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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/4818/2022

AARP/20/2023 du 25.01.2023 sur JTDP/868/2022 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : MISE EN ACCUSATION;RÈGLEMENT (CE) 1987/2006
Normes : CP.144.al1; CP.160.al1.ch1; CP.285.ch1; CP.66B; CP.311; CP.139.ch1
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/4818/2022 AARP/20/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 6 décembre 2022

 

Entre

A______, actuellement détenu en exécution anticipée de peine à la prison de B______, ______, comparant par Me C______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/868/2022 rendu le 14 juillet 2022 par le Tribunal de police,

 

et

STATION SERVICE D______, à l'att. de E______, partie plaignante,

F______, partie plaignante,

G______, partie plaignante,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 14 juillet 2022, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de tentative de vol (art. 22 al. 1 cum art. 139 ch. 1 du Code pénal [CP]), de vol (art. 139 ch. 1 CP), de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), de recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), de tentative de violation de domicile (art. 22 al. 1 cum art. 186 CP), de violation de domicile (art. 186 CP), de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 ch. 1 al. 1 CP) et de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP). Le TP l'a condamné à une peine privative de liberté de 12 mois, sous déduction de la détention avant jugement, il a ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de 20 ans (art. 66a al. 1 let. d CP et 66b al. 1 CP), avec signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS), a renvoyé la partie plaignante station-service D______ à agir par la voie civile, ordonné la confiscation et la destruction d'objets à l'inventaire, rejeté les conclusions en indemnisation de A______ et l'a condamné aux frais de la procédure, émolument complémentaire de jugement de CHF 600.- en sus.

A______ entreprend la majeure partie de ce jugement, concluant à son acquittement des chefs de tentative de vol, vol, dommages à la propriété, recel et violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, à sa condamnation à une peine privative de liberté de cinq mois au plus, la détention qu'il aurait subie en trop devant être indemnisée à hauteur de CHF 200.-/jour, ainsi qu'à une expulsion d'une durée pas plus élevée que dix ans, sans signalement dans le SIS, et à l'allocation d'une indemnité pour tort moral de CHF 5'000.-. Il demande, enfin, que les frais de justice soient réduits dans une juste mesure.

b.a.a. Selon l'acte d'accusation du 20 juin 2022, il est reproché ce qui suit à A______ :

b.a.b. À Genève, le 1er février 2022, entre 04h et 04h30, il a tenté de pénétrer sans droit et par effraction dans la station-service D______, sise rue 1______ no. ______ à H______ [GE], en forçant deux portes avec un outil plat, puis en brisant une fenêtre, endommageant ce faisant la porte d'entrée du magasin, la porte d'entrée et l'encadrement de la fenêtre de la buvette, les frais de réparation étant estimés à CHF 16'142.55 (hors TVA), dans le but d'y dérober des valeurs, de se les approprier sans droit et de s'enrichir illégitimement à due concurrence, sans toutefois y parvenir pour des raisons indépendantes de sa volonté. E______, titulaire de la raison individuelle D______, E______, avec pouvoir de signature individuelle, a déposé plainte pénale en raison de ces faits le 28 février 2022 (chiffre 1.1 de l'acte d'accusation).

b.a.c. Le lendemain, entre 03h45 et 03h55, au même endroit et au préjudice de la même lésée, il a pénétré sans droit et par effraction dans la station-service, en s'introduisant par la fenêtre qu'il avait brisée la veille, laquelle était protégée par une planche de bois et du scotch, l'endommageant une nouvelle fois, puis y a dérobé la somme de CHF 600.- en numéraire, des jeux à gratter de la Loterie Romande, 50 paquets de cigarettes, 80 vignettes autoroutières, un étui gris contenant le passeport suisse de E______, dans le but de s'approprier ces valeurs et objets sans droit et de s'enrichir illégitimement à due concurrence, causant de la sorte à la précitée un dommage s'élevant à tout le moins à CHF 4'265.-. E______ a déposé plainte pénale en raison de ces faits le 28 février 2022 (chiffre 1.2).

b.a.d. Le 3 mars 2022, entre 3h et 4h, à la rue 2______ à Genève, il a dérobé à G______ sa montre de marque I______ n° 3______, que ce dernier avait acquise au prix de CHF 12'500.- le 14 août 2020, dans le but de se l'approprier sans droit et de s'enrichir illégitimement à concurrence de sa valeur.

À titre subsidiaire, il a, le même jour, entre 4h et 10h45, en un lieu indéterminé à Genève, acquis auprès d'un inconnu, contre la somme de CHF 80.-, la montre I______ précitée, alors qu'il savait, respectivement ne pouvait ignorer qu'elle avait été obtenue au moyen d'une infraction contre le patrimoine, vu le prix dérisoire déboursé pour son acquisition, étant précisé que la montre était aisément reconnaissable comme authentique compte tenu du numéro de série figurant sur son cadran (chiffre 1.3).

b.a.e. Le 18 avril 2022, à 19h30, alors qu'il était détenu à la prison de B______ et refusait d'arrêter de claquer le portillon de sa cellule malgré les demandes des agents de détention J______ et K______, contraignant ceux-ci à intervenir, il les a menacés en glissant d'abord, sous la porte de sa cellule, une lettre manuscrite, laquelle contenait la phrase "je tire une balle dans la tête d'une surveillante", menaces qu'il a ensuite confirmées lorsque l'agent J______ lui a demandé des explications, avant de dire aux agents précités : "si vous rentrez dans la cellule, vous allez voir", empêchant de la sorte lesdits agents d'accomplir les actes entrant dans leur fonction ou rendant ces actes plus difficiles (chiffre 1.5.1).

b.a.f. Le 1er mai 2022, à 00h58, toujours à la prison de B______, il a injurié l'agent L______ – qui avait répondu à l'appel que A______ avait passé depuis sa cellule – en le traitant de "fils de pute, je nique ta mère, viens je te démonte". Puis, alors qu'il était transféré en cellule forte, il s'est débattu à réitérées reprises, contraignant les agents M______ et F______ à faire usage de la force pour le maîtriser, puis leur a craché au visage au niveau des yeux, empêchant de la sorte lesdits agents d'accomplir les actes entrant dans leur fonction ou rendant ces actes plus difficiles. L'agent F______ a déposé plainte pénale en raison de ces faits le 1er mai 2022 (chiffre 1.5.2).

b.b. A______ ne conteste plus les infractions de tentative de violation de domicile, respectivement de violation de domicile en lien avec sa tentative de pénétrer dans la station-service D______ le 1er février 2022, puis d'y avoir pénétré le lendemain.

Il ne conteste plus non plus sa condamnation pour rupture de ban en rapport avec le fait d'avoir, à tout le moins les 1er février, 2 février et 3 mars 2022, pénétré en Suisse, plus particulièrement à Genève, alors qu'il savait faire l'objet d'une expulsion judiciaire du territoire suisse prononcée à son encontre le 6 mai 2021 par le TP pour une durée de cinq ans, le début de l'expulsion ayant été fixé le 19 mai 2021.

b.c. Le TP n'a pas retenu comme établie la confirmation ou la réitération de la menace découlant de la lettre manuscrite susvisée auprès du gardien J______ (cf. jugement attaqué, consid. 6.2.1 in fine, p. 17).

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

Station-service D______

a.a. Le 1er février 2022, la police a été avisée d'une tentative de cambriolage perpétrée le jour en question, entre 4h et 04h20, au préjudice de la station-service D______, sise rue 1______ no. ______ à H______. L'exploitation des images de vidéosurveillance avait permis de voir un homme aux abords de la station-service habillé en foncé, capuchonné, masqué, porteur de gants et d'un sac à dos, se munir d'un outil plat et s'attaquer à la porte principale du shop ainsi qu'à la porte arrière, sans succès. Il avait ensuite brisé une vitre donnant sur l'arrière de la station-service, mais le bruit avait alerté une habitante qui avait hurlé à sa fenêtre, mettant en déroute l'auteur.

Le représentant la station-service D______ a déposé plainte pénale contre inconnu pour ces faits. Elle s'est prévalue d'un préjudice d'un montant total de CHF 16'142.55, fondé à hauteur de CHF 14'369.- (hors TVA) sur un devis, en rapport avec les dommages causés à la porte d'entrée du shop ainsi qu'à la porte d'entrée et à la fenêtre de la buvette. La sécurisation des lieux par la dépose du verre cassé ainsi que la mise en place d'une fermeture provisoire représentaient la différence.

a.b. Le lendemain, entre 03h45 et 03h55, la station-service D______ a été cambriolée par le même auteur, qui s'y était introduit en passant par la fenêtre brisée la veille et protégée par un panneau en bois – arraché – et du scotch. Ce faisant, il avait chuté et s'était coupé, laissant son sang sur les lieux, ce qui avait permis de l'identifier en la personne de A______. Grâce aux images de vidéosurveillance, on le voyait se rendre vers le comptoir, y ouvrir un tiroir et s'emparer d'objets qui s'y trouvaient, puis se tourner vers l'étagère à cigarettes pour en vider des colonnes dans son sac, avant de quitter les lieux, la scène n'ayant pas pris plus d'une minute.

E______ a également déposé plainte pénale contre inconnu pour ces faits. Elle a déclaré comme volés CHF 100.- en monnaie, CHF 500.- en billets de CHF 10.- et de CHF 20.-, 50 paquets de cigarettes, 80 vignettes autoroutières, plusieurs liasses de billets à gratter de la Loterie Romande, ainsi qu'un étui gris contenant son passeport, la valeur totale du préjudice s'élevant à CHF 4'265.-.

b.a. Devant le Ministère public (MP), E______ a déclaré avoir pour habitude d'emporter le fond de caisse lorsqu'elle rentrait chez elle le soir, mais laisser les liquidités des machines à jeux "N______" – soit CHF 100.- en monnaie et CHF 500.- en billets – dans le tiroir situé sous ces dernières. Elle n'avait pas de document attestant de ces montants, étant précisé qu'il s'agissait d'une estimation correspondant au nombre de joueurs et aux montants que ceux-ci avaient décaissés. Elle rangeait dans le tiroir sous vidéosurveillance les "billets et vignettes" reçues de la Loterie romande par cartons. L'argent dépensé par les joueurs était également placé dans ledit tiroir. Dans son souvenir, elle avait rangé son passeport dans une pochette qu'elle avait placée dans ce tiroir et s'était aperçue de sa disparition deux semaines plus tard. Elle avait été remboursée par son assurance à hauteur de CHF 3'600.- pour la marchandise volée, mais n'avait encore rien reçu pour les dégâts causés.

b.b. E______ a transmis divers documents au MP, à savoir des factures de la Loterie Romande, dont il résulte que, pour la semaine du 30 janvier au 5 février 2022, les billets vendus ont représenté un total de CHF 10'984.-, une facture du 8 février 2022 de P______ Sàrl [clefs] mentionnant un coût de CHF 610.- pour la fermeture provisoire de la fenêtre brisée le 1er février 2022, une facture du 15 février 2022 de Q______ Sàrl [serrurerie] d'un coût de CHF 1'168.54 pour la dépose du verre brisé et la pose d'un panneau de bois provisoire, ainsi qu'un devis du 15 février 2022 de la même entreprise faisant état d'un montant de réparation des fenêtres, cadres de portes et gâche de CHF 14'369.-.

c.a. Entendu le 3 mars 2022 par la police, A______ a d'abord contesté les faits, même à l'examen d'images tirées de la vidéosurveillance, puis, confronté aux résultats de l'analyse ADN, a fini par admettre être l'auteur des faits précités. Il avait agi seul, étant venu en tram depuis R______ [France] jusqu'à Genève les soirs en question. Il reconnaissait avoir volé les cigarettes et les jeux à gratter, revendus sauf deux paquets de cigarettes qu'il avait conservés. S'agissant des billets de loterie, il n'en avait vendu que la moitié, s'étant débarrassé de l'autre. La revente des objets volés lui avait permis de tirer un bénéfice d'environ EUR 450.-. Il a contesté avoir soustrait CHF 600.-, les vignettes autoroutières et le passeport.

c.b. Devant le MP, il a déclaré n'avoir emporté que 20 paquets de cigarettes ainsi que quelques tickets de loterie. Il maintenait n'avoir pas emporté l'argent, les vignettes autoroutières et/ou le passeport, dont il n'aurait su que faire. Il avait vendu son butin en une fois, dans la rue, à une personne qui lui avait proposé EUR 450.- pour le tout. A______ a cependant précisé que les cigarettes avaient été écoulées par paquets au prix unitaire de EUR 5.-, soit EUR 120.- pour tous les paquets, alors qu'il en ignorait le nombre exact. Grâce à cet argent, il avait pu manger, boire et aller voir des prostituées. Lorsqu'il avait ouvert le tiroir, il n'y avait que des tickets de loterie. Sa deuxième visite dans la station-service n'avait pas été préméditée. Il était passé devant celle-ci par hasard et, après avoir constaté que la fenêtre n'était pas fermée, il s'était dit qu'il reviendrait le soir même pour avoir un peu de sous. Comme l'alarme s'était déclenchée, il n'avait pas eu le temps d'emporter toutes les cigarettes dans son sac. Il s'excusait pour ces faits.

c.c. Devant le premier juge, A______ a confirmé ses déclarations.

Le 2 février 2022, il avait voulu regagner R______, mais, ayant manqué son tram, il s'était promené dans Genève durant la nuit. Il n'avait dérobé que "15 paquets de cigarettes et quelques tickets de loterie pour aller manger et satisfaire [s]es besoins" parce qu'il venait de sortir de prison. Il avait vendu les paquets de cigarettes à CHF 5.- l'unité. Il avait soustrait le butin "à l'aveuglette", ne l'ayant compté qu'après avoir quitté les lieux.

Montre I______

d. Lors d'une patrouille de police du 3 mars 2022, A______ a été aperçu, aux environs de 10h45, en train de sortir du commerce S______, situé sur le quai 4______. D'après le bijoutier, A______ venait de se renseigner sur une montre I______ en sa possession, cherchant à savoir si celle-ci était vraie ou fausse. Le bijoutier lui avait conseillé de se rendre dans un autre établissement de la rue 5______. La police avait décidé de suivre A______ qui s'était rendu dans un second commerce, T______, à la rue 6______. Elle a procédé à son interpellation à la sortie de ce magasin. Une montre I______, 7______ [marque, modèle] (numéro 3______ gravé sur le pourtour du cadran à 6h sous la lunette) a été retrouvée dans la poche avant du pantalon de A______, qui a expliqué l'avoir achetée aux Pâquis à un Maghrébin pour EUR 80.-. Selon les informations recueillies par la police, A______ s'était enquis auprès de T______ de l'authenticité de la montre, du prix qu'il pouvait en obtenir et si le commerce voulait la lui acheter.

A______ était encore porteur d'un petit couteau et d'une pipe à crack, lesquels ont été saisis.

L'enquête a permis de confirmer le caractère authentique de la I______ et d'identifier son propriétaire, G______.

e. À la police, ce dernier a formellement reconnu sa montre. Il a produit la quittance d'achat, en août 2020, pour CHF 12'500.-, le certificat de garantie, ainsi qu'une facture relative à un contrôle effectué en avril 2021. Il a déclaré avoir passé la nuit du 2 au 3 mars 2022 seul, dans le quartier des Pâquis, et avoir bu quelques verres. Vers 3h ou 03h30, il s'était rendu dans un bar sis dans la rue 2______ et, après avoir remarqué la présence de gens "un peu louches", il avait retiré sa montre de son poignet et l'avait mise dans la poche avant droite de son jean. À un moment donné, il était sorti devant le bar pour fumer une cigarette. Il y avait du monde et ça se bousculait ; il était donc possible qu'il se soit fait voler sa montre à ce moment-là. Il ne s'était toutefois aperçu de la disparition de celle-ci qu'en quittant le bar, vers 03h30 ou 4h. À l'issue de son audition, G______ a déposé plainte pénale et sa montre lui a été restituée.

f.a. À la police, A______ a déclaré être arrivé le 3 mars 2022, à 06h30, à la gare de Cornavin puis être allé "faire un petit tour" aux Pâquis afin de retrouver quelques amis. Vers 08h30, alors qu'il se trouvait à proximité de l'école des Pâquis, il était tombé sur un inconnu qui lui avait proposé une fausse montre I______ pour EUR 150.-. Après négociation, il la lui avait achetée pour EUR 80.-. Il avait ensuite croisé "U______" avec qui il était allé boire quelques bières à la Jonction. Il s'était finalement décidé d'aller faire vérifier sa montre dans une bijouterie, où on lui avait confirmé que celle-ci était fausse. Il voulait connaître la qualité de la contrefaçon.

f.b.a. Le 4 mars 2022, le MP a étendu l'instruction ouverte la veille du chef de vol aux faits du 3 mars 2022, retenant que A______ avait, "entre 3h00 et 4h00, à la hauteur du quai 8______, dérobé la montre I______ de G______" (cf. P C-4).

f.b.b. Devant le MP, A______ a précisé que le vendeur – un drogué – lui avait dit que la fausse I______ était "bien faite, de deuxième choix". Lui-même avait regardé la montre mais n'avait pas vu de numéro de série, ni de "tampon" au dos du cadran. Il avait déjà volé des montres par le passé et s'y connaissait. S'il avait questionné le bijoutier au sujet de l'authenticité de la montre, c'était pour lever tout doute. Il voulait également savoir "dans quelle catégorie de fausse montre celle-ci se trouvait, si c'était un premier, deuxième ou troisième choix".

f.c. Devant le premier juge, A______ a indiqué que lorsqu'il était arrivé aux Pâquis, ce jour-là, il avait EUR 200.- en poche. Le vendeur de la I______, qui voulait s'acheter une dose, en voulait EUR 100.- ou 150.-. Sur le moment, il avait pensé avoir réalisé une affaire, la montre étant potentiellement authentique, mais il s'était aussi dit que, s'il s'agissait d'une fausse montre, il la garderait pour lui car il la trouvait jolie. Il n'avait posé aucune question au vendeur sur la provenance de l'objet, mais avait simplement demandé si la montre avait un numéro de série. Comme il n'y en avait pas, il avait eu la confirmation que la I______ n'était pas originale.

En rentrant à R______, il s'était arrêté vers le magasin V______ pour savoir pourquoi la montre ne fonctionnait pas. Il ne s'était pas rendu dans une autre bijouterie ce jour-là. S'il avait pu dépenser un peu d'argent pour cet achat, malgré son manque de moyens, c'était grâce à l'argent que sa famille ou des collègues lui donnaient parfois.

Il a produit deux extraits de sites relatifs aux contrefaçons de la I______, 7______.

Prison de B______

g.a. Le 3 mai 2022, la Direction de la prison de B______ a dénoncé A______ pour un incident s'étant déroulé le 18 avril précédent, à 19h30.

Selon le rapport établi par l'agent K______, A______ n'arrêtait alors pas de claquer le portillon de la fenêtre de sa cellule, motif pour lequel, à la demande de leur hiérarchie, le précité et son collègue J______ s'étaient rendus devant celle-ci afin de demander au détenu précité de cesser ses agissements. A______ avait glissé une lettre manuscrite sous la porte, dont il ressortait – parmi de nombreuses doléances sans aucun rapport l'une avec l'autre – les mots suivants : "Mois (sic) je tire une balle dans la tette (sic) a (sic) une surveillante". Après que J______ avait tenté de discuter, le précité, dans un état d'excitation, avait confirmé ses propos, tout en ajoutant : "Si vous rentrez dans la cellule, vous allez voir !". Au vu de la situation, il avait été décidé de sa mise en cellule forte. Entendu le lendemain, A______ avait contesté les faits, tout en indiquant : "je me tapais une branlette". Il avait écopé d'une sanction de cinq jours en cellule forte.

g.b. Devant le MP, K______ a confirmé son rapport. Le jour de l'intervention, A______ avait glissé "une sorte de mot" sous la porte de sa cellule, faisant allusion à des menaces contre des gardiennes. Une partie était compréhensible, l'autre non. A______ avait ajouté que si les gardiens entraient dans sa cellule, ils allaient "voir". Le transfert en cellule forte s'était déroulé sans incident.

h.a. Le 3 mai 2022, la Direction de la prison de B______ a informé le MP du dépôt de plainte du gardien F______ à l'encontre de A______, pour des faits survenus le 1er mai 2022.

Selon le rapport d'incident du jour en question, à 00h58, le gardien L______ avait répondu à un appel provenant de la cellule de A______, qui avait déversé un flot d'injures à travers l'interphone. Il avait été décidé en conséquence d'une mise en cellule forte du détenu. À l'ouverture de la première porte de la cellule en vue du menottage par le portillon, le précité s'était montré calme et coopérant. Lors de sa fouille dans le couloir, il avait insulté l'agent M______. Dans l'ascenseur, il avait commencé à gesticuler et réitéré ses propos injurieux (cf. "fils de pute, je nique ta mère. Si je n'avais pas les menottes je t'aurais démonté"). À l'arrivée dans la cellule forte, il s'était montré de plus en plus agité et avait refusé de collaborer pour le démenottage, contraignant ainsi les gardiens M______ et F______ à le mettre au sol et à le déshabiller de force pour effectuer la fouille de rigueur. Après l'avoir maintenu au sol en position ventrale, tout en verrouillant son poignet sur l'arrière, le temps pour ses collègues de sortir de la cellule, M______ avait relâché sa clé pour pouvoir sortir à son tour. A______ s'était alors levé d'un coup et dirigé vers la porte, contraignant les gardiens à intervenir à nouveau. Le détenu avait été amené au sol par une double clé de bras, étant précisé que M______ avait préalablement dû lui donner à ces fins deux coups de déstabilisation au niveau des côtes. A______ avait alors craché au niveau des yeux des deux agents de détention.

Entendu le même jour, A______ a contesté les faits et été puni par dix jours de cellule forte.

h.b. Les images de vidéosurveillance concernant l'incident du 1er mai 2022 ont été versées au dossier.

Il résulte de celles relatives à la mise en cellule forte que sept gardiens étaient visibles aux abords de celle-ci. On en voit entrer dans la cellule avec A______ puis en ressortir. Alors que cinq gardiens sont à la porte à l'extérieur de la cellule et qu'ils observent ce qui se passe à l'intérieur, trois d'entre eux s'y précipitent, suivis par un quatrième. Six gardiens se trouvent alors dans la cellule durant près de trois minutes, avant de tous ressortir. Toute la scène dure plus de huit minutes.

i. F______ a confirmé sa plainte pour "violence" en lien avec les événements du 1er mai 2022.

Vers 2h, leur chef de nuit leur avait ordonné de placer A______ en cellule forte, après que ce dernier avait insulté et menacé un de leurs collègues lors d'un appel d'urgence. Au départ, A______ s'était montré coopérant, acceptant de se faire menotter et palper. Par la suite, dans l'ascenseur notamment, il avait commencé à se montrer agité, insultant tout le monde. Lors de sa mise en cellule forte, ses collègues lui avaient demandé s'ils pouvaient lui faire confiance et lui enlever les menottes pour procéder à sa fouille de manière calme, mais l'intéressé avait continué à se montrer agité et à proférer des insultes, se débattant pour tenter de se dégager des clés de bras pratiquées sur lui. Il avait dû être amené au sol pour sa fouille. Une fois par terre, il avait donné des coups, tout en continuant de se débattre. La fouille terminée, les agents étaient sortis de la cellule et M______ était resté avec une clé de bras sur A______, lui demandant de rester calme pour permettre la sortie de ses collègues en sécurité, conformément à la procédure en vigueur. Au moment où ce collègue s'était relevé, A______ en avait profité pour se lever à son tour, de sorte que lui-même avait dû rentrer à nouveau dans la cellule pour tenter de le maîtriser au moyen d'une clé de bras. C'était à ce moment-là que A______, parvenant à se retourner, leur avait craché au visage.

j. L______ a précisé que la mise en cellule forte de A______ ne s'était pas faite dans l'immédiat, car ils avaient dû se charger du retour en prison d'un autre détenu dans l'intervalle. Son collègue s'était chargé de menotter A______ et lui-même était allé préparer la cellule forte. Lorsque l'ascenseur était arrivé à l'étage, "on a[vait] senti que ça chauffait", A______ étant tendu. Ses collègues l'avaient fouillé à son entrée dans la cellule forte et, vu son agitation, lui avaient demandé de se coucher au sol, le temps de les laisser sortir. A______ s'était toutefois relevé précipitamment et ses collègues avaient dû intervenir à nouveau pour le maîtriser. A______ avait craché sur les collègues, en particulier au visage de M______.

k. M______ a déclaré que, dans l'ascenseur, A______, considéré comme imprévisible et dangereux, et faisant l'objet de mesures spécifiques, avait commencé à insulter les gardiens et les menacer. Une fois dans la cellule forte et au moment de procéder à son démenottage, A______ avait commencé "à faire opposition et à gigoter". Il avait fallu le mettre au sol, de force, car il refusait de se laisser démenotter et déshabiller. Après la fouille, il lui avait fait une clé de bras afin que ses collègues puissent quitter la cellule. Une fois ses collègues sortis, il avait relâché sa prise. A______ s'était immédiatement relevé, ce qui l'avait contraint, lui et F______, à intervenir à nouveau. A______ leur avait craché au visage. Il avait été compliqué de le maintenir. Selon ses souvenirs, il avait dû lui donner deux coups de déstabilisation au niveau des côtes aux fins de l'amener au sol. A______ s'était retrouvé face au sol, à plat ventre, les bras sous lui. Il avait cependant réussi à se retourner et à avoir sa tête dans leur direction ; à ce moment-là, il leur avait craché dessus.

l.a. Devant le MP, A______ a contesté les faits tels que relatés dans les rapports d'incidents.

Concernant la lettre intégrant les propos menaçants, il a dit qu'il avait fait un cauchemar et voulu "décharger la pression". Comme les agents de détention la lui mettait, il en faisait de même ; il leur "chauff[ait] la tête". Il n'avait pas voulu viser par ses écrits un agent en particulier. Il n'avait jamais eu l'intention de tirer sur un gardien.

Le 18 avril 2022, les gardiens étaient venus à plusieurs dans sa cellule. Ils l'avaient balayé et voulaient qu'il se mette à genoux, ce qu'il avait refusé. Il avait dit qu'il enlèverait ses vêtements, mais ils lui avaient écrasé la tête contre le sol.

Le 1er mai 2022, il contestait avoir délibérément craché sur les gardiens. L'un d'eux lui avait donné une gifle et sa salive était sortie. C'était les gardiens qui avaient "tout fait".

l.b. Devant le premier juge, A______ a persisté à nier les faits reprochés.

Il n'avait rien dit le 18 avril 2022, ni n'avait glissé de lettre sous la porte. Peut-être que les gardiens avaient pris cette dernière sur sa table, dans la cellule. Il contestait avoir dit "si vous entrez dans la cellule, vous allez voir !". Les gardiens avaient menti. Lui-même n'avait pas insulté ni tapé quiconque. Les gardiens essayaient toujours de le provoquer, mais il n'entrait pas dans leur jeu.

Le 1er mai 2022, les gardiens l'avaient tabassé et avaient menacé sa famille. Lui-même n'avait rien dit au téléphone et n'avait pas non plus passé d'appel depuis sa cellule. Les agents l'avaient insulté à travers l'interphone. Lors de sa mise en cellule forte, un gardien avait voulu le mettre à genoux, ce qu'il avait refusé parce qu'il connaissait la procédure. Par la suite, il avait crié et "bougé un petit peu" car il avait mal au bras, puis ils étaient tous arrivés. Ils l'avaient mis "à poil" et étaient partis. Lui-même ne s'était pas montré violent.

C. a.a. Devant la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR), A______, par son défenseur d'office, a conclu, à titre préjudiciel, à l'invalidité de l'acte d'accusation s'agissant de l'infraction de recel reprochée. Il n'avait pas été mis en prévention de ce chef au stade de l'instruction, alors que le MP aurait eu tout loisir d'étendre son enquête à cette incrimination. Cette accusation devait donc être écartée.

a.b. Après avoir ouï l'appelant, la CPAR a rejeté la question préjudicielle au bénéfice d'une brève motivation orale renvoyant pour le surplus au présent arrêt (cf. infra consid. 2 ss).

b.a. Sur le fond, A______ a reconnu le cambriolage et la tentative au préjudice de la station-service D______. Il se trouvait à cette époque dans une mauvaise passe financière et ne disposait d'aucun moyen, notamment pour se nourrir. Il n'avait pas pris grand-chose dans ce commerce : tout au plus 24 paquets de cigarettes, qu'il avait revendus pour EUR 120.-, et des tickets de loterie à gratter à CHF 2.- ou 3.- l'unité, revendus eux aussi pour EUR 450.- le tout à un tiers, à Genève, qui lui avait fait une offre globale. Il n'avait dérobé ni vignettes autoroutières ni pochette dans le tiroir. Il y avait quelques pièces mais il n'avait pas vu de coupures. Tout s'était passé rapidement ; il y avait l'alarme qui sonnait. Lorsqu'il était revenu le lendemain à la station-service, il n'avait rien cassé de plus ; il n'avait fait qu'enlever des scotchs pour pousser un panneau en bois afin d'y pénétrer.

Lors de l'achat de la I______, il n'avait posé aucune question au vendeur. Il s'était dit qu'il tentait sa chance en procédant à cet achat, la montre lui plaisant. Il s'y connaissait "un peu" en montres ; il avait déjà eu une I______ par le passé et n'avait pas vu, lors de son achat, de numéro de série ou de tampon sur l'arrière de la montre. Il n'avait pas vu non plus à ce moment-là de numéro de série dans le cadran. Il ne voulait pas savoir. Après son achat, l'ami avec qui il passait sa fin de soirée, lui avait proposé d'aller voir quelqu'un, disposé probablement à lui acheter la montre "au noir". Si la montre était authentique, on lui aurait fait un bon prix, sinon il était susceptible de la vendre pour EUR 250.-. Finalement, il n'avait pas pu rencontrer cet acheteur potentiel, car il y avait trop de "à gauche et à droite". Plus tard, en bijouterie, on lui avait dit que la I______ était fausse, mais de première catégorie.

Le 1er mai 2022, avant d'être emmené au cachot, les gardiens lui avaient collé la tête contre la chasse, aux fins de procéder à sa fouille. C'était comme s'ils avaient voulu lui faire rentrer quelque chose dans la tête, parce qu'ils appuyaient fort. Les gardiens s'étaient également montrés sans ménagement lors de sa conduite au cachot, notamment dans l'ascenseur. Sur place, ils lui avaient demandé de se mettre à genoux, ce qu'il avait refusé, et il s'était couché à plat ventre au sol. Les gardiens voulaient qu'il se déshabille. Ils lui avaient écrasé la tête au sol. À l'occasion d'une gifle, sa salive avait atteint les gardiens au visage.

b.b. Par la voix de son conseil, A______ persiste dans ses conclusions. S'agissant des faits du 1er février 2022, à qualifier de tentative de vol d'importance mineure – soit une contravention –, leur punissabilité n'était pas réprimée. Il convenait par ailleurs de qualifier également ceux du 2 février 2022 de la même façon.

En ce qui concernait le butin emporté de la station-service D______, il fallait s'en tenir à ses déclarations, rien ne justifiant de privilégier celles de la lésée. Cette dernière ne s'était au demeurant rendue compte de la disparition de la pochette que deux semaines après la commission du cambriolage. Lui-même n'avait cherché qu'à couvrir des besoins vitaux et son intention ne portait pas sur un butin de plus de CHF 300.-. Il fallait analyser ses actes sous l'angle de la valeur vénale du butin emporté, et non pas selon le gain réalisé, étant précisé, d'une part, qu'il ne savait pas exactement combien de billets de loterie il avait emportés et, d'autre part, que ces billets ne valaient pas plus que quelques francs à l'unité, ce qui justifiait l'application de l'infraction privilégiée d'importance mineure.

Au moment de l'achat de la I______, il était dans l'impossibilité de soupçonner que celle-ci provenait d'une infraction contre le patrimoine. Il ne disposait d'aucun élément pour fonder une éventuelle suspicion. S'il s'était douté de quoi que ce soit, il ne se serait pas ensuite rendu dans une bijouterie. La montre était d'excellente facture. Il n'était par ailleurs pas exclu qu'un possesseur légitime revende sa montre dans les circonstances dans lesquelles il avait procédé à son achat.

S'agissant des faits qui s'étaient déroulés à la prison, il fallait relever que les interventions des gardiens – des professionnels formés et rompus à venir au contact de détenus – n'étaient pas toujours justifiées. Il était devenu un "bouc émissaire". Ses propos figurant dans sa note ne visaient aucun agent en particulier. Il n'avait seulement voulu que "relâcher la pression", ce qui était légitime au vu du traitement qu'il subissait. On ne pouvait en conclure que la gravité préconisée par la jurisprudence au sujet de la menace avait été atteinte dans le cas d'espèce et que celle-ci avait empêché les gardiens de procéder à des actes entrant dans leurs fonctions le 18 avril 2022.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement attaqué.

D. a. A______, connu sous plusieurs alias, dit être né le ______ 1990 à W______ [Algérie], pays dont il revendique la nationalité. Les autorités algériennes n'ont toutefois pas été en mesure de l'identifier sur la base de ses empreintes digitales. Il est célibataire et sans enfant. Il ne possède aucun document d'identité. Sa famille vivrait en Algérie. Il dit avoir fait toute sa scolarité dans ce pays puis, mineur, l'avoir quitté pour la Tunisie, l'Italie, puis la France, où il est arrivé en 2007. Il aurait travaillé en tant que peintre en bâtiment à X______ [France]. Il est venu en Suisse, début 2021, pour trouver du travail. Durant les périodes où il s'est retrouvé sans travail, il lui est arrivé de voler. Il ne disposait d'aucun revenu et était sans domicile fixe lorsqu'il s'est fait interpeller. Il consomme occasionnellement des drogues. À l'avenir, il espère retrouver du travail en France.

b. Selon l'extrait de son casier judiciaire, A______ a été condamné :

-     le 6 mai 2021, par le TP, à une peine privative de liberté de cinq mois, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans (révoqué le 2 décembre 2021), ainsi qu'à une amende de CHF 200.-, pour vol (tentative), infractions d'importance mineure (dommages à la propriété), violation de domicile, faux dans les certificats, entrée illégale, séjour illégal et contravention à l'art. 19a LStup ; une expulsion obligatoire pour une durée de cinq ans a été ordonnée ;

-     le 2 décembre 2021, par le TP, à une peine privative de liberté de cinq mois (peine d'ensemble partiellement complémentaire à la condamnation du 6 mai 2021), pour vol, violation de domicile, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires et rupture de ban ;

-     le 18 janvier 2022, par le MP, à une peine privative de liberté de 60 jours (peine complémentaire à la condamnation du 2 décembre 2021), pour lésions corporelles simples et violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires.

c. A______ a été sanctionné à de très nombreuses reprises par la Direction de la prison de B______ lors de ses séjours carcéraux : il a fait l'objet de 16 sanctions disciplinaires pour la période allant du 29 janvier au 20 mai 2021 et été placé 55 jours en cellule forte ; il a été visé par 11 autres sanctions disciplinaires pour la période allant du 23 août 2021 au 21 janvier 2022 et placé en régime de sécurité renforcée pour une durée de trois mois. Depuis sa mise en détention dans le cadre de la présente procédure, il a fait l'objet de quatre nouvelles sanctions disciplinaires jusqu'à son placement en régime de sécurité renforcée, du 20 mai au 20 août 2022.

E. MC______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 13h40 d'activité de chef d'étude hors débats d'appel, lesquels ont duré 1h35, dont 0h15 pour la rédaction de l'annonce d'appel et 1h40 pour celle de la déclaration d'appel.

Le défenseur d'office a été indemnisé pour plus de 30h en première instance.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Selon l'art. 309 al. 1 CPP, le ministère public ouvre une instruction : lorsqu'il ressort du rapport de police, des dénonciations ou de ses propres constatations des soupçons suffisants laissant présumer qu'une infraction a été commise (let. a) ; lorsqu'il ordonne des mesures de contrainte (let. b) ; lorsqu'il est informé par la police conformément à l'art. 307 al. 1 (let. c). Il ouvre l'instruction par une ordonnance dans laquelle il désigne le prévenu et l'infraction qui lui est imputée. L'ordonnance n'a pas à être motivée ni notifiée. Elle n'est pas sujette à recours (al. 3).

L'ordonnance d'ouverture d'instruction n'a qu'un effet déclaratoire. L'instruction pénale est considérée comme ouverte dès que le ministère public commence à s'occuper de l'affaire (ATF 141 IV 20 consid. 1.1.4).

L'art. 311 al. 2 CPP prescrit que le ministère public peut étendre l'instruction à d'autres prévenus et à d'autres infractions. L'art. 309 al. 3 CPP est applicable.

Une extension de l'instruction, au sens de l'art. 311 al. 2 CPP, n'est pas nécessaire à la poursuite de simples infractions connexes (« Nebendelikte » ; N. SCHMID, Schweizerische Strafprozessordnung : Praxiskommentar, Zurich 2009, n. 6 ad art. 311). Si cette souplesse semble critiquée sous l'angle du droit d'être entendu, en tant qu'elle conduirait à une poursuite tacite de ces faits-là (« stillschweigender Tatvorwurf » ; M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, Schweizerische Strafprozessordnung / Schweizerische Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, Bâle 2011, n. 15 ad art. 311), elle n'est pas mise en question lorsque ceux-ci ressortaient déjà des pièces du dossier et n'ont pas dicté en eux-mêmes la prise de mesures de contrainte.

2.2. En l'espèce, c'est bien l'appelant, lors de son audition à la police du 3 mars 2022, qui a évoqué les conditions dans lesquelles il était entré en possession de la I______, qui s'est avérée volée.

Certes, le MP a étendu l'instruction du chef de vol, en se fondant initialement sur les déclarations de la victime, mais la suite de l'instruction a démontré qu'il a fait porter son enquête sur les circonstances relatives à l'entrée en possession par l'appelant de la montre litigieuse, suite à l'achat déclaré, et non plus sur la soustraction directe de ce bien. L'appelant, au su de ses droits et dûment assisté, n'a d'ailleurs jamais reconnu sa responsabilité pénale dans le vol de cette montre.

L'instruction s'est clôturée sans demande d'actes d'instruction complémentaires visant ces faits.

Il s'ensuit qu'il n'y avait nulle nécessité d'étendre formellement l'instruction au chef de recel, cette infraction ressortant du dossier et ayant été retenue à titre subsidiaire par le MP dans son acte d'accusation (cf. art. 325 al. 2 CPP). Au demeurant, les faits sur lesquels elle repose sont bien connexes à ceux pour lesquels l'instruction a été ouverte et n'ont pas nécessité la mise en œuvre de mesures de contrainte. La critique de l'appelant est vaine puisque cette incrimination subsidiaire repose sur ses propres déclarations et les constats de la police. Il n'y a donc pas de surprise procédurale. L'appelant pouvait et devait s'attendre à devoir se défendre à cet égard au vu de l'acte d'accusation (cf. la fonction de délimitation dudit étant remplie, l'appelant connaissant exactement les faits qui lui étaient imputés et quelles étaient les peines et mesures auxquelles il était exposé, afin de pouvoir s'expliquer et préparer efficacement sa défense ; ATF 143 IV 63 consid. 2.2 p. 65 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_834/2018 du 5 février 2019 consid. 1.1).

La question préjudicielle est ainsi rejetée.

3. 3.1.1. L'art. 139 ch. 1 CP réprime le comportement de celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l'approprier.

La soustraction implique la violation de la possession d'autrui et la création d'une nouvelle possession, en général en faveur de l'auteur (ATF 110 IV 80 consid. 2b p. 84).

L'auteur doit agir dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime. Le dessein d'enrichissement peut résulter du seul fait de vouloir tirer un profit de la chose (B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3e éd., Berne 2010, n. 11 ad art. 139).

3.1.2. Selon l'art. 172ter al. 1 CP, applicable aux infractions du titre 2 de la partie spéciale du Code pénal (infractions contre le patrimoine ; art. 137 à 172ter CP), si l'acte ne visait qu'un élément patrimonial de faible valeur ou un dommage de moindre importance, l'auteur sera, sur plainte, puni d'une amende.

S'agissant d'objets ayant une valeur marchande ou ayant une valeur objectivement déterminable, celle-ci est seule pertinente pour déterminer si l'acte ne visait qu'un élément patrimonial de faible valeur au sens de l'art. 172ter al. 1 CP (ATF
123 IV 113 consid. 3d p. 119 ; 121 IV 261 consid. 2c p. 266). La limite jusqu'à laquelle cette disposition est applicable a été fixée à CHF 300.- (ATF 142 IV 129 consid. 3.1 p. 133 ; 123 IV 113 consid. 3d p. 119).

C'est l'intention de l'auteur qui est déterminante, et non le résultat obtenu. Lorsque l'auteur n'envisage d'emblée de ne se procurer qu'un élément patrimonial de faible valeur ou de ne causer qu'un dommage de moindre importance, l'art. 172ter CP est applicable. Si l'auteur a dû se contenter d'un montant de moins de CHF 300.-, il ne peut bénéficier de la disposition précitée si son intention était d'obtenir davantage. Le dol éventuel suffit (ATF 123 IV 155 consid. 1a p. 156 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_859/2018 du 3 octobre 2018 consid. 2.1 ; 6B_446/2018 du 17 juillet 2018 consid. 3.1).

Le cas n'étant pas expressément prévu par la loi, la tentative de vol d'importance mineure ou la complicité ne sont pas punissables (art. 104 et 105 al. 2 CP ; ATF
142 IV 129 consid. 3.1 p. 133 ss).

Un billet de loterie peut présenter plusieurs valeurs différentes selon la configuration qui se présente. Il a une valeur vénale, correspondant au prix demandé par le commerçant lors de sa vente. Il peut avoir une valeur en cas de revente éventuelle, cette valeur étant différente selon que l'on connaît ou ignore le gain éventuel que le billet contient. Enfin, une fois gratté, il a également une valeur qui correspond au gain éventuellement inscrit et qui peut être directement encaissé auprès de tout commerçant. Dans ce cas de figure, l'élément patrimonial déterminant pour trancher de l'application de l'art. 172ter CP, soit l'élément patrimonial visé par l'auteur, est la valeur que le billet pouvait revêtir une fois gratté auprès d'un commerçant et non seulement la valeur que le billet non gratté aurait eu à l'achat ou lors d'une éventuelle revente (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1318/2015 du 18 novembre 2016 consid. 1.2).

3.2. En l'espèce, l'appelant a dûment identifié la station-service D______ comme une cible intéressante puisqu'il n'a pas hésité à y retourner, après avoir été mis en déroute la veille, en raison de cris d'une voisine du commerce.

Le 1er février 2022, il était muni d'un sac à dos qui devait lui permettre d'emporter un butin conséquent, et non pas seulement, comme il l'a maladroitement allégué, de quoi se nourrir. Il était également muni d'un outil plat ou d'un pied-de-biche, qui devait lui permettre de pénétrer illicitement dans les lieux. Son intention de faire main basse sur un butin indéterminé, composé de marchandises en quantité qu'il escomptait revendre, s'est ainsi concrétisée le lendemain. Une fois à l'intérieur du shop, il s'est de suite dirigé vers le comptoir et a prélevé une partie du contenu du tiroir, emportant ce qui l'intéressait, étant par ailleurs obligé d'agir rapidement en raison du déclenchement d'une alarme. Avant de quitter la zone du comptoir, il a encore fait choir plusieurs colonnes de paquets de cigarettes dans son sac, comme la vidéosurveillance l'établit.

L'appelant conteste avoir emporté les vignettes autoroutières, l'argent liquide et l'étui contenant la pièce d'identité de E______.

Il n'y a aucun motif de s'écarter des déclarations de la lésée, dont les propos ont été précis et mesurés. Celle-ci a ainsi notamment expliqué qu'elle conservait dans ce tiroir une partie des liquidités provenant des gains de jeux, celles-là y étant placées en fin de journée au moment de la fermeture. Elle a en outre déposé au dossier divers documents étayant les réparations entreprises ou à entreprendre suite aux dommages causés, ainsi qu'en rapport avec les jeux de la Loterie romande qu'elle écoulait, y compris les recettes réalisées pour la période allant du 30 janvier au 5 février 2022, soit à l'époque des désagréments subis.

À l'inverse, la crédibilité de l'appelant est bien entamée, lui qui a commencé par mentir lors de son audition à la police, alors même que l'ADN qu'il avait laissé sur place l'incriminait directement, et qui n'a ensuite cessé de minimiser le butin emporté. S'agissant des cigarettes, informé de ce qu'il s'agissait de 50 paquets, il a reconnu les avoir dérobés pour finalement soutenir n'en avoir emporté que 20, puis 15, enfin 24 paquets revendus à l'unité. Outre ces variations, on peine à comprendre pour quels motifs il aurait revendu à un seul acheteur lesdits paquets, mais à un prix unitaire, et les jeux de loterie pour un prix forfaitaire, alors qu'il a avancé s'être débarrassé de la moitié de ces billets, une fois son forfait accompli.

Il doit ainsi être retenu que l'appelant a soustrait dans le tiroir en question plusieurs liasses de billets à gratter de la Loterie Romande, des vignettes autoroutières et des espèces, étant rappelé qu'il a indiqué avoir été en mesure de se payer les services de prostituées aux Pâquis dans la foulée de son forfait. Au vu de ses explications, il n'est pas déraisonnable de penser que l'appelant a dû se débarrasser des vignettes autoroutières, plus difficiles à écouler sans attirer l'attention.

Quant à la pièce d'identité de la lésée, sa disparition n'a été constatée que deux semaines après le cambriolage. Dès lors, au bénéfice du doute, il ne peut être établi que cette disparition soit le fruit des agissements directs de l'appelant, qui n'aurait pas eu grand intérêt à soustraire un tel document, qui plus est s'agissant d'une personne de sexe féminin.

La valeur du préjudice – hors dégâts commis – s'élève ainsi à plus de CHF 4'200.- et n'est en rien assimilable à un dommage de moindre importance. Il signe le fait que l'appelant convoitait un butin de valeur certes indéterminée mais conséquent, incompatible avec l'infraction d'importance mineure de l'art. 172ter CP. Ces considérations valent aussi pour les billets de loterie à gratter emportés par "liasses" par l'appelant, qui devait nécessairement compter sur la réalisation d'un montant de plus de CHF 300.- à leur revente, vu leur quantité et la valeur que ceux-ci représentaient dans la perspective de leur grattage. Preuve en est le fait qu'il a déclaré les avoir écoulés en bloc pour le prix de EUR 450.-.

Les faits susétablis et les circonstances dans lesquelles la tentative de cambriolage de la station-service D______, puis son cambriolage ont été accomplis fondent le verdict de tentative de vol, respectivement de vol retenu par le premier juge, qu'il y a lieu de confirmer.

L'appel sera rejeté sur ce point.

4. 4.1. L'art. 144 al. 1 CP punit, sur plainte, celui qui aura endommagé, détruit ou mis hors d'usage une chose appartenant à autrui ou frappée d'un droit d'usage ou d'usufruit au bénéfice d'autrui.

4.2. L'appelant conteste, sans une argumentation développée, le verdict de dommages à la propriété. Il relève qu'à son retour sur les lieux, le 2 février 2022, il n'avait rien cassé de plus et n'avait fait qu'enlever des scotchs pour pousser un panneau en bois afin de pénétrer dans le shop.

La vidéosurveillance permet de constater la vigueur et l'acharnement mis en œuvre le 1er février 2022 pour tenter de forcer la porte du shop. Nul doute que le montant des réparations devisées pour plus de CHF 14'000.-, s'agissant des fenêtres, cadres de portes et gâche auxquels il s'est attaqué, est significatif de l'ampleur de son activité délictuelle. Au vu des dégâts causés, la lésée a entrepris de faire sécuriser les lieux par la mise en place d'une fermeture provisoire de la fenêtre, ce qui lui a coûté, facture à l'appui, CHF 610.- (cf. facture de P______ Sàrl), montant en lien de causalité avec la tentative de cambriolage.

Au vu du montant de ces travaux, l'action de l'appelant à son retour sur les lieux le 2 février 2022 ne peut être considérée comme sans incidence sur la propriété d'autrui. Il a bien commis de nouveaux dégâts, qui ne sont pas mineurs, pour pénétrer sans droit dans le shop, en arrachant les panneaux de bois. Preuve en est le coût des travaux provisoires subséquents d'un montant de CHF 1'168.54 (cf. facture de Q______ Sàrl).

Dès lors, l'appel sera rejeté sur ce point.

5. 5.1. L'art. 160 ch. 1 al. 1 CP punit celui qui aura acquis, reçu en don ou en gage, dissimulé ou aidé à négocier une chose dont il savait ou devait présumer qu'un tiers l'avait obtenue au moyen d'une infraction contre le patrimoine.

Le recel est punissable parce qu'il a pour effet de perpétuer, au préjudice de la victime du premier délit, l'état de fait contraire au droit que cette première infraction a généré (ATF 127 IV 79 consid. 2b p. 83 et les références ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_641/2017 du 1er juin 2018 consid. 1.1 ; 6B_728/2010 du 1er mars 2011 consid. 2.2).

Au plan objectif, l'infraction de recel suppose une chose obtenue au moyen d'une infraction contre le patrimoine, notion qui s'entend de manière large et englobe toute infraction dirigée contre le patrimoine d'autrui (ATF 127 IV 79 consid. 2a et b p. 81 ss). Le recel peut se concevoir même lorsque l'auteur de l'acte préalable est inconnu, si la preuve peut être rapportée que le possesseur actuel d'une chose ne peut l'avoir acquise que d'un voleur inconnu (arrêt du Tribunal fédéral 6B_641/2017 du 1er juin 2018 consid. 1.1).

Sur le plan subjectif, l'art. 160 CP définit une infraction intentionnelle, mais il suffit que l'auteur sache ou doive présumer, respectivement qu'il accepte l'éventualité que la chose provienne d'une infraction contre le patrimoine (arrêt du Tribunal fédéral 6B_189/2017 du 7 décembre 2017 consid. 4.1 ; 6B_728/2010 du 1er mars 2011 consid. 2.2). Il en va ainsi lorsque les circonstances suggèrent le soupçon de la provenance délictueuse (ATF 129 IV 230 consid. 5.3.2 p. 236 s. et les références à ATF 119 IV 242 consid. 2b p. 247 ; 101 IV 402 consid. 2 p. 405 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_641/2017 du 1er juin 2018 consid. 1.1).

5.2. Il est établi que l'appelant a acheté la I______, dérobée à G______, à un inconnu toxicomane, au petit matin, dans la rue, lequel lui avait dit qu'elle n'était pas authentique, montre qu'il a aussitôt voulu revendre au bénéfice de la certitude qu'il s'agissait bien d'une vraie, escomptant un gain immédiat.

L'appelant a déclaré qu'il s'y connaissait un peu en montres, mais s'est bien gardé d'indiquer qu'il avait remarqué le numéro de série gravé dans la lunette de la I______. Il avait constaté que la montre était "bien faite", d'excellente facture. Il paraît ainsi évident que s'il n'avait eu aucun doute sur le caractère de contrefaçon de la montre, il ne l'aurait pas achetée, respectivement ne se serait pas rendu dans deux bijouteries aux fins de se renseigner en l'exhibant. C'est dire qu'il avait décelé, du moins envisagé qu'il achetait une montre de valeur, très possiblement une vraie I______, pour un prix dérisoire à un toxicomane, flairant l'opportunité.

En achetant la montre dans les circonstances susdécrites, "sous le manteau", et sans poser aucune question sur sa provenance, l'appelant n'a pu qu'accepter que celle-ci pouvait avoir été obtenue au moyen d'une infraction contre le patrimoine. Il a d'ailleurs déclaré qu'il ne voulait précisément "pas savoir", ce qui est significatif de son for intérieur au moment de l'achat.

Partant, l'infraction est réalisée et l'appel sera rejeté sur ce point.

6. 6.1. L'art. 285 ch. 1 1ère phrase CP punit celui qui, en usant de violence ou de menace, aura empêché une autorité, un membre d'une autorité ou un fonctionnaire de faire un acte entrant dans ses fonctions, les aura contraints à faire un tel acte ou se sera livré à des voies de fait sur eux pendant qu'ils y procédaient.

Selon la première variante de l'art. 285 ch. 1 CP, l'auteur empêche, par la violence ou la menace, l'autorité ou le fonctionnaire de faire un acte entrant dans ses fonctions. Il n'est pas nécessaire que l'acte soit rendu totalement impossible : il suffit qu'il soit entravé de telle manière qu'il ne puisse être accompli comme prévu ou qu'il soit rendu plus difficile (ATF 133 IV 97 consid. 4.2 p. 100 et consid 5.2 p. 102 ad art. 286 CP ; 120 IV 136 consid. 2a p. 139 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1009/2014 du 2 avril 2015 consid. 5.1.1 et 6B_659/2013 du 4 novembre 2013 consid. 1.1). Cette infraction se distingue de l'opposition aux actes de l'autorité de l'art. 286 CP par le fait que l'auteur recourt à l'usage de la menace ou de la violence pour se soustraire à de tels actes.

Par violence, on entend ordinairement une action physique de l'auteur sur la personne du fonctionnaire. L'usage de la violence doit revêtir une certaine gravité ; une petite bousculade ne saurait suffire (B. CORBOZ, op. cit., n. 4 ad art. 285 et n. 3 ad art. 181). Selon la jurisprudence, le degré que doit atteindre l'usage de la violence pour entraîner l'application de l'art. 285 CP ne peut pas être fixé de manière absolue, mais dépend de critères relatifs. En particulier, il faut tenir compte de la constitution, du sexe et de l'expérience de la victime (ATF 101 IV 42 consid. 3a p. 44). La menace correspond à celle de l'art. 181 CP, même s'il n'est pas précisé qu'elle doit porter sur un dommage sérieux (arrêt du Tribunal fédéral 6B_257/2010 du 5 octobre 2010 consid. 5.1 ; B. CORBOZ, op. cit., n. 5 ad art. 285).

La loi exige la menace d'un dommage sérieux, c'est-à-dire que la perspective de l'inconvénient présenté comme dépendant de la volonté de l'auteur soit propre à entraver le destinataire dans sa liberté de décision ou d'action. La question doit être tranchée en fonction de critères objectifs, en se plaçant du point de vue d'une personne de sensibilité moyenne (ATF 120 IV 17 consid. 2a/aa ; 122 IV 322 consid. 1a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1253/2019 du 18 février 2020 consid. 4.2).

L'infraction à l'art. 285 CP est une infraction de résultat : le moyen de contrainte illicite doit amener l'autorité ou le fonctionnaire à adopter un comportement qu'il n'aurait pas eu s'il avait eu toute sa liberté de décision ; le comportement peut consister à faire, ne pas faire ou laisser faire (B. CORBOZ, op. cit., n. 11 ad art. 285).

Selon la deuxième variante, l'auteur se livre à des voies de fait sur une autorité, un membre d'une autorité ou un fonctionnaire pendant qu'ils procèdent à un acte entrant dans leurs fonctions. Le membre de l'autorité ou le fonctionnaire agit en cette qualité dans le cadre de sa mission officielle et c'est en raison de cette activité que l'auteur se livre à des voies de fait sur lui. Le but poursuivi est sans pertinence. Il n'est donc pas exigé que l'auteur essaie d'empêcher l'acte officiel (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1191/2019 du 4 décembre 2019 consid. 3.1 et références citées).

La notion de voies de fait est la même que celle figurant à l'art. 126 CP. Les voies de fait au sens de l'art. 285 CP doivent toutefois revêtir une certaine intensité. Le fait de provoquer une situation manifestement inconfortable pour la personne visée, à l'exemple d'un crachat, est toutefois suffisant. L'intensité de la violence doit être analysée selon les circonstances concrètes ; peu importe dès lors que l'auteur emploie ses mains, ses pieds ou un objet. Les voies de fait doivent intervenir pendant l'accomplissement de l'acte officiel. Une interprétation littérale conduirait cependant à des résultats choquants, notamment lorsque l'acte étatique revêt un caractère instantané. Il suffit, en fonction de la ratio legis, que la violence soit motivée par l'acte officiel et qu'elle se produise immédiatement sans qu'il y ait à examiner à quel moment l'acte officiel doit être tenu pour accompli (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1339/2018 du 21 février 2019 consid. 2.2 ; 6B_863/2015 du 15 mars 2016 consid. 1.1 = SJ 2017 I 85).

6.2.1. Concernant les faits du 18 avril 2022 et en l'absence d'appel joint, il est acquis pour l'appelant que la réitération de la menace découlant de la lettre manuscrite glissée sous la porte de sa cellule, auprès du gardien J______, tel que décrite dans l'acte d'accusation, n'entre plus en ligne de compte, n'ayant pas été considérée comme établie par le TP.

Reste à déterminer si les propos en question peuvent être considérés comme une menace en lien de causalité avec les actes de fonction auxquels aurait voulu se soustraire l'appelant.

Le rapport d'incident et le témoignage de l'agent K______ permettent de retenir qu'au moment où ce dernier et son collègue se sont présentés devant la cellule occupée par l'appelant aux fins de lui demander de cesser de faire du bruit, celui-ci a glissé sous la porte le mot en question, dont une partie était incompréhensible. Certes la partie qui l'était cristallise des menaces de mort à l'encontre d'une surveillante, mais dont l'on ne sait rien. Aucun des gardiens n'a évoqué de conflit entre une surveillante et l'appelant, et aucune surveillante ne s'est plainte de l'attitude de ce dernier. Qui plus est les gardiens K______ et J______ n'ont pas indiqué s'être sentis visés par ces propos, dont la majeure partie de ceux couchés sur le papier reste nébuleuse. Lorsqu'ils ont averti l'appelant de ce qu'ils allaient devoir le mettre en cellule forte et malgré son verbe potentiellement intimidant, ils n'ont rencontré aucune difficulté et la conduite s'est faite sans problème. La menace de l'appelant ne les a ainsi ni empêchés ni entravés dans leurs fonctions.

La question de la tentative pourrait se poser, mais il doit être retenu, dans la perspective la plus favorable à l'appelant, que les agents n'ont en réalité accordé aucun véritable poids à ces menaces, celles-ci relevant davantage d'élucubrations, certes inacceptables dans un contexte carcéral, que d'un projet nourri par l'appelant, qui se trouvait dans un état d'excitation au moment de la première venue des gardiens à la porte de sa cellule.

Dans ces conditions, l'appelant sera acquitté de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires s'agissant des faits visés sous chiffre 1.5.1. de l'acte d'accusation.

6.2.2. Le rapport d'incident concernant les faits survenus le 1er mai 2022, l'audition du plaignant F______ et celle des agents M______ et L______, étant relevé qu'elles sont congruentes et corroborées par les images de vidéosurveillance, permet de retenir ce qui suit.

L'appelant a été emmené en cellule forte en raison de son attitude, après qu'il a fait un usage intempestif de l'interphone pour insulter des gardiens. Lors de sa conduite en cellule forte, il a manifesté un état d'excitation grandissant. Une fois en cellule, il s'est opposé à la fouille, refusant de se mettre à genoux, de sorte que les gardiens M______ et F______ ont dû user de la contrainte à son endroit. L'appelant s'y est opposé en gesticulant, puis, une fois au sol, il a persévéré en continuant à s'agiter et à donner des coups. Une fois que la consigne a été donnée pour la sortie de cellule, l'appelant ne s'y est conformé et s'est de suite relevé, manifestant un comportement oppositionnel, en venant dans la direction des gardiens, de sorte que ceux-ci ont dû à nouveau faire usage de la contrainte. L'appelant a alors craché au visage des gardiens précités.

L'appelant admet avoir résisté aux actes mis en œuvre par les gardiens, parce qu'il avait mal au bras, a-t-il dit, omettant d'indiquer qu'il ne s'était préalablement pas soumis aux injonctions en rapport avec sa mise au cachot.

Il est ainsi le principal responsable de la mise en œuvre de moyens de contrainte et est bien malvenu de s'en plaindre. Sans qu'il ne soit nécessaire de qualifier plus avant ses gesticulations, lesquelles, vu son comportement oppositionnel, ont nécessairement compliqué et entravé le travail des gardiens, ceux-ci n'avaient pas à devoir y faire face et à se faire cracher dessus.

Ce faisant, l'appelant, par ses voies de fait, s'est bien rendu coupable de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, et son appel doit être rejeté sur ce point.

7. 7.1.1. Les infractions de vol (art. 139 ch. 1 CP) et de recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP) sont passibles d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire, celles de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), de violation de domicile (art. 186 CP), de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 ch. 1 al. 1 CP) et de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP) d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

7.1.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

7.1.3. Bien que la récidive ne constitue plus un motif d'aggravation obligatoire de la peine (art. 67 aCP), les antécédents continuent de jouer un rôle très important dans la fixation de celle-ci (M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Basler Kommentar Strafrecht I : Art. 1-110 StGB, Jugendstrafgesetz, 3ème éd., Bâle 2013, n. 130 ad art. 47; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1202/2014 du 14 avril 2016 consid. 3.5). En général, la culpabilité de l'auteur est amplifiée du fait qu'il n'a pas tenu compte de l'avertissement constitué par la précédente condamnation, et sa rechute témoigne d'une énergie criminelle accrue (R. ROTH / L. MOREILLON (éds), Code pénal I : art. 1-100 CP, Bâle 2009, n. 55 ad art. 47). Il en va de même des antécédents étrangers (ATF 105 IV 225 consid. 2 p. 226). Une série d'infractions semblables pèse plus lourd que des actes de nature différente. En outre, les condamnations passées perdent de leur importance avec l'écoulement du temps. Les condamnations qui ont été éliminées du casier judiciaire ne peuvent plus être utilisées pour l'appréciation de la peine ou l'octroi du sursis dans le cadre d'une nouvelle procédure pénale (ATF
135 IV 87 consid. 2 p. 89). Les antécédents judiciaires ne sauraient toutefois conduire à une augmentation massive de la peine, parce que cela reviendrait à condamner une deuxième fois pour des actes déjà jugés (ATF 120 IV 136 consid. 3b p. 145).

7.1.4. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

7.1.5. Conformément à l'art. 22 al. 1 CP, le juge peut atténuer la peine si l'exécution d'un crime ou d'un délit n'est pas poursuivie jusqu'à son terme ou que le résultat nécessaire à la consommation de l'infraction ne se produit pas ou ne pouvait pas se produire.

7.2. En l'espèce, la faute de l'appelant est lourde. Un peu plus de dix jours après être sorti de prison, il a récidivé en commettant un cambriolage au préjudice de la station-service D______, à laquelle il s'est attaqué par deux fois afin de parvenir à ses fins. Pour cela, il s'est muni d'un outil, d'un sac, de gants et s'est masqué. Les images de vidéosurveillance traduisent les efforts intenses qu'il a mis en œuvre pour pénétrer dans les lieux, sans succès le 1er février 2022, mais couronné le lendemain. Son intense activité délictuelle comprend le recel d'une montre volée et son mépris des décisions de justice, l'appelant n'ayant pas respecté la mesure d'expulsion prononcée le 6 mai 2021, en venant en Suisse à trois reprises, qui plus est pour y commettre des infractions. Enfin, il a fait preuve d'un comportement inacceptable en détention, se livrant à des voies de fait sur des gardiens qui ne faisaient qu'exercer les tâches qui leur étaient dévolues, outre les très – trop – nombreuses sanctions disciplinaires qui lui ont été infligées et qui témoignent de son état d'esprit contestataire.

Sa collaboration a été mauvaise. L'appelant a d'emblée menti et ce n'est qu'une fois confronté à des preuves techniques, ne prêtant pas à discussion, qu'il a admis son implication dans le cambriolage reproché, tout en digressant sur le butin, minimisant ses actes, sinon rejetant la faute sur la lésée, qui n'avait pas pris de précaution, à son avis, en laissant de l'argent dans le tiroir de son comptoir. Ses dires concernant les autres infractions commises sont apparus bien souvent sans substance, l'appelant s'étant montré évasif, sinon rejetant la faute sur les gardiens de prison, allant jusqu'à soutenir que c'était en raison d'une gifle reçue – mais non établie – que sa salive avait atteint ceux-ci. Sa prise de conscience est nulle. Comme l'a relevé le premier juge, il n'a exprimé aucun regret, aucune excuse sincère et ne pense qu'aux conséquences pour lui-même.

Ses antécédents sont mauvais et spécifiques. Il se montre insensible à la sanction.

Il y a concours d'infractions, facteur d'aggravation de la peine.

Au vu de ce qui précède, seule une peine privative de liberté ferme entre en considération, étant précisé que le genre de peine n'a pas été critiqué en appel, seule sa diminution ayant été plaidée.

Les infractions de vol et de recel sont abstraitement les plus graves. Parmi les faits de cette typicité, ceux du 2 février 2022 sont sans conteste les plus importants et conduisent à une quotité de quatre mois de peine privative de liberté. Celle-ci devrait être aggravée de deux mois pour la tentative de vol (peine hypothétique de trois, voire quatre mois), étant précisé que ce n'est qu'en raison d'une alarme du voisinage que l'appelant s'est résolu à mettre un terme à son action délictueuse alors qu'il paraissait proche du résultat, de deux mois pour le recel (peine hypothétique de quatre mois), d'un mois et 15 jours pour les dommages à la propriété (peine hypothétique de trois mois), d'un mois pour la violation de domicile (peine hypothétique de deux mois) et de 15 jours pour la tentative de violation de domicile (peine hypothétique d'un mois), d'un mois et 15 jours pour les violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (peine hypothétique de trois mois), enfin de trois mois pour la rupture de ban (peine hypothétique de six mois).

C'est ainsi une peine privative de liberté d'un peu plus de 15 mois qui aurait dû être prononcée. Vu l'interdiction de la reformatio in pejus, la peine sera maintenue à 12 mois de privation de liberté, sous déduction de la détention subie avant jugement (cf. art. 51 CP), étant précisé que l'appelant est en exécution anticipée de peine depuis le 8 juin 2022.

8. 8.1.1. Conformément à l'art. 66a al. 1 CP, le juge expulse un étranger du territoire suisse pour une durée de cinq à quinze ans s'il est reconnu coupable de l'une des infractions énumérées aux let. a à o, également sous la forme de tentative (ATF
144 IV 168 consid. 1.4.1), notamment en cas de condamnation pour cambriolage (vol [art. 139 CP] en lien avec une violation de domicile [art. 186 CP]) (let. d).

Conformément à l'al. 2 de cette disposition, le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse. À cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse.

8.1.2. Selon l'art. 66b CP, lorsqu'une personne contre qui une expulsion a été ordonnée commet une nouvelle infraction remplissant les conditions d'une expulsion au sens de l'art. 66a, une nouvelle expulsion est prononcée pour une durée de vingt ans (al. 1). L'expulsion peut être prononcée à vie si le nouvel acte a été commis alors que la première expulsion avait encore effet (al. 2).

8.1.3.1. Selon l'art. 20 de l'Ordonnance sur la partie nationale du système d'information Schengen (N-SIS) et sur le bureau SIRENE (Ordonnance N-SIS), les ressortissants d'États tiers ne peuvent être signalés aux fins de non-admission ou d'interdiction de séjour que sur la base d'une décision prononcée par une autorité administrative ou judiciaire.

8.1.3.2. L'inscription de l'expulsion dans le SIS était jusqu'au 11 mai 2021 régie par le chapitre IV du règlement SIS II (règlement CE n° 1987/2006) relatif aux signalements de ressortissants de pays tiers aux fins de non-admission ou d'interdiction de séjour. Plusieurs arrêts publiés du Tribunal fédéral traitent des conditions de l'inscription de l'expulsion dans le SIS sur la base de ce règlement (ATF 147 II 408 ; 147 IV 340 ; 146 IV 172 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_628/2021 du 14 juillet 2022). La Suisse a repris le nouveau règlement (UE) 2018/1861 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du SIS dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d'application de l'accord de Schengen ainsi que modifiant et abrogeant le règlement CE n°°1987/2006. Il est entré en vigueur pour la Suisse le 11 mai 2021 (RS 0.362.380.085) et donc applicable à la présente procédure.

L'art. 21 du règlement se voit dans le nouveau règlement 2018/1861 agrémenté d'un chiffre supplémentaire. Sa teneur utile au cas d'espèce demeure cependant inchangée, en tant que l'art. 21 ch. 1 du règlement 2018/1861 prescrit comme l'ancien article qu'avant d'introduire un signalement, l'État membre signalant vérifie si le cas est suffisamment approprié, pertinent et important pour justifier l'introduction du signalement dans le SIS.

Il ressort également du nouveau comme de l'ancien règlement que le signalement dans le SIS suppose que la présence de la personne concernée, ressortissante d'un pays tiers, sur le territoire d'un État membre constitue une menace pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale. L'art. 24 ch. 2 précise que tel peut être notamment le cas lorsque l'intéressé a été condamné dans un État membre pour une infraction passible d'une peine privative de liberté d'au moins un an (let. a), qu'il existe des raisons sérieuses de croire qu'un ressortissant de pays tiers a commis une infraction pénale grave, y compris une infraction terroriste, ou il existe des indications claires de son intention de commettre une telle infraction sur le territoire d'un État membre (let. b) ou qu'un ressortissant de pays tiers a contourné ou tenté de contourner le droit national ou de l'Union relatif à l'entrée et au séjour sur le territoire des États membres (let. c).

8.1.3.3. Vu le contenu similaire entre les deux actes, la jurisprudence découlant du premier s'applique au second.

D'après le Tribunal fédéral, la mention d'une peine privative d'au moins un an fait référence à la peine-menace de l'infraction en cause et non à la peine prononcée concrètement dans un cas d'espèce. À cela s'ajoute, sous la forme d'une condition cumulative, que la personne concernée doit représenter une menace pour la sécurité ou l'ordre publics. Selon notre Haute Cour, il ne faut pas poser des exigences trop élevées en ce qui concerne l'hypothèse d'une "menace pour l'ordre public et la sécurité publique". En particulier, il n'est pas nécessaire que l'intéressé constitue une menace concrète, actuelle et suffisamment grave affectant un intérêt fondamental de la société. Il suffit que la personne concernée ait été condamnée pour une ou plusieurs infractions qui menacent l'ordre public et la sécurité publique et qui, prises individuellement ou ensemble, présentent une certaine gravité. Ce n'est pas la quotité de la peine qui est décisive mais la nature et la fréquence des infractions, les circonstances concrètes de celles-ci ainsi que l'ensemble du comportement de la personne concernée. Par conséquent, une simple peine prononcée avec sursis ne s'oppose pas au signalement dans le SIS (ATF 147 IV 340 consid. 4.6 et 4.8 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_628/2021 du 14 juillet 2022 consid. 2.2.2 à 2.2.3 et 6B_834/2021 du 5 mai 2022 consid. 2.2.2).

Si une expulsion est déjà ordonnée sur la base des conditions précitées, son signalement dans le SIS est en principe proportionné et doit par conséquent être effectué. Les autres États Schengen restent néanmoins libres d'autoriser l'entrée sur leur territoire au cas par cas pour des raisons humanitaires ou d'intérêt national ou en raison d'obligations internationales. Leur souveraineté n'est ainsi pas affectée par l'expulsion prononcée en Suisse, laquelle s'applique exclusivement à son territoire. Inversement, l'absence de signalement de l'expulsion dans le SIS ne garantit pas encore un droit de séjour dans les autres États Schengen (ATF 147 IV 340 consid. 4.8 ; arrêts du Tribunal 6B_628/2021 du 14 juillet 2022 consid. 2.2.3 et 6B_834/2021 du 5 mai 2022 consid. 2.2.3).

8.2. En l'espèce, la tentative de cambriolage et le cambriolage commis par l'appelant relèvent de l'expulsion obligatoire.

Ce dernier ne discute pas, à juste titre, la mesure, étant précisé qu'au vu de sa situation personnelle, il ne bénéficie d'aucun droit à demeurer en Suisse.

Seuls sont combattus la durée de la mesure et le signalement de celle-ci dans le SIS.

Il convient, à cet égard, de rappeler que l'appelant a récidivé en commettant des infractions entraînant le prononcé obligatoire de la mesure, alors même qu'il était sous le joug d'une expulsion, prononcée le 6 mai 2021 pour une durée de cinq ans.

Le premier juge n'avait donc pas le choix de la durée de la mesure, soit vingt ans, étant précisé qu'au vu de l'énoncé légal, il aurait même pu la prononcer à vie, les conditions de l'art. 66b al. 2 CP étant réalisées.

Quant au signalement de l'expulsion dans le SIS, il a été ordonné à bon escient, l'appelant – dont l'identité ne peut être établie – ne disposant d'aucun titre de séjour et n'ayant aucun lien avéré dans un pays de l'espace Schengen, alors qu'au vu de la quotité de la peine fixée et de la sécurité publique à garantir, un tel signalement se justifie. Au demeurant, l'appelant n'a soulevé aucune argumentation autonome en rapport avec ce grief.

Son appel sera donc rejeté sur ces points.

9. Au vu de la confirmation de la culpabilité de l'appelant sur l'essentiel et de la peine prononcée, ses conclusions en indemnisation (cf. art. 429 al. 1 let. c CPP) seront rejetées.

Il en ira de même du tort moral réclamé, non particulièrement motivé.

10. 10.1. Dans le cadre du recours, les frais de la procédure sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé (art. 428 al. 1 CPP). Pour déterminer si une partie succombe ou obtient gain de cause, il faut examiner dans quelle mesure ses conclusions sont admises en deuxième instance (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1261/2017 du 25 avril 2018 consid. 2 et 6B_636/2017 du 1er septembre 2017 consid. 4.1). Lorsqu'une partie obtient gain de cause sur un point, succombe sur un autre, le montant des frais à mettre à sa charge dépend de manière déterminante du travail nécessaire à trancher chaque point (arrêts du Tribunal fédéral 6B_472/2018 du 22 août 2018 consid. 1.2 et 6B_636/2017 précité consid. 4.1).

Si l'autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l'autorité inférieure (art. 428 al. 3 CPP).

10.2. En l'occurrence, l'appelant n'obtient gain de cause en appel que sur un chef de l'acte d'accusation, dont l'admission n'entraîne pas la réforme du jugement sur la peine. Dans cette mesure, il y a matière à réduction des frais d'appel, mais que marginalement. Dès lors, l'appelant supportera une quote-part de 7/8èmes desdits frais, ceux-ci comprenant un émolument de CHF 2'000.-, le solde étant laissé à la charge de l'État.

Les actes d'instruction spécifiques relatif au chef pour lequel l'appelant a été acquitté ont été très limités puisqu'ils ont consisté en l'audition du témoin K______. Il s'ensuit que l'appelant doit bénéficier dans la même proportion que celle retenue en appel de la réduction des frais de première instance mis à sa charge (art. 426 al. 1 CPP).

11. 11.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit (cf. art. 138 al. 1 CPP) est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire suivant, débours de l'étude inclus : chef d'étude CHF 200.- (let. c). En cas d'assujettissement, l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

11.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2). Les documents ne nécessitant pas ou peu de motivation ou autre investissement particulier en termes de travail juridique, telles l'annonce d'appel (AARP/184/2016 du 28 avril 2016 consid. 5.2.3.2 et 5.3.1 ; AARP/149/2016 du 20 avril 2016 consid. 5.3 et 5.4 ; AARP/146/2013 du 4 avril 2013) et la déclaration d'appel (ordonnance de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2014.51 du 21 novembre 2014 consid. 2.1 ; décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.165 du 24 janvier 2014 consid. 4.1.3 et BB.2013.127 du 4 décembre 2013 consid. 4.2), sont couverts par le forfait.

11.3. Le temps de déplacement de l'avocat est considéré comme nécessaire pour la défense d'office au sens de l'art. 135 CPP (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2015.33 du 28 juillet 2015 consid. 4.3 et les références). La rémunération forfaitaire de la vacation aller/retour au et du Palais de justice est arrêtée à CHF 100.- pour les chefs d'étude, dite rémunération étant allouée d'office par la juridiction d'appel pour les débats devant elle.

11.4. En l'espèce, il convient de retrancher de l'état de frais du défenseur d'office de A______ le temps facturé pour la rédaction de l'annonce ainsi que de la déclaration d'appel, ces activités étant incluses dans le forfait.

On y ajoutera le temps effectif consacré aux débats d'appel (1h35) ainsi qu'un forfait de déplacement au Palais de justice.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 3'277.70 correspondant à 13h20 d'activité au tarif de CHF 200.-/heure plus l'indemnité de déplacement (CHF 100.-) ainsi que la majoration forfaitaire de 10% et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% (CHF 234.35).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Statuant le 6 décembre 2022
:

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/868/2022 rendu le 14 juillet 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/4818/2022.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de tentative de vol (art. 22 al. 1 cum art. 139 ch. 1 CP), de vol (art. 139 ch. 1 CP), de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), de recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), de tentative de violation de domicile (art. 22 al. 1 cum art. 186 CP), de violation de domicile (art. 186 CP), de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 ch. 1 al. 1 CP ; ch. 1 5.2 de l'acte d'accusation du 20 juin 2022) et de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP).

Acquitte A______ de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 ch. 1 al. 1 CP ; ch. 1 5.1 de l'acte d'accusation du 20 juin 2022).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 12 mois, sous déduction de 279 jours de détention avant jugement (dont 182 jours en exécution anticipée de peine ; art. 40 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de 20 ans (art. 66a al. 1 let. d CP et 66b al. 1 CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) (art. 20 de l'ordonnance N-SIS ; RS 362.0).

Renvoie la station-service D______ à agir par la voie civile (art. 126 al. 2 CPP).

Ordonne la confiscation et la destruction des objets figurant sous chiffres 2 et 3 de l'inventaire n° 9______ (art. 69 CP).

Constate que les frais de la procédure préliminaire et de première instance ont été arrêtés à CHF 2'504.-, y compris un émolument de jugement complémentaire de CHF 600.-.

Condamne A______ aux 7/8èmes de ces frais, soit CHF 2'191.-, et en laisse le solde à la charge de l'État (art. 426 al. 1 CPP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ pour la procédure préliminaire et de première instance.

Prend acte de ce que l'indemnité de procédure de première instance due à MC______, défenseur d'office de A______, a été fixée à CHF 7'863.95 et payée (art. 135 CPP).

Statuant le 16 janvier 2023 :

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 2'445.-, lesquels comprennent un émolument de CHF 2'000.-.

Met 7/8èmes de ces frais, soit CHF 2'139.-, à la charge de A______ et en laisse le solde à la charge de l'État.

Arrête à CHF 3'277.70, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me C______, défenseur d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Secrétariat d'État aux migrations, à l'Office cantonal de la population et des migrations ainsi qu'au Service de l'application des peines et mesures.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

Le président :

Vincent FOURNIER

 

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

2'504.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

300.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

70.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

2'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'445.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

4'949.00