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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/23638/2020

AARP/343/2023 du 05.10.2023 sur JTDP/171/2023 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : PRISE D'OTAGES
Normes : CP.185; LCR.95.al1.letE; CP.49
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/23638/2020 AARP/343/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 15 septembre 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, FRANCE, comparant par Me B______, avocate,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/171/2023 rendu le 10 février 2023 par le Tribunal de police,

 

et

C______, D______ et E______, parties plaignantes, comparant par Me F______, avocate,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 10 février 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de complicité de prise d'otage (art. 25 et 185 ch. 1 du code pénal [CP]), de mise à disposition d'un véhicule à une personne non titulaire du permis de conduire requis (art. 95 al. 1 let. e de la loi sur la circulation routière [LCR]) et de conduite sous retrait, refus ou interdiction d'utilisation du permis de conduire (art. 95 al. 1 let. b LCR). Le TP l’a en revanche acquitté des faits visés sous chiffre 1.2.1 de l'acte d'accusation à l'égard de C______ et de E______, qualifiés de menaces (art. 180 CP), de contrainte (art. 181 CP) et de tentative de contrainte (art. 22 al. 1/181 CP), et l’a condamné à une peine privative de liberté de huit mois, sous déduction de 22 jours de détention avant jugement (2 jours de détention et 20 jours correspondant aux mesures de substitution), peine assortie du sursis et d’un délai d'épreuve de trois ans (art. 42 et 44 CP). Le TP a encore ordonné l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de cinq ans (art. 66a al. 1 CP) et l’a condamné, conjointement et solidairement avec G______, à verser à D______ CHF 1'000.-, plus intérêt à 5% l'an dès le 7 décembre 2020, à titre de réparation de son préjudice moral (art. 49 CO).

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement des faits qualifiés de complicité de prise d'otage et de mise à disposition d'un véhicule à une personne non titulaire du permis de conduire requis, implicitement au déboutement de la partie plaignante, au prononcé d’une peine pécuniaire de 30 jours-amende pour l’infraction à l’art. 95 LCR et à ce que l’intégralité des frais de la procédure soient laissés à la charge de l’État.

b. Selon l'acte d'accusation du 20 mai 2022, il est reproché ce qui suit à A______ :

À Genève, le 7 décembre 2020, A______ a accompagné G______ lorsque celui-ci, fermement déterminé à entrer en contact avec E______, s'est présenté devant l'appartement de cette dernière, sis rue 1______ no. ______. Il s'est ensuite caché dans la cage d'escalier, en renfort, alors que G______ demandait aux occupants de l'appartement de lui ouvrir, en continuant à sonner à plusieurs reprises avec insistance, en disant "Ouvre!" et en donnant des coups de pied et de poing sur la porte afin de les pousser à s'exécuter. Après que G______ eut tenté, en vain, de contraindre E______ à lui ouvrir la porte de son appartement, A______ l'a accompagné, alors que ce dernier quittait l'immeuble, emportant avec lui, sans droit, une paire de chaussures qu'il avait trouvée devant la porte du domicile de E______.

Une fois au pied de l'immeuble, G______ et A______ ont intercepté D______, la sœur mineure de E______, alors que celle-ci rentrait de l'école. A______ a ensuite prêté assistance à G______ au moment où ce dernier contraignait D______ à le suivre jusqu'à une voiture et à y prendre place, d'une part, ainsi qu'à contacter sa sœur, E______, d'autre part. Après que G______ se fut emparé du téléphone que D______ tenait dans ses mains, les deux hommes ont dirigé cette dernière vers la voiture, pendant environ une minute, en l'encerclant, étant précisé que G______ marchait alors devant D______, et A______ derrière elle, fermant la marche, afin de s'assurer que la jeune fille ne puisse s'échapper et qu'elle prenne bien place dans la voiture.

G______ et A______ ont forcé D______ à s’asseoir à l'intérieur de l'habitacle, sur le siège avant-droit, A______ ayant pour ce faire saisi cette dernière par l'épaule. Après avoir installé D______ dans le véhicule, sur le siège avant-droit, A______ et G______ y ont également pris place, le premier sur la banquette arrière, au milieu, le second sur le siège avant-gauche. D______ s'est alors retrouvée assise dans ladite voiture et empêchée d'en sortir pendant une trentaine de minutes, privée de sa liberté de décision et de mouvement par G______, d'une part, et par A______, d'autre part. A______ est resté assis dans le véhicule, sur la banquette arrière, derrière D______, pendant toute la durée de cet épisode. De par sa présence, forcément intimidante, il a ainsi prêté assistance à G______, lorsque ce dernier cherchait à contraindre D______ à appeler sa sœur, E______, tout en la menaçant.

A______ était toujours là, assis dans le véhicule, sur la banquette arrière, lorsque G______ s'est une nouvelle fois emparé du téléphone de D______, et a commencé à envoyer, très énervé, des messages écrits et audio à caractère menaçant à E______, lui demandant de descendre et de lui rendre son compte Snapchat, faute de quoi cela se passerait mal.

A______ était toujours assis sur la banquette arrière, derrière D______, lorsque cette dernière, retenue dans la voiture par les deux hommes, a demandé, en pleurs, à plusieurs reprises, si elle pouvait sortir du véhicule, autant de demandes auxquelles G______ lui a opposé une fin de non-recevoir, en lui disant qu'il les tuerait tous, si elle descendait, menace ayant eu pour effet de l'effrayer.

A______ a signalé la présence d’une voiture de police à G______, ce qui a ensuite permis à ce dernier de mettre en marche son véhicule et de circuler au volant de celui-ci sur une courte distance, pendant environ deux minutes, période pendant laquelle D______ était toujours entravée dans sa liberté de décision et de mouvement. De par la peur que la présence de ces deux hommes lui inspirait, D______ n'a pas été en mesure de sortir du véhicule dans lequel elle était retenue contre son gré, entravée dans sa liberté de décision et de mouvement.

Ces faits, qualifiés initialement par le Ministère public (MP) de complicité de séquestration et d'enlèvement (art. 183 ch. 1 CP cum art. 25 CP), de contrainte (art. 181 CP cum art. 25 CP) et de tentative de contrainte (art. 181 CP cum art. 22 al. 1 CP et art. 25 CP), ont été requalifiés par le TP en complicité de prise d’otage.

Il est encore reproché à A______ d’avoir, le 25 novembre 2020, vers 02h00, mis à disposition de G______ le véhicule de marque H______/2______, immatriculé VD 3______, alors que ce dernier n’était pas au bénéfice du permis de conduire requis, ce qu'il savait ou aurait dû savoir s'il avait prêté toute l’attention commandée par les circonstances.

c. Pour les faits sus-décrits, le TP a reconnu G______ coupable de prise d’otage et l’a acquitté de menaces, de contrainte et de tentative de contrainte à l’égard de E______ et C______. Il l’a reconnu coupable d’infractions aux art. 90 al. 2 et 95 LCR en lien avec sa conduite du véhicule H______.

G______ n’a pas appelé de ce jugement qui est donc entré en force en ce qui le concerne.

d. Le TP a également reconnu A______ coupable d’infraction à l’art. 95 LCR pour avoir conduit un véhicule à Genève le 23 mai 2021 alors que son permis de conduire avait été suspendu. Ce verdict n’est pas contesté en appel.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Le 7 décembre 2020, E______ a composé le 117 pour appeler la police à deux reprises.

À 16h23, elle a fait état de la présence de personnes qui sonnaient avec insistance à la porte de son domicile. Une patrouille s’est rendue sur place et n’a rien constaté.

À 16h53, après le départ des policiers, E______ a appelé pour signaler que sa sœur D______ avait été kidnappée par ces mêmes personnes et emmenée dans une [voiture de marque] J______ grise à plaques vaudoises. Les gendarmes sont retournés sur place ; quelques instants plus tard, vers 17h00, alors qu’ils s’entretenaient avec la requérante et sa mère, C______, ils ont été rejoints par D______, en pleurs (B-3).

b. Dans leurs plaintes déposées le même jour, C______ et E______ ont expliqué comment, alors qu’elles se trouvaient à leur domicile, au 5ème étage de l’immeuble sis no. ______ rue 1______, G______ avait frappé avec insistance et demandé à la première si sa fille E______ était à la maison, accusant celle-ci d’avoir « piraté son compte ». La mère a répondu que sa fille était absente, puis informé celle-ci – qui se trouvait en réalité dans sa chambre – de ce qui venait de se produire. Quelques minutes plus tard, G______ s’était mis à frapper avec insistance à la porte ; C______ avait constaté qu’il était accompagné de plusieurs personnes qu’il avait enjointes de se cacher à l’étage inférieur. C’est alors que E______ avait appelé la police pour la première fois. Peu après, les individus en question avaient quitté le palier, emportant une paire de chaussures trouvée devant la porte des plaignantes, sans toutefois sortir de l’immeuble.

E______ avait alors averti sa sœur, D______, de la présence de ces personnes. Celle-ci, qui rentrait de l’école, avait été abordée en bas de chez elle par G______ et une seconde personne, puis forcée à monter dans leur véhicule. Une fois à bord de celui-ci, G______ l’avait contrainte à contacter sa sœur et échangé avec elle des messages par l’application Snapchat, qui a la particularité de ne pas conserver les échanges entre ses utilisateurs. G______ avait menacé E______ par ce biais (infra c.).

Peu après l’arrivée de la police, D______ était revenue à son domicile, fortement choquée.

c. Par le biais de captures d’écrans effectuées par E______, les messages suivants, échangés entre les appareils des deux sœurs (ci-après désignés par les prénoms de celles-ci), ont pu être retrouvés :

À16h26 E______ écrit à D______ : "Viens pas putain Ils ont volé les chaussures devant la porte !" ; à 16h30 elle tente d'appeler sa sœur ; à 16h32 elle lui écrit "Viens pas putain Toi tu crois que tu va faire quoi Ils sont bcp"; à 16h33 une conversation a été supprimée ; à 16h35 E______ écrit "T ou ???" et à 16h36 elle tente d'appeler D______.

À 16h37 D______ lui répond "Tqt". À 16h43 E______ écrit "T ou ?". À 16h43 D______ envoie "E______" message auquel celle-ci répond "????".

À 16h43 D______ écrit "J'étais entrain de venir j'étais en bas jallais pas rentrer".

E______ lui écrit à 16h44 "Tu sais pas c dangereux là !!!!!" et tente de l'appeler.

À 16h44 D______ écrit "Il est venu il m'a dit t'es la petite sœur a E______ [surnom] j'ai dit non il m'a dit me prend pas pour un con", ensuite de quoi E______ tente d'appeler sa sœur.

À 16h45 E______ écrit "T ou ?????? Mais putain", message auquel D______ répond, "Il veut pas".

Une conversation à 16h46 a été supprimée sur l’appareil de D______, lequel envoie "Pourquoi tu cherche ça T'a pas honte".

À 16h49 D______ écrit "Tu réfléchis pas", tente d'appeler E______ puis écrit "T'a ma parole je vais pas te faire du mal", tente à nouveau de l'appeler et écrit, "Juste mon snap Si t aime vraiment ta sœur vient".

À 16h50 D______ envoie "JE VEUX MON SNAP" et tente d'appeler, puis, à 16h51 "JE VEUX MON SNAP".

À 16h51, E______ écrit "5 minutes Elle revient", message auquel il est répondu "C'EST TOUT".

d. D______ (alors âgée de 17 ans) a été auditionnée le soir-même, dès 19h57, audition filmée selon le protocole pour les enfants victimes d’infractions graves (EVIG ; B-5 ; C-117 ss).

À son arrivée à son domicile, G______ (qu’elle ne connaissait pas et désigne selon ses vêtements « K______ [marque de mode] ») lui avait immédiatement demandé d’appeler sa sœur. Ils insistaient et l’avaient arrêtée. G______ se tenait devant elle et A______ (« survêt ») derrière elle. G______ lui avait pris son téléphone ; constatant qu’il ne lui restait qu’un pourcent de batterie, il l’avait emmenée dans sa voiture. A______ l’avait poussée par l’épaule pour la contraindre à s’asseoir dans le véhicule et s’était assis à l’arrière, en passant par le siège du conducteur, sur lequel G______ avait ensuite pris place et mis son téléphone à charger. Il le lui avait alors rendu, lui ordonnant d’appeler sa sœur en la menaçant de mort, accusant E______ d’avoir piraté son compte. D______ avait refusé et G______ lui avait montré une photo d’une personne blessée, en la menaçant de faire subir la même chose à sa famille, en mentionnant qu’il avait plusieurs personnes prêtes à s’en prendre à elle à proximité. Il avait également menacé d’utiliser les chaussures prises à son domicile pour jeter un sort à la famille, ce qui lui avait fait craindre pour leur vie. Elle avait réussi à envoyer des messages à sa sœur, avant que G______ ne s’empare du téléphone et n’adresse des messages vocaux de menaces à E______. A______ n’avait pas participé à la discussion mais avait mentionné à plusieurs reprises que sa sœur ne l’aimait pas, qu’elle aurait dû les rejoindre pour « donner le compte » (C-124). À un moment donné, A______ avait signalé l’arrivée d’une voiture de police et G______ avait alors démarré le véhicule pour s’arrêter un peu plus loin et la laisser sortir (à une distance d’environ 100 mètres, A-5).

e. Un prélèvement aux fins de rechercher des traces d’ADN a été effectué sur l'arrière de la veste que portait D______ au moment des faits, dès lors que selon elle A______ l'avait poussée dans le dos pour qu'elle prenne place dans la voiture. Le résultat de cet acte d’enquête ne figure pas au dossier de la cause.

f. G______ a nié toute contrainte à l’encontre de D______ tout au long de la procédure, confirmant pour le surplus le déroulé des faits décrit ci-dessus. D______ l’avait approché en lui demandant de lui rendre ses chaussures : s’il a initialement déclaré qu’il les lui avait rendues immédiatement, il a admis ensuite ne les avoir restituées qu’au moment où la jeune fille sortait de la voiture, dans laquelle elle était restée une vingtaine de minutes (PV TP p. 7/8). Il lui avait demandé si elle pouvait appeler sa sœur et lui avait proposé de monter dans le véhicule par gentillesse pour lui permettre de recharger son téléphone. A______ n’avait rien fait.

Ses dénégations n’ont pas emporté la conviction du TP ; il est pour le surplus renvoyé au jugement entrepris (art. 82 al. 4 du code de procédure pénale suisse [CPP]).

g. G______ avait déposé plainte contre E______. Ils avaient un litige à caractère financier en lien avec des prestations informatiques fournies par E______ l’été précédent. Il l’accusait d’avoir piraté son compte Snapchat et diffusé dessus des images à caractère pornographique pour le contraindre à lui verser de l’argent. C’est en raison de ces soupçons qu’il s’était rendu chez elle le 7 décembre 2020.

Cette plainte a été classée le 12 avril 2022, faute de toute prévention, décision qui est entrée en force.

h. A______ a également nié avoir exercé de la contrainte à l’égard de D______. Il avait accompagné G______ à Genève depuis L______ [VD], alors qu’ils étaient en route pour M______ [France], afin de lui permettre de se rendre « chez la fille » (PV TP p. 10). Il savait qu’ils devaient se rendre au domicile de E______ (surnom de E______), que G______ soupçonnait d’être l’auteur du piratage de son compte Snapchat. Il avait constaté que D______ pleurait dans la voiture, mais n’avait personnellement rien fait ni rien dit et ne l’avait pas contrainte, même s’il avait vu qu’elle avait peur. Le seul moment où il avait constaté de la contrainte était lorsque G______ l’avait obligée à appeler sa sœur (C-20).

i. Les parties ont maintenu leurs versions en audiences de confrontation au MP puis devant le TP, étant précisé que les parties plaignantes étaient représentées par leur conseil à l’audience de jugement.

j. Le 25 novembre 2020, sur l’autoroute A1 entre les échangeurs de N______ [VD] et de O______ [VD], en direction de L______, G______ a circulé au volant d’un véhicule H______/2______, à une vitesse excédant de 43 km/h, respectivement 31 km/h la vitesse autorisée. Il a été intercepté à la sortie de l’autoroute par un véhicule banalisé de la police vaudoise. A______ se trouvait à bord du véhicule, qu’il avait pris en location la veille pour une durée de 24 heures. Il a affirmé l’avoir remis à G______ car lui-même avait des douleurs aux cuisses qui l’empêchaient de conduire (C-48).

Il avait fait la connaissance de G______ dix jours plus tôt et l’avait déjà vu au volant d’un véhicule. Il ne lui avait donc pas demandé s’il était titulaire d’un permis avant de lui passer le volant puisqu’il l’avait souvent vu conduire (C-310).

C. a. Aux débats d’appel, A______ a persisté dans ses explications. Il n’avait pas accompagné G______ dans l’immeuble. Il ne le connaissait que depuis un mois avant les faits et n’avait pas de raison de s’impliquer dans ses histoires. Le passage à Genève n’était qu’un crochet ; ils s’étaient rendu immédiatement après à P______ [France], où il habite, et étaient ensuite partis pour M______, qui était le but principal de leur déplacement.

À son arrivée à Genève, il avait déposé G______ et avait attendu dans la voiture. Il en était sorti lorsque G______ l'avait appelé, mais il ne voulait pas se mêler de son histoire. D______ n'avait pas été obligée de venir avec eux ni de s’asseoir dans la voiture. Il y était monté en premier, du côté droit et s’était assis à l’arrière ; il n’avait pas du tout parlé ni rien fait. D______ n'était pas en état de choc, il serait intervenu s’il y avait eu de l'abus. Il avait été naïf.

Il ignorait, avant le contrôle du 25 novembre 2020, que G______ ne disposait pas d’un permis de conduire valable. Il l’avait vu au volant d’autres véhicules ; comme G______ disposait déjà d’une voiture, il avait accepté de louer la H______ même si cela pouvait paraître illogique puisque le loueur était une connaissance de G______.

b. Par la voix de son conseil, A______ persiste dans ses conclusions. Le jugement entrepris consacrait une violation de la présomption d’innocence d’autant plus choquante que la recherche d’ADN sur la veste de la victime était négative. Sa simple présence passive lors des faits ne constituait pas une complicité, faute de toute action de sa part. Il n’avait pas accompagné G______ dans l’immeuble de la plaignante ; D______ n’avait pas été encerclée ni contrainte, elle était montée de son plein gré dans le véhicule. Il était monté en premier dans la voiture (cabriolet à deux portes), était assis derrière elle et ne l’avait en rien menacée. Les échanges Snapchat démontraient, par l’utilisation du singulier par les deux interlocuteurs, qu’il n’avait pas pris part à la discussion ni à la contrainte. Il n’avait rien dit et la déclaration contraire de D______ ne pouvait pas être retenue car elle s’était contredite et l’avait confondu avec G______, prêtant à l’appelant les propos tenus par ce dernier. Les faits s’étaient passés en plein jour dans un quartier fréquenté, les choses s’étaient déroulées calmement sinon les passants seraient intervenus. D______ était sortie seule et librement de la voiture. Il ne connaissait ni E______, ni son frère et n’avait donc pas pu signaler la présence de celui-ci avec les policiers. D______ n’avait été que quelques minutes dans la voiture, soit entre le message envoyé à 16h48 et son retour devant son domicile vers 17h, en ayant récupéré son téléphone et ses chaussures. Il n’avait joué aucun rôle dans les faits, qui se seraient produits de la même manière s’il n’avait pas été présent. Il n’avait pas participé à l’infraction et n’en avait d’ailleurs jamais eu l’intention : en l’absence de position de garant le fait de s’abstenir d’intervenir ne constituait pas une infraction.

Il avait admis l’infraction à l’art. 95 LCR du 23 mai 2021, mais contestait celle du 25 novembre 2020 car il était de bonne foi. Il n’avait pas de raison de douter du fait que G______ était titulaire d’un permis de conduire, l’ayant déjà vu au volant de véhicules de luxe.

c. Le MP, qui n’a pas participé aux débats d’appel, conclut à la confirmation du jugement entrepris.

d. Par son conseil, D______ conclut au rejet de l’appel. G______ et l’appelant s’en étaient pris à l’intégrité d’une enfant. A______ était conscient de ses agissements : il savait que G______ était déterminé à entrer en contact avec E______, il l’avait accompagné au domicile de celle-ci, avait constaté qu’il s’était emparé de ses chaussures et ne pouvait ignorer l’impact psychologique de ce geste, or, il n’avait rien fait. D______ avait été contrainte de les suivre jusqu’à la voiture, encerclée, suivie, poussée pour monter dans celle-ci. Son téléphone avait été arraché de ses mains. L’appelant s’était ensuite assis derrière elle pour l’intimider par sa présence et ses propos.

Il admettait qu’à la place de la victime il aurait eu peur et avait donc compris que celle-ci n’était pas libre de ses faits et gestes. Il avait assisté aux menaces proférées contre la famille, avait vu G______ lui montrer une photo de lésions pour l’impressionner, avait vu ses pleurs et entendu ses vaines demandes de pouvoir sortir du véhicule. Par sa présence, il avait conforté son comparse et lui avait permis de quitter les lieux à l’arrivée de la police, ce qu’ils n’auraient pas fait s’ils n’avaient rien eu à se reprocher.

D. A______ est né le ______ 1999 à Q______ en France, pays dont il est ressortissant. Célibataire et sans enfant, il vit à P______ chez ses parents. Il est employé à temps partiel dans le commerce de sa mère à P______ et perçoit un revenu mensuel de EUR 500.-. Il a un BEP en gestion en administration. Il a rejoint un fonds d'investissement, activité qui pour l'instant ne lui rapporte rien.

Il n'a ni fortune, ni dette. Son casier judiciaire suisse comporte une condamnation du 31 août 2022 par le MP, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 40.-, sursis trois ans et une amende de CHF 500.- pour infraction à l’art. 90 al. 2 LCR, condamnation dont il a déclaré aux débats ne pas avoir eu connaissance.

Il entretient des liens avec la Suisse où vivent une tante maternelle et cinq cousins, en Valais, ainsi qu’une autre tante et trois cousins dans le canton de Vaud. Ses parents ainsi que ses frères et sœurs vivent à P______. En Suisse, il a fait des missions intérim, grâce au foot.

Il se rend deux fois par semaine à l'église à Genève au R______. Interrogé sur les raisons qui le poussent à fréquenter une église aussi éloignée de son domicile, il a indiqué qu’il s’agissait de l’extension de l’une des plus influentes églises ______ sur Youtube, dont la seule congrégation physique en France se trouve à M______. Y étant très attaché, il a donc rejoint celle du R______ vu sa proximité.

E. a. Me B______, défenseure d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 5h10 d’activité de cheffe d'étude (dont quatre entretiens avec son mandant d’une durée totale de trois heures, une heure pour l’analyse du jugement de première instance et 30 minutes pour la déclaration d’appel) et six heures d’activité de stagiaire hors débats d'appel, auxquels le stagiaire est intervenu seul.

En première instance, elle a été rémunérée pour 45 heures d’activité.

b. Me F______, conseil juridique gratuit de D______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 10 heures d'activité de cheffe d'étude (dont 1h30 à réception du jugement de première instance et huit heures de préparation des débats d’appel), hors débats d'appel, lesquels ont duré 1h50.

En première instance, elle a été rémunérée pour plus de 35 heures d’activité réparties entre les trois parties plaignantes.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. L'art. 10 al. 2 CPP consacre le principe de la libre appréciation des preuves, en application duquel le juge donne aux moyens de preuve produits tout au long de la procédure la valeur qu'il estime devoir leur attacher pour se forger une intime conviction sur la réalité d'un fait (arrêt du Tribunal fédéral 6B_348/2012 du 24 octobre 2012 consid. 1.3).

Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ;
ATF 127 I 28 consid. 2a).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. L'absence de doute à l'issue de l'appréciation des preuves exclut la violation de la présomption d'innocence en tant que règle sur le fardeau de la preuve (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).

Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).

2.2. Le juge du fait dispose d'un large pouvoir dans l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 4b). Confronté à des versions contradictoires, il forge sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents. Les preuves doivent être examinées dans leur ensemble et l'état de fait déduit du rapprochement de divers éléments ou indices. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_324/2017 du 8 mars 2018 consid. 1.1 ; 6B_1183/2016 du 24 août 2017 consid. 1.1 ; 6B_445/2016 du 5 juillet 2017 consid. 5.1).

L'appréciation des preuves implique une appréciation d'ensemble. Le juge doit forger sa conviction sur la base de tous les éléments et indices du dossier. Le fait que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit insuffisant ne doit ainsi pas conduire systématiquement à un acquittement. La libre appréciation des preuves implique que l'état de fait retenu pour construire la solution doit être déduit des divers éléments et indices, qui doivent être examinés et évalués dans leur ensemble (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1169/2017 du 15 juin 2018 consid. 1.1 ; 6B_608/2017 du 12 avril 2018 consid. 3.1).

Les déclarations de la victime constituent un élément de preuve. Le juge doit, dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier, les apprécier librement (arrêts du Tribunal fédéral 6B_366/2021 du 26 janvier 2022 consid. 2.1 ; 6B_579/2021 du 29 novembre 2021 consid. 1.1 ; 6B_332/2020 du 9 juin 2020 consid. 3.2 et les références citées).

2.3. À teneur de l’art. 185 ch. 1 CP, quiconque séquestre, enlève une personne ou de toute autre façon s’en rend maître, pour contraindre un tiers à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte est puni d’une peine privative de liberté d’un an au moins.

L’infraction est caractérisée par une double atteinte à la liberté : d’une part, une privation de liberté de l’otage, identique à celle de l’art. 183 CP réprimant la séquestration et l’enlèvement, d’autre part une atteinte à la liberté de décision de la personne que l’auteur veut contraindre. Elle se présente donc à la fois comme une privation de liberté aggravée et comme une contrainte qualifiée, même si la séquestration et l’enlèvement ne constituent que des moyens parmi d’autres permettant à l’auteur, selon l’énoncé légal, de se rendre maître de l’otage (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ [éds], Commentaire romand, Code pénal vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 2 ad art. 185 CP).

Il y a prise d'otage du point de vue objectif, lorsque l'auteur s'est rendu maître de la personne de l'otage. Pour ce qui est du point de vue subjectif de l'infraction de prise d'otage, il suffit, en dehors de l'intention, qu'il existe un dessein de contraindre un tiers à avoir un certain comportement. L'auteur n'a pas besoin d'avoir fait connaître ses exigences ni manifesté ses menaces quant au sort de l'otage (ATF 121 IV 162 consid. 1e ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_163/2015 du 31 mars 2015 consid. 1.4).

2.4. Conformément à l'art. 25 CP, la peine est atténuée à l'égard de quiconque a intentionnellement prêté assistance à l'auteur pour commettre un crime ou un délit.

Objectivement, la complicité, qui est une forme de participation accessoire à l'infraction, suppose que le complice ait apporté à l'auteur principal une contribution causale à la réalisation de l'infraction, de telle sorte que les événements ne se seraient pas déroulés de la même manière sans cette contribution. La contribution du complice est subordonnée : il facilite et encourage l'infraction. Il n'est pas nécessaire que l'assistance du complice ait été une condition sine qua non de la réalisation de l'infraction. Il suffit qu'elle l'ait favorisée. Elle peut être matérielle, intellectuelle ou consister en une simple abstention ; la complicité par omission suppose toutefois une obligation juridique d'agir, autrement dit une position de garant (ATF 132 IV 49 consid. 1.1 ; 121 IV 109 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_72/2009 du 20 mai 2009 consid. 2.1).

Subjectivement, le complice doit avoir l'intention de favoriser la commission, mais le dol éventuel suffit (ATF 121 IV 109 consid. 3a ; 118 IV 309 consid. 1a). Il faut qu'il sache ou se rende compte qu'il apporte son concours à un acte délictueux déterminé et qu'il le veuille ou l'accepte. À cet égard, il suffit qu'il connaisse les principaux traits de l'activité délictueuse qu'aura l'auteur, lequel doit donc avoir pris la décision de l'acte (ATF 132 IV 49 consid. 1.1 ; 121 IV 109 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_72/2009 du 20 mai 2009 consid. 2.1).

L'assistance prêtée par le complice peut être matérielle, intellectuelle ou consister en une simple abstention. La complicité par omission suppose toutefois une obligation juridique d'agir, autrement dit une position de garant (ATF 132 IV 49 consid. 1.1 ; 121 IV 109 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_72/2009 du 20 mai 2009 consid. 2.1). Il faut que l'auteur se soit trouvé dans une situation qui l'obligeait à ce point à protéger un bien déterminé contre des dangers indéterminés (devoir de protection), ou à empêcher la réalisation de risques connus auxquels des biens indéterminés étaient exposés (devoir de surveillance), que son omission peut être assimilée au fait de provoquer le résultat par un comportement actif (art. 11 al. 2 et 3 CP ; ATF 136 IV 188 consid. 6.2 p. 191 ss ; 134 IV 255 consid. 4.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_696/2012 du 8 mars 2013 consid. 7.1).

Contrairement au coauteur, le complice ne veut pas l'infraction pour sienne et n'est pas prêt à en assumer la responsabilité.

2.5. L'art. 95 al. 1 let. e LCR prévoit qu'est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire quiconque met un véhicule automobile à la disposition d'un conducteur dont il sait ou devrait savoir s'il avait prêté toute l'attention commandée par les circonstances qu'il n'est pas titulaire du permis requis.

Conformément aux règles générales, agit intentionnellement quiconque commet un crime ou un délit avec conscience et volonté (art. 12 al. 2 CP). La négligence est l'imprévoyance coupable commise par celui qui, ne se rendant pas compte des conséquences de son acte, agit sans user des précautions commandées par les circonstances et sa situation personnelle (art. 12 al. 3 CP).

Dans toutes les hypothèses visées à l'art. 95 al. 1 LCR, la règle de l'art. 100 al. 1 première phrase LCR s'applique sans restriction, de sorte que la négligence, comme l'intention, sont réprimées (Y. JEANNERET, Les dispositions pénales de la Loi sur la circulation routière (LCR), Berne 2007, n° 43 ad art. 95).

Dans le contexte de l'art. 95 al. 1 let. e LCR, l'auteur agit intentionnellement lorsqu'il sait que le conducteur auquel il cède l'usage de son véhicule n'est pas titulaire du permis requis et qu'en dépit de cela, il lui remet un pouvoir de disposer de ce véhicule (Y. JEANNERET, op. cit, n° 45 ad art. 95). La négligence se traduit quant à elle par une conscience erronée portant sur le contenu du permis de conduire d'un tiers. L'auteur a une obligation générale de se renseigner activement, obligation qui est toujours satisfaite s'il se fait produire le permis de conduire de l'intéressé. L'obligation de contrôler le contenu du permis de conduire sera très stricte lorsque l'auteur ne connaît pas le conducteur - on pense au loueur de voiture ou au moniteur d'auto-école - et pourra être atténuée, voire supprimée lorsque les rapports particuliers - proches, familiers, amis, collègues de travail - existant entre l'auteur et le conducteur sont tels que le premier est en droit de se fier de bonne foi aux assurances qui lui sont faites par le conducteur. L'erreur dans laquelle se trouve l'auteur est toujours évitable, et partant l'infraction punissable par négligence, lorsqu'il n'a pas satisfait à son devoir de vérification du permis du tiers alors qu'il était exigible compte tenu des circonstances (A. BUSSY / B. RUSCONI / Y. JEANNERET / A. KUHN / C. MIZEL / CH. MÜLLER, Code suisse de la circulation routière : commentaire, 4e éd., Lausanne 2015, p. 949 ad art. 95 ; Y. JEANNERET, op. cit, n° 48 ad art. 95).

2.6.1. En l’espèce, les versions de l’appelant, de l’auteur principal de la prise d’otage et de la victime divergent. L’auteur principal a nié tout acte illicite, mais n’a pas fait appel de sa condamnation. Sa version des faits est donc, par définition, lacunaire.

La version de la victime, recueillie moins de trois heures après les faits, apparaît particulièrement crédible. Elle s’est exprimée de façon claire, calme et précise, n’hésitant pas à reprendre l’inspectrice qui menait l’audition lorsque celle-ci se trompait (C-136). Elle n’a pu échanger plus que quelques instants avec sa mère et sa sœur : or, leurs propos sont globalement similaires. Contrairement à ce qu’a soutenu la défense, on ne distingue pas de contradiction fondamentale entre la version donnée à la police et celle fournie à l’audience de confrontation. Certaines questions n’ont été posées que lors de cette dernière (par exemple sur la possibilité de sortir du véhicule) et il n’est donc pas surprenant que certains éléments n’apparaissent que lors de l’une ou l’autre audition. La victime ne connaissait aucun des protagonistes avant les faits et n’avait aucune raison de désigner plutôt l’un que l’autre, ni d’ailleurs de « charger » l’appelant ou son comparse. Elle désigne clairement les deux personnes qui l’ont abordée, distinguant selon les phases le rôle de chacun ou en les désignant collectivement, notamment lorsqu’elle a été contrainte de les accompagner à leur véhicule ou lorsqu’elle décrit comment elle craignait qu’ils ne fassent quelque chose (« ils insistaient » C-117-118 ; « c’est comme si … ils me poussaient … deux grands comme ça… » C-122 ; « ils ont fermé leurs portes »
C-124 ; « ils vont faire un truc » C-127 ; etc.).

Cette version est par ailleurs corroborée par les messages échangés, qui démontrent les pressions exercées (supra B.c.), ainsi que par les déclarations de la sœur et de la mère de la victime. Les constatations des policiers – qui ont recueilli la victime en pleurs à son retour chez elle – comme les propres déclarations de l’appelant – qui admet que la victime a eu peur et pleurait dans le véhicule confirment encore ses explications. Sa crédibilité est ainsi singulièrement forte.

En regard de cette version, celle de l’appelant, qui se contente pour l’essentiel de nier avoir exercé toute contrainte tout en admettant le déroulement factuel, n’emporte pas conviction.

L’appelant savait, bien avant de rencontrer la victime, que son comparse était énervé et en voulait à la sœur de cette dernière. Il a vu l’auteur principal en possession (pour le moins incongrue) d’une paire de chaussures (appartenant à la victime ou sa sœur) ; il l’a vu arracher le téléphone des mains de la jeune fille, alors qu’il est notoire que cet objet est d’une grande importance pour une adolescente et l’appelant n’a pu que comprendre ce geste comme un moyen de contrainte, auquel il ne s’est pas opposé. Surtout, il a accompagné son comparse jusqu’au véhicule. Le prétexte de ce déplacement (charger le téléphone) ne résiste pas à l’examen : la victime se trouvait devant son immeuble et n’avait nul besoin de charger son téléphone pour contacter sa sœur, puisqu’il lui suffisait de rentrer chez elle. L’appelant n’avait aucune raison de suivre son comparse dans cette démarche. Il n’avait surtout aucun motif de monter dans le véhicule, sinon celui de renforcer la pression mise sur la victime pour y entrer et ensuite obéir à l’auteur principal ; il est conforme à l’expérience générale de la vie que la présence de deux adultes, l’un devant, l’autre derrière, est intimidante pour une adolescente, ce que l’appelant ne pouvait pas ignorer.

L’absence de résultat (qui équivaut en l’occurrence à un résultat négatif) du prélèvement effectué sur la veste de la victime est sans pertinence à ce stade. Elle ne signifie pas que tout contact doive être exclu, ce d'autant que le geste décrit est particulièrement bref. Au surplus, même en l’absence de tout contact physique, la présence de l’appelant, contribuant à prendre la victime en tenaille entre l’auteur principal et lui pour la faire entrer dans le véhicule, exerçait déjà une pression importante sur elle, comme elle l’a expliqué lors de son audition.

La victime décrit clairement la séquence d’entrée des protagonistes dans le véhicule, soit elle en premier, puis l’appelant (par la porte du conducteur) et enfin l’auteur principal ; cet ordre paraît logique dans le contexte des faits. Cet élément n’est pas central, mais contribue à la contrainte ; en tout état de cause, même si par hypothèse l’appelant était entré dans le véhicule avant elle, comme il le soutient, l’ensemble des circonstances de l’espèce confirme qu’elle n’y est pas entrée de son plein gré.

L’appelant nie certes avoir parlé dans le véhicule et ainsi contribué à la contrainte exercée sur la victime pour qu’elle fasse venir sa sœur. Or, la victime a été constante à ce sujet ; certains messages Snapchat font d’ailleurs mention de plusieurs personnes. La plaignante a décrit clairement les propos de l’appelant, une fois à bord du véhicule, qui ont contribué à la maintenir dans la crainte, y-compris la manière dont il a signalé la présence de la police. Il s’agissait de personnel en uniforme, facilement visibles ; si la plaignante a précisé que son frère accompagnait les gendarmes, elle ne met pas cette précision dans la bouche de l’appelant. Cette version emporte conviction, la victime n’ayant aucun intérêt à mentir sur ce point – surtout aussi vite après les faits – et ayant, sur ces aspects aussi, clairement désigné l’appelant. Une confusion avec l’auteur principal n’entre pas en ligne de compte.

Le lieu et l’heure à laquelle se sont déroulés les événements – effectivement en pleine rue à une heure d’activité – sont sans pertinence : les faits se sont passés rapidement et il n’est pas surprenant qu’aucun passant – pour autant qu’il y en ait eu un, ce qui n’est pas établi – n’ait réagi.

Certes, l’appelant ne s’est pas adressé à la sœur de la victime et n’a pas directement participé à l’atteinte à la liberté de décision de celle-ci. Il a néanmoins joué un rôle déterminant dans la privation de liberté de la victime elle-même, en sachant pertinemment que son comparse cherchait par ce biais à contraindre la sœur de la victime à venir à sa rencontre. Il ne s’est ainsi pas contenté d’assister passivement aux agissements de son comparse mais y a contribué de façon déterminante.

Le fait que la victime ait finalement pu quitter le véhicule est sans portée sur les circonstances dans lesquelles elle y est entrée et restée, étant relevé que sa privation de liberté a duré, aux dires de l’auteur principal, une vingtaine de minutes, ce qui correspond à la chronologie ci-dessus, qui permet d’établir que la victime a été abordée par les deux hommes avant 16h43 et libérée vers 17h00.

L’appelant a donc joué un rôle causal dans l’infraction de prise d’otage et le verdict de culpabilité pour complicité de cette infraction doit être confirmé.

2.6.2. L’appelant déclare avoir ignoré que son comparse n’était pas titulaire d’un permis de conduire et s’être fié aux apparences. Compte tenu des circonstances de l’espèce, notamment de la location d’un véhicule luxueux et cher, par ses soins, pour le mettre à disposition de son comparse, alors que des relations privilégiées existaient entre ce dernier et le loueur, il aurait été plus logique que le contrat de location soit conclu directement entre eux. Du fait que son comparse lui a lui-même demandé de signer le contrat et qu’il ne le connaissait que depuis quelques jours, l’appelant ne pouvait pas se contenter de se fier aux apparences et il lui incombait, à tout le moins, de lui demander s’il remplissait bien les conditions pour conduire, ce qu’il n’a pas fait.

Il faut dès lors retenir que l’appelant a bien contrevenu à l’art. 95 al. 1 let. e LCR, à tout le moins par négligence, en permettant à son comparse de prendre le volant le 25 novembre 2020. Le verdict de culpabilité sur ce point sera également confirmé.

3. 3.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

3.2. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

L'exigence, pour appliquer l'art. 49 al. 1 CP, que les peines soient de même genre, implique que le juge examine, pour chaque infraction commise, la nature de la peine à prononcer pour chacune d'elle. Le prononcé d'une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation contenu à l'art. 49 CP n'est ensuite possible que si le juge choisit, dans le cas concret, le même genre de peine pour sanctionner chaque infraction commise. Que les dispositions pénales applicables prévoient abstraitement des peines de même genre ne suffit pas. Si les sanctions envisagées concrètement ne sont pas du même genre, elles doivent être prononcées cumulativement. La peine privative de liberté et la peine pécuniaire ne sont pas des sanctions du même genre (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1).

Cette disposition ne prévoit aucune exception. Le prononcé d'une peine unique dans le sens d'un examen global de tous les délits à juger n'est pas possible (ATF 145 IV 1 consid. 1.4 ; 144 IV 313 consid. 1.1.2).

Lorsqu'il s'avère que les peines envisagées concrètement sont de même genre, l'art. 49 al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement - d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner - la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2).

3.3. À teneur de l'art. 49 al. 2 CP, si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement.

Cette situation vise le concours réel rétrospectif qui se présente lorsque l'accusé, qui a déjà été condamné pour une infraction, doit être jugé pour une autre infraction commise avant le premier jugement, mais que le tribunal ignorait. L'art. 49 al. 2 CP enjoint au juge de prononcer une peine complémentaire ou additionnelle (Zusatzstrafe), de telle sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement (ATF 142 IV 265 consid. 2.3.1 = JdT 2017 IV 129 ; ATF 141 IV 61 consid. 6.1.2 ; ATF 138 IV 113 consid. 3.4.1 et les références). Il doit s'agir de peines de même genre
(ATF 142 IV 265 consid. 2.3.2 et les références = JdT 2017 IV 129).

L'art. 49 al. 2 CP permet de garantir le principe de l'aggravation également en cas de concours réel rétrospectif. L'auteur qui encourt plusieurs peines privatives de liberté doit pouvoir bénéficier du principe de l'aggravation, indépendamment du fait que la procédure s'est ou non déroulée en deux temps (ATF 142 IV 329 consid. 1.4.1 = 
JdT 2017 IV 221 ; SJZ/RSJ 112/2016 ; AJP 2017 ; AARP/49/2017 du 10 février 2017 consid. 3.2.1 à 3.2.3 ; ATF 142 IV 265 consid. 2.3.3 = JdT 2017 IV 129 ;
ATF 141 IV 61 consid. 6.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_623/2016 du 25 avril 2017 consid. 1.1 et 1.4).

3.4. Les principes de l'art. 47 CP valent aussi pour le choix entre plusieurs sanctions possibles, et non seulement pour la détermination de la durée de celle qui est prononcée. Que ce soit par son genre ou sa quotité, la peine doit être adaptée à la culpabilité de l'auteur. Le type de peine, comme la durée de celle qui est choisie, doivent être arrêtés en tenant compte de ses effets sur l'auteur, sur sa situation personnelle et sociale ainsi que sur son avenir. L'efficacité de la sanction à prononcer est autant décisive pour la détermination de celle-ci que pour en fixer la durée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_611/2014 du 9 mars 2015 consid. 4.2).

La peine pécuniaire constitue la sanction principale dans le domaine de la petite et moyenne criminalité, les peines privatives de liberté ne devant être prononcées que lorsque l'État ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 134 IV 97 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1249/2014 du 7 septembre 2015 consid. 1.2).

3.5. Aux termes de l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits.

Aux termes de l'art. 44 al. 1 CP, si le juge suspend totalement ou partiellement l'exécution d'une peine, il impartit au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans. Dans le cadre ainsi fixé par la loi, la durée du délai d'épreuve est à déterminer en fonction des circonstances du cas, en particulier selon la personnalité et le caractère du condamné, ainsi que du risque de récidive. Plus celui-ci est important plus long doit être le délai d'épreuve et la pression qu'il exerce sur le condamné pour qu'il renonce à commettre de nouvelles infractions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1339/2016 du 23 mars 2017 consid. 1.1.2).

3.6. En l’espèce, la faute de l’appelant est importante. Il s’en est pris à la liberté d’une mineure et, à deux reprises, à la sécurité routière.

Sa situation personnelle n’explique pas son comportement ; comme il le souligne lui-même, il n’avait pas de raison de prendre fait et cause pour son comparse qu’il ne connaissait pas de longue date. Il a agi par complaisance et facilité, prêtant assistance à son comparse au détriment d’une jeune fille durablement marquée par les faits.

Au vu de la gravité des faits et de l’absence de prise de conscience, seule une peine privative de liberté entre en ligne de compte pour la complicité de prise d’otage, afin d’une part de sanctionner adéquatement la gravité de la faute et d’autre part de remplir efficacement la fonction dissuasive du prononcé d’une sanction. En revanche, les infractions à la LCR peuvent adéquatement être sanctionnées par une peine pécuniaire, laquelle devra être fixée en tenant compte de celle prononcée le 31 août 2022 par le MP, les infractions concernées entrant en concours rétrospectif.

3.6.1. En ce qui concerne la complicité de prise d’otage, les développements du premier juge relatifs à la fixation de la peine, qui n’ont fait l’objet d’aucune critique de l’appelant, emportent conviction. La peine privative de liberté doit être arrêtée à un an et réduite à sept mois pour tenir compte du statut de complice du prévenu.

3.6.2. Les trois infractions à la LCR retenues à l’encontre de l’appelant sont passibles d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire. L’infraction la plus grave est celle déjà sanctionnée par le MP. Si la Cour de céans avait été appelée à sanctionner l’ensemble des faits elle aurait ainsi fixé la peine de base à 60 jours amende pour cette infraction et l’aurait aggravée de 15 jours à chaque fois (peine théorique 30 jours) pour chacune des infractions à l’art. 95 LCR. C’est donc une peine complémentaire de 30 jours-amende qui sera prononcée, la valeur du jour-amende étant calquée sur celle retenue le 31 août 2022 soit CHF 40.-.

3.6.3. Le bénéfice du sursis est acquis à l’appelant. La durée du d’épreuve fixée par le premier juge est adéquate et sera confirmée.

L’appel sera donc partiellement admis et la peine prononcée modifiée dans le sens de ce qui précède.

4. 4.1. Conformément à l'art. 66a al. 1 CP, le juge expulse un étranger du territoire suisse pour une durée de cinq à quinze ans s'il est reconnu coupable de l'une des infractions énumérées aux let. a à o, également sous la forme de tentative (ATF 144 IV 168 consid. 1.4.1), notamment en cas de condamnation pour prise d’otage (let. g). Conformément à l'al. 2 de cette disposition, le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse. À cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse.

4.2. La loi ne définit pas ce qu'il faut entendre par une « situation personnelle grave » (première condition cumulative) ni n'indique les critères à prendre en compte dans la pesée des intérêts (seconde condition cumulative). Il convient de s'inspirer des critères énoncés à l'art. 31 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative (OASA). L'art. 31 al. 1 OASA prévoit qu'une autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d'extrême gravité. L'autorité doit tenir compte notamment de l'intégration du requérant selon les critères définis à l'art. 58a al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants, de la situation financière, de la durée de la présence en Suisse, de l'état de santé ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance. Comme la liste de l'art. 31 al. 1 OASA n'est pas exhaustive et que l'expulsion relève du droit pénal, le juge devra également, dans l'examen du cas de rigueur, tenir compte des perspectives de réinsertion sociale du condamné (ATF 144 IV 332 consid. 3.3.1 et 3.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_379/2021 du 30 juin 2021 consid. 1.1).

En règle générale, il convient d'admettre l'existence d'un cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP lorsque l'expulsion constituerait, pour l'intéressé, une ingérence d'une certaine importance dans son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par la Constitution fédérale (art. 13 Cst.) et par le droit international, en particulier l'art. 8 CEDH (arrêt du Tribunal fédéral 6B_255/2020 du 6 mai 2020 consid. 1.2.1 et références citées). Pour se prévaloir d'un droit au respect de sa vie privée, l'étranger doit établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire. Une pesée des intérêts en présence, en considérant la durée du séjour en Suisse comme un élément parmi d'autres et en n'accordant qu'un faible poids aux années passées en Suisse dans l'illégalité, en prison ou au bénéfice d'une simple tolérance, doit être préférée à une approche schématique qui consisterait à présumer, à partir d'une certaine durée de séjour en Suisse, que l'étranger y est enraciné et dispose de ce fait d'un droit de présence dans notre pays (ATF 134 II 10 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_153/2020 du 28 avril 2020 consid. 1.3.2). La reconnaissance d'un cas de rigueur ne se résume pas non plus à la simple constatation des potentielles conditions de vie dans le pays d'origine ou du moins la comparaison entre les conditions de vie en Suisse et dans le pays d'origine, mais aussi à la prise en considération des éléments de la culpabilité ou de l'acte (M. BUSSLINGER / P. UEBERSAX, Härtefallklausel und migrationsrechtliche Auswirkungen der Landesverweisung, cahier spécial, Plaidoyer 5/2016, p. 101 ; G. FIOLKA / L. VETTERLI, Die Landesverweisung in Art. 66a ff StGB als strafrechtliche Sanktion, cahier spécial, Plaidoyer 5/2016, p. 87 ; AARP/185/2017 du 2 juin 2017 consid. 2.2).

4.3. En l’espèce, l’appelant se prévaut de liens avec la Suisse alors qu’il n’y réside pas et a tout au plus des parents éloignés vivant dans notre pays. Il se prévaut également de liens avec une communauté religieuse, dont il admet qu’il la fréquentait jusque récemment uniquement par le biais des réseaux sociaux. Ces circonstances ne fondent à l’évidence pas un cas de rigueur au sens de l’art. 66a al. 2 CP et il n’y a aucune raison de renoncer au prononcé de l’expulsion qui sera partant confirmée.

4.4. Il n'y a pas lieu d'étendre la mesure d'expulsion prononcée à l'ensemble de l'espace Schengen, le prévenu étant ressortissant d'un État membre.

5. 5.1. Conformément à l'art. 126 al. 1 let. a CPP, le tribunal statue également sur les conclusions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu.

5.2. En l’espèce, l’appelant conclut au déboutement de la partie plaignante, sans motiver cette conclusion au-delà de l’acquittement plaidé. Dans la mesure où le verdict de culpabilité est intégralement confirmé, les prétentions civiles le seront également étant relevé que le montant alloué par le premier juge, dont l’appelant ne critique pas la quotité, est adéquat et conforme aux principes applicables à la réparation du tort moral.

6. L'appelant, qui succombe pour l’essentiel, le jugement entrepris n’étant modifié qu’en ce qui concerne le type de peine prononcée pour certaines infractions, supportera le 80% des frais de la procédure d’appel envers l'État (art. 428 CPP).

7. 7.1. L'état de frais produit par Me B______, défenseure d'office de A______, satisfait globalement les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale. La durée totale des entretiens avec son mandant sera néanmoins ramenée à une heure et demie, suffisante dans le contexte d’une procédure d’appel dans un dossier connu pour avoir été plaidé récemment et suivi dès le début de l’instruction. La durée d’étude du jugement de première instance sera par ailleurs écartée s’agissant d’une activité comprise dans le forfait, tout comme la rédaction de la déclaration d’appel qui n’a pas à être motivée.

La rémunération de Me B______ sera partant arrêtée à CHF 1'593.40 correspondant à 2h10 d'activité au tarif de CHF 200.-/heure, 7h50 d’activité au tarif de CHF 110.-/heure plus la majoration forfaitaire de 10%, un forfait de déplacement en CHF 55.- et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 113.90.

7.2. L'état de frais produit par Me F______, conseil juridique gratuit de D______, satisfait globalement les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale. La durée de préparation aux débats d’appel sera néanmoins ramenée à cinq heures, suffisante dans le contexte d’une procédure d’appel dans un dossier connu pour avoir été plaidé. La durée d’étude du jugement de première instance sera par ailleurs écartée s’agissant d’une activité comprise dans le forfait.

La rémunération de Me F______ sera partant arrêtée à CHF 1'845.25 correspondant à 7h20 d'activité au tarif de CHF 200.-/heure, plus la majoration forfaitaire de 10%, un forfait de déplacement en CHF 100.- et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 131.95.

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/171/2023 rendu le 10 février 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/23638/2020.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement en ce qui le concerne.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de complicité de prise d'otage (art. 25 et 185 ch. 1 CP), de mise à disposition d'un véhicule à une personne non titulaire du permis de conduire requis (art. 95 al. 1 let. e LCR) et de conduite sous retrait, refus ou interdiction d'utilisation du permis de conduire (art. 95 al. 1 let. b LCR).

Acquitte A______ des faits visés sous chiffre 1.2.1 de l'acte d'accusation à l'égard de C______ et de E______, qualifiés de menaces (art. 180 CP), de contrainte (art. 181 CP) et de tentative de contrainte (art. 22 al. 1/181 CP) (rectification d'erreur matérielle art. 83 al. 1 CPP).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de sept mois, sous déduction de 22 jours de détention avant jugement (deux jours de détention et 20 jours correspondant aux mesures de substitution) (art. 40 et 51 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 30 jours amende.

Fixe le montant du jour-amende à CHF 40.-.

Dit que cette peine est complémentaire à celle prononcée le 31 août 2022 par le Ministère public de Genève.

Met A______ au bénéfice du sursis pour ces deux peines et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, les sursis pourraient être révoqués et les peines suspendues exécutées, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de cinq ans (art. 66a al. 1 CP).

Dit que les peines prononcées avec sursis n'empêchent pas l'exécution de l'expulsion durant le délai d'épreuve.

Renonce à ordonner le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) (art. 20 de l'ordonnance N-SIS ; RS 362.0).

Condamne A______, conjointement et solidairement avec G______, à verser à D______ CHF 1'000.-, plus intérêt à 5% l'an dès le 7 décembre 2020, à titre de réparation de son préjudice moral (art. 49 CO).

Ordonne la restitution à A______ du téléphone portable figurant sous chiffre 2 de l'inventaire n° 4______ (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Condamne A______, au paiement de 3/10èmes des frais de la procédure préliminaire et de première instance, soit CHF 1'343.10 ainsi qu’au paiement de l’émolument complémentaire de CHF 1'200.-.

Prend acte que le Tribunal de police a fixé à CHF 12'170.10 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseure d'office de A______ et arrête CHF 1'593.40 celle qui lui est due pour la procédure d’appel (art. 135 CPP).

Arrête à CHF 1'845.25, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me F______, conseil juridique gratuit de D______ pour la procédure d'appel.

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'775.-, incluant un émolument de jugement de CHF 1'500.-.

Met 80% de ces frais, soit CHF 1'420.- à la charge de A______ et laisse le solde de ces frais à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Secrétariat d'État aux migrations et à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Lylia BERTSCHY

 

La présidente :

Gaëlle VAN HOVE

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

5'677.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

120.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

80.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'775.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

7'452.00