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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/11884/2018

AARP/33/2023 du 07.02.2023 sur JTDP/1261/2021 ( PENAL ) , REJETE

Recours TF déposé le 10.03.2023, 7B_427/2023
Descripteurs : IN DUBIO PRO REO;ACTE D'ORDRE SEXUEL AVEC UN ENFANT;TORT MORAL
Normes : CP.187.ch1; CP.47; CP.49; CPP.122.al1; CO.47
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/11884/2018 AARP/33/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 2 février 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant par Me B______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/1261/2021 rendu le 11 octobre 2021 par le Tribunal de police,

 

et

C______, comparant par Me D______, avocate,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 11 octobre 2021, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a acquitté d'actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de discernement ou de résistance (art. 191 du code pénal suisse [CP]), l'a reconnu coupable d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 CP) et l'a condamné à une peine privative de liberté de 24 mois, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans, ainsi qu'à devoir s'acquitter, à titre de tort moral, d'un montant de CHF 15'000.- avec intérêt à 5% dès le 1er juillet 2013 en faveur de C______, frais de la procédure à sa charge.

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant à son acquittement et à l'octroi en sa faveur d'une indemnité pour tort moral de CHF 5'000.-, majorée lors des débats d'appel à CHF 7'000.-.

b. Selon l'acte d'accusation du 5 mai 2021, il est encore reproché ce qui suit à A______ :

- à Genève, à réitérées reprises de 2012 jusqu'aux alentours de 2015, il a fait subir des actes d'ordre sexuel à la fille de son épouse, C______, née le ______ 2002. Il a en particulier profité que sa compagne soit assoupie sur le canapé du salon pour rejoindre C______, qui faisait semblant de dormir, dans sa chambre. Il lui a touché le bras, l'a caressée au niveau des cuisses avant de soulever son t-shirt et de la toucher sur le reste du corps, puis l'a finalement pénétrée avec ses doigts.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

Contexte familial

a.a. F______ et A______, mariés depuis octobre 2011, sont les parents de E______, né le ______ 2011. F______ est également la mère de C______, issue de son union avec son ex-compagnon, G______.

a.b. Après la naissance de leur fils E______, la relation entre F______ et A______ a commencé à se détériorer, faisant place à des violences physiques et verbales mutuelles, dans un contexte de consommation excessive d'alcool. Les disputes entre les époux impliquant, notamment, des injures, des jets d'objets ou des altercations physiques, sont devenues fréquentes, C______ ayant indiqué avoir assisté à plusieurs d'entre elles, dont une dispute lors de laquelle A______ avait saisi sa mère à la gorge. Selon ce dernier, les disputes entre son épouse et C______ étaient également devenues régulières, la première pouvant tirer l'oreille ou saisir fortement sa fille.

a.c. Dans les pages de son journal intime, versées au dossier, écrites entre 2014 et 2015, C______ a évoqué à plusieurs reprises des pensées suicidaires en lien avec des "bêtises" qu'elle avait faites. En août 2015, elle se demandait comment améliorer son comportement pour que la situation s'arrange à la maison, son premier problème étant le mensonge. Avant de faire une bêtise, elle devait se demander si cela valait la peine et se questionner sur les conséquences, pour ne plus avoir besoin de mentir. Il y avait beaucoup de cris à la maison et presque toujours une "mauvaise humeur", dont elle était responsable, ce qui devait changer car cela "compliquait la situation dans le couple de maman et paps", qui risquaient de se séparer, ce qui rendrait sa mère très triste et impliquerait une garde partagée de E______. Si cela arrivait, son petit frère lui en voudrait toute sa vie et sa mère perdrait tout.

a.d. Après une première séparation en mai 2016, F______ et A______ ont repris la vie commune en septembre 2016, avant que ce dernier ne quitte définitivement le domicile conjugal en octobre de la même année.

a.e. Il ressort des nombreux messages WhatsApp versés à la procédure par A______, dont les dates se situent entre mars 2017 et mars 2018, que F______ a mal vécu la séparation, reprochant à ce dernier de l'avoir quittée pour une autre femme et d'avoir abandonné sa famille. Elle a également accusé A______ de l'avoir violée, tout en affirmant notamment qu'il allait "le payer", qu'elle allait le "mettre à terre", qu'il allait perdre son fils et aller en prison. Elle l'a injurié de nombreuses fois et a déclaré que C______ était blessée de la façon dont il l'avait rejetée de sa vie.

a.f. En octobre 2017, la police a adressé un signalement au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (TPAE) en raison de soupçons de maltraitance sur C______ et son petit frère, après que F______ s'est faite l'auteur de violences graves sur le chien de la famille. Alertés tour à tour en 2018 par le TPAE, respectivement le Tribunal de première instance (TPI), le Service de protection des mineurs (SPMi) et le Service d'évaluation et d'accompagnement de la séparation parentale (SEASP), ont rendu des rapports mettant en exergue l'incapacité de F______ de fournir un cadre de vie adéquat à ses enfants. Ces évaluations ont donné lieu au retrait de son droit de garde sur ses deux enfants le 14 mars 2018, avec placement de E______ chez A______ et de C______ chez son père, G______.

a.g. Après son départ du domicile familial, A______ a échangé des messages WhatsApp avec C______ entre mars 2017 et avril 2018. Il ressort des captures d'écran produites par le prévenu qu'il a pris à de nombreuses reprises des nouvelles de sa belle-fille en des termes affectueux, messages restés en majorité sans réponse ou suivis d'un retour très succinct de la part de cette dernière. C______ a envoyé plusieurs messages à A______ dans lesquels elle lui faisait porter la responsabilité des difficultés familiales ("tout ca ne se serai pas passer si ru avais pas fait tout se que tu fait") en lui reprochant de l'avoir oubliée, d'avoir abandonné sa famille et de faire du mal à sa mère, dont elle a pris la défense, mais également dans lesquels elle critiquait la nouvelle compagne de son beau-père. A______ s'est systématiquement montré disponible, ouvert et compréhensif, invitant sa belle-fille à lui parler si elle en ressentait le besoin.

a.h. C______ a débuté son suivi chez sa pédiatre en 2011, sans particularité relevée. En 2015, la Dresse H______ a noté que sa patiente présentait une thymie triste, ce qu'elle avait mis en lien avec la situation familiale. C______ s'était ouverte en 2018 des difficultés rencontrées avec son beau-père, ce qui, couplé avec son attitude, avait amené la Dresse H______ à s'interroger sur de possibles abus sexuels. Elle a décrit une relation mère/fille particulière, avec une grande difficulté pour F______ à ne pas envahir l'espace de sa fille avec ses propres problématiques.

Entre avril et juin 2017, C______ a été hospitalisée en service de pédopsychiatrie pour une mise à l'abri d'idéation suicidaire. Un diagnostic d'état dépressif moyen a été posé. En 2018 et 2019, C______ a été, à plusieurs reprises, prise en charge aux urgences des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) dans le cadre d'abus de médicaments à but suicidaire et de scarifications, de même qu'hospitalisée dans des services psychiatriques ("______"[service], Clinique I______, etc.). Les diagnostics de trouble des conduites alimentaires anorexiques et boulimiques, trouble de la personnalité émotionnellement labile mis en lien avec un syndrome de choc post-traumatique et trouble dépressif récurrent ont été posés par la Dresse J______ en 2018 et un traitement médicamenteux ainsi qu'un suivi mis en place. Lors d'une réunion de réseau entre professionnels le 6 décembre 2018, les intervenants ont suspecté C______ et sa mère de se voir seules, en violation des règles fixées par le TPAE à la suite du retrait du droit de garde, ce que la jeune fille n'a pas confirmé "pour ne pas que sa mère ait des ennuis". En janvier 2019, les intervenants ont noté que la santé de C______ s'était détériorée, la présence de nombreuses scarifications étant notamment constatée sur le bas de son corps. C______ les a informés avoir reçu des messages de sa mère, qualifiés d'"assez violents" par le SPMi, dans lesquels cette dernière l'accusait d'être responsable du placement de son frère. Malgré cela, elle souhaitait pouvoir maintenir des relations personnelles avec sa mère. Dans son rapport du mois de mars 2019, le SPMi a notamment considéré la relation mère/fille comme un facteur déstabilisant pour C______. Fin 2019, alors qu'elle était hospitalisée à la Clinique I______, elle a tenté de mettre fin à ses jours par abus médicamenteux, puis par strangulation à trois reprises.

Faits reprochés : dévoilement et déclarations

b.a. Le 23 mai 2018, F______ a notamment déposé plainte pénale pour des abus sexuels commis par son mari, A______, sur C______. Sa fille l'avait appelée le 21 mai 2018 depuis la Clinique I______, où elle était hospitalisée, pour lui proposer de faire du camping durant le week-end. Sa mère lui avait expliqué que cela n'était pas possible en raison du retrait du droit de garde et C______ lui avait dit qu'elle allait avoir besoin de ses parents. Lorsqu'elle avait interrogé sa fille à ce sujet, cette dernière lui avait indiqué, sans en mentionner la raison, qu'un rendez-vous important allait avoir lieu le 24 mai à la Clinique en présence du SPMi, de la Cheffe de clinique et des psychologues. F______ et G______ devaient également être présents, elle souhaitait toutefois que son père n'y assiste pas.

b.b. Moins d'une heure après cet appel, C______ lui avait envoyé des messages WhatsApp dont la teneur était la suivante : "Cc maman, ça va peut être être un message choque mais j'ai besoin de ton aide. J'en ai parlé à la clinique de se que A______ faisait que ça soit avec toi la nuit.. ou avec moi. Il venais souvent dans ma chambre mais je me rappel plus très bien. Enfin je suis sur. J'ai voulu faire le test et tu vois quand je te disais que j'avais mal dans la partie intime, bas je crois que ct à cause de A______. J'ai essayé de mettre un tampon alors que je n'avais pas mes règles et il s'est mis normalement et ya pas eu " [ndlr : la fin du message n'a pas été versée au dossier]. Le lendemain, C______ a écrit les messages suivants à sa mère : "Ça a commencé quand E______ est née mais au début je comprenais pas trop. Mais t'en fait pas maman ça va aller. Les médecins savent à moitié et depuis pas longtemps.". Lorsque F______ a informé sa fille qu'elle prévoyait d'aller déposer plainte à la police, C______ a répondu "Quoi nn mais nn maman, je suis en train d en parler avec ma psy et il faut pas que ça se passe comme ça", "je suis pas prête se t'en parler par téléphone".

b.c. Selon le rapport de police du 14 juin 2018, K______, psychologue, avait indiqué à la police, lors d'un entretien téléphonique le 24 mai 2018, que C______ avait raconté au corps médical que son beau-père était venu le soir dans sa chambre tandis qu'elle faisait semblant de dormir et qu'il s'allongeait alors à côté d'elle et lui prodiguait des caresses sur les cuisses et les "parties intimes", ajoutant également qu'il faisait "autre chose".

c.a. Après s'être rendue à la Clinique I______ pour tenter d'auditionner C______, sans succès dès lors qu'elle était restée muette et n'était parvenue qu'à hocher la tête pour répondre aux questions de la psychologue, la police a réalisé une audition EVIG un mois plus tard, le 10 août 2018. L'entretien a duré une heure et 26 minutes. C______ est parvenue à répondre aux questions d'ordre général. Elle a ainsi expliqué que tout s'était toujours bien passé avec A______ jusqu'à ses neuf ans, soit jusqu'à la naissance de son petit frère. A partir de ce moment-là, il l'avait mise de côté, avait commencé à la réprimander et à lui faire sans cesse la morale.

Lorsque les faits dénoncés ont commencé à être évoqués, C______ est devenue mutique, laissant passer de longues minutes de silence après les questions de l'inspectrice de police, qui a dû à plusieurs reprises relancer le dialogue ou tenter de rassurer C______. Celle-ci a exprimé qu'elle avait l'angoisse et de la peur car elle n'avait pas l'habitude d'en parler et avait l'impression de revivre les faits. Avec beaucoup de difficulté, C______ a fait état qu'après les disputes avec sa mère, laquelle dormait alors soit dans la chambre de E______, soit sur le canapé, A______ avait pris l'habitude de se glisser dans sa chambre. Il s'asseyait sur le bord de son lit et commençait à la toucher un peu partout, puis sur les cuisses, puis remontait jusqu'à ce qu'il baisse son short et la touche sur sa "partie génitale". Lorsque qu'il lui a été demandé de fournir davantage de précisions, C______ a, toujours difficilement, à nouveau déclaré que A______ s'asseyait sur son lit, qu'il commençait toujours par lui toucher les bras, puis qu'il lui caressait ses cuisses, lui enlevait son t-shirt et commençait à la "toucher un peu partout", à savoir sur le ventre et les hanches. Ensuite il revenait sur les cuisses et remontait. Il lui descendait le short et mettait ses doigts dans sa "partie". Après qu'il lui eut été demandé de préciser ce qu'elle entendait par "partie" et de nombreux silences, C______ a déclaré que A______ mettait ses doigts dans son vagin. Lorsqu'il agissait, A______ était "bizarre" et "pas comme d'habitude". Il ne parlait pas et elle avait l'impression qu'il était en colère. Les quelques fois où elle avait ouvert les yeux, elle avait remarqué qu'il avait un regard froid. Elle avait peur, n'arrivait pas à bouger et faisait semblant de dormir jusqu'à ce qu'il quitte la chambre. Après cela, elle n'arrivait pas à s'endormir, ne parvenant pas à penser à autre chose et avait pris l'habitude de se scarifier, d'abord sur les jambes, puis plus tard sur les bras. A______ avait commencé ses agissements lorsque E______ avait entre six et 12 mois, pénétrant de la sorte dans sa chambre une fois toutes les deux semaines au début, puis une fois par semaine. A______ ne lui faisait ni subir d'attouchements durant les vacances scolaires dans la mesure où son petit frère dormait souvent avec elle à ce moment-là, ni lorsqu'il était à S______ [VS]. Il avait cessé ses actes deux ou trois ans auparavant. En dehors de ces épisodes, A______ maintenait une grande distance par rapport à elle, faisant comme si rien ne se passait lorsqu'il était sobre et était "tout joyeux" comme si tout allait bien lorsqu'il avait bu de l'alcool.

c.b. En première instance, C______ n'a pas été en capacité d'assister à l'audience pour des raisons médicales.

Selon l'attestation du 1er octobre 2021 de la Dresse L______, médecin interne au Service psychiatrique des HUG, la patiente présentait un état de stress post-traumatique qui se manifestait par des flash-back, des insomnies, des cauchemars et une hypervigilance, associés à une anxiété importante et à un état dépressif. L'état de stress post-traumatique aggravait son trouble de la personnalité de type borderline en accroissant ses fluctuations d'humeurs et ses idées noires et suicidaires. C______ se livrait plus fréquemment et plus intensément à des actes auto-dommageables, ce qui pouvait mettre sa vie en danger et mentionnait comme facteur déclenchant de son état clinique les abus sexuels de son beau-père.

Sur les photographies produites par le conseil de C______ le 5 octobre 2021, les bras et les jambes de cette dernière sont couverts de cicatrices plus ou moins fraîches de scarifications, dont certaines ont nécessité des points de sutures.

c.c. Début 2022, C______ était hospitalisée et son état de santé ne lui permettait pas d'assister aux débats d'appel, même en l'absence de A______.

Entendu par la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) en novembre 2022, elle a confirmé ses déclarations à la police, à savoir que A______ était l'auteur de gestes à caractère sexuel alors qu'elle se trouvait dans son lit. Avant la naissance de son petit frère, elle avait une bonne relation avec celui qui tenait son rôle de beau-père et auquel elle était très attachée. Il avait totalement changé après l'arrivée de E______, la rabaissant constamment. Les disputes avec sa mère et les abus avaient commencé à ce moment-là. Les abus avaient cessé quand elle avait 12 ans, lorsque sa mère et A______ s'étaient séparés. Elle n'avait pas dénoncé les faits plus tôt car elle ne souhaitait pas en parler. Ce n'était que lorsqu'elle s'en était ouverte à sa psychiatre à la Clinique I______ qu'il lui avait été conseillé de contacter la police. Elle avait dévoilé les faits à sa mère peu après les avoir évoqués à la clinique. Elle n'avait pas mentionné les abus dans son journal intime car elle savait que ses parents le lisaient. Elle ne savait pas exactement pour quelle raison la garde de E______ avait été retirée à sa mère, mais avait entendu que cette dernière n'était pas apte à s'en occuper. Au début, sa mère avait cru que la garde lui avait été retirée en raison des abus mais elle ne se souvenait pas d'avoir échangé avec elle à ce sujet. En tout état de cause, elle n'était pas au courant du retrait de la garde de E______ au moment où elle avait dévoilé les abus puisqu'elle était hospitalisée. Elle ne se souvenait pas non plus que sa mère lui avait dit "si je le dénonce, toi aussi tu dois le faire". Elle avait plutôt bien vécu le départ de A______ du domicile familial et s'était sentie soulagée même si cela lui faisait de la peine pour son petit frère.

Elle avait commencé à se sacrifier périodiquement dès l'âge de neuf ans sur l'aine et sur les bras. Les scarifications étaient légères quand elle était petite, puis plus marquées en grandissant, étant précisé que durant la période des abus, elles étaient toutes petites et que lorsque son beau-père n'était plus là, elle cessait de s'automutiler. Actuellement, elle continuait de se scarifier à cause des abus et vivait à l'unité hospitalière M______ à la Clinique [psychiatrique] de N______. Elle avait dû y être admise une quinzaine de jours auparavant en raison de l'audience d'appel.

d. A______ a contesté les faits reprochés. Il ne s'était jamais couché dans le lit de sa belle-fille. Il était peut-être allé à une reprise dans sa chambre après une dispute avec F______, mais C______ était éveillée et il s'était contenté de lui expliquer la situation et de la rassurer. Il était rarement entré dans sa chambre lorsqu'elle dormait et uniquement pour descendre les stores, fermer la fenêtre ou aller chercher E______ lorsqu'il s'était endormi avec sa sœur. Sinon, il entrait pour lui dire bonne nuit quand elle était encore éveillée. Il avait toujours eu une bonne relation avec C______, même s'il était vrai qu'après la naissance de E______, ils avaient fait moins d'activités ensemble. Après avoir quitté le domicile familial, ils avaient même partagé des moments ensemble, comme une balade au bord du lac en septembre 2016 de laquelle il a produit des photographies en audience d'appel dont il ressortait que sa belle-fille, en short et en t-shirt, ne portait pas de trace de scarification. Pour lui, les accusations dont il faisait l'objet devaient venir de F______, qui voulait se venger en raison du retrait de son droit de garde sur ses enfants. Après la naissance de E______, les disputes avec F______ étaient devenues fréquentes. Il avait été victime de violences physiques de sa part. Personnellement, il ne s'était jamais montré physiquement violent mais s'était plutôt fait du mal à lui-même, en tapant dans un mur. Il vivait un enfer depuis leur séparation et avait extrêmement mal vécu les accusations dont il faisait l'objet.

e. K______, psychologue au sein de la Clinique I______, a déclaré que durant son suivi, C______ lui avait parlé, ainsi qu'aux infirmiers, d'un événement traumatique qu'elle avait subi quelques années après la naissance de son demi-frère. Elle n'avait pas verbalisé les choses mais les avait écrites car lorsqu'elle en parlait, C______ dissociait et n'était soudainement "plus là", ce qui arrivait lorsque quelqu'un avait subi un traumatisme. C______ avait écrit que son beau-père venait parfois dans sa chambre, qu'il la caressait sur les cuisses et introduisait ses doigts dans son "V", entouré de petites étoiles. Initialement, C______ était suivie pour un trouble alimentaire, le stress post-traumatique et la personnalité borderline ayant été décelés par la suite. Il était arrivé que C______ ait des douleurs pelviennes sans explication, qu'elle fasse des cauchemars ou des insomnies. Il y avait eu des moments où elle semblait revivre les abus. La psychologue n'était pas capable d'indiquer l'origine du stress post-traumatique mais il était fréquent que des actes tels que ceux décrits par C______ engendrent un tel trouble, de même qu'un éclatement familial couplé à de la violence intrafamiliale. Elle n'était toutefois pas en mesure de dire ce qu'il en était pour C______.

f. Selon les déclarations de la Dresse J______, médecin psychiatre à la Clinique I______, C______ leur avait été adressée pour des troubles alimentaire et dépressif, un diagnostic de trouble dissociatif lié à un syndrome de stress post-traumatique ayant été posé par la suite. Cliniquement parlant, il n'existait aucune raison de mettre en doute les dires de la patiente, qui reliait le trouble dissociatif aux abus sexuels, compte tenu de la compatibilité entre son récit, ses troubles et leurs manifestations physiques. Pour la Dresse J______, une personne atteinte de trouble borderline ne pourrait pas inventer de tels faits car il s'agissait de deux choses différentes, le trouble dissociatif étant indépendant du trouble de la personnalité. Cliniquement, C______ ne pouvait pas non plus avoir feint le trouble dissociatif. Elle avait souffert de symptômes physiques de ce trouble sous la forme de douleurs pelviennes, toujours en fin de journée ou durant la nuit, épisodes pendant lesquels il était impossible de reprendre contact avec elle. Lorsque C______ reprenait ses esprits, elle affirmait qu'elle revivait les abus. Pour ces raisons, ils étaient arrivés à la conclusion que le trouble dissociatif et le stress post-traumatique étaient causés par des abus sexuels, à l'exclusion d'un autre événement. Les visites entre la jeune fille et sa mère étaient encadrées par une thérapeute et les contacts directs interdits car il était difficile pour C______ de voir sa mère. Cette dernière tenait des propos culpabilisants envers sa fille, la rendant notamment responsable du placement de son petit frère.

Expertises

g.a. L'expertise de crédibilité du 9 janvier 2019, réalisée par le Dr O______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie et médecin adjoint agrégé auprès du Centre universitaire romand de médecine légale (CURML), retient en substance que les déclarations faites par C______ lors de son audition EVIG sont "plutôt crédibles" mais que le contexte de leur survenue créait un doute au sujet de cette crédibilité.

Les déclarations de C______, cohérentes et spontanées, tant du point de vue de leur contenu que de la manière dont elles ont été exprimées, ne semblaient pas tenir d'un discours appris et récité. L'attitude de l'expertisée durant l'audition, bien qu'évocatrice d'un trouble psychique, n'était pas de nature à faire craindre une déclaration factice, apprise ou suggérée par autrui. L'analyse du contenu de la déclaration (CBCA "Criteria-based Content Analysis") révélait la présence de dix critères sur 19, score qui allait dans le sens d'une déclaration crédible, même s'il n'apparaissait pas particulièrement élevé par rapport à l'âge de l'expertisée.

Les circonstances ayant entouré le dévoilement n'étaient cependant pas en faveur de la crédibilité de C______. Dans le contexte de conflit familial, il semblait que l'expertisée avait adhéré au discours de sa mère qui reprochait à A______, par messages en des termes très sexués, de les avoir abandonnés et de fréquenter sa nouvelle compagne à proximité de leur domicile. En agissant de la sorte, C______ pouvait venger sa mère, confirmer que A______ était perturbé dans sa sexualité et permettre à F______ de récupérer la garde de E______.

g.b. Entendu par le Ministère public (MP), l'expert a confirmé que les déclarations de C______ étaient plutôt crédibles et précisé certains points. Durant son audition, l'expertisée ne s'était pas corrigée elle-même et avait signalé lorsqu'un élément lui échappait, ce qui renforçait sa crédibilité. Le dévoilement initial était peu habituel mais ses particularités n'avaient pas d'influence sur la crédibilité son récit et aucun élément du dossier ne permettait de retenir que l'expertisée avait subi des pressions externes. Dans le contexte du conflit familial, on pourrait craindre que, par ses déclarations, C______ ne cherche à obtenir réparation du préjudice subi par sa mère, ce qui altérait de façon légère sa crédibilité. Celle-ci n'était pas influencée par son syndrome post-traumatique ou ses douleurs périnéales. Dans l'hypothèse où l'expertisée demeurait constante dans ses déclarations, cela serait plutôt favorable à sa crédibilité. Il était fréquent que des dévoilements surviennent tardivement.

C. a. Durant les débats d'appel, A______ a, pro forma, réitéré la réquisition de preuve, déjà sollicitée avant la clôture de l'instruction et en première instance, consistant en la mise en œuvre d'une expertise psychiatrique sur sa propre personne afin d'établir s'il était atteint d'une déviance sexuelle de type pédophilie. Il a également demandé à ce qu'une expertise psychiatrique de l'intimée soit réalisée.

b. Par la voix de son conseil, A______ persiste dans ses conclusions.

L'acte d'accusation était lacunaire, en ce sens que la période pénale était vague, qu'il ne contenait ni de date précise, ni de lieu, ni d'heure, ni ne mentionnait le nombre d'occurrences visées. Le dossier ne comportait aucun élément matériel permettant de retenir qu'il avait commis des actes d'ordre sexuel sur C______, alors qu'au contraire, il ressortait du dossier du SPMi que, dans un contexte de conflit conjugal important, F______ s'était faite l'auteur de violences au sein du foyer, qu'elle avait la volonté de lui nuire et qu'elle avait un ascendant psychologique sur sa fille.

En sus du fait que le dévoilement de C______ était intervenu trois ans après sa séparation d'avec F______ et 18 mois après son départ définitif du domicile conjugal, il s'était produit après que F______ s'était vue retirer la garde de ses deux enfants, ce qu'elle n'avait pas accepté. Aucune accusation n'avait été proférée à son encontre avant l'appel téléphonique entre F______ et sa fille du 21 mai 2018, dont on ne savait rien. Le dévoilement écrit de C______ n'était pas non plus connu, faute d'avoir été versé au dossier. Ainsi, le processus de dévoilement demeurait obscur. Il ressortait en outre de l'expertise de crédibilité que le contexte ayant entouré les révélations, en particulier le rôle que C______ avait joué dans le conflit conjugal, créait un doute sur celle-ci.

Les déclarations de la jeune fille lors de son audition EVIG n'étaient ni spontanées, ni détaillées. Devant la CPAR, elle n'avait pas non plus décrit les actes reprochés de manière précise. Elle n'avait pas davantage mentionné les abus dans son journal intime, mais y avait au contraire indiqué qu'elle appréciait l'appelant, surnommé "paps", avait évoqué des problèmes relationnels à l'école et avait écrit qu'elle avait des problèmes de mensonge. Les SMS échangés durant une année ne témoignaient pas d'abus sexuels mais de l'attachement qu'elle avait pour lui et de son importante implication dans le conflit conjugal, alors qu'il avait tenté de lui tendre la main. C______ n'avait pas empêché sa réintégration du domicile familial et était même allée se promener avec lui après la séparation. Les scarifications constatées sur le corps de sa belle-fille au stade de l'audience de première instance sur les clichés ne pouvaient pas être mises avec certitude en lien avec les abus dénoncés. C______ ne présentait pas de traces de scarifications sur les photos qu'il avait prises d'elle en septembre 2016. Selon K______, un conflit familial pouvait engendrer un syndrome de stress post-traumatique, tandis que le trouble dissociatif pouvait provenir d'un traumatisme subi dans l'enfance. Les souffrances et pathologies psychiques de C______ ne permettaient ainsi pas de tenir pour établi qu'il avait commis des abus sexuels à son encontre, aucune expertise n'ayant été ordonnée pour déterminer leur origine et leur évolution.

De son côté, il s'était montré constant dans ses déclarations et n'avait pu que clamer son innocence.

c. Le MP conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris. Rien n'indiquait que le dévoilement avait été influencé. La teneur des déclarations écrites de C______, antérieures à l'échange de SMS avec F______ au sujet des abus, avait été fournie par K______. L'intimée avait dévoilé les faits alors qu'elle était hospitalisée et rien ne démontrait que le retrait de la garde de son frère était à l'origine de ses révélations. Ses déclarations avaient été constantes, suffisantes et mesurées, C______ ayant confirmé en appel ce qu'elle avait déjà indiqué lors de son audition EVIG. Tant la vidéo de cette audition que l'expertise réalisée par la suite attestaient de sa crédibilité. Les stigmates psychologiques de C______ ne pouvaient être feints et confirmaient qu'elle avait subi des abus sexuels. A cela s'ajoutait encore que sa pédiatre avait suspecté l'existence d'abus sexuels, sans que cela ne vienne de F______, que la plaignante avait souffert de douleurs pelviennes attestées par la psychologue K______ et la Dresse J______ et qu'elle avait essayé d'attenter à plusieurs reprises à ses jours, ce qui n'était pas compatible avec une réaction à une situation familiale.

d. Par la voix de son conseil, C______ conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris. L'audition EVIG était éloquente s'agissant de son langage corporel et témoignait de sa crédibilité. Elle avait dépeint le contexte des abus (conflit familial, disputes, etc.), expliqué comment A______ s'y prenait pour pénétrer durant la nuit dans sa chambre et décrit de manière détaillée l'attitude du prévenu au moment des abus, déclarations qu'elle avait réitérées en appel. Certes, les auditions de K______ et de la Dresse J______ étaient postérieures à l'expertise de crédibilité et le Dr O______ n'en avait pas eu connaissance, mais il demeurait que ladite expertise concluait à sa crédibilité. Elle ne pouvait avoir feint son trouble dissociatif ainsi que son syndrome de stress post-traumatique et les manifestations physiques qu'elle éprouvait, telles que les douleurs pelviennes, ne pouvaient être reliées qu'à des abus sexuels.

Elle était détruite depuis ses dix ans à cause de A______. Les conséquences des abus subis étaient grandes. Elle s'infligeait des scarifications en grand nombre, avait sombré dans la dépression, était atteinte de troubles du comportement alimentaire, n'avait ni relations sociales, ni perspectives d'avenir et avait commis plusieurs tentatives de suicide. Elle avait été contrainte d'être à nouveau hospitalisée à N______ en amont de l'audience d'appel en raison des angoisses importantes qu'elle devait vivre en lien avec la procédure.

D. a. A______, de nationalité suisse, est né le ______ 1981. Il exerce le métier de ______ aux P______ et perçoit à ce titre un salaire mensuel net de CHF 6'000.-, étant relevé qu'au moment de l'audience d'appel il demeurait en incapacité de travail totale depuis début 2022 en raison d'un état dépressif. Il estime ses charges mensuelles à environ CHF 2'000.-, étant relevé qu'il pourvoit à l'entretien de son fils E______, dont il a la garde, et verse à F______ une contribution d'entretien mensuelle de CHF 1'100.-. Il poursuit un suivi multidisciplinaire spécialisé dans les problèmes de l'addiction entamé en juin 2022 à la Fondation Q______.

b. Selon l'extrait de son casier judiciaire, A______ n'a pas d'antécédent.

E. a. Me B______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel facturant, sous des libellés divers, 33 heures et dix minutes d'activité de chef d'étude, hors débats d'appel qui ont duré quatre heures et 30 minutes, dont quatre heures de conférences avec le client, dix minutes de rédaction de l'annonce d'appel, deux heures d'analyse du jugement, trois heures de rédaction de la déclaration d'appel, deux heures de rédaction de la requête en indemnisation, une heure d'élaboration d'un chargé de pièces, 20 heures de préparation de l'audience d'appel, et 15 minutes d'élaboration d'un chargé de pièces complémentaire. L'état de frais facture en outre une vacation au Tribunal pénal et deux vacations à la Poste, à CHF 100.- chacune.

b. Me D______, conseil juridique gratuit de C______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel facturant, sous des libellés divers, sept heures et 45 minutes d'activité de cheffe d'étude, hors débats d'appel, dont 45 minutes d'analyse du jugement, et CHF 100.- de frais de déplacement.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 CEDH et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse [Cst.] et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1). En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu (arrêts du Tribunal fédéral 6B_519/2018 du 29 août 2018 consid. 3.1 ; 6B_377/2018 du 22 août 2018 consid. 1.1).

Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 138 V 74 consid. 7 p. 82 ; ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41 ; ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 87 s.).

2.1.2. Le juge du fait dispose d'un large pouvoir dans l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 4b). Confronté à des versions contradictoires, il forge sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents. Les preuves doivent être examinées dans leur ensemble et l'état de fait déduit du rapprochement de divers éléments ou indices. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_324/2017 du 8 mars 2018 consid. 1.1 ; 6B_1183/2016 du 24 août 2017 consid. 1.1 ; 6B_445/2016 du 5 juillet 2017 consid. 5.1).

L'appréciation des preuves implique donc une appréciation d'ensemble. Le juge doit forger sa conviction sur la base de tous les éléments et indices du dossier. Le fait que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit insuffisant ne doit ainsi pas conduire systématiquement à un acquittement. La libre appréciation des preuves implique que l'état de fait retenu pour construire la solution doit être déduit des divers éléments et indices, qui doivent être examinés et évalués dans leur ensemble (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1169/2017 du 15 juin 2018 consid. 1.1 ; 6B_608/2017 du 12 avril 2018 consid. 3.1 et les références).

2.1.3. Les cas de "déclarations contre déclarations", dans lesquelles les déclarations de la victime en tant que principal élément à charge et les déclarations contradictoires de la personne accusée s'opposent, ne doivent pas nécessairement, sur la base du principe in dubio pro reo, conduire à un acquittement. L'appréciation définitive des déclarations des participants incombe au tribunal du fond (ATF 137 IV 122 consid. 3.3 p. 127 = JdT 2012 IV p. 79 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1306/2017 du 17 mai 2018 consid. 2.1.1 ; M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER [éds], Strafprozessordnung / Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO, 2ème éd., Bâle 2014, n. 83 ad art. 10).

Les déclarations de la victime constituent un élément de preuve. Le juge doit, dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier, les apprécier librement (arrêts du Tribunal fédéral 6B_942/2017 du 5 mars 2018 consid. 2.1.2 ; 6B_614/2012 du 15 février 2013 consid. 3.2.5), sous réserve des cas particuliers où une expertise de la crédibilité des déclarations de la victime s'impose (ATF 129 IV 179 consid. 2.4 p. 184 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1306/2017 du 17 mai 2018 consid. 2.1.1).

2.1.4. Aux termes de l'art. 187 ch. 1 CP, est punissable celui qui aura commis un acte d'ordre sexuel sur un enfant de moins de 16 ans.

2.1.5. Un acte d'ordre sexuel est une activité corporelle sur soi-même ou sur autrui qui tend à l'excitation ou à la jouissance sexuelle de l'un des participants au moins (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1122/2018 du 29 janvier 2019 consid. 3.2). Tel est le cas d'une pénétration vaginale ou anale par le pénis, les doigts ou un objet (arrêt du Tribunal fédéral 6B_231/2020 du 25 mai 2020 consid. 3.1).

2.2.1. A titre liminaire, il sera relevé que, contrairement à ce que la défense soutient, l'acte d'accusation respecte la maxime d'accusation et notamment les conditions mentionnées à l'art. 325 CPP, dans la mesure où des imprécisions relatives au lieu ou à la date sont sans portée si le prévenu ne peut avoir de doute sur le comportement qui lui est reproché (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1185/2018 du 14 janvier 2019 consid. 2.1), ce qui est le cas en l'espèce. L'appelant a d'ailleurs été parfaitement en mesure de préparer efficacement sa défense et de s'expliquer à tous les stades de la procédure.

2.2.2. Le processus de dévoilement de l'intimée est probant quand bien même il fait suite à une longue période de silence, cas de figure très fréquent dans ce type de situation comme relevé par l'expert psychiatre. Il n'est manifestement intervenu que grâce à une conjonction d'éléments : l'intimée se trouvait dans un milieu protégé, entourée de professionnels et éloignée de sa mère ainsi que de l'appelant, environnement propice à l'évocation de ses traumatismes. La difficulté qu'elle a éprouvée à s'exprimer malgré ces conditions favorables est également un élément de crédibilité. Il n'y a pas lieu de douter des déclarations de K______ s'agissant de la manière dont l'intimée a dévoilé les abus aux intervenants de la clinique et du contenu des écrits de cette dernière, que la psychologue a restitué pour l'essentiel et de manière précise, notamment en indiquant que l'intimée avait écrit que son beau-père avait mis ses doigts dans son "V", lettre qu'elle avait entourée de petites étoiles.

Comme relevé dans l'expertise de crédibilité, les circonstances ayant entouré le dévoilement pourraient, en hypothèse, faire douter de la crédibilité de l'intimée, dans la mesure où ses déclarations sont intervenues dans un contexte de conflit familial important qui pourrait laisser craindre que, par ses accusations, l'expertisée n'ait tenté de venger sa mère vis-à-vis de son beau-père. Il est vrai qu'il ressort des messages échangés entre l'appelant et l'intimée que cette dernière a accusé à plusieurs reprises son beau-père d'avoir abandonné leur famille et de faire du mal à sa mère et lui a reproché de vivre au grand jour sa relation avec sa nouvelle compagne, prenant de la sorte fait et cause pour sa mère en endossant un rôle inadéquat dans ce conflit conjugal. Les divers intervenants (pédiatre, professionnels en charge du suivi psychiatrique de l'intimée, expert psychiatre) ont tous relevé que la relation mère/fille était particulière, inappropriée et déstabilisante pour la seconde, ce qui est effectivement manifeste à la lecture du dossier. Pour autant, la position adoptée par l'intimée dans la relation de couple de sa mère et le conflit de loyauté dans lequel elle était placée ne signifient pas encore qu'elle ait été prête à formuler de fausses accusations, de surcroît particulièrement graves, pour satisfaire sa mère, d'autant plus sur plusieurs années alors qu'il lui aurait été facile d'éviter de venir en audience. Un éventuel dessein de vengeance de l'intimée à l'égard de son beau-père ou une volonté de permettre à sa mère de récupérer la garde de son petit frère, lesquels ne sont pas établis, ne permettraient pas d'exclure de facto que les actes dénoncés n'ont jamais été commis. La théorie d'un complot de la mère et la fille à l'encontre de l'appelant est mise à mal par le fait que les abus ont été évoqués pour la première fois en thérapie, ce qui ressort du premier message envoyé par la plaignante à sa mère et du rapport de police, ainsi que par la teneur des échanges intervenus entre la plaignante et sa mère, qui ne reflètent pas l'élaboration d'un scénario vu leur spontanéité. Certains détails, comme l'histoire du tampon, ne coïncident pas avec un message planifié en avance en lien avec des faits inventés. La manière de dévoiler les faits à sa mère a également été la même qu'à l'égard des intervenants de la clinique. Dans les deux cas, l'intimée a été incapable de verbaliser les faits et les a donc posés par écrit. Pour chacun des dévoilements également, il lui a été très difficile de décrire les actes sexuels et d'évoquer son vagin, même par écrit. Finalement, la partie plaignante a toujours indiqué qu'elle ne souhaitait pas parler des abus. Elle ne s'en est d'ailleurs ouverte, très difficilement, qu'auprès du corps médical, puis de sa mère à demi-mot, marquant son désaccord lorsque cette dernière l'a informée des démarches entreprises auprès de son avocat et de la police.

2.2.3. L'audition EVIG est éloquente et achève de démontrer que les déclarations de l'intimée ne relèvent pas d'une déclaration factice, apprise ou suggérée par autrui, comme l'a d'ailleurs également conclu l'expert psychiatre. Ses interactions et émotions sont adéquates au regard de son récit et le langage utilisé authentique. Ses difficultés à répondre aux questions liées aux faits reprochés, à l'inverse de celles en lien avec sa vie quotidienne ou le contexte familial, ainsi que son langage corporel appuient sa crédibilité. Bien qu'entrecoupé de nombreux silences, qui s'expliquent par le trouble dissociatif dont souffre l'intimée, son récit est ancré dans le temps, suffisamment précis sur la nature et les circonstances des attouchements et mesuré.

L'intimée a délimité la période pénale de manière précise, situant le début des abus lorsque son petit frère avait entre six et 12 mois et leur fin deux ou trois ans avant son audition EVIG, moment qui coïncide avec la séparation de sa mère et de l'appelant, qu'elle a également évoquée comme référence temporelle lors de son audition en appel. Certes sans chiffrer précisément le nombre d'occurrences, ce qui n'est pas inhabituel en cas d'actes répétés, de surcroît s'ils sont anciens et survenus durant l'enfance, elle a néanmoins su indiquer que les abus étaient survenus une fois toutes les deux semaines au début, puis une fois par semaine, relevant de la sorte une graduation de la fréquence des abus dans le temps. Amenée à relater les faits à deux reprises durant l'audition EVIG, elle a livré des récits identiques, tout en mentionnant des détails périphériques, comme le fait que les abus s'étaient toujours produits lorsque son beau-père et sa mère s'étaient disputés, cette dernière dormant alors sur le canapé ou dans la chambre de son petit frère, ou encore l'attitude "bizarre" de ce dernier, qui ne parlait pas et avait le "regard froid". S'agissant des faits en eux-mêmes, elle a déclaré que son beau-père commençait toujours par lui caresser certaines parties du corps, en particulier les bras et les cuisses, puis lui enlevait son short et introduisait ses doigts dans sa "partie intime", précisant un peu plus tard lors de l'audition qu'il s'agissait de son vagin (cf. supra), ce qui coïncide avec les indications fournies précédemment par écrit aux intervenants de la Clinique I______. Elle a rapporté sa peur et sa stupeur au moment des actes, ainsi que les sentiments qui l'avaient envahie après le départ de son beau-père et qui l'avaient amenée à se scarifier. L'intimée n'a pas cherché à accabler son beau-père et s'est montrée mesurée dans ses accusations, soulignant spontanément qu'il ne lui avait fait subir d'attouchements ni durant les vacances scolaires, ni lorsqu'il avait séjourné à S______ [VS].

2.2.4. Il est également relevé que le dossier comprend suffisamment d'attestations et de constats médicaux concernant la santé mentale de C______ et son évolution, sans qu'il ne soit nécessaire d'ordonner la réalisation d'une expertise psychiatrique, comme demandé pro forma par l'appelant lors des débats d'appel.

Les troubles psychiatriques que présente l'intimée, soit notamment un trouble dissociatif, un syndrome de stress post-traumatique et un trouble de la personnalité de type borderline, pourraient certes, comme allégué la défense, être attribués au contexte familial particulièrement difficile et violent dans lequel elle a évolué. Rien ne permet néanmoins d'exclure qu'ils soient inhérents aux actes d'ordre sexuel reprochés à l'appelant, voire aux deux types de violence, chacun étant de nature à traumatiser une enfant. Ces éléments peuvent dès lors être considérés comme des facteurs neutres, qui ne plaident ni en faveur ni en défaveur de la crédibilité. Cela étant, comme relevé par la Dresse J______, les troubles psychiques de l'intimée et leurs manifestations, soit en particulier le trouble dissociatif et les douleurs pelviennes, sont compatibles avec les faits dénoncés et le récit de l'intimée, le corps médical étant d'ailleurs arrivé à la conclusion que le trouble dissociatif et le syndrome de stress post-traumatique étaient causés par les abus dénoncés par la patiente, à l'exclusion de tout autre événement. Il n'y a pas lieu de s'écarter de cette conclusion, qui, contrairement à ce qu'allègue la défense, ne s'appuie pas uniquement sur les déclarations de la partie plaignante, mais également sur les manifestations physiques de ses troubles, constatées par les intervenants en charge de son suivi. Tel est en particulier le cas des douleurs pelviennes, qui sont systématiquement survenues en fin de journée ou durant la nuit et pendant lesquelles il était impossible d'entrer en contact avec la patiente, qui semblait revivre les faits. De par leur nature et leur localisation, ces douleurs, qui ne pouvaient être feintes et s'inscrivent dans le récit de la plaignante, sont manifestement en lien avec un traumatisme d'ordre sexuel.

De même que pour les troubles psychiatriques de l'intimée, les scarifications constatées sur elle pourraient être causées tant par le contexte familial que par les abus reprochés à l'appelant, voire même par les deux types de violence. L'expert psychiatre a d'ailleurs constaté une cohérence chronologique entre les troubles présentés par la plaignante et la présence de l'appelant au domicile, tout en relevant néanmoins que la dynamique familiale ne permettait pas d'établir une relation claire de cause à effet. L'appelant ne saurait rien retirer des photographies qu'il a produites en appel, sur lesquelles l'intimée ne présente pas de traces d'automutilation sur les bras et les jambes, dans la mesure où elles ont été prises peu de temps après son retour au domicile familial, qu'il avait quitté durant plusieurs mois. Il est ainsi plausible que la partie plaignante ait cessé de s'automutiler durant cette longue période ou qu'elle l'ait fait au niveau de l'aine, comme elle l'a affirmé en appel, afin d'éviter, en plein été, que les traces ne soient visibles.

2.2.5. L'absence de mention des abus dénoncés dans le journal intime de la partie plaignante ne vient pas affaiblir sa crédibilité. Ses explications à cet égard, soit qu'elle savait que ses parents le lisaient et qu'elle ne souhaitait pas qu'ils prennent connaissance de ces faits, sont cohérentes et crédibles. Vu le contenu des pages versées au dossier, il est manifeste que l'intimée n'y retranscrivait pas chacun des événements de sa vie quotidienne. N'y figurent d'ailleurs pas les violences dont elle a été témoin au domicile parental alors même qu'elles étaient régulières. La partie dans laquelle elle écrit que son problème principal est le mensonge a été rédigée en lien avec des "bêtises" qu'elle couvrait vraisemblablement en mentant à ses parents, ce qui est loin d'être anormal pour un enfant. L'intimée n'a jamais tenté de cacher qu'avant la naissance de son petit frère et la survenance des abus, elle entretenait une bonne relation avec son beau-père et avait de l'affection pour lui, ce qui explique le surnom de "paps" qu'elle utilisait.

2.2.6. Il sera relevé, en lien avec la réitération, pro forma, de la réquisition de preuve d'une expertise psychiatrique de l'appelant dans le but de démontrer qu'il n'est pas atteint d'un trouble de pédophilie, que l'absence d'un tel diagnostic ne constituerait en elle-même pas une preuve à décharge (cf. not. arrêt du TF non publié 6B_1097/2019 consid. 1.3 et 2.4 du 11 novembre 2019).

2.2.7. Nonobstant les dénégations de l'appelant, certes constantes, la Cour retient qu'elles ne sont pas crédibles compte tenu de l'ensemble des éléments évoqués supra. Partant, il est retenu que les faits tels qu'ils résultent des déclarations de l'intimée sont avérés.

2.2.8. Tant les éléments objectifs que subjectifs de l'art. 187 ch. 1 1ère hyp. CP sont remplis, la pénétration vaginale avec les doigts revêtant indubitablement le caractère d'acte d'ordre sexuel, ce que l'appelant ne pouvait ignorer.

Sa culpabilité du chef d'actes d'ordre sexuel sur des enfants doit partant être confirmée et son appel rejeté.

3. 3.1.1. L'infraction d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 ch. 1 CP) est passible d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

L'ancien droit des sanctions doit être appliqué en l'espèce, les faits étant antérieurs au 1er janvier 2018, et la nouvelle pas plus favorable au condamné.

3.1.2. Selon l'art. 47 CP (ancien comme nouveau), le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

3.1.3. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

Un concours réel doit notamment être admis lorsque l'auteur réalise les éléments constitutifs de la même infraction à plusieurs reprises (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1175/2017 du 11 avril 2018 consid. 2.4).

3.2.1. La faute de l'appelant est lourde. Sur une longue période, il a, à réitérées reprises, porté atteinte à l'intégrité et au développement sexuel de sa belle-fille, dont il a trahi la confiance et l'affection. Les conséquences ont été fortes pour la victime qui a développé, à tout le moins en partie à cause des abus subis, des troubles psychiatriques dont l'impact sur sa vie demeure important.

L'appelant a agi au préjudice d'une enfant vulnérable placée sous sa protection, pour assouvir égoïstement ses pulsions sexuelles, faisant abstraction de ce qu'il s'en prenait à une fillette.

Sa collaboration, tout comme sa prise de conscience, sont inexistantes. Il s'est en effet contenté de nier les faits, sans égard pour sa victime et l'impact de ses dénégations sur elle. Le suivi entamé à la Fondation Q______ en juin 2022, bien que positif et constituant un premier pas vers la stabilisation de sa situation, se concentre sur ses problèmes d'addiction et il ne ressort pas des attestations versées au dossier que les faits dénoncés par l'intimée soient évoqués dans ce cadre.

La situation personnelle de l'appelant n'explique, ni n'excuse ses actes et l'absence d'antécédent est un facteur neutre pour la fixation de la peine.

3.4.2. Au vu de la gravité de la faute de l'appelant, le prononcé d'une peine privative de liberté se justifie. La quotité de 24 mois fixée par le TP pour actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 ch. 1 CP) apparaît adéquate compte tenu de la pluralité d'occurrences, qui entrent en concours réel parfait les unes avec les autres.

L'absence totale de prise de conscience de l'appelant pourrait justifier le prononcé d'une peine ferme. Cet élément est toutefois compensé par le fait qu'en dépit d'un arrêt maladie de longue durée, il a un emploi fixe qu'il souhaite visiblement réintégrer prochainement. Le bon déroulement de la garde sur son fils et l'évolution favorable de ce dernier constituent un autre élément positif. L'octroi du sursis avec délai d'épreuve de trois ans, que la Cour estime, dans ces circonstances, suffisant pour dissuader l'appelant de récidiver, sera également confirmé.

4. 4.1. À teneur de l'art. 122 al. 1 CPP, en qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale.

4.2. Aux termes de l'art. 47 du code des obligations (CO), le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale. Les circonstances particulières évoquées dans la norme consistent dans l'importance de l'atteinte à la personnalité du lésé, l'art. 47 CO étant un cas d'application de l'art. 49 CO. Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé. Parmi les circonstances qui peuvent, selon les cas, justifier l'application de l'art. 47 CO, figurent avant tout le genre et la gravité de la lésion, l'intensité et la durée des répercussions sur la personnalité de la personne concernée, le degré de la faute de l'auteur ainsi que l'éventuelle faute concomitante du lésé (ATF 141 III 97 consid. 11.2 p. 98). A titre d'exemple, une longue période de souffrance et d'incapacité de travail, de même que les préjudices psychiques importants sont des éléments déterminants (arrêt 4A_373/2007 du 8 janvier 2008 consid. 3.2, non publié in ATF 134 III 97 ; 132 II 117 consid. 2.2.2 p. 119 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1066/2014 du 27 février 2014 consid. 6.1.2).

4.3. Ni le principe de l'octroi, ni la quotité de l'indemnité pour tort moral allouée à l'intimée ne sont discutés en appel. Le montant de CHF 15'000.- apparaît en tout état adéquat compte tenu des souffrances endurées par la partie plaignante, qui subit encore à ce jour les conséquences des abus commis par l'appelant, avec un impact important sur sa vie.

5. 5.1. L'appelant, qui succombe entièrement, supportera les frais de la procédure d'appel envers l'État, qui s'élèvent à CHF 2'575.-, y compris un émolument de jugement de CHF 2'000.- (art. 428 CPP).

5.2. Vu la confirmation de la culpabilité de l'appelant, les frais de la procédure préliminaire et de première instance, en CHF 6'159.40, y compris un émolument de jugement total de CHF 900.-, demeureront à sa charge (art. 426 al. 1 CPP).

6. Les prétentions en indemnisation du tort moral de l'appelant seront rejetées vu le sort réservé à son appel (art. 429 al. 1 let. a CPP applicable par renvoi de l'art. 436 al. 1 CPP).

7. 7.1.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit (cf. art. 138 al. 1 CPP) est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire suivant, débours de l'étude inclus : chef d'étude CHF 200.- (let. c). En cas d'assujettissement, l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. reiser / B. CHAPPUIS (éds), Commentaire romand, Loi fédérale sur la libre circulation des avocats, Bâle 2010, n. 257 ad art. 12). Dans le cadre des mandats d'office, l'État n'indemnise ainsi que les démarches nécessaires à la bonne conduite de la procédure pour la partie qui jouit d'une défense d'office ou de l'assistance judiciaire. Il ne saurait être question d'indemniser toutes les démarches souhaitables ou envisageables. Le mandataire d'office doit en effet gérer son mandat conformément au principe d'économie de procédure (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.22 du 31 octobre 2013 consid. 5.2.3). Par voie de conséquence, le temps consacré à la rédaction d'écritures inutiles ou reprenant une argumentation déjà développée, fût-ce devant une autorité précédente, ne saurait donner lieu à indemnisation ou à indemnisation supplémentaire (AARP/295/2015 du 12 juillet 2015 consid. 8.2.2.3, 8.2.2.6, 8.3.1.1 et 8.3.2.1).

7.1.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Des exceptions demeurent possibles, charge à l'avocat de justifier l'ampleur d'opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait.

7.1.3. Le temps de déplacement de l'avocat est considéré comme nécessaire pour la défense d'office au sens de l'art. 135 CPP (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2015.33 du 28 juillet 2015 consid. 4.3). La rémunération forfaitaire de la vacation aller/retour au et du Palais de justice ou au et du bâtiment du Ministère public est arrêtée à CHF 100.- pour les chefs d'étude, dite rémunération étant allouée d'office par la juridiction d'appel pour les débats devant elle.

7.2.1. En l'occurrence, l'état de frais déposé par Me B______ ne satisfait pas entièrement aux exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale. Activités couvertes par le forfait, la rédaction de l'annonce d'appel (dix minutes), de la déclaration d'appel (trois heures) et de la requête en indemnisation (deux heures), ainsi que l'analyse du jugement (deux heures), l'élaboration de deux chargés de pièces (une heure + 15 minutes) ne seront pas indemnisées en sus. Le temps consacré aux entretiens avec le client et à la préparation de l'audience d'appel, excessif dans le cadre d'un dossier supposé connu quand bien même l'audience de première instance s'est tenue un an auparavant, sera rémunéré à hauteur de deux heures pour les conférences client et de huit heures pour la préparation de l'audience. La durée effective de l'audience, soit quatre heures et 30 minutes, sera indemnisée.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 3'721.05, correspondant à 15 heures et 15 minutes d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 3'050.-), plus la majoration forfaitaire de 10% (CHF 305.-), la vacation de CHF 100.- et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 266.05.

7.2.2. L'état de frais déposé par Me D______ satisfait globalement aux exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale, à l'exception du temps consacré à l'analyse du jugement (45 minutes), qui, couvert par le forfait, ne sera pas indemnisé en sus. La durée effective de l'audience sera indemnisée.

La rémunération de Me D______ sera par conséquent arrêtée à CHF 3'080.20, correspondant à 11 heures et 30 minutes d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 2'300.-), plus la majoration forfaitaire de 20% (CHF 460.-), la vacation de CHF 100.- et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% (CHF 220.20).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement rendu le 11 octobre 2021 par le Tribunal de police dans la procédure P/11884/2018.

Le rejette.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 2'575.-, qui comprennent un émolument de CHF 2'000.-.

Arrête à CHF 3'721.05, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseur d'office de A______.

Arrête à CHF 3'080.20, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me D______, conseil juridique gratuit de C______.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

"Déclare A______ coupable d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 CP).

Acquitte A______ d'actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de discernement ou de résistance (art. 191 CP).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 24 mois (art. 40 CP).

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Déboute F______ de ses conclusions civiles.

Condamne A______ à payer à C______ CHF 15'000, avec intérêts à 5% dès le 1er juillet 2013, à titre de réparation du tort moral (art. 47/49 CO).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 5'559.40, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).

Fixe à CHF 11'405,45 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de A______ (art. 135 CPP).

Fixe à CHF 4'569,70 l'indemnité de procédure due à Me R______, conseil juridique gratuit de F______ (art. 138 CPP).

Fixe à CHF 5'040,35 l'indemnité de procédure due à Me D______, conseil juridique gratuit de C______ (art. 138 CPP).

( )

Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 600.-.

Condamne A______ à payer à l'Etat de Genève l'émolument complémentaire fixé à CHF 600.-."

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

Le greffier :

Alexandre DA COSTA

 

Le président :

Pierre BUNGENER

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

6'159.40

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

360.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

140.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

2'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'575.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

8'734.40