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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3634/2024

ATA/393/2025 du 08.04.2025 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3634/2024-FORMA ATA/393/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 8 avril 2025

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

SERVICE DES BOURSES ET PRÊTS D'ÉTUDES intimé

 



EN FAIT

A. a. A______, née le ______ 2006, est inscrite en deuxième année de formation CFC – employée de commerce – auprès de l’École B______ (année scolaire 2024/2025).

Selon le registre de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), elle est domiciliée à Genève depuis le 21 mars 2024.

b. Le 26 août 2024, elle a déposé une demande en ligne auprès du service des bourses et prêts d'études (ci-après : SBPE) visant à obtenir un chèque annuel de formation (ci-après : CAF).

c. Le 26 août 2024, le SBPE a invité l’intéressée à lui fournir les douze dernières fiches de salaire et l’état de ses comptes bancaires au 31 décembre 2022.

d. Le 27 août 2024, le SBPE a reçu deux attestations de l’École B______, une note manuscrite de la mère de l’intéressée et l’état du compte bancaire de cette dernière.

e. Par décision du 29 août 2024, le SBPE a rejeté sa demande au motif qu’elle n’était pas contribuable dans le canton de Genève depuis au moins une année au moment du début de sa formation.

f. Par courrier reçu par le SBPE le 7 octobre 2024, A______, par l’intermédiaire de sa mère, a formé opposition à cette décision, invoquant une situation financière précaire.

g. Par décision du 15 octobre 2024, le SBPE a déclaré l’opposition irrecevable. La réclamation, reçue le 7 octobre 2024, était tardive, la décision entreprise ayant été émise le 29 août 2024.

B. a. Par acte expédié le 30 octobre 2024, A______ a recouru devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision.

Elle suivait des cours à l’École B______ et résidait à Genève. Sa mère, qui la soutenait financièrement, travaillait à mi-temps pour s’occuper de ses grands-parents. Ils avaient d’importantes difficultés financières. Elle souhaitait pouvoir continuer ses études « en toute sérénité ».

b. Par réponse du 9 décembre 2024, le SBPE a conclu à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet et à la confirmation de la décision du 15 octobre 2024.

Postée le 29 août 2024, la décision du même jour était parvenue à la recourante « au plus tard le 4 septembre 2024 ». Selon le site Internet de la poste, le courrier B était distribué dans un délai de trois jours ouvrables au maximum. La réclamation du 7 octobre 2024 était partant hors délai. Même à considérer l’opposition recevable, elle aurait en tout état été rejetée. La recourante ne respectait aucune des conditions de l’art. 10 al. 1 de la loi sur la formation continue des adultes du 18 mai 2000 (LFCA - C 2 08). Au bénéfice d’un permis B depuis le 21 mars 2024, elle pouvait prétendre à un CAF pour une formation débutant, au plus tôt, le 21 mars 2025.

c. La recourante n’a pas répliqué dans le délai imparti à cet effet.

d. Par plis des 12 décembre 2024 et 12 février 2025, la chambre de céans a invité la recourante à lui indiquer la date de réception de la décision du SBPE du 29 août 2024.

e. Ces plis sont demeurés sans réponse, si bien que la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art. 17 al. 2 LFCA).

2.             Le recours ne contient pas de conclusions formelles.

2.1 Selon l’art. 65 al. 1 LPA, l'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. En outre, il doit contenir l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. À défaut, un bref délai pour satisfaire à ces exigences est fixé au recourant, sous peine d’irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA). Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant, pourvu que la chambre administrative et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/533/2016 du 21 juin 2016 consid. 2b ; ATA/29/2016 du 12 janvier 2016 consid. 2b).

2.2 En l’occurrence, même si la recourante ne prend pas de conclusions formelles, se contentant d’invoquer ses difficultés financières, il faut comprendre qu’elle souhaite se voir reconnaître un droit à un CAF.

3.             Le litige porte sur le point de savoir si c’est à juste titre que l’autorité intimée a déclaré la réclamation de la recourante irrecevable. Il ne porte en conséquence pas sur le bien-fondé du refus de prestations.

3.1 Les décisions prises par le service, en application du présent chapitre, peuvent faire l’objet d’une réclamation qui doit être formée dans les 30 jours dès la notification de la décision (art. 17 al. 1 LFCA).

3.2 Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d'être prolongés (art. 16 al. 1 LPA), restitués ou suspendus, si ce n'est par le législateur lui-même. Celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (ATA/1068/2015 du 6 octobre 2015 consid. 5a ; ATA/918/2015 du 8 septembre 2015 consid. 3a). Le Tribunal fédéral a eu l'occasion de préciser que le strict respect des délais légaux se justifie pour des raisons d'égalité de traitement et n'est pas constitutif de formalisme excessif (ATF 125 V 65 consid. 1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_507/2011 du 7 février 2012 consid. 2.3 ; 2D_18/2009 du 22 juin 2009 consid. 4.2).

3.3 Le fardeau de la preuve de la notification d’un acte et de sa date incombe en principe à l’autorité qui entend en tirer une conséquence juridique (ATF 142 IV 125 consid. 4.3 ; 136 V 295 consid. 5.9). L'autorité supporte donc les conséquences de l'absence de preuve, en ce sens que si la notification ou sa date sont contestées et qu'il existe effectivement un doute à ce sujet, il y a lieu de se fonder sur les déclarations du destinataire de l'envoi (ATF 142 IV 125 consid. 4.3 et les références citées), dont la bonne foi est présumée (arrêt du Tribunal fédéral 2C_570/2011 du 24 janvier 2012 consid. 4.3 et les références citées). La preuve de la notification peut toutefois résulter d'autres indices que des indications postales ou de l'ensemble des circonstances, par exemple d'un échange de correspondance ultérieur ou du comportement du destinataire (ATF 142 IV 125 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_250/2018 du 26 octobre 2018 consid. 5.2). Cela étant, lorsque le contribuable ne conteste pas avoir reçu la décision peu de temps après sa date d’expédition, ni n’allègue ne l’avoir jamais reçue, la chambre administrative admet que la décision entreprise a été réceptionnée quelques jours après son expédition (ATA/1373/2018 du 18 décembre 2018 consid 7c ; ATA/296/2017 du 14 mars 2017 ; ATA/234/2014 du 8 avril 2014 consid. 6 ; ATA/137/2012 du 13 mars 2012).

3.4 En application de la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public (art. 19 et 20 LPA), l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés ; cette maxime oblige notamment les autorités compétentes à prendre en considération d'office l'ensemble des pièces pertinentes qui ont été versées au dossier. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits (ATF 124 II 361 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1) ; il leur incombe d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).

3.5 En l’occurrence, il est constant que l’autorité intimée ne peut apporter la preuve de la date à laquelle elle a notifié la décision litigieuse à la recourante, ayant choisi de la communiquer par pli simple. Se fondant sur les indications de la Poste, telles qu’elles figurent sur son site Internet, elle fait valoir que la décision litigieuse est parvenue au plus tard le 4 septembre 2024, soit dans le délai maximum de trois jours ouvrables pour la distribution d’un courrier B.

Un telle explication ne suffit certes pas à apporter la preuve stricte de la notification de la décision à la date alléguée. La recourante n’a toutefois jamais contesté avoir reçu la décision peu de temps après sa date d’expédition. Dans son recours, elle ne conteste pas que sa réclamation a été formée postérieurement à l’échéance du délai légal de 30 jours, se limitant à invoquer une situation financière précaire. Invitée à deux reprises à indiquer la date à laquelle la décision du SBPE du 29 août 2024 lui a été communiquée, la recourante ne s’est pas manifestée. Dans ces conditions, en application de la jurisprudence précitée et compte tenu du devoir de collaboration de la recourante – seule en mesure d’apporter la preuve de la date de réception de la décision litigieuse –, il convient de retenir que la décision entreprise a été réceptionnée quelques jours après son expédition, soit au plus tard le 4 septembre 2024. Ainsi, formée le 7 octobre 2024, la réclamation était tardive, ce que l’autorité a constaté à juste titre.

La recourante n’allègue, pour le reste, aucun motif pouvant constituer un cas de force majeure, soit un événement extraordinaire et imprévisible survenant en dehors de la sphère d’activité de l’intéressée et s’imposant à elle de l’extérieur de façon irrésistible (ATA/394/2024 du 19 mars 2024 consid. 2.4 et les arrêts cités).

Le recours, mal fondé, sera en conséquence rejeté.

Par surabondance, la chambre de céans relèvera que la recourante, qui ne conteste pas qu’elle ne réside à Genève que depuis le 21 mars 2024, ne remplit, à teneur du dossier, aucune des conditions de l’art. 10 al. 1 LFCA lui permettant de prétendre à l'octroi d’un CAF. L’autorité intimée lui a d’ailleurs dûment précisé qu’elle pourrait prétendre à un CAF pour une formation débutant, au plus tôt, le 21 mars 2025.

4.             Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA et 11 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l'issue du litige, il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 30 octobre 2024 par A______ contre la décision du service des bourses et prêts d’études du 15 octobre 2024 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'au service des bourses et prêts d'études.

Siégeant : Eleanor McGREGOR, présidente, Patrick CHENAUX, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

E. McGREGOR

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :