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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3416/2020

JTAPI/578/2021 du 08.06.2021 ( OCPM ) , REJETE

Descripteurs : OBJET DU LITIGE;DÉCISION DE RENVOI;AUTORISATION DE TRAVAIL
Normes : LEI.40.al2; LEI.64.al1.letc; LEI.83.al1; LEI.83.al4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3416/2020

JTAPI/578/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 8 juin 2021

 

dans la cause

 

Madame A______, représentée par Me Aleksandra PETROVSKA, avocate, avec élection de domicile

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame A______ (ci-après : la recourante), née le______ 1991, est ressortissante du Cameroun.

2.             Arrivée à Genève le 15 septembre 2014, elle a été mise au bénéfice d’une autorisation de séjour le 16 octobre 2014, renouvelée en dernier lieu jusqu’au 30 septembre 2019, afin de suivre des études auprès de la faculté de psychologie et des sciences de l’éducation de l’Université de Genève.

3.             Le 13 septembre 2019, elle a obtenu une maîtrise universitaire en sciences de l’éducation.

4.             Le 26 novembre 2019, elle a été mise au bénéfice d’une autorisation de séjour de courte durée en application de l’art. 21 al. 3 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), valable jusqu’au 12 mars 2020.

5.             Le 17 juin 2020, Madame B______ a sollicité la délivrance d'une autorisation de travail en sa faveur. Elle l'employait depuis le 1er février 2020 en qualité de garde d’enfants et de répétitrice à raison de quatre heures par semaine et pour un salaire mensuel brut de CHF 400.-.

6.             Par décision du 29 juillet 2020, entrée en force, l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) a refusé de faire droit à cette demande, considérant que son admission ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse et que l’ordre de priorité n’avait pas été respecté, l’employeur n’ayant pas démontré l’impossibilité de trouvé un travailleur en Suisse ou ressortissant des pays de l’UE/AELE. La vacance du poste à pourvoir n’avait pas non plus été annoncée à l’office cantonal de l’emploi. Enfin, il n’était pas accordé d’autorisation pour une activité à temps partiel.

7.             Par décision du 24 septembre 2020, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a refusé de délivrer une autorisation de séjour avec activité lucrative en faveur de Mme A______ et a ordonné son renvoi en application de l’art. 64 al. 1 let. c LEI, lui impartissant un délai au 23 octobre 2020 pour quitter le territoire.

Cette décision était fondée sur la décision négative de l'OCIRT du 29 juillet 2020. L'OCPM était lié par les décisions de l'office chargé des admissions sur le marché du travail. Pour le surplus, l'exécution du renvoi paraissait possible, licite et raisonnablement exigible sous l'angle de l'art. 83 LEI.

8.             Par acte du 26 octobre 2020, sous la plume de son conseil, elle a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, sous suite de frais et dépens, principalement à son annulation et à ce qu’elle soit admise provisoirement en Suisse pour une durée supplémentaire de six mois, afin de lui permettre de trouver une activité professionnelle, et à ce que le tribunal ordonne à l’OCPM de prolonger son autorisation de séjour pour une durée de six mois, subsidiairement à ce que le tribunal dise et constate qu’elle remplissait toutes les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur et qu’il ordonne à l’OCPM de lui délivrer une autorisation de séjour à ce titre.

Suite à l’obtention de son diplôme, elle avait bénéficié d’un délai de six mois, jusqu’au 12 mars 2020, pour trouver un emploi. La pandémie de COVID et « les mesures ordonnées par la Confédération » en mars 2020 avaient toutefois freiné ses recherches. Or, dans des circonstances « normales », elle aurait facilement trouvé un travail. En outre, elle n’avait eu « aucune chance d’obtenir un préavis favorable de l’OCIRT », car son autorisation de séjour était échue depuis le 12 mars 2020. Dans la mesure où « même les délais légaux et judiciaires [avaient] été suspendus par la Confédération » durant le confinement, il convenait de tenir compte des effets de la pandémie sur ses recherches d’emploi et de prolonger son autorisation de séjour de six mois pour lui permettre de trouver un emploi.

En tout état, son renvoi au Cameroun était inexigible. Le département fédéral des affaires étrangères (ci-après : DFAE) déconseillait de s’y rendre, la situation sécuritaire tendue en République centrafricaine ayant des répercussions sur l’est du Cameroun. Le pays traversait une crise. Les conditions de vie y étaient très difficiles et donnaient lieu à des manifestations et à des débordements violents.

À l’appui de son recours, elle a notamment produit divers documents relatifs à ses recherches d’emploi datant de janvier et d’octobre 2020.

9.             Dans ses observations du 7 décembre 2020, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

La durée du permis délivré en application de l’art. 21 al. 3 LEI ne pouvait être prolongée. Contrairement à ce que la recourante alléguait, son titre de séjour avait pris fin avant la mise en place par la Confédération suisse et le canton de Genève des mesures de lutte contre la pandémie. S’agissant du caractère exigible de l’exécution du renvoi, les conseils du DFAE, destinés aux voyageurs, ne liaient pas l'autorités, lorsqu’elle procédait à l’examen de l’exécution du renvoi d’un étranger dans son propre pays. À cet égard, en dépit de la crise sanitaire qui demeurait critique dans certaines régions du Cameroun et des risques d’attentats qui n’étaient pas exclu dans le pays, à teneur des recommandations aux voyageurs du DFAE, le Tribunal fédéral avait confirmé, dans deux arrêts récents, qu'un renvoi au Cameroun était en principe possible, licite et exigible.

10.         Le 8 janvier 2021, la recourante a répliqué, sous la plume de son conseil.

Avant l’échéance de son autorisation de séjour, elle avait reçu deux offres d’emploi et avait entamé des démarches auprès de l’OCIRT. Le refus de ce dernier lui était parvenu durant le confinement et elle s’était trouvée dans l’impossibilité de poursuivre ses recherches d’emploi. Elle était ainsi victime d’une inégalité de traitement par rapport à un étudiant qui aurait été diplômé dans un contexte sanitaire « normal ». Afin de rétablir cette inégalité, son titre de séjour devrait être prolongé de six mois, « dès le prononcé du jugement ».

11.         Le 14 janvier 2021, l’OCPM a indiqué qu'il persistait dans ses conclusions, précisant ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l’OCPM relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente par la destinataire de la décision attaquée, le recours est recevable (art. 57, 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2).

4.             Les arguments formulés par les parties à l'appui de leurs conclusions seront repris et discutés dans la mesure utile (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_72/2017 du 14 septembre 2017 consid. 4.1 ; 1D_2/2017 du 22 mars 2017 consid. 5.1 ; 1C_304/2016 du 5 décembre 2016 consid. 3.1 ; 1C_592/2015 du 27 juillet 2016 consid. 4.1 ; 1C_229/2016 du 25 juillet 2016 consid. 3.1 et les arrêts cités), étant rappelé que, saisi d'un recours, le tribunal applique le droit d'office et que s'il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n'est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas en l'espèce.

6.             Selon l'art. 40 al. 2 LEI, lorsqu'un étranger ne possède pas de droit à l'exercice d'une activité lucrative, une décision cantonale préalable concernant le marché du travail est nécessaire pour l'admettre en vue de l'exercice d'une activité lucrative, ainsi que pour l'autoriser à changer d'emploi ou à passer d'une activité lucrative salariée à une activité lucrative indépendante.

7.             Dans le canton de Genève, la compétence pour rendre une telle décision est dévolue à l'OCIRT (art. 2 al. 2 LaLEtr et 6 al. 4 du règlement d'application de la loi fédérale sur les étrangers, du 17 mars 2009 - RaLEtr - F 2 10.01), dont la décision préalable lie l'OCPM (art. 6 al. 6 RaLEtr ; cf. aussi directives et circulaires du secrétariat d'État aux migrations [ci-après : SEM], domaine des étrangers, état au 1er janvier 2021, ch. 1.2.3.2).

8.             L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/1364/2018 du 18 décembre 2018 consid. 4b ; ATA/421/2017 du 11 avril 2017 consid. 5). La contestation ne peut excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer (ATA/1364/2018 du 18 décembre 2018 consid. 4b ; ATA/421/2017 du 11 avril 2017 consid. 5 ; ATA/1145/2015 du 27 octobre 2015 consid. 4b et les arrêts cités).

Par ailleurs, l'objet d'une procédure administrative ne peut pas s'étendre ou se modifier qualitativement au fil des instances. Il peut uniquement se réduire, dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés devant l'autorité de recours. Si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions qui ont été traitées dans la procédure antérieure (ATA/1364/2018 du 18 décembre 2018 consid. 4b ; ATA/421/2017 du 11 avril 2017 consid. 5 ; ATA/648/2016 du 26 juillet 2016 consid. 2b et les arrêts cités).

Quant à l'autorité de recours, elle n'examine pas les prétentions et les griefs qui n'ont pas fait l'objet du prononcé de l'instance inférieure, sous peine de détourner sa mission de contrôle, de violer la compétence fonctionnelle de cette autorité-ci, d'enfreindre le principe de l'épuisement des voies de droit préalables et, en définitive, de priver les parties d'un degré de juridiction (cf. ATA/648/2016 du 26 juillet 2016 consid. 2b et les arrêts cités).

9.             Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

Le renvoi constitue la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande tendant à la délivrance ou la prolongation d'une autorisation de séjour, l'autorité ne disposant à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation (cf. ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a ; ATA/991/2020 du 6 octobre 2020 consid. 6b ; ATA/1798/2019 du 10 décembre 2019 consid. 6 ; ATA/1694/2019 du 19 novembre 2019 consid. 6).

10.         En l'espèce, la décision attaquée n'est que la conséquence du fait qu'il a été constaté définitivement que la recourante ne remplit pas les conditions pour un séjour avec activité lucrative en Suisse et qu'elle n'est pas au bénéfice d'une autorisation de séjour en Suisse (cf. ATA/421/2017 du 11 avril 2017 consid. 6a).

La recourante n'est pas fondée, dans le cadre de la présente procédure, à remettre en cause la décision prise par l'OCIRT le 29 juillet 2020, qui est entrée en force. N'ayant pas contesté en temps utile cette décision, qui a acquis force obligatoire, elle est en effet forclose (cf. not. ATA/432/2016 du 24 mai 2016 consid. 5b ; ATA/261/2016 du 22 mars 2016 consid. 3a et les références citées) et, conformément à la jurisprudence citée plus haut, l'OCPM est lié par cette décision.

Par ailleurs, ses conclusions tendant à l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur excèdent le cadre de l'objet de la présente procédure, qui n'a trait qu'à la mesure de renvoi prononcée à son encontre en application de l'art. 64 al. 1 let. c LEI. Le tribunal ne saurait se prononcer, en première instance, sur cette demande. Les conclusions subsidiaires de la recourante sont ainsi irrecevables.

Cette dernière étant à ce jour dépourvue de titre de séjour en Suisse, l'autorité intimée n'avait d'autre choix que de prononcer son renvoi en application de la disposition précitée.

Il convient encore de relever à toutes fins utiles que le délai de six mois dont disposait la recourante pour trouver un emploi, conformément à l’art. 21 al. 3 LEI, est arrivé à échéance le 12 mars 2020. Le fait qu’elle ne soit pas parvenue à trouver un emploi répondant aux exigences légales dans ce délai est ainsi sans rapport avec les mesures sanitaires décrétées par le Conseil fédéral le 16 mars 2020.

11.         Conformément à l'art. 83 al. 1 LEI, le SEM décide d'admettre provisoirement un étranger si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée. Ces trois conditions susceptibles d'empêcher l'exécution du renvoi sont de nature alternative : il suffit que l'une d'elles soit réalisée pour que le renvoi soit inexécutable.

Les étrangers admis provisoirement en Suisse bénéficient d’un statut précaire qui assure leur présence dans le pays aussi longtemps que l’exécution du renvoi n’est pas possible, n’est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée (ATF 141 I 49 consid. 3.5 ; 138 I 246 consid. 2.3). L’admission provisoire constitue en d’autres termes une mesure qui se substitue, en principe pour une durée limitée, à la mise en œuvre du renvoi, lorsque celui-ci s’avère inexécutable. Elle coexiste donc avec la mesure de renvoi entrée en force, dont elle ne remet pas en cause la validité. L’admission provisoire n’équivaut pas à une autorisation de séjour, mais fonde un statut provisoire qui réglemente la présence en Suisse de l’étranger tant et aussi longtemps que l’exécution de son renvoi apparaîtra comme impossible, illicite ou non raisonnablement exigible (ATF 141 I 49 consid. 3.5 ; 138 I 246 consid. 2.3 ; 137 II 305 consid. 3.1 ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_1001/2019 du 3 décembre 2019 consid. 3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5915/2007 du 18 février 2009 consid. 6 ; ATA/675/2014 du 26 août 2014 consid. 7 et les références citées).

L’admission provisoire est de la seule compétence du SEM ; elle ne peut être que proposée par les autorités cantonales (art. 83 al. 6 LEI ; cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_1001/2019 du 3 décembre 2019 consid. 3). L'art. 83 al. 6 LEI vise avant tout la situation dans laquelle des autorités cantonales constatent des obstacles liés à l'exécution d'un renvoi. Elle n'est pas conditionnée à une demande de l'intéressé, ni à ce qu'un membre de la famille se trouve déjà au bénéfice d'une admission provisoire. Cette disposition a un caractère facultatif et implique que le SEM n'est saisi que si l'avis de l'autorité cantonale s'avère positif. Les intéressés n'ont, pour leur part, aucun droit à ce que le canton demande au SEM une admission provisoire en leur faveur sur la base de l'art. 83 al. 6 LEI (ATF 141 I 49 consid. 3.5.3 ; 137 II 305 consid. 3.2). Néanmoins, l'existence même de l'art. 83 LEI implique que l'autorité cantonale de police des étrangers, lorsqu'elle entend exécuter la décision de renvoi, statue sur la question de son exigibilité (cf. ATA/675/2014 du 26 août 2014 consid. 7).

12.         Selon l'art. 83 al. 4 LEI, dont la recourante se prévaut, l'exécution de la décision peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale.

Cette disposition légale, qui procède de préoccupations humanitaires du législateur suisse, s'applique en premier lieu aux réfugiés dits « de la violence », soit aux étrangers qui ne remplissent pas les conditions de la qualité de réfugié, parce qu'ils ne sont pas personnellement persécutés, mais qui fuient des situations de guerre, de guerre civile et de violence généralisée, mais aussi aux personnes pour qui un retour reviendrait à les exposer à un danger concret, notamment parce qu'elles ne pourraient plus recevoir les soins dont elles ont besoin ou qu'elles seraient objectivement, au regard des circonstances d'espèce et selon toute probabilité, conduites irrémédiablement à un dénuement complet, exposées à la famine et, ainsi, à une dégradation grave de leur état de santé, à l'invalidité, voire à la mort. En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, de logement, d'emplois et de moyens de formation, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (cf. ATAF 2010/54 consid. 5.1 ; ATAF 2010/41 consid 8.3.6 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral D-5367/2015 du 24 mars 2020 consid. 8 ; C-374/2014 du 2 mars 2016 consid. 6.4 ; E-5092/2013 du 29 octobre 2013 consid. 6.1 ; ATA/490/2020 du 19 mai 2020 consid. 11d ; ATA/515/2016 du 14 juin 2016 consid. 6b ; ATA/189/2016 du 1er mars 2016 ; ATA/1278/2015 du 1er décembre 2015 consid. 7b).

13.         En l’espèce, il est notoire que le Cameroun ne connaît pas une situation de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée sur l’ensemble de son territoire et la recourante n’a pas allégué, ni a fortiori démontré, qu’elle serait personnellement exposée à un danger concret, étant précisé que les motifs résultant de difficultés consécutives à une crise socio-économique (pauvreté, conditions d'existence précaires, difficultés à trouver un travail et un logement, revenus insuffisants, absence de toute perspective d'avenir), ou encore la désorganisation, la destruction des infrastructures ou des problèmes analogues auxquels chacun peut être confronté, dans le pays concerné, ne suffisent pas en soi à réaliser une mise en danger concrète selon l'art. 83 al. 4 LEI (arrêt du Tribunal administratif fédéral D-1573/2020 du 12 mai 2020 consid. 7.1 et 7.2 et les références citées).

Le Tribunal fédéral et la chambre administrative de la Cour de justice ont d’ailleurs récemment confirmé l’exigibilité de l'exécution du renvoi de ressortissants camerounais dans leur pays d’origine (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_856/2020 du 19 novembre 2020 ; 2C_463/2020 du 10 novembre 2020 ; 2C_150/2020 du 7 avril 2020 ; ATA/408/2021 du 13 avril 2021 consid. 9b et 9c).

Au surplus, les conseils aux voyageurs formulés par le DFAE sont des recommandations qui ne lient pas les autorités en matière d’étrangers, lorsque celles-ci procèdent à l’examen de l’exécution ou non d’un renvoi (cf. par analogie arrêt du Tribunal administratif fédéral D-2068/2016 du 13 juin 2016). Il ressort également de la jurisprudence du Tribunal fédéral que les conseils aux voyageurs du DFAE s'adressent aux ressortissants helvétiques en voyage et ne fournissent que de manière abstraite des renseignements sur les risques que peuvent encourir les ressortissants de la région concernée (cf. arrêt 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5. 2. 2 et l’arrêt cité).

Dans ces circonstances, force est d'admettre que l’exécution du renvoi de la recourante apparaît raisonnablement exigible, de sorte qu'il n’y avait pas lieu que l’OCPM propose son admission provisoire au SEM.

14.         Mal fondé, le recours sera par conséquent rejeté.

15.         Vu cette issue, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), et il ne lui sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA a contrario).

16.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 26 octobre 2020 par Madame A______ contre la décision prise à son égard par l'office cantonal de la population et des migrations le 24 septembre 2020 ;

2.             le rejette ;

3.             met un émolument de CHF 500.- à la charge de la recourante, lequel est couvert par son avance de frais de même montant ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

Le président

Yves JOLIAT

 

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

 

Genève, le

 

Le greffier