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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/500/2024

JTAPI/866/2024 du 02.09.2024 ( OCPM ) , REJETE

ATTAQUE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/500/2024

JTAPI/866/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 2 septembre 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______ et Madame B______, agissant pour leur compte et celui de leur enfant mineur, C______, représentés par Me Martin AHLSTROM, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1989, sa compagne, Madame B______, née le ______ 1997, et leur fils C______, né le ______ 2020 à Genève, sont ressortissants albanais.

2.             Par requête réceptionnée le 20 juin 2023 par l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), M. A______ et Mme B______, sous la plume de leur conseil, ont sollicité la régularisation des conditions de leur séjour et celui de leur fils.

La situation économique en Albanie les avait poussés à venir en Suisse. M. A______ était arrivé en 2014 et Mme B______ l’avait rejoint en 2018. Ils n’avaient jamais émargé à l’assistance publique, n’avaient pas de dettes ni fait l’objet de condamnations pénales. Depuis son arrivée en suisse, M. A______ travaillait en qualité de cuisinier. Il était au bénéfice d’un contrat à durée indéterminée auprès de D______ SA. Il parlait couramment le français et était parfaitement intégré. Un retour en Albanie les exposerait à de graves difficultés financières compte tenu de la situation économique précaire du pays.

Ils ont notamment joint les pièces suivantes :

Le concernant :

-          une attestation d’achat d’abonnements établie par les Transports publics genevois (TPG) le 30 mai 2022 ;

-          un document daté du 7 janvier 2021 attestant de ses compétences en langue française (niveau B1 à l’oral) ;

-          une attestation de transfert d’argent établie par E______ Sàrl (ci-après : attestation de transfert d’argent) pour la période comptable de janvier 2014 à novembre 2020 ;

-          son contrat de travail daté du 3 février 2020 auprès de D______ SA pour un emploi de serveur à mi-temps, dès le 1er février 2020 ;

-          le formulaire M daté du 8 juin 2023 complété par son employeur.

La concernant :

-          trois certificats médicaux établis les 1er juin, 3 juillet et 2 août 2018, par un cabinet médical à Genève, certifiant qu’elle se trouvait en incapacité totale de travail du 1er juin au 31 août 2018 ;

-          des documents médicaux attestant de son suivi de grossesse à Genève, dès le 27 juillet 2019 ;

-          une attestation d’achat d’abonnements établie par les TPG le 30 mai 2022.

3.             Le 18 juillet 2023, M. A______ et Mme B______ ont communiqué des renseignements complémentaires, sous la plume de leur conseil.

Ils s’étaient connus en 2015 et vivaient ensemble depuis mai 2018. M. A______ était arrivé à Genève en janvier 2014. Il ne disposait pas de justificatif de sa présence à Genève pour l’année 2015. Au besoin, il solliciterait des attestations de la part d’amis et de connaissances. Sa compagne l’avait rejoint en mai 2018. Depuis le mois de juin 2023, il travaillait à plein temps et percevait un salaire de CHF 5'000.- par mois. Leur loyer mensuel était de CHF 1'300.- et les primes d’assurance-maladie étaient de CHF 740.- par mois. Mme B______ avait prévu de passer un examen de français le 23 août prochain.

4.             Par courrier du 24 novembre 2023, l’OCPM a fait part à M. A______ et Mme B______ de son intention de refusé de préaviser favorablement leur dossier auprès du secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM) en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour et de prononcer leur renvoi de Suisse.

En dépit de son obligation de collaborer, l’intéressé n’avait pas fourni de preuve de sa présence à Genève durant l’année 2015. Il n’avait ainsi pas établi, à satisfaction, un séjour de dix ans à Genève. En outre, leur intégration socio-culturelle ne pouvait pas être qualifiée de particulièrement remarquable. Elle correspondait au comportement ordinaire qui pouvait être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Ils n’avaient pas non plus démontré qu'une réintégration dans leur pays d'origine aurait de graves conséquences sur leur situation personnelle, indépendamment des circonstances, générales (économiques, sociales, sanitaires ou scolaires) affectant l'ensemble de la population restée sur place.

S’agissant de la prise en compte de l’art. 3 de la Convention relative aux droits de l'enfant (CDE - RS 0.107) et de l’intérêt supérieur de leur fils, ce dernier était désormais âgé de 3 ans et demi et n’était pas encore scolarisé, si bien que son intégration en Suisse n'était pas encore déterminante. Il était en bonne santé et sa réintégration dans son pays d’origine ne devrait pas poser de problèmes insurmontables, ce d'autant qu'il pourrait compter sur la présence de ses parents.

Un délai de 30 jours leur était accordé pour exercer leur droit d’être entendu par écrit.

5.             Le 29 décembre 2023, ils ont usé de ce droit, sous la plume de leur conseil.

S’agissant d’une demande de régularisation portant sur une famille avec enfant, la pratique admettait une durée de séjour de cinq ans. Si M. A______ n’avait pas été en mesure de fournir la preuve de sa présence en Suisse pour l’année 2015, il n’en demeurait pas moins qu’il avait établi, à satisfaction de droit, sa présence et celle de sa famille à Genève depuis plus de cinq ans. Il ressortait également des pièces produites qu’il avait fait preuve d’une excellente intégration.

6.             Par décision du 12 janvier 2024, l’OCPM a refusé, pour les motifs qui ressortaient de sa lettre d’intention du 24 novembre 2023, de préaviser favorablement le dossier des intéressés auprès du SEM, en vue de l’octroi d’autorisations de séjour. Il a également prononcé leur renvoi, leur impartissant un délai au 12 avril 2024 pour quitter la Suisse, le dossier ne faisant pas apparaître que l’exécution de cette mesure ne serait pas possible, serait illicite ou qu’elle ne pourrait pas être raisonnablement exigée.

Il a en outre précisé que la condition de la durée de séjour de cinq ans ne s’appliquait qu’aux familles avec enfants scolarisés à Genève.

7.             Par acte du 12 février 2024, M. A______ (ci-après : le recourant) et Mme B______ (ci-après : la recourante), agissant pour leur compte et celui de leur enfant mineur C______, sous la plume de leur conseil, ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à l’octroi des autorisations de séjour sollicitées, subsidiairement, au renvoi de la cause à l’OCPM pour un complément d’instruction et une nouvelle décision allant dans le sens des conclusions.

Ils ont retracé leur parcours et rappelé leur situation, et notamment la durée de leur séjour à Genève. S’agissant de leur fils, il était né à Genève où il avait vécu toute sa vie. Il parlait le français, fréquentait une garderie et serait scolarisé dès la rentrée 2024. Son cercle social se trouvait à Genève. Dans ces circonstances, compte tenu de la jurisprudence et des critères « post-Papyrus » applicables, la durée de séjour requise dans leur cas était de cinq ans.

En outre, le recourant était arrivé en Suisse en janvier 2014 et la recourante en mai 2018, de sorte que la durée de leurs séjours était de, respectivement, plus de dix ans et près de six ans, tel que cela ressortait des justificatifs produits. Le recourant parlait couramment le français et la recourante avaient des compétences linguistiques, dès lors qu’elle avait suivi des cours. Ils étaient financièrement indépendants, n’avaient pas de dettes et n’avaient jamais fait l’objet de condamnations pénales. L’OCPM avait ainsi abusé de son pouvoir d’appréciation en considérant que leur intégration n’était pas remarquable. Tout leur réseau social se trouvait à Genève et il serait particulièrement difficile à leur fils de s’intégrer en Albanie. Ils n’avaient plus aucune attache dans leur pays d’origine où ils se retrouveraient à la rue et dans une situation financière précaire.

8.             Dans ses observations du 10 avril 2024, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

Le recourant avait justifié de sa présence à Genève en 2014, puis dès 2016. Ainsi, à la date du dépôt de la demande, le 13 juin 2023, il ne pouvait se prévaloir que d’un séjour d’une durée de huit ans au total, faute de justificatifs pour l'année 2015.

Cela étant, la durée du séjour ne permettait pas à elle seule d’admettre un cas humanitaire. Or, le séjour des recourants s'était d’abord déroulé dans l'illégalité puis au bénéfice d'une tolérance cantonale suite au dépôt de leur demande. À cet égard, aucun élément au dossier ne permettait d'admettre une intégration socio-professionnelle particulièrement importante en Suisse, telle que requise par la jurisprudence. Le recourant, intégré sur le marché de l'emploi à Genève, était financièrement autonome mais la recourante n’avait jamais travaillé en Suisse. Ils n’avaient pas non plus démontré qu’un retour dans leur pays d'origine les exposerait à des conditions socio-économiques ou sanitaires autrement plus difficiles que celles auxquelles était confrontée la plupart de leurs compatriotes restés au pays. Le recourant, âgé de 35 ans, et la recourante âgée de 26 ans, ne devraient pas rencontrer de difficultés insurmontables pour se réintégrer en Albanie, pays où ils étaient nés, dont ils parlaient la langue et où ils avaient passé leur enfance, leur adolescence et une grande partie de leur vie d'adulte.


Enfin la situation de leur fil, âgé de 4 ans, ne conduisait pas à une appréciation différente. Son très jeune âge ne pouvait en effet pas s'opposer à un retour dans son pays d'origine.

9.             Le 13 mai 2024, les recourants ont répliqué sous la plume de leur conseil. Ils ont repris en substance les arguments développés dans leurs précédentes écritures, reprochant à l’OCPM d’avoir abusé de son pouvoir d’appréciation.

10.         Dans sa duplique du 12 avril 2024, l’OCPM a indiqué ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

11.         Le détail des écritures et des pièces des parties sera repris, en tant que de besoin, ci-après dans la partie en droit.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas en l'espèce.

6.             Selon l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission d'un étranger en Suisse pour tenir compte d'un cas individuel d'extrême gravité.

7.             L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l'existence d'une telle situation, il convient de tenir compte, notamment, de l'intégration du requérant sur la base des critères d'intégration définis à l'art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l'état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g).

Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (cf. ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; 137 II 1 consid. 1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017), d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (cf. ATA/1669/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7b).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu'ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1020/2017 du 27 juin 2017 consid. 5b ; cf. aussi arrêts du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3 ; 2C_222/2017 du 29 novembre 2017 consid. 1.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (cf. ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

8.             Selon l'art. 58a al. 1 LEI, les critères d'intégration sont le respect de la sécurité et de l'ordre publics (let. a), le respect des valeurs de la Constitution (let. b), les compétences linguistiques (let. c), ainsi que la participation à la vie économique ou l'acquisition d'une formation (let. d).

9.             L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question, et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1131/2017 du 2 août 2017 consid. 5e).

La reconnaissance de l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité implique que les conditions de vie et d'existence de l'étranger doivent être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. En d'autres termes, le refus de le soustraire à la réglementation ordinaire en matière d'admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il y soit bien intégré, tant socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite que l'on ne puisse exiger qu'il vive dans un autre pays, notamment celui dont il est originaire. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage qu'il a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3 ; 124 II 110 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C 754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 7.2 ; 2A 718/2006 du 21 mars 2007 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-6956/2014 du 17 juillet 2015 consid. 6.1 ; C_5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.3 ; C_6726/2013 du 24 juillet 2014 consid. 5.3 ; ATA/181/2019 du 26 février 2019 consid. 13d ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'une telle situation, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse et la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-2584/2019 du 11 décembre 2019 consid. 5.3 ; F-6510/2017 du 6 juin 2019 consid. 5.6 ; F-736/2017 du 18 février 2019 consid. 5.6 et les références citées ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1130/2017 du 2 août 2017 consid. 5b).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de la réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l’intéressé, seraient gravement compromises (arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; ATA/577/2021 du 1er juin 2021 consid. 2c).

10.         Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; 2A.166/2001 du 21 juin 2001 consid. 2b/bb ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-912/2015 du 23 novembre 2015 consid. 4.3.2 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017 ; ATA/287/2016 du 5 avril 2016).

La durée du séjour (légal ou non) est ainsi un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul, pour la reconnaissance d'un cas de rigueur. La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée (ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. II : LEtr, 2017, p. 269 et les références citées). A été considérée comme une durée assez brève la présence de deux ans et demi, entre 2006 et 2008, puis de trois ans, entre mai 2009 et mai 2012 (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5048/2010 du 7 mai 2012 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6c ; ATA/1306/2020 du 15 décembre 2020 consid. 5b ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Le caractère continu ou non du séjour peut avoir une influence (ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7f ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5048/2010 du 7 mai 2012 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Le Tribunal fédéral a considéré que l'on ne saurait inclure dans la notion de séjour légal les périodes où la présence de l'intéressé est seulement tolérée en Suisse et qu'après la révocation de l'autorisation de séjour, la procédure de recours engagée n'emporte pas non plus une telle conséquence sur le séjour (cf. arrêt 2C_926/2010 du 21 juillet 2011 ; cf. aussi ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; cf. Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 270).

Ainsi, le simple fait, pour un étranger, de séjourner en Suisse pendant de longues années, y compris à titre légal, ne permet pas d'admettre un cas personnel d'extrême gravité sans que n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles (cf. ATAF 2007/16 consid. 7 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral E-643/2016 du 24 juillet 2017 consid. 5.1 et les références citées ; cf. ég., sous l'ancien droit, ATF 124 II 110 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.540/2005 du 11 novembre 2005 consid. 3.2.1).

Enfin, en règle générale, la durée du séjour illégal en Suisse ne peut être prise en considération dans l'examen d'un cas d'extrême gravité, car, si tel était le cas, l'obstination à violer la législation serait en quelque sorte récompensée (ATAF C-6051/2008 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-6098/2008 du 9 juillet 2010 consid. 6.4 ; ATA/188/2016 du 1er mars 2016 consid. 10 ; ATA/80/2016 du 26 janvier 2016 consid. 5g et les références citées).

11.         L'intégration professionnelle de l'intéressé doit revêtir un caractère exceptionnel au point de justifier, à elle seule, l'octroi d'une autorisation de séjour en dérogation aux conditions d'admission. Le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ou doit avoir réalisé une ascension professionnelle remarquable, circonstances susceptibles de justifier à certaines conditions l'octroi d'un permis humanitaire (arrêt du Tribunal fédéral 2A543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.4 et les références citées ; ATA/775/2018 du 24 juillet 2018 consid. 4d ; ATA/882/2014 du 11 novembre 2014 consid. 6d et les arrêts cités). À titre d'exemple, le Tribunal fédéral a notamment retenu en faveur d'un étranger installé depuis plus de onze ans en Suisse qu'il y avait développé des liens particulièrement intenses dans les domaines professionnel (création d'une société à responsabilité limitée, emploi à la délégation permanente de l'Union africaine auprès de l'ONU) et social (cumul de diverses charges auprès de l'Eglise catholique) (arrêt 2C_457/2014 du 3 juin 2014 consid. 4 et les références citées).

12.         Lorsqu'une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte dans son pays d'origine, elle y reste encore attachée dans une large mesure. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l'âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d'origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

Il est parfaitement normal qu'une personne, ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers, s'y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l'une des langues nationales. Aussi, les relations d'amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l'étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d'une situation d'extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.3 ; F-1714/2016 du 24 février 2017 consid. 5.3 ; C-7467/2014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine).

L'intégration socio-culturelle n'est donc en principe pas susceptible de justifier à elle seule l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (cf. not. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ; C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7 ; Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l'engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d'une intégration réussie, voire remarquable (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine ; cf. aussi Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10).

13.         Lorsqu'il y a lieu d'examiner la situation d'une famille sous l'angle de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, la situation de chacun de ses membres ne doit pas être considérée isolément, mais en relation avec le contexte familial global. Le sort de la famille formera en général un tout. Il serait en effet difficile d'admettre le cas d'extrême gravité, par exemple, uniquement pour les parents ou pour les enfants. Ainsi, le problème des enfants est un aspect, certes important, de l'examen de la situation de la famille, mais ce n'est pas le seul critère. Il y a donc lieu de porter une appréciation d'ensemble, tenant compte de tous les membres de la famille. Quand un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse ou lorsqu'il y a juste commencé sa scolarité, il reste encore dans une large mesure rattaché à son pays d'origine par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socio-culturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour au pays d'origine constitue un déracinement complet (ATAF 2007/16 du 1er juin 2007 et les références citées). Avec la scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et, au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle commencées en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6053/2017 du 13 février 2020 consid. 8.2.1 ; ATA/404/2021 du 13 avril 2021 consid. 7 ; ATA/1818/2019 du 17 décembre 2019 consid. 5f). L’adolescence, une période comprise entre douze et seize ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6053/2017 du 13 février 2020 consid. 8.2.1 ; ATA/91/2022 du 1er février 2022 consid. 2d).

Sous l'angle du cas de rigueur, le Tribunal fédéral a considéré que cette pratique différenciée réalisait la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, telle qu'elle est prescrite par l'art. 3 al. 1 de la Convention relative aux droits de l'enfant, conclue à New York le 20 novembre 1989, approuvée par l'Assemblée fédérale le 13 décembre 1996. Instrument de ratification déposé par la Suisse le 24 février 1997 (CDE - RS 0.107) (cf. ATF 135 I 153 consid. 2.2.2 ; arrêts 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 et 2A.43/2006 du 31 mai 2006 consid. 3.1 ; cf. aussi ATA/404/2021 du 13 avril 2021 consid. 7 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6053/2017 du 13 février 2020 consid. 8.2.1).

14.         L'opération « Papyrus », qui a pris fin le 31 décembre 2018 (ATA/1153/2022 du 15 novembre 2022 consid. 7), consistait en un processus de régularisation des personnes séjournant à Genève sans titre de séjour, élaboré par le département de la sécurité et de l'économie, devenu département de la sécurité, de l'emploi et de la santé (DSES), « dans le strict respect du cadre légal en vigueur (art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA [soit du cas de rigueur exposé ci-dessus] » ; cf. communiqué de presse du 21 février 2017 : https://demain.ge.ch/actualite/operation-papyrus-presentee-aux-medias-21-02-2017). Le DSES a ainsi précisé - en tenant compte de la marge d'appréciation possible (cf. brochure officielle publiée en février 2017 : https://demain.ge.ch/document/brochure-papyrus).

Les critères objectifs et cumulatifs permettant aux personnes concernées de demander la légalisation de leur séjour selon ce programme étaient les suivants : une intégration réussie (niveau A2 de français du cadre européen commun de référence pour les langues et scolarisation des enfants notamment) ; une absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal) ; une indépendance financière complète ; un séjour continu de cinq ans (pour les familles avec enfants scolarisés) ou de dix ans pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires.

Ces conditions devaient être remplies au moment du dépôt de la demande d’autorisation de séjour (ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 8b). Par ailleurs, s'écartant sur ce point de la jurisprudence de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre), le Tribunal administratif fédéral a jugé, qu’au vu des spécificités de l'opération « Papyrus », qui était limitée dans le temps, il se justifiait d'en restreindre l'application aux personnes étrangères qui en remplissaient la condition temporelle au moment où ce programme était encore en cours, soit du mois de février 2017 à décembre 2018 (arrêt F-4206/2021 du 2 novembre 2022 consid. 6.3 et réf. cit.).

Enfin, le communiqué de presse du Conseil d’État du 4 mars 2019, selon lequel les conditions de régularisation de cette opération perduraient après sa fin, ne pouvait se substituer aux conditions posées par la législation et la jurisprudence en la matière (ATA/1025/2023 du 19 septembre 2023 consid. 2.11).

15.         Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI).

16.         Lorsque les conditions légales pour se prévaloir d'un droit à l'autorisation de séjour ne sont pas remplies, les autorités ne jouissent pas d'un pouvoir d'appréciation dans le cadre duquel il y aurait lieu de procéder, conformément à cette disposition, à un examen de la proportionnalité. Admettre l'inverse aurait pour effet de déduire de l'art. 96 LEI un droit à l'obtention ou au renouvellement de l'autorisation, ce qui ne correspond pas à la lettre de cette disposition, qui prévoit uniquement que les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son intégration (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_30/2020 du 14 janvier 2020 consid. 3.2).

17.         L'octroi d'une autorisation de séjour dans un cas individuel d'une extrême gravité et l’octroi d’une autorisation de courte durée ou d’une autorisation de séjour en vue de préserver des intérêts publics majeurs sont soumis au SEM pour approbation (art. 99 LEI ; art. 85 al. 1 et 2 et 86 al. 5 OASA ; art. 5 let. d et e de l'ordonnance du DFJP relative aux autorisations soumises à la procédure d'approbation et aux décisions préalables dans le domaine du droit des étrangers du 13 août 2015 - RS 142.201.1).

18.         En l’espèce, après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, il y a lieu de constater que l'OCPM n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que les recourants et leur fils ne satisfaisaient pas aux conditions strictes requises pour la reconnaissance d'un cas de rigueur.

Sous l’angle de la durée de séjour, le tribunal relèvera d’emblée que les recourants ne peuvent pas se prévaloir du critère du séjour continu de cinq ans pour les familles avec enfants scolarisés. En effet, contrairement aux exigences posées par la jurisprudence, ils ne remplissaient pas cette condition, lorsqu’ils ont déposé leur demande d’autorisations de séjour. À cette date, leur fils qui n’était alors âgé que d’un peu plus de trois ans, n’était pas encore scolarisé.

Cela étant, le recourant et la recourante allèguent séjourner de manière continue à Genève depuis, respectivement janvier 2014 et mai 2018, sans toutefois en apporter la preuve.

Le concernant :

Si l’attestation de transfert d’argent produit couvre la période comptable de janvier 2014 à novembre 2020, elle indique également que seuls deux transferts ont été effectués par le recourant en 2014, soit les 5 et 15 septembre. Par la suite, aucun autre transfert n’a été effectué jusqu’au 12 avril 2017. Quant à l’attestation établie par les TPG, elle prouve l’achat d’abonnements du 20 août au 20 novembre 2016, du 26 mai au 25 juin 2017, puis dès le 1er mars 2018. Le recourant n’a en outre produit aucun justificatif de sa présence à Genève durant l’année 2015.

La concernant :

Hormis les trois certificats médicaux attestant d’une incapacité totale de travail du 1er juin au 31 août 2018, la recourante n’a produit aucun autre document démontrant sa présence à Genève durant les autres mois de l’année 2018. Les versements d’argent que le recourant a effectués en sa faveur en Albanie durant cette année-là, soit les 9 et 15 août, les 1er et 6 octobre, les 1er et 24 novembre et le 20 décembre (cf. l’attestation de transfert d’argent) indiquent, au contraire, qu’elle se trouvait en Albanie durant ces mois, étant relevé qu’un versement en sa faveur a également été effectué le 22 janvier 2019. Quant à l’attestation établie par les TPG, il ne prouve l’achat d’abonnements que du 17 juin au 1er octobre 2019.

Dans ces circonstances et dans l’hypothèse qui leur est la plus favorable, il y a lieu de retenir que le recourant et la recourante séjournent à Genève de manière continue depuis, respectivement avril 2017 et juin 2019.

Si la durée de séjour du recourant peut être qualifiée d’assez longue, elle doit néanmoins être fortement relativisée, dès lors qu’elle a été effectuée illégalement dans sa quasi-totalité et à la faveur d’une tolérance des autorités depuis le dépôt de la demande le 20 juin 2023. Ce constat vaut a fortiori s’agissant de la recourante qui ne séjourne en Suisse que depuis un peu plus de cinq ans.

En tout état, la durée du séjour n’est qu’un critère parmi d’autres et le simple fait de séjourner en Suisse pendant de longues années, même légalement, ne permet pas d'admettre un cas personnel d'extrême gravité sans que n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles qui font ici défaut.

Le recourant ne peut en effet pas se prévaloir d’une intégration socio-professionnelle exceptionnelle. L’emploi qu’il exerce dans le domaine de la restauration ne témoigne pas d’une ascension professionnelle remarquable et il n’a pas acquis des qualifications spécifiques susceptibles de justifier l'admission d'un cas de rigueur au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. Il ne peut pas non plus se prévaloir d’un comportement irréprochable. Il a non seulement séjourné et travaillé illégalement en Suisse durant plusieurs années, ce qui est en soi déjà répréhensible (arrêts du Tribunal fédéral administratif F-989/2022 du 17 mai 2023 consid. 8.6 ; F- 5341/2020 du 7 février 2022 consid. 6.5), mais il a également fait venir la recourante, sans l'aval des autorités helvétiques. Or, il existe un intérêt public prononcé à éviter la politique du fait accompli et à ne pas discréditer gravement les conditions posées par la Suisse à l'admission et au séjour des étrangers (arrêts du Tribunal fédéral 2C_634/2017 du 14 août 2018 consid. 3.8 et 2C_616/2012 du 1er avril 2013 consid. 1.4.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral du 18 novembre 2022 consid. 7.7).

Sur le plan social, le recourant a certes appris le français (niveau B2), mais il ne ressort pas du dossier qu’il aurait noué avec la Suisse des liens dépassant en intensité ce qui peut être raisonnablement attendu d’un étranger ayant passé un nombre d'années équivalent dans le pays.

Les considérations qui précèdent valent a fortiori en ce qui concerne l’intégration socio-professionnelle de la recourante qui n’a jamais travaillé en Suisse et n’a pas non plus justifié de ses compétences linguistiques.

De plus, les recourants sont nés au Kosovo, où ils ont passé leur enfance et adolescence, soit les périodes cruciales pour l’intégration socio-culturelle (cf. ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 9a), et la majeure partie de leur vie d’adulte. Ils ont très certainement conservé des attaches avec leur patrie, comme en atteste les transferts d’argent effectués par le recourant en faveur de personnes, domiciliés à F______ (Albanie), portant leurs patronymes. C’est également le lieu de relever que sous la rubrique « adresse à l’étranger » du formulaire M, il est indiqué « G______ ». Contrairement à leurs allégations, ils ont ainsi vraisemblablement de la famille et dispose d’une adresse dans leur pays d’origine.

En tout état, le fait de travailler pour ne pas dépendre de l'aide sociale, d'éviter de commettre des actes répréhensibles et de s'efforcer d'apprendre au moins la langue nationale parlée au lieu du domicile constitue un comportement ordinaire qui peut être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Il ne s'agit pas là de circonstances exceptionnelles permettant à elles seules de retenir l'existence d'une intégration particulièrement marquée, susceptible de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur. Or, il ne ressort pas du dossier que les liens que le recourant a pu se créer en Suisse dépasseraient en intensité ce qui peut être raisonnablement attendu d’étrangers ayant passé un nombre d'années équivalent dans le pays. Il ne peut en tous cas pas se prévaloir d’une intégration sociale remarquable.

Ni l'âge des recourants, ni la durée de leur séjour sur le territoire, ni encore les inconvénients pratiques auxquels ils pourront éventuellement se heurter en cas de retour dans leur pays ne constituent des circonstances si singulières qu'il faille considérer qu'ils se trouveraient dans une situation de détresse personnelle devant justifier l'octroi d'une exception aux mesures de limitation. Une telle exception n'a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d'origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu'on ne saurait exiger d'eux qu'ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce que les recourants n'ont pas établi. Après un temps d’adaptation, ils pourront certainement se réintégrer sans difficultés insurmontables dans leur patrie, les connaissances linguistiques et professionnelles acquises en Suisse par le recourant, constituant des atouts sur le plan professionnel. En tout état, celui qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (cf. ATF 123 II 248 consid. 4a ; 111 Ibb 213 consid. 6b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1 ; 1C_269/2013 du 10 décembre 2013 consid. 4.1 et les références citées).

S’agissant de C______, désormais âgé de 4 ans, il est né à Genève. À teneur du recours, il était prévu qu’il entre en classe de 1P en août 2024. Compte tenu de son très jeune âge, il reste rattaché dans une large mesure, par le biais de ses parents, à leur patrie. Son intégration en Suisse n’est ainsi pas profonde au point qu’une réintégration dans son pays d’origine paraisse compromise.

Il sera enfin rappelé que l’intérêt supérieur de l’enfant au sens de l'art. 3 par. 1 de la CDE est d’abord de pouvoir vivre durablement auprès de ses parents, quel que soit l'endroit où il séjournera.

19.         En tout état, ni l’âge des recourants, ni la durée de leur séjour sur le territoire, ni encore les inconvénients pratiques auxquels ils pourraient éventuellement se heurter en cas de retour dans leur pays ne constituent des circonstances si singulières qu'il faille considérer qu'ils se trouveraient dans une situation de détresse personnelle devant justifier l'octroi d'une exception aux mesures de limitation. Une telle exception n'a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d'origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu'on ne saurait exiger d'eux qu'ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce que les recourants n’ont pas établi. En tout état, celui qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (cf. ATF 123 II 248 consid. 4a ; 111 Ibb 213 consid. 6b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1 ; 1C_269/2013 du 10 décembre 2013 consid. 4.1 et les références citées).

20.         Il ressort de ce qui précède que l'OCPM n'a violé ni le droit conventionnel, ni le droit fédéral, ni encore excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation (art. 96 LEI) en refusant de délivrer les autorisations de séjour sollicitées.

21.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

Le renvoi constitue la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande tendant à la délivrance ou la prolongation d'une autorisation de séjour, l'autorité ne disposant à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation (ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a).

22.         Les recourants et leur fils n'obtenant pas d'autorisation de séjour, c'est à bon droit que l'autorité intimée a prononcé leur renvoi de Suisse. Il n'apparaît en outre pas que l'exécution de cette mesure ne serait pas possible, serait illicite ou qu'elle ne pourrait être raisonnablement exigée (art. 83 LEI).

23.         Infondé, le recours sera rejeté et la décision contestée confirmée.

24.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

25.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 12 février 2024 par Monsieur A______ et Madame B______, agissant pour leur compte et celui de leur enfant mineur, C______, contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 12 janvier 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

Le greffier