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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2898/2020

JTAPI/907/2021 du 07.09.2021 ( LCI ) , ADMIS PARTIELLEMENT

Descripteurs : AMENDE;SANCTION ADMINISTRATIVE;TRAVAUX DE CONSTRUCTION;GRAVITÉ DE LA FAUTE
Normes : LCI.7; RCI.10A.al1; LPAI.6.al2; LCI.137; LCI.11.al4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2898/2020 LCI

JTAPI/907/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 1er septembre 2021

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Mark MULLER, avocat, avec élection de domicile

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, architecte, est l'administrateur unique de la société B______ SA, inscrite au registre du commerce genevois depuis le ______ 2011, qui a pour but l’exploitation d'un atelier d'architecture et d'un bureau d'études, ainsi que des opérations de gestion, de promotions et de développements immobiliers.

Il figure au tableau des mandataires professionnellement qualifiés (ci-après : MPQ) institué par l'art. 2 de la loi sur l’exercice des professions d’architecte et d’ingénieur du 17 décembre 1982 (LPAI - L 5 40).

2.             La parcelle n° 1______, feuille n° 2______ de la Commune de Genève-______, sise avenue C______, sur laquelle se trouvent un immeuble destiné à l'habitation et des activités au rez-de-chaussée (n° G3______) et un immeuble destiné à l'habitation (n° G4______), est la propriété de Madame D______.

3.             Madame E______ et Messieurs F______ et G______ sont copropriétaires de la parcelle n° 5______ adjacente, sise avenue C______, qui abrite deux immeubles destinés notamment à l'habitation (nos G6______ et G7______).

4.             La parcelle n° 8_______, jouxtant cette dernière parcelle, sise avenue C______, sur laquelle sont érigés deux bâtiments destiné à l'habitation (nos G9______ et G10______), appartient à H______ SA.

5.             Par requête enregistrée le 30 juin 2011 sous la référence DD 11______/1 par le département des constructions et des technologies de l’information, devenu depuis lors le département du territoire (ci-après : DT ou le département), Messieurs I______ et J______, architectes, ont sollicité la délivrance d’une autorisation de construire portant sur ces trois parcelles en vue de la surélévation d'une « barre » de trois immeubles [contigus et formant un ensemble] et de la pose de panneaux solaires en toiture.

6.             Dans le cadre de l’instruction de cette requête, plusieurs préavis ont été rendus, notamment :

-          Le 26 juillet 2011, la commission d’architecture (ci-après : CA) a requis la modification du projet. Se disant favorable à la surélévation qui était proposée, elle estimait que le décrochement envisagé sur l’immeuble n° 19______ en alignement des étages inférieurs était en contradiction avec le projet. En outre, certaines émergences des cages d’escaliers en toiture étaient hors gabarits, l’alignement côté cour étant pris sur la saillie des balcons en lieu et place du plan de façade.

Le 4 octobre 2011, elle a émis un préavis favorable à l'octroi d'une dérogation selon l’art. 11 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) « pour un gabarit supérieur à 27 mètres, sous réserve d’aligner les balcons sur l’avancée existante (grand bow-windows) sur la façade cour ».

Elle a à nouveau préavisé favorablement le projet le 15 novembre 2011. Précisant qu’elle avait pris connaissance du préavis défavorable de la Ville de Genève, elle a indiqué que :

« le dossier a fait l’objet de plusieurs mises au point et de plusieurs préavis pour trouver une surélévation qui s’intègre et dialogue avec le bâti existant. Elle maintient son préavis du 4 octobre 2011 et le complète en précisant que la solution architecturale projetée avec un volume sur l’ensemble est cohérente et renforce le dispositif architectural existant. En effet, cette surélévation sur deux bâtiments permet d’unifier l’ensemble et démontre la possibilité de surélever les immeubles voisins de manière similaire. Dès lors, la dérogation se justifie pleinement et permet de garantir la cohérence susmentionnée » ;

-          la Ville de Genève a rendu deux préavis défavorables, les 9 août et 26 octobre 2011, retenant notamment que la dérogation prévue par l’art. 11 LCI devait être octroyée de manière restrictive. Aucune des conditions prévues par l’art. 11 al. 4 LCI n’était respectée. La construction nuisait à l’harmonie de la silhouette de l’agglomération et à la perception de sa topographie. Elle ne se justifiait pas par son aspect esthétique et sa destination n’était pas compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier.

7.             Par décision du 23 avril 2012, publiée dans la feuille d’avis officielle (FAO) du 27 avril 2012, le DT, sous la signature de Monsieur K______, chef de région, a délivré l’autorisation de construire DD 11______/1, « conformément aux plans acceptés », se référant notamment aux préavis de la CA précités.

8.             Le 6 février 2015, MM. I______ et J______ ont fait savoir au DT que leur mandat avait pris fin et était repris par B______ SA.

9.             L'avis d'ouverture du chantier, devant débuter le 17 août 2015 et s'achever le 30 novembre 2016, a été établi le 12 août 2015.

10.         Par requête enregistrée le 6 novembre 2015 sous DD 11______/2, H______ SA, par l'intermédiaire de M. A______, a déposé auprès du DT une demande d’autorisation de construire complémentaire à l'autorisation DD 11______/1 (« modifications de la typologie de quatre appartements au 8ème étage du bâtiment n° 17______ - 18______ et mise aux normes des barrières et gardes-corps des bâtiments n° 17______, 18______ & 19______ »).

11.         Par pli du 14 juillet 2016, accompagné de plans de mise en conformité des balcons des façades Nord-Est et Sud-Ouest et indiquant comme objet « Abandon du complément d’autorisation DD 11______/2-1 », B______ SA, sous la signature de Monsieur L______, s’est adressé au DT en ces termes :

« Suite à notre entretien téléphonique avec Monsieur M______ le 14 juillet 2016, nous vous prions de prendre note de l’abandon du complément d’autorisation pour le dosser cité en marge.

Veuillez prendre note également de la mise en conformité des balcons comme indiqués dans les plans ci-joint et expliqué auprès de votre département.

Les parapets de balcons du côté de l’avenue C______, étant perforés, et faisant une hauteur de 90 cm de moyenne, nous les avons obturés par des panneaux en fibro-ciment des deux côtés que nous avons crépis, et ajouté une main courante en inox sur la partie supérieure afin d’atteindre une hauteur de 102 cm. Nous avons appliqué le même procédé qui avait été appliqué sur les bâtiments voisins sis au 20______ et 21______ avenue C______.

Concernant les garde-corps des balcons sur la façade arrière de l’immeuble, ceux-ci avaient une hauteur moyenne de 85 cm. Nous avons changé les garde-corps latéraux qui était pour la plus part rouillés et mis une main courante sur tout le pourtour afin d’arrivé à une garde de 102 cm.

Dans l’attente de vos nouvelles, nous vous prions Messieurs, d’accepter nos salutations les meilleures » (sic).

12.         Par pli du 23 janvier 2017, le DT a accusé réception de ce pli, indiquant l’avoir « reçu le 20 décembre 2016 », que les documents joints avaient été enregistrés et que sa décision serait communiquée ultérieurement au précité.

13.         Le DT a ainsi poursuivi l’instruction de la requête DD 11______/2. Plusieurs préavis ont été émis dans ce cadre. Notamment, le service LDTR et l’office cantonal de l'énergie (OCEN) ont requis la modification du projet en février et mars 2017. En outre, la CA a préavisé favorablement celui-ci, sans observations, le 7 février 2017.

14.         Le 6 juin 2017, M. L______ a adressé au DT une copie de son courrier du 14 juillet 2016 « mentionnant l'abandon du complément d'autorisation DD 11______/2 », le priant « d'en prendre bonne note ».

15.         Par courrier du 13 septembre 2017, mentionnant « mise aux normes des barrières et garde-corps des bâtiments nos 17______, 18______ & 19______ » dans la rubrique « description de l’objet » de la requête, le DT a requis la modification du projet dans un délai de trente jours, afin qu'il se conforme à un nouveau préavis de l'OCEN émis le 3 juillet 2017.

16.         Par plis séparés du 25 septembre 2017, faisant suite à l'ouverture d'une procédure d'infraction sous la référence I-12______ et adressés en copie à M. A______, le DT a informé Mmes D______ et E______, MM. F______ et G______, ainsi que H______ SA que, lors d’un contrôle effectué sur place le 4 septembre 2017, l'un de ses inspecteurs avait constaté que les travaux n’étaient pas conformes à la « DD 11______/2 ». Cette situation était susceptible de constituer une infraction à l'art. 1 LCI. Avant de se déterminer formellement sur la suite à donner à cette affaire, il les invitait à lui faire part de leurs observations et explications éventuelles dans un délai de dix jours.

17.         Le 28 septembre 2017, M. L______ a adressé le courriel suivant au DT :

« Nous avons reçu ce jour différents courriers adressés aux propriétaires concernant la DD 11______/2.

( )

Résumé des différents échanges de ce courrier :

- le 5 novembre 2015, nous avons déposé une complémentaire à l'autorisation DD 11______ (annexe 1)

- le 9 décembre 2015, vous nous avez écrit pour nous informer avoir enregistré le dossier et donnant le numéro de dossier DD 11______/2 (annexe 2)

- le 19 janvier 2016, vous avez fait des demandes de complément concernant cette complémentaire DD 11______/2 (annexe 3)

Suite à de nombreuse séance avec la LDTR et le service du feu, les propriétaires ont souhaité abandonner la complémentaire DD 11______/2.

- Le 14 juillet 2016, nous avons écrit, suite à un entretien avec M. M______ dans ce sens. (annexe 4)

- Nous avons eu connaissance que ce courrier n’avait pas été reçu et nous l’avons renvoyé le 19 décembre 2016. (même courrier que le 14 juillet 2016)

- Le 23 janvier 2017, vous nous avez répondu avoir pris accusation de notre abandons de complémentaire DD 11______/2 (annexe 5)

Ainsi nous avons continué sur l’autorisation de base DD 11______

Nous ne comprenons du coup pas l’objet de la non-conformité à la DD 11______/2

Pouvez-vous nous rappeler afin de comprendre la teneur de votre courrier du 25 septembre 2017 ?» (sic).

18.         Par pli du 9 octobre 2017, adressé au DT, M. L______, reprenant les termes du courriel précité et réitérant « pour la troisième fois l'abandon du complément d'autorisation DD 11______/2 », a souligné le fait qu'il demeurait toujours sans nouvelles dudit courriel. Il indiquait ensuite :

« Nous vous confirmons avoir abandonné la complémentaire DD 11______/2, tout en confirmant la mise en conformité des balcons.

Une APA vous sera transmise dans ces prochains jours, pour des modifications mineures apportés au projet sur la base de l'autorisation DD 11______.

Nous vous prions de nous adresser votre confirmation de l'abandon définitif de la complémentaire DD 11______/2 ( ) » (sic).

19.         Par courrier du 18 octobre 2017, M. L______, faisant suite à la demande du DT du 13 septembre 2017, a rappelé au DT qu'il lui avait « écrit à plusieurs reprises pour l'abandon du complément d'autorisation DD 11______/2 » et qu'il lui avait transmis le jour même « le dossier énergétique complet pour l'autorisation DD 11______ ».

20.         La CA a à nouveau préavisé la requête DD 11______/2 le 28 novembre 2017. Elle requérait cette fois-ci la modification du projet, indiquant ce qui suit :

« Ce projet a été autorisé en 2012 pour une surélévation conjointe sur les 3 immeubles qui forment un ensemble.

La commission relève que les travaux d’exécution ne sont pas conformes à l’autorisation délivrée puisque la surélévation n’a pas été réalisée sur l’immeuble 17______ et que le mur pignon "en attente" empêche l’homogénéité de l’ensemble.

D’autre part, il est également relevé que les fenêtres de la façade sur cour n’ont pas été réalisées comme autorisé, soit toute hauteur. La commission juge cette exécution peu esthétique.

Une réalisation homogène et conforme à l’autorisation sur l’ensemble de ces 3 immeubles est attendue ».

21.         Par courrier du 8 décembre 2017, M. A______, indiquant faire suite au courrier du DT du 25 septembre 2017, à « notre réponse » du 9 octobre 2017 et à un « entretien verbal avec Monsieur N______, le 30 novembre dernier », est revenu sur le déroulement des faits.

Après réception des appels d’offres en vue de la réalisation des travaux prévus par l’autorisation DD 11______/1, la propriétaire du bâtiment 17______ n’avait plus souhaité réaliser la surélévation de son immeuble.

Lors d'un passage dans les locaux du département, à cette époque, il avait consulté un inspecteur de la direction des autorisations de construire (DAC), « de façon verbale, pour demander comment cela se pass[ait] dans ce cas précis, vis-à-vis de l'autorisation de construire. La réponse a[vait] été de préciser que ce propriétaire devra[it] se conformer à l'autorisation le jour où il voudra[it] commencer ces travaux et respecter l'unité des 2 autres surélévations réalisées, pour respecter l'uniformité ». Il n'avait donc pas sollicité une modification de projet, sachant que celui-ci pourrait réaliser cette surélévation ultérieurement dans un délai raisonnable et admissible.

Le 5 novembre 2015, il avait déposé une demande complémentaire à l'autorisation DD 11______/1, qui « faisait état de complément pour la mise en conformité des balcons pour les étages inférieurs et une modification d'un appartement au 18______ de 7 pièces en 2 appartements ». Vu les demandes de compléments sollicitées le 19 janvier 2016, demandant de tenir compte des nouvelles règles admissibles pour les valeurs locatives sur l'ensemble des trois immeubles, les maîtres d'ouvrage lui avaient demandé de renoncer à la modification de l'appartement susmentionné et de retirer cette demande complémentaire.

Le 14 juillet 2016, il avait contacté « M. M______ pour lui communiquer l'abandon de la complémentaire, et rester conforme à la DD de base », ce qu'il avait confirmé par courrier le même jour, « selon sa demande ». Il avait appris, après plusieurs tentatives téléphoniques, que ce courrier n'avait pas été enregistré et l'avait renvoyé le 19 décembre 2016. Il lui avait été confirmé que ce courrier avait été enregistré le 23 janvier 2017 « et que la décision du Département [lui] sera[it] communiquée ultérieurement ».

Compte tenu du fait que la mise en conformité des balcons inférieurs et l’évolution des travaux en cours nécessitaient une requête complémentaire, il avait réclamé sans succès, à plusieurs reprises, la « confirmation officielle » de l’annulation de la requête complémentaire DD 11______/2, qu'il n'avait toujours pas reçue, étant précisé qu’il ne pouvait pas déposer une nouvelle demande de complément tant que la requête complémentaire précédente était encore en cours de traitement. La nouvelle requête, en attente de dépôt, comprenait la mise en conformité de parapets des balcons aux étages inférieurs (« anciennement hauteur 90 cm et avec des ouvertures dans le parapet, plus conformes aux normes en vigueur »), la « modification des portes-fenêtres sur la façade cour, par des fenêtres, vu le problème rencontré sur la structure des façades existantes qui ne pouvait pas reprendre la charge de la surélévation et qui a nécessité la réalisation d'un sommier renversé en contre-coeur sur toute la longueur des immeubles », et de « légères mises à jour des positions des cloisons intérieures, tenant compte des passages techniques, sanitaires, mais sans modification du nombre de pièces et de distribution intérieure des appartements ».

Suite au courrier précité du 25 septembre 2017, il avait « écrit à Monsieur M______, en l'absence de M. K______, précisant que cette nouvelle requête complémentaire devait être déposée, sachant que votre courrier faisait toujours état du numéro de la première requête complémentaire DD 11______/2 ».

Depuis le 14 juillet 2016, il n’avait « pas reçu officiellement l’annulation de la première requête complémentaire » et n’avait donc pas pu déposer cette nouvelle demande, alors que le chantier devait impérativement continuer et avait été achevé durant l’été 2017.

Il n’avait pas pu présenter les documents de conformité et le permis d’habiter avant l’entrée des locataires, « vu la non prise en compte de la nouvelle requête complémentaire ». Ceci avait « encore été l’objet d’une incompréhension » du DT et de l’OCEn, ce dernier ayant requis, le 13 septembre 2017, une mise à niveau du rapport énergétique, basée sur la requête relative à la DD 11______/2.

Il avait appris, lors de son dernier entretien avec M. N______, que le « dossier de constat (photos) » avait été présenté à la CA le 28 novembre 2017, en comparaison de l’autorisation initiale. Cette dernière avait requis la modification du projet, afin que la surélévation manquante du bâtiment 17______ soit réalisée et que les fenêtres sur la façade cour soient modifiées, conformément à l'autorisation initiale.

Il lui avait été dit qu'il était sous la menace d'une amende pour non-respect de l'autorisation de construire. Vu la situation, il ne se sentait pas responsable. Il souhaitait néanmoins vivement régulariser ce dossier, « avec cette requête complémentaire et sa conformité ».

Le propriétaire du bâtiment 17______ avait confirmé ne pas vouloir ou pouvoir réaliser prochainement ces travaux et qu'il savait qu'il serait tenu de demander une nouvelle autorisation de construire. La nouvelle requête complémentaire, toujours en attente d’être déposée, montrait que ce bâtiment ne serait pas surélevé, comme les bâtiments mitoyens du 16______, 20______, 21______ et 22______. « Autrement dit, cette « barre », fort de 8 entrées d'immeuble, n'aura[it] que 2 surélévations au lieu de 3. Comme expliqué ci-dessus, les fenêtres sur façade cour ne [pouvaient] pas être modifiées, pour revenir à l'autorisation de base ».

22.         Par décision du 15 décembre 2017, publiée dans la FAO du même jour, le DT a délivré l'autorisation de construire complémentaire DD 11______/2 sous l'intitulé « (surélévation de 3 immeubles d’habitation - panneaux solaires en toiture) - mise aux normes des barrières et garde-corps des bâtiments nos 17______, 18______ & 19______ » et sur la base du « projet n° 6 du 20 décembre 2016 ».

23.         Le 21 décembre 2017, M. A______ a requis la délivrance d’une autorisation de construire en la procédure accélérée (APA), laquelle a été enregistrée par le DT deux jours plus tard sous la référence APA 13______ (« mise en conformité »), puis « requalifiée » et enregistrée sous la référence DD 11______/3 et l'intitulé « réduction du projet de surélévation et modification des façades » le 11 janvier 2018, ce dont il a informé le précité par courrier du 5 mars 2018.

24.         Par courrier du 16 mars 2018, M. A______ a notamment indiqué au DT qu'il avait pris note du fait que sa demande d'APA avait été transformée en demande d'autorisation définitive (DD).

25.         Dans le cadre de l’instruction de cette requête, notamment :

-          La CA a requis la modification du projet dans un premier préavis émis le 20 mars 2018, laissant la demande de dérogation selon l’art. 11 LCI « en suspens ». Le projet initial avait été autorisé en 2012 « pour une surélévation conjointe sur les 3 immeubles qui forment un ensemble ». Au vu de l’architecture proposée, elle admettait le principe d’une surélévation uniquement sur deux des trois immeubles, mais demandait que « l’expression d’éléments de division en façade correspondant à chaque allée, qui doivent être traités en retrait, tant du côté cour que sur rue », soit retrouvée. Elle regrettait d'autre part « l’appauvrissement du traitement de la façade du côté cour, notamment avec la réduction des vides de lumière, les fenêtres n’ayant pas été exécutées toute hauteur, comme prévu ».

-          Par courrier du 7 juin 2018, Mme D______ a indiqué au DT « que suite au préavis de la commission d'architecture et de l'audition de [son] mandataire M. A______, architecte », elle confirmait « qu’en cas de réalisation de la surélévation future sur [s]on immeuble sis, au 17______ avenue C______, [elle] [s]’engage[ait] à respecter le projet faisant l’objet de la DD 11______/3 ». Pour permettre la continuité visuelle des façades, il serait prévu de déposer les joues mitoyennes sur les façades rue et cour, afin de reconstituer un cadre tel que prévu sur les trois immeubles.

-          Dans un second préavis du 4 septembre 2018, la CA s’est déclarée favorable à la dérogation selon l’art. 11 LCI, après avoir pris connaissance du courrier de Mme D______ du 7 juin 2018, qui s’engageait à supprimer la joue lors de la surélévation de son immeuble, « à la condition que le propriétaire de l’immeuble 18______ s’engage à laisser le propriétaire de l’immeuble 17______ supprimer la joue construite sur l’immeuble 18______ ».

-          Par préavis des 22 mars et 14 septembre 2018, la Ville de Genève s’est prononcée défavorablement, indiquant « réitérer ses précédents préavis défavorables à ce dossier ». La construction nuisait à l’harmonie de la silhouette de l’agglomération et à la perception de sa topographie. Elle ne se justifiait pas par son aspect esthétique et sa destination n’était pas compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, étant précisé que la suppression de la surélévation de l’immeuble 17______ ne faisait qu'accentuer ces problèmes ;

-          l’ensemble des autres instances spécialisées consultées ont émis des préavis favorables, avec ou sans conditions.

26.         Par pli du 28 août 2019, le DT a requis auprès de M. A______ la modification du projet « dans les meilleurs délais ».

Le projet de surélévation avait initialement été autorisé en raison de sa réalisation homogène sur les trois immeubles concernés (17______, 18______ et 19______), qui formaient un ensemble. La présente demande complémentaire visait à permettre aux requérants de ne plus réaliser la surélévation du bâtiment 17______, respectivement de légaliser les travaux non conformes réalisés dans les surélévations des bâtiments 18______ et 19______, de sorte qu’elle remettait en question l’homogénéité initiale du projet de surélévation.

Au vu du préavis défavorable de la Ville de Genève et de l’« avis » de l’architecte cantonal, qui lui avait indiqué le 9 juillet 2019 que le préavis de la CA du 4 septembre 2018 n’était à son sens « pas pertinent » [cet « avis » ne figure pas au dossier], il entendait refuser la dernière version du projet, déposée le 10 août 2018.

Toutefois, pour permettre aux différents intéressés d'exercer leur droit d'être entendu, il leur proposait la possibilité de choisir entre les trois alternatives suivantes :

1)        le dépôt, dans les trente jours, d’un « projet modifié, homogène pour l’ensemble des trois immeubles », de sorte que les travaux non conformes réalisés sur les bâtiments 18______ et 19______ devraient pouvoir être légalisés, à condition que la surélévation de l’immeuble 17______ soit réalisée à l’identique (art. 33A al. 2 du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 - RCI - L 5 05.01) ; une telle condition, complétée par un délai, figurerait dans l'autorisation complémentaire, à charge de tous les propriétaires, pris solidairement ;

2)        si les requérants n’entendaient pas déposer un projet modifié dans les trente jours, avec pour conséquence que la présente requête serait refusée, vu l’absence d’homogénéité de la surélévation qui en résulterait, ils étaient invités, dans le même délai, à « se prononcer sur laquelle des deux remises en état suivantes ils entend[ai]ent se soumettre :

a.       « Première solution, le département ordonne aux propriétaires des bâtiments 18______ et 19______ de modifier les travaux de surélévations réalisés pour les rendre conformes aux autorisations DD 11______/1 et 11______/2 et ordonne au propriétaire du bâtiment 17______ de réaliser la surélévation telle qu’autorisée par les DD 11______/1 et 11______/2 (article 33A alinéa 2 RCI, variante achèvement de l’ouvrage) » ;

b.      « La deuxième solution est que le département ordonne la suppression des surélévations partielles réalisées, constatant que les propriétaires refusent d’achever l’ensemble des travaux autorisés selon les DD 11______/1 et 11______/2 (article 33A alinéa 2 RCI, variante remise en état des lieux) ».

Il conviendrait que soit indiqué le temps jugé nécessaire pour mettre en place et accomplir les travaux découlant de la variante choisie, le cas échéant avec des justificatifs, tel qu'un planning de chantier.

27.         Par courrier du 30 septembre 2019, sous la plume de leur conseil, auquel était joint un engagement de Mme et MM. E______, F______ et G______ à laisser Mme D______ supprimer la joue construite sur leur immeuble (18______, avenue C______), lorsque cette dernière « voudra surélever son immeuble sis 17______ avenue C______ », les précités et H______ SA, se disant « surpris, voire choqués par [la] missive » du DT, ont requis de celui-ci qu'il délivre l’autorisation de construire complémentaire DD 11______/3, considérant que toutes les conditions légales y relatives étaient réunies.

Les variantes proposées étaient irréalisables, respectivement totalement disproportionnées et illusoires, de sorte que la situation actuelle devait être « validée ». Le fait de surélever deux immeubles au lieu de trois ne modifiait pas fondamentalement la situation, comme l’avait retenu la CA à deux reprises. En outre, elle était due « aux aléas subis » dans le cadre de la procédure DD 11______/2, étant rappelé que, nonobstant le fait qu’ils avaient informé le DT par courrier du 14 juillet 2016 de l’abandon de la requête, celle-ci avait finalement été scindée en deux, sans qu’ils soient consultés, puis avait donné lieu à la délivrance de l'autorisation en décembre 2017. Ce n'avait été qu'à ce moment qu'une nouvelle demande d'autorisation de construire avait pu être déposée, ce qui avait été fait immédiatement.

28.         Par décision du 28 juillet 2020, publiée dans la FAO du même jour, le DT a délivré l'autorisation de construire complémentaire DD 11______/3, sous l'intitulé « réduction du projet de surélévation et modification des façades », références faites, notamment, à la version du projet du 10 août 2018, au courrier du 7 juin 2018 de Mme D______, au courrier de Mme et MM. E______, F______ et G______ du 30 septembre 2018 et à l'art. 11 LCI, et « conformément aux plans acceptés et aux conditions suivantes, en particulier celles figurant dans le préavis de la CA du 4 septembre 2018.

29.         Il en a informé la Ville de Genève par courrier du même jour. Il lui a rappelé que l’autorisation initiale DD 11______/1 avait déjà été réalisée et que l’autorisation complémentaire précitée visait à régulariser une situation non conforme à ce qui avait été préalablement autorisé, l’immeuble 17______ n’ayant pas été surélevé et des modifications ayant été apportées aux façades, ce qui était regrettable. Consultée, la CA avait fait part de son mécontentement quant aux travaux réalisés. Toutefois, prenant en compte « l’engagement de l'ensemble des propriétaires concernés (y compris ceux des immeubles situés au 18______ et 9, avenue C______) à vouloir, en définitive, mettre en œuvre le projet de surélévation initialement autorisé, tout en respectant l’harmonie qui le caractérisait (notamment suppression de la joue située entre l'immeuble situé au 17______ et l'immeuble situé au 18______), elle a[vait] préavisé favorablement cette demande, sous condition, en date du 4 septembre 2018 ». Partant, au vu également des préavis favorables rendus par les autres instances consultées et du « principe de proportionnalité (les travaux ayant déjà été réalisés et les appartements créés étant déjà occupés) », l’autorisation complémentaire sollicitée était délivrée.

30.         Par décision du 28 juillet 2020, prise dans le cadre de la procédure d’infraction I-12______ et portant la mention « travaux non conformes à la DD 11______/2 », le DT a infligé à M. A______ une amende administrative de CHF 50'000.-, tenant compte de la gravité tant objective que subjective de l'infraction commise, en application de l'art. 137 LCI et lui a ordonné de « rétablir une situation conforme au droit en procédant à la réalisation des travaux conformément à l’autorisation délivrée ce jour », dans un délai de trois mois. Une attestation globale de conformité, accompagnée des plans conformes à exécution, devrait être produite dans le même délai.

L'autorisation complémentaire DD 11______/3 était délivrée « à titre exceptionnel en application du principe de proportionnalité, la construction telle que réalisée ne pouvant normalement pas être autorisable en l’état, au vu de l’impact esthétique négatif en découlant ».

L’engagement des travaux sans autorisation, qui avait donné lieu à l’ouverture de la présente procédure, ne pouvait être toléré et devait être sanctionné.

Le plafond de l’amende à CHF 20'000.- ne s’appliquait pas au cas d’espèce, « puisque les travaux litigieux n’[avaie]nt pas été autorisés en raison de leur légalité mais exclusivement du fait qu’une remise en état s’avérait disproportionnée, notamment du fait que les logements [étaient] déjà occupés ». La mise en occupation des locaux avant transmission d’une attestation globale de conformité justifiait également, à elle seule, le dépassement du seuil de CHF 20'000.-. Avaient notamment été pris en considération son statut de professionnel de l’immobilier, le fait accompli devant lequel l'autorité avait été mise, le caractère difficilement réversible des éléments réalisés sans autorisation, les circonstances particulières liées à la non-réalisation d’une partie indissociable de l’autorisation de construire initiale, ainsi que l’entrée en occupation sans permis d’occuper.

31.         Par acte du 14 septembre 2020, sous la plume de son conseil, après avoir en vain sollicité la reconsidération de cette dernière décision, M. A______ a interjeté recours à son encontre auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal). Principalement, il en a requis l’annulation et, subsidiairement, a sollicité la réduction à CHF 3'000.- de l’amende lui étant infligée, le tout sous suite de frais et dépens.

Lorsqu'il avait repris le projet et que Mme D______ avait décidé de renoncer à la surélévation de son immeuble, il avait reçu l’assurance de M. N______, « collaborateur chevronné de l’OAC [office des autorisations de construire] », que l’abandon de la surélévation de l’immeuble 17______ ne posait pas de problème, en application du principe « qui peut le plus, peut le moins », et que la surélévation de ce troisième immeuble pourrait avoir lieu ultérieurement. Les travaux de surélévation des immeubles 18______ et 19______ avaient débuté le 20 août 2015 avec la pose d’échafaudages. Le 6 novembre 2015, une demande d’autorisation de construire complémentaire portant sur la mise aux normes des barrières et garde-corps des immeubles 17______, 18______ et 19______, dans le cadre de leur surélévation, avait été déposée. Les échafaudages de couverture des toitures en vue de la démolition des combles existants des immeubles 18______ et 19______ avaient été montés dès le 7 décembre 2015 et les travaux de démolition s’étaient achevés à fin avril 2016. Les travaux de surélévation à proprement parler avaient quant à eux débuté en juin 2016. Au cours des travaux, il avait été constaté qu’une demande complémentaire devait être déposée s’agissant de la mise en conformité de parapets de balcons aux étages inférieurs, de la modification des portes-fenêtres sur la façade cour et de légères mises à jour des positions des cloisons intérieures. Une telle requête ne pouvant être déposée tant que la DD 11______/2 était en cours d’instruction, il avait réclamé la confirmation de l’annulation de cette procédure à plusieurs reprises. Les travaux relatifs à la surélévation des immeubles 18______ et 19______ s’étaient achevés durant l’été 2017.

La demande d’autorisation de construire par procédure accélérée visant la mise en conformité des immeubles 17______, 18______ et 19______ déposée le 21 décembre 2017 avait été enregistrée sous APA 13______/1, comme le démontrait l’extrait du site internet SAD Consult qu'il produisait. Cette APA avait été requalifiée par le DT en demande définitive portant sur la réduction du projet de surélévation et la modification des façades, objets de la demande complémentaire DD 11______/3.

L’amende devait être annulée, eu égard au fait que c’était le DT lui-même qui l’avait empêché de déposer une requête avant le début des travaux, comme cela ressortait de la chronologie des faits. Ainsi, si le retrait de la requête DD 11______/2 avait été enregistré par le DT lors de son annonce, la demande DD 11______/3 aurait pu être déposée au tout début des travaux. Au vu de l’absence de réaction du DT suite à l’annonce du retrait de la DD 11______/2, puis de son refus inexplicable d’en tenir compte, il n’avait pas eu d’autre choix que de poursuivre les travaux et de réaliser la surélévation des immeubles 18______ et 19______, afin d’éviter de gêner inutilement les locataires des étages inférieurs, en limitant autant que possible la durée du chantier. On ne pouvait par conséquent lui reprocher d’avoir tardé à déposer une demande d’autorisation de construire complémentaire visant la mise en conformité des travaux, ni exiger qu’il suspendît les travaux déjà entamés pendant cinq ans, soit entre le début du chantier en août 2015 jusqu’à la délivrance de la DD 11______/3 en juillet 2020.

Le respect du principe de la bonne foi justifiait également l’annulation de l’amende, dès lors qu’il s’était fondé sur les assurances données par M. N______ pour aller de l’avant avec les travaux.

Si, par impossible, il devait être jugé qu'une amende était justifiée, son montant devrait être réduit. En effet, l’art. 137 al. 2 LCI avait été violé et le montant de CHF 50'000.- fixé par le DT était sans rapport avec la gravité de l'infraction invoquée et les circonstances. Le raisonnement de ce dernier selon lequel la DD 11______/3 aurait été acceptée, non en raison de la légalité des travaux, mais uniquement car une remise en état s’avérait disproportionnée tombait à faux.

L’art. 26 al. 3 LCI [recte : 27 al. 3 LCI], qui faisait appel à des notions juridiques indéterminées, n’indiquait pas avec exactitude dans quels cas une surélévation pouvait être autorisée. Or, la CA, qui avait soigneusement étudié le dossier et dont les préavis étaient déterminants, avait estimé à deux reprises que la surélévation de deux immeubles au lieu de trois répondait au critère de l’harmonie urbanistique. Cet avis ne pouvait qu’être suivi, dès lors qu’aucune raison particulière ne justifiait d’autoriser la « surélévation des trois immeubles d’une barre d’immeubles relativement récents, et pas de deux ». De plus, la CA s’était également déclarée favorable à une dérogation fondée sur l’art. 11 LCI. En outre, le DT avait lui-même relevé, dans son courrier adressé à la Ville de Genève le 28 juillet 2020, que c’était en prenant en compte les préavis favorables de la CA et des autres instances qu’il avait délivré la DD 11______/3. Ainsi, contrairement à ce que le DT prétendait, cette autorisation complémentaire n’avait pas été délivrée uniquement sur la base du principe de proportionnalité, mais également de préavis favorables. Par conséquent, la surélévation était clairement autorisable et l’amende attaquée ne pouvait pas dépasser CHF 20'000.-

Si l'on devait admettre qu'il avait violé la loi, ce qu'il contestait, la gravité de l’infraction devait être relativisée. Cette amende lui avait été infligée non en raison des travaux de surélévation effectués sans autorisation, mais au motif que seuls deux immeubles sur trois avaient été surélevés, contrairement à ce que prévoyait l’autorisation initiale. Il résultait de la jurisprudence de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) que, « dans des cas similaires », la quotité de l'amende infligée par le DT avait été bien moindre, s'agissant notamment de l'agrandissement d'un sous-sol sans autorisation (CHF 1'000.- ; ATA/107/2009 du 3 mars 2009), de la construction d'un garage fermé sans autorisation (CHF 1'500.- ; ATA/611/2016 du 12 juillet 2016), de la non-conformité à l'ordre d'enlèvement d'une piscine (CHF 2'000.- ; ATA/610/2017 du 30 mai 2017) et de travaux de construction à des fins d'habitation entrepris sans autorisation suite à une décision de refus et après récidive (CHF 3'000.- ; ATA/83/2009 du 17 février 2009).

De plus, il convenait de tenir compte de l’historique du dossier, notamment les assurances qu'il avait reçues « selon lesquelles il pouvait sans autre effectuer partiellement les travaux autorisés », du fait que si la DD 11______/2 avait été annulée en juillet 2016, soit au moment de son retrait, la demande complémentaire DD 11______/3 aurait pu être déposée en août 2016 au lieu de décembre 2017 et que plus de deux ans et demi s’étaient écoulés entre le dépôt de la DD 11______/3 et son acceptation par le DT le 28 juillet 2020.

Ces faits devaient amener le tribunal à relativiser la gravité de l'infraction et à la fixer, dans la ligne des jurisprudences citées ci-dessus, à un montant de l'ordre de CHF 3000.-.

Enfin, l’absence de remise d’une attestation de conformité avant la mise en location des logements ne justifiait pas le montant de cette amende, puisqu’il ressortait clairement du texte de l’art. 137 al. 3 LCI que c’était l’établissement, par le MPQ ou le requérant, d’une attestation non conforme à la réalité qui constituait une circonstance aggravante. Or, il n’avait jamais établi de telle attestation non conforme, dès lors qu’il savait que celle-ci dépendait de la DD 11______/3, qui n’avait pu être enregistrée qu’en janvier 2018. Il n’y avait par conséquent pas d’attestation de conformité à délivrer et la circonstance aggravante de l’art. 137 al. 3 LCI n’était pas réalisée.

32.         Par acte du 17 novembre 2020, accompagné de son dossier I-12______ et d’une partie des dossiers relatifs aux procédures DD 11______/1, 11______/2 et 11______/3, le DT a conclu au rejet du recours.

Jusqu’aux travaux réalisés après 2015, la toiture des immeubles nos G9______, G3______ et G6______ était uniforme, comme le montraient les photographies aériennes du système d'information du territoire genevois (SITG) de l’été 2015. La CA avait considéré qu’il s’agissait d’un ensemble.

Le recourant l’avait informé, « par courrier du 14 juillet 2016, reçu le 20 décembre 2016, qu’il abandonnait la requête complémentaire, précisant toutefois qu’il maintenait la mise en conformité des balcons et les garde-corps des trois immeubles ». Par conséquent, le descriptif de l’objet de cette autorisation de construire complémentaire avait été modifié, pour ne porter que sur la mise aux normes des barrières et garde-corps des bâtiments 17______, 18______ et 19______. C'était ainsi conformément aux déclarations du recourant et à la volonté de celui-ci que l'instruction de la requête DD 11______/2 avait été poursuivie pour aboutir à la décision d'autorisation du 15 décembre 2017.

Le 11 janvier 2018, le recourant avait déposé la demande d’autorisation complémentaire DD 11______/3, en vue de la réduction du projet de surélévation et des modifications des façades, déjà réalisées. Lors de l’instruction de cette requête, il avait relevé, dans son courrier du 28 août 2019, que cette requête visait à permettre aux requérants « de ne plus réaliser la surélévation du bâtiment 17______, respectivement de légaliser les travaux non conformes réalisés par les surélévations des bâtiments 18______ et 19______ ». Ce projet complémentaire remettait en question l’homogénéité du projet de surélévation tel qu'autorisé selon la DD 11______/1.

L’amende était fondée dans son principe. Le recourant avait en effet sciemment violé les art. 1 al. 7 et 7 LCI, de même que l'art. 10A al. 1 RCI et, ainsi, commis une faute.

Le recourant admettait que les travaux de surélévation réalisés et objet du constat du 4 septembre 2017 différaient du projet autorisé selon la DD 11______/1 et que ceux-ci étaient assujettis à la LCI. Or, dans la mesure où il entendait modifier le projet initialement autorisé, ce dernier avait l’obligation de déposer une requête complémentaire et d’attendre son obtention avant de réaliser des travaux divergeant de l’autorisation de base. En outre, dans son courriel du 28 septembre, puis dans son courrier du 9 octobre 2017, le recourant avait affirmé avoir « continué [les travaux] sur l'autorisation de base DD 11______ ». Aucune mention n'y était faite quant à la modification du projet autorisé tendant à renoncer à réaliser l'une des trois surélévations autorisées. Il n'indiquait pas non plus que l'abandon de cette complémentaire lui était nécessaire, afin de requérir une nouvelle autorisation complémentaire visant à modifier le projet initial. Or, à cette période, coïncidant avec le constat d'infractions, les travaux de surélévation de deux immeubles au lieu de trois étaient presque entièrement réalisés. Manifestement, lorsqu’il avait déclaré l’abandon d’une partie du projet faisant l’objet de la DD 11______/2, le recourant n’avait aucune intention de déposer une requête tendant à modifier le projet initial et à réduire à deux immeubles la surélévation autorisée. Son attitude tendait au contraire à démontrer qu’il avait l’intention de mettre l'autorité devant le fait accompli. La réalisation de la surélévation des seuls immeubles 18______ et 19______ ne s’imposait pas en raison d’une urgence, l'éventuelle gêne occasionnée aux locataires par les travaux n'étant à cet égard pas relevante, et le simple fait qu’il ne s'était pas déterminé sur une demande complémentaire dans le délai voulu par le recourant ne donnait pas à ce dernier le droit de faire fi des dispositions de la LCI et de réaliser les travaux sans autorisation de construire obtenue préalablement, étant précisé qu’il ne l'avait pas mis « en demeure de rendre une décision conformément à l'art. 4 al. 4 LPA ».

Aucune violation du principe de la bonne foi n’était en outre à déplorer. Le recourant, ancien membre de la CA, était un architecte chevronné et expert en matière de procédure d’autorisation de construire. « Renseignements pris auprès de [M. N______], si le sujet de la réalisation de deux surélévations au lieu d'une a[vait] bien été évoqué oralement avec le recourant, aucune assurance n'a[vait] été donnée à ce dernier quant à l'absence de nécessité de déposer une requête complémentaire ». Par ailleurs, aucune information erronée ne lui avait été communiquée. En outre, les dispositions légales en la matière étaient parfaitement claires, de sorte que le recourant ne pouvait, de bonne foi, considérer qu’il était exempté de l’obligation de déposer une requête visant à modifier le projet initial.

Enfin, les locaux d’habitation avaient été occupés sans que le recourant n’eût déposé au préalable des plans conformes à l’exécution, ni établi une attestation de conformité.

S’agissant du montant de l’amende, l’art. 137 al. 2 LCI ne trouvait pas application. Les surélévations en cause n'étaient pas conformes aux prescriptions légales, en particulier à l’art. 27 al. 3 LCI, puisqu’elles compromettaient l’harmonie urbanistique de la rue. Cette appréciation ressortait du préavis du 28 novembre 2017 de la CA rendu dans le cadre de la DD 11______/2, étant précisé que les travaux litigieux avaient déjà été réalisés à cette période. Si la CA s’était ensuite prononcée favorablement quant aux travaux réalisés dans son préavis du 4 septembre 2018 dans le cadre de la DD 11______/3, c’était uniquement en raison de l’engagement de l’ensemble des propriétaires concernés « à vouloir, en définitive, mettre en œuvre le projet de surélévation initialement autorisé, tout en respectant l’harmonie qui le caractérisait (notamment avec la suppression de la joue [ ] », ce qui ressortait de son courrier du 28 juillet 2020 adressé au Conseil administratif de la Ville de Genève. Ainsi, l’accord de la CA quant à la surélévation partielle n’avait été donné qu’au vu de l’engagement des propriétaires à réaliser le projet tel qu’autorisé initialement par la DD 11______/1. Il en découlait que « tant que le projet tel qu’autorisé initialement n’a[vait] pas été réalisé, il empêch[ait] l’homogénéité d’ensemble et compromet[tait] l’harmonie urbanistique de la rue ». Par conséquent, c’était bien en « application du principe de proportionnalité, uniquement », que la DD 11______/3 avait été autorisée. Dans son arrêt 1C_290/2020 du 16 octobre 2020 (consid. 2.3), le Tribunal fédéral avait par ailleurs « récemment confirmé qu'il n'était nullement critiquable de considérer que des constructions finalement autorisées et tolérées en vertu du principe de la proportionnalité, n'étaient pas, à tout le moins au moment de leur réalisation, en tous points conformes à la législation cantonale ».

Enfin, le montant de cette amende était fondé au regard de la « violation crasse des dispositions de la LCI », des « circonstances aggravantes » qu'il avait retenues (statut de professionnel de l'immobilier du recourant, mise de l'autorité devant le fait accompli, caractère difficilement réversible des éléments réalisés sans autorisation, circonstances particulières liées à la non réalisation d'une partie indissociable de l'autorisation de construire initiale et entrée en occupation sans permis de construire, « soit le fait d'avoir permis l'occupation des locaux alors que, légalement, les démarches permettant l'entrée en occupation n'étaient pas encore accomplies, ce qui reflète d'ailleurs la cupidité du recourant » et de la jurisprudence, étant souligné que les précédents cités par ce dernier n'étaient pas pertinents.

33.         Par réplique du 15 janvier 2020, le recourant a persisté dans ses conclusions et ses explications.

Il avait, dans son courrier adressé au DT le 9 octobre 2017 déjà, mentionné le fait qu’une autorisation serait déposée pour des modifications mineures du projet et qu’une éventuelle suspension des travaux durant cinq ans n’était pas envisageable, eu égard à la gêne occasionnée par des travaux inachevés aux autres locataires sur une période aussi longue.

Les travaux qui avaient été réalisés ne violaient pas la DD 11______/1. Il était question d’un « écart négatif », cette dernière prévoyant des travaux plus conséquents que ceux ayant été réalisés in fine. Un tel écart était illégal uniquement lorsque l’autorisation était assortie de l’obligation de réaliser l’ouvrage conformément aux plans approuvés dans leur ensemble, ce qui n’avait pas été le cas en l’espèce.

L’autorisation DD 11______/3 ne violait ni l’art. 27 al. 3 LCI, ni l’art. 11 LCI et était fondée sur des préavis constants de la CA, de sorte qu’elle était conforme aux prescriptions légales. S’il était vrai que, le 7 juin 2018, Mme D______ - et non tous les propriétaires - avait pris un engagement, celui-ci ne portait pas sur la réalisation de la surélévation future de son immeuble, mais, « en cas de surélévation de son immeuble et seulement dans ce cas », sur le respect de l’autorisation de construire initiale et de certaines mesures constructives, soit la suppression des joues mitoyennes sur les façades sur rue et sur cour. Les propriétaires ne s’étaient en aucun cas engagés à surélever le troisième immeuble et l’autorisation de construire ne contenait pas cette charge. De plus, dans son préavis du 20 mars 2018, soit avant la prise de cet engagement, la CA avait déjà rendu un préavis favorable au principe de la surélévation de deux immeubles seulement, sans le conditionner à la surélévation ultérieure du troisième. Enfin, dans son préavis du 4 septembre 2019, la CA avait confirmé, au vu de l’engagement de Mme D______ de supprimer la joue, son accord avec la surélévation des deux immeubles, sans toutefois demander qu’il soit procédé ultérieurement à la surélévation du troisième.

Le montant de l’amende devait être réduit à environ CHF 3'000.-. L’argument du DT selon lequel il aurait agi « par cupidité » en autorisant l’occupation des locaux en l’absence de permis de construire tombait à faux, dès lors que, n’étant pas le propriétaire de l’immeuble concerné, il n’avait retiré aucun avantage financier de l’entrée dans ces locaux.

34.         Par duplique du 19 février 2021, le DT a lui aussi persisté dans ses conclusions.

Dans son courrier du 9 octobre 2017, le recourant avait indiqué qu’une autorisation serait déposée pour des « modifications mineures » et qu’il souhaitait procéder par le biais d’une APA. A l'évidence, il n'avait pu en déduire que ce dernier faisait référence à la réalisation de deux surélévations au lieu de trois, qui ne pouvait être considérée comme une modification mineure. Par ailleurs, l’instruction d’une APA ne dépendait aucunement de l’état d’instruction d’une DD ou de ses complémentaires, puisqu'une telle requête portait sur un projet indépendant, ce que le recourant, vu son statut et son expérience, ne pouvait ignorer. En outre, une APA se limitait à la modification intérieure d'une construction, respectivement portait sur une construction de peu d'importance ou provisoire (art. 3 al. 7 LCI), de sorte qu'elle ne pouvait porter sur la diminution de l'étendue du projet de surélévation. Ces éléments démontraient que le recourant n’entendait pas attendre la fin du traitement du dossier DD 11______/2 pour requérir des modifications ; il ne s'agissait que d'un prétexte invoqué pour les besoins de la cause, puisqu'il ne reflétait pas la volonté du recourant en octobre 2017.

Cela étant, l’autorisation relative à la DD 11______/1 précisait bien que « le département accord[ait] l’autorisation sollicitée, conformément aux plans acceptés ». Ainsi, si le recourant entendait réaliser le projet autorisé selon cette autorisation, il devait le faire dans son ensemble, conformément aux plans visés ne varietur.

Enfin, encore une fois, le projet complémentaire autorisé par la DD 11______/3 n’était pas conforme à la LCI, dès lors « qu’un écart négatif ne [devait] pas avoir de conséquences négatives en matière d’esthétique, ce qui s'av[érait] indéniablement être le cas en l'espèce ». En effet, les préavis de la CA avaient été clairs. L'engagement donné par les propriétaires des immeubles situés au 17______, 18______ et 19______ avenue C______ avait été décisif pour que celle-ci s'exprime favorablement à la surélévation projetée. Par ailleurs, dans son préavis du 20 mars 2018, la CA n'avait pas donné son accord à l'application de la dérogation prévue à l'art. 11 LCI permettant la surélévation, puisqu'elle y indiquait que la demande relative à cette dérogation était en suspens. Ainsi, l'argumentation complémentaire du recourant quant à la violation de l'art. 137 al. 2 LCI et à la faible gravité de sa faute ne pouvait être suivie.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente par le destinataire de la décision attaquée, le recours est recevable (art. 115 et 116 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI ; art. 57, 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), en soi non réalisée dans le cas d'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).

3.             Les arguments formulés par les parties à l'appui de leurs conclusions respectives seront repris et discutés dans la mesure utile (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_72/2017 du 14 septembre 2017 consid. 4.1 ; 1D_2/2017 du 22 mars 2017 consid. 5.1 ; 1C_304/2016 du 5 décembre 2016 consid. 3.1 ; 1C_592/2015 du 27 juillet 2016 consid. 4.1 ; 1C_229/2016 du 25 juillet 2016 consid. 3.1 et les arrêts cités), étant rappelé que, saisi d'un recours, le tribunal applique le droit d'office et que s'il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 69 al. 1 LPA ; cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a). Aussi peut-il admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (cf. ATF 135 III 397 consid. 1.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_540/2013 du 5 décembre 2013 consid. 3 ; 2C_349/2012 du 18 mars 2013 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-1734/2019 du 23 mars 2020 consid. 2).

4.             La direction des travaux dont l’exécution est soumise à autorisation de construire doit être assurée par un mandataire inscrit au tableau des MPQ, dont les capacités professionnelles correspondent à la nature de l’ouvrage, sous réserve des constructions ou installations d’importance secondaire, qui font l’objet de dispositions spéciales édictées par voie réglementaire (art. 6 al. 1 LCI).

Le mandataire commis à la direction des travaux en répond à l’égard de l’autorité jusqu’à réception de l’avis d’extinction de son mandat (art. 6 al. 2 LCI).

Le cercle de ces mandataires est défini par la LPAI, qui stipule à son article premier que l’exercice indépendant de la profession d’architecte ou d’ingénieur civil ou de professions apparentées sur le territoire du canton de Genève est restreint, pour les travaux dont l’exécution est soumise à autorisation en vertu de la LCI, aux MPQ reconnus par l’État.

Conformément à l’art. 6 LPAI, le mandataire est tenu de faire définir clairement son mandat (al. 1). Il s’acquitte avec soin et diligence des tâches que lui confie son mandant, dont il sert au mieux les intérêts légitimes, tout en s’attachant à développer, dans l’intérêt général, des réalisations de bonne qualité au titre de la sécurité, de la salubrité, de l’esthétique et de l’environnement (al. 2).

Il résulte de cette dernière disposition que le respect du droit public est l’un des devoirs incombant à l’architecte (Blaise KNAPP, « La profession d’architecte en droit public », in Le droit de l’architecte, 3ème éd., 1986, p. 487 ss n. 510 ; cf. ATA/118/2013 du 26 février 2013).

5.             Aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente (art. 22 al. 1 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 - LAT - RS 700).

Aux termes de l'art. 1 al. 1 LCI, sur tout le territoire du canton nul, ne peut notamment, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (let. a) et modifier, même partiellement, le volume, l’architecture, la couleur, l’implantation, la distribution ou la destination d’une construction ou d’une installation (let. b).

Aucun travail ne doit être entrepris avant que l'autorisation ait été délivrée (art. 1 al. 7 LCI).

6.             À teneur de l’art. 7 al. 1 let. a LCI, les constructions ou installations neuves ou modifiées destinées à l'habitation ou au travail ne peuvent être occupées ou utilisées à un titre quelconque avant le dépôt, au département, d'un dossier de plans conformes à l'exécution et d'une attestation de conformité établie par un MPQ, cas échéant le requérant, dans les cas prévus par les art. 2 al. 3 2ème phr. et 6 LCI.

L'attestation certifie que les constructions ou installations sont conformes à l'autorisation de construire, aux conditions de celle-ci, ainsi qu'aux lois et règlements applicables au moment de l'entrée en force de l'autorisation de construire (art. 7 al. 2 LCI).

7.             Est formellement illégale une construction qui existe sans reposer sur une autorisation de construire ou sans correspondre entièrement à l’autorisation de construire délivrée. Les travaux qui ne reposent pas sur des plans autorisés sont présumés illicites. Si une autorisation existe, l’illégalité concerne tout écart - total ou partiel, positif ou même négatif - entre la réalité et cette autorisation. Un écart négatif est illégal, lorsque l’autorisation est assortie de l’obligation de réaliser l’ouvrage conformément aux plans approuvés dans son ensemble (par exemple pour des motifs d’esthétique ou patrimoniaux, lors d’intervention sur des ensembles bâtis), voire avec des « accessoires » indispensables (cf. Nicolas WISARD/Samuel BRÜCKNER / Milena PIREK, Les constructions « illicites » en droit public. Notions, mesures administratives, sanctions, in Journées suisses du droit de la construction 2019, p. 212 et la note de bas de page n° 3).

8.             Est réputée complémentaire la demande qui a pour objet la modification d’une autorisation principale en vigueur, pour laquelle l'attestation de conformité n'a pas encore été adressée au département ou pour laquelle le permis d'occuper n'a pas encore été délivré (art. 10A al. 1 RCI).

9.             A teneur de l'art. 5 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), les organes de l'Etat et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. Cela implique notamment qu'ils s'abstiennent d'adopter un comportement contradictoire ou abusif. De ce principe général découle le droit fondamental du particulier à la protection de sa bonne foi dans ses relations avec l'Etat, consacré à l'art. 9 in fine Cst. (arrêt du Tribunal fédéral 1C_115/2020 du 9 novembre 2020 consid. 5.1 et les arrêts citée). Valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi protège le justiciable, à certaines conditions, dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités, lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration. Un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée (ATF 141 V 530 consid. 6.2 ; 131 II 627 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_500/2020 du 11 mars 2021 consid. 3.4.1 ; 1C_50/2020 du 8 octobre 2020 consid. 8.1.2).

La bonne foi ne peut être exclue que lorsque l'incompétence de l'autorité est clairement reconnaissable. Cette question doit s'apprécier en fonction d'éléments objectifs et subjectifs. Au titre des premiers, entrent notamment en considération la nature de l'indication fournie et le rôle apparent du fonctionnaire dont elle émane ; mais il y a en outre lieu de tenir compte de la position ou de la qualité, éventuellement particulières, du justiciable concerné. Des exigences plus élevées sont imposées aux spécialistes (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_50/2020 du 8 octobre 2020 consid. 8.1.2 et les arrêts cités).

10.         Aux termes de l'art. 137 LCI, est passible d'une amende administrative de CHF 100.- à 150'000.- tout contrevenant à la LCI, aux règlements et aux arrêtés édictés en vertu de ladite loi, ainsi qu'aux ordres donnés par le département dans les limites de ladite loi et des règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci (al. 1). Le montant maximum de l'amende est de CHF 20'000.-, lorsqu'une construction, une installation ou tout autre ouvrage a été entrepris sans autorisation, mais que les travaux sont conformes aux prescriptions légales (al. 2). Il est tenu compte, dans la fixation du montant de l'amende, du degré de gravité de l'infraction. Constituent notamment des circonstances aggravantes la violation des prescriptions susmentionnées par cupidité, les cas de récidive et l'établissement, par le MPQ ou le requérant, d'une attestation au sens de l'art. 7 LCI non conforme à la réalité (al. 3).

11.         Selon la jurisprudence constante, les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions, pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C'est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (cf. not. ATA/559/2021 du 25 mai 2021 consid. 7c ; ATA/206/2020 du 25 février 2020 consid. 4b ; ATA/1277/2018 du 27 novembre 2018 consid. 6b ; ATA/1030/2018 du 2 octobre 2018 consid. 9b ; ATA/319/2017 du 21 mars 2017 consid. 3c et les références citées).

12.         En vertu de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les art. 1 à 110 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif aux infractions prévues par la législation genevoise, sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal, comme notamment les art. 34 ss, 42 ss, 56 ss, 74 ss, 106 al. 2 et 3 et 107 CP (not. ATA/559/2021 du 25 mai 2021 consid. 7d ; ATA/403/2019 du 9 avril 2019 consid. 7b ; ATA/1277/2018 du 27 novembre 2018 consid. 6c).

Il est ainsi en particulier nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d'une simple négligence (cf. not. ATA/559/2021 du 25 mai 2021 consid. 7d ; ATA/13/2020 du 7 janvier 2020 consid. 7c ; ATA/1828/2019 du 17 décembre 2019 consid. 13c ; ATA/1277/2018 du 27 novembre 2018 consid. 6c).

13.         L'autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d'une sanction doit faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine). La culpabilité doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle, ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure (cf. ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1 ; 136 IV 55 ; 134 IV 17 consid. 2.1 ; 129 IV 6 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_28/2016 du 10 octobre 2016 consid. 5.1 ; 6B_1276/2015 du 29 juin 2016 consid. 2.1 ; cf. aussi ATA/559/2021 du 25 mai 2021 consid. 7e) et ses capacités financières (cf. ATA/719/2012 du 30 octobre 2012 consid. 20 et les références citées).

Néanmoins, toujours selon la jurisprudence constante, l'administration doit faire preuve de sévérité, afin d'assurer le respect de la loi, et jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour infliger une amende, le juge ne la censurant qu'en cas d'excès (ATA/559/2021 du 25 mai 2021 consid. 7d ; ATA/147/2021 du 9 février 2021 consid. 4d et e ; ATA/403/2019 du 9 avril 2019 consid. 7c ; ATA/1277/2018 du 27 novembre 2018 consid. 6d). L'autorité ne viole le droit en fixant la peine que si elle sort du cadre légal, si elle se fonde sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, si elle omet de prendre en considération des éléments d'appréciation prévus par cette disposition ou, enfin, si la peine qu'elle prononce est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (cf. ATF 136 IV 55 consid. 5.6 ; 135 IV 130 consid. 5.3.1 ; 134 IV 17 consid. 2.1 ; 129 IV 6 consid. 6.1 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_28/2016 du 10 octobre 2016 consid. 5.1 ; 6B_1276/2015 du 29 juin 2016 consid. 2.1).

14.         Enfin, l'amende doit respecter le principe de la proportionnalité garanti par l'art. 5 al. 2 Cst. (cf. ATA/559/2021 du 25 mai 2021 consid. 7d et les arrêts cités ; ATA/313/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/871/2015 du 25 août 2015 ; ATA/824/2015 du 11 août 2015), lequel commande que la mesure étatique soit nécessaire et apte à atteindre le but prévu et qu'elle soit raisonnable pour la personne concernée (cf. ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 140 II 194 consid. 5.8.2 ; 139 I 218 consid. 4.3).

15.         En l’espèce, en sa qualité de MPQ, le recourant a fait procéder à des travaux ne respectant pas l'autorisation de construire DD 11______/1, ce qui aurait commandé qu'une autorisation complémentaire soit préalablement obtenue. Même si l'on s'étonne de la façon pour le moins singulière dont le DT a traité la procédure DD 11______/2 après que son retrait lui avait clairement été annoncé, il ne ressort pas des éléments figurant au dossier que, comme il le prétend, le recourant aurait été empêché de déposer une telle requête avant le début des travaux de surélévation proprement dits, en particulier en raison de l'instruction de ladite procédure. On relèvera en particulier que, selon ses propres déclarations, les travaux tendant à la mise en œuvre de l'autorisation DD 11______/1 ont débuté en août 2015 avec la pose d’échafaudages. Or, toujours selon les déclarations du recourant, Mme D______ avait alors déjà pris le parti de ne plus surélever son immeuble (sa décision ayant été prise suite à la réception des appels d’offre relatifs aux travaux), ce que le recourant, alors en charge du projet, ne pouvait ignorer. Ainsi, lorsqu'il a déposé, quelques mois après, en novembre 2015, la demande complémentaire DD 11______/2, qui ne faisait aucunement état d'une modification de l'étendue de la surélévation initialement autorisée, il savait pertinemment que la réalisation de celle-ci ne porterait plus que sur deux des trois immeubles, de sorte qu'elle ne serait pas réalisée « conformément aux plans acceptés ». Il n'en est pas allé différemment au moment où les travaux de surélévation proprement dits ont débuté, soit, à teneur du recours, en juin 2016. Toutefois, à cette date, le recourant n’avait pas même encore déclaré retirer la demande complémentaire DD 11______/2. Dans ces conditions, il faut admettre qu'il a sciemment décidé de réaliser des travaux divergeant de ceux qui étaient autorisés, sans requérir l'autorisation qui lui aurait éventuellement permis de le faire, ni même s’enquérir auprès de l'autorité compétente de la légalité de sa démarche. Le fait qu’il ait pris langue avec M. N______ pour avoir son avis sur le sujet illustre bien qu’il n’ignorait pas que l'abandon de la surélévation du troisième immeuble pourrait poser problème. Au demeurant, compte tenu de ses qualifications, il ne pouvait l'ignorer. De plus, ses explications selon lesquelles il souhaitait déposer une APA en lieu et place de la requête DD 11______/2 permet de se convaincre du fait qu’il n’entendait pas requérir une telle modification, ne serait-ce car celle-ci n’aurait pas pu être acceptée selon la procédure accélérée, ce que, à l'évidence, il n'ignorait pas.

Par ailleurs, la thèse du recourant selon lequel aucune infraction ne serait à déplorer, compte tenu du fait que l'« écart négatif » entre la construction réalisée et celle qui était autorisée ne serait pas illégal ne saurait être suivie. La décision d’autorisation initiale DD 11______/1 était en effet délivrée « conformément aux plans acceptés », lesquels prévoyaient la surélévation conjointe et simultanée des trois immeubles 17______, 18______ et 19______, la CA ayant très explicitement, dans son dernier préavis du 15 novembre 2011, mis l’accent sur les motifs architecturaux et esthétiques liés à cette surélévation, qui portait sur trois immeubles formant un tout cohérent (« avec un volume sur l'ensemble ») et « s'intégr[ait] et dialogu[ait] avec le bâti existant », tout en laissant « la possibilité de surélever les immeubles voisins de manière similaire ».

Pour le surplus, le recourant ne démontre pas que M. N______ lui aurait donné une assurance concrète quant au fait que l’autorisation initiale lui permettait de réaliser uniquement deux des trois surélévations autorisées et que le dépôt d’une demande complémentaire ne s'avérait pas nécessaire (étant d'ailleurs relevé qu'il n’a pas sollicité l’audition de ce dernier dans le cadre de la présente procédure, afin de démontrer ses dires). Même à considérer qu'une telle assurance lui aurait été donnée, le recourant, en sa qualité d’architecte, de MPQ et d'ancien membre de la CA, devait clairement savoir qu'il ne pouvait se baser sur le seul avis de M. N______, avec qui il s'était de surcroît entretenu oralement et de façon informelle et, selon toute vraisemblance, parce qu'il le connaissait personnellement. Il ne pouvait en aucun cas considérer que la seule opinion de ce dernier pouvait suffire, dans un tel contexte, ne serait-ce car il ne pouvait ignorer que ce dernier ne disposait pas des prérogatives, tant formelles que matérielles, pour juger d'une telle situation. Au contraire, à l'évidence, il devait savoir qu’une modification du projet autorisé par la DD 11______/1 nécessitait le dépôt d’une requête complémentaire, ce d'autant plus, comme évoqué plus haut, que la CA avait insisté sur l’importance de la « cohérence » de l’ensemble.

Enfin, il n'est pas contesté que les logements issus de la surélévation des deux immeubles concernés ont été occupés sans qu'un dossier de plans conformes à l'exécution et une attestation de conformité n'aient été déposés, ce qui, compte tenu des circonstances, n’aurait au demeurant pas pu être fait.

Dans ces conditions, c'est à juste titre que l'autorité intimée a considéré que le recourant avait contrevenu aux art. 1 al. 1 et 7 et 7 al. 1 et 2 LCI, 10A al. 1 RCI, mais aussi 6 al. 2 LPAI, et, partant, qu'une amende pouvait lui être infligée en application de l'art. 137 LCI.

16.         Une fois qu'une autorisation de contruire requise a posteriori est entrée en force, la construction initialement formellement illicite est pleinement régularisée. Son statut est dès lors assimilable à celui de n'importe quelle construction licite dès l'origine. La régularisation complète de la construction n'empêche toutefois pas de sanctionner le procédé suivi par le constructeur (cf. ATA/206/2020 du 25 février 2020 consid. 4e et la référence citée).

17.         Dans un dossier où il avait été constaté que huit villas avaient subi plusieurs modifications en fin de construction par rapport au projet autorisé et qu'il manquait une servitude de distances et vues droites sur les parcelles voisines, la chambre administrative (alors Tribunal administratif) a retenu qu'il convenait d'appliquer l'art. 137 al. 2 LCI. En effet, l'architecte avait par la suite obtenu une autorisation complémentaire pour ces travaux et constitué une servitude de distance. Il s'agissait dès lors de travaux entrepris sans autorisation, mais qui étaient conformes aux prescriptions légales (ATA/132/1999 du 2 mars 1999).

Dans une autre affaire concernant des travaux effectués sans autorisation aux premier et deuxième étages d'un immeuble, la chambre administrative (alors encore Tribunal administratif) a également retenu que l'art. 137 al. 2 LCI était applicable dans ce dossier. En effet, le département avait délivré une autorisation de construire après le dépôt d'une demande d'autorisation de construire portant sur ces travaux (ATA/567/2005 du 16 août 2005).

Dans un arrêt concernant des travaux importants de rénovation d'une maison effectués sans autorisation, la chambre administrative a considéré que seul l'art. 137 al. 1 LCI était applicable. En effet, même si une autorisation de construire avait finalement été délivrée, l'amende ne sanctionnait pas les travaux tels qu'autorisés, mais ceux effectués antérieurement sans autorisation, avant les modifications réalisées pour la mise en conformité et l'obtention de l'aval du département, lesquels travaux initiaux avaient engendré des dégâts irréparables dans la zone protégée d’un village (ATA/1151/2015 du 27 octobre 2015).

Plus récemment (ATA/206/2020 du 25 février 2020), dans une affaire portant sur des « travaux ayant été entrepris en violation des règles topiques de la LCI et en violation des différentes autorisations de construire accordées par le département » dans la zone protégée de O______ (« notamment : transformations dans les étages (sous-sol, rez-de-chaussée et premier étage) ; changement d'affectation au sous-sol des locaux de service en logements ; création de deux logements en duplex au sous-sol et rez-de-chaussée ; abaissement de la terrasse sur la cour intérieure du niveau rez inférieur au niveau du sous-sol ; modification des façades ; modification de la toiture ; reprise du mur du sous-sol en sous-oeuvre de la façade du bâtiment principal »), la chambre administrative a retenu l'application de l’art. 137 al. 1 LCI, même si ces travaux avaient fait l'objet d'une autorisation de construire complémentaire ; à son sens, c'était en effet « uniquement pour des motifs de proportionnalité » qu'ils avaient été autorisés. Ils demeuraient toutefois non conformes aux prescriptions légales, en particulier les art. 127 LCI et 123 RCI (interdiction d'utiliser, pour l'habitation, des locaux dont le plancher est situé au-dessous du niveau général du sol adjacent). Cette problématique des locaux en sous-sol avait d'ailleurs été reprise dans le dernier préavis de la direction des autorisations de construire, où il était précisé qu'ils ne pourraient pas être utilisés pour l'habitation, mais uniquement être loués comme chambre d'hôtes pour une courte durée. Cette condition faisait partie intégrante de l'autorisation de construire complémentaire. Sur ce point, il semblait dès lors que le projet avait « fait l'objet d'une mise en conformité, puisque les locaux en sous-sol étaient jusqu'alors dévolus à du logement selon la note de service du 6 avril 2016 d'une architecte de l'OPS et selon le rapport d'enquête d'un inspecteur de l'OAC du 12 avril 2016 » (consid. 4g). En tout état de cause, il ressortait du préavis de la police du feu que le concept sécurité et les plans avaient été réadaptés, si bien que le projet finalement régularisé avait fait l'objet d'une mise en conformité. Elle a considéré que la « violation crasse » des dispositions de la LCI et de son règlement devait être sanctionnée avec grande sévérité, sous peine de voir un tel procédé se répéter, étant précisé que le recourant, MPQ, avait mis le département devant le fait accompli. La question d'une redevance et d'un maintien à titre précaire prévus à l'art. 139 LCI aurait d'ailleurs pu se poser. Malgré l'absence d'antécédent et au vu des éléments du dossier, pris dans leur ensemble, le DT n'avait pas abusé de son pouvoir d'appréciation en fixant le montant de l'amende à CHF 50'000.-, le recourant ne se plaignant au surplus pas du fait qu'elle mettrait en péril sa situation financière. Elle sanctionnait de manière proportionnée sa culpabilité pour les travaux réalisés dans une zone historique protégée. Cet arrêt a été confirmé par le Tribunal fédéral par arrêt 1C_209/2020 du 16 octobre 2020, lequel a retenu ce qui suit :

« S'il n'est certes pas contesté que les travaux litigieux avaient fait l'objet d'une autorisation de construire complémentaire délivrée le 20 juillet 2018 (DD 14______), il ressort cependant de l'arrêt attaqué que cette autorisation n'avait été délivrée que sous conditions et moyennant une mise en conformité de travaux réalisés initialement en contravention à la législation cantonale.

Il en va ainsi s'agissant des logements au rez-de-chaussée inférieur que le recourant avait exécutés, selon le préavis de la Direction des autorisations de construire (ci-après: la DAC) du 9 mars 2017, d'une manière contraire à l'art. 127 al. 1 LCI, cette disposition interdisant en particulier l'utilisation, pour l'habitation, de locaux dont le plancher est situé au-dessous du niveau général du sol adjacent. Alors que ces locaux avaient jusqu'alors été dévolus à un logement, l'autorisation de construire complémentaire du 20 juillet 2018 faisait ainsi expressément référence aux conditions fixées dans le second préavis établi le 10 avril 2018 par la DAC (cf. ch. 5), lequel disposait que ces locaux pouvaient "uniquement être loués comme chambres d'hôtes pour une courte durée" (cf. arrêt attaqué, consid. 4g p. 14). Il en est de même s'agissant des conditions posées par la Police du feu dans son préavis du 21 mars 2018, lesquelles devaient, aux termes de l'autorisation du 20 juillet 2018 (cf. ch. 5), être strictement respectées alors que, selon le préavis évoqué ci-avant, le "concept sécurité" et les plans avaient dû être adaptés en raison des travaux réalisés en sus du projet initialement approuvé en 2010 (cf. arrêt attaqué, ibidem). Pour sa part, la Commission des monuments, de la nature et des sites a relevé, dans son préavis défavorable du 12 avril 2017, que le projet tel qu'il avait été réalisé "n'aurait jamais été accepté si la procédure avait été suivie". Selon cette instance, l'excavation de la cour réduisait, de manière conséquente, la surface de la cour elle-même et créait des coursives qui n'avaient pas lieu d'être dans le contexte d'une cour intérieure de O______, zone protégée en vertu des art. 83 ss LCI (cf. arrêt attaqué, consid. 4h p. 15). 

Il n'est nullement critiquable de considérer, au vu de ce qui précède, que les constructions litigieuses, certes finalement autorisées et tolérées en vertu du principe de la proportionnalité, n'étaient pas, à tout le moins au moment de leur réalisation, en tous points conformes à la législation cantonale, pas plus qu'elles ne respectaient alors les conditions posées ultérieurement par le Département dans le cadre de l'autorisation de construire complémentaire.

De surcroît, le recourant ne conteste pas que la première autorisation délivrée en 2010 (DD 15______) était caduque au moment de la réalisation des travaux sur lesquels cette autorisation initiale portait, faute pour le recourant de les avoir entrepris dans le délai de deux ans prévu par l'art. 4 al. 5 LCI. Ainsi, alors que le Département avait expressément précisé que l'autorisation de construire complémentaire (DD 14______) n'avait pas pour effet de prolonger la validité de l'autorisation initiale (cf. ch. 4 du dispositif de l'autorisation du 20 juillet 2018), on comprend que l'amende litigieuse, également prononcée le 20 juillet 2018, était aussi susceptible de viser le comportement du recourant ayant consisté à laisser échoir le délai de l'art. 4 al. 5 LCI avant d'entreprendre les premiers travaux autorisés. 

Cela étant, on ne saurait reprocher à la cour cantonale d'avoir versé dans l'arbitraire en considérant qu'au moment d'infliger une amende au recourant, le Département n'était pas lié par la limite prévue par l'art. 137 al. 2 LCI, dont le texte suppose la réalisation de travaux conformes aux prescriptions légales ».

18.         De façon générale, selon l'art. 11 al. 4 LCI, le département peut, après consultation de la CA, autoriser un dépassement du gabarit prescrit par la loi lorsque les constructions prévues :

a) sont édifiées sur des terrains dont la surface libre est suffisante pour préserver les voisins des inconvénients que pourrait impliquer le supplément de hauteur ;

b) n'excèdent pas l'indice d'utilisation du sol qui résulterait de la stricte application de la loi ;

c) ne nuisent pas à l'harmonie de la silhouette de l'agglomération ni à la perception de sa topographie ;

d) se justifient par leur aspect esthétique et leur destination et sont compatibles avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier.

19.         En 3ème zone, afin de permettre la construction de logements supplémentaires, le département peut autoriser une augmentation de la hauteur du gabarit, à condition que celle-ci ne compromette pas l'harmonie urbanistique de la rue ; il est notamment tenu compte du gabarit des immeubles voisins (art. 27 al. 3 LCI).

20.         Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste ainsi libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (cf. not. ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3b ; ATA/498/2020 du 19 mai 2020 consid. 4b).

Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l'autorité inférieure suit les préavis requis, la juridiction de recours doit s'imposer une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des entités ayant formulé un préavis dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation, pour autant que l'autorité inférieure ait suivi l'avis de celles-ci. Elle se limite à examiner si le département ne s'est pas écarté sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3e ; ATA/639/2020 du 30 juin 2020 consid. 4d ; ATA/875/2018 du 28 août 2018 consid. 5b; ATA/1274/2017 du 12 septembre 2017 consid. 5).

La CA, composée essentiellement de spécialistes, est particulièrement apte à prendre position sur des questions qui font appel aux connaissances de ces derniers et est à même d'évaluer un projet de façon utile et objective (cf. not. ATA/1186/2017 du 22 août 2017 consid. 6c ; ATA/521/2017 du 9 mai 2017 consid. 5e et les références citées ; ATA/442/2015 du 12 mai 2015 consid. 5c ; ATA/634/2014 du 19 août 2014 consid. 6 ; ATA/720/2012 du 30 octobre 2012 consid. 10, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_635/2012 du 5 décembre 2013 ; ATA/385/2011 du 21 juin 2011 consid. 4b, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_362/2011 du 14 février 2012).

21.         En l’espèce, il ne peut être retenu, contrairement à ce que fait valoir le DT, que l’autorisation complémentaire DD 11______/3 n’a été délivrée qu'en application du principe de proportionnalité, ce qui, en soi, apparaîtrait pour le moins incongru, si ce n'est contraire au droit. Il serait en effet pour le moins surprenant que, sous couvert de motifs relevant exclusivement de la proportionnalité, une autorisation de construire puisse être octroyée alors que l'autorité s'estime convaincue que la condition légale essentielle nécessaire à son obtention (art. 27 al. 3 LCI) n'est pas réunie (cf. not. ATF 136 II 405 consid. 4.7 et 136 II 497 consid. 3.4 ; cf. aussi art. 1 al. 6 LCI a contrario ; cf. encore Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, pp. 305 s.), à tout le moins pas sans qu'il soit fait application de l'art. 139 LCI. Compte tenu de ce qui suit, cette question de principe pourra demeurer ouverte.

Force est en effet de constater que l'autorisation DD 11______/3 respecte la disposition topique invoquée par chacune des parties. L’art. 27 al. 3 LCI fait appel, comme le relève à juste titre le recourant, à une notion juridique indéterminée : « l’harmonie urbanistique de la rue ». Or, il ressort du préavis émis par la CA le 20 mars 2018 que, nonobstant le fait que le projet initial avait été autorisé pour une surélévation conjointe sur les immeubles 17______, 18______ et 19______, qui formaient un ensemble, elle admettait, « au vu de l'architecture proposée », le principe d’une surélévation uniquement sur deux des trois immeubles, à la condition que « l'expression d'éléments de division en façade correspondant à chaque allée, qui doivent être traités en retrait, tant du côté cour que sur rue », soit retrouvée. Dans cette mesure, elle laissait « en suspens » sa détermination quant à l'octroi de la dérogation prévue par l'art. 11 LCI. Par la suite, le 4 septembre 2018, elle a confirmé son avis de principe, n'émettant cette fois-ci plus de réserve à l'octroi de ladite dérogation, après avoir pris connaissance de l’engagement de Mme D______ à supprimer la joue en cas de surélévation (future) de son immeuble, cet élément ayant visiblement permis de répondre à la condition formulée dans son préavis précédent. Ce faisant, elle n'a pas soumis son préavis favorable à la réalisation de la surélévation de l’immeuble 17______. Elle a donc considéré que le projet présenté dans la requête DD 11______/3 pouvait être autorisé tel quel. Pour le surplus, contrairement à ce que le DT a rapporté à la Ville de Genève dans sa correspondance du 28 juillet 2020, il ressort tant de la déclaration de Mme D______ du 7 juin 2018 que de celle de Mme et MM. E______, F______ et G______ du 30 septembre 2019, par le biais de laquelle - répondant à la (seule) condition formulée par la CA dans son dernier préavis du 4 septembre 2018 - ces derniers se sont contentés de s’engager à laisser Mme D______ supprimer la joue construite sur leur immeuble lorsque celle-ci « voudra surélever son immeuble », que cette dernière ne s’est pas engagée à réaliser la surélévation dont il était question dans l'autorisation initiale.

Quant à l’avis rendu le 9 juillet 2019 par l’architecte cantonal, selon lequel le préavis de la CA du 4 septembre 2018 ne serait « pas pertinent », il ne figure pas au dossier. On ignore dès lors tout de cette prise de position, à propos de laquelle l’autorité intimée n'a d'ailleurs pas fourni d'explications. Quoi qu'il en soit, selon l'art. 3 de la loi sur la fonction d'architecte cantonal du 10 novembre 1995 (LFAC - L 1 57) celui-ci n'a pas pour mission d'émettre des préavis (cf. ATA/206/2020 du 25 février 2020 consid. 4h), cette tâche étant dévolue à la CA (art. 11 LCI). Cette dernière demeure ainsi l’instance spécialisée et son avis ne saurait être écarté sans autre, ce que le DT n'a, en somme, pas fait, puisqu'il l'a suivi en délivrant l'autorisation DD 11______/3 en ne la soumettant pas à la condition que l’immeuble 17______ soit (également) surélevé.

Pour le surplus, on observera que le DT n’a pas mis à exécution ses intentions formulées dans son courrier du 28 août 2019 à l'adresse des propriétaires des immeubles, renonçant ainsi en fin de compte à exiger tant un projet modifié qu'une remise en état, et délivré l’autorisation complémentaire DD 11______/3, après que ceux-ci lui avaient catégoriquement fait part de leur refus de se soumettre à ses exigences.

Dans ces conditions, il ne peut être retenu que les travaux en cause ne seraient pas conformes aux prescriptions légales. Il en résulte que l’art. 137 al. 2 LCI doit être appliqué au cas d’espèce. L’autorité était par conséquent liée par le montant maximal légal de l’amende fixé à CHF 20'000.- par cette disposition. En tant qu’elle prévoit une sanction dépassant ce seuil, la décision querellée viole donc le principe de la légalité et doit être réduite.

Au vu de la nature des infractions retenues, de leur ampleur et de leur gravité, ainsi que du statut, des qualifications et de l'expérience du recourant, sa faute apparaît particulièrement lourde, quand bien même les circonstances aggravantes énoncées à l'art. 137 al. 3 LCI n'apparaissent pas réalisées. A cette exception près, les éléments retenus par le DT pour arrêter la quotité de l'amende, énoncés dans sa réponse au recours, ne prêtent pas le flanc à la critique, de sorte qu'il peut y être renvoyé. Compte tenu de ce qui a été exposé plus haut, les éléments auxquels le recourant se réfère pour amenuiser sa faute, qui a un caractère intentionnel, à tout le moins par dol éventuel (sur cette notion, cf. arrêts du Tribunal fédéral 6B_259/2019, 6B_286/2019 du 2 avril 2019 consid. 5.1 ; 6B_1117/2016 du 18 juillet 2017 consid. 1.1.2 et 1.1.4), ne convainquent pas. Peu importe en outre qu’il n’ait, comme il le soulève, pas retiré un avantage financier particulier de l’entrée prématurée des locataires dans les logements nouvellement réalisés. De même, la prétendue urgence de réaliser la surélévation des immeubles, afin d’éviter des désagréments aux locataires, au demeurant peu crédible, ne saurait avoir un poids déterminant dans l'évaluation de sa culpabilité. Les violations légales en cause doivent être sanctionnée avec grande sévérité, sous peine également de voir un tel procédé se répéter, étant souligné que le recourant a mis le département devant le fait accompli (cf. ATA/206/2020 du 25 février 2020 consid. 4h).

Au vu de l'ensemble de ces circonstances, ladite faute, considérée globalement, apparaît suffisamment lourde pour justifier une amende d'un montant de CHF 20'000.-, correspondant au maximum prévu par la loi. Pour le surplus, il ne ressort pas du dossier, dès lors que le recourant ne s'est pas exprimé et n'a produit aucune pièce à cet égard, qu'une telle sanction l'exposerait à une situation financière difficile (cf. not. ATA/206/2020 du 25 février 2020 consid. 4h ; ATA/440/2019 du 16 avril 2019 consid. 6b ; ATA/19/2018 du 9 janvier 2018 consid. 9e ; ATA/1472/2017 du 14 novembre 2017).

22.         Il résulte de ce qui précède que le recours sera partiellement admis. La décision querellée sera annulée dans la mesure où elle inflige une amende de CHF 50'000.- au recourant et le montant de cette dernière sera réduit au montant précité.

23.         Vu cette issue, un émolument, en soi réduit, de CHF 900.- sera mis à la charge du recourant, qui n'obtient que partiellement gain de cause (art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Une indemnité de procédure de CHF 1'000.-, à la charge de l'autorité intimée, lui sera par ailleurs allouée (art. 87 al. 2 LPA et 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), valant participation aux honoraires d'avocat qu'il a dû supporter aux fins de la procédure (cf. not. ATA/345/2021 du 23 mars 2021 consid. 6 et l'arrêt cité ; ATA/1113/2019 du 1er juillet 2019 consid. 3c ; ATA/1089/2016 du 20 décembre 2016 consid. 12h ; ATA/897/2015 du 1er septembre 2015 consid. 4b).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours formé le 14 septembre 2020 par Monsieur A______ contre la décision prise à son encontre le 28 juillet 2020 par le département du territoire ;

2.             l'admet partiellement ;

3.             annule la décision précitée en tant qu'elle fixe le montant de l'amende infligée à Monsieur A______ à CHF 50'000.- ;

4.             réduit le montant de cette amende à CHF 20'000.- ;

5.             confirme ladite décision pour le surplus ;

6.             met un émolument de CHF 900.- à la charge de Monsieur A______, lequel est couvert par son avance de frais du même montant ;

7.             alloue à Monsieur A______, à la charge du département du territoire, une indemnité de procédure de CHF 1'000.- ;

8.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Yves JOLIAT, président, Carmelo STENDARDO et Damien BLANC, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

Le président

Yves JOLIAT

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière