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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/2071/2024

DCSO/90/2025 du 20.02.2025 ( PLAINT ) , REJETE

Recours TF déposé le 03.03.2025
Résumé : Recours au TF interjeté par la débitrice le 3 mars 2025 (5A_177/2025).
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2071/2024-CS DCSO/90/25

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 20 FEVRIER 2025

 

Plainte 17 LP (A/2071/2024-CS) formée en date du 20 juin 2024 par A______, représentée par Me Peter PIRKL, avocat.

* * * * *

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 20 février 2025
à :

-       A______

c/o Me PIRKL Peter

REGO AVOCATS

Esplanade de Pont-Rouge 4

Case postale

1212 Genève 26.

- B______ SA

c/o Me SCHWAB Alexandre J.

Schwab Flaherty & Ass.

Rue De-Candolle 7

1205 Genève.

- Office cantonal des poursuites.

 


EN FAIT

A. a. Les époux A______ et C______, en qualité de débiteurs solidaires, font chacun l'objet d'une poursuite requise par B______ SA pour un montant de 168'532 fr. 60 à titre d'honoraires d'architecte (poursuite n° 1______ contre C______ et poursuite n° 2______ contre A______).

b. L'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office) a établi le 19 décembre 2023 les commandements de payer dans ces deux poursuites.

c. Le commandement de payer destiné à C______ a fait l'objet de plusieurs tentatives infructueuses de notification en mains propres à son domicile. Il lui a finalement été remis au guichet de l'Office où il s'était rendu le 13 février 2024, suite à un avis de retrait d'acte de poursuite remis dans sa boîte-aux-lettres. Il a immédiatement formé opposition au commandement de payer à l'Office.

d. Le commandement de payer destiné à A______ a été remis à La Poste le 19 décembre 2023 en vue de notification.

d.a Il a fait l'objet d'une tentative de notification ordinaire par PostMail le 4 janvier 2024 à 11h11, laquelle a échoué. Un avis de retrait au guichet postal a été remis dans la boîte-aux-lettres de la débitrice fixant le délai de garde au bureau de poste de D______ [GE] au 11 janvier 2024.

d.b La débitrice ne s'étant pas présentée au guichet postal dans le délai, le commandement de payer a été confié à PostLogistic pour notification spéciale, laquelle a été tentée sans succès les 25, 29, 30 et 31 janvier à, respectivement, 16h09, 18h26, 19h15 et 18h00. Il a été retourné non notifié le 5 février 2024 à l'Office, qui a adressé à la débitrice, par courrier A+ du 15 février 2024, une sommation de retirer un acte de poursuite à ses guichets, distribuée dans la boîte-aux-lettres de l'intéressée le 17 février 2024.

d.c Selon une note figurant dans la base de données de l'Office, C______ s'est présenté au guichet le 4 mars 2024 pour retirer le commandement de payer destiné à son épouse. L'Office a refusé de le lui remettre sans procuration de son épouse. Le commentaire suivant a été ajouté à la note : "attend l'externe au domicile", ce par quoi il faut comprendre qu'il avait été annoncé au précité qu'un huissier tenterait une nouvelle remise de l'acte au domicile de la débitrice.

Conformément à cette note, un huissier de l'Office s'est rendu au domicile de la débitrice le 18 mars à 13h30 pour tenter une nouvelle notification de l'acte, sans trouver personne à qui le remettre. Il a laissé un avis dans la boîte-aux-lettres informant A______ du fait que la notification du commandement de payer serait désormais confiée à la Commune de E______ [GE], ce qui a été fait le 26 mars 2024.

Les agents municipaux ont tenté des notifications les 5, 13 et 16 avril 2024 à la débitrice, sans succès. Ils ont constaté que la boîte-aux-lettres était "pleine de recommandés" et que le portail était fermé.

e. L'Office a décidé le 19 avril 2024 de procéder à une notification par voie de publication du commandement de payer, laquelle a eu lieu le ______ mai 2024.

f. En l'absence d'opposition, la créancière a requis la continuation de la poursuite le 5 juin 2024.

g. B______ SA a assigné les époux A______/C______ en justice par requête en conciliation déposée le 13 mai 2024, notifiée le 7 juin 2024 aux intéressés en vue d'une audience de conciliation fixée le 8 juillet 2024.

h. A______ allègue avoir pris connaissance de la notification du commandement de payer par voie de publication à la lecture de la requête de conciliation (allégué 25) et de la pièce 14 jointe (publication).

i. Par courrier du 20 juin à l'Office, elle a demandé la restitution du délai pour former opposition au commandement de payer et déclaré faire opposition.

L'Office a annoncé à la débitrice par courrier du 3 juillet 2024 qu'il sursoyait à statuer sur la demande de restitution du délai d'opposition et la recevabilité de son opposition dans l'attente de la décision de l'autorité de surveillance sur sa plainte contre la poursuite (cf. infra B).

B. a. Par acte déposé le 20 juin 2024 auprès du greffe de la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance), A______ a formé une plainte contre la poursuite n° 2______, concluant principalement à la constatation de sa nullité, subsidiairement à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle avait formé opposition, à ce que le délai d'opposition lui soit restitué, à ce qu'il soit constaté qu'elle avait valablement formé opposition au commandement de payer dans le délai restitué et à ce que tout refus de l'Office d'enregistrer l'opposition formée au commandement de payer soit annulé.

Elle adresse plusieurs griefs à l'Office dans la conduite de la poursuite dont il découle que les conditions préalables à une notification par voie de publication n'étaient, selon elle, pas réunies en l'espèce, soit : les prétendus nombreux passages de l'Office à son domicile, non établis; la première tentative de notification du commandement de payer le 19 décembre 2023 en période de féries de Noël; le refus de notifier le commandement de payer à son mari à l'Office le 4 mars 2024 alors que la notification à l'époux est expressément prévue par l'art. 64 al. 1 LP; l'absence de notification postale après le 4 mars 2024, alors que l'Office lui avait annoncé que tel aurait été le cas lors du passage de son mari à ses guichets le 4 mars 2024; la tentative de notification par les agents municipaux alléguée le 5 avril 2024 en période de féries de Pâques; la tentative de notification du 13 avril 2024, soit le samedi de la fin des vacances scolaires de Pâques; la tentative de notification du 16 avril 2024 pendant les horaires de travail, alors que les deux époux ont une activité professionnelle à plein temps, elle-même en qualité d'employée et fondée de pouvoir inscrite au registre du commerce d'une banque; l'absence de remise d'avis de passage dans la boîte-aux-lettres les 5, 13 et 16 avril 2024; l'absence de tentative de notification sur son lieu de travail.

La plaignante conteste par ailleurs que la boîte-aux-lettres était "pleine de recommandés" et observe que d'autres poursuites à l'encontre des époux n'ont rencontré aucun obstacle de notification.

Elle précise par ailleurs qu'elle n'avait aucune raison de s'attendre à être poursuivie par B______ SA, les prétentions de cette dernière concernant son mari et étant contestées.

b. La Chambre de surveillance a octroyé l'effet suspensif à la plainte, requis par la plaignante, par ordonnance du 1er juillet 2024.

c. Dans ses observations du 17 juillet 2024, l'Office a considéré avoir régulièrement procédé aux notifications préalables à la notification par voie édictale. En outre, l'époux de la débitrice était dûment informé de l'existence de la poursuite et n'a rien entrepris pour permettre la notification du commandement de payer. L'Office s'en rapportait à justice sur la question de la restitution du délai d'opposition.

d. B______ SA a conclu au rejet de la plainte avec suite de dépens en 4'850 fr. Elle a en substance contesté que la plaignante n'avait pas à s'attendre à être poursuivie, n'étant pas sa débitrice, cette question étant de surcroît sans pertinence dans le cadre d'une plainte au sens de l'art. 17 LP. Pour le surplus, les conditions étaient réunies pour une notification par voie édictale et la plaignante ne pouvait de bonne avoir ignoré la poursuite jusqu'en juin 2024.

e. A______ et B______ SA ont répliqué, respectivement les 20 et 26 septembre 2024, persistant dans leurs conclusions.

f. Les parties ont été informées par avis de la Chambre de surveillance du 17 octobre 2024 que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Déposée en temps utile (art. 17 al. 2 LP) et dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie potentiellement lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est recevable.

2. La plaignante soutient en substance qu'en l'absence de toute tentative de notification préalable valable, les conditions de la notification par voie édictale ne sont pas réunies et que sa nullité doit être constatée.

2.1.1 La notification se fait par publication lorsque le débiteur se soustrait obstinément à la notification (art. 66 al. 4 ch. 2 LP).

En raison du risque élevé que le débiteur ne prenne pas effectivement connaissance de la publication et parce qu'elle est susceptible de porter atteinte à la bonne réputation du débiteur, il n'est possible de recourir à la notification par voie édictale qu'en ultima ratio, lorsqu'il n'y a pas d'autres moyens d'atteindre le débiteur. Cette stricte subsidiarité est une condition générale applicable aux trois hypothèses dans lesquelles l'art. 66 al. 4 LP autorise une notification par voie de publication (Jeanneret, Lembo, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 19 ad art. 66 LP et les références citées).

Ce motif de publication suppose cumulativement l'impossibilité réitérée de remettre l'acte de poursuite au débiteur ou à une personne autorisée et un élément subjectif, à savoir l'intention de se soustraire à la notification. Le principe de la subsidiarité requiert de l'office qu'il tente préalablement de notifier l'acte de poursuite avec tous les moyens principaux et subsidiaires prévus par les 64, 65 et 66 al. 1 à 3 LP, notamment par le recours à la police. La réalisation de l'élément subjectif peut découler d'expériences précédentes de l'office qui connaît le comportement récalcitrant du débiteur; en revanche, l'office doit s'assurer que les échecs de notification ne sont pas le fruit d'un simple cas fortuit ou d'une banale négligence qui ne réalisent pas la condition d'intention requise par la loi (arrêt du Tribunal fédéral 5A_542/2014, consid. 5.1.2; décisions de la Chambre de surveillance DCSO/152/2023 du 06.04.2023 consid. 2.1.2; DCSO/191/2020 du 12 juin 2020 consid. 2.1; DCSO/583/2017 du 9 novembre 2017 consid. 2.1; DCSO/595/2017 du 9 novembre 2017 consid. 2.2; DCSO/251/2016 du 11 août 2016 consid. 2.1 et les références citées; Jeanneret, Lembo, op. cit., n° 21 ad art. 66 LP).

2.1.2 L'art. 64 al. 1 LP prescrit que les actes de poursuite sont notifiés au débiteur dans sa demeure ou à l'endroit où il exerce habituellement sa profession et que s'il est absent, l'acte de poursuite peut être remis à une personne adulte de son ménage ou à un employé. Une personne adulte du ménage du destinataire est celle qui vit avec ce dernier et qui fait partie de son économie domestique, sans nécessairement être membre de sa famille selon l'état civil, et dont on peut s'attendre à ce qu'elle transmette l'acte dans le délai utile. Ce sera le cas notamment du conjoint, du concubin, de l'enfant capable de discernement, des parents, des grands-parents et des employés de maison pour autant qu'ils vivent dans une même communauté domestique. La notification est réputée effectuée au moment où l'acte est remis au récipiendaire. Le fait que celui-ci omette, volontairement ou non, de le transmettre au débiteur n'affecte pas la validité de la notification (ATF 117 III 5 c. 1, JdT 1992 II 31: Jaques, De la notification des actes de poursuites, in BlSchK 2011, p. 177 ss, ch. 5.1 p. 184-185 et les références citées). Le conjoint séparé n'est pas une personne appartenant au ménage du débiteur (Jeanneret, Lembo, op, cit., n° 24 ad art. 64 LP).

La loi n'établit aucune hiérarchie entre la notification au domicile ou sur le lieu de travail, qui sont mis sur pied d'égalité. L'office est libre de son choix et le débiteur n'a aucun droit d'exiger qu'un lieu soit privilégié par rapport à l'autre (ATF 91 III 41; BlSchK 1995, p. 188 consid. 3; Jeanneret, Lembo, op, cit., n° 10 ad art. 64 LP; Gilliéron, Commentaire I, art. 64 N 9 et 17; Kren Kostkiewicz, p. 213).

Un acte de poursuite peut aussi être notifié à un représentant conventionnel du débiteur, pour autant que celui-ci ait été expressément habilité à recevoir des actes de poursuite pour le compte du débiteur (BlSchK 1987, p. 23; ATF 43 III 18 c. 3, JdT 1917 II 98; Jeanneret, Lembo, op, cit., n° 21 ad art. 64 LP).

2.1.3 C'est sur l'Office que pèse le fardeau de la preuve de la notification régulière du commandement de payer (ATF 120 III 117 consid. 2). Les exemplaires du commandement de payer notifiés et comportant le procès-verbal de notification avec les mentions apposées par l'agent notificateur constituent des titres officiels au sens de l'art. 9 CC, avec pour conséquence qu'ils font en principe foi des faits qu'ils constatent. Le débiteur conserve cependant la possibilité d'établir que ces faits sont en réalité inexacts, cette preuve n'étant soumise à aucune forme particulière (art. 9 al. 2 CC; ATF 128 III 380 consid. 1.2; 120 III 117 = JdT 1997 II 54; 84 III 13; arrêts de la Chambre de surveillance DCSO/236/19 du 23 mai 2019 consid. 2.2; DCSO/418/2008 du 02.10.2008 consid. 3).

2.1.4 L'interdiction de l'abus de droit est applicable à tout l'ordre juridique, y compris la LP (ATF 108 III 120 consid. 2). Néanmoins, le droit des poursuites est par nature un droit formaliste dont les règles prescrivent des actes définis aux effets précisément rigoureux (arrêt du Tribunal fédéral B.192/1996 du 16 octobre 1996 consid. 2). Au vu de ce formalisme, qui vaut aussi pour les autorités de poursuite, on ne peut admettre l'abus de droit à se prévaloir d'une règle de la LP que de manière restreinte (arrêt du Tribunal fédéral 5A_825/2020 du 25 mars 2021 consid. 5.2.1).

2.1.5 L'autorité de surveillance n'est pas compétente pour statuer sur le bienfondé matériel des prétentions du créancier déduites en poursuite qui relèvent de la compétence du juge ordinaire; elle n'est notamment pas compétente pour déterminer si le poursuivi est bien le débiteur du montant qui lui est réclamé; ce dernier doit faire valoir les moyens que lui offre la procédure de poursuite, soit notamment l'opposition au commandement de payer, l'action en libération de dette, l'annulation de la poursuite ou l'action en constatation de l'inexistence de la dette (parmi d'autres : ATF 136 III 365 consid. 2.1, avec la jurisprudence citée; 115 III 18 consid. 3b; 113 III 2 consid. 2b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_250-252/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1; 5A_76/2013 du 15 mars 2013 consid. 3.1; 5A_890/2012 du 5 mars 2013 consid. 5.3).

2.2 Globalement, la plaignante invoque que les divers passages allégués par l'Office ne seraient pas prouvés. Il découle des principes en matière de preuve rappelés ci-dessus que les procès-verbaux des agents notificateurs figurant sur le commandement de payer, de même que le contenu des registres de l'Office, ont une portée probante accrue en application de l'art. 9 CC et ne sauraient donc être remis en cause sur la base d'une simple contestation de la plaignante. En l'absence d'indices que ces procès-verbaux et registres seraient contraires à la vérité, il y a lieu de se fier à leur contenu. En l'occurrence, tous les passages sont documentés par des procès-verbaux figurant sur les commandements de payer ou des mentions dans les registres tenus par l'Office. Ils sont par conséquent prouvés.

La première tentative de notification, ordinaire, du commandement de payer n'a pas eu lieu le 19 décembre 2023, soit pendant les féries de Noël, comme le soutient la plaignante, mais le 4 janvier 2024, soit à une date postérieure aux féries de Noël, de sorte qu'elle est intervenue dans un temps où les actes de poursuite sont autorisés (art. 56 LP).

Contrairement à ce que soutient la plaignante, l'Office n'était pas tenu de remettre le commandement de payer qui lui était destiné à son mari, lorsque celui-ci s'est présenté sans procuration à l'Office, le 4 mars 2024. L'art. 64 LP prévoit la remise à une personne faisant ménage commun avec le débiteur à son domicile, dont son conjoint s'il s'y trouve. Il ne prévoit en revanche pas la remise au conjoint en dehors du domicile du débiteur. C'est par conséquent à raison que l'Office a refusé la remise du commandement de payer au conjoint de la plaignante le 4 mars 2024 lorsque celui-ci s'est présenté à ses guichets sans procuration.

La plaignante reproche à l'Office de ne pas avoir tenté de nouvelle notification à son domicile alors qu'il avait annoncé à son mari, le 4 mars 20214, qu'il le ferait. Cet allégué est contraire aux faits, un huissier s'étant présenté au domicile de la débitrice le 18 mars 2024 et n'y a pas trouvé l'intéressée, ni personne pour recevoir l'acte de poursuite. Il a par conséquent laissé un avis dans la boîte-aux-lettres à teneur duquel la notification du commandement de payer était désormais confiée à la Commune de E______. Les agents de cette dernière ont procédé à trois tentatives de notification. Ils n'ont certes pas laissé d'avis dans la boîte-aux-lettres – ce qu'ils ne sont pas censés faire, contrairement à La Poste – de sorte que la débitrice ne s'en est vraisemblablement pas rendue compte. Mais ces tentatives ont bien eu lieu valablement, sous réserve de ce qui suit. C'est en effet à raison que la plaignante reproche aux agents municipaux d'être passés une première fois le 5 avril 2024, soit durant les féries de Pâques (art. 56 LP), de sorte que cette visite est intervenue en temps prohibé. Il n'en demeure pas moins que deux visites ultérieures ont eu lieu en temps autorisé, de sorte que la tentative de notification par la commune a bien valablement eu lieu.

Le fait que les passages des différents agents notificateurs auraient eu lieu dans des périodes inopportunes du point de vue de la plaignante (horaires de travail, samedis, vacances scolaires) est sans pertinence. Il sera relevé que plusieurs passages ont eu lieu en dehors de ces périodes, notamment le soir, entre 19h et 20h, étant précisé que les notifications sont prohibées au-delà de 20h (art. 56 LP). Ce grief doit par conséquent également être écarté.

La plaignante reproche à l'Office de ne pas avoir tenté la notification sur son lieu de travail parmi les tentatives préalables à la notification par voie de publication. Si une telle notification fait bien partie des divers modes prévus par les art. 64 et ss LP, elle n'a pas été requise par le créancier poursuivant qui n'a pas mentionné d'adresse professionnelle, de sorte que l'Office n'avait pas à y procéder spontanément. Des démarches de l'Office en ce sens ne se justifiaient pas d'ailleurs puisque, comme l'a soulevé la plaignante elle-même, les actes de poursuite lui parvenaient normalement à son domicile de sorte que l'Office pouvait considérer que ses notifications pouvaient y être reçues, ce que confirment d'ailleurs les procès-verbaux des agents notificateurs qui ont constaté l'existence du domicile de la débitrice à l'adresse mentionnée par la créancière et que des avis ont pu y être déposés ou envoyés. Le fait que le mari de la débitrice se soit rendu le 4 mars 2024 à l'Office pour se faire remettre le commandement de payer, suite à la sommation déposée dans la boîte-aux-lettres, permet de retenir que la plaignante était informée de l'existence de la poursuite et n'ignorait pas les difficultés de notification rencontrées par l'Office. Elle n'a néanmoins rien fait pour favoriser les notifications suivantes, tentées à quatre reprises par l'Office et la commune, quand bien même un avis d'échec de notification lui a encore été remis le 18 mars 2024. Dans de telles circonstances l'Office pouvait considérer qu'elle se soustrayait obstinément à la notification d'un acte. Exiger de lui qu'il recherche encore une éventuelle adresse professionnelle et y procède à des notifications – au demeurant préjudiciables à la plaignante en sa qualité d'employée de banque – semble excessif, voire abusif.

Finalement, que la plaignante ne se soit pas attendue à une poursuite de la part de la créancière poursuivante, dont elle estime ne pas être la débitrice, n'est pas pertinent. Il n'appartient ni à l'Office ni à l'autorité de surveillance de s'intéresser au bienfondé de la créance en poursuite cette question relevant de la compétence du seul juge. Par ailleurs, le fait que la notification d'un acte de poursuite soit attendue ou non est sans effet sur l'application des règles en la matière, tout un chacun devant être atteignable par un tel acte. La plaignante peut de surcroît, en l'occurrence, difficilement soutenir de bonne foi avoir ignoré l'existence de la poursuite après les divers avis laissés dans la boîte-aux-lettres, ainsi que le passage de son époux à l'Office le 4 mars 2024.

En résumé, il ressort de l'instruction de la cause que les tentatives de notification du commandement de payer litigieux à la plaignante ont été nombreuses et qu'elle ne saurait soutenir ne pas en avoir été informée, même si elle n'a jamais été directement en contact avec un agent notificateur. Un avis de passage a été laissé par l'agent notificateur le 4 janvier 2024 dans la boîte-aux-lettres en vue d'un retrait au bureau postal. Une sommation de se rendre à l'Office pour remise d'un acte de poursuite a été envoyée par courrier A+ à la plaignante, reçue le 17 février 2024 dans sa boîte-aux-lettres. Son mari était pleinement informé de la poursuite et du commandement de payer qu'il a tenté de récupérer à l'Office le 4 mars 2024; à cet égard, rien à la procédure ne permet de considérer que les époux seraient en mauvais termes et qu'aucun échange d'information n'avait lieu entre eux. Un avis a encore été déposé dans la boîte-aux-lettres de la plaignante suite à la tentative infructueuse de notification du 18 mars 2024 par un huissier de l'Office, annonçant que la notification était désormais confiée à la commune. La plaignante n'allègue pas que son courrier ne lui parvient pas et conteste que celui-ci ne serait pas relevé, de sorte qu'il y a lieu de retenir qu'elle a reçu tous les avis susvisés. Dans de telles circonstances, la plaignante ne peut soutenir, sans abus de droit, même si en matière de poursuites cette notion juridique doit être appliquée avec retenue, qu'elle ignorait l'existence de la poursuite litigieuse, ni nier la soustraction obstinée à la notification d'un acte de poursuite.

La notification par voie de publication du commandement de payer était par conséquent fondée. Elle est valablement intervenue le ______ mai 2024. La plainte sera par conséquent rejetée en tant qu'elle concluait à titre principal au constat de la nullité de la poursuite, notamment de la notification du commandement de payer.

Il appartiendra à l'Office de se prononcer formellement sur la recevabilité de l'opposition formée au commandement de payer par la débitrice, puisqu'il a sursis à statuer sur objet, qui relève de sa compétence.

3. A titre subsidiaire, la plaignante sollicite la restitution du délai d'opposition.

Quand bien même la question apparaît prématurée, l'Office n'ayant pas encore formellement statué sur la recevabilité de l'opposition formée par la débitrice, la Chambre de surveillance statuera de manière anticipée cet objet afin d'éviter un prolongement ultérieur de la procédure. Elle est compétente pour octroyer une telle restitution (art. 33 al. 4 LP) et dispose des éléments pertinents pour le faire.

3.1 Le délai pour former opposition au commandement de payer, auprès de l'Office, est de dix jours dès sa notification (art. 74 al. 1 LP).

En application de l'article 33 al. 4 première phrase LP, quiconque a été empêché sans sa faute d'agir dans le délai fixé peut demander à l'autorité de surveillance ou à l'autorité judiciaire compétente qu'elle lui restitue ce délai. L'intéressé doit, à compter de la fin de l'empêchement, déposer une requête motivée dans un délai égal au délai échu et accomplir auprès de l'autorité compétente l'acte juridique omis (art. 33 al. 4 deuxième phrase LP).

Le délai d'opposition prévu par l'art. 74 al. 1 LP peut être restitué aux conditions de l'art. 33 al. 4 LP, soit lorsque le débiteur a été empêché sans sa faute d'agir en temps utile et que l'acte omis est accompli dans un délai égal au délai échu, courant à compter de la disparition de l'empêchement. Pour qu'un empêchement non fautif puisse être retenu, il faut que la partie n'ayant pas respecté le délai se soit trouvée, de manière imprévue et sans aucune faute de sa part, dans l'impossibilité non seulement d'accomplir elle-même l'acte omis mais également de mandater une tierce personne à cette fin. Il faut entendre par empêchement non fautif, non seulement l'impossibilité objective d'agir dans le délai ou de se faire représenter à cette fin, mais aussi l'impossibilité subjective due à des circonstances personnelles ou à une erreur excusable. Tel sera le cas, par exemple, en cas d'accident, de maladie grave et soudaine, de service militaire, de faux renseignement donné par l'autorité ou encore d'erreur de transmission. Un empêchement non fautif a également été admis en cas de soudaine incapacité de discernement ou de perte d'un proche. Une maladie de courte durée, une absence ou une surcharge de travail ne sont en revanche pas constitutives d'un empêchement non fautif. L'empêchement perdure aussi longtemps que l'intéressé n'est pas en mesure - compte tenu de son état physique ou mental - d'agir en personne ou d'en charger un tiers (ATF 119 II 86 consid. 2a; 112 V 255 consid. 2a; arrêts du Tribunal fédéral 5A_896/2012 du 10 janvier 2013 consid. 3.2; 5A_383/2012 du 23 mai 2012 consid. 2.2; 5A_231/2012 du 21 mai 2012 consid. 2; 5A_30/2010 du 23 mars 2012 consid. 4.1; 5A_566/2007 du 26 novembre 2007 consid. 3; 7B_64/2006 du 9 mai 2006 consid. 3; 7B_108/2004 du 24 juin 2004 consid. 2.2.1; 7B_190/2002 du 17 décembre 2002; Russenberger, Minet, KuKo SchKG, 2ème édition, 2014, n° 22 ad art. 33 LP; Nordmann, Berner Kommentar, SchKG I, n° 11 ad art. 33 LP; Erard, Commentaire Romand, Poursuites et faillites, 2005, n° 22 ad art. 33 LP).

3.2 En l'espèce, aucune circonstance au sens du considérant précédent n'est alléguée par la plaignante autorisant la restitution du délai d'opposition, de sorte que la requête subsidiaire de la plaignante en ce sens sera rejetée.

4. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

Les conclusions en paiement de dépens de l'intimée ne peuvent donc être allouées.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte de A______ contre la poursuite n° 2______.

Au fond :

La rejette.

Rejette la requête en restitution du délai d'opposition contre le commandement de payer, poursuite n° 2______.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Messieurs Alexandre BÖHLER et
Denis KELLER, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

Le président : La greffière :

Jean REYMOND Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.