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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/25622/2022

AARP/212/2023 du 26.06.2023 sur JTDP/86/2023 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Normes : CP.148a
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/25622/2022 AARP/212/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 20 juin 2023

 

Entre

A______, sans domicile connu, comparant par Me B______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/86/2023 rendu le 25 janvier 2023 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 25 janvier 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable d'obtention illicite de prestations d'une assurance sociale ou de l'aide sociale (art. 148a du Code pénal [CP]), d'entrée illégale et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI]), l'a condamné à une peine privative de liberté de 90 jours, sous déduction de 54 jours (recte : 64 jours) de détention avant jugement, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans, a ordonné son expulsion du territoire suisse pour une durée de cinq ans (avec inscription au SIS) et mis à sa charge les frais de la procédure.

A______ entreprend ce jugement dans son ensemble, concluant à son acquittement des chefs d'entrée illégale, de séjour illégal et d'obtention illicite de prestations d'une assurance sociale ou de l'aide sociale (art. 148 al. 1 CP), étant précisé qu'il ne s'oppose pas à ce que la contravention pour les cas de peu de gravité de l'art. 148a al. 2 CP soit, le cas échéant, retenue à son encontre. Subsidiairement, il conclut à une atténuation de la peine et à ce qu'il soit renoncé à son expulsion. Dans tous les cas, il conclut à son indemnisation pour la période de détention injustifiée.

b. Selon l'acte d'accusation du 3 janvier 2023, il est reproché ce qui suit à A______ :

-        le 2 novembre 2022, il a pénétré sur le territoire suisse et y a séjourné jusqu'au 3 décembre 2022, date de son interpellation, alors qu'il n'était pas au bénéfice des autorisations nécessaires et qu'il était démuni d'un passeport valable ainsi que de moyens de subsistance ;

-        le 4 novembre 2022, il a induit le Service de protection des mineurs (ci-après : SPMi) en erreur en se faisant faussement passer pour un mineur né le ______ 2006 et, de la sorte, a obtenu pour lui-même des prestations indues de l'aide sociale – soit un hébergement et des cartes journalières d'achat – entre le 2 novembre 2022 et le 3 décembre 2022, date de son interpellation, d'un montant total de CHF 8'726.50.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______ est né le ______ 2001 au Maroc, de nationalité marocaine. Il est arrivé en Suisse, à Genève, le 2 novembre 2022.

Le 3 novembre 2022, il s'est présenté au SPMi sous une fausse identité, en se faisant passer pour un mineur, né le ______ 2006, afin de solliciter une prise en charge. Le 4 novembre 2022, il a signé sous le nom de A______ [alias] le formulaire intitulé "Protection des mineurs étrangers non accompagnées (MNA) à Genève", confirmant qu'il était mineur.

A______ a bénéficié des prestations du SPMi, soit d'un hébergement au sein du foyer C______ à Genève et de cartes journalières d'achat de CHF 10.-, pour la période du 2 novembre 2022 au 3 décembre 2022.

b. Le 9 novembre 2022, A______ s'est présenté sous son alias de mineur, pour être entendu par la Cellule requérant d'asile de la police. À cette occasion, il a déclaré avoir quitté le Maroc en août 2022 et payé EUR 5'000.- pour traverser la Méditerranée en bateau, de l'Algérie à l'Espagne. À teneur des renseignements de police obtenus le 25 novembre 2022, sa véritable identité a été confirmée.

c. A______ a fait l'objet d'un contrôle de Police le 3 décembre 2022 lors duquel il a été formellement identifié.

d. Le 7 décembre 2022, le SPMi a dénoncé les faits, précisant que A______ avait bénéficié de ses prestations durant 31 jours pour un total de CHF 8'726.50.

Il ressort du courrier du SPMi du 9 décembre 2022 que, malgré le montant total mentionné dans la dénonciation, A______ a en réalité profité de quatre nuits d'hébergement à CHF 269.90 et de 26 nuits à CHF 281.50 (le prix ayant augmenté à compter du 7 novembre 2022), soit des prestations d'une valeur totale de CHF 8'398.60. Le SPMi ne mentionne pas les cartes journalières d'achat de CHF 10.- dans ce courrier et ne les prend pas en compte comme coûts supplémentaires dans son calcul des prestations indûment perçues.

e. Tant lors de son audition par la police le 3 décembre 2022 que devant le Ministère public, puis le TP, A______ a admis les faits d'entrée et séjour illégaux, tout en expliquant qu'il pensait avoir le droit de venir en Suisse. Il n'avait jamais eu de passeport, même au Maroc. Il était venu à Genève pour soigner sa jambe car elle était fracturée. Il avait été opéré en France mais ne pouvait pas y bénéficier d'un suivi médical. Il a confirmé avoir pu consulter un médecin dès son arrivée à Genève. Son idée était de repartir en France une fois qu'il aurait obtenu des soins. Il souhaitait en effet pouvoir marcher, comme tout le monde.

Il a également admis avoir menti au SPMi sur son identité et sur son âge, alors qu'il était en réalité majeur. À son arrivée en Suisse, il avait rencontré quelqu'un qui lui avait dit que, s'il voulait de l'aide ou trouver un endroit où dormir, il fallait qu'il déclare être mineur. La date de son entrée au foyer C______ était bien le 2 novembre 2022. Il ignorait le coût d'une nuitée en foyer, l'estimant entre CHF 20.- et 25.-, mais savait qu'un bon d'achat d'une valeur de CHF 10.- lui était remis chaque jour.

f. À teneur d'un rapport médical des HUG produit par A______, ce dernier s'est fait radiographier son bassin/fémur le 7 décembre 2022, car il souffrait encore de douleurs à la suite d'une fracture du fémur droit, traitée le 10 juillet 2022 à D______ [France].

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b. Selon son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions.

Selon les documents des HUG qu'il a produits, il a consulté à plusieurs reprises les services médicaux durant sa détention, entre décembre 2022 et janvier 2023. Il s'est plaint d'une recrudescence des douleurs en lien avec sa fracture du fémur ; le bilan clinique et radiologique montrait que celle-ci était en voie de consolidation avec cal osseux (cf. rapport de la consultation orthopédique du 13 janvier 2023).

Il devait être mis au bénéfice d'une erreur sur l'illicéité s'agissant de ses entrée et séjour sur le territoire suisse. Avant son arrestation à Genève, il n'avait jamais été contrôlé par les autorités, ni en Suisse ni dans un autre des pays d'Europe qu'il avait traversés. Notamment du fait de son jeune âge, il ignorait totalement agir de façon illicite par sa seule présence en Suisse.

Bien qu'il admettait avoir trompé le SPMi sur son âge, son comportement entrait dans le cas de peu de gravité décrit à l'art. 148a al. 2 CP. Le total des prestations indûment touchées se montait à "CHF 8'378.60", et non à CHF 8'698.60 comme l'avait retenu le TP. Ce montant n'était toutefois pas, à teneur de la jurisprudence en la matière, le seul élément à prendre à compte pour qualifier ou non le cas de peu de gravité. Il devait également être tenu compte du fait qu'il avait menti à une seule reprise sur son identité et donc sur son âge, que la durée des prestations était de seulement un mois et qu'il avait agi dans le but compréhensible d'éviter de dormir dehors et de pouvoir se faire soigner, alors que sa situation personnelle était déplorable. Les prestations obtenues consistaient en réalité en un toit et de la nourriture, soit des biens de première nécessité, ce qui ne pouvait lui être reproché. À titre subsidiaire, il devait être retenu qu'il avait agi sous le coup d'une erreur sur les faits, puisqu'il ne pouvait connaître le coût des nuitées passées au foyer. Personne ne l'avait informé d'un tarif journalier – exorbitant – de CHF 281.50, alors qu'il estimait plutôt le prix d'un telle nuitée à une vingtaine de francs, comme il l'avait indiqué lors de son audition. Son intention ne portait ainsi que sur un cas de peu de gravité.

Plus subsidiairement, sa peine devait être atténuée pour tenir compte de son état de détresse profonde. Sans toit et sans le sou, il souffrait de la jambe et ne pouvait pas marcher correctement. Il ne voyait pas d'autre solution pour être soigné que de commettre les infractions en question, faisant de manière compréhensible passer sa santé avant le patrimoine de la collectivité.

L'expulsion était exclue pour une contravention et, à toutes fins utiles, l'inscription au SIS était injustifiée dans la mesure où il ne représentait absolument pas une menace pour la sécurité ou l'ordre public au vu de l'infraction reprochée.

Dans la mesure où il ne devait être condamné que pour une contravention, il concluait à une indemnité de CHF 200.- par jour pour les 64 jours de détention subis injustement, soit un total de CHF 12'800.-.

c. Le Ministère public conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris.

A______ avait parfaitement conscience qu'il était en situation illégale en Suisse, dès lors qu'il avait payé un passeur pour traverser la mer Méditerranée et arriver en Europe, et n'avait jamais détenu de passeport.

Ses actes ne pouvaient être qualifiés de cas de peu de gravité, au sens de l'art. 148a al. 2 CP. Le montant des prestations obtenues sans droit, qui était bien de CHF 8'698.60, était largement supérieur au seuil préconisé par la Conférence des procureurs de Suisse. Il avait, en sus, profité indûment d'une aide destinée à des mineurs non accompagnés qui en avaient davantage besoin, alors qu'il disposait d'autres moyens légaux pour se nourrir et se loger. Il pouvait notamment s'adresser à des associations privées ou, en dernier recours, demander l'aide d'urgence fournie par l'Hospice général.

Pour les mêmes motifs, la circonstance atténuante de la détresse profonde n'était pas réalisée, d'autant qu'il avait d'abord transité par l'Espagne, puis la France, de sorte qu'il ne pouvait prétendre n'avoir eu aucune autre solution pour se soigner que de se rendre en Suisse.

d. Le TP se réfère intégralement au jugement rendu.

D. A______ est célibataire et sans enfant. Sa mère vit au Maroc, alors que son père est décédé. Il a un demi-frère plus âgé. Il a suivi sa scolarité obligatoire jusqu'en 6ème primaire, puis une formation de coiffeur dans son pays d'origine qu'il a quitté en 2020, dans l'espoir d'une vie meilleure, pour se rendre en Espagne, puis à D______ [France] avant d'arriver en Suisse en novembre 2022. Il n'a jamais eu de passeport et n'a fait aucune démarche à son arrivée en France pour obtenir un titre de séjour. Il est actuellement sans emploi, ni revenu.

Son extrait du casier judiciaire suisse est vierge. À teneur des renseignements de police, A______ n'a pas non plus d'antécédent judiciaire au Maroc.

E. MB______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant un total de 11 heures et 30 minutes d'activité de chef d'étude, composée d'une heure et 15 minutes pour l'étude du jugement motivé et du procès-verbal de l'audience de première instance, trois heures et 15 minutes d'étude du dossier et sept heures pour la rédaction du mémoire d'appel et de la requête d'indemnisation. En première instance, il a été indemnisé à hauteur de 20 heures et 20 minutes d'activité.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1.1. L'art. 115 al. 1 LEI réprime quiconque contrevient aux dispositions sur l'entrée en Suisse prévues à l'art. 5 LEI (let. a) ou y séjourne illégalement (let. b).

À teneur de l'art. 5 al. 1 LEI, pour entrer en Suisse, tout étranger doit : avoir une pièce de légitimation reconnue pour le passage de la frontière et être muni d'un visa si ce dernier est requis (let. a) ; disposer des moyens financiers nécessaires à son séjour (let. b) ; ne représenter aucune menace pour la sécurité et l'ordre publics ni pour les relations internationales de la Suisse (let. c) ; ne faire l'objet d'aucune mesure d'éloignement ou d'une expulsion au sens des art. 66a ou 66a bis du Code pénal (let. d).

2.1.2. Selon l'art. 21 CP, quiconque ne sait ni ne peut savoir au moment d'agir que son comportement est illicite n'agit pas de manière coupable. Le juge atténue la peine si l'erreur était évitable.

L'erreur sur l'illicéité vise le cas où l'auteur agit en ayant connaissance de tous les éléments constitutifs de l'infraction, et donc avec intention, mais en croyant par erreur agir de façon licite (ATF 129 IV 238 consid. 3.1 ; cf. ATF 141 IV 336 consid. 2.4.3 et les références citées). La réglementation relative à l'erreur sur l'illicéité repose sur l'idée que le justiciable doit faire tout son possible pour connaître la loi et que son ignorance ne le protège que dans des cas exceptionnels (ATF 129 IV 238 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_524/2016 du 13 février 2017 consid. 1.3.2 ; 6B_1102/2015 du 20 juillet 2016 consid. 4.1). Pour exclure l'erreur de droit, il suffit que l'auteur ait eu le sentiment de faire quelque chose de contraire à ce qui se doit ou qu'il eût dû avoir ce sentiment (ATF 104 IV 217 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_524/2016 du 13 février 2017 consid. 1.3.2). Toutefois, la possibilité théorique d'apprécier correctement la situation ne suffit pas à exclure l'application de l'art. 21, 1ère phrase, CP. Ce qui est déterminant c'est de savoir si l'erreur de l'auteur peut lui être reprochée (ATF 116 IV 56 consid. II.3a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_784/2018 du 4 octobre 2018 consid. 1.1.2).

2.2. En l'espèce, c'est à juste titre que le TP a retenu qu'en pénétrant sur le territoire suisse le 2 novembre 2022, et en y séjournant jusqu'à son interpellation le 3 décembre 2022, alors qu'il ne disposait d'aucun document d'identité valable et d'aucune somme d'argent lui permettant d'assurer son séjour en Suisse, l'appelant avait réalisé les éléments constitutifs des infractions d'entrée illégale et de séjour illégal.

L'appelant ne saurait être mis au bénéfice d'une erreur sur l'illicéité du seul fait qu'il prétend n'avoir jamais été contrôlé avant son interpellation à Genève. Sans aucun passeport ni titre de séjour, il savait, ou ne pouvait ignorer, agir dans l'illégalité dans la mesure où, selon ses propres déclarations, il a traversé la Méditerranée en bateau en payant un passeur et vécu ensuite environ deux ans dans la clandestinité en Espagne, en France puis en Suisse. Il devait manifestement avoir le sentiment qu'il agissait de manière contraire au droit et il n'indique pas avoir cherché à se renseigner à ce propos. Il a notamment eu affaire au SPMi, puis à la Cellule requérant d'asile auprès de qui il s'est présenté le 9 novembre 2022, lesquels n'ont certainement pas manqué d'attirer son attention sur son statut. S'il n'a, comme il le prétend, jamais été contrôlé avant le 3 décembre 2022, il ne saurait se prévaloir d'une tolérance de la part des autorités alors que son arrivée en Suisse remontait au 2 novembre 2022 seulement.

Partant, le verdict de culpabilité des chefs d'entrée et de séjour illégaux sera confirmé.

3. 3.1.1. L'art. 148a CP punit quiconque qui, par des déclarations fausses ou incomplètes, en passant des faits sous silence ou de toute autre façon, induit une personne en erreur ou la conforte dans son erreur, et obtient de la sorte pour lui-même ou pour un tiers des prestations indues d'une assurance sociale ou de l'aide sociale (al. 1). Dans les cas de peu de gravité, la peine est l'amende (al. 2).

3.1.2. Selon le Message du Conseil fédéral, l'art. 148a CP constitue une clause générale par rapport à l'escroquerie au sens de l'art. 146 CP, qui trouve application lorsque l'élément d'astuce, typique de l'escroquerie, n'est pas réalisé. L'infraction englobe toute tromperie, qui peut être commise par le biais de déclarations fausses ou incomplètes, lorsque l'auteur dissimule sa situation financière ou personnelle réelle, ou en passant sous silence certains faits (arrêts du Tribunal fédéral 6B_797/2021 du 20 juillet 2022 consid. 2.1.1 ; 6B_1030/2020 du 30 novembre 2020 consid. 1.1.2 ; cf. Message du Conseil fédéral concernant une modification du code pénal et du code pénal militaire [Mise en œuvre de l'art. 121, al. 3 à 6 Cst. relatif au renvoi des étrangers criminels] du 26 juin 2013, FF 2013 5432 ss. [Message du Conseil fédéral du 26 juin 2013]).

Pour que l'infraction d'obtention illicite de prestations d'une aide sociale soit consommée, l'erreur dans laquelle la tromperie active ou passive a mis ou conforté l'aide sociale doit avoir déterminé celle-ci à verser des prestations indues à l'auteur ou à un tiers. La réalisation de l'infraction résulte de l'obtention de prestations d'une assurance sociale auxquelles la personne n'a pas droit. Les prestations doivent avoir été effectivement versées. La simple allocation est insuffisante (Message du Conseil fédéral du 26 juin 2013, p. 5433).

Sous l'angle subjectif, l'art. 148a CP décrit une infraction intentionnelle. Il faut d'une part que l'auteur sache, au moment des faits, qu'il induit l'aide sociale en erreur ou la conforte dans son erreur et, d'autre part, qu'il ait l'intention d'obtenir une prestation sociale à laquelle lui-même ou le tiers auquel il la destine n'a pas droit (Message, p. 5433). Le dol éventuel suffit (arrêts du Tribunal fédéral 6B_797/2021 précité consid. 2.1.2 ; 6B_1246/2020 du 16 juillet 2021 consid. 3.4).

3.1.3. La loi ne définit pas le cas de peu de gravité au sens de l'art. 148a al. 2 CP. Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a eu à se prononcer sur les critères permettant de retenir un cas de peu de gravité. Sur la base du Message du Conseil fédéral et après examen des différents avis de doctrine, le Tribunal fédéral a ainsi fixé un premier seuil quant au montant du délit à CHF 3'000.-, en deçà duquel il y a toujours lieu de retenir un cas de peu de gravité. À l'inverse, lorsque ce montant est supérieur à CHF 36'000.-, le cas de peu de gravité est en général exclu (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1108/2021 du 27 avril 2023 destiné à publication, consid. 1.5.9). Pour les montants intermédiaires, soit entre CHF 3'000.- et CHF 36'000.-, un examen approfondi des circonstances particulières du cas concret s'impose et les autres éléments retenus par la jurisprudence doivent être pris en compte. En particulier, la culpabilité peut sembler moindre lorsque l'obtention illicite de la prestation a été de courte durée, que le comportement de l'auteur ne traduit pas une intention marquée d'enfreindre la loi ou qu'on peut comprendre ses motivations ou ses buts (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1108/2021 précité consid. 1.5.7 ; 6B_104/2022 du 8 février 2023 consid. 2.1.4 ; 6B_1400/2021 du 20 décembre 2022 consid. 4.2 ; 6B_797/2021 du 20 juillet 2022 consid. 2.2).

Ainsi, le Tribunal fédéral a retenu un cas de peu de gravité, alors que la somme indûment perçue s'élevait à CHF 13'735.30, dans un cas où le prévenu avait passé sous silence, durant sept mois, aux services sociaux la réception d'un unique versement de ses avoirs de libre passage, considérant que l'intéressé avait agi par une simple omission, alors qu'il pouvait s'attendre à ce que le versement soit découvert dans la mesure où les services sociaux connaissaient l'existence de cet avoir de libre passage et qu'ensuite, à l'occasion d'un contrôle, il avait présenté volontairement les justificatifs correspondants. L'intention de l'auteur d'enfreindre la loi a ainsi été considérée comme relativement peu marquée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1108/2021 précité consid. 1.6).

3.1.4. Selon l'art. 13 al. 1 CP, quiconque agit sous l'influence d'une appréciation erronée des faits est jugé d'après cette appréciation si elle lui est favorable.

Agit sous l'emprise d'une erreur sur les faits celui qui n'a pas connaissance ou qui se base sur une appréciation erronée d'un élément constitutif d'une infraction pénale. L'intention délictuelle fait alors défaut (ATF 129 IV 238 consid. 3.1). L'erreur peut cependant aussi porter sur un fait justificatif, tel le cas de l'état de nécessité ou de la légitime défense putatifs ou encore sur un autre élément qui peut avoir pour effet d'atténuer ou d'exclure la peine (ATF 129 IV 257 consid. 2.2.1).

La délimitation entre erreur sur les faits et erreur de droit ne dépend pas du fait que l'appréciation erronée concerne une question de droit ou des faits illicites. Il s'agit de qualifier d'erreur sur les faits, et non d'erreur de droit, non seulement l'erreur sur les éléments descriptifs, mais également l'appréciation erronée des éléments normatifs, tels que l'appartenance à autrui d'un objet ou l'étendue d'une servitude (ATF 129 IV 238 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_220/2015 du 10 février 2016 consid. 3.4.1 et 6B_455/2008 du 26 décembre 2008 consid. 4.4). En d'autres termes, les erreurs sur tous les éléments constitutifs d'une infraction qui impliquent des conceptions juridiques entrent dans le champ de l'art. 13 CP et non de l'art. 21 CP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_806/2009 du 18 mars 2010 consid. 4.1).

3.2.1. En l'espèce, il est établi, et l'appelant ne le conteste pas, que ce dernier s'est présenté au SPMi sous un faux nom, en se faisant passer pour un mineur, alors qu'il était en réalité âgé de 21 ans. Sur cette base, il a perçu des prestations de ce service, entre le 2 novembre et le 3 décembre 2022, sous forme d'hébergement, de repas et de bon d'achat d'une valeur de CHF 10.- par jour.

La valeur totale des prestations obtenues correspond au coût facturé par le foyer au SPMi tel qu'il ressort des pièces au dossier de ce service. En revanche, il ne peut être déduit ni de la dénonciation du SPMi, ni de son courrier du 9 décembre 2022 et ses annexes que les cartes journalières d'achat de CHF 10.- par jour ne seraient pas comprises dans le tarif journalier mentionné. L'hypothèse la plus favorable à l'appelant doit dès lors être retenue et c'est un montant total de CHF 8'398.60 qui sera arrêté concernant les prestations perçues indûment. Il n'y a en revanche pas lieu de déduire la valeur des deux bons que l'appelant détenait encore sur lui lors de son arrestation, puisqu'il s'agit néanmoins de prestations qu'il a obtenues, sans que leur utilisation effective ne soit d'une quelconque pertinence pour juger de sa culpabilité d'infraction à l'art. 148a CP.

On précisera encore que l'appelant ne saurait être suivi lorsqu'il affirme devoir être jugé selon son appréciation des faits s'agissant du coût des prestations obtenues. Rien dans le dossier ne permet d'affirmer qu'il aurait d'emblée envisagé ne se procurer que des prestations de faible valeur, voire de révéler sa majorité avant d'atteindre un certain seuil. On peut bien imaginer que l'appelant ne connaissait pas le coût exact des prestations dont il bénéficiait mais il savait bénéficier d'une aide particulière, exclusivement destinée aux mineurs non accompagnés, puisque c'était la raison de son mensonge. Il n'est ainsi pas raisonnable de prétendre qu'il n'envisageait qu'un hébergement d'une valeur d'une vingtaine de francs, étant précisé que les prestations fournies aux mineurs par le Foyer C______ vont au-delà d'un simple hébergement d'urgence.

En induisant l'institution en erreur par une fausse date de naissance, l'appelant a obtenu des prestations auxquelles il n'aurait légitimement pas pu prétendre et causé de la sorte un dommage au SPMi, dans la mesure où la réalité des faits cachés aurait conduit l'organisme à refuser de telles prestations, indépendamment de la situation de précarité dans laquelle il se trouvait.

Du point de vue subjectif, l'appelant a également admis avoir agi sciemment en mentant sur son âge, sachant que, ce faisant, il était en mesure de postuler à l'obtention de prestations du SPMi en tant que mineur non accompagné, conscient que sa tromperie était nécessaire puisqu'il n'avait pas droit à ces prestations en tant que personne majeure.

Les éléments constitutifs de l'infraction à l'art. 148a al. 1 CP sont ainsi réalisés.

3.2.2. Reste à déterminer si, comme l'appelant le soutient, les circonstances du cas d'espèce permettent de retenir le cas de peu gravité au sens de l'art. 148a al. 2 CP.

La valeur des prestations obtenues sans droit par l'appelant, finalement fixée à CHF 8'398.60, se situe vers le bas de l'échelle des montants intermédiaires décrits par la récente jurisprudence du Tribunal fédéral, de sorte qu'il y a lieu de procéder à un examen des autres critères pertinents.

En l'occurrence, l'appelant a menti sur son identité et son âge, alors qu'il venait d'arriver en Suisse et se trouvait dans une situation précaire, démuni et sans logement, situation rendue encore plus compliquée par ses problèmes de santé, puisqu'il souffrait de la jambe tel que le révèlent les pièces produites au dossier. Dans ces circonstances, on peut comprendre la tentation de l'appelant de mentir sur son identité, sachant qu'il pourrait ainsi avoir accès à une aide spécifique, soit un hébergement et de la nourriture, et éventuellement être ensuite soigné. L'appelant n'a concrètement obtenu que des prestations en nature et de première nécessité. Il ne s'est pas enrichi de la somme susvisée. Enfin, la période pénale a porté sur un seul mois et n'a ainsi pas été particulièrement longue, d'autant qu'il s'agissait du premier mois que l'appelant a passé en Suisse.

Dans ces circonstances particulières, il y a lieu de considérer que l'appelant a agi dans un mobile compréhensible et durant une période restreinte, de sorte que le cas de peu de gravité sera retenu.

3.2.3. Au vu de ce qui précède, l'appelant sera reconnu coupable de contravention à l'art. 148a al. 1 et 2 CP.

Le jugement entrepris sera réformé sur ce point.

Cela étant, contrairement aux conclusions de l'appelant, cette nouvelle qualification juridique, plus favorable que celle de l'acte d'accusation mais portant sur les mêmes faits, ne justifie pas le prononcé d'un acquittement du chef de l'art. 148a al. 1 CP (art. 351 al. 1 CPP ; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE [éds.], Commentaire romand, Code de procédure pénale, 2ème éd., 2019, Bâle, n. 3 ad art. 351 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_254/2015 du 27 août 2015, consid. 3.2).

4. 4.1.1. Les infractions d'entrée et séjour illégaux (art. 115 al. 1 let. a et b LEI) sont passibles d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire. L'obtention illicite de prestations de l'aide sociale de peu de gravité (art. 148a al. 2 CP) est passible d'une amende.

4.1.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Elle doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution.

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 consid. 2.1 ; 129 IV 6 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_660/2013 du 19 novembre 2013 consid. 2.2).

4.1.3. Il y a détresse profonde au sens de l'art. 48 let. a ch. 2 CP, lorsque l'auteur est poussé à transgresser la loi pénale par une situation proche de l'état de nécessité, c'est-à-dire que, sous la pression d'une détresse particulièrement grave, il croit ne pouvoir trouver d'autre issue que la commission de l'infraction. La détresse peut être de nature matérielle ou morale ; le fait qu'elle résulte d'une faute ou d'une négligence de l'auteur de l'infraction ne suffit pas à exclure l'application de cette disposition. Le bénéfice de cette circonstance atténuante ne peut en outre être accordé que si l'auteur a respecté une certaine proportionnalité entre les motifs qui le poussent à agir et l'importance du bien qu'il lèse (ATF 147 IV 249 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1431/2020 du 8 juillet 2021 consid. 4.2).

4.1.4. Si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion (art. 49 al. 1 CP).

Lorsqu'il s'avère que les peines envisagées concrètement sont de même genre, l'art. 49 al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement – d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner – la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2).

4.1.5. La peine pécuniaire constitue la sanction principale dans le domaine de la petite et moyenne criminalité, les peines privatives de liberté ne devant être prononcées que lorsque l'État ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Lorsque tant une peine pécuniaire qu'une peine privative de liberté entrent en considération et que toutes deux apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute commise, il y a en règle générale lieu, conformément au principe de la proportionnalité, d'accorder la priorité à la première, qui porte atteinte au patrimoine de l'intéressé et constitue donc une sanction plus clémente qu'une peine privative de liberté, qui l'atteint dans sa liberté personnelle. Le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention. La faute de l'auteur n'est en revanche pas déterminante (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1).

4.1.6. Conformément à l'art. 34 CP, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende, le juge fixant leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur (al. 1). Un jour-amende est de CHF 30.- au moins et de CHF 3'000.- au plus. Exceptionnellement, si la situation personnelle et économique de l'auteur l'exige, il peut être réduit à CHF 10.-. Le juge en arrête le montant selon la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d'assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (al. 2).

En dépit de l'usage de l'adverbe "exceptionnellement", il faut retenir que le montant minimum du jour-amende est de CHF 10.- et qu'il n'y a pas lieu de se montrer particulièrement restrictif, pour descendre en-dessous du seuil de CHF 30.-, lorsque la situation financière du prévenu le justifie (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, n. 9 ad art. 34).

4.1.7. Selon la Directive du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (Directive sur le retour 2008/115/CE), intégrée au droit suisse par l'arrêté fédéral du 18 juin 2010 (RO 2010 5925) et la jurisprudence de la Cour de justice de l'union européenne y relative (ci-après : la CJUE, arrêt du 28 avril 2011 C-61/11 PPU EL DRIDI), le prononcé d'une peine pécuniaire du chef de séjour illégal est toujours envisageable (arrêt de la CJUE du 6 décembre 2012 C-430/11 SAGOR), alors que tel n'est pas le cas du prononcé d'une peine privative de liberté. La CJUE a toutefois précisé que les ressortissants de pays tiers ayant, outre le délit de séjour irrégulier, commis un ou plusieurs autres délits, pouvaient le cas échéant, en vertu de l'art. 2, paragraphe 2, sous b, de la Directive sur le retour, être soustraits au champ d'application de la directive (arrêt du 6 décembre 2011 C- 329/11 ACHUGHBABIAN, ch. 41)

4.1.8. Aux termes de l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits.

Le juge doit poser, pour l'octroi du sursis – ou du sursis partiel –, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit prononcer le sursis. Celui-ci est ainsi la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 ; ATF 134 IV 1 consid. 4.2.2).

4.1.9. Sauf disposition contraire de la loi, le montant maximum de l'amende est de CHF 10'000.- (art. 106 al. 1 CP). Le juge prononce dans son jugement, pour le cas où, de manière fautive, le condamné ne paie pas l'amende, une peine privative de liberté de substitution d'un jour au moins et de trois mois au plus (art. 106 al. 2 CP). Le juge fixe l'amende et la peine privative de liberté de substitution en tenant compte de la situation de l'auteur afin que la peine corresponde à la faute commise (art. 106 al. 3 CP).

Au sens de l'art. 104 CP, les dispositions de la première partie du CP s'appliquent aux contraventions, sous réserve des modifications des art. 105 ss CP.

4.2.1. En l'espèce, au vu de la requalification des faits, la peine prononcée dans le jugement de première instance doit être revue.

La faute de l'appelant n'est pas négligeable. Il a fait fi de la législation en vigueur en entrant et en demeurant durant un mois sur le territoire suisse sans bénéficier des autorisations nécessaires. La période pénale demeure relativement courte, mais n'a pris fin qu'en raison de l'intervention de la police.

S'agissant de la contravention, il a délibérément fourni une fausse identité afin de pouvoir bénéficier de l'aide sociale, soit un hébergement et des cartes journalières d'achat, en profitant de la confiance accordée par un organisme étatique. Sa situation personnelle précaire explique ses agissements, mais ne justifiait pas d'agir de manière contraire au droit.

Sa collaboration et sa prise de conscience peuvent être qualifiées de bonnes. Il a immédiatement reconnu les faits, même s'il a tenté de les expliquer par son ignorance et sa situation personnelle difficile.

Il sera également tenu compte, à décharge, de son jeune âge.

En revanche, aucun état de détresse profonde ne saurait être mis à son crédit. Si ses problèmes de santé sont étayés par des pièces au dossier, l'appelant ne fournit aucun élément qui puisse attester qu'il ne pouvait pas se faire soigner ailleurs qu'en Suisse, alors que c'est en France qu'il a été opéré de sa fracture à la jambe en juillet 2022. On ignore ainsi pour quelle raison il n'aurait pu poursuivre ses soins dans ce pays. Au surplus, il aurait été en mesure de requérir les soins médicaux adéquats auprès des hôpitaux suisses sans avoir à se faire passer pour un mineur.

Son absence d'antécédent est un facteur neutre dans la fixation de la peine, mais il en sera tenu compte s'agissant du choix du genre de peine. En effet, malgré l'absence de contestation par l'appelant du genre de peine prononcé par le premier juge, il y a lieu de considérer que seule une peine pécuniaire entre en ligne de compte pour les infractions à l'art. 115 al. 1 LEI, conformément à la Directive sur le retour.

La peine pécuniaire sera ainsi fixée à 30 jours-amende, soit une peine de base de 20 jours-amende pour le séjour illégal, augmentée de dix jours-amende pour l'entrée illégale (peine hypothétique de 20 jours-amende). Au vu de la situation personnelle et financière de l'intimé, il apparaît justifié de fixer le montant du jour-amende à CHF 10.-.

Le sursis sera octroyé, celui-ci étant acquis à l'appelant, et le délai d'épreuve fixé à trois ans.

En lien avec la contravention à l'art. 148a al. 2 CP, une amende de CHF 1'500.- sera prononcée, afin de tenir compte de la faute et de la situation personnelle de l'appelant. Une peine privative de liberté de substitution sera déterminée à 15 jours.

5. 5.1.1. À teneur de l'art. 429 CPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une réparation du tort moral subi en raison d'une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté (let. c).

L'art. 431 al. 2 CPP vise spécifiquement l'indemnisation de la détention injustifiée en raison de sa durée, qualifiée d'excessive dans la mesure où elle dépasse la sanction ou la peine privative de liberté prononcée par la suite. Une indemnisation est notamment possible si le nombre des jours de détention avant jugement dépasse celui de la peine prononcée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_558/2013 du 13 décembre 2013 consid. 1.6).

5.1.2. Aux termes de l'art. 51 CP, le juge impute sur la peine la détention avant jugement subie par l'auteur dans le cadre de l'affaire qui vient d'être jugée ou d'une autre procédure.

Il découle de cette disposition qu'une peine privative de liberté doit, si possible, être compensée avec la privation de liberté déjà intervenue, même dans une autre procédure (ATF 133 IV 150 consid. 5.1). La détention avant jugement doit être imputée sur la peine, indépendamment du fait que celle-ci soit assortie du sursis ou non et qu'il s'agisse d'une peine pécuniaire, privative de liberté ou d'une amende (ATF 135 IV 126 consid. 1.3.6 ; cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_389/2018 du 6 septembre 2018 consid. 1.2 sur l'imputation sur une peine prononcée avec sursis). La question de l'indemnisation d'une détention injustifiée ne se pose donc en principe que si une imputation suffisante de cette détention sur une autre sanction au sens de l'art. 51 CP n'est plus possible ; l'indemnisation financière est ainsi subsidiaire à l'imputation (ATF 141 IV 236 consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_431/2015 du 24 mars 2016 consid. 2.2).

L'art. 51 CP doit être appliqué d'office, l'imputation étant obligatoire et inconditionnelle (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1033/2018 du 27 décembre 2018 consid. 2.4).

5.1.3. L'ampleur de la réparation morale dépend avant tout de la gravité des souffrances physiques ou psychiques consécutives à l'atteinte subie par l'intéressé et de la possibilité d'adoucir sensiblement, par le versement d'une somme d'argent, la douleur morale qui en résulte (ATF 146 IV 231 consid. 2.3.1 ; 143 IV 339 consid. 3.1). Lorsque la victime a subi des atteintes pendant une période prolongée, les intérêts sur l'indemnité courent, en général, à partir d'une date moyenne (ATF 129 IV 149 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_123/2020 du 26 novembre 2020 consid. 10.6).

Pour le Tribunal fédéral, une indemnité journalière de CHF 200.- constitue en principe une réparation appropriée en cas de détention injustifiée de courte durée (art. 429 CPP), à condition qu'il n'existe pas de circonstances particulières qui pourraient fonder le versement d'un montant inférieur ou supérieur (arrêts du Tribunal fédéral 6B_133/2014 du 18 septembre 2014 consid. 3.2 ; 6B_547/2011 du 3 février 2012 consid. 2 ; 6B_111/2012 du 15 mai 2012 consid. 4.2 ; 6B_133/2014 du 18 septembre 2014 consid. 3.2). Lorsque la durée de détention est de plusieurs mois, il convient en règle générale de réduire le montant journalier de l'indemnité (ATF 113 Ib 155 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_111/2012 du 15 mai 2012 consid. 4.2).

Le Tribunal fédéral a admis une réduction, non schématique, de l'indemnité pour tort moral, lorsque les frais d'entretien au domicile de l'intéressé étaient beaucoup plus bas (ATF 125 II 554 consid. 4a : Voïvodine (Serbie), pouvoir d'achat 18 fois plus élevé qu'en Suisse, permettant une réduction de l'indemnité, réduction toutefois ramenée de 14 fois à deux fois ; arrêts du Tribunal fédéral 1A.299/2000 du 30 mai 2001 consid. 5c : Bosnie-Herzégovine, pouvoir d'achat six à sept fois plus élevé permettant une réduction de l'indemnité de 75% ; 1C_106/2008 du 24 septembre 2008 consid. 4.2 : Portugal, coût de la vie correspondant à 70% du coût de la vie suisse ne justifiant pas de réduction).

Statuant selon les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC), le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation. Ainsi, la juridiction d'appel a diminué de 60% l'indemnité de CHF 100.- par jour pour tort moral dans le cas d'un ressortissant albanais qui avait subi 89 jours de détention (AARP/120/2015 du 3 mars 2015 consid. 4.2.3 qui constate une différence de niveau de vie d'un facteur 26), de 70% dans le cas d'un ressortissant kosovar qui avait subi 76 jours de détention (AARP/376/2012 du 16 novembre 2012 consid. 3.6.1), de 65% dans le cas d'un ressortissant tunisien qui avait subi 183 jours de détention (AARP/605/2013 du 30 décembre 2013 pour une différence de facteur 20 ; ACPR/434/2014 du 29 septembre 2014). Elle a en particulier considéré, eu égard à un ressortissant roumain, qu'il se justifiait de réduire de 55% le montant de l'indemnité journalière, étant considéré que le niveau de vie en Roumanie était neuf fois et demie moins élevé qu'en Suisse (PIB par habitant suisse de CHF 78'023.- et roumain de CHF 8'100.- en 2012) (AARP/525/2015 du 14 décembre 2015 consid. 5.2.3).

Le produit intérieur brut (PIB) ainsi que le PIB par habitant sont des indicateurs de l'activité économique qui permettent de mesurer et de comparer les degrés de développement économique des différents pays. Le PIB par habitant est habituellement utilisé comme indicateur du niveau de vie d'un pays.

Pour l'année 2021 (derniers chiffres publiés), le PIB par habitant en Suisse était de l'ordre de CHF 91'991.-, alors qu'il se montait à environ USD 3'795.- au Maroc (cf. données de la Banque mondiale disponibles sur https://donnees.banquemondiale.org/ [consulté le 9 juin 2023]).

5.2.1. En l'espèce, la peine fixée étant inférieure aux 64 jours de détention subis par l'appelant, ces derniers seront déduits en priorité de la peine pécuniaire prononcée, à raison de 30 jours. L'appelant est également condamné à une amende de CHF 1'500.-, rattachée à une peine privative de liberté de substitution de 15 jours, sur lesquels doivent ainsi être imputés 15 jours supplémentaires.

Pour les 19 jours restants, l'appelant a droit à une indemnisation pour détention excessive au sens de l'art. 431 al. 2 CPP, et non fondée sur l'art. 429 al. 1 let. c CPP (détention injustifiée).

Comme cela résulte de la jurisprudence, le montant de CHF 200.- par jour constitue une indemnité appropriée en cas de détention injustifiée de courte durée. En l'espèce, l'appelant est resté incarcéré sans droit durant un peu plus d'un mois, de sorte qu'il convient de retenir le montant susvisé comme approprié pour l'indemnité journalière à fixer, sous réserve de ce qui suit.

Les circonstances de la privation de liberté de l'appelant n'ont pas été particulièrement difficiles ou attentatoires à son intégrité physique, psychique ou à sa sensibilité. Il ressort de la comparaison entre le produit intérieur brut par habitant en Suisse et celui au Maroc que le niveau de vie dans cet État est plus de 24 fois moins élevé qu'en Suisse. Vu cette différence conséquente, il se justifie de réduire de 50% le montant de l'indemnité journalière.

Partant, une indemnité journalière de CHF 100.- (CHF 200.- x 50%) pour les 19 jours de détention excessive lui sera octroyée, soit un total de CHF 1'900.-. Ce montant portera intérêt à 5% dès le 1er janvier 2023 (date à laquelle il aurait dû être libéré).

5. Au vu de l'issue de l'appel, la question de l'expulsion obligatoire de l'appelant du territoire suisse ne se pose plus, les infractions pour lesquelles il est condamné ne faisant pas partie de la liste de l'art. 66a al. 1 CP.

L'expulsion prononcée par le premier juge sera annulée, de même que l'inscription au SIS y relative.

6. L'appelant obtient gain de cause sur l'essentiel de ses conclusions, mais succombe s'agissant des infractions à la LEI, lesquelles sont confirmées. Aussi, il sera condamné à supporter 20% des frais de la procédure d'appel, le solde étant laissé à la charge de l'État (art. 428 al. 1 CPP). Il en ira de même de l'émolument de jugement de CHF 600.- mis à sa charge à la suite de son annonce d'appel.

Vu la confirmation du verdict de culpabilité, malgré la déqualification retenue, la répartition des frais de procédure en première instance n'a en revanche pas à être revue (art. 426 al. 1 et 428 al. 3 CPP).

7. 7.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique. Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

7.2. À l'aune de ces principes, il y a lieu de retrancher de l'état de frais produit par Me B______, défenseur d'office de A______, le poste d'étude du jugement et du procès-verbal de première instance, cette activité étant couverte par le forfait. Par ailleurs, le temps consacré à la rédaction du mémoire d'appel et la requête en indemnisation de sept heures, additionné de trois heures d'étude du dossier préalable, est excessif dans la mesure où le dossier est déjà bien connu du conseil pour avoir été plaidé il y a peu, outre sa faible ampleur et l'absence de difficulté juridique. Une activité totale de sept heures, préparation et rédaction comprises, paraît plus appropriée.

La rémunération de MB______ sera partant arrêtée à CHF 1'809.36 correspondant à sept heures d'activité au tarif de CHF 200.-/heure, plus la majoration forfaitaire de 20% vu le total d'activité finalement admis, ainsi que l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 129.36.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/86/2023 rendu le 25 janvier 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/25622/2022.

L'admet partiellement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable d'entrée et de séjour illégaux (art. 115 al. 1 let. a et b LEI) et d'obtention illicite de prestations d'une assurance sociale ou de l'aide sociale de peu de gravité (art. 148a al. 1 et 2 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, sous déduction de 30 jours de détention avant jugement (art. 34 et 51 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 10.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne A______ à une amende de CHF 1'500.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 15 jours, sous déduction de 15 jours de détention avant jugement (art. 51 et 104 CP).

Alloue à A______ une indemnité de CHF 1'900.-, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2023, à titre de réparation du tort moral pour la détention subie en trop.

Ordonne la confiscation des objets figurant sous chiffres 1, 2 et 3 de l'inventaire n° 1______ (art. 69 CP).

Condamne A______ aux frais de la procédure de première instance, qui s'élèvent à CHF 1'164.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'115.-, qui comprennent un émolument de CHF 1'000.-.

Met 20% de ces frais, ainsi que de l'émolument de jugement complémentaire de CHF 600.- prononcé par le Tribunal de police, soit CHF 343.-, à la charge de E______ et laisse le solde à la charge de l'État.

Prend acte de ce que l'indemnité de procédure due à MB______, défenseur d'office de A______, a été arrêtée à CHF 5'663.45 pour la procédure de première instance (art. 135 CPP).

Arrête à CHF 1'809.36, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Secrétariat d'État aux migrations ainsi qu'à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

Le président :

Vincent FOURNIER

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'764.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

40.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'115.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

2'879.00