Décisions | Chambre pénale de recours
ACPR/153/2025 du 25.02.2025 sur OCL/1424/2024 ( MP ) , REJETE
république et | canton de Genève | |
POUVOIR JUDICIAIRE P/18061/2012 ACPR/153/2025 COUR DE JUSTICE Chambre pénale de recours Arrêt du mardi 25 février 2025 |
Entre
A______, domicilié ______ [VD], agissant en personne,
B______, domicilié ______ [VD], agissant en personne,
recourants,
contre l'ordonnance de classement et de non-entrée en matière rendue le 11 octobre 2024 par le Ministère public,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.
EN FAIT :
A. a.a. Par acte expédié le 31 octobre 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 11 précédent, notifiée le 21 suivant, par laquelle le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur ses plaintes des 21 juin 2017 et 17 novembre 2020, rejeté ses réquisitions de preuve, et ordonné, pour le surplus, le classement de la procédure.
Il conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de l'ordonnance querellée, à ce que sa qualité de partie plaignante soit reconnue pour les infractions d'escroquerie (art. 146 CP), d'extorsion (art. 156 CP), de faux dans les titres (art. 251 CP), d'induction de la justice en erreur (art. 304 CP) et d'entrave à l'action pénale (art. 305 CP), ainsi qu'au renvoi de la cause au Ministère public pour instruction des infractions précitées et celle de dénonciation calomnieuse (art. 303 CP).
a.b. Le recourant a versé les sûretés en CHF 2'000.- qui lui étaient réclamées par la Direction de la procédure.
b.a. Par acte expédié le 25 octobre 2024, B______ recourt contre l'ordonnance précitée et conclut, sous suite de frais et dépens, à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour instruction.
b.b. Le recourant a versé les sûretés en CHF 2'000.- qui lui étaient demandées par la Direction de la procédure.
B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :
I. Les sociétés
a. C______ SA EN LIQUIDATION (ci-après, C______ SA ou la société) est une société anonyme sise à D______ (Valais) ayant comme but la gestion, la prise de participations dans des sociétés, le consulting et la gestion de ressources humaines en Suisse et à l'étranger.
A______, avocat spécialisé en droit commercial et des contrats, en a été l'administrateur unique, avec signature individuelle, entre le 27 juillet 2006 et le 25 mai 2011 et entre le 4 juillet 2011 et le 9 juillet 2015. Entre le 25 mai et le 4 juillet 2011 et depuis le 9 juillet 2015, le conseil d'administration de C______ SA est composé de E______ et de F______, qui disposent d'une signature collective à deux.
b. G______ SA est une société genevoise constituée en ______ 2009, dont le but est la gestion de projets, ainsi que le conseil en fusions et acquisitions dans les domaines des infrastructures, de l'industrie et des matières premières. E______ en est l'actionnaire majoritaire et l'administrateur président avec signature individuelle.
II. Le contexte
c. Les 8 et 23 août 2005, E______, fiduciant, et A______, fiduciaire, ont signé une convention de fiducie, à teneur de laquelle celui-ci était chargé – moyennant rémunération – d'encaisser des commissions revenant à celui-là, notamment dans le cadre de la finalisation de contrats portant sur la réalisation de divers projets en Algérie.
E______, qui souhaitait que les contrats soient gérés par une société suisse, a remis à A______, à titre fiduciaire, les actions de C______ SA.
d. Le 3 juillet 2008, C______ SA a acquis les parcelles nos 1______ et 2______ sises à H______ (Valais) (ci-après, les parcelles de H______), pour le montant de CHF 2'000'000.-. Cette acquisition a été financée en partie par un prêt hypothécaire de [la banque] I______ de CHF 1'000'000.-.
e. Par courriels des 6 et 11 avril 2010, E______ a formulé divers reproches à l'encontre de A______, mettant en exergue des dysfonctionnements au sein de C______ SA. Il a sollicité la mise en place d'une double signature pour tout acte de gestion, ce qui impliquait la nomination de J______ en qualité de deuxième administrateur et a ajouté que: "[T]ant que ces modifications ne seront pas faites; il n'y aura plus aucune contribution financière directe à C______ SA. Tous les engagements financiers de C______ SA seront directement pris en charge par G______ SA. De même, afin de ne pas perturber nos relations d'affaires nous ne vous dérangerons plus sur les dossiers en cours qui sont […] les contrats en cours de signature avec K______ BV […]".
Au premier courriel est annexé un contrat de prestations de service – non signé – entre G______ SA et K______ BV. L'art. 4 stipule que "[l]e présent contrat, nonobstant sa date de signature, rétroagit avec effet au 1er septembre 2009 et vaut ratification de part et d'autre des parties concernées de tout acte accompli aux fins d'exécution des obligations que renferment les présentes, à compter du 1er septembre 2009. Le présent contrat déploiera ses effets jusqu'au 31 août 2011".
f. Le 19 novembre 2010, E______ a informé A______ résilier avec effet immédiat la convention de fiducie de 2005.
Le 17 décembre suivant, le premier a demandé au second de lui faire parvenir les certificats d'actions de C______ SA, ce qui a été refusé par A______ au motif qu'il exerçait un droit de rétention en garantie de sa créance d'honoraires.
g. Le 8 avril 2011, E______ a tenu à Genève une assemblée générale extraordinaire de la société, qui a décidé de la résiliation avec effet immédiat du mandat de l'administrateur unique, de la nomination de E______ comme président avec signature individuelle, de F______ en tant que secrétaire, et de J______ en tant que membre, les deux derniers nommés disposant du droit de signature collective à deux.
De son côté, A______, le 24 juin 2011, a également tenu une assemblée générale extraordinaire de la société dans les locaux d'un notaire à L______, auprès de qui il s'est présenté comme le légitime détenteur des actions. Tenant pour nulles les décisions prises lors de l'assemblée du 8 avril 2011, il a résilié les mandats de E______ et de F______ avec effet immédiat et s'est nommé administrateur unique de la société, avec droit de signature individuelle.
h. Aux dires de A______, C______ SA était privée de toute liquidité à la suite de la décision de E______ de "rediriger" des contrats revenant à la société. Il avait ainsi établi deux cédules hypothécaires au porteur grevant en deuxième rang les parcelles de H______ pour les montants respectifs de CHF 200'000.- et CHF 400'000.-.
i. Le 21 octobre 2011, C______ SA et B______ ont conclu un contrat d'investissement immobilier (PP 110'326) aux termes duquel, ce dernier prêtait à la société une somme de CHF 100'000.-, avec intérêts annuels à 7%. D'après l'art. 7, C______ SA remettait en nantissement en faveur de l'investisseur une cédule hypothécaire au porteur constituée en 2ème rang et grevant les parcelles de H______. Il est mentionné en préambule que "B______ a été informé des dissensions survenues depuis l'acquisition des parcelles précitées entre [E______ et A______] avec pour conséquence que des liquidités conséquentes, attendues sur les comptes de la société, ont été en réalité dirigées sur une nouvelle entité […]".
j. Le 26 novembre 2012, E______ a adressé à B______ un courrier ayant la teneur suivante: "[…] Depuis une année et demi, M. A______ agit en qualité d'administrateur unique de C______ SA, ce sur la base d'un prétendu droit de rétention civil sur les titres de dite société, justifié par une créance en honoraires infondée, elle-même basée sur une convention de fiducie résiliée. […] Il refuse depuis lors de rendre les actions au porteur de C______ SA à M. E______, qui lui appartiennent et représentent la totalité des actions de la société, et continue à gérer dite société de manière totalement contraire aux intérêts de C______ SA […]. Au vu de cette situation, il nous incombe de vous aviser que nous considérons que votre investissement peut être qualifié d'investissement à haut risque, et qu'il n'a jamais reçu l'aval du propriétaire […]" (PP 110'334).
k. Les 16 décembre 2011 et 28 février 2013, C______ SA a tenu des assemblées générales à l'occasion desquelles A______ a refusé de reconnaître la légitimation de E______ à prendre part au vote sur les points de l'ordre du jour.
E______ et A______ se sont ensuite opposés dans le cadre d'une procédure civile à l'issue de laquelle, le Tribunal fédéral a, par arrêt 4D_73/2014 du 15 avril 2015, retenu ce qui suit: "[…] [L]a convocation (et la tenue) […] de l'assemblée générale du 28 février 2013 n'était qu'un simulacre de convocation, l'administrateur n'ayant jamais eu la volonté de convoquer (et de tenir) une assemblée générale qui permettrait à l'actionnaire d'exercer ses droits sociaux. […] [L]'absence d'intention de l'administrateur de convoquer une assemblée générale permettant à l'actionnaire d'exercer ses droits sociaux est corroborée par son attitude générale qui […] a conduit à un complet blocage des activités sociales […]. [I]l est patent que l'administrateur, qui a toujours refusé de reconnaître la légitimation de l'actionnaire, n'a aucune intention de faciliter les démarches de l'actionnaire. Dans les circonstances de l'espèce, il paraît justifié […] de désigner directement le notaire (tiers neutre) qui procédera à la convocation de l'assemblée générale" (PP 600'547 ss).
l. Lors de l'assemblée générale qui s'est tenue le 23 juin 2015, E______ et F______ ont été nommés administrateurs en remplacement de A______.
III. De la faillite de C______ SA
m.a. Sur poursuite de I______, les parcelles de H______ ont été vendues aux enchères, le 14 janvier 2016, et adjugées au poursuivant pour un montant de CHF 240'000.-.
Le 29 avril suivant, B______ – lequel avait produit sa créance devant l'Office des poursuites de M______ [VS] le 3 décembre précédent – s'est vu délivrer une constatation de l'insuffisance d'un gage à hauteur de CHF 128'816.70. Il était invité à intenter une poursuite pour le découvert par la voie de la faillite (PP 110'388 ss).
m.b. Le 12 avril 2016, C______ SA a adressé au Tribunal du district de D______ un avis de surendettement (PP 120'052 ss), dont il ressort qu'au 31 décembre 2015 les fonds propres étaient négatifs (CHF -2'829'775.-) et que la société avait subi une perte commerciale de CHF 2'150'012.-, laquelle s'expliquait par la vente aux enchères des parcelles de H______ au créancier gagiste à un prix nettement inférieur à sa valeur comptable. Les états financiers avaient été établis aux valeurs comptables et le principal actif – le terrain – était évalué à sa valeur vénale, soit CHF 240'000.- [CHF 2'247'948 – CHF 2'007948 à titre de provision pour moins-value].
Y figurent les comptabilités pour les années 2013 à 2015 dont il ressort que (PP 120'195ss):
- le poste "Compte courant actionnaire" dans les actifs circulants se chiffrait à CHF 7'502.- en 2013, CHF 5'502.- en 2014 et CHF 502 en 2015.-;
- le poste "Compte courant G______ SA" dans les dettes à court terme totalisait CHF 161'820.- en 2013 et était demeuré inchangé les années suivantes;
- les postes "Hypothèque I______" et "Prêts de tiers" se chiffraient à CHF 962'500 en 2013 et en 2014, et CHF 957'063 en 2015, respectivement à CHF 1'090'000 en 2013, 2014 et 2015;
- les dettes totalisaient CHF 2'907'727 en 2013, CHF 2'994'464 en 2014 et CHF 3'082'436 en 2015.
La comptabilité de l'année 2013 comporte une note à teneur de laquelle "[l]es comptes des exercices antérieurs à 2012 contenaient des erreurs et des omissions. Ainsi une créance apparaissait à l'actif du bilan pour une prétention en dommages et intérêts qui n'a jamais fait l'objet d'un jugement. Une société proche de l'actionnaire a réglé de nombreuses factures pour le compte de la société ; ces factures n'avaient pas été comptabilisées dans la société" (PP 120'199).
L'annexe à la comptabilité de 2015 fait également état de la vente des parcelles de H______ au créancier gagiste pour le montant de CHF 240'000.- (PP 120'208).
m.c. C______ SA a été déclarée en faillite le 19 avril 2016. La procédure a ensuite été suspendue, faute d'actif, par jugement du Tribunal du district de D______ du 19 août 2016. Le ______ septembre suivant, la faillite a été close et la société radiée, avant d'être réinscrite par décision du 27 mars 2017, en raison de la procédure pénale dans le canton de Valais (infra B.IV).
IV. De la procédure pénale dans le canton du Valais
n. À la suite d'une plainte pénale de E______ du 19 décembre 2012, le Ministère public du canton de Valais a ouvert, les 17 juillet 2013 et 15 juin 2015, une instruction pénale contre A______, enregistrée sous le numéro 3______ (ci-après, procédure pénale dans la canton de Valais ou 3______) pour indications inexactes (art. 29 LFAIE), faux dans les titres (art. 251 CP), obtention frauduleuse d'une constatation fausse (art. 253 CP), inobservation des prescriptions légales sur la comptabilité (art. 325 CP), appropriation illégitime (art. 137 CP), gestion déloyale (art. 158 CP) et tentative de soustraction d'impôts (art. 176 LIFD).
Il était reproché à ce dernier:
(i) de s'être indûment approprié les actions de C______ SA en refusant de les restituer (art. 137 CP);
(ii) d'avoir, en sa qualité d'administrateur de la société, omis de vendre des parcelles à H______ et d'y avoir constitué deux actes hypothécaires (art. 158 CP);
(iii) d'avoir, dans le cadre de l'achat des parcelles, faussement déclaré que C______ SA ne devait pas être considérée comme une personne à l'étranger, alors qu'il savait que l'actionnaire majoritaire était un ressortissant extra- communautaire au bénéfice d'un permis B (art. 29 LFAIE);
(iv) d'avoir, à partir d'avril 2010, en sa qualité d'administrateur de la société, refusé, à réitérées reprises, de donner suite aux instructions de E______ et de tenir des assemblées générales des actionnaires de C______ SA, ce qui avait entraîné le blocage des activités de la société (art. 158 CP);
(v) d'avoir omis d'honorer les engagements qu'il prenait pour le compte de la société et d'avoir, en violation des statuts, révoqué le réviseur sans en nommer un autre (art. 158 CP);
(vi) de ne pas avoir établi régulièrement les comptes de la société (art. 325 CP);
(vii) d'avoir faussement constaté dans le procès-verbal de l'assemblée des actionnaires de C______ SA du 24 juin 2011 que l'entier du capital-actions était présent (art. 251 CP), puis d'avoir trompé le préposé du registre du commerce sur la validité da ladite assemblée et avoir obtenu son inscription au registre du commerce comme administrateur unique (art. 253 CP).
o. Par ordonnance du 19 janvier 2015, le Ministère public du canton de Valais a classé les faits relatifs à l'infraction à l'art. 29 LFAIE (supra B.IV.n.iii). Certes, les indications fournies au notaire dans le cadre de l'acquisition des parcelles n'étaient pas conformes à la réalité, dans la mesure où E______ était au bénéfice d'un permis B extra-communautaire. Cela étant, il ressortait des déclarations concordantes des protagonistes que A______ n'avait pas eu connaissance de la situation personnelle de E______. Seul un manquement par négligence pouvait être reproché au premier nommé (art. 29 al. 2 LFAIE), infraction toutefois atteinte par la prescription (PP 601'301 ss).
p. Par ordonnance du 3 février 2017, le Procureur valaisan a en outre classé les faits visés sous B.IV.n.i et B.IV.n.ii. Les éléments constitutifs d'appropriation illégitime n'étaient pas réalisés en l'absence de volonté de A______ d'incorporer les actions de C______ SA à son patrimoine. Par ailleurs, ce dernier avait entrepris plusieurs démarches dans la perspective de valoriser les parcelles, ce qui était de nature à exclure l'application de l'art. 158 CP pour ce volet. Enfin, la constitution des deux actes hypothécaires grevant les parcelles n'avait pas été faite dans l'optique d'un enrichissement de l'administrateur au détriment de C______ SA, de sorte que les éléments constitutifs de l'art. 158 al. 2 CP n'étaient pas réalisés.
q. Par acte du même jour, le Ministère public du canton de Valais a renvoyé en jugement A______ pour les autres faits.
r. Par jugement du 28 septembre 2020 (PP 601'019 ss), le Tribunal de district de D______ a constaté que l'infraction d'inobservation des prescriptions légales sur la comptabilité et les actes de gestion déloyale visés sous B.IV.n.v étaient prescrits (ch. 1) et reconnu pour le surplus A______ coupable de gestion déloyale, de faux dans les titres et d'obtention frauduleuse d'une constatation fausse.
s. Par arrêt du 22 décembre 2022, le Tribunal cantonal du Valais a acquitté A______ de l'infraction de gestion déloyale et confirmé le jugement du 28 novembre 2020 pour le surplus, retenant notamment que le prévenu "a tout fait pour faire obstruction aux droits de l'actionnaire majoritaire […] [de sorte qu'il] a clairement violé son obligation découlant de l'art. 716a al. 1 ch. 6 CO de même que son devoir d'exercer ses attributions avec toute la diligence nécessaire et de veiller fidèlement aux intérêts de la société (art. 717 CO). Il s'agit toutefois d'obligations liées à la protection des droits sociaux des actionnaires et non directement aux intérêts pécuniaires de la société. […] [O]n ne peut pas reprocher au prévenu d'avoir transgressé des devoirs spécifiques qui lui incombaient en vertu de son devoir de gérer les intérêts pécuniaires de la société" (PP 601'236).
Les recours interjetés par E______, C______ SA et A______ au Tribunal fédéral sont toujours pendants.
V. Des plaintes pénales de A______ déposées à Genève
i. De la plainte du 21 décembre 2012
t.a. Par acte du 21 décembre 2012, A______, déclarant agir en qualité d'actionnaire et administrateur de C______ SA, respectivement de gérant unique de N______ SÀRL [filiale de C______ SA], a déposé une plainte pénale contre E______, F______ et J______ pour faux dans les titres (art. 251), obtention frauduleuse d'une constatation fausse (art. 253 CP), faux renseignements sur une entreprise commerciale (art. 153 CP), abus de confiance (art. 138 CP) et gestion déloyale, leur reprochant en substance d'avoir: tenu l'assemblée générale de C______ SA du 8 avril 2011 en faisant faussement constater dans les procès-verbaux que l'entier du capital-actions était présent; adopté des résolutions relatives à sa radiation et à son remplacement par des nouveaux administrateurs et adressé au registre du commerce des réquisitions visant les modifications précitées.
Il reprochait également à E______ – en sa qualité de gérant de N______ SÀRL – d'avoir perçu indûment un bonus de CHF 50'000.- et d'avoir transféré un remboursement de prêt – moyennent des fausses factures – à un tiers.
Cette plainte a été enregistrée sous le présent numéro de procédure.
t.b. Le 5 décembre 2013, le Ministère public a ouvert une instruction contre E______ (PP 300'000).
ii. De la plainte du 13 janvier 2013
u.a. Le 13 janvier 2013, A______ a déposé une plainte pénale contre E______ et O______ notamment pour contrainte.
Le 28 novembre 2011, P______ SA – dont le premier nommé était le directeur et le second l'administrateur – lui avait fait notifier un commandement de payer, pour un montant de CHF 851'551.- sur la base des reconnaissances de dettes qu'il avait signées en faveur de Q______ LTS et R______ LTD, le 1er juillet 2008, totalisant CHF 850'000.-. Ces créances avaient, les 14 et 23 mars 2013, été cédées à P______ SA, également propriété de E______. Le représentant de la cessionnaire avait requis, en vain, la mainlevée de son opposition. Il [le plaignant] avait argué avec raison que les créances n'étaient pas exigibles car il était lui-même au bénéfice de reconnaissances de dettes d'un montant identique émanant de C______ SA.
Par arrêt ACPR/204/2013 du 10 mai 2013 (P/4______/2013), la Chambre de céans a rejeté le recours de A______ contre le refus du Ministère public d'entrer en matière sur cette plainte, retenant en substance qu'il n'était pas acquis, pour les mis en cause, qu'ils n'avaient aucune créance à faire valoir contre le recourant. Ils avaient dès lors initié une poursuite – soit la procédure usuelle en recouvrement d'une prétention pécuniaire –, ce qui ne constituait pas un moyen de pression abusif.
iii. De la plainte du 21 juin 2017
v.a. Par courrier du 21 juin 2017 – complété par plis des 4 février 2020, 25 novembre 2022 et 24 janvier 2023 – A______ a déposé une plainte pénale [laquelle a été jointe par le Ministère public à la P/18061/2012] notamment contre E______ et O______ pour:
des faits potentiellement constitutifs de contrainte (art. 181 CP), extorsion et chantage (art. 156 CP), faux dans les titres (art. 251 CP) et escroquerie dans le procès (art. 146 CP)
Il reprend les faits exposés dans sa plainte du 13 janvier 2013, précisant que les cessions de créance au bénéfice de P______ SA étaient nulles et constituaient des faux, dès lors qu'elles avaient été signées par les mis en cause, lesquels n'étaient – selon l'extrait du registre du commerce de la société pour les années 2011 et 2012 [qu'il produit] – pas habilités à signer collectivement, sans le concours de l'administrateur-président. Le représentant de P______ SA s'était prévalu de cette créance dans la procédure de mainlevée d'opposition mais – n'y ayant pas eu gain de cause – n'avait ensuite ni intenté une action en reconnaissance de dette, ni entrepris des démarches pour radier la poursuite.
des faits potentiellement constitutifs de dénonciation calomnieuse (art. 303 CP) et d'induction de la justice en erreur (art. 304)
Le Ministère public du canton de Valais avait prononcé un classement pour plusieurs infractions qui lui étaient reprochées par E______ (supra B.IV.n). Or la dénonciation du précité était abusive, dans la mesure où il avait exécuté son mandat d'administrateur de C______ SA avec toute la diligence requise par les circonstances, ce que le mis en cause savait pertinemment. Par ailleurs, dans la mesure où la société était privée de tout revenu, E______ ne pouvait pas lui reprocher d'avoir constitué deux cédules hypothécaires sur les parcelles de H______, ce qui avait, au demeurant, permis de trouver un investisseur et d'éviter la dénonciation du prêt par I______. Enfin, E______ – en sa qualité d'organe de fait de C______ SA pour les années 2008 à 2011 – ne pouvait pas ignorer le caractère infondé de sa dénonciation.
des faits potentiellement constitutifs de diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers (art. 164 CP)
Début avril 2010, E______ avait décidé qu'un montant d'EUR 233'000.- – lequel était dû à C______ SA en vertu d'un contrat conclu avec K______ BV – soit versée à G______ SA, société dont il était l'administrateur. Ce faisant, il avait refusé sans raison valable des créances revenant à C______ SA, étant précisé que celle-ci avait assumé tous les frais relatifs à la relation contractuelle avec K______ BV.
À l'appui de sa plainte, il a produit notamment:
- deux actes intitulés "Assignement of claim" des 14 et 23 mars 2013, par lesquels R______ LTD et Q______ LTS cèdent leurs créances contre A______ à P______ SA. Ils portent les signatures des représentants des cédants, ainsi que celles de E______ et de O______ (PP 110'142 ss);
- des pièces de la procédure de mainlevée provisoire l'opposant à P______ SA (PP 110'155), dont il ressort que, par décision du 8 janvier 2013, le Tribunal des districts de M______ a maintenu l'opposition formée au commandement de payer retenant que le poursuivant revêtait la qualité de créancier, dès lors que la cession de créance avait été opérée en conformité avec le droit et était pleinement valable. Cela étant, P______ SA avait échoué à rendre vraisemblable par pièces que sa créance était exigible. Le 16 avril 2013, le Tribunal cantonal a annulé cette décision et ordonné la mainlevée provisoire de l'opposition. Le 24 septembre suivant, le Tribunal fédéral a admis le recours du poursuivi et confirmé la décision de la première instance.
- un jugement du Tribunal cantonal du Valais du 6 novembre 2017 – [rendu dans le cadre d'une plainte contre les organes de C______ SA pour détournement de l'impôt à la source] – duquel il ressort notamment que le pouvoir de décision de E______ était "durable, de la fondation de la société […], jusqu'à la fin de l'année 2010, ses agissements s'effectuant de plus en plus en opposition avec l'administrateur qui ne se conformait plus à ses instructions et refusait de démissionner" (PP 110'462).
v.b. Par pli du 30 avril 2019, E______ a contesté les faits qui lui étaient reprochés dans la plainte du 21 juin 2017. Il n'avait pas dénoncé A______ en le sachant innocent. Preuve en était que l'instruction contre le précité avait duré plusieurs années. S'agissant du montant d'EUR 233'000.-, aucun contrat n'avait été signé entre K______ BV et C______ SA, cette dernière n'ayant pas été en mesure, depuis 2010, de fournir des prestations, en raison des agissements de A______ (PP 600'474 ss).
v.c. Par lettre du 2 novembre 2020, B______ s'est constitué partie plaignante dans la procédure. Il s'estimait lésé par les agissements de E______ et de F______, dès lors que le bilan de C______ SA au 31 décembre 2015, produit à l'appui de l'avis de surendettement, ne reflétait pas la réalité. En effet, il faisait état d'un fait futur, soit la vente aux enchères des parcelles de H______. Les comptes mentionnaient, par ailleurs, une créance de G______ SA de CHF 161'820.-, – laquelle n'avait pas lieu d'être –, mais ne faisaient nullement état de la créance d'EUR 233'000.- à l'encontre de K______ BV. De surcroit, la créance de I______ devait être réduite d'au moins de CHF 240'000.-. Enfin, E______ – en sa qualité d'administrateur – devait postposer sa créance et prendre toute mesure d'assainissement utile pour éviter la faillite de C______ SA.
iv. De la plainte du 17 novembre 2020
w.a. Le 17 novembre 2020, A______ a déposé une plainte pénale [jointe par le Ministère public à la P/18061/2012] contre E______ et F______ pour gestion déloyale (art. 158 CP), faux dans les titres (art. 251 CP) et banqueroute frauduleuse et fraude dans la saisie (art. 163 CP).
Il revient sur les faits exposés dans sa plainte du 21 juin 2017 et dans le courrier du B______ du 2 novembre 2020, précisant que la créance de G______ SA d'un montant de CHF 161'820.- ne devait pas figurer dans les bilans produits à l'appui de l'avis de surendettement de C______ SA, dans la mesure où E______ avait détourné un montant d'EUR 233'000.- revenant à celle-ci au profit de celle-là. Par ailleurs, les comptes de C______ SA pour les années 2010 à 2012 – établis par la fiduciaire T______ SA – faisaient état des créances de CHF 72'627.50 (R______ LTD), de CHF 28'799.25 (débiteur J______/F______) et de CHF 7'502.- (c/c actionnaire E______). Or tous ces postes ne figuraient pas dans les bilans de la société pour les années 2013 à 2015 produits par les mis en cause. Dits correctifs auraient permis de réduire la dette de C______ SA à hauteur de CHF 547'795.10, montant "qui demeurai[t] aisément à traiter dans un concordat judiciaire dont les créanciers ont été privés".
À l'appui de sa plainte et des courriers la complétant, il a produit notamment:
- des extraits de la comptabilité de C______ SA pour les années 2008 à 2012 dont il ressort que:
o le poste "1100 Débiteur R______ LTD" se chiffrait à CHF 72'627.50 en 2011 et CHF 0.- en 2012 (PP 120'077);
o l'extrait de compte "Débiteur R______ LTD" pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2010 fait état de plusieurs factures au nom de cette dernière société (PP 1010 de la 3______);
o le poste "1120 C/C Actionnaire E______" se chiffrait à CHF 7'502.- en 2011 et en 2012 (PP 120'077);
o la créance envers "J______-F______" s'élevait à CHF 28'799.25 de 2009 à 2011 et à CHF 21'844.40 en 2008 (PP 120'177 et 120'180). L'extrait du compte pour la période de 2008 à 2009 comprend comme libellés "part privée S/Véhicule Leasing […]", ainsi que divers débits (PP 942 et 976 de la 3______);
o le poste "1190 C/C G______ SA" dans la rubrique "Créances" se chiffre à CHF 279'600.- en 2012 et en 2011, et à CHF 306'843.- en 2010 (PP 120'077 et 120'186).
- un tableau établi par G______ SA, lequel fait état de prêts et de paiements de factures (notamment des frais de leasing de voitures) en faveur de C______ SA d'un montant total de CHF 175'915.- pour la période de 23 décembre 2009 au 4 octobre 2011 (PP 59 de la 3______);
- un courriel de E______ adressé à la fiduciaire de R______ LTD le 2 septembre 2010 et ayant la teneur suivante: "je vous présenterais [lors de notre rendez-vous] la solution simplifiée pour le cas de la dette de C______ SA envers R______ LTD que je souhaite simplement compenser par une facture de prestations de 2009 […]" (PP 120'110);
- un procès-verbal d'audition de E______ du 14 juin 2013 devant le Tribunal de D______ [procédure pénale pour détournement de l'impôt à la source], aux termes duquel ce dernier a expliqué qu'il ne voulait plus héberger des contrats dans C______ SA car il ne la maîtrisait plus et que c'était la raison pour laquelle le chiffre d'affaires de la société avait chuté entre 2009 et 2011;
- un procès-verbal d'audition du précité du 15 décembre 2015 [procédure 3______], aux termes duquel il déclare que contrairement à ce que lui reprochait A______, il n'avait pas "redirigé" des contrats revenant à C______ SA vers d'autres sociétés, dans le but de priver celle-là d'entrées financières. En effet, C______ SA était dans l'impossibilité de fournir des prestations pour ses clients, dans la mesure où ses consultants avaient démissionné entre 2009 et 2010. C'était pour cette raison que les contrats litigieux n'avaient pas été signés avec la précitée. Il n'avait pas reçu des comptes audités de C______ SA pour la période de 2011 à 2015. Suite à la reprise du contrôle de la société en été 2015, il n'avait pas réussi à trouver un accord avec le créancier I______ ni empêcher la vente aux enchères des parcelles (PP 600'827 ss).
- un procès-verbal d'audition de U______ [directeur de T______ SA] du 28 mars 2014 [procédure 3______] aux termes duquel il a déclaré que T______ SA avait établi les comptes de C______ SA pour les années 2011 et 2012 sur la base des déclarations de A______. Les comptes n'avaient pas été signés par la société fiduciaire. Les déclarations d'impôts de C______ SA n'étaient pas munies du sceau de la société fiduciaire, laissant ainsi la responsabilité de l'exactitude des chiffres inscrits à l'administrateur. Il était au courant d'un litige entre ce dernier et E______ au sujet d'une voiture en leasing (PP 120 ss de la 3______).
w.b. Par lettre du 24 novembre 2020 au Ministère public, B______ a exposé avoir été informé par A______ du dépôt, le 17 précédent, d'une nouvelle plainte pénale en lien avec la faillite de C______ SA. Il se constituait dès lors partie plaignante dans le cadre de cette nouvelle procédure.
v. De l'avis de prochaine clôture
x.a. Par avis de prochaine clôture de l'instruction, du 21 décembre 2020, le Ministère public a informé E______ et A______ de son intention de classer la procédure en tant qu'elle visait la plainte du second nommé du 21 décembre 2012.
x.b. Le 20 janvier 2021, A______ s'est opposé au classement de la plainte et a sollicité plusieurs réquisitions de preuve.
x.c. Par courrier du 29 mars 2023, E______ s'est opposé à la qualité de partie plaignante de A______ dans la procédure.
C. a. Dans l'ordonnance querellée, le Ministère public n'est pas entré en matière sur les plaintes de A______ des 21 juin 2017 et 22 novembre 2020, au motif que les éléments constitutifs des infractions dénoncées n'étaient manifestement pas réunis (art. 310 al. 1 let. a CPP).
Même si une ordonnance de classement avait été prononcée par les autorités valaisannes en lien avec les faits reprochés par E______ à A______, il n'était nullement établi que le premier nommé aurait dénoncé le second en le sachant innocent. Rien n'indiquait que E______ n'était pas de bonne foi, étant précisé que la décision de classement était fondée sur "divers motifs juridiques et techniques".
Par ailleurs, la Chambre de céans avait déjà retenu que l'envoi du commandement de payer par P______ SA ne revêtait aucun caractère pénal. Dans la mesure où A______ n'invoquait pas de faits nouveaux, rien ne permettait de revenir sur ce volet. En tout état de cause, le fait que la poursuite n'ait pas été radiée – respectivement que P______ SA n'ait pas introduit une action en reconnaissance de dette – ne saurait être constitutif d'une violation des art. 156 et 181 CP. Il en allait de même des infractions d'escroquerie au procès et de faux dans les titres, dès lors que, même à supposer que la cession de créance sur laquelle se fondait P______ SA était nulle – ce qui n'était pas démontré – on ne voyait pas en quoi les éléments constitutifs desdites infractions seraient réunis.
En outre, rien ne permettait de conclure que les bilans produits à l'appui de l'avis de surendettement de C______ SA constituaient des faux. En effet, les parcelles de H______ étaient évaluées à une valeur correspondant au prix de leur vente aux enchères. De même, aucun contrat n'ayant été conclu entre K______ BV et C______ SA, le montant d'EUR 233'000.- ne constituait qu'une simple expectative, ce d'autant que A______ n'avait intenté aucune action judiciaire pour recouvrer cette somme. De surcroit, la créance de G______ SA de CHF 161'820.- était correctement inscrite au bilan, dès lors que C______ SA ne pouvait pas la compenser avec le montant d'EUR 233'000.- précité. Par ailleurs, E______ n'avait, en tant qu'administrateur de C______ SA, aucun devoir de postposer sa créance, voire de la ramener à CHF 0.-. Enfin, c'était à juste titre que les mis en cause avaient déposé le bilan de C______ SA, dès lors que celle-ci s'était retrouvée endettée à la suite de la vente aux enchères des parcelles. Compte tenu de ce qui précédait, les éléments constitutifs des art. 163 et 164 CP n'étaient pas non plus réunis.
Pour le surplus, le Ministère public a classé les faits reprochés à E______ dans la plainte de A______ du 21 décembre 2012 au motif qu'aucun soupçon ne justifiait sa mise en accusation (art. 319 al. 1 let. a CPP).
b. Par courrier du même jour adressé à E______ – avec copie à A______ –, le Ministère public a expliqué que la qualité de lésé du dernier nommé était établie pour l'infraction de dénonciation calomnieuse visée par la plainte du 21 juin 2017. Toutefois, au vu de l'ordonnance querellée, il n'était pas pertinent de trancher sa qualité de partie plaignante pour les autres infractions.
D. a.a. À l'appui de son recours, A______ reproche au Ministère public de ne pas lui avoir – en violation de l'art. 118 CPP – reconnu la qualité de partie plaignante pour les infractions aux art. 146, 156, 251, 304 et 305 CP.
Sur le fond, il se plaint d'une constatation incomplète des faits et d'une violation du droit.
En premier lieu, les éléments constitutifs des infractions aux art. 303 et 304 CP étaient réunis, dès lors que E______ avait été mis en garde sur les conséquences pénales d'une fausse dénonciation. Par ailleurs, le Tribunal cantonal du Valais avait retenu, dans l'arrêt du 6 novembre 2017, que E______ était impliqué dans la gestion de C______ SA jusqu'en 2012, ce qui tendait à démontrer que ce dernier l'avait dénoncé en le sachant innocent. Qui plus est, le mis en cause s'était contredit quant aux motifs du paiement de la somme d'EUR 233'000.- en mains de G______ SA. Enfin, E______ avait fini par reconnaître devant le Procureur du canton du Valais que l'achat des parcelles par l'administrateur de C______ SA avait été effectué de bonne foi, ce qui était propre à établir que la dénonciation pour violation de la LFAIE n'avait pas lieu d'être.
En second lieu, dans la mesure où E______ et O______ n'étaient pas autorisés à signer collectivement pour P______ SA, ils s'étaient rendus coupables d'escroquerie au procès et de faux dans les titres en ayant produit devant les Tribunaux des cessions de créances nulles et viciées. Les éléments constitutifs de l'art. 156 CP étaient également réunis, dès lors que ces agissements auraient pu le conduire à payer une somme d'argent très conséquente. Contrairement à ce que soutenait le Ministère public, ces faits n'étaient pas visés par sa plainte du 13 janvier 2013.
a.b. Dans son recours, B______ se prévaut d'une constatation erronée des faits et d'une violation du principe in dubio pro duriore, les éléments constitutifs des infractions aux art. 158, 163, 164 et 251 CP – dénoncées dans les plaintes de A______ des 21 juin 2017 et 17 novembre 2020 – étant selon lui réalisés.
Il reprend en substance les faits exposés dans son courrier du 2 novembre 2020 précisant que, contrairement au bilan de 2012 de C______ SA, ceux des années 2013 à 2015 ne faisaient pas état des créances envers R______ LTD et K______ NV – ni du remboursement des comptes courants de E______, F______ et J______ – ce qui était constitutif de banqueroute frauduleuse, dans la mesure où ces actifs avaient été distraits sans droit du patrimoine de la société. Il ressortait en effet du dossier que K______ BV était le client "le plus fidèle" de C______ SA et que E______ avait pris la décision de priver cette dernière d'une entrée financière qui aurait pu permettre de "régulariser sa situation comptable". Qui plus est, ce dernier avait "activé" dans les dettes de la société une créance fictive de G______ SA de CHF 161'820.-, ce qui était constitutif d'une infraction à l'art. 164 CP. Ces agissements réunissaient également les éléments constitutifs de faux dans les titres, étant précisé que les administrateurs n'avaient pas non plus diminué les passifs de la société pour tenir compte de la vente aux enchères des terrains de H______, ni ramené la créance de l'actionnaire à 0.-, pas plus que pris des mesures d'assainissement pour éviter la faillite de la société.
b. À réception des sûretés, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.
EN DROIT :
1. Vu la connexité évidente des deux recours, interjetés contre la même décision, ils seront joints et traités en un seul arrêt.
2. La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.
3. 3.1. Les recours ont été déposés selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP) et concernent une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP).
3.2.1. Seule la personne qui a un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée dispose de la qualité pour recourir (art. 382 al. 1 CPP).
Tel est, en particulier, le cas du lésé qui s'est constitué demandeur au pénal (art. 104 al. 1 let. b cum art. 118 al. 1 CPP). La notion de lésé est définie à l'art. 115 CPP. Il s'agit de toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction. En règle générale, seul peut se prévaloir d'une atteinte directe le titulaire du bien juridique protégé par la disposition pénale qui a été enfreinte (ATF 143 IV 77 consid. 2.2 p. 78; 141 IV 454 consid. 2.3.1 p. 457).
Lorsqu'une infraction est perpétrée au détriment du patrimoine d'une personne morale, seule celle-ci subit un dommage et peut donc prétendre à la qualité de lésée, à l'exclusion des actionnaires d'une société anonyme, des associés d'une société à responsabilité limitée, des ayants droit économiques et des créanciers desdites sociétés (ATF 141 IV 380 consid. 2.3.3 p. 386 ; 140 IV 55 consid. 3.3.1 p. 158).
3.2.2. Les art. 163 et 164 CP protègent, outre le bon déroulement de la procédure pour dettes, les prétentions des créanciers, plus précisément leurs droits, dans la procédure d'exécution forcée, de se satisfaire sur les biens du débiteur. Les créanciers individuels sont considérés comme directement touchés (ATF 148 IV 170 consid. 3.4.1 et 3.4.6 = JdT 2023 IV 115 pp. 120 et 127; 140 IV 155 consid. 3.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1208/2019 du 29 avril 2020 consid. 2.3.1).
3.2.3. L'induction de la justice en erreur (art. 304 CP) et l'entrave à l'action pénale (art. 305 CP) visent exclusivement la protection de la justice pénale (suisse), et non les intérêts privés (ACPR/186/2024 du 13 mars 2024 consid. 1.2.3; ACPR/510/2021 du 5 août 2021 consid. 2.2.2; A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 1 ad art. 304; M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), Code pénal - Petit commentaire, 2ème éd., Bâle 2017, n. 1 ad art. 304).
3.2.4. En l'espèce, une éventuelle infraction de gestion déloyale toucherait uniquement C______ SA, et non les créanciers de celle-ci. B______ ne peut dès lors pas se prévaloir de la qualité de lésé. En revanche, en tant que créancier individuel de la société, il dispose de la qualité pour recourir concernant les infractions aux art. 163 et 164 CP et ce, peu importe que la créance n'ait pas été produite dans la faillite, vu sa suspension faute d'actifs et l'absence de liquidation (cf. ACPR/819/2019 consid. 1.2.6 et ACPR/590/2018 consid. 4, non remis en cause par l'arrêt du Tribunal fédéral 1B_528/2018 du 20 novembre 2018).
Par ailleurs, A______, n'est pas directement lésé par le refus du Ministère public d'entrer en matière sur les infractions d'induction de la justice en erreur et d'entrave à l'action pénale.
3.3. Partant, les recours sont irrecevables en tant qu'ils portent sur les infractions aux art. 158, 304 et 305 CP.
Ils sont recevables au surplus.
4. Le recourant A______ ne remet pas en cause l'ordonnance querellée en tant qu'elle concerne le classement des faits visés dans sa plainte du 21 décembre 2012, de sorte que l'ordonnance précitée est définitive sur ces aspects, qui ne seront donc pas examinés (art. 385 al. 1 let. a CPP).
5. En tant que le précité reproche au Ministère public de ne pas lui avoir reconnu la qualité de partie plaignante pour les infractions aux art. 146, 156 et 251 CP, le grief est irrecevable, faute de décision préalable. En effet, le Ministère public n'a pas rejeté la qualité de lésé à A______, mais considéré qu'au vu de l'ordonnance querellée, il n'était pas nécessaire de statuer sur ce point. Au vu de ce qui précède, on ne saurait non plus reprocher à l'autorité précédente un refus de statuer.
6. Les recourants se plaignent d'une constatation incomplète des faits par le Ministère public (art. 393 al. 2 let. b CPP).
Dès lors que la Chambre de céans jouit d'un plein pouvoir d'examen en droit et en fait (art. 393 al. 2 CPP; ATF 137 I 195 consid. 2.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_524/2012 du 15 novembre 2012 consid. 2.1), les éventuelles constatations incomplètes ou inexactes du Ministère public auront été corrigées dans l'état de fait établi ci-devant.
7. Aux termes de l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ne sont manifestement pas réunis.
Conformément à cette disposition, la non-entrée en matière est justifiée lorsque la situation est claire sur le plan factuel et juridique. Tel est le cas lorsque les faits visés ne sont manifestement pas punissables, faute, de manière certaine, de réaliser les éléments constitutifs d'une infraction. Au stade de la non-entrée en matière, on ne peut admettre que les éléments constitutifs d'une infraction ne sont manifestement pas réalisés que lorsqu'il n'existe pas de soupçon suffisant conduisant à considérer un comportement punissable ou lorsqu'un éventuel soupçon initial s'est entièrement dissipé. En revanche, si le rapport de police, la dénonciation ou les propres constatations du ministère public amènent à retenir l'existence d'un soupçon suffisant, il incombe en principe à ce dernier d'ouvrir une instruction (art. 309 al. 1 let. a CPP). Cela implique que les indices de la commission d'une infraction soient importants et de nature concrète, ce qui n'est pas le cas de rumeurs ou de suppositions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 3.1). Dans le doute, lorsque les conditions d'une non-entrée en matière ne sont pas réalisées avec une certitude absolue, l'instruction doit être ouverte (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_196/2020 précité).
Recours de A______
8. De la dénonciation calomnieuse reprochée à E______
8.1. Contrevient à l'art. 303 CP celui qui dénonce à l'autorité, comme auteur d'un crime ou d'un délit (ch. 1 al. 1), respectivement d'une contravention (ch. 2), une personne qu'il sait innocente, en vue de faire ouvrir contre elle une poursuite pénale.
Sur le plan objectif, une dénonciation est composée de deux éléments, c'est-à-dire qu'une dénonciation soit faite et qu'elle fasse porter l'accusation sur une personne innocente. La dénonciation n'est calomnieuse que si la personne mise en cause est innocente, en ce sens qu'elle n'a pas commis les faits qui lui sont faussement imputés, soit parce que ceux-ci ne se sont pas produits, soit parce qu'elle n'en est pas l'auteur. Une dénonciation pénale n'est pas punissable du seul fait que la procédure pénale ouverte consécutivement à la dénonciation est classée. L'infraction n'est réalisée que si l'innocence de la personne dénoncée a été constatée dans une procédure précédente (ATF 136 IV 170 consid. 2.2).
Sur le plan subjectif, l'auteur doit savoir que la personne qu'il dénonce est innocente. Il ne suffit donc pas qu'il ait conscience que ses allégations pourraient être fausses. Il doit savoir que son affirmation est inexacte. Aussi, le dol éventuel ne suffit pas (ATF 136 IV 170 consid. 2.1 et les références citées).
8.2.1. Une non-entrée en matière se justifie également lorsqu'il existe un empêchement définitif de procéder (art. 310 al. 1 let. b CPP), par exemple la prescription de l'action pénale.
8.2.2. Une dénonciation calomnieuse perpétrée en 2012 se prescrit par sept ans si les accusations proférées visaient une contravention (art. 303 ch. 2 CP; art. 97 al. 1 let. c aCP), telle que les infractions aux art. 325 CP et 176 LIFD, passibles de l'amende (tant en 2012 que selon le droit actuel).
8.3.1. En l'espèce, en tant que le recours porte sur la dénonciation de E______ pour des contraventions aux art. 325 CP et 176 LIFD, l'action pénale est prescrite depuis fin décembre 2019 sur ces aspects.
8.3.2. Pour le surplus, aucun élément concret ne permet d'inférer que E______ était certain que le recourant était innocent des faits qu'il lui imputait et qu'il aurait eu pour seul but de faire ouvrir une procédure pénale à son encontre dans le dessein de lui nuire. En effet, le litige entre les parties dure depuis plusieurs années. Tant l'arrêt du Tribunal fédéral 4D_73/2014 du 15 avril 2015 que l'arrêt du Tribunal cantonal du Valais du 22 décembre 2022 ont retenu que A______ avait empêché l'actionnaire majoritaire d'exercer ses droits sociaux, violant ainsi son devoir d'exercer ses attributions avec toute la diligence nécessaire et de veiller fidèlement aux intérêts de la société. Sur cette base, E______ – voulant procéder aux changements au sein du conseil d'administration de C______ SA – pouvait estimer que les soupçons d'infractions de gestion déloyale au préjudice de C______ SA – voire d'appropriation illégitime des actions de la société – étaient suffisamment sérieux pour justifier le dépôt d'une plainte pénale. Qu'un arrêt du Tribunal cantonal du Valais du 7 novembre 2014 – rendu dans le cadre d'une plainte des autorités fiscales contre les organes de C______ SA pour détournement de l'impôt à la source – ait retenu que E______ était l'organe de fait de la société jusqu'à la fin de l'année 2011 n'était pas de nature à amoindrir ses soupçons.
S'agissant de la dénonciation pour violation de l'art. 29 LFAIE, le mis en cause était légitimé à considérer que le recourant – avocat de profession – devait s'enquérir sur la situation personnelle de l'ayant droit économique de la société et fournir ainsi au notaire des informations exactes dans le cadre de l'acquisition des parcelles de H______. Ce d'autant que le Ministère public du Valais a considéré qu'un manquement par négligence pouvait être reproché au recourant, ce qui était toutefois atteint par la prescription.
En tout état de cause, la plainte de E______ du 21 décembre 2012 a donné lieu à une instruction, ce qui dénote qu'elle n'était pas d'emblée dénuée de tout fondement.
C'est donc à bon droit que le Ministère public n'est pas entré en matière sur l'infraction de dénonciation calomnieuse.
9. Des infractions aux art. 146, 156 et 251 CP reprochées à E______ et O______
9.1. Selon l'art. 146 al. 1 CP, se rend coupable d'escroquerie quiconque, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l'aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.
L'escroquerie au procès constitue un cas particulier d'escroquerie. Elle consiste à tromper astucieusement le juge aux fins de le déterminer à rendre une décision – matériellement fausse – préjudiciable au patrimoine de la partie adverse ou d'un tiers (ATF 122 IV 197 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_510/2020 du 15 septembre 2020 consid. 3.3). L'escroquerie au procès tombe sous le coup de l'art. 146 CP moyennant la réalisation de l'ensemble des éléments constitutifs objectifs et subjectifs de cette disposition. La typicité se conçoit sans réelle particularité (ATF 122 IV 197 consid. 2d; arrêt du Tribunal fédéral 6B_751/2018 consid. 1.4.3).
9.2. D'après l'art. 251 ch. 1 CP, se rend coupable de faux dans les titres quiconque, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, crée un titre faux, falsifie un titre, abuse de la signature ou de la marque à la main réelles d'autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constate ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou pour tromper autrui, fait usage d'un tel titre.
Cette disposition – qui doit être appliquée de manière restrictive (ATF 117 IV 35 consid. 1d) – vise non seulement un titre faux ou la falsification d'un titre (faux matériel), mais aussi un titre mensonger (faux intellectuel). Il y a faux matériel lorsque l'auteur réel du document ne correspond pas à l'auteur apparent, alors que le faux intellectuel vise un titre qui émane de son auteur apparent, mais dont le contenu ne correspond pas à la réalité (ATF 146 IV 258 consid. 1.1; 144 IV 13 consid. 2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_367/2022 du 4 juillet 2022 consid. 1.1).
9.3.1. Selon l'art. 181 CP, se rend coupable de contrainte quiconque, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque manière dans sa liberté d'action, l'oblige à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte.
L'extorsion et le chantage, réprimés par l'art. 156 CP, sont une forme qualifiée de contrainte, caractérisée par la recherche d'un enrichissement illégitime.
9.3.2. L'interdiction de la double poursuite constitue un empêchement de procéder, dont il doit être tenu compte à chaque stade de la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1100/2020 du 16 décembre 2021 consid. 3.1).
Le principe ne bis in idem, ancré à l'art. 11 al. 1 CPP, consacre le droit de la personne qui a été mise au bénéfice d'un classement de ne pas être jugée une nouvelle fois pour les mêmes infractions. Ce principe requiert qu'il y ait identité de la personne visée et des faits retenus, soit que les deux procédures aient pour origine des faits identiques ou des faits qui sont en substance les mêmes. La qualification juridique des faits ne constitue pas un critère pertinent (ATF 144 IV 362 consid. 1.3.2; 137 I 363 consid. 2.2 p. 366; 125 II 402 consid. 1b p. 404; arrêts du Tribunal fédéral 6B_279/2018 du 27 juillet 2018 consid. 1.1; 6B_1053/2017 du 17 mai 2018 consid. 4.1).
Seules des conditions restrictives permettent d'ordonner une reprise de la procédure contre cette personne (art. 11 al. 2 CPP), à savoir l'existence de faits et/ou moyens de preuve nouveaux, qui ne ressortent pas du dossier antérieur, aptes à révéler sa responsabilité pénale (art. 323 al. 1 CPP).
9.4.1. En l'espèce, en tant que le recourant reproche aux mis en cause de lui avoir fait notifier un commandement de paiement pour un montant de CHF 851'551.- sur la base d'une créance non exigible, puis d'avoir requis, en vain, la mainlevée de l'opposition, ces faits sont identiques à ceux ayant fait l'objet de l'ordonnance de non-entrée en matière, confirmée par arrêt de la Chambre de céans du 10 mai 2013. Que le recourant qualifie désormais ces faits d'extorsion et de chantage ne change rien à ce qui précède. Rien ne justifiait donc de revenir sur ces points.
9.4.2. Le recourant estime que les cessions de créances des 14 et 23 mars 2013 constituaient des faux et que les mis en cause – en les ayant produites en justice – se seraient, en outre, rendus coupables d'une escroquerie au procès.
Force est toutefois de constater qu'il n'y a pas d'indices suffisants permettant de soupçonner la commission des infractions reprochées.
Tout d'abord, les auteurs réels coïncident avec les auteurs apparents, de sorte que le faux matériel est exclu. Par ailleurs, à supposer que les documents litigieux revêtissent une valeur probante accrue – ce qui n'est pas rendu vraisemblable par le recourant –, on ne voit pas en quoi leur contenu ne serait pas conforme à la réalité, dans la mesure où le cédant déclare effectivement céder une créance qu'il prétend avoir. Tout au plus, la question de savoir si les mis en cause ont valablement représenté le cessionnaire relève du droit civil.
En tout état de cause, rien n'indique au dossier que le président-administrateur de la cessionnaire P______ SA se soit opposé aux cessions litigieuses, étant précisé que la ratification peut intervenir de manière tacite (cf. art. 38 CO; arrêt du Tribunal fédéral 4A_87/2011 du 16 mai 2011 consid. 2.2). Par ailleurs, le Tribunal des districts de M______ a considéré que les cessions litigieuses avaient été opérées en conformité avec le droit et étaient pleinement valables.
Faute de soupçon de faux dans les titres, le grief concomitant d'escroquerie au procès tombe à faux (cf. ATF 122 IV 197 consid. 2; cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_1110/2021 du 11 janvier 2022 consid. 3.2). Quoi qu'il en soit, l'astuce fait défaut, dès lors qu'il aurait été aisé pour le recourant de consulter le registre du commerce.
Recours de B______
10.1.1. L'art. 163 CP punit le comportement du débiteur qui consiste à diminuer fictivement son actif, de manière à causer un dommage à ses créanciers, en distrayant ou en dissimulant des valeurs patrimoniales, en invoquant des dettes supposées, en reconnaissant des créances fictives ou en incitant un tiers à en produire.
Par le terme actif, on vise l'ensemble du patrimoine du débiteur, soumis à la procédure d'exécution forcée, en vue de désintéresser les créanciers (ATF 103 IV 227 consid. 1c p. 233). Il y a diminution fictive de l'actif lorsque le débiteur met en danger les intérêts de ses créanciers non pas en aliénant les biens sur lesquels ils ne pourront plus exercer directement leur mainmise, mais en les trompant sur la substance ou la valeur de son patrimoine, c'est-à-dire en créant l'apparence que ses biens sont moindres ou ses dettes plus importantes qu'elles ne le sont en réalité (arrêts du Tribunal fédéral 6B_310/2014 du 23 novembre 2015 consid. 5.1 in SJ 2016 I 414 et 6S_438/2005 du 28 février 2006 consid. 3 et les références citées). N'entrent en revanche pas dans les prévisions de l'art. 163 CP les opérations qui, tel un transfert de propriété ou une cession de créance sans contre-prestation suffisante, entraînent une diminution effective de l'actif du débiteur. Ces actes-là, qui mettent en danger les intérêts des créanciers par une modification véritable de la substance ou de la valeur du patrimoine du débiteur, sont visés par l'art. 164 CP (arrêts du Tribunal fédéral 6B_551/2015 du 24 février 2016 consid. 4.1 ; 6S_438/2005 du 28 février 2006 consid. 3 et les références citées).
L'art. 163 CP mentionne différentes formes de diminution fictive du patrimoine : la distraction ou la dissimulation de valeurs patrimoniales, le fait d'invoquer des dettes supposées, ainsi que la reconnaissance de créances fictives. La distraction vise le cas où le débiteur met hors d'atteinte des biens qui servent à désintéresser les créanciers. Par exemple, l'auteur transfère ou attribue faussement ses propres valeurs patrimoniales à un tiers. Un cas particulier de distraction consiste dans le transfert des actifs de la société faillie à une "société-écran" (ATF 93 IV 16 consid. 1b ; ATF
85 IV 217).
10.1.2. L'art. 164 ch. 1 CP sanctionne la diminution effective par le débiteur de son actif au préjudice des créanciers. Cette disposition envisage trois hypothèses : premièrement la détérioration, la destruction, la dépréciation ou la mise hors d'usage de valeurs patrimoniales (al. 1), deuxièmement leur cession à titre gratuit ou contre une prestation de valeur manifestement inférieure (al. 2) et troisièmement le refus sans raison valable de droits qui reviennent au débiteur ou la renonciation gratuite à de tels droits (al. 3). L'art. 164 ch. 1 CP n'est applicable que si le débiteur a été déclaré en faillite ou si un acte de défaut de biens a été dressé contre lui.
Dans ce cas de figure, le disponible n'est pas dissimulé mais perdu (sous réserve des actions civiles ouvertes au créancier). L'infraction ne vise pas une manière critiquable de mener ses affaires, mais un comportement qui n'a plus rien à voir avec l'activité économique proprement dite et ne sert qu'à léser le ou les créanciers (Message concernant la modification du code pénal suisse et du code pénal militaire ainsi que la modification de la loi fédérale sur l'approvisionnement économique du pays du 24 avril 1991, FF 1991 II 933, p. 1032).
L'énumération de l'art. 164 ch. 1 CP est exhaustive (ATF 131 IV 49 consid. 1.2). Faute d'être mentionnée, l'aliénation d'un actif à sa valeur vénale ne peut être sanctionnée en vertu de cette disposition. Il en va de même de l'augmentation du passif (arrêts du Tribunal fédéral 6B_551/2015 du 24 février 2016 consid. 4.2 ; 6B_635/2010 du 19 avril 2011 consid. 3.2.1 et les références citées). Si l'organe de la société débitrice paie, à l'aide des actifs de la société, la dette que cette dernière avait à l'égard d'un tiers, il n'y a pas de diminution effective de l'actif puisque cette diminution est compensée par une diminution du passif (ATF 131 IV 49 consid. 1.3.1).
10.1.3. Ces infractions ont pour caractéristique commune qu'elles sont intentionnelles, le dol éventuel étant suffisant.
S'agissant des art. 163 et 164 CP, l'intention doit porter non seulement sur l'acte lui-même, mais encore sur la mise en danger des intérêts des créanciers. En tant que l'infraction n'est punissable que si le débiteur a été déclaré en faillite – condition objective de punissabilité – l'intention de l'auteur ne doit pas nécessairement porter sur cet élément. Il n'est pas non plus exigé un rapport de causalité entre le comportement fautif et la survenance de la faillite (arrêt du Tribunal fédéral 6B_979/2017 du 29 mars 2018 consid. 4.1).
Ces dispositions répriment des délits propres, qui ne peuvent être commis que par le débiteur. Cependant, lorsque cette qualité échoit à une personne morale, les personnes physiques qui en sont organes sont, en vertu de l'art. 29 let. a CP, punissables en tant qu'auteurs, si elles ont agi ès qualité pour cette dernière (arrêts du Tribunal fédéral 6B_438/2019 du 28 mai 2019 consid. 3.1 ; 6B_1024/2016 du 17 novembre 2017 consid. 2.2).
10.2. Viole l’art. 251 CP la personne qui établit une fausse comptabilité commerciale (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1406/2019 du 19 mai 2020 consid. 1.1.1).
La comptabilité doit présenter une image exacte et complète de la situation économique réelle à un moment donné. Une comptabilisation fausse est un acte typique du faux intellectuel lorsqu’elle fausse l’image d’ensemble de la comptabilité et viole des prescriptions et principes comptables (CO 957a ss, notamment CO 957a II) qui ont été érigés de façon à garantir la véracité de la comptabilité, et par là sa valeur probante accrue. En revanche, de simples entorses à des prescriptions comptables de droit civil ne suffisent pas (ATF 132 IV 12 consid. 8.1; ATF 125 IV 17 consid. 2c).
La comptabilité doit d’abord être juste d’un point de vue formel. Toujours à la condition que l’image d’ensemble soit faussée, il y a notamment faux intellectuel lorsque le montant d’une écriture est faux, qu’une écriture est totalement omise, lorsque des positions fictives sont enregistrées (M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER, Basler Kommentar Strafrecht II - Art. 137-392 StGB, Jugendstrafgesetz, 4ème éd. Bâle, 2019, n. 90 ad art. 251) ou lorsqu’un événement comptable est comptabilisé à une date inexacte (ATF 71 IV 132 consid. 4 d).
La comptabilité doit aussi être juste d’un point de vue matériel (ATF 108 IV 25): la valorisation des actifs et passifs doit correspondre à la réalité, c’est-à-dire être effectuée selon les prescriptions légales (CO 960 à 960e) M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER, op. cit., n. 95 ad art. 251). Lorsqu’un poste suppose une évaluation, la comptabilité ne peut être considérée comme fausse qu’en cas d’abus du pouvoir d’appréciation ; le bilan est faux lorsque les actifs sont nettement surévalués ou les passifs clairement sous-évalués (arrêt du Tribunal fédéral 6B_496/2012 du 18 avril 2013 consid. 9.5).
10.3.1. Des créances de C______ SA contre K______ BV et R______ LTD
Le recourant reproche à E______ et à F______ d'avoir distrait des montants d'EUR 233'000.- et de CHF 72'627.50 qui auraient dû revenir à C______ SA en vertu des créances contre K______ BV, respectivement R______ LTD. Ces actifs ne figuraient par ailleurs pas dans les bilans produits à l'appui de l'avis de surendettement de la société.
Force est de constater que le dossier ne fournit aucun indice permettant de retenir que K______ BV devait payer le montant litigieux à C______ SA en vertu d'un contrat conclu entre les parties. Au contraire, A______ – qui était administrateur de la société jusqu'en 2015 – n'a intenté aucune action en justice permettant d'établir le bien-fondé de la prétention. Par ailleurs, E______ a joint dans un courriel du 6 avril 2010 des contrats de prestations de service devant être signés entre G______ SA et K______ BV et non pas entre cette dernière et C______ SA. Que K______ BV ait été par le passé la cliente de C______ SA n'implique pas pour autant que celle-ci avait, en avril 2010, une créance contre celle-là. Ce d'autant qu'il n'est pas contesté que, depuis 2010, C______ SA n'a pas exercé d'activité en raison du conflit opposant l'administrateur à l'actionnaire. Enfin, que E______ ait déclaré, dans le cadre d'une autre procédure, n'avoir plus voulu "héberger" des contrats pour C______ SA, ne permet pas de retenir – contrairement à ce que soutient le recourant – que le montant litigieux aurait dû revenir à la société précitée en vertu des prestations déjà exécutées.
Il n'est pas non plus rendu vraisemblable que R______ LTD avait, au moment du dépôt des bilans litigieux, une dette de CHF 72'627.50 à l'égard de C______ SA. Il ressort en effet de la comptabilité de 2012 de cette dernière – établie par A______ – que le poste "1100 Débiteur R______ LTD" se chiffrait à CHF 0.- cette année-là. Par ailleurs, E______ a exprimé dans un courriel du 2 septembre 2010 adressé au directeur de R______ LTD le souhait de compenser la créance de C______ SA avec une facture de prestations de la première nommée. Contrairement à ce que soutient le recourant, ce procédé ne semble pas insolite, dans la mesure où le bilan de 2010 de la société fait état d'autres factures établies par R______ LTD.
Au vu de ce qui précède, on ne saurait déduire un soupçon d'infraction aux art. 251 et 163 CP. S'agissant de cette dernière infraction, il sera au surplus relevé que l'élément constitutif subjectif fait clairement défaut, dès lors que le recourant est devenu créancier de C______ SA postérieurement aux actes reprochés.
10.3.2. De la prétendue dette fictive contre R______ LTD
Le recourant estime que dans la mesure où C______ SA avait une créance en dommages-intérêts d'EUR 233'000.- contre R______ LTD, la dette de CHF 161'820.- n'aurait pas dû être inscrite au bilan, car elle était éteinte par la compensation. Or, il a été relevé supra que la créance de C______ SA n'a nullement été rendue vraisemblable. Il n'est par ailleurs pas contesté que tout au long de l'année 2010, G______ SA s'est acquittée des charges courantes de C______ SA, de sorte que la dette n'apparaît pas fictive.
10.3.3. De la vente des parcelles de H______
Le bilan au 31 décembre 2015 fait état d'une provision pour moins-value des parcelles de H______ de CHF 2'247'948. L'actif est dès lors évalué à CHF 240'000.-, ce qui correspond au prix de la vente aux enchères du 14 janvier 2016. L'écriture ne peut ainsi pas être considérée comme fausse, ce d'autant que selon la jurisprudence sus-rappelée, le fait d'indiquer rétroactivement une date est permis pour autant qu'il s'agisse d'une transaction fondée économiquement. Or le recourant ne critique pas le prix de la vente aux enchères.
B______ considère ensuite que les mis en cause auraient dû réduire la créance de I______ d'un montant de CHF 240'000.-. Même si tel devait être le cas – ce qui n'est nullement rendu vraisemblable – on ne voit pas en quoi les mis en cause auraient agi intentionnellement afin de tromper le recourant, dès lors qu'il est mentionné dans le bilan litigieux que les parcelles de H______ ont été vendues pour un montant de CHF 240'000.- au créancier-gagiste.
10.3.4. D'autres écritures comptables
Le recourant reproche aux mis en cause de ne pas avoir inscrit dans les actifs des bilans de 2013 à 2015 les postes "Débiteur J______-F______" et "c/c actionnaires".
Il convient tout d'abord de relever que le bilan de C______ SA de 2012 – sur lequel se fondent les accusations du recourant – a été contesté par E______, de sorte qu'il ne saurait constituer à lui seul un indice de prévention. Ce d'autant qu'aux dires de U______ (cf. B.w.a in fine), les comptes de 2012 n'avaient pas été signés par la fiduciaire, laissant ainsi la responsabilité des chiffres inscrits à l'administrateur.
Cela étant, contrairement à ce que soutient le recourant, le poste "c/c actionnaires" figure dans les bilans de 2013 à 2015. Que ce poste ait été chiffré à CHF 7'502.- en 2013, puis à CHF 5'502.- en 2014 et à CHF 502.- en 2015, ne permet pas de retenir, sans autre développement, un soupçon d'infraction. Ce d'autant qu'il n'est pas contesté que A______ n'a pas établi les comptes de la société pour les années 2013 à 2015, période où il était toujours administrateur de C______ SA.
Il en va de même du poste "Débiteur J______-F______", le recourant n'étayant pas en quoi cette créance aurait dû toujours être inscrite au bilan trois ans après les derniers comptes établis par A______. Il n'est par ailleurs pas exclu que la créance de C______ SA soit éteinte par les paiements de G______ SA, lesquels concernaient en grande partie des frais de leasing de voitures, étant rappelé que l'extrait du poste litigieux pour la période de 2008 à 2009 comprenait comme libellé "part privée S/Véhicule Leasing".
Enfin, on ne voit pas, et le recourant n'explique nullement, en quoi le fait de ne pas avoir ramené la créance de E______ à CHF 0.- constituerait une prévention de faux dans les titres.
11. Les recours seront ainsi rejetés et l'ordonnance querellée confirmée.
12. Les recourants, qui succombent, supporteront chacun par moitié les frais de la procédure de recours, fixés en totalité à CHF 4'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Ordonne la jonction des recours.
Rejette les recours, dans la mesure de leur recevabilité.
Condamne les recourants, par moitié chacun, aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 4'000.-.
Dit que ce montant (soit CHF 4'000.- au total) sera prélevé sur les sûretés versées.
Notifie le présent arrêt, en copie, aux recourants et au Ministère public.
Siégeant :
Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Françoise SAILLEN AGAD, juges; Monsieur Zidane DJEBALI, greffier
Le greffier : Zidane DJEBALI |
| La présidente : Daniela CHIABUDINI |
Voie de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).
P/18061/2012 | ÉTAT DE FRAIS |
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COUR DE JUSTICE
Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).
Débours (art. 2) | | |
- frais postaux | CHF | 20.00 |
Émoluments généraux (art. 4) | | |
- délivrance de copies (let. a) | CHF | |
- délivrance de copies (let. b) | CHF | |
- état de frais (let. h) | CHF | 75.00 |
Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13) | | |
- décision sur recours (let. c) | CHF | 3'905.00 |
Total | CHF | 4'000.00 |