N. 9 avec renvois). Pour revêtir un but agricole ou horticole, il est en principe indifférent que l’agriculture ou l’horticulture productrice soit exercée à titre principal ou accessoire, voire dans le cadre d’une entreprise agricole au sens des art. 5 ou 7 LDFR. Ces distinctions peuvent néanmoins jouer un rôle lorsque se pose la question du critère de la nécessité (RUCH/MUGGLI, ad. Art. 16a LAT n. 16).

16.         En application de l'art. 34 al. 2 let. b OAT, le Tribunal fédéral a notamment considéré que cette condition était remplie s'agissant de la construction, en zone agricole, d'un hangar pour machines agricoles et d'une halle pour le stockage et le triage de pommes de terres et légumes, comprenant des locaux frigorifiques, un local de préparation équipé d'une machine de tri, un dépôt, un local matériel, un local technique, des vestiaires ainsi qu'un important quai de chargement. Il a notamment relevé que la main-d'oeuvre sur l'exploitation serait constituée des deux requérants, d'un collaborateur familial, de deux employés à l'année et de deux à trois temporaires (de deux à six mois par an). Le stockage et le conditionnement portaient sur les propres récoltes des requérants. Ce faisant, ces derniers ne changeaient pas la nature principale de leur activité, à savoir la culture. Il s'agissait uniquement de faciliter l'étape de la vente de leur production agricole, celle-ci n'étant pas transformée, mais uniquement triée, conservée et conditionnée en gros. Les nouvelles installations ne donnaient ainsi pas une vocation industrielle à leur exploitation (arrêt du Tribunal fédéral 1C_58/2017 précité consid. 5.1).

Quant au critère de l'art. 34 al. 2 let. c OAT prévoyant que l'exploitation doit conserver son caractère agricole, l'ARE donne pour seule indication, dans ses explications relatives à l'OAT, l'exemple de constructions et installations destinées précisément à la transformation de pommes de terre en pommes chips, celles-ci n'ayant pas leur place en zone agricole dès lors qu'elles modifieraient de façon déterminante le caractère agricole de l'exploitation (arrêt du Tribunal fédéral 1C_58/2017 précité consid. 5.2).

17.         Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi. L'autorité reste libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur. La LCI ne prévoit pas de hiérarchie entre les différents préavis requis. Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/462/2020 du 7 mai 2020 consid. 18 et les références citées).

18.         Chaque fois que l'autorité administrative suit les préavis des instances consultatives, les juridictions de recours observent une certaine retenue, lorsqu'il s'agit de tenir compte des circonstances locales ou de trancher de pures questions d'appréciation (ATF 136 I 265 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_579/2015 du 4 juillet 2016 consid. 5.1). Elles se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (arrêt du Tribunal fédéral 1C_891/2013 du 29 mars 2015 consid. 8.2 ; ATA/258/2020 du 3 mars 2020 consid. 3c).

19.         Par exception au principe selon lequel les préavis ne lient pas l'autorité décisionnaire (cf. ci-dessus consid. 17), l'art. 82 al. 2 LCI prévoit qu'en cas d’application des art. 34 à 38 et 40 OAT, le département ne peut délivrer une autorisation qu’avec l’accord, exprimé sous forme d’un préavis, de l'OCAN; de même, sur préavis dudit office, la caducité d’une autorisation, au sens de l’art. 40 al. 5 OAT, pourra être constatée (art. 82 al. 2 LCI). Ainsi, en zone agricole, le préavis de l'OCAN ne doit pas être minimisé car il est obligatoire (ATA/534/2016 du 21 juin 2016 cité in Stéphane GRODECKI/Valérie DEFAGO GAUDIN, La jurisprudence genevoise en matière d'aménagement du territoire et de droit public des constructions rendue en 2016 in RDAF 2017 I p. 20).

20.         En l'espèce, l’OCAN, instance spécialisée en matière d’agriculture et de protection de la nature et dont le préavis revêt un caractère prépondérant, a constaté que le recourant n’exerçait pas l’activité d’horticulteur à titre principal et que la surface cultivée était nettement insuffisante pour démontrer la présence d’une exploitation horticole. Dans le même sens, l'OU a retenu que l’activité du recourant n’était pas conforme à la zone. Partant, il apparaît que le recourant se contente en réalité de substituer sa propre appréciation à celle effectuée par les instances spécialisées, sans parvenir à démontrer en quoi ces instances spécialisées auraient émis des préavis dénués de pertinence ou fondés sur des motifs étrangers au buts de la loi. Quoi qu'il en soi, le tribunal peut parfaitement adhérer au point de vue des instances spécialisées. En effet, selon les éléments du dossier, notamment les bilans des années 2020 et 2021 et les déclarations du recourant, il appert que l'horticulture productrice ne constitue qu'une faible part des sources de revenus du recourant. Ce dernier a lui-même déclaré que, pour l'instant, la plus grande partie de ses revenus provenaient de l'achat et la revente d'arbuste, et que seule une faible partie de sa propre production était vendue. Ses projections financières 2024 n'en disent pas autrement. En effet, selon les chiffres avancés dans son business plan, en 2024, seuls CHF 15'000.- devraient être générés par le produit de la vente de l'horticulture productrice, alors que ce chiffre devrait être complété par un revenu de l'activité d'achat et de revente de plantes pour plus de CHF 430'000.-. Pour les années suivantes, le recourant indique que le produit de la vente des plantes produites en pépinière serait de CHF 20'000.-, puis de CHF 32'500.-. En parallèle, le produit de la vente de plante (achat/revente) serait de CHF 415'000.-, puis CHF 405'000.- (business plan, p. 4). Si certes le recourant a indiqué sa volonté d'intensifier la part d'activité d'horticulteur, à environ 9% du chiffre d'affaire d'ici 5 ans, puis, à terme, à 50%, force est de constater que la plus grande partie de son activité professionnelle est constitué aujourd'hui par le commerce de plantes (achat/revente) et non du produit de sa propre production, et ce, même à l'avenir. En effet, bien que les chiffres avancés présentent une augmentation de la valeur de la production horticole, avec une diminution parallèle du produit de l'achat/vente de végétaux, cette dernière part de l'activité du recourant reste néanmoins manifestement largement prépondérante. Or, il ne faut pas perdre de vue que seule une horticulture principalement productrice est autorisée en zone agricole, ce qui doit trouver sa traduction dans la part également prépondérante que doit avoir cette production dans le chiffre d'affaire de l'exploitation.

L'argument du recourant selon lequel la démonstration d'une production effective et non d'une production intentionnelle reviendrait à exclure de facto tout nouvel agriculteur ou horticulteur qui souhaiterait démarrer une nouvelle activité, n'a pas véritablement de portée dans le cas d'espèce, étant donné que sa production intentionnelle elle-même ne satisfait pas aux conditions de l'art. 34 OAT.

Pour le surplus, il ne faut pas perdre de vue que l'autorisation de construire sollicitée vise à permettre le développement des installations servant directement une activité de production horticole in situ, et non pas à permettre de développement de l'ensemble des activités liées au domaine de l'horticulture. Or, il n’a nullement été prouvé que l'exploitation en horticulture productrice pourrait subsister à long terme ou que l'édification des constructions projetées était nécessaire au maintien, respectivement au développement, de l'activité en horticulture productrice du recourant. Les explications du recourant ne permettent en effet pas de démontrer de manière convaincante que les installations existantes ne suffiraient pas à permettre le maintien et le développement projeté de la part de production horticole locale selon le business plan du recourant. En tout état, il sera relevé que rien n'empêche le recourant de prévoir des installations destinées à l'achat et à la revente de plantes étrangères à sa propre production ailleurs qu'en zone agricole, conformément à la jurisprudence précitée.

Au vu de ce qui précède, la conclusion à laquelle l’autorité intimée est parvenue -en suivant les préavis des instances spécialisées précitées, notamment l’OCAN - selon laquelle l’activité du recourant ne consistait pas en de l’horticulture productrice ne prête pas flanc à la critique. En conclusion, aucune violation des art. 16a LAT et 34 OAT n’est à déplorer.

Dans ces circonstances, les constructions/installations sollicitées dans la demande du ______ 2022 ne peuvent pas être considérés comme conformes à la zone agricole en vertu des dispositions précitées. Le département pouvait ainsi, à juste titre, rejeter cette demande, ceci sous réserve de l’octroi d’une dérogation ou de la reconnaissance de la situation acquise, éléments qu’il faut donc examiner.

21.         L’art. 24 LAT précise qu’en dérogation de l’art. 22 al. 2 LAT, des autorisations peuvent être délivrées pour de nouvelles constructions ou installations ou pour tout changement d’affectation si (a) l’implantation de ces constructions ou installations hors de la zone à bâtir est imposée par leur destination et (b) qu’aucun intérêt prépondérant ne s’y oppose.

À Genève, selon l’art. 27 LaLAT, qui correspond à l’art. 24 LAT (arrêt du Tribunal fédéral 1A.196/2006 du 12 mars 2007 consid. 5.3), hors des zones à bâtir, en dérogation à l’art. 20 LaLAT, une autorisation ne peut être délivrée pour une nouvelle construction ou installation ou pour tout changement d’affectation que si l’emplacement de la construction prévue est imposé par sa destination (let. a) et si elle ne lèse aucun intérêt prépondérant, notamment du point de vue de la protection de la nature et des sites et du maintien de la surface agricole utile pour l’entreprise agricole (let. b).

22.         De façon générale, l’implantation d’une construction est imposée par sa destination lorsqu’un emplacement hors de la zone à bâtir est dicté par des motifs techniques, des impératifs liés à l’exploitation d’une entreprise, la nature du sol ou lorsque l’ouvrage est exclu de la zone à bâtir pour des motifs particuliers. Il suffit que l’emplacement soit relativement imposé par la destination. Il n’est pas nécessaire qu’aucun autre emplacement n’entre en considération. Il doit toutefois exister des motifs particulièrement importants et objectifs qui laissent apparaître l’emplacement prévu comme plus avantageux que d’autres endroits situés à l’intérieur de la zone à bâtir (ATF 136 II 214 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_877/2013 du 31 juillet 2014 consid. 3.1.1 ; ATA/582/2022 du 31 mai 2022 consid. 6a). L’examen du caractère relativement imposé par la destination de l’emplacement, implique une pesée de l’ensemble des intérêts en présence, pesée qui se recoupe avec celle imposée par l’art. 24 let. b LAT (ATF 141 II 245 consid. 7.6.2). Des préférences dictées par des idées et des vœux subjectifs ou des critères de commodité ou d’agrément ne peuvent être pris en considération (ATF 129 II 63 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.98/2005 du 19 février 2007 consid 3.1).

23.         L’autorité n’est en principe pas tenue d’accorder une dérogation, sauf si ce refus est entaché d’arbitraire, et peut interpréter restrictivement une norme dérogatoire (ATA/690/1999 du 23 novembre 1999). Selon la jurisprudence, la dérogation sert fondamentalement à éviter des cas d’extrême dureté, en permettant de prendre en considération des situations exceptionnelles. La plupart du temps, toutefois, des considérations générales ou d’ordre économique ne permettent pas de justifier une dérogation qui ne peut en tout cas pas être accordée pour fournir « une solution idéale » au maître de l’ouvrage (ATF 107 Ia 214, consid. 5 ; ATA/690/1999 du 23 novembre 1999). À cet égard, il faut souligner qu’il n’y a pas lieu de prendre en compte les considérations de convenance personnelle du constructeur (ATF 123 II 499 consid. 3b /cc ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.213/2005 du 27 mars 2006 ; ATA/68/2013 du 6 février 2013 consid. 9). L’octroi d’une autorisation dérogatoire sur la base de l’art. 24 LAT ne doit pas être utilisé pour éviter de procéder à un changement de zone (ATA/1019/2014 du 16 décembre 2014 consid. 7b).

24.         L’art. 24c LAT, intitulée « Constructions et installations existantes sises hors de la zone à bâtir et non conformes à l’affectation de la zone », stipule que hors de la zone à bâtir, les constructions et installations qui peuvent être utilisées conformément à leur destination mais qui ne sont plus conformes à l’affectation de la zone, bénéficient en principe de la garantie de la situation acquise (al. 1). L’autorité compétente peut autoriser la rénovation de telles constructions et installations, leur transformation partielle, leur agrandissement mesuré ou leur reconstruction, pour autant que les bâtiments aient été érigés ou transformés légalement (al. 2). Les modifications apportées à l’aspect extérieur du bâtiment doivent être nécessaires à un usage d’habitation répondant aux normes usuelles ou à un assainissement énergétique ou encore, à viser à une meilleure intégration dans le paysage (al. 4).

25.         Le champ d’application de l’art. 24c LAT est restreint aux constructions et installations qui ont été érigées ou transformées conformément au droit matériel en vigueur à l’époque, mais qui sont devenues contraires à l’affectation de la zone à la suite d’une modification de la législation ou des plans d’aménagement (art. 41 OAT ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_318/2013 du 10 décembre 2013 consid. 4.1.1 ; 1C_660/2012 du 16 octobre 2013 consid. 4.2).

Cette disposition n’est ainsi pas applicable aux constructions qui sont transformées ou érigées illégalement, même si le rétablissement de l’état conforme au droit n’a pas pu être effectué pour des raisons de proportionnalité, de prescription ou de péremption. Le fait qu’une construction illicite en zone agricole a été tolérée pendant longtemps par les autorités et que le propriétaire soit dès lors protégé dans sa bonne foi, empêche également l’application de l’art. 24c LAT et s’oppose tout au plus à une remise en état des lieux (arrêt du Tribunal fédéral 1C_486/2015 du
24 mai 2016 consid. 2.1.1 et les références citées).

26.         En l'espèce, les constructions visées, soit le chalet et le hangar de stockage/espace administratif, ne remplissent pas les conditions requises par les art. 24 LAT et 27 LaLAT. En effet, leur implantation n’est à l’évidence pas imposée, par leur destination, hors de la zone à bâtir. Ils ne sont dictés par aucune nécessité technique, économique ou inhérente à la nature du sol, soit l'exploitation nécessaire à la production horticule, propre à justifier une dérogation générale au sens de l’art. 24 LAT, vu le caractère très accessoire de la production horticole sur site du recourant.

S’agissant de la dérogation de l’art. 24c LAT, précisée à l’art. 42 OAT, elle requiert, en tant que condition préalable, que les constructions et installations en cause existent déjà physiquement. Or, cette disposition ne pourrait théoriquement s'appliquer que pour le chalet, les serres et la dalle, le hangar de stockage/espace administratif n'étant pas déjà érigés, quand bien même ils ont fait l'objet d'une autorisation délivrée en 1988. À cet égard, ni le chalet ni les serres n'ont manifestement été formellement autorisées, dès lors que le recourant en demande la régularisation selon les plans de la DD 4______ – bien que ces dernières apparaissent déjà sur les plans autorisés de la DD 1______ –, de sorte que l'art. 24c LAT ne saurait s'appliquer à ces constructions. Concernant la dalle existante, son existence n'est pas remise en cause par le département. Néanmoins, cet élément ne saurait permettre la construction d'un nouveau bâtiment sur celle-ci, quand bien même celui-ci reprendrait les formes du bâtiment dont la construction avait été autorisée par la DD 1______, en l'absence de réalisation de celui-ci, étant relevé que la réalisation très partielle de l'ancien bâtiment, par le coulage d'une dalle, n'est pas suffisant pour admettre que le bâtiment autorisé a été érigé. Une dérogation sur la base de cette disposition légale n’est donc également pas possible.

Au surplus, aucune des autres dérogations hors de la zone à bâtir n'est envisageable.

27.         Le recourant se prévaut d'une inégalité de traitement en comparant sa situation à celle objet de l'arrêt de la chambre administrative ATA/69/2021. Il prétend aussi qu'il serait suffisant d'imposer à titre de condition assortie à l'autorisation de construire le fait que les constructions projetées ne pourraient être utilisées que pour la pépinière, comme cela était le cas de l'arrêt de la chambre administrative précité.

28.         Une décision est arbitraire (art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101), lorsqu'elle contredit clairement la situation de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou qu'elle heurte d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 144 I 318 consid. 5.4 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_523/2019 du 1er avril 2021 consid. 2 ; 2C_713/2020 du 8 décembre 2020 consid. 2.3 ; 1C_12/2019 du 11 novembre 2019 consid. 2.1.1).

29.         La protection contre l'arbitraire et celle de l'égalité (art. 8 Cst.) sont étroitement liées. Une décision est arbitraire lorsqu'elle ne repose pas sur des motifs sérieux et objectifs ou n'a ni sens ni but. Une décision viole le principe de l'égalité de traitement consacré à l'art. 8 al. 1 Cst., lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. L'inégalité de traitement apparaît ainsi comme une forme particulière d'arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait l'être de manière semblable ou inversement. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. Les situations comparées ne doivent pas nécessairement être identiques en tous points, mais leur similitude doit être établie en ce qui concerne les éléments de fait pertinents pour la décision à prendre (cf. ATF 146 II 56 consid. 9.1 ; 144 I 113 consid. 5.1.1 ; 142 I 195 consid. 6.1 ; 137 I 167 consid. 3.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_195/2021 du 28 octobre 2021 consid. 5.1.2 ; 1C_270/2021 du 1er octobre 2021 consid. 3.1 ; 2C_538/ du 1er décembre 2020 consid. 3.2 ; 2C_949/2019 du 11 mai 2020 consid. 6.3 ; 8C_107/2019 du 4 juin 2019 consid. 4.2.1 ; 1C_564/2015 du 2 juin 2016 consid. 3.1). Il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'une solution autre que celle choisie semble concevable, voire préférable. Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que sa motivation soit insoutenable ; il faut encore que cette décision soit arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 318 consid. 5.4 et les références ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_523/2019 du 1er avril 2021 consid. 2 ; 2C_713/2020 du 8 décembre 2020 consid. 2.3 ; 1C_12/2019 du 11 novembre 2019 consid. 2.1.1).

30.         En l'espèce, la situation d'espèce de l'ATA/69/2021 diffère de celle du recourant sur plusieurs points. En effet, il apparait clairement que, contrairement à la situation du recourant, la production horticole était prépondérante par rapport à l'activité de service dans le domaine de l'horticulture, raison pour laquelle l'OCAN avait préavisé favorablement la demande d'autorisation de surélévation. En effet, le recourant avait expressément indiqué que son activité de paysagiste s'exerçait à partir du produit de son activité de pépiniériste, contrairement à la situation du recourant qui, en grande majorité, achète et vend des plantes non issues de sa production. La création d'une surélévation projetée était destinée au stockage des produits servant ou issus de la production horticole sur site, les locaux existants ne le permettant pas. En outre, dans l'arrêt ATA/69/2021 le recourant n'était pas locataire mais propriétaire de la parcelle, ce qui exerce une influence notable sur la maîtrise foncière de la parcelle. À cela s'ajoute qu'il s'agissait de l'exploitation d'une surface de 3.6 ha, alors que le recourant vise l'exploitation d'une surface totale d'un peu plus d'1 ha, dont près de la moitié est actuellement en friche, de sorte que la viabilité économique de l'exploitation est à l'évidence différente.

Par conséquent, même s'il s'agit également dans cet arrêt d'un pépiniériste-paysagiste, la situation dont il traite semble suffisamment différente de celle du cas d'espèce pour justifier un traitement différent. Le grief est ainsi écarté.

31.         Le recourant reproche enfin au département d’avoir adopté un comportement contradictoire en refusant d’admettre un projet qui avait été autorisé par le passé, exposant ce faisant qu’un tel comportement violerait le principe de la bonne foi.

32.         Valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l’administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l’administration doit s’abstenir de toute attitude propre à tromper l’administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_341/2019 du 24 août 2020 consid. 7.1).

33.         À certaines conditions, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu’il a réglé sa conduite d’après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l’administration (ATF 141 V 530 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_626/ 2019 du 8 octobre 2020 consid. 3.1 ; 2C_136/2018 du
24 septembre 2018 consid. 3.2). Conformément au principe de la confiance, qui s’applique aux procédures administratives, les décisions, les déclarations et comportements de l’administration doivent recevoir le sens que l’administré pouvait raisonnablement leur attribuer en fonction des circonstances qu’il connaissait ou aurait dû connaître (arrêt du Tribunal fédéral 1P.292/2004 du
29 juillet 2004 consid. 2.1 ; ATA/1299/2019 du 27 août 2019 consid. 3d).

Le droit à la protection de la bonne foi peut également être invoqué en présence simplement d’un comportement de l’administration, notamment en cas de silence de l’autorité dans une situation de fait contraire au droit, susceptible d’éveiller chez l’administré une attente ou une espérance légitime (ATF 129 II 361 consid. 7.1). Entre autres conditions, l’autorité doit être intervenue à l’égard du citoyen dans une situation concrète et celui-ci doit avoir pris, en se fondant sur les promesses ou le comportement de l’administration, des dispositions qu’il ne saurait modifier sans subir de préjudice (arrêt du Tribunal fédéral 9C_628/2017 du 9 mai 2018 consid. 2.2).

La précision que l’attente ou l’espérance doit être « légitime » est une autre façon de dire que l’administré doit avoir eu des raisons sérieuses d’interpréter comme il l’a fait le comportement de l’administration et d’en tirer les conséquences qu’il en a tirées. Tel n’est notamment pas le cas s’il apparaît, au vu des circonstances, qu’il devait raisonnablement avoir des doutes sur la signification du comportement en cause et se renseigner à ce sujet auprès de l’autorité (ATF 134 I 199 consid. 1.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_138/2015 du 6 août 2015 consid. 5.1).

Le principe de la confiance est toutefois un élément à prendre en considération et non un facteur donnant en tant que tel naissance à un droit (arrêt du Tribunal fédéral 2P.170/2004 du 14 octobre 2004 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., p. 193 n. 569 et les références citées).

34.         Sous le terme de droit acquis est désigné un ensemble assez hétérogène de droits des administrés envers l’État dont la caractéristique commune est qu’ils bénéficient d’une garantie particulière de stabilité. Des droits acquis peuvent être conférés par la loi lorsque celle-ci les qualifie comme tels ou lorsqu’elle garantit leur pérennité, soit si le législateur a promis dans la loi que celle-ci ne serait pas modifiée ou sera maintenue telle quelle pendant un certain temps (ATF 143 I 65 ; 134 I 23).

35.         Un droit acquis peut être créé, dans les mêmes conditions que par la loi, par une décision individuelle. On notera à cet égard que le simple octroi d’une autorisation de police, comme par exemple une autorisation de construire, ne crée pas de droits acquis (ATA/555/2022 du 24 mai 2022 consid. 10b ; ATA/199/2022 du 22 février 2022 consid. 9a). En tant que telle, la répétition de décisions successives de contenu identique n’en fait pas non plus des droits acquis. La catégorie la plus importante de droits acquis est constituée de ceux qui sont créés par un contrat entre l’État et les administrés. La stabilité particulière du droit est ici fondée sur le principe pacta sunt servanda (principe de la confiance ; Thierry TANQUEREL, op. cit., p. 266 et 267).

36.         En l'espèce, le fait que le département a autorisé dans le passé certaines constructions, respectivement installations, n’implique nullement qu’il soit tenu ad aeternam par une telle autorisation. En effet, on ne peut prétendre que l’autorité soit à jamais liée par une décision antérieure, ce qui impliquerait en particulier de ne plus pouvoir, à l'avenir, tenir compte des évolutions du droit. La jurisprudence a d’ailleurs retenu, en matière du droit des constructions, qu’une autorisation de construire ne crée pas de droits acquis.

Partant, le fait que le département a autorisé en 1988 les constructions visées par la DD 1______, soit selon les plans de cette autorisation versés au dossier, un bâtiment servant à la détente des ouvriers agricoles avec vestiaires et réfectoire, comprenant également un espace servant au bouturage/greffage ainsi qu'un hangar agricole permettant le dépôt d'engrais, de poterie et d'outils avec un couvert pour véhicules (étant rappelé que les serres y sont mentionnées comme préexistantes et que seule la dalle visant à supporter le hangar agricole a été au final réalisée) ne signifie pas qu’il doive à nouveau autoriser les constructions projetées, quand bien même elles sont similaire.

Aucun élément du dossier ne permet au surplus de retenir une violation du principe de la bonne foi. Rien n'indique en effet que le département aurait assuré ou promis au recourant qu’un permis de construire accordant les éléments qu’il a sollicité en date du ______ 2022 lui serait accordé. Le grief tombe ainsi à faux.

37.         Mal fondé, le recours est rejeté et la décision confirmée.

38.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 1'200.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais de CHF 900.- versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 14 juin 2023 par Monsieur A______ contre la décision du département du territoire du ______ 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 1'200.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Olivier BINDSCHEDLER TORNARE, président, Patrick BLASER et Saskia RICHARDET VOLPI, juges assesseurs

 

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

 

Genève, le

 

La greffière