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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1439/2016

ATA/19/2018 du 09.01.2018 sur JTAPI/64/2017 ( LCI ) , REJETE

Recours TF déposé le 15.02.2018, rendu le 23.05.2019, REJETE, 1C_80/2018
Descripteurs : DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS ; CONSTRUCTION ET INSTALLATION ; PERMIS DE CONSTRUIRE ; AMENDE ; REPRÉSENTATION ; NOTIFICATION DE LA DÉCISION ; MANDATAIRE ; ARCHITECTE ; DEVOIR PROFESSIONNEL ; POUVOIR D'APPRÉCIATION ; LÉGALITÉ ; PROPORTIONNALITÉ ; PRINCIPE DE LA BONNE FOI ; ÉGALITÉ DE TRAITEMENT
Normes : LCI.6; LCI.129; LCI.130; LPA.1; LPAI.6; Cst.9; Cst.5.al3; Cst.8.al1; LCI.137; LPG.1; Cst.36.al3; CP.47
Résumé : L'amende de CHF 10'000.- infligée au recourant, en sa qualité de mandataire professionnellement qualifié (MPQ), pour inexécution d'une décision ordonnant la mise en conformité des éléments d'une construction ne respectant pas l'autorisation de construire initiale dans le délai imparti, est justifiée in casu, tant dans son principe que dans son montant. En sa qualité de MPQ, le recourant demeure responsable de l'exécution conforme de l'autorisation de construire initiale accordée et de la régularisation de ladite construction, faute d'avoir informé en temps voulu le département de l'extinction de son mandat. La dégradation des relations contractuelles avec sa mandante, relevant du droit privé, ne saurait être opposée au département, qui n'en avait au demeurant pas été informé. La réalisation de la vente à terme de l'immeuble concerné après l'échéance du délai imparti pour la régularisation de la construction ne saurait davantage permettre de tels manquements à ses obligations légales. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1439/2016-LCI ATA/19/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 janvier 2018

3ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Béatrice Antoine, avocate

contre

DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 janvier 2017 (JTAPI/64/2017)


EN FAIT

1) Le 8 février 2013, B______ (ci-après : B______), propriétaire de la parcelle n° 1______ de la commune de Genève-Cité à l'adresse
______, a sollicité du département de l'aménagement, du logement et de l'énergie (ci-après : DALE) la délivrance d'une autorisation de construire en vue du « réaménagement d'une surface commerciale » (DD 2______).

Cette requête, déposée par Monsieur C______, architecte et associé gérant de D______, visait la transformation de l'ancien cinéma E______ en une salle polyvalente destinée à accueillir diverses manifestations et activités culturelles.

2) Par décision du 27 novembre 2013, le DALE a délivré cette autorisation (DD 2______), intitulée « transformation d'un ancien cinéma en salle polyvalente culturelle ».

Celle-ci est entrée en force selon le jugement du 28 mai 2014 du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

3) F______ (ci-après : F______), représentée par son associé gérant, Monsieur A______, architecte inscrit au tableau des mandataires professionnellement qualifiés (ci-après : MPQ) institué par l'art. 2 de la loi sur l'exercice des professions d'architecte et d'ingénieur du 17 décembre 1982 (LPAI – L 5 40), a été mandaté par B______ pour diriger les travaux.

En tant que MPQ, M. A______ a été l'interlocuteur du DALE pendant l'exécution des travaux.

4) Par courrier du 10 novembre 2014, la propriétaire de l'immeuble voisin a informé M. A______ qu'elle refusait sa demande d'une pose de gaines de ventilation sur le mur mitoyen.

5) Selon un rapport de Monsieur G______, inspecteur auprès de l'inspection de la construction du DALE, du 27 février 2015, établi à la suite d'une réunion de chantier tenue sur place, « d'importantes gaines de ventilation [avaient] été installées dans la cour dont certaines bouchant partiellement le jour des fenêtres du 2ème étage. Il exist[ait] à cet étage un logement et une arcade commerciale. Le dégagement des vues droites minimales de 4 m [n'était] pas respecté face aux vitrages du logement. Ces gaines n'apparaissaient nullement sur les plans visés ne varietur. Ces gaines [étaient] susceptibles de créer de nombreuses gênes (olfactives, sonores, etc.) sans compter l'aspect esthétique à prendre en compte. De surcroît, le vide d'étage du sas d'entrée du local [était] de moins de 2,2 m non conformément aux plans validés. Concernant les portes au raz [sic] des marches d'escaliers, [il se référait] à [son] courriel du 27.02. OPA avait remarqué dans son rapport du 03.02 qu'une porte palière d'un appartement [avait] été modifiée au dernier étage de l'immeuble (______) ».

6) Par courriel du 26 février 2015, M. A______ s'est engagé auprès de M. G______ à déposer une demande d'autorisation de construire complémentaire afin de régulariser la situation, en lui confirmant que c'était F______ qui avait été « en charge de l'exécution de ce dossier en lieu et place de D______ ».

7) Le 27 février 2015, M. G______ lui a répondu qu'un dossier d'infraction (INF 3______) allait être ouvert, en prenant note de ce que M. A______ était responsable de ce chantier.

8) Par courrier du même jour, anticipé par courriel, M. A______ lui a confirmé qu'il déposerait d'ici au 2 mars 2015 une demande d'autorisation de construire complémentaire pour « régulariser la situation des gaines de ventilation et son incidence sur une pièce de l'appartement situé au 2ème étage ». Il l'informait par ailleurs de la finalisation de l'achat de l'immeuble concerné par la Coopérative E______ (ci-après : la coopérative), de sorte que la problématique des gaines de ventilation serait prise en compte dans un « projet futur de transformation de l'immeuble comprenant un changement d'affectation de bureaux en logements » (DD 4______).

9) Après des échanges avec Monsieur H______ et Madame  I______, administrateurs de la coopérative, sur les solutions proposées, M. A______ a déposé la demande d'autorisation de construire complémentaire le 4 mars 2015 (DD 5______), portant sur les modifications consistant en des « aménagements intérieurs gaines extérieures dans la cour et réaménagement d'un appartement au 2ème étage ».

Le DALE en a accusé réception le 18 mars 2015.

10) Par courrier du 5 mars 2015, le DALE a attiré l’attention de M. A______ sur le fait que cette situation était susceptible de constituer une infraction à la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI – L 5 05). L'instruction de la procédure restait réservée jusqu'à l'issue de celle de la demande complémentaire DD 5______.

11) Par courrier du 23 mars 2015, M. A______ a observé que sa société n'était pas responsable de la non-conformité de la porte palière du dernier étage de l'immeuble, son mandat n'ayant pas porté sur ledit étage. Il invitait dès lors le DALE à s'adresser à la propriétaire des lieux à ce sujet.

12) Le 26 mai 2015, le DALE a informé M. A______ et la SI de la nécessité de modifier le projet du dossier DD 5______ conformément aux préavis de l'inspection de la construction du 10 mars 2015 et de la commission d'architecture du 12 mai 2015.

13) À la suite de divers échanges avec des collaborateurs du DALE, M. A______ a confirmé à M. G______, par courriers des 13 juillet et 18 août 2015, qu'une des variantes de disposition des gaines proposées avait été retenue et acceptée par la commission d’architecture. Concernant le vide d'étage, la différence de dimensions de 2,16 m au lieu de 2,20 m correspondait à l’installation d'un plafond phonique imposée par l'acousticien. Il invitait le DALE à se déterminer à ce sujet. La coopérative avait effectivement déposé un projet de modification des bureaux en logements (DD 4______), comprenant également une solution de rabaissement et la nouvelle disposition des gaines. Ces travaux allaient donc être entrepris sous la responsabilité du mandataire de celle-ci.

14) Par décision du 5 novembre 2015 adressée à M. A______, le DALE a délivré l'autorisation de construire complémentaire DD 5______. Ce document visait Monsieur J______ comme requérant, M. A______ en tant que MPQ et B______ comme propriétaire. En annexe, était jointe une facture au nom de B______ pour le paiement de l'émolument. En outre, comme les travaux considérés avaient été engagés sans autorisation, le DALE a infligé à M. A______ une amende administrative de CHF 10'000.- au sens de
l'art. 137 LCI. La facture y relative, libellée au nom de B______, était également annexée. L'ordre était donné à M. A______ de procéder aux travaux de mise en conformité de l'ensemble de la construction par rapport aux plans visés ne varietur dans un délai de trois mois dès parution dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) le 13 novembre 2015, soit le 13 février 2016.

Non contestée, cette décision est entrée en force.

15) Par courrier du 11 mars 2016, le DALE a informé M. A______ que, selon un constat effectué sur place le 8 mars 2016, aucun travail de remise en conformité n'avait été exécuté. Un délai lui était imparti pour exercer son droit d'être entendu, cette situation étant susceptible de constituer une infraction.

16) Le 14 mars 2016, M. A______ a répondu qu'il n'avait pas été mandaté par la propriétaire pour l'exécution des travaux de mise en conformité. Tous les documents relatifs à l'autorisation de construire complémentaire DD 5______ avaient été transmis à la SI. Le DALE devait ainsi s’adresser à elle.

17) Le 22 mars 2016, le DALE lui a fait savoir qu'il s'adresserait désormais au requérant « pour la suite de cette affaire ».

18) Le 23 mars 2016, B______ a elle-même fait suite au courrier du 11 mars 2016 du DALE, dont M. A______ lui avait transmis copie le 15 mars 2016. L'immeuble concerné avait été acquis le 1er mars 2016 par K______ . La charge d'exécuter les travaux en retard incomberait à l'acquéreuse, laquelle envisageait d'en effectuer d'autres les englobant. Dans l'attente de la décision de la nouvelle propriétaire, B______ sollicitait une prolongation du délai imparti.

19) Le lendemain, se référant au courrier de M. A______ du 14 mars 2016, le DALE a écrit à B______ qu’il la tenait « désormais pour seul interlocuteur provisoirement responsable de la suite de cette affaire ». Un délai lui était imparti pour se déterminer « quant à la non-réalisation de [son] ordre du 5 novembre 2015 » et lui fournir le nom d'un nouveau MPQ.

20) Par courrier du 4 avril 2016, M. H______ a informé le DALE que K______ était devenue propriétaire de l'immeuble concerné le 9 mars 2016. Lors de l'achat, elle avait été informée des demandes d'autorisation de construire DD 4______ et 5______, de même que du dossier d'infraction INF 3______, qu'elle prévoyait de reprendre à son nom. Afin de réduire les nuisances et les frais inhérents aux travaux, elle envisageait de les regrouper sur une même période. Le nom du nouveau MPQ serait communiqué ultérieurement au DALE.

21) Par décision du 5 avril 2016, le DALE a imparti à M. H______ un délai de six mois pour exécuter l’ordre de remise en état du 5 novembre 2015, aucune prolongation supplémentaire n'étant envisageable. Un second délai lui était imparti pour lui communiquer le nom du nouveau MPQ en charge du dossier DD 5______.

Ce courrier n’ayant pas été retiré, le DALE l'a adressé directement à K______ le 21 avril 2016.

22) Par décision du 6 avril 2016, le DALE a infligé à M. A______ une amende administrative de CHF 10'000.- en application de l’art. 137 LCI, pour non-exécution de l’ordre donné dans son courrier du 5 novembre 2015. Le bulletin de versement joint était libellé à son nom.

23) Par acte du 3 mai 2016, M. A______ a recouru auprès du TAPI contre cette décision, en concluant à son annulation.

In casu, aucun élément ne permettait au DALE de lui infliger une amende. Le fondement de celle-ci résidait dans l’inexécution de l’ordre de mise en conformité du 5 novembre 2015, lequel avait manifestement été donné à B______. En sa qualité d’architecte mandataire, il n’était pas en son pouvoir de remédier à l’inexécution des travaux de mise en conformité ordonné au maître d’ouvrage. Il ne revêtait ainsi aucune qualité de perturbateur, de sorte qu’il ne pouvait être sanctionné à ce titre. Lui-même n’avait jamais été le mandataire de la propriétaire, puisque c’était l’entreprise F______ qui avait été mandatée, mais pas pour l’exécution des travaux de mise en conformité. Le DALE le savait et en avait dûment pris note. Aucune faute ne pouvait lui être reprochée.

24) Dans ses écritures responsives du 11 juillet 2016, le DALE a conclu au rejet du recours.

Comme la remise en état ne supposait pas d’autorisation de construire conformément à l’art. 132 al. 2 LCI, l’absence de mandat ne constituait pas un empêchement dirimant. Ce n’était que quatre mois après avoir reçu l’ordre de remise en état et sur interpellation de sa part que M. A______ avait fait valoir cet argument contrairement à l’art. 4 du règlement d’application de la loi sur l’exercice des professions d’architecte et d’ingénieur du 9 novembre 1983
(RPAI – L 5 40.01). Aux termes de l’art. 6 LCI, un rôle de garant était attribué aux MPQ. Comme M. A______ était son unique interlocuteur et qu’il l’avait informé qu’il recevrait toute la correspondance afférente au dossier, la sanction pécuniaire lui avait été infligée à juste titre. En outre, lorsque l’ordre de rétablir une situation conforme au droit lui avait été personnellement notifié, M. A______ n’avait pas fait valoir d’erreur de destinataire. La récidive était avérée. Après avoir violé l’autorisation de construire et avoir été sanctionné à cet égard, M. A______ avait ignoré l’ordre de remise en état. La proximité temporelle de ces deux infractions constituait indubitablement un facteur aggravant qui aurait même permis de justifier un montant plus élevé que la première amende. Selon la jurisprudence, dans la fixation du montant de l’amende, la qualité de MPQ était également prise en considération. Le principe de proportionnalité était respecté.

25) Le 19 août 2016, M. A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions.

L’amende du 5 novembre 2015 pour l’inexécution des travaux était libellée au nom de B______. Il ne pouvait pas se voir reprocher l’inexécution d’un ordre de conformité dont l’échéance avait été prolongée à fin mars 2016, alors même que l’immeuble avait été vendu le 1er mars 2016 et que son mandat avait pris fin, ce dont le DALE avait pris acte. La position du DALE revenait à le pénaliser pour le prétendu non-respect d’un délai qu’il ne pouvait matériellement pas tenir.

26) Le 22 septembre 2016, le DALE a dupliqué.

La décision du 5 novembre 2015 avait été adressée à M. A______ directement. Le libellé de la facture n’était pas de nature à l’induire en erreur puisque la procédure avait été initiée à son encontre uniquement et que la discordance n’avait pas été invoquée auparavant. Entrée en force, cette décision n’était plus contestable. À l’échéance du délai fixé dans la décision du 5 novembre 2015, soit au mois de février 2016, aucune remise en état n’avait été effectuée et aucun changement de propriétaire ni de mandataire n’était intervenu, ni n’avait été communiqué au DALE. Durant ce laps de temps, M. A______ n’avait pas soulevé la moindre contestation à l’encontre de l’ordre notifié et n’avait même pas demandé une prolongation du délai. Le fait que celui-ci ne s’était pas soumis à l’ordre donné dans le délai imparti suffisait à justifier la sanction litigieuse. Les circonstances dont se prévalait M. A______ n’y changeaient rien puisqu’elles étaient intervenues après l’échéance du délai qui lui avait été imparti et ne constituaient pas un obstacle à la mise en conformité. M. A______ ne pouvait pas non plus se prévaloir de la prolongation du délai requise par la nouvelle propriétaire.

27) Par courrier du 13 octobre 2016, M. A______ a repris son argumentation précédente, en relevant que dans son envoi du 5 novembre 2015, le DALE avait également joint l’autorisation de construire DD 5______, adressée à B______. De bonne foi, il ne pouvait imaginer que cet envoi le concernait personnellement. De manière générale, le DALE adressait tous ses envois destinés aux propriétaires via leurs architectes représentants. Celui-ci ne pouvait donc se prévaloir des décisions du 5 novembre 2015 destinées à B______ pour légitimer sa décision du 6 avril 2016.

28) Dans sa détermination du 4 novembre 2016, le DALE a maintenu sa position, reprenant son argumentation précédente. Vu que la décision du 5 novembre 2016 (sic) visait la réalisation de travaux sans autorisation, l’art. 6 al. 2 LCI ne laissait guère de place au doute quant à son destinataire. En cas d’hésitation sur le véritable destinataire, il appartenait au concerné de se renseigner.

29) Par jugement du 17 janvier 2017, le TAPI a rejeté le recours.

Il n'était pas contesté que M. A______ était le mandataire de la société propriétaire pour les travaux en cause, ni qu'il avait omis d'adresser au DALE l'avis d'extinction de son mandat. Il ne l'avait fait que le 14 mars 2016, après avoir été interpelé par ce dernier. Il devait donc, à titre personnel, répondre envers l'autorité des manquements intervenus dans la réalisation des travaux et des violations de la loi dont il était question in casu, seule une personne physique pouvant revêtir la qualité de MPQ. Les évènements qui s'étaient déroulés postérieurement au délai accordé au 13 février 2016 étaient sans pertinence. Bien que la communication du DALE du 5 novembre 2015 eût été quelque peu ambigüe, le texte de la décision et le déroulement de la procédure d’infraction laissaient clairement paraître l'obligation, faite à M. A______, de procéder aux travaux de mise en conformité. En cas de doute sur le véritable destinataire de cette décision, il lui appartenait de se renseigner auprès de l'autorité, ce qu'il n'avait pas fait. Le fait qu'il était chargé de la direction des travaux lorsque le DALE avait émis son ordre de remise en état et qu'il avait constaté que celui-ci n'avait pas été respecté, suffisait à fonder sa responsabilité. L'infraction reprochée à M. A______ était donc objectivement réalisée. L'amende était fondée dans son principe, sa faute revêtant à tout le moins la forme de la négligence. Compte tenu de sa position, de son rôle, du déroulement des faits et de ses connaissances professionnelles, il ne pouvait ignorer la nature et la portée de son obligation, découlant des règles essentielles régissant sa profession. S’agissant d'un cas de récidive, sa faute était grave, d'autant plus qu'en sa qualité de MPQ, il avait un devoir spécial vis-à-vis de l'autorité quant au respect du droit public. Le montant de l'amende de CHF 10'000.- restait mesuré. M. A______ n'alléguait pas que son paiement l'exposerait à une situation financière difficile. L'autorité avait fait une application correcte de la loi, sans excéder ni abuser de son pouvoir d'appréciation.

30) Par acte du 17 février 2017, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, en concluant principalement à son annulation, à celle de la décision du DALE du 6 avril 2016 ou à la constatation que l'amende du 6 avril 2016 était « nulle et de nul effet tout comme l'injonction de travaux de mise en conformité de la décision du 5 novembre 2015 », « sous suite de frais et dépens » comprenant une indemnité équitable. Subsidiairement, il sollicitait la réduction du montant de l'amende du 6 avril 2016 à CHF 100.-. Plus subsidiairement, il demandait le renvoi de « la décision » (sic) au TAPI pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

a. Il faisait valoir une violation de l'interdiction de l'arbitraire, du principe de la bonne foi et du principe de l'égalité de traitement dans l'application de l'art. 6 LCI, ainsi qu'une impossibilité d'exécuter les travaux de mise en conformité ordonnée par la décision du 5 novembre 2015 et la nullité de cette injonction.

Des éléments factuels pertinents relatifs à l’étendue et à l’extinction de son mandat n’avaient pas été retenus par le premier juge de manière arbitraire. Le 23 mars 2015, il avait précisé les limites de son mandat, ne comprenant pas la porte palière au dernier étage. Le 18 août 2015, il avait informé le DALE de l’extinction de son mandat concernant l’installation des gaines de ventilation dans la cour de l’immeuble. Il avait alors également formulé deux propositions concernant le sas, auxquelles le DALE n’avait jamais répondu. Aucune responsabilité sur ces points ne pouvait donc être retenue à son encontre. Le 14 mars 2016, il avait derechef informé le DALE qu’il n’avait pas reçu de nouveau mandat du propriétaire d’effectuer les travaux de mise en conformité. Il avait ainsi respecté les art. 6 al. 1 et 2 LCI.

À réception de la décision du 5 novembre 2015, il n’avait plus la direction des travaux. Cette notification était donc nulle. L’ensemble de sa correspondance avec les différents intervenants avait été mentionné et versé à la procédure, afin de démontrer sa conscience professionnelle non critiquable et sa volonté de transparence, en dépit du fait que la propriétaire ne s’acquittait plus de ses notes d’honoraires et acomptes. À tout le moins depuis le 24 mars 2015, toute relation entre B______ et lui était rompue. Le fait que celle-ci n’eût pas communiqué le nom d’un nouveau MPQ pour la mise en conformité des gaines ne pouvait lui être imputé. Il ignorait tout de ces projets de vente de l’immeuble à K______ le 22 décembre 2015. Dans sa demande de prolongation de délai, B______ ne faisait d’ailleurs état que de sa responsabilité ou de celle de l’acheteuse. Au vu de la chronologie et de la complexité des faits en cause, il fallait retenir que la situation avait été floue entre le 22 décembre 2015 et le 13 février 2016. L’absence de communication de cette vente au DALE ne pouvait lui être imputée. Son mandat étant terminé, il n’avait pas à solliciter de prolongation de délai. Le projet visé ne varietur autorisé avait finalement été abandonné le 14 juin 2016. Il était manifestement arbitraire d'amender une personne pour la non-exécution de travaux qui ne devaient plus être réalisés.

À titre subsidiaire, il invoquait une application arbitraire de l'art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
(Cst. - RS 101) dans l'évaluation de la faute, compte tenu des éléments précités et de l’absence de récidive. À sa demande, le DALE s'était effectivement rendu sur place le 23 février 2015 et avait constaté le commencement des travaux.

b. À l'appui de son recours, M. A______ a produit des pièces, dont les documents suivants :

-                 un échange de courriers du 1er avril 2015 entre B______ et M. A______, la première contestant ses prétentions en paiement d'honoraires et le second rappelant les retards que le projet avait rencontré en raison d'imprévus et de dysfonctionnements dus à celle-là ;

-                 deux courriers de relance des 27 avril 2014 et 17 juin 2015 de M. A______ à B______ en vue du paiement de ses honoraires ;

-                 une lettre du 13 novembre 2015 de M. A______ à B______, lui rappelant qu'elle avait pris la décision de « poursuivre le chantier en disposant ces gaines [de ventilation] différemment en taille et en nombre et ce, en toute connaissance de cause des risques encourus » et lui transmettant une copie de la décision du 5 novembre 2015 ainsi que de ses annexes, en la priant de régler les honoraires dus considérant que son mandat s'achevait désormais ;

-                 un acte notarié du 22 décembre 2015 relatif à la vente de l'immeuble concerné par la SI à K______ pour un terme fixé au 29 février 2016. Cette dernière déclarait « parfaitement connaître les dossiers des autorisations de construire DD 5______ et DD 6______ qui [étaient] également compris dans la vente. Le vendeur s'engage[ait] à effectuer d'ici le 30 juin 2016, à ses frais, les travaux nécessaires à la mise en conformité des gaines techniques de ventilation […] » ;

-                 un courrier du 26 janvier 2017 L______, architectes, au DALE indiquant que cette entreprise avait été mandatée pour la régularisation de l'infraction INF 3______ et que K______ avait vendu l'immeuble concerné à M______ le 29 juillet 2016.

31) Par pli du 22 février 2017, le TAPI a transmis son dossier, sans formuler d'observations.

32) Dans ses écritures responsives du 22 mars 2017, le DALE a conclu au rejet du recours, en maintenant sa position.

Bien que le recourant considérait que des faits pertinents avaient été omis par les premiers juges, il s'était essentiellement limité à en modifier la formulation retenue par le jugement querellé. Quant aux éléments supplémentaires relatés, il n'était pas indiqué en quoi ils auraient été ou seraient de nature à influencer l'issue du litige. La plupart d'entre eux relevait du rapport contractuel qui le liait à la propriétaire, soit du droit privé, ce qui n'était pas pertinent in casu.

M. A______ ne niait pas avoir assumé l'exécution des travaux litigieux, notamment l'installation des gaines de ventilation, éléments admis dans son courrier du 23 mars 2015. Les travaux réalisés ne correspondaient toutefois pas à l'autorisation de construire initiale. La prétendue limitation de son mandat dans son courrier du 18 août 2015 était intervenue postérieurement aux travaux effectués sans autorisation. M. A______ n'avait informé le DALE qu'au mois de mars 2016 de la fin de son mandat, date déterminante au sens de l'art. 6 al. 2 LCI. Le paiement de l'amende par la propriétaire relevait de la relation interne de droit privé entre celle-ci et M. A______, de sorte qu'il n'était pas opposable au DALE. Le prétendu abandon du projet autorisé ne constituait pas un obstacle à l'exécution de l'ordre de remise en état. Selon l'art. 132 al. 2 LCI,
celle-ci ne supposait pas d'autorisation de construire, de sorte que la renonciation à une autorisation de construire n'influait pas sur cette obligation. La complexité de la situation invoquée par M. A______ ne justifiait pas l'insoumission à l'ordre de mise en conformité.

33) Par écritures du 23 avril 2017, M. A______ a répliqué, en reprenant son argumentation précédente. Le mandataire de la demande d'autorisation de construire DD 6______, déposée par la coopérative et enregistrée le 3 juin 2015, était Monsieur N______, architecte. L'exécution de la mise en conformité des gaines était intégralement imbriquée dans ce projet d'ensemble. Ne pas retenir l'établissement de l'extinction du mandat par actes concluants ainsi que la reprise de la responsabilité par M. N______, puis par B______ et K______ à la suite de la vente du 22 décembre 2016 était arbitraire. En traitant son cas comme celui du propriétaire qui demeurait toujours le même et procédait à un savant changement de MPQ pour noyer la responsabilité de chacun, le DALE et les premiers juges avaient traité de manière identique un cas totalement différent. Ces circonstances survenues avant l’échéance du délai d’injonction au 13 février 2016 rendaient donc impossible l’exécution des travaux de mise en conformité des gaines par lui. Depuis le 26 janvier 2017, une nouvelle autorisation de construire était en cours, incluant encore une autre variante pour la mise en conformité des gaines dont le responsable de l’exécution était Monsieur L______, architecte.

34) Le 2 mai 2017, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 – LOJ – E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 – LPA – E 5 10).

2) L’objet du litige porte sur l’amende de CHF 10'000.- infligée le 6 avril 2016 au recourant, en sa qualité de MPQ, pour inexécution de la décision du 5 novembre 2015 ordonnant la mise en conformité des éléments d’une construction ne respectant pas l’autorisation de construire initiale, dans le délai imparti au 13 février 2016.

3) Le recourant fait grief au département, puis au TAPI d’avoir retenu à tort, en violation des principes de l'interdiction de l'arbitraire, de la bonne foi et de l'égalité de traitement, qu'il aurait commis des violations à la loi justifiant l'amende infligée le 6 avril 2016, en tant que destinataire de la décision du 5 novembre 2015.

4) a. À teneur de l’art. 6 LCI, la direction des travaux dont l’exécution est soumise à autorisation de construire doit être assurée par un mandataire inscrit au tableau des MPQ dont les capacités professionnelles correspondent à la nature de l’ouvrage. Demeurent réservées les constructions ou installations d’importance secondaire, qui font l’objet de dispositions spéciales édictées par voie réglementaire (al. 1). Le mandataire commis à la direction des travaux en répond à l’égard de l’autorité jusqu’à réception de l’avis d’extinction de son mandat (al. 2).

b. Lorsque l’état d’une construction, d’une installation ou d’une autre chose n’est pas conforme aux prescriptions de la LCI, des règlements qu’elle prévoit ou des autorisations délivrées en application de ces dispositions légales ou réglementaires, le DALE peut notamment ordonner, à l’égard des constructions, des installations ou d’autres choses, la remise en état, la réparation, la modification, la suppression ou la démolition (art. 129 let. e et 130 LCI).

Les propriétaires ou leurs mandataires, les entrepreneurs et les usagers sont tenus de se conformer aux mesures ordonnées par le DALE en application des art. 129 et 130 LCI (art. 131 LCI). Le département notifie aux intéressés, par lettre recommandée, les mesures qu’il ordonne. Il fixe un délai pour leur exécution, à moins qu’il n’invoque l’urgence (art. 132 al. 1 LCI).

c. La LPAI a pour objet de réglementer l’exercice indépendant de la profession d’architecte ou d’ingénieur civil, ou de professions apparentées, sur le territoire du canton de Genève. L’exercice de cette profession est restreint, pour les travaux dont l’exécution est soumise à autorisation en vertu de la LCI, aux MPQ reconnus par l’État (art. 1).

À teneur de l’art. 6 LPAI, le mandataire est tenu de faire définir clairement son mandat (al. 1). Il s’acquitte avec soin et diligence des tâches que lui confie son mandant, dont il sert au mieux les intérêts légitimes tout en s’attachant à développer, dans l’intérêt général, des réalisations de bonne qualité au titre de la sécurité, de la salubrité, de l’esthétique et de l’environnement (al. 2).

Il résulte de cette dernière disposition que le respect du droit public est l’un des devoirs incombant à l’architecte (Blaise KNAPP, La profession d’architecte en droit public, in Le droit de l’architecte, 3ème éd., 1986, p. 487 ss n. 510).

d. Selon les travaux préparatoires de la LPAI, la ratio legis de celle-ci était d’atteindre, par des restrictions appropriées au libre exercice de cette activité économique, un ou plusieurs buts d’intérêt public prépondérant à l’intérêt privé –opposé – des particuliers. Il peut s’agir d’assurer aux mandants, à l’instar des capacités professionnelles exigées des mandataires dans le domaine médical ou juridique, des prestations d’une certaine qualité nécessitée par la nature ou l’importance des intérêts du mandant. Il peut s’agir aussi de l’intérêt social de la communauté dans son ensemble, aux titres de la sécurité, de la santé, de l’esthétique et de la protection de l’environnement, à ce que les constructions ne comportent pas de risques pour le public, ni ne déparent l’aspect général des lieux. Il peut s’agir notamment de l’intérêt des autorités compétentes à ce que leurs interlocuteurs, lors de la présentation et de l’instruction de dossiers de demandes d’autorisations de construire, respectivement lors de l’exécution des travaux, soient des personnes qualifiées, contribuant ainsi, d’une manière générale, à une meilleure application de la loi (MGC 1982/IV p. 5204).

Il s’ensuit que les manquements professionnels de l’architecte concernés par la LPAI peuvent aussi être trouvés dans les relations qu’entretient ce dernier avec les autorités administratives, respectivement dans l’exécution scrupuleuse des injonctions qu’elles formulent et, d’une manière générale, dans le respect des règles juridiques du droit de la construction justifiant l’existence même du tableau des architectes habilités (arrêt du Tribunal fédéral 2C_268/2010 du 18 juin 2010 consid. 6 ; ATA/118/2013 du 26 février 2013). La chambre de céans n'a ainsi jamais annulé une amende fondée sur la LCI au motif qu'elle devait être décernée au propriétaire et non à l'architecte (ATA/569/2015 du 2 juin 2015 ; ATA/836/2014 du 11 novembre 2014 ; ATA/632/2007 du 11 décembre 2007).

e. Le mandant doit endosser la responsabilité des actes de son mandataire (ATA/260/2014 du 15 avril 2014 consid. 15e ; ATA/135/2011 du 1er mars 2011 consid. 10).

5) L'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation constituent des violations du droit, qui peuvent être revues par les autorités de recours. Cela signifie qu'une autorité judiciaire de recours qui contrôle la conformité au droit d'une décision vérifiera si l'administration a, dans l'exercice du pouvoir d'appréciation que lui confère la loi, respecté le principe de la proportionnalité – et les autres principes constitutionnels tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'égalité, la bonne foi –, mais s'abstiendra d'examiner si les choix faits à l'intérieur de la marge de manœuvre laissée par ces principes sont « opportuns » ou non (Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2015, p. 569 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 174-175 n. 524). L’autorité commet un abus de son pouvoir d'appréciation tout en respectant les conditions et les limites légales, si elle ne se fonde pas sur des motifs sérieux et objectifs, se laisse guider par des éléments non pertinents ou étrangers au but des règles ou viole les principes généraux précités (Benoît BOVAY, op. cit., p. 566).

6) Le principe de la bonne foi, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 ;
137 I 69 consid. 2.5.1 ; 131 II 627 consid. 6.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_151/2012 du 5 juillet 2012 consid. 4.2.1 ; 2C_1023/2011 du 10 mai 2012 consid. 5). Conformément au principe de la confiance, qui s’applique aux procédures administratives, les décisions, les déclarations et comportements de l’administration doivent recevoir le sens que l’administré pouvait raisonnablement leur attribuer en fonction des circonstances qu’il connaissait ou aurait dû connaître (arrêt du Tribunal fédéral 2P.170/2004 du 14 octobre 2004 in RDAF 2005 I 71 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., 2011, p. 193 n. 569 s.). Le principe de la confiance est toutefois un élément à prendre en considération et non un facteur donnant en tant que tel naissance à un droit (Thierry TANQUEREL, op. cit., p. 193 n. 569 et les références citées). La protection de la bonne foi ne s’applique pas si l’intéressé connaissait l’inexactitude de l’indication ou aurait pu la connaître en consultant simplement les dispositions légales pertinentes (ATF 135 III 489 consid. 4.4 ; 134 I 199 consid. 1.3.1).

7) Selon l’art. 8 al. 1 Cst., tous les êtres humains sont égaux devant la loi. Une décision viole le principe de l’égalité de traitement consacré par cette disposition lorsqu’elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu’elle omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances (ATF 137 V 121 consid. 5.3 ; 134 I 23 consid. 9.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1D_6/2014 du 7 mai 2015 consid. 3.1 ; 1C_223/2014 du 15 janvier 2015 consid. 4.5.1). Il y a notamment inégalité de traitement lorsque l’État accorde un privilège ou une prestation à une personne, mais qu’elle les dénie à une autre qui se trouve dans une situation comparable (ATF 140 I 201 consid. 6.5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_223/2014 précité consid. 4.5.1).

8) En l'espèce, si l'autorisation de construire DD 2______ délivrée le 27 novembre 2013 a été initiée par une requête déposée par un architecte de D______, le recourant n'a jamais contesté avoir été l'interlocuteur du département pendant l'exécution des travaux, dans la mesure où il avait été mandaté par B______ pour les diriger. Dans son courriel du 26 février 2015 adressé à M. G______, il avait même expressément confirmé avoir été « en charge de l'exécution de ce dossier en lieu et place de D______ ». Son intervention en tant que MPQ pour le compte de B______ est donc établie. Il avait d'ailleurs sollicité la délivrance de l'autorisation de construire complémentaire DD 5______ à ce titre.

S'agissant de l'amende infligée le 5 novembre 2015 constatant une violation de la LCI, il est admis par les parties que la construction réalisée ne respectait pas totalement les plans visés ne varietur dans le cadre de l'autorisation de construire DD 2______. Étant donné que le recourant avait la charge de l'exécution des travaux autorisés, cette responsabilité lui incombait indéniablement. Certes, la décision et le libellé de la facture y relative du 5 novembre 2015 ne dénotent pas d'une grande clarté, la loi l'est cependant au sujet de la responsabilité des MPQ. Selon son expérience dans le domaine, le recourant pouvait saisir les conséquences qu'une telle situation impliquait en regard des devoirs inhérents à sa fonction. En cas de doute, il lui appartenait d'en référer au DALE. Il n'a cependant pris aucune mesure en ce sens, pas même en formulant une éventuelle demande de reconsidération. N'ayant fait l'objet d'aucun recours, la décision du 5 novembre 2015 ordonnant la remise en état de la construction est désormais entrée en force. Elle ne saurait dès lors être contestée par le biais de la présente procédure.

Bien que, selon leurs échanges de correspondance entre B______ et le recourant, entre le 1er avril 2015 et le 13 novembre 2015, concernant le paiement des honoraires de celui-ci, leurs relations se soient dégradées, il n'en a aucunement averti son interlocuteur auprès du département. Aucun élément ne permettait ainsi à ce dernier d'en avoir alors connaissance. Au contraire, après avoir été informé le 26 mai 2015 de la nécessité de modifier le projet du dossier DD 5______ conformément aux préavis de l'inspection de la construction du 10 mars 2015 et de la commission d'architecture du 12 mai 2015, le recourant a poursuivi son intervention en vue de l'acceptation d'une proposition de régularisation concernant la disposition des gaines de ventilation litigieuses. S'il est vrai qu'il a indiqué dans ses courriers des 13 juillet et 18 août 2015 que ces travaux seraient entrepris sous la responsabilité du mandataire de la coopérative, aucun élément concret ne venait néanmoins l'attester. L'extinction de son mandat en qualité de MPQ de B______ n'était pas davantage mentionnée. En ces circonstances, ce n'est que le 14 mars 2016, soit après l'échéance du délai de remise en état, que le recourant a réellement informé le DALE, à la demande de celui-ci, de l'extinction de son mandat. Sur la base de cette communication, le DALE s'est ensuite adressé à B______ pour s'enquérir de la situation. Quand bien même le département a été informé, au début du mois d'avril 2016, par un autre architecte du rachat de l'immeuble par K______, il n'en demeure pas moins qu'il appartenait au recourant de remplir ses propres obligations légales vis-à-vis de l'intimé afin de s'en départir valablement. Pour le surplus, il ne saurait être reproché à l'intimé de ne pas avoir tenu compte du différend financier opposant le recourant à sa mandante, ces aspects relevant de leur relation contractuelle, par nature régie par le droit privé.

En ces circonstances, s'il existait une éventuelle impossibilité d'exécuter l'ordre de remise en état adressé dans la décision du 5 novembre 2015, celle-là n'est le fait que du comportement du recourant, auquel il appartenait de remplir son devoir d'information à l'égard du département. À défaut, sa responsabilité était fondée.

Au vu de ce qui précède, tant le DALE que les premiers juges ont retenu à juste titre que le recourant devait répondre, à titre personnel, envers l'autorité des manquements intervenus dans la réalisation des travaux en question. Les griefs du recourant relatifs à une constatation inexacte et incomplète des faits pertinents en violation des principes susmentionnés doivent ainsi être écartés.

9) À titre subsidiaire, le recourant conclut à une réduction du montant de l'amende infligée le 6 avril 2016 à CHF 100.- au lieu de CHF 10'000.-.

a. Aux termes de l’art. 137 LCI, est passible d'une amende administrative de CHF 100.- à CHF 150'000.- tout contrevenant à la LCI, aux règlements et aux arrêtés édictés en vertu de ladite loi, ainsi qu'aux ordres donnés par le DALE dans les limites desdits loi, règlements et arrêtés (al. 1) ; le montant maximum de l’amende est de CHF 20'000.- lorsqu’une construction, une installation ou tout autre ouvrage a été entrepris sans autorisation mais que les travaux sont conformes aux prescriptions légales (al. 2) ; il est tenu compte, dans la fixation du montant de l'amende, du degré de gravité de l'infraction ; constituent notamment des circonstances aggravantes la violation des prescriptions susmentionnées par cupidité, les cas de récidive et l'établissement, par le MPQ ou le requérant, d'une attestation, au sens de l'art. 7 LCI, non conforme à la réalité (al. 3).

b. Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/824/2015 du 11 août 2015 consid. 14b et les références citées).

c. En vertu de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006
(LPG – E 4 05), les dispositions de la partie générale du code pénal suisse du
21 décembre 1937 (CP – RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif. On doit cependant réserver celles qui concernent exclusivement le juge pénal (ATA/824/2015 précité consid. 14b et les références citées).

Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence. Selon la jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende. La juridiction de céans ne la censure qu’en cas d’excès ou d'abus. Enfin, l’amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst. ; ATA/824/2015 précité consid. 14c et les références citées).

L’autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d’une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine), soit tenir compte de la culpabilité de l’auteur et prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47
al. 2 CP ; ATA/824/2015 précité consid. 14d et les références citées).

d. S'agissant de la quotité de l'amende, la jurisprudence de la chambre de céans précise que le département jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour en fixer le montant. La juridiction de céans ne la censure qu’en cas d’excès. Sont pris en considération la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises dans le respect du principe de proportionnalité (ATA/558/2013 du 27 août 2013 consid. 18 ; ATA/804/2012 du 27 novembre 2012 ; ATA/488/2011 du 27 juillet 2011 ; ATA/537/2009 du 27 octobre 2009).

e. En l'occurrence, il résulte des considérations qui précèdent que les manquements reprochés au recourant sont effectivement réalisés, constituant une faute, ne serait-ce que par négligence, passible d'une amende. Celle-ci est donc fondée dans son principe.

À cet égard, les premiers juges ont retenu à bon droit qu'au vu de sa position, de son rôle, du déroulement des faits et de ses connaissances professionnelles, le recourant ne pouvait ignorer la nature et la portée de son obligation, découlant des règles essentielles régissant sa profession. En adoptant un comportement à tout le moins passif, le recourant n'a pas satisfait à ses obligations légales vis-à-vis de l'intimé. La faute du recourant n'est pas anodine. Comme il le relève lui-même, il ignorait les pourparlers quant au rachat de l'immeuble concerné par une société tierce, dont la concrétisation n'a finalement eu d'effet qu'après l'échéance du délai de remise en état qui lui avait été imparti. Ces circonstances, qu'il en ait eu connaissance ou non, n'avaient cependant aucune influence sur sa propre situation du mois d'avril au mois de novembre 2015, alors même que, selon ses allégations, il estimait que son mandat était terminé. La complexité de la situation invoquée n'avait dès lors aucune incidence à son endroit.

Une première amende d'un montant de CHF 10'000.- lui ayant été infligée le 5 novembre 2015, en raison de manquements incontestables et incontestés à la LCI, il faut considérer la récidive comme avérée. Finalement, le recourant ne relève pas non plus dans le cadre de son recours que le paiement de l'amende infligée le 6 avril 2016 l'exposerait à une situation difficile.

Au vu de ce qui précède, l'intimé n'a pas excédé ni abusé de son pouvoir d'appréciation en infligeant au recourant une seconde amende de CHF 10'000.-, soit d'un montant identique à la première, alors que le montant maximal prévu par la loi s'élève à CHF 150'000.-.

10) Mal fondé, le recours est rejeté.

11) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 700.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 17 février 2017 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 janvier 2017 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 700.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Béatrice Antoine, avocate du recourant, au département de l'aménagement, du logement et de l'énergie ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Rodriguez Ellwanger

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :