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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/976/2023

ATA/515/2024 du 23.04.2024 sur JTAPI/1219/2023 ( LCI ) , REJETE

Recours TF déposé le 07.06.2024, rendu le 24.07.2024, RETIRE, 1C_344/2024, A 322884/1
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/976/2023-LCI ATA/515/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 23 avril 2024

3ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Andreas FABJAN, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OAC intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
2 novembre 2023 (JTAPI/1219/2023)


EN FAIT

A. a. A______ est propriétaire de la parcelle n° 1'437 de la commune de B______, sise route de C______ ______, sur laquelle est érigée une villa. Elle se situe en zone 5.

b. Le 12 octobre 2022, A______, par l’intermédiaire de l’entreprise D______ SA, a déposé auprès du département du territoire (ci-après : DT ou le département) une requête en autorisation de construire portant sur la réalisation d’un terrain de tennis et de murs, la création de clôtures et l’abattage d’arbres
(APA 1______).

c. Lors de l’instruction de la demande, les préavis des instances concernées ont été sollicités.

d. Le service des monuments et des sites (ci-après : SMS) a rendu un préavis favorable le 18 octobre 2022 avec dérogation selon l’art. 13 de la loi sur la protection générale des rives du lac du 4 décembre 1992 (LPRLac - L 4 10).

e. L’office cantonal de l’agriculture et de la nature (ci-après : OCAN) a rendu un préavis défavorable le 20 octobre, puis le 3 novembre 2022. Le projet était trop impactant sur la végétation. Les arbres situés en lieu et place de l’implantation du futur terrain de tennis étaient des éléments majeurs et devaient être conservés en tant que tels à leurs emplacements actuels. Aucune construction (y compris desserte, canalisation, revêtement etc.) ni aucun décaissement ne devaient être réalisés dans le domaine vital des arbres (aplomb de la couronne, plus 1 m), afin d’assurer leur conservation valable (art. 1, 14 et 16 du règlement sur la conservation de la végétation arborée du 27 octobre 1999 - RCVA - L 4 05.04).

f. L’OCAN a réitéré son préavis défavorable le 21 novembre 2022.

g. Par courrier du 23 novembre 2022, A______ a transmis des observations au département à la suite du préavis défavorable de l’OCAN du
21 novembre 2022. Il précisait notamment que l’abattage des huit arbres prévus serait compensé par la plantation de dix-neuf arbres sur la parcelle, pour un montant de CHF 128'196.25. Le solde par rapport à la valeur estimée des arbres à abattre (CHF 157'320 au total) pourrait faire l’objet de compensations ailleurs.

h. Le 6 décembre 2022, l’OCAN a, une quatrième fois, préavisé défavorablement le projet, car il était trop important pour la végétation, soulignant aussi que le principe voulu par les dispositions légales (RCVA, directives cantonales) était celui de la conservation des arbres. Leur abattage ne pouvait donc intervenir que pour des motifs particuliers, dont l’importance devait l’emporter sur les différents aspects qui conféraient à chaque sujet une valeur plus ou moins grande. Pour l’essentiel, les motifs d’abattage pouvaient ainsi concerner soit des problèmes de sécurité (liés notamment à l’état sanitaire de l’arbre), soit des nuisances d’une certaine gravité et auxquelles il n’était pas possible de remédier à un coût raisonnable, ou encore des projets de construction ou d’aménagement incompatibles avec le maintien de l’arbre et qui représentaient un intérêt privé ou public suffisamment important.

i. A______ a transmis de nouvelles observations le 21 décembre 2022.

j. Par décision du 14 février 2023, le département a refusé de délivrer à A______ l’autorisation de construire sollicitée.

L’OCAN avait d’emblée relevé, dans son préavis défavorable du 20 octobre 2022, que les arbres dont l’abattage était projeté constituaient des éléments majeurs du paysage et que, partant, ils devaient être conservés. Cette instance avait confirmé sa position dans les préavis défavorables subséquents et, en particulier dans celui du 6 décembre 2022 dans lequel elle avait précisé, en réponse aux arguments avancés par le propriétaire le 23 novembre 2022, que la conservation des arbres constituait le principe et que leur abattage devait répondre à un intérêt privé ou public prépondérant. Or, la construction d’un court de tennis répondait à un besoin de pure convenance personnelle qui ne prévalait pas sur l’intérêt public à la conservation des arbres. Il était de surcroit relevé qu’il n’existait aucun motif d’abattage à l’aune du RCVA et de la directive concernant la conservation des arbres d'août 2008 (ci-après: la directive), les arbres concernés n’étant ni source de danger ni en mauvais état sanitaire.

B. a. Par acte du 16 mars 2023, A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation.

Il souhaitait construire un terrain de tennis pour permettre à ses deux enfants, pratiquant le tennis à haut niveau, de s’entraîner.

La décision était basée sur une constatation incomplète des faits dans la mesure où ni l’office des autorisations de construire ni l’OCAN n’avaient examiné ou pris en considération les mesures compensatrices prévues, soit la plantation de dix-neuf arbres pour une montant de CHF 128'196.25.

La décision violait ensuite l’art. 15 RCVA et la hiérarchie des normes. La directive d'août 2008 adoptée par le département excédait très largement le cadre réglementaire puisqu’une décision d’abattage était prise seulement si des motifs valables empêchaient le maintien de l’arbre, ce qui constituait une condition et une limitation nullement prévues par le RCVA. De même, la pesée des intérêts selon laquelle la décision de maintenir un arbre était prise lorsque l’intérêt au maintien primait les motifs d’abattage excédait les conditions prévues par le RCVA. Ainsi, l’obligation de réaliser des mesures compensatoires constituait la seule et unique condition à l’abattage d’arbres.

Le département avait par ailleurs abusé de son pouvoir d’appréciation et violé les principes de proportionnalité et de la garantie de la propriété. Les arbres ne répondaient pas aux critères de maintien prévus par la directive : ils ne bénéficiaient d’aucun statut spécial, n’étaient pas identifiés par l’inventaire cantonal des arbres (ci-après : ICA), deux d’entre eux étaient déjà morts et tous n’étaient visibles que depuis sa parcelle et celles adjacentes. Leur abattage se justifiait par le projet d’aménagement envisagé qui était en tous points conforme aux dispositions en matière d’aménagement du territoire et du droit public de la construction. Par ailleurs, la décision portait gravement atteinte à sa garantie de la propriété.

Enfin, le département avait fait preuve d’un excès négatif de son pouvoir d’appréciation. Il avait en effet fait siens, sans autre analyse ni esprit critique, les préavis négatifs de l’OCAN en considérant que le projet querellé serait trop impactant sur la végétation et porterait atteinte à l’intérêt public à la conservation des arbres, alors qu’il aurait dû s’en écarter puisqu’ils étaient infondés.

b. Le département a conclu au rejet du recours et a produit son dossier.

Ce n’était que dans le cadre d’une autorisation d’abattage d’arbres que les mesures compensatoires pouvaient avoir une influence et faisaient, cas échéant, l'objet d'une analyse. Or, à défaut d'autorisation d'abattage d'arbres, le département n'avait pas à examiner ou à se prononcer sur lesdites mesures.

La directive ne faisait que préciser les principes contenus dans la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 (LMPNS - L 4 05) et le RCVA et leur mise en pratique sans imposer de nouvelles obligations aux citoyens : son but était la protection des arbres en place et le renouvellement du patrimoine arboré. Pour le surplus, l'interprétation du recourant selon laquelle le RCVA ne prévoirait pas la possibilité pour le département de refuser l'abattage d'arbres mais uniquement de la conditionner à des mesures compensatoires allait à l'encontre des objectifs de préservation et de sauvegarde précités.

L'OCAN avait pris en compte l'intérêt paysager du groupe d'arbres numérotés 9 à 13 sur le plan d'abattage fondé notamment sur la valeur esthétique, confirmée d'ailleurs par l'évaluation de D______ SA, sur leur âge (une quarantaine d'années) et leur bon état sanitaire. Cela résultait également de la valeur de remplacement élevée (de CHF 20'000 à CHF 38'000.-). La position contraire de l’intéressé ne constituait qu'une simple substitution de son appréciation à celle de l'instance compétente. Preuve en était que les arbres morts n'avaient eu aucune influence sur la décision litigieuse puisqu'il était loisible au propriétaire de déposer une requête en abattage pour ces derniers, une éventuelle autorisation ne lui permettrait toutefois pas de réaliser le projet en cause. De surcroît, le fait que les arbres dont l'abattage avait été requis n'avaient pas été identifiés par l'ICA n'était pas déterminant puisqu'il s'agissait d'un inventaire non exhaustif établi en 1976, à titre purement informatif et ne remplaçant pas un examen au cas par cas de la végétation dont l'abattage était demandé.

A______ estimait que la construction d'un court de tennis constituait un motif d'abattage des arbres et que celle-ci ne saurait être qualifiée de pure convenance personnelle. Pourtant, l'intérêt à pouvoir jouer au tennis chez soi plutôt que dans un club existant était de nature « purement privée » qui ne saurait l'emporter sur le préservation d'arbres possédant un fort intérêt paysager. L'importance et le type de construction projetée ne pouvait par ailleurs pas être assimilés à ceux de la construction d'un logement par exemple.

Enfin, la décision litigieuse résultait d'une pesée des intérêts et de la jurisprudence constante en matière de portée des préavis des instances spécialisées.

c. A______ a répliqué et persisté intégralement dans ses conclusions.

Selon l'art. 15 al. 1 RCVA, le requérant d'une requête en abattage d'arbres devait obligatoirement soumettre un projet de mesures compensatoires, faute de quoi sa demande était refusée : il était dès lors insoutenable d'alléguer que les mesures compensatoires n'auraient aucune influence sur la décision d'abattage, il s'agissait au contraire d'un élément factuel déterminant.

La directive excédait par ailleurs largement le cadre réglementaire découlant du RCVA, instaurant notamment des conditions et des restrictions supplémentaires à la seule obligation de l'art. 15 al. 1 RCVA de réaliser des mesures compensatoires à l'abattage d'arbres. En conditionnant l'abattage d'arbres à la seule condition d'une replantation de valeur équivalente, l'art. 15 RCVA permettait à tout propriétaire de jouir librement de sa propriété conformément à la garantie de la propriété, tout en respectant l'intérêt public à la préservation de la nature dans la mesure où les arbres d'une valeur équivalente devaient obligatoirement être replantés. Ainsi, le département ne contestait pas que les mesures compensatoires prévues étaient suffisantes pour compenser huit arbres dont deux étaient déjà morts.

L'âge, l'état sanitaire et la valeur de remplacement des arbres n'étaient pas pertinents dans l'analyse de la qualité d'« élément majeur du paysage » ; le département n'était ainsi pas parvenu à énoncer le moindre argument convaincant pour démontrer que les arbres querellés présenteraient un intérêt important sur la perception du site. Par ailleurs l'âge et l'état sanitaire réel des arbres litigieux ne correspondait pas à ceux que le département tentait de leur accorder : les deux pins et les trois chênes avaient été plantés il y avait une trentaine d'années tandis que le cerisier avait été planté il y avait une douzaine d'années, de sorte qu'ils n'étaient pas particulièrement âgés – leur âge étant très éloignée des 100 ans. Ils étaient en outre plantés relativement proches, les deux pins interféraient mutuellement sur leur développement et pendaient déjà d'un côté, de sorte qu'ils ne présentaient aucun potentiel de développement. Enfin l'ICA était un inventaire exhaustif mis régulièrement à jour.

L'abattage des arbres était par ailleurs rendu nécessaire par la construction d'un court de tennis, soit un motif expressément prévu par l'art. 2.2.2 de la directive et le département ne pouvait procéder à une évaluation totalement subjective de l'intérêt qu'avait le projet de construction.

L'exigence d'un préjudice découlant de l'art. 2.2.5 de la directive était en outre surprenant et cette disposition ne pouvait être appliquée.

d. Dans sa duplique, le département a persisté dans ses conclusions, les éléments avancés par le recourant ne lui permettant pas de revenir sur sa position exprimée dans sa précédente écriture.

e. Le 12 octobre 2023, le TAPI a procédé à un transport sur place en présence des parties.

f. Lors de celui-ci, l'OCAN a déclaré qu'il ne s'était pas déplacé pour constater de visu les arbres à abattre, mais avait reçu un dossier complet de l’entreprise D______ SA.

Il pourrait entrer en matière sur la suppression de l’arbre fruitier n° 8, mais avait rendu une décision globale concernant les neuf arbres à abattre. L’arbre n° 14 était effectivement mort et son abattage pouvait être considéré. La situation devait être examinée de manière plus stricte que pour la construction d’un logement, un court de tennis constituant un loisir, à l’instar d’une piscine et non un besoin essentiel. Sur l’ensemble de la propriété, l’abattage d’arbres à ces fins ne pouvait être autorisé. Il avait pris en considération l’essence des arbres soit des chênes rouges (3) et des pins maritimes (2) qui étaient encore jeunes mais qui pourraient devenir centenaires. Il était exact que désormais, ces cinq arbres ne pourraient être plantés aussi proches de la limite de la propriété, ce qui signifiait qu’il n’était pas possible de replanter des arbres au même endroit en remplacement. Ces arbres étaient de bonne vigueur et avaient un bon avenir devant eux, élément qui avait également été pris en considération. Les trois chênes allaient se développer ensemble car ils avaient été plantés de manière assez proche et cela ne posait pas de problème particulier. Aucun élagage droit à la limite de la propriété des voisins de ces trois chênes ne serait autorisé. Il faudrait que les voisins fassent valoir des nuisances importantes, notamment de salubrité. Les trois chênes permettaient de conserver et développer la canopée. Pour en trouver une équivalente, il faudrait compter une trentaine d’années.

Dans la mesure où l’abattage n’était pas autorisé, la compensation proposée ne pouvait être prise en compte. Dans tous les cas, celle proposée était inférieure de CHF 30'000.- en comparaison à la valeur des arbres qui seraient abattus et il n’y avait pas suffisamment de place sur la parcelle pour replanter des arbres équivalent à CHF 150'000.-. C’était seulement si la construction était estimée nécessaire et qu’il n’était pas possible de replanter les arbres sur la parcelle qu’un versement dans le fond de compensation de l’État était accepté.

Les arbres étaient en situation 10 selon les normes de l'Union suisse des Services et des Parcs et Promenades (ci-après : USSP) utilisé pour le chiffrage, raison pour laquelle il avait été estimé qu’il s’agissait effectivement d’éléments majeurs bien qu’ils ne soient visibles que depuis la parcelle ou celle des voisins.

Les cinq arbres, soit les trois chênes rouges et les deux pins maritimes n'étaient pas des espèces rares.

g. A______ a indiqué que l’arbre n° 1 situé sur le plan à côté de la villa avait dû être abattu car il était mort. Ils avaient demandé l’autorisation pour l’abattre car il devenait dangereux.

Ses deux enfants de 13 et 15 ans jouaient assidûment au tennis, entre deux et trois heures par jour, et étaient dans les cadres nationaux. Il était très compliqué d’organiser leur entraînement en dehors des heures scolaires, raison pour laquelle ils souhaitaient réaliser ce court de tennis dans leur propriété.

Son épouse a indiqué que lors de la construction de la maison 23 ans auparavant, ils avaient planté les deux pins maritimes. Ils avaient peut-être également planté un chêne.

h. Le 24 octobre 2023, A______ a transmis ses observations finales. Il précisait que la construction du court de tennis ne devait pas être considérée comme ayant une simple visée de loisirs, mais comme une installation destinée à l'entraînement sportif de compétition, et, cas échéant, de formation professionnelle, soit un besoin nécessaire.

i. Le même jour, le département a transmis ses observations finales, se limitant à constater que l'inspection des lieux et les déclarations des parties n'avaient fait que confirmer la position soutenue dans ses écritures, en particulier au sujet de l'examen détaillé des circonstances et de la pesée des intérêts.

j. Par jugement du 2 novembre 2023, le TAPI a rejeté le recours.

Même sur une parcelle privée un arbre ne pouvait être abattu qu'avec l'autorisation de l'autorité compétente. À cet égard, l'art. 16 RCVA octroyait un large pouvoir réglementaire au département dans l'édiction de directives, notamment en matière de sauvegarde des végétaux maintenus. La directive était ainsi conforme au RCVA et applicable.

L’autorisation d’abattage d’arbres pouvait être assortie de l’obligation de réaliser des mesures compensatoires, mais celles-ci ne constituaient pas la seule condition à l’octroi de l’autorisation. Ainsi, c’était à juste titre que le département avait, dans un premier temps, déterminé si les conditions d’abattage des arbres visés étaient réunies et, si tel avait été le cas, il aurait examiné si des mesures compensatoires devaient être demandées.

Le TAPI devait faire preuve de retenue et éviter de substituer son avis à celui des instances spécialisées. Le transport sur place n’avait pas permis à ce dernier de comprendre clairement ce qui faisait de ces arbres des éléments majeurs du paysage, mais, à l’inverse, ne lui avait pas permis non plus de considérer d’emblée que le département avait manifestement erré dans cette appréciation. Si le TAPI était à même, globalement, d'apprécier le sens et la portée de la notion d'élément majeur du paysage, il ne disposait ni des connaissances théoriques ni de l’expérience de terrain nécessaires pour attribuer lui-même à un arbre ou un groupe d'arbres ce qualificatif, en dehors des cas manifestes d’arbres hors-normes ou au contraire tout à fait quelconques. En l'absence d'éléments laissant penser que l'avis de l'OCAN manquerait de pertinence ou omettrait des éléments d'appréciation importants, il devait se fonder sur l’avis de ce dernier.

L'élément majeur du paysage ne constituait que l’un des critères pris en considération, à côté notamment de sa beauté, de son intérêt écologique, de son état sanitaire et de son espérance de vie. Ainsi, tout arbre dont l’abattage était demandé faisait l’objet d’une évaluation globale en fonction de ces différents éléments. Les cinq arbres en question étaient encore jeunes, en bonne santé et avaient un bon avenir devant eux, pouvant même devenir centenaires. Ils participaient ainsi au maintien et au développement de la canopée.

Ainsi, l'intérêt privé à leur abattage, soit la construction d’un terrain de tennis pour que les enfants puissent s’entraîner sans contrainte d’horaire, était moindre par rapport à l'intérêt public à leur conservation, étant rappelé que selon le système prévu par le RCVA, la conservation des arbres est la règle et l'abattage une exception.

Le département n'avait ainsi pas mésusé de son pouvoir d'appréciation.

C. a. Le 7 décembre 2023, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du TAPI, concluant principalement à son annulation et subsidiairement au renvoi de la cause au TAPI pour nouvelle décision.

Il a joint à son recours une expertise du 30 novembre 2023 de E______, qui s’est rendue sur site le 22 novembre 2023, ainsi qu’un avis de D______ SA du 13 novembre 2023, selon lesquels les cinq arbres étaient très rapprochés, si bien que leur croissance, leur accès à la lumière et leur statique s’en trouvaient affectés. Ces cinq arbres ainsi que les cerisiers ne présentaient aucun intérêt particulier et la qualification en tant qu’élément majeur du paysage ne leur était pas applicable, dans la mesure où ils n’étaient ni exceptionnels par leur ensemble ou pris individuellement. Certains arbres présentaient également des blessures, des branches fragilisées par le déséquilibre de leur développement et du bois mort.

Le TAPI, qui se trouvait face à un doute sérieux s’agissant de la qualification d’éléments majeurs du paysage, avait violé la maxime d’office en n’instruisant pas plus ce point, se contentant de relever qu’aucun élément ne permettait de retenir que l’avis de l’OCAN manquait de pertinence ou omettait des éléments d’appréciation importants.

C’était à tort que les arbres avaient été qualifiés d’éléments majeurs du paysage. Ils étaient relativement jeunes, n’étaient pas répertoriés dans l’ICA et étaient uniquement visibles depuis sa parcelle. De plus, du fait de leur promiscuité, leur croissance et développement se trouvaient contraints et ils présentaient des blessures ainsi que du bois mort, diminuant d’autant leur attrait. Le TAPI avait lui‑même admis lors du transport sur place que les arbres ne lui avaient pas paru revêtir de caractéristiques particulières, ce que ni l’OCAN, ni le département n’avaient démontré. Le TAPI avait ainsi abusé de son pouvoir d’appréciation.

Aucune des conditions de maintien des arbres, à savoir leur beauté ou l’intérêt du sujet (élément majeur du paysage, arbre remarquable, intérêt écologique), leur état sanitaire ou encore leur espérance de vie des arbres, n’était réalisée.

L’abattage des arbres était nécessaire pour la construction d’un terrain de tennis et un tel motif devait être admis dès lors qu’un propriétaire, sous réserve des exceptions de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), devait être autorisé à élever des constructions sur un terrain constructible, sous peine de violation de l’art 26 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101). La construction ne visait pas un simple loisir, mais la volonté de favoriser l’entraînement de ses deux enfants, qui était difficile à organiser quotidiennement en dehors des heures scolaires.

Le plan de compensation proposé était particulièrement qualitatif et ainsi propre à peser dans les critères de maintien et d’abattage. Les arbres sélectionnés étaient nombreux et résistants au climat genevois. Le TAPI avait ainsi violé l’art. 15 RCVA et la directive en avalisant la décision du département de refuser l’examen de la compensation proposée.

Enfin, le TAPI avait fait preuve d’un excès négatif du pouvoir d’appréciation en faisant sienne la position du département, qui était lacunaire et dont les constats étaient infondés. En effet, il avait admis ne pas comprendre pour quelle raison le département avait qualifié les arbres d’éléments majeurs du paysage, tout en se limitant à considérer que la décision ne prêtait pas le flanc à la critique.

b. Dans sa réponse, le département a conclu au rejet du recours.

Le TAPI avait respecté la maxime inquisitoire en ordonnant le transport sur place et en retenant qu’il n’avait pas été déterminant pour former une conviction. Il ne s’était d’ailleurs pas arrêté au résultat du transport sur place, mais s’était clairement déterminé sur l’appréciation des faits en prenant en compte d’autres éléments qui permettaient de retenir que les arbres constituaient des éléments majeurs du paysage.

C’était à juste titre et en conformité avec les exigences jurisprudentielles que le TAPI s’était référé à l’avis de l’instance spécialisée que rien ne permettait de remettre en cause. A______ ne démontrait au demeurant pas que cette position manquerait de pertinence ou omettrait des éléments d’appréciation importants.

L’expertise privée devait être relativisée, puisqu’il était notoire que l’avis d’un expert mandaté constituait un simple allégué de partie et ne pouvait remettre en cause l’avis de l’instance spécialisée et du département. Dans tous les cas, il ressortait de l’expertise de E______ que les arbres litigieux étaient dans un état physiologique et mécanique qui allait de bon à excellent, que les trois chênes allaient se développer ensemble et pourraient devenir centenaires et confirmait l’objectif de conservation de la canopée. Aucune des expertises ou avis ne remettaient en cause les éléments retenus par l’OCAN et le département, soit la valeur esthétique des arbres concernés, leur âge, leur état sanitaire et leur valeur de remplacement élevée.

L’appréciation n’était pas arbitraire, puisqu’elle était conforme à ce que prévoyait la directive en matière de pesée des intérêts. Le terrain de tennis ne répondait à aucun intérêt public, il ne pouvait être qualifié d’important et ne pouvait être comparé à la construction de logements.

Le raisonnement selon lequel la compensation devait être revue dans un second temps était conforme à la loi et devait être confirmé.

c. Dans sa réplique, A______ a intégralement persisté dans ses conclusions.

Le transport sur place avait fait naître des doutes sérieux quant au fait que les arbres constitueraient des éléments majeurs du paysage. Le TAPI ne pouvait dès lors faire siens les préavis de l’OCAN, qui ne s’était pas rendu sur place avant de les rédiger, et instruire davantage la situation.

L’appréciation du TAPI pour qualifier les arbres d’éléments majeurs du paysage était lapidaire et faisait abstraction des critères propres à permettre une telle qualification.

Les résultats issus d’une expertise privée étaient soumis à la libre appréciation des preuves, de sorte que l’autorité n’était pas exempte d’exposer les motifs pour lesquels elle ne serait pas concluante. L’expertise de E______ présentait une évidente qualité scientifique et de nombreux éléments factuels qui contredisaient les préavis de l’OCAN et permettaient d’établir que le TAPI avait mésusé de son pouvoir d’appréciation.

Le refus d’autorisation fondé sur l’application des critères du RCVA examinés en l’espèce étaient strictement limités aux cas concernant des arbres « pièces maîtresses » remarquablement intégrés dans le paysage, de sorte que la confirmation du jugement du TAPI créerait une nouvelle jurisprudence. Aucune décision judiciaire n’avait à ce jour accordé une protection particulière à des arbres de taille moyenne, totalement invisibles depuis le domaine public. Le refus d’abattage constituait une expropriation matérielle, soit une grave atteinte à la garantie de propriété.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le recourant considère que le TAPI a violé la maxime d'office en n'ayant pas procédé à d’autres actes d'instruction, lesquels auraient permis de se rendre compte si les arbres litigieux constituaient des éléments majeurs du paysage.

2.1 Selon l'art. 19 LPA, l'autorité établit les faits d'office. Elle n'est pas limitée par les allégués et les offres de preuves des parties. À teneur de l'art. 20 al. 1 LPA, l'autorité réunit les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties. Elle recourt s'il y a lieu aux moyens de preuve énumérés à l'art. 20 al. 2 LPA, notamment en ordonnant la production de documents (let. a), en entendant les parties (let. b) et des témoins (let. c) et en procédant à un examen (let. d).

Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés ; elle oblige notamment les autorités compétentes à prendre en considération d'office l'ensemble des pièces pertinentes qui ont été versées au dossier. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1021/2013 du 28 mars 2014 consid. 5.2 ; 2C_416/2013 du 5 novembre 2013 consid. 10.2.2). Le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA) comprend en particulier l'obligation d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (arrêts du Tribunal fédéral 8C_1034/2009 du 28 juillet 2010 consid. 4.2 ; 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 3.3.2. ; ATA/874/2020 du 8 septembre 2020 consid. 5a ; ATA/871/2015 du 25 août 2015 consid. 3c et les références citées).

En procédure administrative, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2e phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/874/2020 du 8 septembre 2020 consid. 5a ; ATA/659/2017 du 13 juin 2017 consid. 2b et les références citées).

2.2 Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1).

L'autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1).

En tout état, le droit d'être entendu ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l'issue du litige (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; 141 V 557 consid. 3.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1).

2.3 En l'espèce, le recourant ne peut valablement et de bonne foi soutenir que le TAPI n'a pas examiné la question de l'utilité des mesures d’instruction, ayant même été jusqu’à ordonner un transport sur place lors duquel toutes les parties étaient présentes. Lors de celui-ci de nombreuses questions relatives aux arbres litigieux ont été posées à l’OCAN, autorité compétente pour se prononcer en la matière, laquelle a répondu de façon précise. Il n’y avait ainsi pas lieu, par exemple, d’ordonner une expertise par un autre service que celui étatique spécialisé en la matière. Le TAPI a ainsi considéré que d’autres mesures d'instruction n'étaient pas nécessaires pour répondre aux différents griefs soulevés par le recourant.

Ce dernier n’a d’ailleurs pas effectué de réquisitions de preuves auprès du TAPI ou de la chambre administrative. Il n’indique en outre pas quelles mesures d’instruction le TAPI aurait dû ordonner, en sus du transport sur place, ce dernier étant déjà en possession de quatre préavis négatifs de l’OCAN et de sa détermination lors du transport concernant les arbres litigieux.

Au vu de ces éléments et des questions à résoudre, le TAPI était en droit de renoncer à d’autres mesures d'instruction au demeurant non sollicitées par le recourant.

Le grief est infondé.

3.             L’objet du litige porte sur la conformité au droit de la décision du département du
14 février 2023 refusant de délivrer au recourant l’autorisation de construire sollicitée.

Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a) et pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3).

La juridiction administrative chargée de statuer est liée par les conclusions des parties. Elle n’est en revanche pas liée par les motifs que les parties invoquent (art. 69 al. 1 LPA).

4.             Le recourant reproche au département d’avoir violé l’art. 15 RCVA et d’avoir abusé de son pouvoir d’appréciation.

4.1 Conformément à l’art. 3 de la loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage du 1er juillet 1966, (LPN - RS 451), les autorités, services, instituts et établissements fédéraux ainsi que les cantons doivent, dans l’accomplissement des tâches de la Confédération, prendre soin de ménager l’aspect caractéristique du paysage et des localités, les sites évocateurs du passé, les curiosités naturelles et les monuments historiques et, lorsque l’intérêt général prévaut, d’en préserver l’intégrité (al. 1). Ils s’acquittent de ce devoir, notamment, en attachant des charges ou des conditions aux autorisations et aux concessions, ou en refusant celles-ci
(al. 2 let. a ; art. 2 let. b). Ce devoir existe quelle que soit l’importance de l’objet au sens de l’art. 4. Une mesure ne doit cependant pas aller au-delà de ce qu’exige la protection de l’objet et de ses environs (al. 3).

La LPMNS a notamment pour but d'assurer la sauvegarde de la nature, en ménageant l'espace vital nécessaire à la flore et à la faune, et en maintenant les milieux naturels (art. 1 let. c).

À teneur de l'art. 36 al. 1 LPMNS, le Conseil d'État édicte les dispositions nécessaires à la protection, la conservation et l'aménagement des sites visés à
l'art. 35 LPMNS, soit notamment les espèces végétales. Il peut n’autoriser que sous condition ou même interdire l'abattage, l’élagage ou la destruction de certaines essences d’arbres, de cordons boisés, de boqueteaux, buissons ou de haies vives (art. 36 al. 2 let. a LPMNS).

4.2 En application de cette disposition, le Conseil d'État a adopté le RCVA, qui a pour but d'assurer la conservation, à savoir la protection, le maintien et le renouvellement, de la végétation formant les éléments majeurs du paysage
(art. 1 RCVA). Il est notamment applicable aux arbres situés en dehors de la forêt, telle que définie à l'art. 2 de la loi sur les forêts du 20 mai 1999 (LForêts - M 5 10), ainsi qu'aux haies vives et boqueteaux présentant un intérêt biologique ou paysager (art. 2 al. 1 RCVA).

Selon l’art. 3 al. 1 RCVA, aucun arbre ne peut être abattu ou élagué, ni aucune haie vive ou aucun boqueteau coupé ou défriché, sans autorisation préalable du département, sous réserve de l’al. 2, non pertinent en l'occurrence.

En application de l'art. 14 RCVA, les propriétaires, mandataires, requérants, constructeurs ou autres usagers de terrains sont tenus de veiller avec la plus grande attention à la préservation des arbres, haies vives et boqueteaux existants (al. 1). Il leur incombe de prendre, notamment lors de travaux, toutes précautions utiles pour assurer la survie des arbres, haies vives et boqueteaux, en se conformant aux directives édictées par le département (al. 2 let. b).

À teneur de l’art. 15 RCVA, l'autorisation d'abattage d'arbres ou de défrichage de haies vives et de boqueteaux est assortie, en principe, de l'obligation de réaliser des mesures compensatoires (al. 1). Une valeur de remplacement est attribuée aux végétaux dont l'abattage ou le défrichage est autorisé (al. 2).

L’art. 16 RCVA dispose que le département édicte des directives en matière de sauvegarde des végétaux maintenus, de leur mise en valeur et de l’exécution correcte des mesures compensatoires.

4.3 La directive d'août 2008 concernant la conservation des arbres (ci-après : la directive) précise les règles décisionnelles en matière de conservation du patrimoine arboré et vise à assurer la protection des arbres en place et simultanément le renouvellement du patrimoine arboré (art. 1 de la directive). La décision de maintenir un arbre est prise lorsque l’intérêt au maintien prime sur les motifs d’abattage. La décision d'abattage est prise seulement si des motifs valables empêchent le maintien de l'arbre (art. 2 de la directive). Les critères de maintien sont évalués en relation directe avec l'espèce par une personne qualifiée du département du territoire (art. 2.1 de la directive).

Les art. 2.1.1 à 2.1.4 de la directive énumèrent lesdits critères, à savoir : la beauté et l’intérêt du sujet (élément majeur du paysage, arbre remarquable, intérêt écologique), son état sanitaire (vigueur, absence de maladies, de blessures, qualité statique, couronne et charpente équilibrées) et son espérance de vie (potentialités de développement futur, espace disponible, conditions environnementales), ainsi que d’autres cas (impossibilité de compenser et de renouveler, maintien d’un espace plantable, situations particulières).

Les directives sont des ordonnances administratives dont les destinataires sont ceux qui sont chargés de l'exécution d'une tâche publique, et non les administrés. Elles ne sont pas publiées dans le recueil officiel de la collectivité publique et ne peuvent donc avoir pour objet la situation juridique de tiers (Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. I, 3e éd., 2012,
ch. 2.8.3.1). L'ordonnance administrative ne lie pas le juge, mais celui-ci la prendra en considération, surtout si elle concerne des questions d'ordre technique, mais s'en écartera dès qu'il considère que l'interprétation qu'elle donne n'est pas conforme à la loi ou à des principes généraux (ATA/552/2013 du 27 août 2013 consid. 4d).

4.4 Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l'autorité inférieure suit les préavis requis, la juridiction de recours doit s'imposer une certaine retenue, qui est fonction de son aptitude à trancher le litige (ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 15d ; ATA/284/2016 du 5 avril 2016 consid. 7c ; ATA/109/2008 du 11 mars 2008 consid. 4 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 508 et la jurisprudence citée). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/284/2016 précité consid. 7c ; ATA/51/2013 du 29 janvier 2013 consid. 5d).

Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux en mesure d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose alors une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, en matière économique, de subventions et d'utilisation du sol (ATA/896/2021 du 31 août 2021 consid. 4b).

4.5 En l'espèce, l'OCAN, instance compétente dans ce domaine et qui est le mieux à même de prendre en considération tous les paramètres spécifiques, s'est déclaré défavorable au projet à quatre reprises. Sur la base du dossier complet remis par le recourant dans le cadre de la requête d’autorisation de construire, il a souligné que le projet était trop impactant sur la végétation et que les arbres situés en lieu et place de l’implantation du futur terrain de tennis étaient des éléments majeurs qui devaient être conservés comme tels (préavis des 20 octobre, 3 et
21 novembre 2022). À la suite des déterminations du recourant, l’OCAN a confirmé sa position en précisant que le principe voulu par les dispositions légales était celui de la conservation des arbres. Leur abattage ne pouvait ainsi intervenir que pour des motifs particuliers, dont l’importance devait l’emporter sur ce qui conférait une plus ou moins grande importance aux sujets. Les motifs d’abattage pouvaient concerner des problèmes de sécurité, des nuisances d’une certaine gravité ou encore des projets de construction ou d’aménagement incompatibles avec le maintien des arbres et qui revêtaient un intérêt public ou privé suffisamment important (préavis du 6 décembre 2022).

Lors du transport sur place du 12 octobre 2023, l’OCAN, après avoir examiné les arbres litigieux, a à nouveau confirmé être défavorable à leur abattage. La construction d’un terrain de tennis, qui relevait du loisir et n’était pas essentielle, ne primait pas sur l’abattage notamment des trois chênes rouges et des deux pins maritimes qui pourraient devenir centenaires.

Le recourant produit, afin de contredire la version de l’OCAN, une expertise privée de E______.

Il sera rappelé dans un premier temps, selon la jurisprudence constante, les résultats issus d'une expertise privée sont soumis au principe de la libre appréciation des preuves et sont considérés comme des simples allégués de parties (ATF 142 II 355 consid. 6 ; ATF 141 IV 369 consid. 6). Tel est le cas pour l’expertise de E______ et du rapport de D______ SA.

L’expertise de E______, qui n’est pas l’autorité compétente en la matière selon la directive (ch. 2.1) et ne saurait dès lors se substituer à l’avis de l’OCAN, retient notamment que certains des arbres litigieux présentent des blessures. Cela étant, elle précise que ces blessures ont été infligées lors de la tonte ou de tailles trop importantes des arbres et ne découlent ainsi pas d’un mauvais état de santé général. Au contraire, elle qualifie celui-ci de bon à excellent et seules des hypothèses concernant leur croissance sont émises. La taille des arbres est au demeurant dans la moyenne selon les chiffres de cette expertise. Ces appréciations, qui ne font qu’opposer la vision du recourant à celle de l’OCAN ne permettent ainsi pas de retenir que ce dernier aurait outrepassé son pouvoir d’appréciation et erré en se déclarant défavorable à l’abattage d’arbres sains et vieux de plusieurs dizaines d’années au profit d’un terrain de tennis.

L’avis de l’OCAN est au contraire d’autant plus probant que le TAPI, qui a effectué un transport sur place, n’a pu trouver un élément sérieux qui aurait permis de le remettre en question et l’a donc confirmé.

À l’instar du TAPI, la chambre de céans constate que le recourant échoue à démontrer que l'analyse de l'OCAN aurait été effectuée de manière irrégulière ou qu’elle serait fondée sur des considérations arbitraires ou étrangères au but poursuivi par le RCVA, soit la préservation de la nature.

De plus, dans la mesure où la chambre de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des instances spécialisées composées de spécialistes et au vu des éléments précités, les arbres en cause doivent être reconnus, selon les explications de l’OCAN, comme éléments majeurs du paysage, de sorte que l’autorisation d’abattage devait être refusée.

En effet, la chambre administrative estime que c’est à juste titre que le département a retenu que l’intérêt à maintenir des arbres en bonne santé générale et plantés plusieurs dizaines d’années en arrière primait sur l’intérêt privé de construire un terrain de tennis qui ne constitue pas une nécessité, mais un loisir.

En définitive et au vu de ces éléments, le département, se fondant sur l'ensemble des préavis défavorables de l’OCAN, n'a nullement abusé de son pouvoir d'appréciation en refusant de délivrer l’autorisation querellée, ce que le TAPI, qui a d’autant plus instruit la cause en effectuant un transport sur place, a confirmé à juste titre.

Enfin, contrairement à ce que soutient le recourant, une autorisation d’abattage ne doit pas être systématiquement octroyée, dès que des mesures de compensations sont prévues. En effet, si l’abattage est en principe conditionné à de telles mesures, l’existence de celles-ci n’est pas suffisante pour autoriser tout abattage, qui est soumis à certaines conditions légales et décrites dans la directive.

Ce grief doit également être rejeté.

En tous points mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 décembre 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 novembre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Andreas FABJAN, avocat du recourant, au département du territoire - OAC ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Valérie MONTANI, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :