Skip to main content

Décisions | Chambre Constitutionnelle

1 resultats
A/3225/2019

ACST/30/2019 du 17.10.2019 ( ELEVOT ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3225/2019-ELEVOT ACST/30/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre constitutionnelle

Arrêt du 17 octobre 2019

 

dans la cause

 

GROUPE MCG VERNIER

et

Monsieur A______

contre

CONSEIL D'ÉTAT

et

Monsieur B______


EN FAIT

1. Lors de l'élection au conseil municipal (ci-après : le conseil municipal) de la commune de Vernier (ci-après : la commune) du 19 avril 2015, la liste n° 5 « MCG, INDÉPENDANTS, L'ENTENTE POUR VERNIER » comprenant 31 candidats a obtenu 12 sièges sur 37 pour la législature 2015-2020. Monsieur B______, né en 1970 et domicilié à Vernier, figurait parmi les élus sur cette liste.

2. Au cours de l'année 2016, M. B______ a démissionné de ses fonctions de conseiller municipal de la commune.

3. Dans un communiqué de presse du 27 mars 2019, le Conseil d'État a fixé au 15 mars 2020 la date de l'élection des conseils municipaux et du premier tour de l'élection des exécutifs communaux.

4. Par courrier du 11 juin 2019, Monsieur C______, conseiller municipal de la liste n° 5, a annoncé sa démission pour le 27 juin 2019. Le secrétariat général de la commune en a informé le service des votations et élections (ci-après : SVE) le 12 juin 2019.

5. Par courrier du 13 juin 2019, le SVE a informé Monsieur D______ qu'en sa qualité de premier des « viennent-ensuite » sur la liste « MCG, INDÉPENDANTS, L'ENTENTE POUR VERNIER », il était appelé à remplacer M. C______. Il lui était ainsi demandé d'indiquer s'il acceptait le mandat. Le SVE a réitéré sa demande par courrier recommandé du 29 juillet 2019, précisant que sans réponse de sa part au 13 septembre 2019, il serait considéré comme démissionnaire de la liste des « viennent-ensuite ». Ce courrier n'ayant pas été retiré par M. D______, le SVE le lui a fait parvenir par courrier A le 13 août 2019.

6. Le 13 août 2019, M. B______ a remis en mains propres au SVE les déclarations de renonciation des « viennent-ensuite » de la liste n° 5. Les documents comprenaient une lettre manuscrite de M. D______ datée du 2 août 2019, par laquelle ce dernier avait déclaré avoir pris la décision de renoncer à son mandat de conseiller municipal de la ville de Vernier, ainsi que six déclarations de renonciation datées du 5 août 2019 et signées par Monsieur E______, Madame F______, Madame G______, Madame H______, Monsieur I______ et Madame J______.

7. Le 14 août 2019, le SVE a remis en mains propres à M. B______ en sa qualité de « mandataire remplaçant » un courrier daté du 7 août 2019 adressé à Madame K______, ancienne cheffe de groupe du parti « MCG, INDÉPENDANTS, L'ENTENTE POUR VERNIER » et membre du conseil municipal de la commune de Vernier. Dans ce courrier, le SVE a détaillé la procédure d'élection applicable en vertu de l'art. 164 de la loi sur l'exercice des droits politiques du 15 octobre 1982 (LEDP - A 5 05). Il a notamment indiqué que les signataires de la liste initiale n° 5 « MCG, INDÉPENDANTS, L'ENTENTE POUR VERNIER » disposaient d'un droit prioritaire au dépôt d'une candidature, dont l'élection aurait lieu sans scrutin dans les trois mois suivant la demande de remplacement. Audit courrier étaient jointes une nouvelle formule de dépôt à remplir et à faire signer par le candidat, ainsi qu'une liste vierge des déposants de la liste de candidature.

8. Le 16 août 2019, M. B______ a déposé au SVE une « liste de candidature » pour sa propre élection complémentaire à la fonction de membre du conseil municipal de la commune. Cette liste était datée du 16 août 2019 et signée par Monsieur L______, dont le nom figurait, barré, en tant que « déposant responsable ». Elle comportait 25 signatures d'électeurs, dont 13 de la liste des déposants du 19 avril 2015. Parmi les signataires de la liste initiale figuraient M. L______ (en tête de liste), M. B______ (en deuxième position) et M. D______. La liste contenait en bas de page un texte pré-imprimé selon lequel « les signataires de chaque liste de candidature désignent parmi eux un-e mandataire et son/sa remplaçant-e, chargés des relations avec les autorités. Si aucun-e mandataire n'a été désigné-e, l'électeur-trice dont le nom figure en tête des signataires est considéré-e comme mandataire et le/la suivant-e comme son/sa remplaçant-e ».

9. Par arrêté du 4 septembre 2019, publié dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 6 septembre 2019, le Conseil d'État a déclaré M. B______ élu sans scrutin à la fonction de conseiller municipal de la commune.

10. Par acte déposé le 6 septembre 2019, enregistré sous la cause A/3225/2019, le Groupe MCG Vernier, représenté par Monsieur M______, conseiller municipal de la commune de la liste n° 5, a interjeté recours auprès de la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : la chambre constitutionnelle) contre cet arrêté, concluant à son annulation sous suite de frais et dépens, ainsi qu'à la validation de la nomination de M. D______ en qualité de conseiller municipal de la commune. À titre préalable, il a conclu à ce que la chambre constitutionnelle « annonce sans délai l'effet suspensif aux autorités de Vernier ».

Il a allégué en substance que M. D______, qui était le premier des « viennent-ensuite » à la suite de la démission de M. C______, avait accepté le mandat au cours d'un entretien téléphonique avec M. M______ le 31 juillet 2019. Lors d'une visite à son domicile le 2 août 2019, M. B______ avait cependant obtenu « par astuce » qu'il renonce à son mandat. Il aurait tenu des propos désobligeants à son égard, ce qui revenait à « jeter le discrédit d'une volonté populaire ».

À l'appui de son recours, il a produit une attestation datée du 3 septembre 2019 et signée par M. D______, dans laquelle ce dernier a expliqué avoir été contacté par M. M______ le 31 juillet 2019 au sujet du poste laissé vacant par M. C______. À cette occasion, M. D______ avait dit vouloir accepter le mandat. Il avait été prévu que M. M______ rédige le courrier destiné au SVE et le présente à M. D______ pour signature le 5 août suivant. Entre-temps, soit le 2 août 2019, M. B______ était venu le voir à son domicile pour le dissuader d'accepter ce mandat. Il lui avait expliqué qu'il ne restait plus que six mois dans cette législature, de sorte qu'il convenait d'élire « une personne déjà expérimentée à la chose politique ». Pensant que « cette action pouvait contenir une certaine compréhension », il avait signé une lettre de renonciation qui avait été préparée à l'avance. Il avait appris par la suite que M. B______ avait agi pour son « intérêt personnel dans ses futurs engagements politiques sur la commune de Vernier ». Il confirmait dès lors qu'il maintenait « fermement le souhait d'entreprendre cette expérience au sein de l'hémicycle verniolan ».

11. Par acte déposé le 11 septembre 2019 auprès de la chambre constitutionnelle et enregistré sous la cause A/3285/2019, Monsieur A______, conseiller municipal de Vernier de la liste n° 5, a également formé recours contre l'arrêté du Conseil d'État du 4 septembre 2019. Il a conclu à son annulation, « sous suite de frais et dépens », ainsi qu'à la validation de la nomination de M. D______ en qualité de conseiller municipal de la commune. Il a sollicité l'audition de Messieurs D______, E______ et N______, Mesdames O______, P______, F______ et G______, Monsieur Q______ et Mesdames H______, I______ et J______. Il a également conclu, à titre préalable, à ce que la chambre constitutionnelle « annonce sans délai l'effet suspensif aux autorités de Vernier ».

12. Le 11 septembre 2019, invité à se déterminer sur l'effet suspensif requis dans la cause A/3225/2019, le Conseil d'État a répondu que le recours déployait effet suspensif de plein droit, de sorte que son arrêté n'était pas exécutoire.

13. Par décisions ACST/26/2019 et ACST/27/2019 du 12 septembre 2019, la présidence de la chambre constitutionnelle a constaté que les deux recours avaient effet suspensif et réservé le sort des frais des procédures jusqu'à droit jugé au fond.

14. Le 19 septembre 2019, le Conseil d'État a répondu aux deux recours. Il a indiqué avoir respecté la procédure décrite aux art. 164 à 166 LEDP, s'en remettant pour le surplus à l'appréciation de la chambre constitutionnelle. Il a notamment produit le courrier de renonciation de M. D______ du 2 août 2019, ainsi que la liste de candidature déposée au SVE le 16 août 2019 par M. B______.

15. Le 26 septembre 2019, M. B______ s'est rallié à la position et aux conclusions du Conseil d'État.

16. Dans ses observations du 4 octobre 2019, M. A______ a persisté dans les conclusions de son recours. Il a fait valoir que la « liste de candidature » du 16 août 2019 comportait des vices de forme, de sorte qu'elle n'était pas recevable. M. B______ n'avait pas la légitimité pour représenter le groupe des élus de Vernier, ce rôle étant attribué au chef de groupe. Il a notamment produit un courrier du 2 octobre 2019 du secrétariat général de la commune attestant de ce que M. M______ occupait la fonction de chef de groupe du parti « MCG, INDÉPENDANTS, L'ENTENTE POUR VERNIER » du 14 novembre 2018 au 1er octobre 2019, son successeur étant M. A______. Le courrier précisait en outre que cette fonction avait pour but d'assurer le lien entre le secrétariat général de la commune et les différents représentants du groupe politique.

17. M. M______ s'est déterminé le 7 octobre 2019, reprenant pour l'essentiel les observations de M. A______.

18. Le 7 octobre 2019, le Conseil d'État a indiqué n'avoir pas d'observations complémentaires.

19. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. a. Selon l'art. 124 let. b de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00), la Cour constitutionnelle - à savoir la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (art. 1 let. h ch. 3 1er tiret de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05) - est compétente pour traiter les litiges relatifs à l'exercice des droits politiques en matière cantonale et communale. Concrétisant cette norme constitutionnelle par le biais de la loi 11311 du 11 avril 2014 mettant en oeuvre la Cour constitutionnelle, le législateur a prévu que la chambre constitutionnelle connaît des recours en matière de votations et d'élections (art. 130B al. 1 let. b LOJ) ainsi qu'en matière de validité des initiatives populaires (art. 130B al. 1 let. c LOJ), et il a transféré à la chambre constitutionnelle, par une modification de l'art. 180 LEDP, la compétence qu'avait jusqu'alors la chambre administrative de la Cour de justice de connaître des recours ouverts contre les violations de la procédure des opérations électorales indépendamment de l'existence d'une décision (art. 180 aLEDP ; ACST/23/2018 du 9 novembre 2018 consid. 2 et les références citées ; Michel Hottelier, Le recours pour violation des opérations électorales en droit genevois, in Hottelier/Hertig Randall/Flückiger, Études en l'honneur du Professeur Thierry Tanquerel, 2019, p. 159-170).

Comme le Tribunal administratif puis la chambre administrative et enfin la chambre de céans l'ont jugé à maintes reprises, entre dans le cadre des opérations électorales au sens de l'art. 180 LEDP tout acte destiné aux électeurs de nature à influencer la libre formation du droit de vote telle qu'elle est garantie par les art. 34 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 44 Cst-GE (ACST/10/2015 du 11 mai 2015 et la jurisprudence citée). La constatation du résultat exact d'une élection, de même que le respect de la procédure en matière électorale font partie de la liberté de vote (ATF 140 I 394 consid. 8.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_136/2014 du 22 juillet 2014 consid. 5.1).

b. En l'espèce, les recours sont dirigés contre l'arrêté du Conseil d'État du 4 septembre 2019 constatant l'élection sans scrutin de M. B______ à la fonction de conseiller municipal de la commune. Le litige a donc trait à l'exercice des droits politiques et vise un acte sujet à recours au sens de l'art. 180 LEDP. Aussi la chambre de céans est-elle compétente à raison de la matière pour connaître du présent recours.

2. Selon l'art. 70 al. 1 de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), l'autorité peut, d'office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune.

En l'occurrence, les deux recours ayant le même objet et visant le même arrêté, leur jonction sera ordonnée sous le numéro de cause A/3225/2019.

3. Sur le plan cantonal, le délai de recours en matière de votations et d'élections est de six jours (art. 62 al. 1 let. b LPA).

Déposés les 6 et 11 septembre 2019 contre l'arrêté du Conseil d'État du 4 septembre 2019, publié dans la FAO du 6 septembre 2019, les recours ont été interjetés en temps utile.

4. a. La qualité pour recourir est reconnue, pour les recours pour violation des droits politiques, à toute personne physique ayant le droit de vote dans l'affaire en cause, aux partis politiques - pour autant qu'ils soient constitués en personnes morales, exercent leurs activités dans la collectivité publique concernée par la votation populaire en cause et recrutent leurs membres principalement en fonction de leur qualité d'électeurs -, ainsi qu'aux organisations à caractère politique formées en vue d'une action précise comme le lancement d'une initiative ou d'un référendum (ACST/14/2019 du 25 mars 2019 consid. 2d in initio ; ACST/7/2019 du 11 mars 2019 consid. 2c ; ACST/8/2016 du 3 juin 2016 consid. 3a).

b. La qualité pour recourir doit partant être reconnue tant à M. A______, domicilié dans la commune où il est titulaire des droits politiques, qu'au parti politique Groupe MCG Vernier, actif sur la scène politique de Vernier et représenté au conseil municipal de la commune.

5. Pour le reste, les recours satisfont aux exigences de forme et de contenu prescrites par la loi (art. 64 et 65 LPA). Ils seront donc déclarés recevables.

6. M. A______ a sollicité l'audition de plusieurs témoins.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (ATF 137 IV 33 consid. 9.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_265/2016 du 23 mai 2016 consid. 5.1 et les arrêts cités), de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 ; 137 II 266 consid. 3.2).

b. L'audition de témoins est ordonnée lorsque les faits pertinents ne peuvent être éclaircis autrement (art. 28 al. 1 LPA).

c. En l'espèce, les parties ont eu l'occasion de s'exprimer par écrit durant la procédure, d'exposer leur point de vue et de produire les pièces qu'elles jugeaient utiles à l'appui de leurs allégués. La chambre de céans dispose d'un dossier complet et les pièces, notamment l'attestation de M. D______ du 3 septembre 2019, les déclarations de renonciation des sept « viennent-ensuite » et la liste de candidature datée du 16 août 2019, qui y figurent suffisent pour trancher tous les éléments de fait pertinents. Elle renoncera par conséquent, par une appréciation anticipée des preuves, aux auditions sollicitées.

7. a. L'art. 34 al. 1 Cst. garantit de manière générale et abstraite les droits politiques, que ce soit sur le plan fédéral, cantonal ou communal. Selon l'art. 34 al. 2 Cst., cette garantie protège la libre formation de l'opinion des citoyens et l'expression fidèle et sûre de leur volonté (ATF 131 I 126 consid. 5.1 ; 130 I 290 consid. 3 ; 121 I 252 consid. 2 et les références citées ; ATA/181/2011 du 17 mars 2011 consid. 5 ; ATA/163/2009 du 31 mars 2009 consid. 9 et 10). L'art. 44 Cst-GE garantit les droits politiques en des termes similaires (ACST/10/2015 précité consid. 4 ; ACST/5/2015 du 4 mars 2015 consid. 6a ; ATA/181/2011 précité consid. 5). De cette garantie découle notamment le droit d'exiger qu'aucun résultat ne soit reconnu s'il n'exprime pas la libre volonté du corps électoral (ATF 131 I 126 consid. 3.1 et les références citées ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse vol. I, 3ème éd., 2013, n. 923 ss ; Pascal MAHON, Droit constitutionnel, vol. I, 3ème éd., 2014, n. 153).

Afin notamment de ne pas nuire à la crédibilité du résultat de l'élection, la garantie des droits politiques implique le respect de règles de procédure (ATF 131 I 442 consid. 3.1 et 3.6 ; ATA/41/2008 du 5 février 2008 consid. 6).

b. Selon l'art. 4 de la loi sur l'administration des communes du 13 avril 1984 (LAC - B 6 05), le conseil municipal est élu selon le mode et la procédure prévus par les art. 54 et 140 Cst-GE et par la LEDP.

Les conseils municipaux sont élus au système proportionnel (art. 140 al. 3 Cst-GE). Le Chapitre III du Titre II de la LEDP traite des élections proportionnelles applicables aux élections municipales. La procédure en cas de sièges non pourvus lors d'élections générales est prévue à l'art. 164 LEDP. D'après cette disposition, si une liste obtient plus de sièges qu'elle n'a présenté de candidats, les signataires de celle-ci sont seuls admis à déposer une nouvelle liste. Celle-ci doit comprendre un nombre de candidats égal à celui des sièges restant à pourvoir (pour la liste considérée) et être approuvée par la majorité des signataires de la liste initiale (al. 1). Les candidats sont déclarés élus sans scrutin (al. 2). Les alinéas 3 à 5 règlent la procédure d'« élection complémentaire ». Si les signataires de la liste initiale ne font pas usage de leur droit de dépôt dans les trois mois qui suivent la demande de remplacement, ils perdent leur droit prioritaire et un scrutin a lieu (al. 3). Lorsque plusieurs sièges sont vacants, les dispositions réglant l'élection selon le système de la représentation proportionnelle sont applicables ; si un seul siège est vacant, l'élection a lieu selon le système majoritaire (al. 4). Une élection complémentaire n'est toutefois pas organisée dans les six mois qui précèdent la date de l'élection générale (al. 5). En cas de vacance, le candidat qui a obtenu le plus de suffrages après le dernier élu de la liste où la vacance s'est produite est élu en remplacement (art. 165 LEDP). Si la liste est épuisée, avant les six mois qui précèdent la date de l'élection générale, la procédure prévue à l'art. 164 s'applique (art. 166 LEDP).

8. En l'occurrence, dans sa réponse au recours, le Conseil d'État a expliqué qu'à la suite à la démission de M. C______ de ses fonctions de conseiller municipal de la commune, le SVE avait mis en oeuvre le processus de remplacement en cas de vacance décrit à l'art. 165 LEDP. En application de cette disposition, le SVE a dressé, sur la base de la liste n° 5 « MCG, INDÉPENDANTS, L'ENTENTE POUR VERNIER », l'ordre de remplacement des « viennent-ensuite » susceptibles de reprendre le mandat du démissionnaire. Après avoir constaté que quatre candidats n'étaient plus éligibles dans la commune (soit M. N______, Mmes O______ et P______ et M. Q______), la liste des « viennent-ensuite » se présentait, dans l'ordre des suffrages obtenus, comme suit : MM. D______ et E______, Mmes F______, G______ et H______, M. I______ et Mme J______. Le 13 juin 2019, le SVE a informé M. D______ qu'en sa qualité de premier des « viennent-ensuite », il était appelé à remplacer M. C______ au sein du conseil municipal. Par lettre manuscrite du 2 août 2019, M. D______ a déclaré renoncer au mandat de conseiller municipal de la commune. Le 5 août 2019, les six autres « viennent-ensuite » ont également signé une déclaration de renonciation. Après vérification de ces différents documents, le SVE a constaté que la liste des remplacements était épuisée au sens de l'art. 166 LEDP. Conformément à l'art. 164 LEDP, les signataires de la liste initiale ont déposé une nouvelle liste désignant M. B______ comme candidat à l'élection complémentaire. Constatant que cette liste respectait les conditions fixées à l'art. 164 al. 1 LEDP, le Conseil d'État a déclaré M. B______ élu sans scrutin à la fonction de conseiller municipal de la commune de Vernier.

9. a. Devant la chambre de céans, les recourants font valoir que la signature sur la lettre de renonciation de M. D______ du 2 août 2019 a été obtenue par astuce par M. B______, que ce dernier n'était pas légitimé à représenter le groupe des élus de Vernier et que la « liste de candidature » du 16 août 2019 comporte des vices de forme, la signature d'un représentant valable faisant défaut.

b. S'agissant en premier lieu de la lettre de renonciation du 2 août 2019, force est de constater que celle-ci a été signée par M. D______ alors que l'intéressé avait déjà reçu un courrier du SVE du 13 juin 2019 l'informant de sa position de premier des « viennent-ensuite » et qu'il s'était entretenu à ce sujet avec son chef de parti quelques jours auparavant. Dans ces conditions, il est difficile d'imaginer que l'intéressé ait renoncé à son mandat de conseiller municipal autrement qu'en toute connaissance de cause. L'absence d'un vice de volonté, voire d'une astuce de la part de M. B______ - dont la notion relève du droit pénal -, est du reste confirmée par le fait que M. D______ a également signé la liste de candidature pour l'élection complémentaire de M. B______. Si, comme le relèvent les recourants, la signature de l'intéressé n'est accompagnée d'aucune date, la liste de candidature est datée du 16 août 2019. Par ailleurs, dans la mesure où la liste vierge des déposants de la liste de candidature a été remise en mains propres à M. B______ le 14 août 2019 - ce qui n'est pas contesté -, il y a tout lieu de penser que M. D______ a signé la liste après cette date, venant ainsi confirmer sa renonciation au mandat de conseiller municipal formulée dix jours auparavant. On ne décèle ainsi aucune violation des règles de procédure dans la manière dont l'intimé a retenu que, conformément aux art. 165 et 166 LEDP, la liste était épuisée.

c. Ensuite, pour ce qui est de la liste de candidature, la chambre de céans constate qu'elle a été signée par M. L______ en tant que « déposant » le 16 août 2019. Le nom de l'intéressé a toutefois été barré sous la rubrique « déposant responsable ». Il est certes étonnant que la liste ait été signée par un représentant dont le nom a été barré. Ceci ne change cependant rien au fait que les conditions de l'art. 164 al. 1 LEDP ont été dûment respectées : la liste comprend un nombre de candidats égal à celui des sièges à pourvoir et est approuvée par la majorité des signataires de la liste initiale, ce que les recourants ne contestent pas. La LEDP n'exige pas, en outre, que les signataires désignent un représentant. Ainsi, que les signataires aient désigné M. L______, dont le nom figure en tête de liste, ou M. B______, en sa qualité de remplaçant figurant en deuxième place (conformément au texte pré-imprimé figurant en bas de la liste de candidature), ne change rien au fait que 13 signataires de la liste initiale, sur les 25 déposants, ont approuvé la nouvelle liste. N'est pas non plus pertinent le fait que, selon les recourants, M. B______ n'était pas légitimé à représenter le groupe des élus de Vernier. Ainsi que l'a précisé le secrétariat général de la commune de Vernier, cette fonction a pour but d'assurer un lien entre le secrétariat général de la commune et les différents représentants des groupes politiques. Il s'agit là d'une question d'organisation interne dont le non-respect ne remet pas en cause la correcte application des règles de procédure.

Il s'ensuit que les règles applicables en matière d'élections municipales complémentaires ont été respectées.

10. Les considérants qui précèdent conduisent au rejet des recours.

Vu l'issue donnée aux recours, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du Groupe MCG Vernier et de Monsieur A______, pris conjointement et solidairement, et il ne leur sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 1 et 2 LPA).

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE CONSTITUTIONNELLE

préalablement :

ordonne la jonction des causes nos A/3225/2019 et A/3285/2019 sous la cause n° A/3225/2019 ;

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 6 septembre 2019 par le Groupe MCG Vernier contre l'arrêté du Conseil d'État du 4 septembre 2019 ;

déclare recevable le recours interjeté le 11 septembre 2019 par Monsieur A______ contre l'arrêté du Conseil d'État du 4 septembre 2019 ;

au fond :

les rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge du Groupe MCG Vernier et de Monsieur A______, pris conjointement et solidairement ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt au Groupe MCG Vernier, à Monsieur A______, au Conseil d'État, ainsi qu'à Monsieur B______.

Siégeant : M. Verniory, président, Mmes Galeazzi et Payot Zen-Ruffinen, M. Martin, Mme McGregor, juges.

Au nom de la chambre constitutionnelle :

le greffier-juriste :

 

 

 

I. Semuhire

 

 

le président siégeant :

 

 

 

J.-M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :