Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/892/2024 du 10.09.2024 ( LCR ) , REJETE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 10 septembre 2024
|
dans la cause
Monsieur A______
contre
OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES
1. Monsieur A______, né le ______ 1996, est titulaire d'un permis de conduire depuis 2017. Il exerce la profession de livreur.
2. Il ressort du rapport de renseignements établi le 12 mai 2024 par l'unité routière de la gendarmerie qu'en date du 27 mars 2024, à 2h50, M. A______ a fait l'objet d'un contrôle alors qu'il circulait au volant d'une voiture de livraison sur la route de La-Capite en direction du chemin de la Mairie. Les policiers ont soumis l'intéressé à un test salivaire drugwipe qui s'est révélé positif au cannabis.
Sur ordre du commissaire de police, des prélèvements sanguins et urinaires ont été effectués par un médecin.
Lors de son audition par la police, M. A______ a déclaré avoir uniquement consommé du CBD. Sa dernière consommation remontait à 24 heures environ soit le 26 mars 2024 aux alentours de 2h00.
Le permis de conduire de l'intéressé a été saisi par la police le même jour.
3. Le 4 avril 2024, l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) a fait savoir à M. A______ que les autorités de police avaient porté à sa connaissance l'infraction du 27 mars précédent et qu'une mesure administrative pourrait être prise à son encontre, indépendamment de toute amende ou autre sanction pénale, de sorte qu'un délai de quinze jours lui était imparti pour produire ses observations écrites, notamment quant à sa consommation de stupéfiants.
4. M. A______ n'a pas donné suite au courrier du 4 avril 2024.
5. En date du 6 avril 2024, l’OCV lui a provisoirement restitué son permis de conduire.
6. Dans son rapport d'expertise toxicologique établi le 29 avril 2024, l'unité de toxicologie et de chimie forensiques du Centre Universitaire Romand de médecine légale (ci-après : CURML) est parvenue à la conclusion suivante :
« Les analyses des échantillons biologiques contenus dans les tubes sous la référence 1______ (A______) ont révélé la présence dans le sang de THC et de THC-COOH.
Les résultats sont indicateurs d'une consommation récente de cannabis et la concentration de THC déterminée dans le sang (3,6 µg/l) est supérieure à la valeur limite définie par l'OFROU (1,5 µg/l).
À l'intention de l'autorité administrative, selon l'annexe 8 (ch. 2) des instructions de l'OFROU concernant la constatation de l'incapacité de conduire dans la circulation routière et selon les résultats obtenus dans le cas présent, nous recommandons qu'une évaluation de l'aptitude à conduire soit effectuée ».
7. Par décision déclarée exécutoire nonobstant recours du 24 mai 2024, prise en application des art. 15d al. 1 let. b de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01) et 30 de l'ordonnance réglant l'admission des personnes et des véhicules à la circulation routière du 27 octobre 1976 (OAC - RS 741.51), l'OCV a retiré le permis de conduire toutes catégories, sous catégories et catégories spéciales de M. A______ à titre préventif et pour une durée indéterminée. Il lui était également interdit de conduire des cycles et des véhicules pour lesquels un permis de conduire n'était pas nécessaire au sens de l'art. 5 al. 2 OAC pendant la durée de la mesure. Une expertise visant à évaluer son aptitude à la conduite auprès d'un médecin de niveau 4 était par ailleurs ordonnée.
Il était reproché à M. A______ une conduite dans l'incapacité de conduire du fait de l'absorption de stupéfiants, l'expertise toxicologique ayant révélé une concentration de THC dans le sang supérieure à la valeur limite définie par l'OFROU.
M. A______ ne justifiait pas d'une bonne réputation, le système d'information relative à l'admission à la circulation (SIAC) faisant apparaître une décision imposant un délai d'attente avant toute délivrance d'un permis d'élève conducteur ou d'un permis de conduire prononcée le 6 août 2012 et un retrait du permis de conduire à l'essai avec prolongation de la période probatoire, prononcé par décision du 30 juillet 2019, en raison d'une infraction grave.
L'intéressé n'avait pas présenté d'observations et l'examen du dossier incitait l'autorité à concevoir des doutes sérieux quant à son aptitude à la conduite des véhicules à moteur.
8. Par acte du 3 juin 2024, M. A______ a formé recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision.
Lors du contrôle, il était exclusivement sous l'influence de CBD légal, acheté dans les commerces locaux. Il ignorait que la consommation de CBD pouvait influer sur le taux de THC et avait été très surpris du résultat des analyses ayant révélé un taux de THC de 3,6 µg/l. Il n'avait jamais été informé de cette possible influence, notamment lors des cours de sensibilisation à la conduite obligatoire.
Par ailleurs, il avait récemment retrouvé un emploi de chauffeur-livreur qui lui avait permis de retrouver son indépendance financière. Il sollicitait la possibilité de conserver son permis jusqu'à l'obtention des résultats des examens médicaux requis. Il s'engageait à ne plus jamais consommer de CBD avant de prendre le volant.
9. En date du 12 juin 2024, l'OCV s'est opposé à la restitution de l'effet suspensif au recours. La sécurité routière représentait un intérêt public prépondérant à celui de M. A______ à recouvrer son droit de conduire tant que les doutes quant à son aptitude à la conduite n'avaient pas été dissipés, compte tenu du danger considérable que représentait un conducteur s'adonnant à la consommation de substances stupéfiantes pour les autres usagers de la route. À cet égard rien ne permettait de dissiper ces doutes en l'état du dossier.
10. Le recourant n'a pas répliqué sur la question de l'effet suspensif.
11. Par décision du 10 juillet 2024 (DITAI/390/2024), le tribunal a rejeté la demande d'effet suspensif au recours.
12. En date du 29 juillet 2024, l'OCV a présenté ses observations sur le fond. Il a conclu au rejet du recours et à la confirmation de sa décision.
13. Le recourant n'a pas répliqué dans le délai imparti.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal des véhicules (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
3. Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.
Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).
4. Selon l'art. 14 al. 1 LCR, tout conducteur de véhicule automobile doit posséder l’aptitude et les qualifications nécessaires à la conduite. Est apte à la conduite, aux termes de l'art. 14 al. 2 LCR, celui qui a atteint l’âge minimal requis (let. a), a les aptitudes physiques et psychiques requises pour conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. b), ne souffre d’aucune dépendance qui l’empêche de conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. c) et dont les antécédents attestent qu’il respecte les règles en vigueur ainsi que les autres usagers de la route (let. d).
5. Si l'aptitude à la conduite soulève des doutes, la personne concernée fait l'objet d'une enquête dans les cas énumérés de manière non exhaustive à l'art. 15d al. 1 let. a à e LCR (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.1). Un examen d'aptitude est en particulier ordonné, selon l'art. 15d al. 1 let. b LCR, en cas de conduite sous l'emprise de stupéfiants ou de transport de stupéfiants qui altèrent fortement la capacité de conduire ou présentent un potentiel de dépendance élevé.
6. Les faits objet des hypothèses de l’art. 15d al. 1 LCR fondent un soupçon préalable que l'aptitude à la conduite pourrait être réduite (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.1 ; ATA/1138/2017 du 2 août 2017 consid. 5d et la référence). Si des indices concrets soulèvent des doutes quant à l'aptitude à la conduite de la personne concernée, un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un médecin et/ou un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un psychologue du trafic doivent être ordonnés (art. 28a al. 1 OAC ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_41/2019 du 4 avril 2019 consid. 2.1 ; 1C_76/2017 du 19 mai 2017 consid. 5 ; cf. aussi ATF 139 II 95 consid. 3.5).
7. Est tenu de s'abstenir de conduire quiconque n'en est pas capable, parce qu'il est surmené, sous l'effet de l'alcool, d'un médicament, d'un stupéfiant ou pour toute autre raison (art. 2 al. 1 de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière du 13 novembre 1962 - OCR - RS 741.11).
8. Un conducteur est notamment réputé incapable de conduire chaque fois qu'il est prouvé que son sang contient du tetrahydrocannabinol (THC / cannabis) (art. 2 al. 2 let. a OCR). En vertu de la compétence que lui confère l'art. 2 al. 2bis OCR, l'OFROU a retenu que la présence de THC est considérée comme prouvée lorsque sa quantité dans le sang atteint ou dépasse la valeur de 1,5 µg/l (art. 34 let. a de l'ordonnance de l'OFROU concernant l'ordonnance sur le contrôle de la circulation routière du 22 mai 2008 - OOCCR-OFROU - RS 741.013.1), ce qui conduit à poser qu'au-delà de cette valeur, l'incapacité de conduire est présumée de manière irréfragable (arrêt du Tribunal fédéral 6B_136/2010 du 2 juillet 2010 consid. 2.3.2 ; cf. aussi arrêt 6B_743/2012 du 14 février 2013 consid. 1.5).
9. La consommation de cannabis, même si elle n'est qu'occasionnelle et ne porte que sur de faibles quantités, est susceptible d'altérer l'aptitude à conduire. Il peut, par exemple, en résulter une diminution de l'acuité visuelle dynamique, un allongement du temps de réaction, une altération de la capacité de coordination ou encore une diminution de la précision des automatismes de conduite. Parmi les erreurs de conduite typiques, on peut citer les difficultés à tenir sa ligne, l'éloignement de sa voie de circulation, la mauvaise appréciation des manoeuvres de dépassement, la confusion entre limites extérieures et intérieures de la route, l'augmentation de la fréquence des collisions et les excès de vitesse (ATF 130 IV 32 consid. 5.2 ; 124 II 559 consid. 3c/aa et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_41/2019 du 4 avril 2019 consid. 2.1 ; 6A.84/2003 du 27 janvier 2004 consid. 3.1.2).
10. Cela étant, selon la jurisprudence, une consommation régulière, mais contrôlée et modérée de haschisch ne permet pas à elle seule de conclure à l'inaptitude à conduire (ATF 130 IV 32 consid. 5.2 ; 127 II 122 consid. 4b ; 124 II 559 consid. 4d et e ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_41/2019 du 4 avril 2019 consid. 2.1). La consommation de stupéfiants est considérée comme une dépendance aux drogues, au sens des dispositions précitées, lorsque sa fréquence et sa quantité diminuent l'aptitude à conduire et qu'il existe un risque majeur que l'intéressé se mette au volant d'un véhicule dans un état qui, partiellement ou de manière durable, compromet la sûreté de sa conduite et ne permet plus d'assurer la sécurité de la circulation (cf. ATF 129 II 82 consid. 4.1 ; 127 II 22 consid. 3c ; 124 II 559 consid. 3d ; 120 Ib 305 consid. 3c ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_819 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 1C_328/2013 du 18 septembre 2013 consid. 3.1 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.1). Ainsi, un défaut d'aptitude à conduire peut être admis lorsque la personne considérée n'est plus capable de séparer de façon suffisante sa consommation de cannabis et la conduite d'un véhicule automobile, ou s'il y a un risque important qu'elle conduise un véhicule automobile sous l'effet aigu de cette drogue (ATF 129 II 82 consid. 4.1 ; 127 II 22 consid. 3c ; 124 II 559 consid. 3d ; arrêts du Tribunal fédéral 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3b). En d'autres termes, ces conditions sont remplies lorsque le consommateur n'est plus en mesure de s'abstenir lorsqu'il doit conduire (cf. ATF 127 II 122 consid. 3c ; 124 II 559 consid. 3d et 4e ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_819 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 1C_328/2013 du 18 septembre 2013 consid. 3.1 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.1 ; 6A.84/2003 du 27 janvier 2004 consid. 4.1 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3b). Il convient ainsi d'analyser les habitudes de consommation de l'intéressé, notamment la fréquence, la quantité et les circonstances. Il faut également tenir compte de l'éventuelle absorption d'autres substances stupéfiantes et/ou d'alcool, ainsi que de la personnalité du consommateur, en particulier en ce qui concerne l'abus de drogues et son comportement en tant que conducteur (ATF 128 II 335 consid. 4b ; 124 II 559 consid. 4e et 5a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_41/2019 du 4 avril 2019 consid. 2.1 ; 1C_618/2015 du 7 mars 2016 consid. 2 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.2).
11. Comme évoqué plus haut, si des indices concrets soulèvent des doutes quant à l'aptitude à la conduite de la personne concernée, un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un médecin et/ou un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un psychologue du trafic doivent être ordonnés (art. 28a al. 1 OAC ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_41/2019 du 4 avril 2019 consid. 2.1 ; 1C_76/2017 du 19 mai 2017 consid. 5) et le permis de conduire doit alors en principe être retiré par mesure de précaution, conformément à l'art. 30 OAC (ATF 125 II 396 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_41/2019 du 4 avril 2019 consid. 2.1 ; 1C_144/2017 du 2 juin 2017 consid. 2.3 ; 1C_434/2016 du 1er février 2017 consid. 2.1 ; 1C_404/2007 du 7 mars 2008 consid. 2.4 ; ATA/1138/2017 du 2 août 2017 consid. 5e), quitte à ce que l'autorité rapporte ensuite cette mesure s'il s'avère, après expertise, qu'elle n'était pas justifiée (ATF 125 II 396 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_219/2011 du 30 septembre 2011 consid. 2.2-2.4 ; 1C_420/2007 du 18 mars 2008 consid. 3.4 ; 1C_404/2007 du 7 mars 2008 consid. 2.4 ; 6A.17/2006 du 12 avril 2006 consid. 3.2 ; ATA/1138/2017 du 2 août 2017 consid. 5e).
12. Aux termes de l'art. 30 OAC, le permis de conduire peut être retiré à titre préventif lorsqu'il existe des « doutes sérieux » (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1) quant à l'aptitude à conduire de l'intéressé.
Il s'agit d'une mesure provisoire destinée à protéger les intérêts menacés jusqu'à l'issue de la procédure principale portant sur un retrait de sécurité. En effet, vu l'importance du risque inhérent à la conduite des véhicules automobiles, il s'impose qu'un conducteur puisse se voir retirer son permis à titre préventif dès que des indices autorisent à penser qu'il représente un risque particulier pour les autres usagers de la route et font douter sérieusement de sa capacité à conduire. Une preuve stricte n'est pas nécessaire. En effet, si une telle preuve était apportée, c'est un retrait de sécurité qu'il y aurait lieu d'ordonner sans plus attendre. Au contraire, le retrait préventif intervient, par définition, avant que tous les éclaircissements nécessaires pour juger de la nécessité d'un retrait de sécurité aient été obtenus. Pour décider d'un retrait préventif, l'autorité doit donc se fonder sur les éléments dont elle dispose en l'état. La prise en considération de tous les éléments plaidant pour ou contre l'aptitude de l'intéressé à la conduite de véhicules automobiles interviendra à l'issue de la procédure au fond (cf. ATF 125 II 492 consid. 2b ; 122 II 359 consid. 3a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_154/2018 du 4 juillet 2018 consid. 4.2 ; 1C_514/2016 du 16 janvier 2017consid. 2.2 ; 1C_768/2013 du 10 mars 2014 consid. 3.1 ; 1C_173/2009 du 27 mai 2009 consid. 3.1 in JdT 2009 I 520 ; ATA/1138/2017 du 2 août 2017 consid. 5c).
Les exigences liées à la mise en œuvre d'un examen d'aptitude ne sont pas les mêmes que celles prévalant en matière de retrait préventif, même si, en pratique, les deux mesures vont, dans un premier temps du moins, souvent de pair (cf. ATF 125 II 396 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.4.2 ; 1C_404/2007 du 7 mars 2008 consid. 2.4 ; ATA/390/2018 du 24 avril 2018 consid. 3b). Alors que l'ouverture d'une enquête peut être ordonnée en présence d'indices suffisants pour que se pose la question de l'aptitude à conduire (cf. ATF 139 II 95 consid. 3.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.4.2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1), une décision de retrait préventif du permis de conduire suppose, quant à elle, l'existence de « doute sérieux » sur l'aptitude de conduire de l'intéressé (art. 30 OAC). A l'inverse, une clarification de l'aptitude intervient généralement sans retrait préventif lorsqu'il n'existe pas de danger immédiat pour la circulation routière (arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.4.2 et la référence citée ; cf. aussi arrêt 1C_593/2012 consid. 3.3 ; ATA/390/2018 du 24 avril 2018 consid. 3b).
En définitive, il appartient à l'autorité cantonale d'apprécier dans chaque cas d'espèce si le principe de la proportionnalité autorise un retrait préventif ou s'il commande d'y renoncer en considérant qu'il paraît peu vraisemblable que le conducteur présente un danger particulièrement important et menaçant pour les autres usagers de la route (ATA/390/2018 du 24 avril 2018 consid. 3b ; ATA/1138/2017 du 2 août 2017 consid. 5d et les références citées).
13. En l'espèce, il n'appartient pas au tribunal, à ce stade, de se déterminer sur la question de l'aptitude à la conduite du recourant, à laquelle l'expertise ordonnée par l'OCV devra répondre. La prise en considération de tous les éléments plaidant pour ou contre cette aptitude aura en effet lieu à l'issue de cette procédure. La seule question qui se pose en l'état revient à savoir s'il existe effectivement ou non des doutes, voire des « doutes sérieux » quant à l'aptitude à conduire du recourant, susceptibles de justifier l'ordonnance d'une expertise, respectivement le retrait préventif qui lui a été faite.
Or, le recourant a été interpellé le 27 mars 2024 alors qu'il conduisait sous l'influence du cannabis. L'expertise toxicologique effectuée sur les prélèvements opérés suite à cette interpellation indique que la concentration de THC déterminée dans son sang (3,6 µg/l) était alors plus de deux fois supérieure à la valeur limite fixée par l'art. 34 let. a OOCCR-OFROU (1,5 µg/l), ce qui suffit en principe à faire naître des doutes quant à l'aptitude d'une personne à conduire (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_41/2019 du 4 avril 2019 consid. 2.2). Dans leurs conclusions, les experts recommandent d'ailleurs « qu'une évaluation de l'aptitude à conduire soit effectuée ». Par ailleurs, le recourant n'a donné aucune explication quant à sa consommation de cannabis et partant aucune indication suffisante quant à une absence de dépendance et à sa capacité à la conduite.
Face à de tels éléments, l'OCV pouvait à juste titre émettre des doutes sérieux quant à l'aptitude à la conduite du recourant. Il était donc fondé à lui retirer à titre préventif son permis de conduire. En regard de l'intérêt public à la protection des usagers de la route, largement prépondérant, l'atteinte à l'intérêt privé du recourant demeure faible et reste encore, par voie de conséquence, proportionnée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.3 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.4 ; 6A.17/2006 du 12 avril 2006 consid. 3.2 in fine).
C'est aussi à juste titre que l'OCV a fait obligation au recourant de se soumettre à une expertise auprès du CURML pour que celui-ci évalue son aptitude à la conduite avant qu'une décision finale soit prise, étant souligné qu'en cas de mesure préventive prise en application de l'art. 30 OAC, une expertise doit être exécutée dans les meilleurs délais afin que le droit de conduire puisse être restitué au plus vite à son titulaire s'il n'y a pas lieu de prononcer un retrait (une interdiction de circuler en Suisse) de sécurité (cf. ATF 125 II 396 consid. 3 ; 106 Ib 115 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_404/2007 du 7 mars 2008 consid. 2.4 ; 6A.48/2004 du 26 août 2004 consid. 2.3 ; 6A.114/2000 du 20 février 2001 consid. 4a ; cf. aussi arrêt 1C_195/2013 du 20 mars 2013 consid. 3.2-3.4).
Dès lors, la décision querellée ne prête pas le flanc à la critique et ne peut qu’être confirmée.
14. Le recours, mal fondé, sera rejeté.
15. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.
Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 3 juin 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 24 mai 2024 ;
2. le rejette;
3. met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.
Genève, le |
| La greffière |