Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites
DCSO/629/2024 du 13.12.2024 ( PLAINT ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE A/118/2024-CS DCSO/629/24 DECISION DE LA COUR DE JUSTICE Chambre de surveillance DU JEUDI 12 DECEMBRE 2024 |
Plainte 17 LP (A/118/2024-CS) formée en date du 12 janvier 2024 par A______.
* * * * *
Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :
- A______
______
______ ÉTATS-UNIS.
- B______ TRUST
c/o Me FATIO Guillaume
BMG Avocats
Avenue de Champel 8C
Case postale 385
1211 Genève 12.
- Office cantonal des poursuites.
A. a. A______, domicilié rue 1______ no. ______, [code postal] C______, Etats-Unis d'Amérique, est titulaire et/ou ayant droit économique d'actifs auprès de D______, à Genève, pour un montant de l'ordre de 2'700'000 fr., répartis sur quatre comptes, l'un ouvert à son nom (n° 2______), un autre au nom de la société E______ LTD (n° 3______), adossé à un dossier de titres comportant 16'000 actions F______, un autre au nom de la société G______ LTD (n° 4______) et un dernier au nom de l'épouse de A______, H______ (n° 5______), scindé en deux sous comptes, l'un en USD et l'autre en GBP.
b. Ces avoirs ont été séquestrés, le 1er juillet 2022 (séquestre n° 6______), sur requête de B______ TRUST qui s'est prévalue d'une créance de 888'704'766 fr. 30 à l'encontre de A______, fondée sur deux jugements rendus par la Queen's Bench Division, Cour commerciale, de la Haute Cour de justice d'Angleterre et du Pays de Galles des 23 janvier et 27 février 2020.
c. B______ TRUST a validé le séquestre susmentionné en requérant la poursuite de A______ (poursuite n° 7______). Un commandement de payer a été établi le 28 juillet 2022, notifié par voie diplomatique et remis au débiteur le 6 janvier 2023. Celui-ci a formé opposition à réception de cet acte.
d. L'opposition au commandement de payer a été levée par jugement JTPI/11669/2023 du 10 octobre 2023 du Tribunal de première instance (ci-après le Tribunal), communiqué non motivé aux parties le 12 octobre 2023.
A______ allègue avoir reçu ce jugement le 28 octobre 2023.
e. Il en a demandé la motivation par courrier du 31 octobre 2023, reçu le 13 novembre 2023 par le Tribunal.
f. Par jugement JTPI/45/2024 du 3 janvier 2024, le Tribunal a déclaré irrecevable la demande de motivation du jugement pour tardiveté, le jugement de mainlevée ayant été reçu le 21 octobre 2023 et le recours n'étant parvenu à la Poste suisse que le 11 novembre 2023.
Sur recours de A______ la Cour de justice a confirmé ce jugement par arrêt ACJC/720/2024 du 3 juin 2024.
g. B______ TRUST a requis la continuation de la poursuite le 3 novembre 2023 sur la base du jugement du 10 octobre 2023.
h. L'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office) a établi le 30 novembre 2023 un procès-verbal de saisie, série n° 81 8______, transformant en saisie définitive le séquestre du 1er juillet 2022.
Ce procès-verbal a été notifié à A______ par voie diplomatique et reçu le 5 janvier 2024 par l'intéressé.
B. a. Par courrier adressé le 26 septembre 2023 à l'Office, H______ a revendiqué l'intégralité des avoirs déposés sur les comptes ouverts à son nom auprès de [la banque] D______. Elle a également revendiqué la moitié des avoirs déposés au nom de G______ LTD et de A______.
b. L'Office a fixé, le 9 octobre 2023, un délai de 20 jours à B______ TRUST et A______ pour ouvrir action en contestation de la revendication de H______ sur les avoirs figurant sur les comptes à son nom.
B______ TRUST a informé l'Office le 6 novembre 2023 du dépôt d'une action en contestation de la revendication de H______.
c. Le 9 octobre 2023 toujours, l'Office a fixé un délai de dix jours à B______ TRUST et A______ pour contester la revendication de H______ sur les avoirs figurant sur les comptes et titres dont A______ et G______ LTD sont titulaires. B______ TRUST ayant contesté cette revendication le 23 octobre 2023, l'Office a fixé, le 25 octobre 2023, à H______, un délai de vingt jours pour ouvrir action.
H______ a informé l'Office le 27 novembre 2023 du dépôt d'une action en revendication.
C. a. Par acte parvenu le 12 janvier 2024 au Guichet universel du Pouvoir judiciaire à l'attention de la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance), A______ a formé une plainte contre le procès-verbal de saisie, série n° 81 8______, concluant au constat de sa nullité.
Il s'est opposé à la saisie effectuée par l'Office au motif que le jugement de mainlevée définitive de l'opposition formé au commandement de payer, poursuite n° 7______, n'était jamais devenu définitif, faute d'avoir été motivé, suite à sa demande. Il restait dans l'attente de cette motivation pour recourir contre ce jugement.
Par ailleurs, il reprochait à l'Office de ne pas avoir notifié les actes de poursuites à son épouse alors qu'ils étaient mariés sous le régime de la communauté de biens.
b. Dans ses observations du 26 janvier 2024, l'Office a conclu au rejet de la plainte.
Si le jugement de mainlevée n'était peut-être pas définitif lorsque la continuation de la poursuite avait été requise par la créancière, il était en tout état exécutoire de sorte que la poursuite pouvait se continuer. Par ailleurs, le fait que le débiteur et son épouse auraient été soumis au régime matrimonial de la communauté de biens aurait impliqué que l'Office communique les actes de poursuite au conjoint après avoir eu connaissance de ce régime; en revanche, il n'entraînait pas la nullité de la poursuite. En l'occurrence, l'épouse du plaignant était informée de tous les éléments de la poursuite, puisqu'elle avait revendiqué des biens saisis, de sorte que l'invocation aussi tardive de l'art. 68b al. 1 LP dans le processus d'exécution forcée était abusive, voire dilatoire. En tout état, le plaignant n'établissait pas la réalité du régime de la communauté de biens.
c. Dans ses observations du 6 février 2024, B______ TRUST a conclu à l'irrecevabilité de la plainte pour tardiveté, s'agissant de l'omission de la notification des actes de poursuite à l'épouse du plaignant, puisqu'il était informé depuis plus d'une année de l'existence de la poursuite et aurait dû s'en prévaloir à la notification du commandement de payer.
Sur le fond, elle concluait au rejet de la plainte.
Elle contestait que les époux A______/H______ fussent soumis au régime de communauté de biens au regard du droit international privé suisse, le droit de la Caroline du Sud, où étaient domiciliés le plaignant et son épouse, ne connaissant pas une telle institution (art. 14 et 57 LDIP); de surcroît, le plaignant ne fournissait aucune preuve de la soumission de son mariage à un tel régime, notamment au regard du droit russe, par la fourniture d'un contrat de mariage. En tout état, les droits de l'épouse du plaignant avaient été suffisamment sauvegardés par l'opposition formée par ce dernier et elle avait eu connaissance de l'ensemble des poursuites dans le cadre desquelles elle avait agi en revendication.
S'agissant de la continuation de la poursuite alors que l'opposition n'aurait pas été définitivement levée, la demande de motivation du jugement de mainlevée formée par A______ avait été déclarée irrecevable par jugement du 3 janvier 2024, de sorte que le prononcé de la mainlevée était désormais définitif et que la poursuite s'était ainsi valablement continuée.
d. Les observations des parties intimées (soit l'Office et B______ TRUST – ci-après l'intimée), de même que l'avis de la Chambre de surveillance selon lequel la cause était gardée à juger ont été communiqués par voie diplomatique au plaignant le 13 février 2024 et reçus par ce dernier le 8 avril 2024 selon avis du consulat suisse de I______ [Etats-Unis d'Amérique].
1. 1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de l'article 17 al. 1 LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre les mesures de l'Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire. L'autorité de surveillance doit par ailleurs constater, indépendamment de toute plainte et en tout temps
(ATF 136 III 572 consid. 4), la nullité des mesures de l'Office contraires à des dispositions édictées dans l'intérêt public ou dans l'intérêt de personnes qui ne sont pas parties à la procédure (art. 22 al. 1 LP).
1.2 La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP). Elle peut également être déposée en tout temps en cas de nullité de l'acte contesté (art. 22 al. 1 LP).
1.3 La qualité pour porter plainte selon l'art. 17 LP – condition de recevabilité devant être examinée d'office (GILLIERON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, n° 140 ad art. 17 LP) – est reconnue à toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés, ou à tout le moins atteinte dans ses intérêts de fait, par une mesure ou une omission d'un organe de la poursuite. Le plaignant doit dans tous les cas poursuivre un but concret; il doit être matériellement lésé par les effets de la décision attaquée et avoir un intérêt digne de protection à sa modification ou à son annulation
(ATF 139 III 384 consid. 2.1; 138 III 628 consid. 4; 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3, JdT 2004 II 96; 120 III 42 consid. 3; arrêts du Tribunal fédéral 5A_48/2022 du 10 mai 2022 consid. 4.2.1; 5A_483/2012 du 23 août 2012 consid. 5.3.1).
1.4 En l'occurrence, la plainte ne vise pas une mesure spécifique de l'Office. Le plaignant fait grief à ce dernier d'avoir permis à la poursuite de prospérer alors que : a) ses actes n'auraient pas été notifiés à l'épouse du débiteur, nonobstant la soumission de leur mariage au régime de la communauté de biens; b) le jugement de mainlevée ne serait pas encore définitif et exécutoire.
Lorsque la plainte a été déposée, les derniers actes accomplis par l'Office étaient déjà anciens de sorte que le délai de 10 jours pour former une plainte était déjà échu depuis ces derniers actes. Cela étant, les griefs invoqués par le plaignant conduisent à la nullité des actes de la poursuite s'ils devaient s'avérer fondés (cf. infra 3.1.2 et 4.1.1), de sorte que le respect du délai de plainte n'est pas pertinent en l'espèce.
La plainte est particulièrement sommaire et ne fournit que peu d'éléments pour statuer sur les deux griefs invoqués. Il n'en demeure pas moins que ceux-ci sont suffisamment clairement exprimés pour être examinés. Le caractère insuffisamment motivé de l'un ou l'autre des griefs soulevés sera néanmoins réévalué ci-après dans le cadre de leur examen au fond.
La question de la qualité pour porter plainte du débiteur s'agissant de l'absence notification des actes de la poursuite à son épouse sera analysée ci-dessous, dans le cadre de l'examen au fond de ce grief.
A ce stade, la plainte sera par conséquent considérée comme recevable sous les réserves susmentionnées.
2. L'autorité de surveillance constate les faits d'office, apprécie librement les preuves et ne peut, sous réserve de l'art. 22 LP, aller au-delà des conclusions des parties (art. 20a al. 2 ch. 2 et 3 LP).
La maxime inquisitoire découlant de cette disposition implique que l'autorité cantonale dirige la procédure, définisse les faits pertinents et les preuves nécessaires, ordonne l'administration de ces preuves et les apprécie d'office. Elle ne peut se contenter d'attendre que les parties lui demandent d'instruire ou lui fournissent spontanément les preuves idoines. Celles-ci ont néanmoins une obligation de collaborer (art. 20a al. 2 ch. 2 2ème phrase LP), qui implique en particulier qu'elles décrivent l'état de fait auquel elles se réfèrent et produisent les moyens de preuve dont elles disposent. Il en est ainsi, notamment, lorsque la partie saisit dans son propre intérêt l'autorité de surveillance ou qu'il s'agit de circonstances qu'elle est le mieux à même de connaître ou qui touchent à sa situation personnelle, surtout lorsqu'elle sort de l'ordinaire. A défaut de collaboration, l'autorité de surveillance n'a pas à établir des faits qui ne résultent pas du dossier (ATF 123 III 328 consid. 3; arrêts du Tribunal fédéral 5A_907/2021 du 20 avril 2022 consid. 7.2.1; 5A_378/2020 du 12 mars 2021 consid. 7.2; 5A_898/2016 du 27 janvier 2017 consid. 5.2; 5A_253/2015 du 9 juin 2015 consid. 4.1).
3. Le plaignant invoque le fait que la poursuite ne peut se continuer tant qu'un commandement de payer n'a pas été notifié à son épouse – avec laquelle il est soumis au régime de la communauté de biens – et que celui-ci n'est pas devenu exécutoire.
3.1 A teneur de l'art. 68a LP, lorsque la poursuite est dirigée contre un époux placé sous un régime de communauté, le commandement de payer et tous les autres actes de poursuite doivent être notifiés aussi au conjoint débiteur; s'il n'apparaît qu'au cours de la procédure que le débiteur est placé sous un régime de communauté, l'office procède sans délai à cette notification. Chaque époux peut faire opposition au commandement de payer.
Il n'existe pas de jurisprudence sur cette disposition et la doctrine est peu développée sur la sanction de la violation de cette norme. Elle a toutefois été édictée en même temps (1997) que l'art. 153 al. 2 let. b LP relatif à la poursuite en réalisation de gage qui prévoit qu'un exemplaire du commandement de payer est également notifié : (…) b. au conjoint ou au partenaire enregistré du débiteur (…) lorsque l'immeuble grevé est le logement de la famille ou le logement commun. L'art. 68a LP poursuit le même but de protection du conjoint dans la poursuite que l'art. 153 al. 2 let. b LP. La jurisprudence relative à cette seconde disposition est par conséquent pertinente pour l'interprétation de la première.
L'exécution d'un acte de poursuite qui ne se fonde pas sur un commandement de payer exécutoire heurte les principes fondamentaux de la poursuite pour dettes (ATF 109 III 53 consid. 2b). En conséquence, lorsque la réalisation de l'immeuble a été exécutée malgré l'absence de notification d'un commandement de payer au conjoint du débiteur en application de l'art. 153 al. 2 let. b LP, cette adjudication est nulle (arrêt 7B.141/2004 du 24 novembre 2004 consid. 6.2.2).
L'art. 153 al. 2 let. b LP (et l'art. 88 ORFI), rattaché aux effets généraux du mariage, est une conséquence de la protection instaurée par le législateur dans le droit de la famille à l'égard du conjoint, contre les actes de disposition de son époux sur le logement familial (arrêt du Tribunal fédéral 4P.264/2005 du 17 janvier 2006 consid. 5.2.3.1). Avec la notification du commandement de payer, l'époux acquiert la qualité de copoursuivi et peut ainsi former opposition au commandement de payer au même titre que le débiteur (ATF 142 III 720 consid. 4.2.1). Cet acte n'est qu'un double de celui qui a été signifié au débiteur (personnel) et il porte le même numéro, de sorte qu'il n'y a qu'une seule poursuite (arrêt du Tribunal fédéral 5A_366/2007 du 7 décembre 2007 consid. 4.1). Dans la poursuite en réalisation du gage, la notification du commandement de payer au conjoint du débiteur a pour but d'informer celui-ci de ses droits en lien avec une poursuite portant sur une créance qui ne le concerne pas. En cette matière, il n'y pas lieu de transiger sur le formalisme exigé par la LP et le conjoint peut se prévaloir du vice de procédure. Pour juger de sa bonne foi, il ne suffit donc pas de constater que le conjoint du débiteur ait connaissance de l'existence de la poursuite, mais bien plutôt de ses droits en lien avec celle-ci. La raison en est qu'être autorisé à faire opposition au même titre que le débiteur pour la mise en poursuite d'une créance dont on n'est pas le prétendu débiteur est une situation particulière en LP (arrêt du Tribunal fédéral 5A_825/2020 du 25 mars 2021 consid. 5).
L'interdiction de l'abus de droit est applicable à tout l'ordre juridique, y compris la LP (ATF 108 III 120 consid. 2). Néanmoins, le droit des poursuites est par nature un droit formaliste dont les règles prescrivent des actes définis aux effets précisément rigoureux (arrêt du Tribunal fédéral B.192/1996 du 16 octobre 1996 consid. 2). Au vu de ce formalisme, qui vaut aussi pour les autorités de poursuite, on ne peut admettre l'abus de droit à se prévaloir d'une règle de la LP que de manière restreinte (arrêt du Tribunal fédéral 5A_825/2020 du 25 mars 2021 consid. 5.2.1).
3.2 En l'espèce, le plaignant allègue l'existence d'un régime matrimonial de communauté de biens entre lui et son épouse. L'intimée et l'Office contestent l'existence d'un tel régime et soutiennent qu'il est en tout état abusivement invoqué à ce stade de la procédure.
Les principes ressortant de l'arrêt du Tribunal fédéral 5A_825/2020 précité rappellent qu'en matière de poursuite et de protection du conjoint la sanction est la nullité et que le recours à l'abus de droit est très limité. En outre, la contestation surgie sur l'existence du régime auquel le mariage des époux A______/H______ est soumis impliquerait que la Chambre instruise ce point et ne saurait se satisfaire du fait que le plaignant n'a pas spontanément fournis les moyens de preuve adéquats. Cela signifie que la seule invocation tardive et peu étayée du grief soulevé par le plaignant ne serait pas suffisante pour le rejeter sous l'angle de l'abus de droit comme le souhaiteraient l'Office et l'intimée.
Cela étant, force est de constater en l'espèce que la situation diffère sensiblement de l'état de fait de l'arrêt du Tribunal fédéral 5A_825/2020 précité en ce sens que dans ce dernier la protection du conjoint était invoquée par le conjoint qui en bénéficiait, soit en l'occurrence l'épouse, et que l'existence du droit à la protection du conjoint était établie.
Dans la présente cause, le plaignant se prévaut très opportunément de l'absence de notification de commandement de payer à son épouse à un stade avancé de la poursuite, sans produire la moindre pièce, ni exposer quelque circonstance que ce soit permettant d'admettre l'existence que son union serait soumise au régime de la communauté de biens. Une telle attitude permet de douter de son existence ou à tout le moins de sa portée dans la présente procédure, comme le soutient l'intimée. Aussi, nonobstant l'obligation d'instruire d'office, la Chambre estime que le plaignant, au vu des circonstances du cas d'espèce, ne pouvait de bonne foi se satisfaire d'alléguer que son mariage aurait été soumis au régime de la communauté de biens, sans fournir le moindre élément de preuve ni la moindre explication, et exiger que ce point soit instruit.
Par ailleurs, le plaignant n'est pas la personne protégée par l'art. 98a LP, de sorte que son intérêt à former une plainte sur cette base est inexistant et devrait conduire à l'irrecevabilité de la plainte sur ce point – ce qui ne dispense certes pas la Chambre d'examiner la violation de l'art. 98a LP qui est sanctionnée de nullité, constatable en tout temps et en l'absence de plainte (art. 22 al. 1 LP).
Mais surtout, l'épouse du plaignant, titulaire de la protection offerte par l'art. 98a LP, ne s'est pas prévalue de l'existence d'un régime de communauté de biens et de l'absence de notification d'un commandement de payer, bien qu'elle soit parfaitement informée de la poursuite et qu'elle y soit activement intervenue, assistée d'un avocat suisse, en agissant en revendication. De telles circonstances sont propres à faire définitivement douter du fait que l'union des époux A______/H______ serait réellement soumise à une communauté de biens invocable dans le cadre de l'art. 98a LP, de sorte qu'il faut en conclure que le plaignant invoque cet argument à des fins et selon un procédé dilatoires, ce qui ne saurait être admis au regard des règles sur l'abus de droit.
Il résulte de ce qui précède que la Chambre de surveillance rejettera la conclusion du plaignant visant au constat de la nullité des actes en continuation de la poursuite en raison de la violation de l'art. 98a LP.
4. Le plaignant soutient que l'Office avait accepté de continuer la poursuite alors que l'opposition qu'il avait formée au commandement de payer qui lui avait été notifié n'avait pas encore été définitivement levée.
4.1.1 En application de l'article 78 LP, l'opposition suspend la poursuite. Elle ne peut être reprise qu'une fois obtenue une décision exécutoire écartant expressément l'opposition (art. 79 et 88 LP).
Les actes effectués en continuation de la poursuite alors qu'elle est suspendue par l'opposition sont nuls (ATF 92 III 55 = JT 1966 II 66; Ruedin, Commentaire romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 2 ad art. 78 LP). Ainsi, une commination de faillite est nulle s'il s'avère ultérieurement que le prononcé de la mainlevée n'était pas encore en force au moment de sa notification ou qu'une action en libération de dette avait été introduite à temps (ATF 101 III 40 = JdT 1977 II 7, consid. 1; DCSO/270/2013 du 14 novembre 2013).
4.1.2 En application des articles 308 al. 2 et 319 let. a CPC, le jugement de mainlevée n'est susceptible que d'un recours au sens des articles 319 et ss CPC, lequel n'a pas d'effet suspensif (art. 325 CPC).
Une décision qui ne peut faire l'objet que du recours limité au droit des art. 319 ss CPC acquiert ainsi force de chose jugée et force exécutoire dès son prononcé, c'est-à-dire au moment où elle est rendue. La décision et sa date ne sont pas modifiées du fait que la motivation en est rédigée ultérieurement; en effet, seul sera motivé ce qui a déjà été décidé (ATF 142 III 695 consid. 4.2.1; 137 III 127 consid. 2). La décision de mainlevée provisoire prend donc date au moment où elle est arrêtée par le tribunal et elle acquiert force de chose jugée et force exécutoire à ce moment-là (arrêt du Tribunal fédéral 4A_61/2023 du 25 juin 2024 consid. 5.2.1 et 5.2.2).
4.2 En l'espèce, l'Office était ainsi autorisé à continuer la poursuite sur le vu du jugement non motivé de mainlevée de l'opposition, lequel est resté exécutoire jusqu'à ce qu'il devienne définitif, après que la Cour de justice a définitivement statué sur la recevabilité de la demande de motivation. Le plaignant n'a jamais requis d'effet suspensif à sa demande.
5. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).
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La Chambre de surveillance :
A la forme :
Déclare recevable la plainte formée le 12 janvier 2024 par A______ contre le procès-verbal de saisie, série n° 81 8______.
Au fond :
La rejette.
Siégeant :
Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Ekaterine BLINOVA et Monsieur Anthony HUGUENIN, juges assesseurs ; Madame Elise CAIRUS, greffière.
Le président : Jean REYMOND |
| La greffière : Elise CAIRUS |
Voie de recours :
Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.