Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision
AARP/349/2024 du 01.10.2024 sur JTDP/1512/2023 ( PENAL ) , ADMIS
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE P/3545/2018 AARP/349/2024 COUR DE JUSTICE Chambre pénale d'appel et de révision Arrêt du 1er octobre 2024 |
Entre
A______, domicilié ______, comparant par Me B______, avocate,
appelant,
contre le jugement JTDP/1512/2023 rendu le 24 novembre 2023 par le Tribunal de police,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.
EN FAIT :
A. a.a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 24 novembre 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a acquitté d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 du Code pénal dans son ancienne teneur [aCP]) et lui a alloué CHF 5'000.- à titre d'indemnité pour la réparation du tort moral subi.
a.b. A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à l'octroi d'une indemnité en CHF 30'000.- pour son tort moral, avec intérêts à 5% l'an dès le 20 février 2018, sous suite de frais.
b. Selon l'acte d'accusation du 14 juin 2023, il était reproché à A______ d'avoir, à son domicile, sis route 1______ no. ______ à C______ [GE] :
- à une date indéterminée en été 2016 ou octobre 2017, montré son sexe à son petit-fils D______, né le ______ 2014, ce qui a fait dire à ce dernier "la quéquette de papi, ça ressemble à une glace" ;
- le 23 ou le 24 décembre 2017, mis sa bouche sur le sexe de l'enfant, alors âgé de moins de quatre ans, et de lui avoir prodigué une fellation, ce qui a fait dire à ce dernier "Papi a bu ma quéquette".
B. Les faits de la cause, qui ne sont pas contestés par l'appelant, peuvent être résumés comme suit, étant pour le surplus renvoyé au jugement de première instance (art. 82 al. 4 du Code de procédure pénale suisse [CPP]) :
a.a. Le 7 février 2018, E______ et F______, parents de D______, ont déposé plainte pénale à l'encontre de A______, en raison de révélations faites par l'enfant courant janvier 2018. Il ressort de leurs déclarations que les rapports entre la mère de F______ et l'épouse de celui-ci avaient été émaillés de nombreux incidents et que cette dernière avait décidé de mettre "le holà" dans la relation de leur fils avec ses grands-parents dès le 26 décembre 2017. Selon F______, ils avaient toutefois commencé à espacer les visites avant cette date. Depuis lors, afin de protéger son fils et que vérité soit faite, il ne voulait plus que celui-ci ait de contact avec ses grands-parents.
a.b. Le 20 février 2018, à 6h58, la police s'est rendue au domicile de A______ et de son épouse pour les interpeller, avec l'appui d'une patrouille de la police de la navigation afin de couvrir le côté lac de la propriété. Elle a procédé à une perquisition des lieux, puis à l'audition des précités, étant précisé que leur transport n'a pas nécessité l'usage de la force et qu'ils n'ont pas été menottés.
a.c. A______ a été relâché le 21 février 2018 à 12h38, sous mesures de substitution (interdiction de tout contact oral, scriptural ou électronique avec F______, E______ et D______), étant précisé que son audition à la police a duré de 9h36 à 16h08, avec une pause de 1h48, soit 4h44, et celle par-devant le Ministère public (MP) 0h23. Les mesures de substitution ont été levées le 17 août 2018 à 17h00 (178 jours) (Y – 7 ss).
b.a. Lors de son audition à la police, A______ a indiqué qu'il souffrait de ne plus voir son petit-fils (B-12).
b.b. En cours d'instruction, F______ a déclaré qu'au début, D______ avait demandé à voir ses grands-parents paternels, raison pour laquelle il lui avait répondu qu'ils étaient morts et qu'il n'avait lui-même désormais plus de parents. Il a ajouté qu'avant le 1er avril 2018, son fils ne les avait pas réclamés, car il était alors "content de ne plus y aller", à cause des cauchemars qu'il faisait à leur domicile.
b.c. Lors des débats de première instance, le 21 novembre 2023, A______ a exposé avoir vécu difficilement la procédure, qui avait été particulièrement violente. Il n'avait plus vu son petit-fils depuis cinq ans et avait une santé fragile, ce qui n'était toutefois pas lié à la présente cause. Après les révélations, son épouse et lui s'étaient ressourcés un mois en Espagne. Il n'avait entrepris aucune démarche afin de revoir D______ car en Suisse, les grands-parents n'avaient aucun droit et encore moins lorsqu'ils étaient accusés de pédophilie. Il avait cependant des contacts avec son fils. Durant l'instruction, celui-ci était revenu vivre sous leur toit puis était retourné auprès de son épouse, avant de finalement la quitter. F______ avait alors passé plusieurs années dans la rue et était devenu addict à la drogue dure. Ils avaient renoué depuis peu. Son objectif, en cas d'acquittement, était de rétablir le lien avec son petit-fils.
c.a. Il ressort de la procédure qu'à l'âge de douze ans, F______ a été victime d'un abus sexuel, par un garçon de deux ans son ainé, événement qui l'a profondément traumatisé. Depuis son adolescence, et durant de nombreuses années, il a consommé des drogues. Il souffre d'un trouble schizo-affectif et est au bénéfice d'une rente invalidité pleine depuis 2008/2009. Il indique également souffrir de bipolarité et avoir subi un accident vasculaire cérébral entre ses 17 et 21 ans. Enfant unique, il a vécu chez ses parents jusqu'à ses 30 ans, en dehors des périodes où il était hospitalisé en unité psychiatrique.
c.b. Durant l'année 2020, F______ a fait deux tentatives de suicide, en raison desquelles il a été hospitalisé. Il a indiqué avoir déménagé, tour à tour, chez ses parents, puis à nouveau chez son épouse, et se sentir manipulé de toutes parts. Il s'est ainsi rétracté à deux reprises et a définitivement retiré sa plainte pénale le 20 juin 2023. Après sa séparation d'avec son épouse, il a consommé de la drogue dure et n'en a été sevré qu'au cours de l'année 2023. Il est sous curatelle de gestion et de représentation depuis le 1er avril 2021 (C – 1'071 ss).
c.c. À l'audience de jugement, F______ a déclaré n'avoir plus vu son fils depuis quatre mois car E______, qui en avait la garde, refusait qu'il le rencontre.
C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite.
b. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions.
Les souffrances morales causées par la présente procédure étaient considérables. Il avait subi une arrestation matinale, qui avait duré plus de 24h00, avec perquisition de son domicile, de son véhicule et de ses appareils électroniques, ainsi qu'un long interrogatoire particulièrement cru et intrusif au sujet de sa vie intime.
Malgré la levée des mesures de substitution lui interdisant tout contact avec les plaignants, il n'était parvenu à renouer avec son fils que peu de temps avant l'audience de jugement. En revanche, la procédure pénale avait anéanti sa relation avec son petit-fils de par, notamment, sa durée, ses intervenants, les déclarations tenues par les parties (notamment le fait que F______ l'avait fait passer pour mort) et les mesures de substitution ; or, il n'existait aucun levier juridique permettant de restituer ce lien (cf. art. 274a al. 1 CC).
Il avait enduré une longue instruction et des accusations infamantes, sa réputation ayant été salie auprès de tiers. Il avait été confronté à la détresse de son épouse et avait lui-même fait un malaise à l'audience de jugement. Âgé de plus de soixante ans au début de l'instruction, il avait déployé une énergie considérable afin de prouver son innocence. Il ne jouissait que du soutien de son épouse, n'osant se confier à personne, et s'était vu isolé socialement contre son gré.
Ainsi, deux jours de détention avant jugement devaient être comptabilisés et indemnisés (2 x CHF 200.-). Par ailleurs, de par leur nature, leur durée et leurs conséquences, le ratio de conversion des mesures de substitution en peine privative de liberté devait être retenu à hauteur d'un tiers au moins, soit 60 jours ou CHF 12'000.- (ATF 140 IV 74). Enfin, les souffrances évoquées conduisaient à un tort moral global et total de CHF 30'000.-.
c. Le Ministère public (MP) conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement attaqué.
La rupture des relations personnelles entre l'appelant et son petit-fils résultait bien plus d'un choix des parents de l'enfant, antérieur au dépôt de leurs plaintes respectives, que de la procédure pénale en tant que telle. En outre, la mesure d'interdiction de contact n'avait déployé ses effets que durant six mois, soit jusqu'au 17 août 2018, et l'appelant, pourvu d'un avocat, n'avait entrepris aucune démarche pour tenter de rétablir le lien avec son petit-fils, étant précisé que le droit civil ne le lui interdisait en rien. En ce qui concernait les contacts avec son propre fils, il ressortait des déclarations de toutes les parties que l'irrégularité de leurs relations découlait surtout des troubles et addictions dont ce dernier souffrait. En définitive, la rupture durable des liens entre l'appelant et D______ était davantage imputable à des relations familiales dysfonctionnelles qu'à la procédure. L'indemnité pour tort moral sollicitée apparaissait exorbitante et non conforme à la jurisprudence.
d. Le TP se réfère intégralement au jugement rendu.
E. Me B______, défenseure d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 13h55 d'activité de collaboratrice, dont 0h15 d'"annonce d'appel & suivi", 1h30 de "prise de connaissance du jugement motivé et suivi client", 0h15 de "déclaration d'appel", et 1h00 de travail sur dossier, précédant 9h00 dévolues à la rédaction du mémoire d'appel. En première instance, elle a été indemnisée pour plus de 77h00 d'activité.
EN DROIT :
1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).
La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).
2. 2.1.1. À teneur de l'art. 429 al. 1 let. c CPP, le prévenu a droit, s'il est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, à une réparation du tort moral subi en raison d'une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté.
2.1.2. Lorsque, du fait de la procédure, le prévenu a subi une atteinte particulièrement grave à ses intérêts personnels au sens des art. 28 al. 2 du Code civil (CC) ou 49 du Code des obligations (CO), il aura droit à la réparation de son tort moral. L'intensité de l'atteinte à la personnalité doit être analogue à celle requise dans le contexte de l'art. 49 CO (ATF 143 IV 339 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_740/2016 du 2 juin 2017 consid. 3.2 ; 6B_928/2014 du 10 mars 2016 consid. 5.1, non publié in ATF 142 IV 163).
2.1.3. Une arrestation de plus de trois heures constitue une détention avant jugement qui peut donner lieu à indemnisation. Il convient toutefois de ne pas tenir compte de la durée d'un éventuel interrogatoire formel dans le décompte des heures, seul étant déterminante la période pendant laquelle la personne est retenue à la disposition des autorités (ATF 139 IV 243 = SJ 2014 I 161). Lorsqu'elle se situe à cheval sur deux jours mais que sa durée ne dépasse pas 24 heures, il n'y a lieu de retenir qu'un seul jour de détention avant jugement ; si elle dépasse 24 heures, il faut alors décompter deux jours (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1100/2023 du 8 juillet 2024 consid. 2.3, destiné à la publication ; L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, N 11 ad art. 51 CP).
Le Tribunal fédéral considère en principe qu'un montant de CHF 200.- par jour en cas de détention injustifiée de courte durée constitue une indemnité appropriée, dans la mesure où il n'existe pas de circonstances particulières qui pourraient fonder le versement d'un montant inférieur ou supérieur. Le taux journalier n'est qu'un critère qui permet de déterminer un ordre de grandeur pour le tort moral. Il convient ensuite de corriger ce montant compte tenu des particularités du cas (durée de la détention, retentissement de la procédure sur l'environnement de la personne acquittée, gravité des faits reprochés, etc.) (ATF 143 IV 339 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_984/2018 du 4 avril 2019 consid. 5.1).
2.1.4. Outre la détention, peut constituer une grave atteinte à la personnalité, par exemple, une arrestation ou une perquisition menée en public ou avec un fort retentissement médiatique, une durée très longue de la procédure ou une importante exposition dans les médias, ainsi que les conséquences familiale, professionnelle ou politique d'une procédure pénale, de même que les assertions attentatoires aux droits de la personnalité qui pourraient être diffusées par les autorités pénales en cours d'enquête. En revanche, il n'y a pas lieu de prendre en compte les désagréments inhérents à toute poursuite pénale comme la charge psychique que celle-ci est censée entraîner normalement chez une personne mise en cause (ATF 143 IV 339 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_740/2016 du 2 juin 2017 consid. 3.2 ; 6B_671/2016 du 17 mai 2017 consid. 2.1 ; 6B_118/2016 du 20 mars 2017 consid. 6.1 ; 6B_928/2014 du 10 mars 2016 consid. 5.1 non publié in
ATF 142 IV 163).
La gravité objective de l'atteinte doit être ressentie par le prévenu comme une souffrance morale. Pour apprécier cette souffrance, le juge se fondera sur la réaction de l'homme moyen dans un cas pareil, présentant les mêmes circonstances (ATF 128 IV 53 consid. 7a). Il incombe au prévenu de faire état des circonstances qui font qu'il a ressenti l'atteinte comme étant subjectivement grave (ATF 120 II 97 consid. 2b). La fixation du tort moral procède d'une appréciation des circonstances et l'autorité compétente bénéficie d'un large pouvoir d'appréciation en la matière (arrêt du Tribunal fédéral 6B_928/2014 précité ; ATF 130 III 699 consid. 5.1).
S'agissant du montant de l'indemnité, toute comparaison avec d'autres affaires doit intervenir avec prudence, dès lors que le tort moral touche aux sentiments d'une personne déterminée dans une situation donnée et que chacun réagit différemment face au malheur qui le frappe. Une comparaison avec d'autres cas similaires peut cependant, suivant les circonstances, constituer un élément d'orientation utile (ATF 138 III 337 consid. 6.3.3 p. 345 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_118/2016 du 20 mars 2017 consid 6.1 et 6B_486/2015 du 25 mai 2016 consid. 4.1).
2.1.5. Lorsque l'indemnisation se fait sous la forme d'un capital, le demandeur a droit aux intérêts de celui-ci. Ces intérêts, dont le taux s'élève à 5% (art. 73 CO), courent en principe à partir du jour de l'évènement dommageable et ce, jusqu'au moment de la capitalisation. Il s'agit d'intérêts du dommage ou intérêts compensatoires, qui ont pour but de remettre le lésé dans la situation patrimoniale qui aurait été la sienne si la réparation du dommage avait eu lieu immédiatement (L. THÉVENOZ / F. WERRO, Commentaire romand : Code des obligations I, Genève, Bâle, Munich, 2003, n. 19 ad art. 42 et n. 3 ad art. 104).
2.2.1. En l'espèce, il n'est pas contesté que l'appelant a droit, sur le principe, à une indemnité en réparation du tort moral causé par la procédure.
2.2.2. La Cour relève que l'appelant a été retenu à la disposition des autorités de 06h58 le 20 février 2018 à 12h38 le lendemain, sous déduction de 5h07 d'audition, soit un total de 24h33 (29h40 – 5h07). C'est donc non pas un, mais deux jours de détention avant jugement, à CHF 200.- l'unité, qui doivent être indemnisés à ce titre, conformément aux principes sus-rappelés.
2.2.3. Pour ce qui a trait aux mesures de substitution, il est vrai qu'elles constituaient une ingérence importante de sa vie privée et familiale, bien que nécessaire au vu de la nature des faits reprochés. Cela étant, cette interdiction a porté atteinte à la liberté personnelle de l'appelant dans une mesure bien moindre qu'en cas de détention provisoire, ce qu'il perd de vue. De plus, outre le fait que les plaignants avaient d'ores et déjà pris la décision d'espacer voire de suspendre les relations personnelles avec l'appelant avant-même l'ouverture de la présente procédure, celui-ci n'a pas formulé une quelconque demande de révocation, pas plus qu'il n'a entrepris la moindre démarche pour renouer avec son fils et/ou son petit-fils une fois les mesures levées. À cet égard, quand bien même il n'existe pas de droit des grands-parents à l'exercice des relations personnelles, rien n'y faisait obstacle si ce n'est la volonté des parents de l'enfant ; or, contre cela, la procédure pénale ne pouvait rien. Celle-ci n'est pas davantage responsable de la décision individuelle de F______ de fréquenter ou non son propre père.
Au vu de ce qui précède, la Cour est d'avis que la prise en compte des mesures de substitution à hauteur de 10% de leur durée, soit 18 jours, apparaît adéquate, voire généreuse en ce qu'elle correspond à ce qui est généralement pratiqué dans les cas d'interdiction de contact, de périmètre et/ou de quitter le sol suisse, soit un cumul de plusieurs restrictions. Leur indemnisation à hauteur de CHF 3'600.- sera donc confirmée.
2.2.4. Enfin, s'agissant de la réparation du tort moral dans sa globalité, la procédure pénale n'est pas la cause de la rupture des liens entre l'appelant et son petit-fils, s'agissant initialement d'une décision commune des parents prise avant son ouverture, puis essentiellement celle de la mère de l'enfant, devenue son seul parent gardien, étant précisé que même F______ déplore l'absence de contact avec son propre fils.
Sans remettre en question les difficultés rencontrées par l'appelant depuis son inculpation, l'intensité des souffrances qu'il allègue doit être relativisée, étant sans commune mesure notamment avec celles ressenties par un parent lors de la perte d'un enfant mineur, pour lequel le montant demandé par l'appelant, soit CHF 30'000.-, est communément alloué (cf. AARP/203/2023 du 19 juin 2023, consid. 4.6.1 s.). L'appelant n'a en outre produit aucune pièce médicale permettant d'établir l'ampleur de l'atteinte à sa personnalité. Il ressort enfin de ses propres déclarations que sa santé fragile n'était en rien corrélée avec la présente cause, d'une part, et qu'un mois en Espagne lui a permis de se ressourcer, d'autre part.
La Cour, devant ainsi statuer en équité, arrêtera à CHF 2'500.-, la quotité du préjudice moral de l'appelant, outre la détention subie, l'indemnité de CHF 1'200.- prononcée à ce titre apparaissant quelque peu insuffisante.
2.2.5. Au vu de ce qui précède, une indemnité de CHF 6'500.-, avec intérêts à 5% dès le 20 février 2018, sera allouée à A______, à titre de réparation du tort moral subi dans la présente procédure. Le jugement sera réformé dans ce sens.
3. L'appel ayant été admis, il ne sera pas perçu de frais (art. 428 CPP a contrario).
4. 4.1.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.
Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire suivant, débours de l'étude inclus : avocat stagiaire CHF 110.- (let. a) ; collaborateur CHF 150.- (let. b) ; chef d'étude CHF 200.- (let. c). En cas d'assujettissement – l'assujettissement du patron de l'avocat au statut de collaborateur n'entrant pas en considération (arrêts du Tribunal fédéral 6B_486/2013 du 16 juillet 2013 consid. 4 et 6B_638/2012 du 10 décembre 2012 consid. 3.7) – l'équivalent de la TVA est versé en sus.
Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.
On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. M. REISER / B. CHAPPUIS / F. BOHNET (éds), Commentaire romand, Loi sur les avocats : commentaire de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats (Loi sur les avocats, LLCA), 2ème éd. Bâle 2022, n. 257 ad art. 12). Dans le cadre des mandats d'office, l'État n'indemnise ainsi que les démarches nécessaires à la bonne conduite de la procédure pour la partie qui jouit d'une défense d'office ou de l'assistance judiciaire. Il ne saurait être question d'indemniser toutes les démarches souhaitables ou envisageables. Le mandataire d'office doit en effet gérer son mandat conformément au principe d'économie de procédure (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.22 du 31 octobre 2013 consid. 5.2.3). Par voie de conséquence, le temps consacré à la rédaction d'écritures inutiles ou reprenant une argumentation déjà développée, fût-ce devant une autorité précédente, ne saurait donner lieu à indemnisation ou à indemnisation supplémentaire (AARP/295/2015 du 12 juillet 2015 consid. 8.2.2.3, 8.2.2.6, 8.3.1.1 et 8.3.2.1).
4.1.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Des exceptions demeurent possibles, charge à l'avocat de justifier l'ampleur d'opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait.
4.2. En l'occurrence, seront retranchées de l'état de frais produit par Me B______, le temps consacré à l'annonce d'appel, la prise de connaissance du jugement motivé ainsi qu'à la déclaration d'appel, ces activités étant couvertes par le forfait. En outre, l'heure de travail sur dossier sera écartée, compte tenu de l'objet extrêmement restreint de l'appel, étant précisé que l'avocate connaissait le dossier pour l'avoir plaidé en première instance.
En conclusion, la rémunération de Me B______ sera arrêtée à CHF 1'946.65 correspondant à 10h55 d'activité au tarif de CHF 150.-/heure (CHF 1'637.50), plus la majoration forfaitaire de 10% (CHF 163.75) et l'équivalent de la TVA au taux variant entre 7.7% et 8.1 % (CHF 9.50 + CHF 135.90).
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1512/2023 rendu le 24 novembre 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/3545/2018.
L'admet.
Annule ce jugement.
Et statuant à nouveau :
Acquitte A______ d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 aCP).
Déboute D______ de ses conclusions civiles.
Ordonne la restitution à A______ des objets figurant sous chiffres 5 à 12 et 14 de l'inventaire n° 2______ du 20 février 2018.
Condamne l'État de Genève à verser à A______ CHF 6'500.-, avec intérêts à 5% à compter du 20 février 2018, à titre d'indemnité pour la réparation du tort moral subi.
Laisse les frais de la procédure à la charge de l'Etat.
Prend acte de ce que l'indemnité due à Me B______, défenseure d'office de A______, a été fixée à CHF 16'430.70, pour la procédure de première instance.
Arrête à CHF 1'946.65, TVA comprise, le montant des honoraires de Me B______, défenseure d'office, de A______ pour la procédure d'appel.
Notifie le présent arrêt aux parties.
Le communique, pour information, au Tribunal de police.
La greffière : Aurélie MELIN ABDOU |
| La présidente : Delphine GONSETH |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.