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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/14819/2022

AARP/284/2023 du 18.08.2023 sur JTDP/1476/2022 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : DISPOSITIONS PÉNALES DE LA LSTUP;REPRÉSENTATION DE LA VIOLENCE;PRINCIPE DE L'ACCUSATION;IN DUBIO PRO REO;PROFIL D'ADN;EXPERTISE;ACQUITTEMENT;TORT MORAL
Normes : LStup.19.al1.letb, g; LStup.19.al2.leta; CP.135.al1; CPP.325.al1; CPP.431.al2
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/14819/2022 AARP/284/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 2 août 2023

 

Entre

A______, sans domicile connu, comparant par Me B______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/1476/2022 rendu le 30 novembre 2022 par le Tribunal de police,

 

et


LE MINISTÈRE PUBLIC
de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 30 novembre 2022, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19 al. 1 let. d et g et al. 2 let. a LStup), ainsi que de représentations de la violence (art. 135 al. 1 du code pénal [CP]) s'agissant des faits visés sous ch. 1.1.2 let. A et B de l'acte d'accusation et condamné à une peine privative de liberté de 18 mois, sous déduction de 125 jours de détention avant jugement, avec sursis durant quatre ans, ainsi qu'aux frais de la procédure en CHF 4'377.-, ses conclusions en indemnisation étant rejetées. Le premier juge a renoncé à prononcer son expulsion de Suisse et ordonné la confiscation et la destruction de deux téléphones portables.

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant à son acquittement et sollicitant une indemnité en tort moral pour détention injustifiée, avec suite de frais.

b. Selon l'acte d'accusation du 28 octobre 2022 du Ministère public (MP), il est reproché ce qui suit à A______ :

À une (des) date(s) indéterminée(s), antérieure(s) au 1er février 2022, en Suisse, en un lieu impossible à déterminer mais pouvant se situer dans le canton de Berne ou de Genève, il a intentionnellement participé, sans droit, à un important trafic de cocaïne portant sur une quantité d'à tout le moins 610.9 grammes net de cocaïne, d'un taux de pureté oscillant entre 23.9 et 64.7%, en détenant cette drogue qui était destinée à la vente sur le territoire suisse, en la confectionnant, voire en la transportant à Genève, fin janvier 2022, étant précisé qu'elle a été saisie par la police, le 1er février 2022, lors de la perquisition du logement de C______, à D______ [GE] (ch. 1.1.1 de l'acte d'accusation).

Le 28 juillet 2022, en route pour la Suisse sur un vol en provenance de E______, au Nigéria, via Istanbul, à destination de Genève, il a reçu, en provenance du numéro suisse +41_1______, sur son téléphone portable, des images montrant une mule décédée, le ventre ouvert, après avoir ingéré des doigts de cocaïne, soit des images illustrant des actes de cruauté envers des êtres humains, portant gravement atteinte à la dignité humaine et ne présentant aucune valeur d'ordre culturel ou scientifique digne d'intérêt. Il a ensuite conservé ces images sur son téléphone portable et les a ultérieurement importées en Suisse, le 29 juillet 2022, faits qualifiés de représentation de la violence au sens de l'art. 135 al. 1 CP (ch. 1.1.2 let. A de l'acte d'accusation).

Le 20 mai 2022, alors qu'il se trouvait au Nigéria, il a transféré au détenteur du raccordement +41_2______ qui se trouvait en Suisse, cinq vidéos illustrant des actes de violence envers des êtres humains tels que définis ci-dessus. Il a conservé sur son téléphone portable, avant de les importer en Suisse, le 29 juillet 2022 :

- deux vidéos de la même scène, sur laquelle on aperçoit des hommes allongés sur le sol, recouverts de sang, apparemment morts, et d'autres, eux aussi couchés sur le sol, vraisemblablement encore vivants, en train de se faire tirer dessus par des personnes armées de fusils ;

- une vidéo d'un individu africain, recouvert de sang et le visage très sérieusement meurtris, marcher tout en se faisant photographier et/ou filmer par d'autres personnes autour de lui ;

- une vidéo d'une femme vivante, allongée à côté d'un homme apparemment mort, la gorge tranchée, en train de se faire elle-même trancher la gorge, découper la tête, ainsi que les organes génitaux, l'homme étant décapité à son tour ;

- une vidéo sur laquelle on aperçoit la tête d'un homme (décapité) posée sur le sol, dans la nature, à côté d'un carton, puis, quelques instants plus tard, la tête d'un autre homme (lui aussi décapité), posée sur le sol d'une rue où circulent des véhicules et motocycles,

faits qualifiés de représentation de la violence au sens de l'art. 135 al. 1 CP (ch. 1.1.2 let. B de l'acte d'accusation).

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a.a. Le 1er février 2022, lors d'une patrouille à Genève, l'attention de la police a été attirée par un individu au comportement suspect, identifié comme étant F______. Porteur de documents d'identité belges, il s'est montré très évasif sur les raisons de sa présence en Suisse. Il circulait au volant d'un véhicule prêté par C______ à l'occasion de son séjour.

a.b. La perquisition du domicile de ce dernier, sis chemin 3______ no. ______, à D______, a permis la découverte de 674 grammes brut de cocaïne, sous forme de : sept doigts (dans un double sachet transparent ; poids total de 213.8 grammes), quatre autres doigts (dans un sachet blanc ; poids total de 169.3 grammes), 58 boulettes (poids total de 78.1 grammes) et une boulette supplémentaire (poids total d'un gramme), deux puck (poids respectif de 104 et 103.1 grammes) et quatre boulettes (poids total de 4.7 grammes). Plusieurs smartphones, une balance, du matériel de conditionnement et de l'argent liquide en différentes devises, notamment CHF 18'770.-, ont également été saisis.

a.c. Les recherches effectuées sur la drogue saisie ont en particulier mis en évidence le profil ADN de F______ à l'extérieur de 10 boulettes du lot en comprenant 58, sur et dans le nœud du sachet transparent contenant sept doigts, ainsi qu'à l'extérieur des quatre autres boulettes.

Un profil ADN de mélange, dont la fraction majeure correspondait au profil de A______ et la fraction mineure n'était pas interprétable, a été mis en évidence, après analyse d'un écouvillon, sur l'extérieur des sept doigts contenus dans un sachet transparent. Il était un milliard de fois plus probable que A______ soit à l'origine du profil ADN de mélange mis en évidence pour la trace en question plutôt qu'un inconnu.

a.d. L'analyse de la cocaïne d'un poids total net de 610.9 grammes a notamment révélé un taux de pureté de 23.9 à 28.6% s'agissant des sept doigts en question.

a.e. La fouille du téléphone appartenant à C______ n'a révélé aucun lien avec A______.

b.a. Devant la police et le MP, F______ a d'abord contesté s'adonner à un trafic de stupéfiants, expliquant être arrivé à Genève environ deux semaines avant son interpellation et résider chez C______, avant d'admettre avoir vendu de la cocaïne à trois consommateurs qui le mettaient en cause, agissant pour le compte du précité. Le nom de A______ ne lui évoquait rien.

b.b. C______ a nié toute implication dans un quelconque trafic de stupéfiants. Il avait séjourné en Gambie du 16 décembre 2021 au 15 mai 2022 et confié son trousseau de clés à F______, un ami, afin qu'il relève son courrier et veille sur son appartement et s'acquitte du loyer de celui-ci. Il ne connaissait pas A______.

c. A______ a fait l'objet d'un mandat d'amener, délivré le 13 mai 2022 par le MP.

Le MP a rendu une ordonnance de disjonction le 11 juillet 2022, considérant que le sort de A______ devait être tranché dans une procédure distincte de celle ouverte à l'encontre de F______ et C______.

A______ a été interpellé à l'aéroport de Genève le 29 juillet suivant, à 10h55, en provenance de E______, via Istanbul. Il a expliqué revenir d'un séjour de quatre mois au Nigéria, débuté en mars ou avril 2022.

Il louait une chambre dans une maison à Q______ [BE]. Selon la police, qui avait contacté le propriétaire de l'habitation, A______ n'était plus revenu depuis plusieurs mois, de sorte que sa chambre avait été relouée. Il n'avait ainsi plus de domicile en Suisse.

d.a. L'examen du téléphone portable G______ de A______, lié au raccordement +41_4______, a permis la découverte de neuf photographies se rapportant au décès d'une mule. Ces clichés ont été envoyés, via l'application WhatsApp, le 28 juillet 2022 entre 12:08:21 et 12:08:23, par le contact H______ depuis un téléphone portable suisse sur celui de A______. Ces clichés contiennent la mention "forwarded". Sur trois d'entre eux, est visible l'intérieur de l'intestin, rempli de doigts de cocaïne, de la personne décédée. Deux photographies semblent avoir été réalisées au cours d'une autopsie. Ont également été envoyées une photographie du passeport de la vraisemblable victime ainsi que trois images de cette dernière, dont deux où on la voit couchée au sol dans un aéroport. Selon une coupure de presse d'un journal angolais, il s'agirait d'un certain I______, décédé le ______ 2022 à l'aéroport de J______, en Angola. Trois des neuf photographies litigieuses illustrent cet article.

d.b.a. A______ a également partagé depuis le même raccordement, via WhatsApp, les 20 et 22 mai 2022, des messages et vidéos, en particulier les cinq vidéos décrites sous ch. 1.1.2 let. B de l'acte d'accusation, toutes filmées de très près, de sorte que l'identité des victimes est identifiable, avec K______, membre de la police cantonale bernoise. À la réception de l'une des vidéos, le policier a écrit : "Der Mensch ist dumm!", avant d'envoyer : "No more Videos please!", "Your fucking crazy!". Le 21 juin 2022, K______ a repris contact avec A______ en ces termes : "Mein Antrag ist abgelaufen, ich muss nun CHF 300.- haben. Wie sieht es aus?".

d.b.b. Il ressort de diverses coupures de presse produites par A______ que l'État de L______ au Sud Est du Nigéria est en proie à une flambée de violence sur fond de mouvement séparatiste. De nombreuses images et vidéos sont régulièrement relayées par les médias et les résidents. Un évènement en particulier a été largement repris par les médias, soit la décapitation d'un couple de policiers nigérians au mois de mai 2022, ce qui pourrait correspondre à la vidéo du couple décapité transmise par A______.

d.c. Les recherches menées par la police sur les téléphones M______ et G______ de A______ n'ont pas permis d'établir de lien entre le précité, C______ et F______.

e. K______ a indiqué au MP qu'il travaillait au sein de la Brigade de la recherche des personnes, à Q______ [BE]. Il avait rencontré A______ en novembre 2020 et en mars 2022, dans le cadre de mandats d'amener délivrés à son encontre pour des amendes impayées. Lors de leur première rencontre, A______ lui avait parlé des violences au Nigéria. Il ignorait pour quelles raisons ce dernier lui avait envoyé ces vidéos et lui avait demandé de cesser de lui en transmettre.

f.a. Tout au long de la procédure et y compris devant le TP, A______ a déclaré ne pas comprendre comment son ADN avait pu se retrouver sur la drogue saisie, si ce n'était du fait qu'il avait travaillé en Suisse en qualité de conseiller en emballage de marchandises pour l'exportation de divers produits en Afrique, ayant d'ailleurs eu sa propre société. Il avait également été en contact avec beaucoup d'africains et avait pu "toucher des choses". Il était venu à Genève pour faire la fête avec des amis depuis Q______ [BE] ou encore acheter son billet d'avion pour le Nigéria. À son arrivée en Suisse comme réfugié, soit avant 2003, il avait conditionné et vendu quelques fois de la cocaïne, durant deux ou trois mois.

En confrontation, A______, C______ et F______ ont confirmé ne pas se connaître.

f.b. A______ a expliqué avoir reçu les photographies de la mule décédée d'une connaissance, prénommée H______, qui vivait en Suisse, pour qu'il puisse le cas échéant identifier la victime et aviser sa famille. Il a d'abord indiqué s'être trouvé à l'aéroport de E______ lors de la réception de ces clichés, si bien qu'il avait appelé H______ pour lui dire qu'il était fou et qu'il était lui-même occupé. Il ne les avait pas partagés, et les aurait supprimés s'il avait bénéficié d'un meilleur réseau internet. Il a ensuite déclaré les avoir reçus après avoir quitté le Nigéria, de sorte qu'en l'absence de réseau internet, il n'avait pas pu prendre connaissance de leur contenu avant d'arriver en Suisse. Dans le cas contraire, il aurait partagé l'information. Il conservait toutes sortes de photographies liées à des crimes sur son téléphone, dès lors qu'au Nigéria, pays en guerre, ce type d'information était partagé.

Il a admis avoir transféré cinq vidéos à un agent de police en Suisse et à un autre au Nigéria, films qu'il avait reçus lors de ses vacances dans son pays d'origine, où de telles vidéos étaient partagées pour informer les locaux des risques encourus dans certaines régions, en particulier à l'est du pays, sa région natale. Il considérait qu'il était en droit de garder ces vidéos afin d'alerter sur les graves actes perpétrés dans son village. Le policier suisse lui avait envoyé des "factures" pour qu'il s'acquitte des CHF 300.- dus aux forces de l'ordre. Il lui avait alors transmis ces vidéos car il était "inquiet" et avait besoin de "protection", affirmant ensuite qu'il avait agi de la sorte pour que le fonctionnaire le prenne au sérieux lorsqu'il évoquait la guerre civile dans son pays mais également pour prouver qu'il se trouvait en Afrique et ne pouvait pas revenir en Suisse.

g. Entendue par le MP et le TP, N______ a expliqué avoir été très étonnée d'apprendre que A______, son ex-époux, avait été mis en prévention pour trafic de stupéfiants. Ils avaient été en couple dès 2004 et mariés de 2006 à 2019. Ils avaient exploité une entreprise d'exportation, depuis lors en liquidation, en 2011 ou 2012. Tout comme leurs quatre enfants, elle avait déjà visionné des vidéos montrant les violences commises au Nigéria, films partagés par A______ dont le père était un ancien major du mouvement O______, ce qui avait influencé toute sa vie. Avant son arrestation, A______ voyait ses enfants de manière irrégulière, à raison d'une fois par mois environ et entretenait une très bonne relation avec eux.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b. Dans son mémoire d'appel, A______ conclut, principalement, à son acquittement complet, subsidiairement, à son acquittement de l'infraction grave à la LStup et à sa condamnation à une peine pécuniaire assortie du sursis complet s'agissant des chefs de représentation de la violence. Dans tous les cas, il sollicite CHF 25'000.- d'indemnité à titre de tort moral pour la détention injustifiée consécutive aux 125 jours de détention subis.

À la lecture de l'acte d'accusation, il était impossible d'appréhender ce qui lui était exactement reproché. Ce document ne précisait ni le lieu ni la date de commission de l'infraction grave à la LStup, aucune activité concrète ne lui était imputée, de sorte que l'on ne comprenait pas le rôle qu'il aurait joué dans le trafic de stupéfiants. Le premier juge n'avait pas discuté la portée des éléments à décharge, au nombre desquels figuraient l'absence de liens entre lui-même et les principaux protagonistes, ainsi qu'avec le trafic de stupéfiants de manière générale, les photographies trouvées dans son téléphone d'une mule décédée ne constituant en aucun cas un indice de sa participation à un tel trafic. Le TP s'était exclusivement fondé sur l'ADN retrouvé sur un sachet de cocaïne pour retenir sa culpabilité, alors même qu'il était domicilié dans le canton de Berne, soit à plus de 165 km du lieu où la drogue avait été saisie. Or, il avait, de manière constante, nié avoir manipulé ce sachet, émettant de simples hypothèses.

Il n'avait pas sollicité l'envoi des photographies de la mule décédée et ne les avait par ailleurs pas enregistrées dans sa galerie d'images, pas plus que transférées à un tiers. Aucun élément ne permettait de retenir qu'il les avait intentionnellement importées en Suisse, étant rappelé qu'il les avait reçues juste avant son départ pour Genève, si bien qu'il était possible qu'il n'ait pas pu prendre entièrement connaissance de leur contenu avant d'arriver en Suisse. Dans tous les cas, il était manifeste que ces images lui avaient été envoyées dans le cadre du partage d'une actualité récente, sans plus de réflexion.

Les vidéos transmises à l'agent de police, aussi violentes fussent-elles, illustraient l'actualité malheureuse de l'État de L______. Ces images, qui n'étaient pas dénuées de valeur culturelle et scientifique, avaient été envoyées à cet agent afin de l'informer de la situation dans laquelle il se trouvait et de dénoncer la violence perpétrée dans son pays, si bien qu'il devait être acquitté, subsidiairement mis au bénéfice d'une erreur sur l'illicéité inévitable et, encore plus subsidiairement, évitable. En effet, il n'aurait notamment jamais envoyé ces vidéos à un membre des forces de l'ordre s'il avait été conscient de l'illicéité de son comportement.

Le téléphone de marque M______ ne présentait aucun lien de connexité avec l'infraction retenue. Ainsi, sa confiscation et sa destruction n'étaient aucunement justifiées. Par ailleurs, bien qu'il ait admis avoir fait usage du téléphone G______ pour recevoir et envoyer les images litigieuses, sa confiscation et destruction était disproportionnée, dès lors qu'il était peu vraisemblable qu'il l'utilise à l'avenir pour commettre une infraction, de sorte que l'effacement des images incriminées suffisait à atteindre le but visé. La restitution de ces deux appareils, après effacement des contenus litigieux, devait dès lors être ordonnée.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement attaqué.

L'acte d'accusation présentait diverses alternatives tant s'agissant de la date et du lieu de survenance des faits que du rôle exact joué par le prévenu dans le cadre du trafic de stupéfiants, l'instruction n'ayant pas permis d'établir avec précision sa fonction, compte tenu notamment de son absence totale de collaboration. Il avait toutefois été démontré qu'il avait bien participé au trafic grâce en particulier à la présence de son ADN sur une partie de la drogue conditionnée et prête à la consommation. L'acte d'accusation avait ainsi été rédigé de manière aussi précise que possible et l'appelant aurait été en mesure de se déterminer sur les faits qui lui étaient reprochés.

Les explications maladroites données par l'appelant quant à la présence de son ADN n'emportaient pas conviction. Les seules personnes, hormis les consommateurs, amenées à toucher les doigts de cocaïne faisaient forcément parties d'un maillon de la chaîne. Le prévenu avait certainement confectionné ou transporté la drogue à Genève en vue de sa revente. Il l'avait, à tout le moins, détenue, ce qui était en soi déjà condamnable. D'autres éléments au dossier tendaient d'ailleurs à démontrer qu'il n'était pas étranger au trafic de cocaïne, notamment les photographies de la mule décédée retrouvées dans son téléphone portable, qui lui avaient été envoyées très certainement pour l'informer de la mort d'un des membres du réseau. L'appelant avait également admis avoir été impliqué dans une affaire de drogue en 2003.

Les vidéos transmises au policier représentaient incontestablement des actes de cruauté envers des êtres humains et ce, avec insistance. Le prévenu les avait, d'une part, envoyées à destination de Suisse et, d'autre part, conservées dans son téléphone, sans les effacer, avant de les y importer. Il ressortait de ses déclarations qu'il n'avait eu aucune intention de les effacer. S'il avait été réellement inquiet pour sa protection, il aurait simplement pu expliquer ce qu'il se passait au Nigéria.

L'appelant était bien en possession des images de la mule décédée lorsqu'il avait franchi la frontière suisse et il les avait déjà visionnées, de sorte qu'il savait qu'il s'agissait d'images choquantes susceptibles de porter atteinte à la dignité humaine et sans aucune valeur d'ordre culturel ou scientifique. Il lui appartenait de se renseigner sur la législation applicable, ce d'autant plus qu'il était arrivé en Suisse en 2003 et était titulaire d'un permis C.

Les téléphones confisqués en vue de leur destruction avaient été utilisés pour recevoir, détenir, transférer et importer les images litigieuses. La prise de conscience presque inexistante de l'appelant pouvait faire redouter d'une récidive.

d. Le TP se réfère intégralement au jugement rendu.

D. A______ est né le ______ 1978 à P______ dans l'État de L______ au Nigéria, pays dont il est ressortissant. Il est arrivé en Suisse en 2003, titulaire d'un permis C, divorcé et père de six enfants, dont deux résident au Nigéria et quatre à Q______ [BE]. Il n'exerce pas d'activité professionnelle depuis le début de l'année 2022 et bénéficie de prestations de l'assurance chômage à hauteur de CHF 1'900.- net par mois. Avant son départ au Nigéria, il était locataire d'une chambre pour un loyer mensuel de CHF 940.-. Ses primes d'assurance-maladie se montent à CHF 300.- par mois. Il a des dettes (primes d'assurance-maladie et impôts) à hauteur d'environ CHF 15'000.-.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, il a été condamné par le MP de R______ [BE] le 12 février 2016 à une peine pécuniaire de 40 jours-amende à CHF 60.- l'unité, ainsi qu'à une amende de CHF 1'200.-, pour contravention à la loi fédérale sur la protection de l'environnement (art. 60 al. 1 LPE) et conduite d'un véhicule automobile sans le permis de conduire requis (art. 95 al. 1 let a de la loi fédérale sur la circulation routière [LCR]).

E. Me B______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 20h45 d'activité de stagiaire, dont 19h00 pour la rédaction du mémoire d'appel, lequel comporte 22 pages, en-tête et conclusions incluses. En première instance, il a été indemnisé pour 37h00 d'activité.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. L'art. 9 CPP consacre la maxime d'accusation, laquelle découle également des art. 29 al. 2 et 32 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst. ; droit d'être informé, dans les plus brefs délais et de manière détaillée, des accusations portées contre soi) et 6 par. 3 let. a de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH ; droit d'être informé de la nature et de la cause de l'accusation).

Selon ce principe, l'acte d'accusation définit l'objet du procès (fonction de délimitation). Une infraction ne peut faire l'objet d'un jugement que si le Ministère public a déposé auprès du tribunal compétent un acte d'accusation dirigé contre une personne déterminée sur la base de faits précisément décrits. Il doit décrire les infractions qui sont imputées au prévenu de façon suffisamment précise pour lui permettre d'apprécier, sur les plans subjectif et objectif, les reproches qui lui sont faits (art. 325 CPP). En effet, le prévenu doit connaître exactement les faits qui lui sont imputés et quelles sont les peines et mesures auxquelles il est exposé, afin qu'il puisse s'expliquer et préparer efficacement sa défense (fonction de délimitation et d'information ; ATF 143 IV 63 consid. 2.2 p. 65 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_834/2018 du 5 février 2019 consid. 1.1).

Selon l'art. 325 al. 1 CPP, l'acte d'accusation désigne notamment les actes reprochés au prévenu, le lieu, la date et l'heure de leur commission ainsi que leurs conséquences et le mode de procéder de l'auteur ainsi que les infractions réalisées et les dispositions légales applicables de l'avis du Ministère public. En d'autres termes, l'acte d'accusation doit contenir les faits qui, de l'avis du Ministère public, correspondent à tous les éléments constitutifs de l'infraction reprochée au prévenu (ATF 143 IV 63 consid. 2.2 p. 65 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_665/2017 du 10 janvier 2018 consid. 1.1 ; 6B_166/2017 du 16 novembre 2017 consid. 2.1 ; 6B_275/2016 du 9 décembre 2016 consid. 2.1). Des imprécisions relatives au lieu ou à la date sont sans portée, dans la mesure où le prévenu ne peut avoir de doute sur le comportement qui lui est reproché (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1185/2018 du 14 janvier 2019 consid. 2.1). Le prévenu doit néanmoins être en mesure de situer temporellement les faits qui lui sont reprochés (arrêt du Tribunal fédéral 6B_14/2012 consid. 4.4).

La description des faits reprochés dans l'acte d'accusation doit être la plus brève possible (art. 325 al. 1 let. f CPP). Celui-ci ne poursuit pas le but de justifier ni de prouver le bien-fondé des allégations du Ministère public, qui sont discutées lors des débats. Aussi le ministère public ne doit-il pas y faire mention des preuves ou des considérations tendant à corroborer les faits. Par ailleurs, il va de soi que le principe de l'accusation ne saurait empêcher l'autorité de jugement, au besoin, de constater des faits permettant de réfuter les contestations et allégations du prévenu, qu'il n'incombe pas au Ministère public de décrire par le menu dans l'acte d'accusation (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1023/2017 du 25 avril 2018 consid. 1.1, non publié in ATF 144 IV 189 ; 6B_1185/2018 du 14 janvier 2019 consid. 2.1).

Le ministère public peut présenter un acte d'accusation alternatif ou, pour le cas où ses conclusions principales seraient rejetées, un acte d'accusation subsidiaire (art. 325 al. 2 CPP).

L'acte d'accusation doit permettre, à sa lecture, de comprendre les faits et les infractions qui sont reprochés au prévenu, et à celui-ci d'exercer efficacement ses droits à la défense. Il n'est pas une fin en soi, mais un moyen de circonscrire l'objet du procès pénal et de garantir l'information de l'accusé, afin que celui-ci ait la possibilité de se défendre et doit ainsi décrire précisément les infractions reprochées, tant sur le plan objectif que subjectif. Il faut se garder de tout formalisme excessif dans les exigences formulées à l'égard de l'acte d'accusation lequel n'est pas un jugement (arrêt du Tribunal fédéral 6B_799/2014 du 11 décembre 2014 in Forumpoenale 5/2015 p. 262).

2.2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 CEDH et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 Cst. et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 127 I 28 consid. 2a p. 40 s. ; 144 IV 345 consid. 2.2.3.2).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Le principe est violé lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que l'accusé n'a pas prouvé son innocence ; lorsqu'il résulte du jugement que, pour être parti de la fausse prémisse qu'il incombait à l'accusé de prouver son innocence, le juge l'a condamné parce qu'il n'avait pas apporté cette preuve. En revanche, l'absence de doute à l'issue de l'appréciation des preuves exclut la violation de la présomption d'innocence en tant que règle sur le fardeau de la preuve (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3).

Il n'y a pas non plus de renversement du fardeau de la preuve lorsque l'accusé refuse sans raison plausible de fournir des explications rendues nécessaires par des preuves à charge. Son silence peut alors permettre, par un raisonnement de bon sens conduit dans le cadre de l'appréciation des preuves, de conclure qu'il n'existe pas d'explication à décharge et que l'accusé est coupable (arrêt du Tribunal fédéral 6B_748/2009 du 2 novembre 2009 consid. 2.1).

Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.1).

L'autorité de jugement dispose d'un large pouvoir dans l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 4b p. 40), en application duquel, selon l'art. 10 al. 2 CPP, le juge donne aux moyens de preuve produits tout au long de la procédure la valeur qu'il estime devoir leur attacher pour se forger une intime conviction sur la réalité d'un fait (arrêt du Tribunal fédéral 6B_348/2012 du 24 octobre 2012 consid. 1.3).

2.2.2. À l'instar des autres moyens de preuve, le juge apprécie librement la force probante d'une expertise – dont celles portant sur l'analyse de profils d'ADN (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Strafprozessordnung / Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 2ème éd., Bâle 2014, n. 2 ad art. 182 ; A. KUHN / Y. JEANNERET (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 2, 7 et 10 ad art. 182) –, étant rappelé qu'il ne peut s'écarter des conclusions de l'expert sans motifs sérieux et qu'il doit alors motiver sa décision (ATF 129 I 49 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_787/2009 du 27 novembre 2009 consid. 1.1).

Dans ce domaine particulier, le risque d'un transfert secondaire d'ADN, soit le fait pour un individu "A" de déposer sur un objet l'ADN d'un autre individu "B" avec lequel il a été en contact, par exemple en lui serrant la main, existe mais reste faible selon les recherches en la matière (J. VUILLE, Ce que la justice fait dire à l'ADN [et que l'ADN ne dit pas vraiment] : étude qualitative de l'évaluation de la preuve par ADN dans le système judiciaire pénal suisse, Lausanne 2011, p. 38 ; M. PHIPPS / S. PETRICEVIC, The tendency of individuals to transfer DNA to handled items, Forensic Science International 2007 (168), p. 166).

La probabilité d'un transfert secondaire d'ADN dépend notamment de la propension de chacun à laisser des traces biologiques (en fonction également de la zone cutanée concernée, de l'âge, des conditions hormonales et des éventuelles maladies cutanées de l'individu, S. ZOPPIS / B. MUCIACCIA / A. D'ALESSIO / E. ZIPARO / C. VECCHIOTTI / A. FILIPPINI, DNA fingerprinting secondary transfer from different skin areas : Morphological and genetic studies, in Forensic Science International, Genetics 2014 (11), p. 137 ss, p. 143) et des circonstances temporelles du transfert. Ainsi, il se peut, dans des conditions "idéales", soit en présence d'un objet propre et de participants qui se sont lavés les mains, que seul le profil ADN d'un individu qui n'a pas touché l'objet soit mis en évidence sur ledit objet, lorsque tous les contacts ont eu lieu sans délai. Dans un cas d'espèce, cela nécessiterait que les individus se trouvent ensemble sur la scène du crime. En revanche, un profil de mélange était mis en évidence lorsque trente minutes ou une heure s'étaient écoulées entre le contact humain et le contact avec l'objet. Par conséquent, le réel risque d'un transfert secondaire d'ADN se poserait en pratique davantage lorsqu'un profil de mélange est mis en évidence (A. LOWE / C. MURRAY / J. WHITAKER / G. TULLY / P. GILL, The propensity of individuals to deposit DNA and secondary transfer of low level DNA from individuals to inert surfaces, Forensic Science International 2002 (129), p. 33).

Aussi, le risque d'erreur existe et doit être pris en compte. Toutefois, le juge ne saurait remettre en cause la valeur probante d'une analyse ADN au seul motif qu'une erreur peut parfois survenir. Il y a lieu, au contraire, de tenir compte de l'ensemble des circonstances, en particulier les coûts induits par des recherches supplémentaires, la célérité de la procédure, la gravité des charges et la présence d'autres éléments de preuve à charge ou à décharge. Il paraît essentiel de procéder à des investigations sur une potentielle erreur d'analyse, par exemple, lorsque l'ADN a permis aux enquêteurs de mettre en cause une personne que rien ne semblait lier aux faits de la cause, habitant à des centaines de kilomètres de l'infraction et inconnue des services de police pour des faits similaires (A. BIEDERMANN / J. VUILLE / F. TARONI, Apprécier le risque d'erreur lors d'une analyse ADN : de la nécessité d'être concret, PJA 2013, p. 1217 ss, p. 1220 s.).

Le Tribunal fédéral a régulièrement confirmé que le résultat d'analyses de profils ADN peut servir comme élément de preuve pour forger la conviction du juge (arrêts du Tribunal fédéral 6B_936/2020 du 6 janvier 2021 consid. 2.3 ; 6B_772/2020 du 8 décembre 2020 consid. 1.7.1 s. ; 6B_220/2020 du 26 mai 2020 consid. 1).

2.2.3. L'aveu est une preuve ordinaire qui n'a pas de valeur particulière. Il permet la condamnation de l'auteur lorsque le juge est convaincu qu'il est intervenu sans contrainte et paraît vraisemblable. Face à des aveux, suivis de rétractation, le juge doit se forger une conviction aussi bien sur les premières déclarations du prévenu que sur les nouvelles, valant rétractation, et apprécier les circonstances dans lesquelles celui-ci a modifié ses déclarations initiales (arrêts du Tribunal fédéral 6B_65/2016 du 26 avril 2016 consid. 2.2.1 ; 6B_157/2011 du 20 septembre 2011 consid. 1.2 ; 6B_626/2008 du 11 novembre 2008 consid. 2.1).

2.3.1. L'art. 19 al. 1 LStup punit d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire, celui qui notamment possède, détient ou acquiert des stupéfiants ou s'en procure de toute autre manière (let. d) ou celui qui prend des mesures aux fins de commettre une des infractions visées aux let. a à f (let. g).

L'art. 19 al. 1 let. g LStup vise tant la tentative que les actes préparatoires qualifiés qu'il tient pour aussi répréhensibles que les comportements énumérés aux let. a à f (ATF 138 IV 100 consid. 3.2 p. 102 s. ; 133 IV 187 consid. 3.2 p. 193).

2.3.2. L'art. 19 al. 2 let. a LStup érige en circonstance aggravante le fait que l'auteur ait su ou n'ait pu ignorer que son acte pouvait directement ou indirectement mettre en danger la santé de nombreuses personnes.

Tel est notamment le cas lorsque la quantité en cause est d'au moins 18 grammes de cocaïne pure (ATF 138 IV 100 consid. 3.2 ; 109 IV 143 consid. 3b).

2.4.1. L'art. 2 CP délimite le champ d'application de la loi pénale dans le temps. Son alinéa 1 pose le principe de la non-rétroactivité, en disposant que dite loi ne s'applique qu'aux infractions commises après son entrée en vigueur. Son alinéa 2 fait exception à ce principe pour le cas où l'auteur est mis en jugement sous l'empire d'une loi nouvelle ; en pareil cas, cette dernière s'applique si elle est plus favorable à l'auteur que celle qui était en vigueur au moment de la commission de l'infraction (lex mitior).

Le nouveau droit ne doit être appliqué que s'il conduit effectivement à un résultat plus favorable au condamné. L'ancien et le nouveau droit ne peuvent être combinés. Ainsi, on ne saurait, à raison d'un seul et même état de fait, appliquer l'ancien droit pour déterminer quelle infraction a été commise et le nouveau droit pour décider si et comment l'auteur doit être puni. Si l'un et l'autre droit conduisent au même résultat, c'est l'ancien droit qui est applicable. En revanche, lorsque l'auteur a commis plusieurs actes punissables indépendants, il convient d'examiner pour chacun d'eux quel est le droit le plus favorable (ATF 134 IV 82 consid. 6.2.3 ; 102 IV 196).

2.4.2. Selon l'ancien art. 135 CP, dans sa teneur jusqu'au 30 juin 2023, celui qui aura fabriqué, importé ou pris en dépôt, mis en circulation, promu, exposé, offert, montré, rendu accessibles ou mis à disposition des enregistrements sonores ou visuels, des images, d’autres objets ou des représentations qui illustrent avec insistance des actes de cruauté envers des êtres humains ou des animaux portant gravement atteinte à la dignité humaine, sans présenter aucune valeur d’ordre culturel ou scientifique digne de protection, sera puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire (al. 1). Celui qui aura acquis, obtenu par voie électronique ou d’une autre manière ou possédé des objets ou des représentations visés à l’al. 1, dans la mesure où ils illustrent des actes de violence contre des êtres humains ou des animaux, sera puni d’une peine privative de liberté d’un an au plus ou de l’amende (al. 1bis).

2.4.3. Le nouvel art. 135 al. 1 CP stipule que quiconque fabrique, importe, prend en dépôt, met en circulation, promeut, expose, offre, montre, rend accessibles, met à disposition, acquiert, obtient par voie électronique ou d’une autre manière ou possède des enregistrements sonores ou visuels, des images, d’autres objets ou des représentations qui illustrent avec insistance des actes de cruauté envers des adultes ou des animaux ou des actes de cruauté non effectifs envers des mineurs portant gravement atteinte à la dignité humaine, sans présenter aucune valeur d’ordre culturel ou scientifique digne de protection, est puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire.

2.4.4. "Importer" désigne le fait d'introduire en Suisse les objets incriminés, physiquement ou par transmission de données (arrêt du Tribunal fédéral 6P_117/2004 du 11 octobre 2004 consid. 5.1), alors que "prendre en dépôt" consiste à stocker les objets en vue de leur distribution ultérieure. L'acte de "montrer" décrit un comportement par lequel l’auteur présente l’objet ou la représentation illicite à un tiers. "Rendre accessible" signifie conférer à autrui la faculté de voir l’objet ou la représentation et, enfin, "mettre à disposition" vise également le fait de ménager à un tiers la faculté de voir librement l’objet ou la représentation (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI [éds], Code pénal – Petit Commentaire, 2ème éd., Bâle 2017, n. 13 et 14 ad art. 135).

2.4.5. Une représentation de violence n’est illicite qu’en l’absence de valeur culturelle ou scientifique digne de protection, notion qui doit s’interpréter de façon large (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI [éds], op. cit., n. 10 ad art. 135). Le caractère digne de protection s’examine du point de vue d’un spectateur ouvert aux différentes formes d’expression artistique, dans le cercle visé par ladite représentation (ATF 131 IV 64 consid. 10.1.3 = JdT 2007 IV 161). Il ne peut être retenu de valeur digne de protection lorsque les contenus ont pour unique objectif l’apologie ou la banalisation de la violence, ou le divertissement du public. L’absence d’intérêt digne de protection doit toutefois être manifeste ; en cas de doute, l’illicéité doit être déniée (jugement de la Cour des affaires pénales SK.2019.49 du 3 septembre 2020 consid. 6.3.6). Même lorsqu’elles proviennent originellement de sources à caractère scientifique, les représentations ne sont pas dignes de protection lorsqu’elles sont présentées hors de leur contexte initial, sans lien avec celui-ci (jugement de la Cour des affaires pénales SK.2019.38 du 26 juin 2020 consid. 6.1.3). Par contre, des images imprécises d’assassinat de civils dont on ne peut exclure qu’elles soient assimilables à celles d’un reportage de guerre, des images de cadavres défigurés se référant à un fait d’actualité visant à dénoncer une action de la police ou des images d’assassinat reprises d’un reportage officiel n’ont pas été considérées comme illicites, car elles pouvaient relever de l’illustration de faits d’actualité (jugement de la Cour des affaires pénales SK.2007.4 du 21 juin 2007 consid. 6.2.4 à 6.2.6).

2.4.6. L'art. 135 CP est une infraction intentionnelle. Le dol éventuel suffit. L'auteur doit avoir conscience, au moins sous la forme d'une appréciation qui serait communément admise, du caractère gravement attentatoire à la dignité humaine des objets ou représentations visées et de l'absence de valeur culturelle ou scientifique (A. KUHN / Y. JEANNERET [éds], op. cit., n. 73 ad art. 135).

2.4.7. Quiconque ne sait ni ne peut savoir au moment d'agir que son comportement est illicite n'agit pas de manière coupable. Le juge atténue la peine si l'erreur était évitable (art. 21 CP).

2.5.1. S'agissant du grief tiré de la violation du principe de l'accusation en lien avec l'infraction grave à la LStup retenue par le TP (art. 19 al. 1 let. d et g et al. 2 let. a), il sera relevé que l'acte d'accusation retient en particulier :

"A une (des) date(s) indéterminée(s), antérieure(s) au 1er février 2022, en Suisse, en un lieu impossible à déterminer mais pouvant se situer dans le canton de Berne ou de Genève, A______ a intentionnellement participé, sans droit, à un important trafic de cocaïne portant sur une quantité d'à tout le moins 610.9 grammes net de cocaïne à un taux de pureté oscillant entre 23.9% et 64.7%, en détenant cette drogue qui était destinée à la vente sur le territoire suisse, en la confectionnant, voire en la transportant à Genève, fin janvier 2022, étant précisé qu'elle a été saisie par la police, le 1er février 2022, lors de la perquisition du logement de C______, sis chemin 3______ no.______, à D______."

L'acte d'accusation n'établit pas la période pénale et retient une date de fin mais pas le moindre point de départ, même en terme d'année, ni de dates de commission, si bien qu'à ce titre il n'est pas possible pour le prévenu de situer temporellement les faits qui lui sont reprochés, étant précisé que les faits antérieurs au 30 novembre 2012 sont dans tous les cas prescrits (art. 97 al. 1 let. c CP).

À cela s'ajoute que le lieu de commission de l'infraction n'a pas non plus été déterminé de manière précise, ce qu'atteste la présentation alternative, "dans le canton de Berne ou de Genève", cantons éloignés de plus de 150 km. Il était ainsi quasiment impossible à l'appelant de préparer efficacement sa défense en tentant de produire notamment des pièces attestant de ses voyages, de ses activités lucratives ou même pour prouver un autre alibi, vu les lacunes de l'acte d'accusation. En outre, compte tenu de ce flou, toute mesure d'instruction, telle que l'analyse des rétroactifs et des données GPS de l'appelant, tendant à démontrer ou à infirmer qu'il se serait trouvé dans les environs du lieu de commission de l'infraction au moment des faits ou les jours précédents, était vaine.

Enfin, l'accumulation de comportements reprochés à l'appelant (détention, conditionnement, voire transport de drogue), dénote également l'impossibilité du MP de circonscrire matériellement son implication dans le trafic de cocaïne et, par conséquence, la nature des actes lui étant reprochés, ce qui est impropre à fonder une déclaration de culpabilité et lui permettre d'exercer son droit d'être entendu, qui plus est au vu de ce qui précède.

De manière générale, on ne saurait reprocher au prévenu d'avoir exercé son droit de se taire et de ne pas s'auto-incriminer (art. 6 par. 1 CEDH).

Cela étant, la question d'une quelconque violation de la maxime d'accusation peut souffrir de demeurer ouverte, dans la mesure où la condamnation de l'appelant pour infraction grave à la LStup contrevient, dans tous les cas, à la présomption d'innocence.

2.5.2.1. Les charges, s'agissant du trafic de stupéfiants, reposent essentiellement, si ce n'est exclusivement, sur les traces ADN trouvées sur l'extérieur des sept doigts de cocaïne contenus dans un sachet transparent retrouvés dans l'appartement de D______.

Si l'expertise attestant ce qui précède constitue un moyen de preuve important, elle ne saurait toutefois suffire, à elle seule, à fonder la culpabilité de l'appelant, dans la mesure où l'instruction n'a pas pu établir de manière certaine la façon dont cet ADN s'est trouvé sur les doigts de cocaïne saisis (transfert primaire ou secondaire, nature du matériel biologique analysé). Il n'est en effet pas exclu que l'ADN de l'appelant ait pu être laissé sur l'emballage extérieur de la drogue dans un contexte différent de celui du conditionnement ou du transport desdits stupéfiants. Il n'est pas impossible que l'appelant ait laissé des traces sur un emballage plastique, par la suite réutilisé, si, comme il l'explique, il a effectivement travaillé dans le conditionnement de marchandises, son ex-épouse ayant confirmé qu'ils avaient exploité, en 2011 ou 2012, une entreprise d'exportation de marchandises. S'il avait effectivement conditionné et manipulé la drogue, l'expérience enseigne que son ADN aurait dû plutôt être retrouvé à l'intérieur des contenants, ou encore sur leur fermeture, plutôt qu'à l'extérieur, signe d'un éventuel transport, nullement étayé par d'autres éléments au dossier en l'espèce.

L'instruction n'a pas non plus permis de déterminer si l'ADN trouvé sur les doigts de cocaïne aurait pu être transféré par une personne ou un objet avec lequel l'appelant aurait été préalablement en contact, ce dernier admettant être venu à Genève en diverses occasions et avoir eu des contacts avec des personnes d'origine africaine, étant rappelé qu'un risque de transfert secondaire d'ADN est davantage probable en pratique lors de la mise en évidence d'un profil de mélange (voir supra ch. 2.2.2), ce qui est le cas en l'occurrence.

Le risque d'erreur, bien que faible, existe et doit être pris en compte, a fortiori lorsqu'on se trouve, comme dans le cas d'espèce, dans la situation où un recoupement sur la base d'une analyse ADN constitue le seul lien entre le prévenu, que rien ne semble lier aux faits de la cause, et les autres protagonistes, en l'absence de contact entre les intéressés et compte tenu de la distance géographique les séparant.

2.5.2.2. Aucun autre élément du dossier ne permet en effet de lier l'appelant au trafic de stupéfiants.

Aucune trace ADN du prévenu n'a été retrouvée sur le reste de la drogue saisie dans le domicile de C______.

C______, tout comme F______, lequel a admis avoir vendu de la cocaïne pour le compte du premier, ont contesté connaître l'appelant, ce qu'il a confirmé, et que l'analyse de leurs téléphones respectifs n'a pas infirmé, tout comme le résultat de la perquisition de l'appartement de C______.

L'analyse des téléphones du prévenu n'a pas non plus permis de trouver un élément l'incriminant dans le cadre d'un trafic de stupéfiants, hormis les images de la mule décédée, largement relayées par la presse locale nigériane, retrouvées sur son téléphone parmi d'autres clichés analogues (voir infra ch. 2.6.2).

On relèvera enfin que le casier judiciaire du prévenu, qui vit en Suisse depuis plus de vingt ans, ne contient aucune condamnation en lien avec un quelconque trafic de stupéfiants, bien qu'il ait évoqué avoir vendu et conditionné de la drogue avant 2003, faits dorénavant prescrits. Au demeurant, son ex-épouse a déclaré être étonnée d'apprendre la mise en prévention de l'appelant pour ce motif.

L'intéressé n'est par ailleurs pas dénué de moyens de subsistance, dès lors qu'il perçoit des allocations chômage, et il est titulaire d'un permis C, ce qui lui permet de vivre et de travailler sur le territoire helvétique en toute légalité.

2.5.2.3. Au regard de ce qui précède, il n'est pas établi, au-delà de tout doute insurmontable et sauf à renverser le fardeau de la preuve, que l'appelant aurait participé, d'une quelconque manière que ce soit, à un important trafic de cocaïne en lien avec les faits reprochés sous ch. 1.1.1 de l'acte d'accusation.

Ainsi, en vertu du principe in dubio pro reo, l'appelant sera acquitté du chef d'infraction grave à la LStup (art. 19 al. 1 let. d et g et al. 2 let. a), le jugement de première instance devant être modifié sur ce point et l'appel admis.

2.6. Dans la mesure où le nouvel art. 135 al. 1 CP, s'agissant des comportements visés dans l'acte d'accusation, n'est plus favorable au prévenu que celui dans sa teneur jusqu'au 30 juin 2023, il sera fait application de cette dernière disposition, en vertu du principe de la non-rétroactivité (art. 2 al. 1 CP).

2.6.1. Le prévenu a, dans un premier temps, admis avoir reçu les images de la mule décédée alors qu'il se trouvait encore sur le sol nigérian. Sa réaction consistant à contacter leur expéditeur pour lui signifier notamment qu'il le considérait comme "fou", démontre qu'il a bien eu connaissance de leur contenu avant d'arriver en Suisse, contrairement à ce qu'il a affirmé par la suite. Ces explications postérieures n'emportent dès lors pas conviction, d'autant plus qu'il a reçu ces images le 28 juillet 2022 à 12h08 et n'a été arrêté à l'aéroport de Genève que le lendemain matin.

Il a donc délibérément importé, sur le territoire helvétique, des images illustrant des actes de violence contre des êtres humains, ce qu'il ne conteste pas, alors même qu'elles sont dépourvues de valeur d'ordre culturel ou scientifique digne de protection.

La condamnation du prévenu pour représentation de la violence au sens de l'art. 135 al. 1 aCP sera ainsi confirmée en lien avec le ch. 1.1.2 let. A de l'acte d'accusation et l'appel rejeté sur ce point.

2.6.2. Il n'est pas contesté que les cinq vidéos litigieuses retrouvées dans le téléphone de l'appelant sont des représentations de la violence. Ce dernier a admis les avoir envoyées à un agent de police via l'application WhatsApp et les avoir ensuite importées en Suisse.

Autre est la question de savoir si elles présentent une valeur d'ordre culturel ou scientifique digne de protection.

Bien qu'il s'agisse d'une notion qui doit s'interpréter largement (voir supra ch. 2.4.5), une telle valeur doit être niée en l'espèce.

En effet, non seulement ces images, compte tenu déjà de leur caractère particulièrement insoutenable, ne semblent avoir d'autre but que l'apologie de la violence. Elles ne sauraient être assimilées à un reportage, au vu, à nouveau, de leur nature très crue et choquante, mais aussi de l'angle très proche de la prise de vue, qui permet de s'interroger sur l'identité de son réalisateur, ou encore de l'absence d'anonymat des victimes.

Néanmoins, il ressort des déclarations constantes et crédibles de l'appelant qu'il n'avait pas conscience de l'absence de valeur culturelle ou scientifique de ces vidéos.

Au vu des différents articles de presse produits, ces vidéos semblent se référer à plusieurs faits d'actualités commis dans un contexte de violences et actes présents dans l'Etat de L______ au Nigéria, région dont le prévenu est originaire et dans laquelle il se trouvait vraisemblablement lorsqu'il a transmis ces vidéos.

Dès le début et tout au long de l'instruction, il s'est ainsi montré particulièrement touché par ces évènements, comme en ont témoigné son ex-épouse et le récipiendaire des images, mais également alarmé pour sa propre sécurité.

La qualité du réceptionnaire des images, soit un membre des forces de l'ordre de la Suisse, pays de domicile de l'appelant, atteste également de sa volonté d'alerter les dirigeants de notre État, même si cela est, certes, maladroit, et non pas de divertir ou choquer.

On relèvera d'ailleurs que ces vidéos ne sont accompagnées d'aucun commentaire ni émoticône dénigrant et qu'elles ne semblent pas avoir été partagées avec d'autres connaissances du prévenu, hormis, selon ses dires, avec un autre agent de police nigérian. L'appelant a par ailleurs cessé toute nouvelle diffusion aussitôt que le fonctionnaire suisse le lui a demandé.

Il découle de ce qui précède qu'il existe un doute raisonnable sur l'élément constitutif subjectif de l'art. 135 al. 1 aCP (conscience de l'absence de valeur culturelle ou scientifique de vidéos incriminées) en lien avec le ch. 1.1.2 let. B de l'acte d'accusation.

Dans ces conditions, la version la plus favorable à l'appelant, soit une négligence, doit être retenue.

L'appel sera donc admis sur ce point, le jugement entrepris annulé et l'acquittement de l'appelant prononcé.

3. 3.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1).

3.1.2. La peine pécuniaire ne peut excéder 180 jours-amende, le juge fixant leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur (art. 34 al. 1 CP). Un jour-amende est de CHF 30.- au moins et de CHF 3'000.- au plus (al. 2).

3.2. La faute du prévenu n'est pas négligeable. Il a agi par légèreté et manque de respect pour l’ordre juridique suisse, en important des images interdites sur le sol helvétique. Il s'agit cependant d'un acte ponctuel commis par désinvolture plus que par méchanceté ou dans le but de nuire.

Malgré ses aveux initiaux et les éléments accablants du dossier, l'appelant nie l'introduction de ces photographies en Suisse et jette la faute sur leur expéditeur. Il n'y a ainsi aucune prise de conscience

Il a deux antécédents judiciaires, toutefois non spécifiques.

Sa responsabilité pénale est entière. Aucune circonstance atténuante n'est réalisée, ni plaidée.

Sa situation personnelle ne justifie en aucun cas ses actes.

Le prévenu sera en conséquence condamné à une peine pécuniaire de
40 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à CHF 30.- pour tenir compte de sa situation financière modeste.

Le sursis prononcé lui est acquis (art. 42 al. 1 CP et art. 391 al. 2 CPP). Le délai d'épreuve, arrêté à quatre ans, n'est pas critiquable, compte tenu de ce qui précède.

4. 4.1.1. Aux termes de l'art. 431 al. 2 CPP, en cas de détention provisoire et de détention pour des motifs de sûreté, le prévenu a droit à une indemnité ou à une réparation du tort moral lorsque la détention a excédé la durée autorisée et que la privation de liberté excessive ne peut être imputée sur les sanctions prononcées à raison d’autres infractions. Cette subsidiarité de l'indemnisation sur l'imputation correspond à la règle prévue par l'art. 51 CP, n'exigeant pas pour une telle imputation une identité des faits ou de la procédure. Elle peut donc être effectuée sur une peine ordonnée dans une autre cause (arrêt du Tribunal fédéral 6B_632/2017 du 22 février 2018 consid. 1.5).

4.1.2. L'ampleur de la réparation morale dépend avant tout de la gravité des souffrances physiques ou psychiques consécutives à l'atteinte subie par l'intéressé et de la possibilité d'adoucir sensiblement, par le versement d'une somme d'argent, la douleur morale qui en résulte. Le Tribunal fédéral considère en principe qu'un montant de CHF 200.- par jour en cas de détention injustifiée de courte durée constitue une indemnité appropriée, dans la mesure où il n'existe pas de circonstances particulières qui pourraient fonder le versement d'un montant inférieur ou supérieur (ATF 146 IV 231 consid. 2.3.2). Le taux journalier n'est qu'un critère qui permet de déterminer un ordre de grandeur pour le tort moral. Il convient ensuite de corriger ce montant compte tenu des particularités du cas (durée de la détention, retentissement de la procédure sur l'environnement de la personne acquittée, gravité des faits reprochés, etc.). Lorsque la détention injustifiée s'étend sur une longue période, une augmentation linéaire du montant accordé dans les cas de détention plus courte n'est pas adaptée, car le fait de l'arrestation et de la détention pèse d'un poids en tout cas aussi important que l'élément de durée pour apprécier l'atteinte que subit la personne incarcérée. Aussi, lorsque la durée de détention est de plusieurs mois, convient-il en règle générale de réduire le montant journalier de l'indemnité (ATF 143 IV 339 consid. 3.1). A titre d'exemples, le Tribunal fédéral n'a pas considéré comme contraire au droit une indemnité correspondant à CHF 150.- par jour pour une détention excessive de 59 jours (arrêt du Tribunal fédéral 6B_744/2020 du 26 octobre 2020 consid. 5.2. et 5.3) ou une réduction à CHF 100.- par jour pour une détention injustifiée de 863 jours (arrêt du Tribunal fédéral 6B_974/2020 du 31 mars 2021 consid. 2.3).

Pour déterminer l'ampleur de la réparation du tort moral, le juge peut notamment prendre en considération les répercussions de la détention sur la vie privée, sociale et professionnelle de l'intéressé (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1374/2021 du 18 janvier 2023 consid. 3.2 ; 6B_974/2020 du 31 mars 2021 consid. 2.2 et 2.6 ; 6B_909/2015 du 22 juin 2016 consid. 2.2.2 ; 6B_196/2014 du 5 juin 2014 consid. 1.4 [réduction de l'indemnité à CHF 100 par jour]).

4.2. En l'espèce, l'appelant étant condamné à une peine pécuniaire de 40 jours-amende. Ainsi, la détention avant jugement subie du 7 septembre au 30 novembre 2022, soit 85 jours, est excessive, et doit être indemnisée.

Au vu de la durée de la détention excessive plutôt longue, de presque trois mois, l'indemnité de base fixée jurisprudentiellement à CHF 200.- par jour peut être réduite à CHF 150.-, étant rappelé que le Tribunal fédéral a validé une telle réduction pour une détention d'environ deux mois (arrêt 6B_744/2020 précité, consid. 5.3). Aucun élément lié aux conditions de détention de l'appelant ou à sa situation personnelle ne justifie une augmentation de ce montant. Lorsqu'il a été arrêté, il n'avait en effet plus de domicile en Suisse ni d'activité professionnelle, étant au bénéfice de l'assurance chômage, et ne voyait que rarement ses enfants, soit environ une fois par mois.

L'indemnité en réparation du tort moral de l'appelant sera dès lors fixée au montant arrondi de CHF 12'750.- (CHF 150.- × 85 jours). Ce montant portera intérêt au taux de 5% dès le 6 septembre 2022 (date à laquelle il aurait dû être libéré).

5. L'absence de prononcé d'une mesure d'expulsion pénale par l'autorité précédente est acquise à l'appelant (art. 391 al. 2 CPP), étant précisé que compte tenu de l'acquittement prononcé du chef d'infraction grave à la LStup, son expulsion aurait, dans tous les cas, été seulement facultative (art. 66abis CP). Elle n'a, par contre, pas à figurer dans le dispositif.

6. 6.1. Selon l'art. 69 CP, le juge prononce la confiscation d'objets qui ont servi ou devaient servir à commettre une infraction ou qui sont le produit d'une infraction, si ces objets compromettent la sécurité des personnes, la morale ou l'ordre public (al. 1). Le juge peut ordonner que les objets confisqués soient mis hors d'usage ou détruits (al. 2).

Il doit y avoir un lien de connexité entre l'objet à confisquer et l'infraction, en ce sens que celui-ci doit avoir servi ou devait servir à la commission d'une infraction (instrumenta sceleris) ou être le produit d'une infraction (producta sceleris). En outre, cet objet doit compromettre la sécurité des personnes, la morale ou l'ordre public. Cela signifie que, dans le futur, ce danger doit exister et que, précisément pour cette raison, il faut ordonner la confiscation en tant que mesure de sécurité. Par conséquent, le juge doit poser un pronostic quant à la vraisemblance suffisante que l'objet, dans la main de l'auteur, compromette à l'avenir la sécurité des personnes, la morale ou l'ordre public (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1150/2014 du 19 novembre 2015 consid. 4). La confiscation d'objets dangereux constitue une atteinte à la garantie de la propriété selon l'art. 26 Cst. et elle est soumise pour cette raison au principe de la proportionnalité (art. 36 Cst.). Le respect de ce dernier implique d'une part que la mesure qui porte atteinte à la propriété est propre à atteindre le but recherché et d'autre part que ce résultat ne peut pas être obtenu par une mesure moins grave (subsidiartié ; ATF 137 IV 249 consid. 4.5 p. 256 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_35/2017 du 26 février 2018 consid. 9.1).

Ces principes s'appliquent, en particulier, aussi aux supports de données numériques (arrêts du Tribunal fédéral 6B_35/2017 du 26 février 2018 consid. 9.1 ; 6B_279/2011 du 20 juin 2011 consid. 4.1 ; 6B_748/2008 du 16 février 2009 consid. 4.5.3 et 4.5.4).

6.2. Certes, le prévenu a fait usage du téléphone portable G______ saisi pour transférer les images incriminées. Il est en revanche peu vraisemblable, compte tenu de la présente condamnation, qu'il l'utilise à l'avenir pour commettre une infraction de sorte qu'il lui sera restitué après effacement de toutes les photographies et vidéos incriminées en lien avec le ch. 1.1.2 let. A et B de l'acte d'accusation pour le cas où elles s'y trouveraient encore, opération dont il lui incombera de supporter le coût.

S'agissant de son téléphone M______, dans la mesure où il ne présente aucun lien de connexité avec l'infraction retenue, sa confiscation et sa destruction n'étaient pas justifiées, de sorte que sa restitution sera également ordonnée.

7. 7.1. Le prévenu supporte les frais de procédure de première instance s'il est condamné (art. 426 al. 1 CPP).

7.2.1. Les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé (art. 428 al. 1 CPP).

Pour déterminer si une partie succombe ou obtient gain de cause, il faut examiner dans quelle mesure ses conclusions sont admises en deuxième instance (arrêt du Tribunal fédéral 6B_472/2018 du 22 août 2018 consid. 1.2). Lorsqu'une partie obtient gain de cause sur un point, succombe sur un autre, le montant des frais à mettre à sa charge dépend de manière déterminante du travail nécessaire à trancher chaque point (arrêts du Tribunal fédéral 6B_636/2017 du 1er septembre 2017 consid. 4.1 ; 6B_634/2016 du 30 août 2016 consid. 3.2). Dans ce cadre, la répartition des frais relève de l'appréciation du juge du fond (arrêt du Tribunal fédéral 6B_620/2016 du 17 mai 2017 consid. 2.1.2).

7.2.2. Si l'autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l'autorité inférieure (art. 428 al. 3 CPP).

7.3. En l'espèce, le prévenu sera condamné à supporter le quart des frais de la procédure préliminaire et de première instance, compte tenu du verdict de culpabilité en lien avec le ch. 1.1.2 let. A de l'acte d'accusation.

7.4. Au vu de l'issue de la procédure d'appel, le prévenu, qui obtient gain de cause pour l'essentiel, sera condamné à 1/8ème des frais de celle-ci (art. 14 al. 1 let. e du règlement fixant le tarif des frais en matière pénale [RTFMP]), comprenant un émolument de CHF 2'500.-, le solde étant laissé à la charge de l'État.

8. 8.1.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire de CHF 110.- pour les avocats stagiaires (let. a), débours de l'Étude inclus. En cas d'assujettissement, la TVA est versée en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. M. REISER / B. CHAPPUIS / F. BOHNET (éds), Commentaire romand, Loi sur les avocats : commentaire de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats (Loi sur les avocats, LLCA), 2ème éd. Bâle 2022, n. 257 ad art. 12). Dans le cadre des mandats d'office, l'État n'indemnise ainsi que les démarches nécessaires à la bonne conduite de la procédure pour la partie qui jouit d'une défense d'office ou de l'assistance judiciaire. Il ne saurait être question d'indemniser toutes les démarches souhaitables ou envisageables. Le mandataire d'office doit en effet gérer son mandat conformément au principe d'économie de procédure (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.22 du 31 octobre 2013 consid. 5.2.3). Par voie de conséquence, le temps consacré à la rédaction d'écritures inutiles ou reprenant une argumentation déjà développée, fût-ce devant une autorité précédente, ne saurait donner lieu à indemnisation ou à indemnisation supplémentaire (AARP/295/2015 du 12 juillet 2015 consid. 8.2.2.3, 8.2.2.6, 8.3.1.1 et 8.3.2.1).

8.1.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Des exceptions demeurent possibles, charge à l'avocat de justifier l'ampleur d'opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait.

8.2. En l'occurrence, le temps consacré à la rédaction du mémoire d'appel (tenant sur 22 pages, pages d'en-tête et de conclusions incluses) sera ramené à 10h00, suffisantes considérant la nature et la complexité de la cause, dans un dossier censé être maîtrisé pour avoir été plaidé devant le Tribunal de police quelques mois auparavant.

En conclusion, la rémunération de Me B______ sera arrêtée à CHF 1'531.20 correspondant à 11h45 d'activité au tarif de CHF 110.-/heure (CHF 1'292.50) plus la majoration forfaitaire de 10% (CHF 129.30), compte tenu de l'activité indemnisée en première instance, et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 109.50.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1476/2022 rendu le 30 novembre 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/14819/2022.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ des chefs d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19 al. 1 let. d et g et al. 2 let. a LStup) et de représentation de la violence (art. 135 al. 1 aCP) pour les faits visés au ch. 1.1.2 let. B de l'acte d'accusation.

Déclare A______ coupable de représentation de la violence (art. 135 al. 1 aCP) pour les faits visés au ch. 1.1.2 let. A de l'acte d'accusation.

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 40 jours-amende, sous déduction de 40 jours de détention avant jugement (art. 40 et 51 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à quatre ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Alloue à A______ une indemnité de CHF 12'750.-, avec intérêts à 5% dès le 6 septembre 2022, à titre d'indemnité pour la réparation du tort moral subi en raison de la détention préventive excessive (art. 431 al. 2 CPP).

Déboute pour le surplus A______ de ses conclusions en indemnisation.

Ordonne la restitution à A______ des téléphones portables figurant sous chiffre 2 de l'inventaire n° 5______ du 29 juillet 2022 après effacement des vidéos et photographies incriminées (art. 69 CP), dans l'hypothèse où elles y seraient encore stockées, et moyennant la couverture des coûts relatifs à cette opération.

Condamne A______ au quart des frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent à CHF 4'377.-, y compris un émolument de jugement total de CHF 900.-, et laisse le solde à la charge de l'État (art. 426 al. 1 CPP).

Prend acte de ce que la rémunération de Me B______, défenseur d'office de A______, a été arrêtée à CHF 5'159.- pour la procédure préliminaire et de première instance (art. 135 CP).

Condamne A______ au huitième des frais de la procédure d'appel, en CHF 2'635.-, qui comprennent un émolument de CHF 2'500.-.

Arrête à CHF 1'531.20, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, à l'Office cantonal de la population et des migrations, au Service d’application des peines et mesures et au Tribunal de police.

 

La greffière :

Lylia BERTSCHY

 

La présidente :

Delphine GONSETH

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

4'377.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

60.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

2'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'635.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

7'012.00