Skip to main content

Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

1 resultats
P/16278/2021

AARP/368/2022 du 24.11.2022 sur JTDP/249/2022 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/16278/2021 AARP/368/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 24 novembre 2022

 

Entre

A______, sans domicile fixe, comparant par Me B______, avocate,

appelant,

intimé sur appel joint,

 

contre le jugement JTDP/249/2022 rendu le 10 mars 2022 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé,

appelant joint.


EN FAIT :

A.           a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 10 mars 2022, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a acquitté de lésions corporelles simples qualifiées en lien avec les faits décrits aux paragraphes 1, 2 et 4 (sous chiffre 1.1.) de l'acte d'accusation (art. 123 ch. 1 et 2 du Code pénal suisse [CP]), mais l'a déclaré coupable de lésions corporelles simples qualifiées (art. 123 ch. 1 et 2 CP), d'infraction à l'art. 19 al. 1 let. c de la Loi fédérale sur les stupéfiants [LStup], de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b de la Loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI]) et de non-respect d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI).

Pour ces faits, le TP a condamné A______ à une peine privative de liberté de huit mois, sous déduction de la détention avant jugement subie, peine assortie du sursis, avec un délai d'épreuve de trois ans. Le TP a en outre renoncé à révoquer le sursis octroyé le 30 mars 2017 par le Ministère public (MP) et a ordonné l'expulsion facultative de A______ pour une durée de cinq ans, avec signalement dans le système d'information Schengen. Il a encore fait interdiction à A______ de prendre contact, d'une quelconque manière, directement ou indirectement, avec C______, et lui a fait interdiction de l'approcher à moins de 50 mètres ainsi que de se rendre à son logement, mesures prononcées pour une durée de deux ans. Il a débouté A______ de ses conclusions en indemnisation et l'a condamné aux frais de la procédure.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement de lésions corporelles simples qualifiées, au prononcé d'une peine pécuniaire clémente, assortie du sursis, à ce qu'il soit renoncé à son expulsion de Suisse et au signalement de celle-ci dans le système d'information SCHENGEN.

Le Ministère public (MP) a formé en temps utile un appel joint contre ce jugement, concluant à son annulation, à ce que A______ soit déclaré coupable de lésions corporelles simples qualifiées en lien avec les faits décrits aux paragraphes 1, 2 et 4 (sous chiffre 1.1.) de l'acte d'accusation, et condamné à une peine privative de liberté de 12 mois, sous déduction de la détention avant jugement subie, ainsi qu'à la confiscation et à la destruction du téléphone figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 1______.

b.a. Selon l'acte d'accusation du 9 février 2022, il est encore reproché à A______ d'avoir, au domicile commun sis rue 2______no.______ et dans les rues du quartier D______ à Genève, entre janvier 2019 et le 2 septembre 2021, régulièrement et à réitérées reprises, frappé sa compagne, C______, avec laquelle il faisait ménage commun depuis décembre 2018, notamment, il a :

- à des dates indéterminées, frappé C______, notamment à coups de pied sur le corps, le visage et les côtes, provoquant ainsi des blessures telles que des bosses sur la tête, des cicatrices sur le front, des hématomes, une bouche enflée, un nez bleu et tuméfié, un œil au beurre noir, des yeux rouges de sang et de multiples marques aux jambes et aux poignets ;

- durant l'année 2019, à une date indéterminée, éteint sa cigarette à deux reprises sur le haut de la poitrine de C______, ce qui a provoqué des marques et des cicatrices ;

- durant l'année 2019, à une date indéterminée, frappé le visage de C______, lui fracturant le nez ;

- en janvier 2021, à une date indéterminée, frappé C______, ce qui l'a fait tomber au sol, avant de lui donner plusieurs coups de pied dans les côtes, provoquant ainsi à tout le moins des douleurs ;

- au début de l'année 2021, à une date indéterminée, frappé le visage de C______, ce qui lui a occasionné des blessures sous forme d'un nez bleu et tuméfié ;

- au début de l'été 2021, à une date indéterminée, donné un coup de poing sur le visage de C______, ce qui l'a défigurée, a provoqué une fracture du nez et d'abondants saignements ;

- le 2 septembre 2021, assené plusieurs coups de poing à C______, notamment au niveau de l'arcade sourcilière gauche, provoquant sa chute au sol et des blessures, constatées médicalement.

b.b. Il était en outre reproché à A______, à teneur dudit acte d'accusation, faits non contestés en appel, d'avoir :

- le 9 mai 2021, vendu sans droit un gramme de cocaïne à E______ (art. 19 al. 1 let. c LStup ;

- du 23 juin 2021 au 13 septembre 2021, sous réserve des 20 et 21 août 2021 où il se trouvait en détention, séjourné sur le territoire suisse, alors qu'il était démuni de papier d'identité et d'autorisation de séjour (art. 115 al. 1 let. b LEI) ;

- du 24 août 2021 au 13 septembre 2021, séjourné sur le territoire genevois au mépris de l'interdiction de pénétrer sur ledit territoire du 23 août 2021, notifiée le même jour et valable durant 18 mois (art. 119 al. 1 LEI).

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a.a.a. Dans sa plainte pénale du 8 septembre 2021, retirée le lendemain au motif qu'elle aurait menti par jalousie, C______ a exposé avoir fait la connaissance, en décembre 2018, de A______, lequel était immédiatement venu s'installer dans la chambre qu'elle occupait no.______ rue 2______, dans l'appartement du F______. Ils avaient dans la foulée débuté une relation sentimentale. Rapidement, A______ avait commencé à l'insulter et à la frapper pour obtenir d'elle de l'argent ou en guise de représailles quand elle ne pouvait pas lui en donner. C'est ainsi qu'en 2019, A______ lui avait écrasé une cigarette sur le haut de la poitrine à deux reprises; il en était résulté des cicatrices. Il lui avait aussi fracturé le nez, ce qui avait causé d'abondants saignements. En janvier 2021, parce qu'elle avait bravé l'interdiction qu'il lui avait faite de quitter son lit, A______ l'avait frappée. Elle était tombée au sol, où il lui avait assené divers coups de pieds dans les côtes, violences qui s'était produites quotidiennement en janvier et février de l'année en question. A ces occasions, elle se mettait en boule et subissait les coups. Au mois de mars 2021, A______ lui avait assené un coup de poing sur le nez; elle avait chuté au sol. Il s'était ensuite excusé, tout en justifiant son geste par le fait qu'elle l'avait énervé. Le 2 septembre 2021, tandis qu'elle consommait un café à la terrasse d'un établissement public situé en face de chez elle, A______ l'avait rejointe, puis l'avait insultée et, finalement, lui avait assené un coup de poing, si bien que le responsable de l'établissement avait demandé à A______ de la laisser tranquille. Ultérieurement au cours de la journée, tandis qu'ils étaient toujours attablés à la terrasse de l'établissement et avaient tous deux consommé de l'alcool, A______, rejoint dans l'intervalle par plusieurs amis, l'avait à nouveau insultée, puis l'avait frappée à réitérées reprises. Elle avait chuté plusieurs fois au sol et avait menacé d'appeler la police. A______ l'avait encore poussée dans des vélos stationnés à proximité. Après qu'elle s'était relevée et lui avait demandé d'attendre l'arrivée de la police, il lui avait assené un nouveau coup de poing, de sorte qu'elle était tombée une fois de plus au sol, où elle avait perdu connaissance pendant quelques secondes. Ensanglantée, elle avait appelé en criant la police, laquelle l'avait conduite à l'hôpital.

A______ l'avait frappée continuellement au cours de leur relation, de sorte qu'elle avait eu de nombreuses bosses et blessures. L'un de ses clients avait photographié à plusieurs reprises ses lésions, afin qu'elle conserve une trace des violences subies, clichés qu'elle s'engageait à fournir, ce qu'elle n'a finalement pas fait. Vu la récurrence des violences, il lui était difficile de fournir davantage de détails. Par le passé, elle n'avait jamais consulté de médecin, ni fait établir de constat de lésions, A______ lui ayant interdit d'aller à l'hôpital, tout comme de contacter l'association G______, auprès de laquelle elle s'était tout de même rendue à trois ou quatre reprises pour dénoncer les violences qu'elle subissait. A ces occasions, des clichés de ses blessures avaient été pris. H______, intervenante sociale, avait en outre proposé plusieurs fois de l'accompagner auprès de la police pour déposer plainte pénale.

Elle avait conservé de nombreuses séquelles de ces violences, en particulier une importante cicatrice sur le front, des bosses sur la tête, des marques sur les jambes et les poignets. Psychologiquement, elle était stressée, paniquée, pleurait tous les jours et avait peur de représailles.

a.a.b. Selon un constat médical du 2 septembre 2021 du Dr I______, C______, triste et en pleurs, présentait trois plaies linéaires de l'arcade sourcilière gauche ayant nécessité la pose de points de suture, ainsi que de multiples macules érythémateuses bleutées à l'avant-bras droit, lésions photographiées.

a.a.c. Lors du dépôt de plainte de C______, la police a constaté que A______ avait tenté de la contacter à 14 reprises en l'espace de moins de 20 minutes.

a.b. Devant le MP, C______ a précisé avoir retiré sa plainte pénale car elle avait regretté sa décision et ne voulait pas porter préjudice à A______. Leurs problèmes de couple étaient liés à la consommation d'alcool de A______ et à sa propre jalousie. Après avoir refusé de s'exprimer sur les violences qu'elle avait dénoncées, tout en admettant que lors d'une dispute, en juin 2021, il l'avait poussée, elle a finalement admis avoir été frappée par A______, ce que les habitants du quartier savaient, pour avoir entendu ses cris. Les intervenants de G______ lui avaient conseillé à plusieurs reprises de déposer plainte pénale, ce qu'elle avait systématiquement refusé avant septembre 2021. Elle considérait que A______ était en prison par sa faute, ce qu'elle regrettait, de sorte qu'elle lui transmettait de l'argent et des vêtements.

a.c. C______ a refusé de rencontrer les médecins légistes mandatés pour procéder à son examen physique.

b.a. A la police, A______ a confirmé avoir entretenu une relation amoureuse avec C______, qu'il n'avait jamais violentée, au contraire de celle-ci. Elle l'avait ainsi tiré par le col, griffé et appelait la police en criant lorsqu'elle l'apercevait dans la rue. Il ne lui avait en particulier jamais brisé le nez, épisode qui, selon lui, se rapportait à une bagarre que C______ avait eue avec une autre "fille", pas plus qu'il ne lui avait assené des coups de pied dans les côtes. Ils n'avaient connu aucun problème dans leur relation jusqu'à ce qu'il avait commencé à fréquenter une autre femme. Le comportement de C______ avait dès lors changé. A l'inverse de cette dernière, il ne consommait pas de stupéfiants, mais buvait en revanche quotidiennement de grandes quantités d'alcool. Le 2 septembre 2021, C______ l'avait rejoint dans l'établissement public situé en face du no.______ rue 2______. Elle l'avait menacé, l'accusant de fréquenter d'autres femmes. Il s'était ensuite déplacé dans un autre établissement public, où elle l'avait à nouveau rejoint, avant d'exiger qu'il lui remette le téléphone portable et la carte SIM qu'elle avait acquis à son nom, ce qu'il avait fait. C______ était ensuite partie en courant, puis avait chuté sur le trottoir et avait commencé à crier. Il ne l'avait ni frappée, ni insultée, et avait attendu l'arrivée de la police. A la réflexion, cet épisode datait du mois de juillet 2021. Il lui était arrivé, à une seule reprise, début septembre 2021, de pousser C______ et de la faire tomber au sol, événements survenus à l'issue d'une soirée où il avait consommé de l'alcool avec des amis, lorsque C______ l'avait rejoint dans l'établissement public situé en face du no.______ rue 2______ où il s'était rendu. Sur place, C______ avait commencé à lui faire des reproches en criant, puis l'avait suivi lorsqu'il avait voulu quitter les lieux. Elle avait jeté une chaise par terre et un verre en direction d'une autre prostituée, avant de se diriger contre lui. Il l'avait poussée pour pouvoir partir, sans vouloir lui faire du mal, et elle avait heurté un mur. Il ne lui avait jamais assené de coup de poing; elle était "tombée, c'est tout". Il s'agissait des seules blessures qu'il lui avait infligées. Il s'en était excusé par message.

b.b. Devant le MP, A______ a persisté dans ses dénégations. Les accusations de C______ étaient dictées par sa jalousie. Ils avaient vécu ensemble pendant trois ans au no.______ rue 2______. Leur relation, initialement bonne, s'était altérée après que C______ avait découvert qu'il fréquentait une autre femme, ce qui les avait conduits à interrompre leur relation pendant quelques mois, avant de la reprendre. Malgré leur réconciliation, C______ avait persisté à lui reprocher ses relations féminines. Il ne l'avait jamais insultée, ni vue avec des blessures au niveau des yeux et du nez, répétant que le seul épisode de violence était survenu début septembre 2021. C______, qu'il avait repoussée "un petit peu" après qu'elle s'était approchée de lui, était tombée contre le mur d'un immeuble et s'était blessée au visage, ce dont elle était responsable, dès lors qu'elle l'avait "cherché". Il avait effectivement tenté de contacter C______ à plusieurs reprises lorsque celle-ci déposait plainte pénale contre lui, afin de connaître les raisons de sa démarche. Il l'avait vue le soir même. Le lendemain, C______ l'avait contacté pour l'informer que l'association G______ l'avait contrainte à déposer plainte pénale et que le contenu en était mensonger, ce qu'elle avait ensuite indiqué à la police. Il s'engageait à ne plus avoir de contacts avec C______.

b.c. Devant le TP, A______ a réaffirmé ne jamais avoir frappé C______, ni constaté qu'elle présentait des blessures. Contrairement à lui, C______ était violente, avait des problèmes avec ses clients notamment, et l'accusait à tort, par jalousie. Le 2 septembre 2021, alors qu'ils étaient déjà séparés, C______ l'avait suivi dans le quartier D______. Ne sachant plus comment s'en défaire, il l'avait finalement poussée, sans la frapper, si bien qu'elle était tombée et s'était blessée à l'arcade sourcilière. Il s'était ensuite excusé auprès d'elle par message.

c.a. L'analyse du téléphone portable saisi sur A______, dont le raccordement a été souscrit le 26 août 2021 par C______, a mis en évidence plusieurs conversations entre les intéressés. C______ auteure de la plupart des messages, lui a reproché de l'insulter, de lui prendre son argent, de la frapper et de fréquenter une autre femme. Dans le même temps, elle a demandé à pouvoir le voir pour discuter et a proposé de lui donner de l'argent.

Lors d'une conversation avec C______ au sujet de l'altercation du 2 septembre 2021, et après que celle-ci lui a envoyé des photographies montrant ses lésions, A______ a répondu : "désolé je étais bourré" (sic), puis "appelle vidéo montre moi" (sic).

c.b. Il ressort de divers courriers adressés à A______ lors de son incarcération, que C______, tout en regrettant qu'il soit détenu, a expliqué sa démarche auprès de la police par le fait qu'elle avait peur, et qu'elle voulait qu'il arrête de lui faire mal, de la frapper et de l'insulter.

c.c. Il ressort des images de vidéosurveillance capturées en particulier par les caméras filmant les angles des rues de J______, K______ et L______, que C______, a eu une discussion animée avec A______, lequel était attablé à la terrasse d'un établissement public en compagnie d'autres personnes. Au cours de celle-ci, depuis l'emplacement occupé par A______, une main a jailli dans un mouvement horizontal vers l'avant et a atteint C______, qui a été projetée à l'autre bout du trottoir et a chuté sur les places où des deux roues étaient stationnés, sans qu'aucun mouvement préalable en direction de A______ de cette dernière, qui avait les mains vides, sous réserve d'un téléphone portable visible dans sa main gauche, ne soit décelable sur les images. C______ s'est ensuite relevée et, cette fois extrêmement excitée et véhémente, elle est retournée à plusieurs reprises au contact de A______, qu'elle a ensuite suivi dans la rue, alors qu'il essayait de s'éloigner d'elle, aidé par des tiers, dont l'un a frappé C______ à la tête d'un coup de sac.

d.a. Désignées par C______ comme ayant été témoins des violences qu'elle avait subies, M______ et N______ ont refusé d'être auditionnées par la police, la première par peur de représailles, et la seconde, qui a mentionné oralement à la police ne pas avoir assisté à des épisodes de violence entre A______ et C______, pour ne pas être impliquée dans leur différend.

d.b. O______, qui avait assisté à une partie des événements survenu le 2 septembre 2021, a relaté qu'une femme blonde, soit C______, qui ne lui paraissait "pas bien", alcoolisée et nerveuse, s'était approchée d'un jeune homme de type africain, identifié comme étant possiblement A______, attablé en compagnie d'une "demoiselle" à la terrasse de l'établissement public situé entre les rue de L______ et de P______. C______ les avait insultés, avait reproché à l'autre femme de se trouver avec son "mari", puis avait saisi un verre d'eau dont elle avait jeté le contenu au visage de A______. Il lui semblait que C______ avait également projeté au sol tout ce qui se trouvait sur la table avant de s'emparer d'une bouteille ou d'un verre, de briser cet objet, et de s'en prendre à A______ au moyen d'un tesson, ce dont elle n'était toutefois pas certaine. Diverses personnes étaient intervenues pour l'en empêcher. C______ s'était ensuite emparée d'une chaise pour frapper A______, toujours assis, lequel l'avait repoussée d'un coup de pied, de sorte qu'elle avait chuté entre les vélos et autres deux roues stationnés à proximité, avant de se relever rapidement. Elle n'avait constaté aucune trace de blessure sur C______, qui était ensuite revenue à la charge. Pour éviter C______, A______ avait quitté les lieux, poursuivi par cette dernière.

d.c. Q______, travailleuse du sexe habitant un appartement au 1er étage de l'immeuble sis rue 2______no.______, a déclaré n'avoir jamais vu A______ frapper C______, ni constaté de blessures ou de marques sur le visage ou le corps de celle-ci, à l'exception d'une brûlure à la main, faite en cuisinant selon l'intéressée, et de taches épithéliales d'origine allergique au niveau du décolleté. A______ et C______ semblaient bien s'entendre. Après diverses fluctuations dans son discours, elle a reconnu que C______ lui avait confié avoir été battue et giflée par A______, ce qu'elle avait supposé être un mensonge en l'absence de lésion visible. C______ devenait très jalouse lorsqu'elle consommait de la drogue et de l'alcool. A une reprise, elle l'avait vu assener une gifle à A______, qu'elle recherchait constamment, faisant des scènes dans la rue, brandissant un couteau et menaçant de le tuer, alors qu'il ne voulait plus habiter avec elle et partait en essayant de l'éviter.

d.d.a. Plusieurs travailleurs sociaux œuvrant à divers titres au sein de l'association G______, qui ont eu des contacts avec C______, ont été entendus en cours de procédure. Tous s'accordent sur le fait que C______ avait fait l'objet, entre août 2019 et septembre 2021, de violences de la part d'un homme, désigné dans la majorité des cas comme étant son compagnon, soit A______, reconnu sur planche photographiques par R______. C______ refusait de fournir l'identité de son agresseur. Aucun cliché de ses lésions n'avait été pris. C______, fragile psychologiquement, était réfractaire aux soins et avait refusé systématiquement de déposer plainte pénale contre A______ avant les événements du 2 septembre 2021. Elle éprouvait une grande crainte à l'égard de son compagnon selon H______, qui a ajouté que plusieurs de ses collègues lui avaient relaté avoir constaté, en 2020, année au cours de laquelle l'activité de l'association avait été ralentie en raison de la pandémie, que C______ présentait des blessures.

S______ a confirmé que C______ avait peur de son compagnon, qu'elle essayait dans le même temps de protéger. Elle avait constaté, lors d'un entretien intervenu entre août et septembre 2019, que C______ avait "les yeux explosés" en raison d'une fracture du nez. Lors de tournées dans le quartier D______, elle avait vu à deux reprises C______ avec un ou deux yeux "au beurre noir". Entre mars et avril 2021, C______, qui s'était présentée à la permanence de l'association avec des marques de blessures non récentes, lui avait montré des photographies de son visage suite aux coups reçus. Sur certains clichés, C______ était défigurée, tandis que sur d'autres, elle présentait des hématomes, avait la bouche enflée ou encore les yeux rouges de sang. Elle avait également recueilli les confidences d'autres occupants de l'immeuble sis rue 2______no.______, impactés par les violences subies par C______.

T______ avait vu C______ à plusieurs reprises avec des blessures sur le corps et le visage, dont une fracture impressionnante du nez antérieurement à 2020. A une autre reprise, alors qu'elle se trouvait en compagnie de son collègue U______, elle avait aperçu C______ le visage couvert de blessures, en particulier d'un énorme hématome. Par messages vocaux, C______ lui avait confié, le 28 février 2021, "avoir encore été tabassée" et, le 12 mars 2021, avoir été frappée à nouveau "à la pyramide nasale".

U______ avait constaté, en 2021, que C______ présentait des blessures, soit, en début d'année, une lésion au nez, qui était "bleu et gonflé" et, au début de l'été, il avait vu qu'elle était défigurée, avait une grosse bosse sur le visage et le nez complètement cassé. Fin août ou début septembre 2021, une autre travailleuse du sexe l'avait informé de ce que C______ avait été tabassée en pleine rue et avait dû être hospitalisée. Cette personne avait ajouté qu'elle entendait tous les jours des bruits de coups provenant de l'appartement occupé par l'intéressée, au point qu'elle s'inquiétait pour sa vie.

Le 21 juin 2021, suite à l'intervention d'un tiers, C______ avait confié à R______ avoir été agressée par son ami intime, qu'elle lui avait désigné du doigt dans la rue. Ce dernier souriait et semblait trouver la situation très amusante.

d.d.b. Selon les notes d'entretien relatives à C______, l'association G______ a reçu plusieurs retours de violences conjugales. Le 8 août 2019, C______ avait mentionné avoir été agressée, avoir eu le nez cassé et le visage tuméfié. Le 22 juin 2021, une prostituée s'était adressée à R______, pour l'informer de ce que C______ venait d'être agressée par son compagnon, interpellé dans la foulée par la police. Le 2 septembre 2021, C______ avait à nouveau été brutalisée par son conjoint, violences qui, selon elle, survenaient quotidiennement. A l'exception de ce dernier épisode de maltraitance, C______ avait systématiquement refusé de déposer plainte pénale.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b. Dans ses mémoires d'appel et de réponse, A______ persiste dans ses conclusions, tout en précisant contester également les mesures d'interdiction de contact et d'éloignement prononcées à son endroit.

Le MP, qui se contentait de conclure au prononcé d'un verdict de culpabilité du chef de lésions corporelles simples en lien avec les faits décrits au chiffre 1.1. de l'acte d'accusation, n'avait pas satisfait à son devoir de motivation. Il avait vécu une relation très conflictuelle avec C______, que sa consommation d'alcool, de stupéfiants et sa jalousie, rendaient agressive, ce qu'elle avait admis et était confirmé, outre par ses propres déclarations, par celles de Q______. Il en résultait que les déclarations de C______ n'étaient pas crédibles. Le 2 septembre 2021, il s'était contenté de repousser les attaques de C______. Les témoignages des collaborateurs de G______ n'étaient pas probants, ces derniers, qui n'avaient jamais été les témoins directs de violence de sa part envers C______, s'étant contentés de rapporter les propos tenus par cette dernière. Père d'un fils résidant à V______ [France], il était désormais en couple depuis de nombreux mois avec W______, ressortissante polonaise établie en Suisse, qui l'avait soutenu durant sa détention. Il comptait l'épouser dans un futur proche. Dans le cadre de la fixation de la peine, il convenait de tenir compte du fait qu'il avait la possibilité de régulariser sa situation administrative avec sa compagne actuelle, d'obtenir une autorisation de travail et, ainsi, de s'acquitter d'une peine pécuniaire, de sorte que le prononcé d'une peine privative de liberté, qui plus est ferme, était disproportionné et ne tenait pas compte de l'absence d'antécédent d'infractions contre l'intégrité corporelle. Il en allait de même du prononcé de l'expulsion, facultative, de Suisse, et de l'inscription de celle-ci dans le système d'information Schengen, vu ses projets de mariage et le domicile en France de son fils, attaches dont il disposait ainsi tant sur le territoire helvétique qu'en Europe. Il convenait en outre de lui allouer une indemnité de CHF 200.- par jour de détention injustifiée, avec intérêts à 5% dès le 14 septembre 2021, et de laisser les frais de la procédure d'appel à la charge de l'Etat.

c. Le MP persiste dans les conclusions de son appel joint. Les faits décrits aux paragraphes 1, 2 et 4 du chiffre 1.1. de l'acte d'accusation découlaient des déclarations spontanées, complètes et mesurées de C______ à la police, sur lesquelles elle n'était pas revenue, y compris après le retrait de sa plainte pénale, son seul but étant de mettre un terme aux violences subies. A l'inverse, A______ n'était pas crédible, en particulier lorsqu'il affirmait n'avoir jamais constaté d'hématomes sur C______, alors même que divers témoins, en particulier les collaborateurs de G______, avaient attesté du contraire en cours de procédure. Il était pour le surplus fait référence à la motivation du premier juge pour les points visés aux paragraphes 3, 5, 6 et 7 du chiffre 1.1. de l'acte d'accusation. Eu égard à la gravité de sa faute, il se justifiait de condamner A______ à une peine privative de liberté de 12 mois, sous déduction de la détention déjà subie, peine nécessairement ferme au vu de ses antécédents et de l'existence d'un pronostic défavorable quant à son comportement futur. De même, en l'absence de permis de séjour, de liens familiaux ou affectifs avec la Suisse, et d'emploi, ainsi qu'en tenant compte de ses condamnations passées, le prononcé de l'expulsion de Suisse de A______ était justifié, la durée de cinq ans proportionnée, et le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen adéquat. Le MP a enfin retiré sa conclusion en confiscation et en destruction du téléphone figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n°1______, mesure ordonnée par le premier juge, dont il a sollicité la confirmation.

D. A______, ressortissant guinéen né le ______1999, est célibataire et père d'un enfant mineur qu'il n'a jamais vu, vivant en France avec sa mère, avec laquelle il n'a plus de contact. Sa sœur est décédée. Sa mère et son frère habitent en Guinée, tandis que son père réside au Sénégal. En Guinée, il a étudié dans une école militaire jusqu'à l'âge de 18 ans ou 19 ans, puis il est parti en Lybie, pour se rendre en Europe en 2016 selon ses dires, d'abord en Italie, où il a vécu à proximité de X______, puis à Genève en 2017, en passant par Y______ [France]. Il déposé une demande d'asile en Suisse et a été attribué au canton du Jura. Il ne bénéficie d'aucune autorisation de séjour. Il n'a jamais travaillé pour subvenir à ses besoins, étant entretenu par C______ du temps de leur vie commune, encore en août 2021, d'après les indications qu'il a fournies à la police. Il n'a aucune autre attache familiale en Suisse.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, A______ a été condamné :

-          le 30 mars 2017, par le Ministère public de Genève, à une peine pécuniaire de 90 jours-amende à CHF 10.-, avec sursis, délai d'épreuve de trois ans, prolongé le 12 février 2020 pour une durée d'un an par le Ministère public de Genève, pour délit contre la LStup et séjour illégal;

-          le 8 avril 2017, par le Ministère public de Genève, à une peine pécuniaire de 90 jours-amende à CHF 10.-, avec sursis, délai d'épreuve de trois ans, révoqué le 12 février 2020 par le Ministère public de Genève, pour séjour illégal et non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée;

-          le 12 février 2020, par le Ministère public de Genève, à une peine pécuniaire de 180 jours-amende à CHF 10.- (peine d'ensemble avec la condamnation du 8 avril 2017), pour séjour illégal;

-          le 22 juin 2021, par le Ministère public de Genève, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 10.-, pour séjour illégal.

E. Bien qu'ayant été invitée à le faire, Me B______, défenseure d'office de A______, n'a pas fait parvenir à la CPAR son état de frais pour l'activité déployée dans le cadre de la procédure d'appel.

EN DROIT :

1. L'appel et l'appel joint sont recevables pour avoir été interjetés et motivés selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, ce principe signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé, et non à ce dernier de démontrer son innocence. Il est violé lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que l'accusé n'a pas prouvé son innocence mais aussi lorsqu'il résulte du jugement que, pour être parti de la fausse prémisse qu'il incombait à l'accusé de prouver son innocence, le juge l'a condamné parce qu'il n'avait pas apporté cette preuve (ATF 127 I 38 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 2c et d).

Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo signifie que le juge ne peut se déclarer convaincu d'un état de fait défavorable à l'accusé lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence de cet état de fait (ATF 127 I 38 consid. 2a; ATF 124 IV 86 consid. 2a; ATF 120 Ia 31 consid. 2c).

On parle de témoin par ouï-dire (" vom Hörensagen "; témoignage indirect) lorsqu'un témoin fait part de ce qu'un tiers lui a relaté de ce qu'il avait lui-même constaté. En l'absence d'une norme prohibant expressément une telle démarche, le principe de la libre appréciation des preuves (art. 10 al. 2 CPP) permet au juge de se fonder sur les déclarations d'un témoin rapportant les déclarations d'une autre personne. La seule prise en considération, au stade du jugement, de telles déclarations n'est pas en soi arbitraire (arrêts du Tribunal fédéral 6B_324/2017 du 8 mars 2018 consid. 1.2.2; 6B_862/2015 précité consid. 4.2; 6B_834/2013 du 14 juillet 2014 consid. 1.5). Le témoin par ouï-dire n'est toutefois témoin direct que de la communication que lui a faite le tiers; il n'est témoin qu'indirect des faits décrits, dont il ne peut rapporter que ce qui lui en a été dit mais non si cela était vrai (arrêts du Tribunal fédéral 6B_862/2015 précité consid. 4.2; 6B_905/2010 du 16 juin 2011 consid. 2.3.2). La jurisprudence en a conclu qu'un tel témoin, faute d'avoir pu constater par lui-même un élément constitutif de l'infraction, ne constitue pas à proprement parler un " témoin à charge " (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1403/2021 du 9 juin 2022 destiné à la publication consid. 2.4; 6B_862/2015 précité consid. 4.2; 6B_342/2015 du 15 octobre 2015 consid. 6.3).  

3. 3.1.1. L'art. 123 CP réprime les lésions du corps humain ou de la santé qui ne peuvent être qualifiées de graves au sens de l'art. 122 CP. Cette disposition protège l'intégrité corporelle et la santé tant physique que psychique. Elle implique une atteinte importante aux biens juridiques ainsi protégés. À titre d'exemples, la jurisprudence cite l'administration d'injections, la tonsure totale et tout acte qui provoque un état maladif, l'aggrave ou en retarde la guérison, comme les blessures, les meurtrissures, les écorchures ou les griffures, sauf si ces lésions n'ont pas d'autres conséquences qu'un trouble passager et sans importance du sentiment de bien-être (ATF 134 IV 189 consid. 1.1 p. 191 et les références citées; plus récemment arrêt du Tribunal fédéral 6B_1283/2018 du 14 février 2019 consid. 2.1).

3.1.2. La distinction entre lésions corporelles et voies de fait peut s'avérer délicate, notamment lorsque l'atteinte s'est limitée à des meurtrissures, des écorchures, des griffures ou des contusions. Ainsi, une éraflure au nez avec contusion a été considérée comme une voie de fait ; de même une meurtrissure au bras et une douleur à la mâchoire sans contusion. En revanche, un coup de poing au visage donné avec une violence brutale propre à provoquer d'importantes meurtrissures, voire une fracture de la mâchoire, des dents ou de l'os nasal, a été qualifié de lésion corporelle ; de même de nombreux coups de poing et de pied provoquant chez l'une des victimes des marques dans la région de l'oeil et une meurtrissure de la lèvre inférieure et chez l'autre une meurtrissure de la mâchoire inférieure, une contusion des côtes, des écorchures de l'avant-bras et de la main (ATF 134 IV 189 consid. 1.3 p. 191 s. ; 119 IV 25 consid. 2a p. 26/27). La question peut parfois être résolue de manière satisfaisante par l'application de l'art. 123 ch. 1 al. 2 CP, qui permet une atténuation libre de la peine dans les cas de peu de gravité (cf. ATF 119 IV 25 consid. 2a p. 27).

Dans les cas limites, il faut tenir compte de l'importance de la douleur provoquée, afin de déterminer s'il s'agit de lésions corporelles simples ou de voies de fait. Les contusions meurtrissures, écorchures ou griffures constituent des lésions corporelles simples si le trouble qu'elles apportent, même passager, équivaut à un état maladif, notamment si viennent s'ajouter au trouble du bien-être de la victime un choc nerveux, des douleurs importantes, des difficultés respiratoires ou une perte de connaissance. Par contre, si les contusions, meurtrissures, écorchures ou griffures en cause ne portent qu'une atteinte inoffensive et passagère au bien-être du lésé, les coups, pressions ou heurts dont elles résultent ne constituent que des voies de fait (ATF 119 IV 25 consid. 2a p. 26 ; 107 IV 40 consid. 5c p. 42 ; 103 IV 65 consid. II 2c p. 70 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 6S.474/2005 du 27 février 2006 consid. 7.1.).

Comme les notions de voies de fait et d'atteinte à l'intégrité corporelle, qui sont décisives pour l'application des art. 123 et 126 CP, sont des notions juridiques indéterminées, une certaine marge d'appréciation est reconnue au juge du fait car l'établissement des faits et l'interprétation de la notion juridique indéterminée sont étroitement liés (ATF 134 IV 189 consid. 1.3. p. 191-192 ; ATF 119 IV 25 consid. 2a p. 27 et les arrêts cités).

3.1.3. L'infraction est intentionnelle. Le dol éventuel est suffisant (Petit commentaire du Code pénal, N. 12 ad art. 123 CP et références citées).

3.1.4. Quiconque, de manière contraire au droit, est attaqué ou menacé d'une attaque imminente a le droit de repousser l'attaque par des moyens proportionnés aux circonstances ; le même droit appartient aux tiers (art. 15 CP). Si l'auteur, en repoussant l'attaque, a excédé les limites de la légitime défense au sens de l'art. 15 CP, le juge atténue la peine (art. 16 al. 1 CP). Si cet excès provient d'un état excusable d'excitation ou de saisissement causé par l'attaque, l'auteur n'agit pas de manière coupable (art. 16 al. 2 CP).

La légitime défense suppose une attaque, c'est-à-dire un comportement visant à porter atteinte à un bien juridiquement protégé, ou la menace d'une attaque, soit le risque que l'atteinte se réalise. Il doit s'agir d'une attaque actuelle ou à tout le moins imminente, ce qui implique que l'atteinte soit effective ou qu'elle menace de se produire incessamment (ATF 106 IV 12 consid. 2a p. 14 ; ATF 104 IV 232 consid. c p. 236 s. ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_600/2014 du 23 janvier 2015 consid. 5.1 non publié in ATF 141 IV 61 ; 6B_632/2011 du 19 mars 2012 consid. 2.1). Cette condition n'est pas réalisée lorsque l'attaque a cessé ou qu'il n'y a pas encore lieu de s'y attendre. Une attaque n'est cependant pas achevée aussi longtemps que le risque d'une nouvelle atteinte ou d'une aggravation de celle-ci par l'assaillant reste imminent (ATF 102 IV 1 consid. 2b p. 4 s.). S'agissant en particulier de la menace d'une attaque imminente contre la vie ou l'intégrité corporelle, celui qui est visé n'a évidemment pas à attendre jusqu'à ce qu'il soit trop tard pour se défendre ; il faut toutefois que des signes concrets annonçant un danger incitent à la défense. La seule perspective qu'une querelle pourrait aboutir à des voies de fait ne suffit pas. Par ailleurs, L'acte de celui qui est attaqué ou menacé de l'être doit tendre à la défense. Un comportement visant à se venger ou à punir ne relève pas de la légitime défense. Il en va de même du comportement qui tend à prévenir une attaque certes possible mais encore incertaine, c'est-à-dire à neutraliser l'adversaire selon le principe que la meilleure défense est l'attaque (ATF 93 IV 81 p. 83 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_130/2017 du 27 février 2018 consid. 3.1 = SJ 2018 I 385 ; 6B_346/2016 du 31 janvier 2017 consid. 2.1.2).

Celui qui invoque un fait justificatif susceptible d'exclure sa culpabilité ou de l'amoindrir doit en rapporter la preuve, car il devient lui-même demandeur en opposant une exception à l'action publique. Si une preuve stricte n'est pas exigée, l'accusé doit rendre vraisemblable l'existence du fait justificatif. Il convient ainsi d'examiner si la version des faits invoquée par l'accusé pour justifier la licéité de ses actes apparaît crédible et plausible eu égard à l'ensemble des circonstances (G. PIQUEREZ / A. MACALUSO, Procédure pénale suisse, 3e éd., Genève/Bâle/Zurich 2011, n. 555, p. 189).

3.2.1. Fin 2018, l'appelant et la lésée ont débuté une relation amoureuse, rapidement devenue conflictuelle, qui a été émaillée par divers épisodes de violence domestique à compter de l'année 2019. La liaison des intéressés a à tout le moins perduré jusqu'au 2 septembre 2021 et n'était ainsi pas terminée depuis plusieurs mois à cette date, contrairement à ce qu'a soutenu l'appelant en dernier lieu après avoir affirmé le contraire en cours de procédure. En atteste également le fait qu'en date du 26 août 2021, la lésée a souscrit, à son propre nom, le raccordement téléphonique qu'utilisait l'appelant le jour de son arrestation, où il lui a par ailleurs demandé de le contacter alors qu'elle se trouvait à l'hôpital.

A la police et devant le MP, la lésée a été constante quant au fait qu'elle avait été frappée à plusieurs reprises par l'appelant. Son attitude ambivalente à l'égard de ce dernier en cours de procédure est à l'image de celle qui a été la sienne du temps de leur vie commune, comme l'ont rapporté divers intervenants de G______, et témoigne de sa fragilité psychologique, constatée par ces derniers, de même que de la crainte qu'elle nourrissait à l'égard de l'appelant. Cette ambivalence est toutefois impropre à décrédibiliser ses déclarations quant aux violences subies, lesquelles ont également été rapportées par divers témoins, de manière directe ou indirecte.

La quasi-totalité des témoignages recueillis s'accorde en effet sur l'existence de violences domestiques au sein du couple. Selon les confidences faites au témoin U______ par une travailleuse du sexe, dont l'identité n'a pas été dévoilée, elle entendait tous les jours des bruits de coups provenant de l'appartement occupé par la lésée, au point de s'inquiéter pour sa vie.

Il ressort par ailleurs du dossier qu'entre 2019 et septembre 2021, les intervenants de G______ étaient soucieux de la situation de la lésée, après avoir constaté qu'elle présentait des blessures et/ou recueilli ses confidences, photographies à l'appui, ainsi que celles de tiers dans le milieu de la prostitution, quant au fait qu'elle était frappée par un individu, dont elle a parfois indiqué expressément qu'il s'agissait de son compagnon, qu'elle a par ailleurs désigné physiquement au témoin R______.

Au cours de cette période, la lésée ne s'est en revanche jamais plainte auprès de ces intervenants ou d'autres personnes d'avoir été victime de violences de la part de tiers, de ses clients ou de collègues en particulier. Aucun élément au dossier ne permet par ailleurs d'établir que tel a été ou aurait été le cas.

Dans cette mesure, il y a lieu de retenir que l'appelant a effectivement brutalisé à plusieurs reprises la lésée durant leur relation.

3.2.2. La culpabilité de l'appelant pour les faits visés aux paragraphes 1, 3 et 5 à 7 sous chiffre 1.1. est dûment établie.

Le témoin S______ a en effet constaté directement, soit encore au travers des photographies, qu'entre 2019 et le 2 septembre 2021, la lésée a présenté diverses lésions sous forme, d'un ou deux yeux "au beurre noir" à plusieurs reprises et de marques de blessures non récentes. Elle était défigurée sur certains clichés, tandis que sur d'autres, elle avait des hématomes, la bouche enflée ou encore les yeux rouges de sang.

Ce témoin a en outre confirmé que lors d'un entretien intervenu entre août et septembre 2019, la lésée avait "les yeux explosés" en raison d'une fracture du nez, ce que le témoin T______, qui a fait état d'une fracture impressionnante du nez antérieure à 2020, a confirmé. Cette dernière a aussi constaté à plusieurs reprises que la lésée présentait des marques sur le corps. Elle l'avait en outre vue à une reprise, en compagnie de son collègue U______, le visage couvert de blessures, dont en particulier d'un énorme hématome, ce que ce dernier a confirmé, ajoutant que la lésée avait un nez "bleu et gonflé" au début d'année 2021 et, au début de l'été de cette même année, qu'elle était défigurée, avait une grosse bosse sur le visage et le nez complètement cassée, lésions qui sont compatibles avec les confidences recueillies par le témoin R______ le 21 ou 22 juin 2021.

Les événements du 2 septembre 2021 sont établis, par les images de vidéosurveillance et les déclarations des protagonistes, dont il ressort que l'appelant a poussé de la main la lésée, qui a été projetée de l'autre côté du trottoir et a chuté dans l'espace réservé au stationnement des deux roues, geste manifestement à l'origine des blessures dont elle a souffert sous forme de trois plaies linéaires de l'arcade sourcilière gauche, ayant nécessité la pose de points de suture, ainsi que de multiples macules érythémateuses bleutées à l'avant-bras droit.

Il s'ensuit que les faits décrits aux paragraphes 1, 3 et 5 à 7 sous chiffre 1.1. de l'acte d'accusation et les lésions y relatives, peuvent être imputés à l'appelant.

Les blessures de la lésée sont constitutives de lésions corporelles simples d'un point de vue juridique, vu leur ampleur et leur gravité.

L'appelant a agi intentionnellement, dès lors qu'il savait pertinemment qu'en frappant la lésée, en particulier au visage, et en la faisant chuter au sol, il était susceptible de lui occasionner des blessures du type de celles qui ont été constatées.

3.2.3. L'appelant invoque avoir agi en état de légitime défense lors des événements du 2 septembre 2021, argument qui ne résiste pas à la critique.

En effet, les deux protagonistes s'accordent à dire que le jour en question, une dispute, dont ils étaient coutumiers, a surgi entre eux, en raison de la jalousie de la lésée et alors qu'ils étaient tous deux alcoolisés.

Tout au long de la procédure, l'appelant a affirmé avoir poussé la lésée afin de s'en défaire, parce qu'il souhaitait qu'elle le laisse tranquille, et non en raison du fait qu'elle s'apprêtait à l'attaquer, ou l'avait concrètement fait.

Contrairement à ce qui a été rapporté par le témoin O______, la lésée avait les mains vides, à l'exception d'un téléphone portable, lorsque l'appelant l'a poussée d'un geste de la main, et non du pied, et a ainsi occasionné sa chute sur la chaussée, dans l'espace réservé au stationnement des deux roues, et les lésions en résultant.

Ainsi, vu la dispute en cours entre les protagonistes et en l'absence d'attaque imminente ou en cours de la lésée, l'appelant ne saurait prétendre avoir agi en état de légitime défense.

3.2.4. L'épisode décrit dans l'acte d'accusation au cours desquels la lésée aurait reçu des coups sur les côtes (paragraphe 4), de même que celui relatif aux brûlures de cigarette au niveau du haut de la poitrine (paragraphe 2), contestés par l'appelant, reposent sur les seules déclarations de l'intéressée. Aucun témoin n'a rapporté avoir recueilli de confidences de la lésée dans ce sens et les lésions qu'elle a décrites sur le haut de la poitrine et ainsi que les douleurs aux côtes, n'ont pas davantage été constatées visuellement, ni attestées médicalement. Seules une brûlure à la main et des marques épithéliales au niveau du décolleté, non liées à une agression physique selon les dires de la lésée, ont été vues par le témoin Q______, à laquelle cette dernière a pourtant confié avoir été frappée par l'appelant.

En l'absence d'éléments probants au dossier autre que les déclarations, même si elles sont crédibles, de la lésée, il existe un doute, qui doit profiter à l'appelant.

C'est ainsi à juste titre que le premier juge, dont le jugement sera confirmé sur ce point, a acquitté l'appelant pour les faits visés aux paragraphes 2 et 4 sous chiffre 1.1. de l'acte d'accusation.

3.2.5. L'appelant sera ainsi reconnu coupable de lésions corporelles simples qualifiées au sens de l'art. 123 ch. 1 et ch. 2 al. 6 CP pour les faits visés aux paragraphes 1, 3 et 5 à 7 sous chiffre 1.1. de l'acte d'accusation, son acquittement pour ceux visés aux paragraphes 2 et 4 étant confirmé.

4. 4.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

4.1.2. Bien que la récidive ne constitue plus un motif d'aggravation obligatoire de la peine (art. 67 aCP), les antécédents continuent de jouer un rôle très important dans la fixation de celle-ci (M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER (éds), Basler Kommentar Strafrecht I : Art. 1-110 StGB, Jugendstrafgesetz, 3ème éd., Bâle 2013, n. 130 ad art. 47 CP ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1202/2014 du 14 avril 2016 consid. 3.5.). En général, la culpabilité de l'auteur est amplifiée du fait qu'il n'a pas tenu compte de l'avertissement constitué par la précédente condamnation, et sa rechute témoigne d'une énergie criminelle accrue (R. ROTH / L. MOREILLON (éds), Code pénal I : art. 1-100 CP, Bâle 2009, n. 55 ad art. 47 CP). Il en va de même des antécédents étrangers (ATF 105 IV 225 consid. 2 p. 226). Une série d'infractions semblables pèse plus lourd que des actes de nature différente. En outre, les condamnations passées perdent de leur importance avec l'écoulement du temps. Les condamnations qui ont été éliminées du casier judiciaire ne peuvent plus être utilisées pour l'appréciation de la peine ou l'octroi du sursis dans le cadre d'une nouvelle procédure pénale (ATF 135 IV 87 consid. 2 p. 89). Les antécédents judiciaires ne sauraient toutefois conduire à une augmentation massive de la peine, parce que cela reviendrait à condamner une deuxième fois pour des actes déjà jugés (ATF 120 IV 136 consid. 3b p. 145).

Dans le cadre de l'art. 47 CP, le juge peut prendre en compte à titre d'antécédents des actes punissables qui n'ont pas (encore) été punis, pour autant que les faits soient établis (cf. arrêts du Tribunal fédéral 6B_1457/2020 du 15 avril 2021 consid. 1.4).

4.1.3. Lorsque les peines envisagées concrètement sont de même genre, l'art. 49 al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement - d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner - la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2).

L'exigence, pour appliquer l'art. 49 al. 1 CP, que les peines soient de même genre, implique que le juge examine, pour chaque infraction commise, la nature de la peine à prononcer pour chacune d'elle. Le prononcé d'une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation contenu à l'art. 49 CP n'est ensuite possible que si le juge choisit, dans le cas concret, le même genre de peine pour sanctionner chaque infraction commise. Que les dispositions pénales applicables prévoient abstraitement des peines de même genre ne suffit pas. Si les sanctions envisagées concrètement ne sont pas du même genre, elles doivent être prononcées cumulativement. La peine privative de liberté et la peine pécuniaire ne sont pas des sanctions du même genre (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1 p. 316).

Une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation suppose que le tribunal ait fixé (au moins de manière théorique) les peines (hypothétiques) de tous les délits (ATF 144 IV 217 consid. 3.5.3).

Cette disposition ne prévoit aucune exception. Le prononcé d'une peine unique dans le sens d'un examen global de tous les délits à juger n'est pas possible (ATF 145 IV 1 consid. 1.4 ; 144 IV 313 consid. 1.1.2).

4.1.4. Aux termes de l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits.

Le juge doit poser, pour l'octroi du sursis – ou du sursis partiel –, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit prononcer le sursis. Celui-ci est ainsi la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 185 s. ; ATF 134 IV 1 consid. 4.2.2 p. 5).

La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner le prévenu de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère du prévenu et ses chances d'amendement. Il n'est pas admissible d'accorder un poids particulier à certains critères et d'en négliger d'autres qui sont pertinents (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 185 s.). Le sursis est la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (ATF 135 IV 180 consid. 2.1 p. 185 s. et les références ; ATF 134 IV 140 consid. 4.2 p. 143 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1339/2016 du 23 mars 2017 consid. 1.1.1).

4.2.1. La faute de l'appelant est importante. Il s'en est pris à de multiples reprises à l'intégrité corporelle de sa compagne pendant plus de deux ans, lui infligeant de la sorte de nombreuses blessures d'une gravité certaine. Il a persisté à séjourner illégalement en Suisse, et plus particulièrement à Genève, malgré le fait qu'il se savait démuni de papiers d'identité ainsi que d'autorisation de séjour et en dépit de l'interdiction de pénétrer sur le territoire genevois prononcée à son encontre le 23 août 2021. Il s'est en outre adonné au trafic de stupéfiants.

Les mobiles de l'appelant sont égoïstes. Il a laissé libre cours à son agressivité, est demeuré en Suisse par convenance personnelle et s'est livré au trafic de stupéfiants par appât d'un gain facile.

Si la situation personnelle de l'appelant était pour partie précaire au moment des faits, vu son statut administratif irrégulier en Suisse, elle ne saurait justifier son comportement, encore moins à l'égard de la lésée, qui l'hébergeait et le soutenait financièrement.

La collaboration de l'appelant a été médiocre. Il a persisté à contester les faits les plus graves, sous réserve des événements du 2 septembre 2021, qu'il pouvait difficilement nier au vu du dossier, pour lesquels il a finalement invoqué avoir agi en état de légitime défense.

Il n'a manifestement pas pris conscience de la gravité de ses agissements, en particulier à l'égard de la lésée, qu'il n'a eu de cesse d'accabler et de rendre responsable de son comportement. Il ne lui a pas présenté d'excuse et, d'une manière générale, n'a manifesté aucun repentir ni volonté de s'amender.

Les antécédents de l'appelant sont mauvais et spécifiques en matière de LEI et de LStup, ce qui ne l'a toutefois pas dissuadé de récidiver.

4.2.2. Pour des motifs de prévention générale et spéciale, seule une peine privative de liberté est susceptible d'entrer en considération pour sanctionner les infractions commises par l'appelant.

Il y a concours d'infractions, ce qui justifie une augmentation de la peine dans une juste proportion.

L'infraction de lésions corporelles simples est abstraitement la plus grave, ce qui doit conduire à prononcer, en tenant compte des éléments à charge et à décharge, une peine de base de six mois, les différents épisodes de violence devant être traités comme un tout, eu égard à leur récurrence au sein du couple. Par le jeu du concours, il convient ensuite de l'aggraver d'un mois et demi supplémentaire pour l'infraction à l'art. 19 al. 1 let. c LStup (peine théorique : deux mois et demi), d'un mois supplémentaire pour l'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b LEI (peine théorique : deux mois) et de 15 jours supplémentaires pour l'infraction à l'art, 119 al. 1 LEI (peine théorique : un mois).

La peine privative de liberté sera ainsi fixée à neuf mois, sous déduction de la détention avant jugement, et le jugement entrepris réformé dans ce sens.

4.2.3. Au vu de l'absence de prise de conscience de l'appelant de la gravité de ses agissements, de ses antécédents, dont certains spécifiques, du manque de changement notable dans sa situation personnelle et de perspective concrète dans ce sens, dès lors que ses projets de mariage avec W______ ne sont nullement documentés et qu'aucun élément au dossier ne permet de retenir que sa situation administrative pourrait être régularisée à court terme, seul un pronostic défavorable peut être posé quant à son comportement futur.

L'appelant ne saurait prétendre au bénéfice du sursis. Le jugement entrepris sera réformé en ce sens que c'est une peine ferme qui sera infligée à l'appelant.

4.2.4. Le sursis octroyé le 30 mars 2017 ne sera pas révoqué, cette mesure n'apparaissant pas nécessaire pour dissuader l'appelant de récidiver vu la peine ferme prononcée (art. 46 al. 2 CP).

5. 5.1. Conformément à l'art. 66abis CP, le juge peut expulser un étranger du territoire suisse pour une durée de trois à quinze ans si, pour un crime ou un délit non visé à l'art. 66a, celui-ci a été condamné à une peine ou a fait l'objet d'une mesure au sens des art. 59 à 61 ou 64 CP.

Cette mesure prévue par la loi qui, par essence, s'ajoute à la peine proprement dite, fait partie intégrante de la sanction à prononcer (ATF 143 IV 168 consid. 3.2 = SJ 2017 I 433). L'expulsion judiciaire pénale de l'art. 66abis CP – qui ne diffère pas fondamentalement de l'expulsion prescrite en son temps par l'art. 55 al. 1 aCP (ATF 123 IV 107 consid. 1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_607/2018 du 10 octobre 2018 consid. 1.1 ; 6B_770/2018 du 24 septembre 2018 consid. 1.1) – ne contredit pas l'interdiction de la double peine qui découle notamment de l'art. 6 CEDH (AARP/202/2017 du 16 juin 2017 consid. 2.5).

Il s'agit d'une Kann-Vorschrift (G. MÜNCH / F. DE WECK, Die neue Landesverweisung, in Art. 66a ff. StGB, Revue de l'avocat 2016, p. 163 ; G. FIOLKA / L. VETTERLI, Landesverweisung nach Art. 66a StGB als strafrechtliche Sanktion, cahier spécial, Plädoyer 5/16, p. 86 ; AARP/185/2017 du 2 juin 2017 consid. 2.2 ; AARP/179/2017 du 30 mai 2017 consid. 3.1.2).

Le juge est donc libre, sans autre justification, de renoncer à l'expulsion facultative (M. BUSSLINGER / P. UEBERSAX, Härtefallklausel und migrationsrechtliche Auswirkungen der Landesverweisung, cahier spécial, Plaidoyer 5/2016, p. 98).

Comme toute décision étatique, le prononcé d'une expulsion non obligatoire doit respecter le principe de la proportionnalité ancré aux art. 5 al. 2 et 36 al. 2 et 3 Cst. Il convient ainsi d'examiner si l'intérêt public à l'expulsion l'emporte sur l'intérêt privé de la personne à demeurer en Suisse. Une telle pesée des intérêts répond également aux exigences découlant de l'art. 8 par. 2 CEDH concernant les ingérences dans la vie privée et familiale (arrêt du Tribunal fédéral 6B_371/2018 du 21 août 2018 consid. 3.2). S'agissant d'un étranger arrivé en Suisse à l'âge adulte, l'examen de la proportionnalité suppose une prise en compte de la nature et de la gravité de la faute, du temps écoulé depuis la commission de l'infraction, du comportement de l'auteur durant cette période, de la durée de son séjour en Suisse, de la solidité des liens sociaux, culturels et familiaux avec le pays hôte et avec le pays de destination (ATF 139 I 145 consid. 2.4 p. 149 ; ATF 139 I 31 consid. 2.3.3 p. 34 ss ; ATF 135 II 377 consid. 4.3 p. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_607/2018 du 10 octobre 2018 consid. 1.4.1).

5.2.1. L'appelant, qui est né et a grandi à l'étranger, est arrivé en Suisse à l'âge de 18 ans. Depuis plusieurs années, il séjourne sur le territoire helvétique en dépit d'une situation administrative irrégulière. Il n'a jamais travaillé en Suisse, pays dans lequel il n'a ni famille, ni attache sérieuse. Comme déjà indiqué, ses projets de mariage avec W______ ne sont nullement documentés et aucun élément au dossier ne permet de retenir que sa situation administrative pourrait être régularisée à court terme. Aucun motif, d'ordre familial ou médical, ne fait obstacle au retour de l'appelant dans son pays d'origine, où vit une partie de sa famille.

L'appelant a par ailleurs été condamné à plusieurs reprises, ce qui n'a pas eu pour effet de le dissuader de récidiver. Par son mode de vie, il constitue une menace pour l'ordre public suisse. Il s'ensuit que l'intérêt public de la Suisse à l'expulsion du prévenu prime son intérêt privé à demeurer sur le territoire.

Le jugement de premier instance, qui prononce l'expulsion de Suisse de l'appelant pour une durée de cinq ans, proportionnée en regard des circonstances, sera dès lors confirmé.

5.2.2. Le principe de proportionnalité fait en revanche obstacle à l'extension de la mesure d'expulsion à l'ensemble de l'espace Schengen, vu la quotité de la peine prononcée et le fait qu'il s'agit d'une expulsion facultative.

L'appel sera admis sur ce point et le jugement du Tribunal de police sera réformé dans ce sens.

6. 6.1. Aux termes de l'art. 67b al. 1 CP, si l’auteur a commis un crime ou un délit contre une ou plusieurs personnes déterminées ou contre les membres d’un groupe déterminé, le juge peut ordonner une interdiction de contact ou une interdiction géographique d’une durée de cinq ans au plus, s’il y a lieu de craindre qu’il commette un nouveau crime ou délit en cas de contact avec ces personnes. Selon le second alinéa de cette disposition, par l’interdiction de contact ou l’interdiction géographique, le juge peut notamment interdire à l’auteur de prendre contact, directement ou par l’intermédiaire d’un tiers, avec une ou plusieurs personnes déterminées ou des membres d’un groupe déterminé, notamment par téléphone, par écrit ou par voie électronique (let. a), ainsi que d’approcher une personne déterminée ou d’accéder à un périmètre déterminé autour de son logement (let. b).

6.2. L'appelant s'en est pris à l'intégrité corporelle de la lésée dans un contexte de violences domestiques récurrentes, de sorte que le prononcé d'une interdiction de contact et géographique pourrait prima facie apparaître justifiée. C'est toutefois oublier que c'est en premier lieu la lésée qui a constamment cherché à entrer en contact avec lui, y compris durant sa détention, et non l'inverse, ainsi que cela ressort de la pléthore de messages qu'elle lui a adressés sur son raccordement téléphonique, ainsi que des nombreux courriers, censurés, qu'elle a tenté de lui faire parvenir à [la prison] Z______.

Compte tenu de l'attitude de la lésée, le prononcé des interdictions susmentionnées n'est pas propre à atteindre le but de protection visé, de sorte que le jugement de première instance sera réformé sur ce point.

7. L'appelant ayant été libéré depuis le prononcé du jugement de première instance, il n'y a pas lieu de statuer sur son maintien en détention pour des motifs de sûretés.

8. Vu l'issue de l'appel, l'appelant sera débouté de ses conclusions en indemnisation (art. 429 al. 1 CPP a contrario).

9. Le sort des objets saisis n'ayant pas été contesté en appel, le MP ayant retiré sa conclusion sur ce point, le jugement de première instance sera confirmé sur ce point.

10. L'appelant, qui succombe en grande partie, supportera 90 % des frais de la procédure envers l'État, dont le solde de 10 % sera laissé à la charge de ce dernier (art. 428 CPP).

11. 11.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit (cf. art. 138 al. 1 CPP) est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire suivant, débours de l'étude inclus : avocat stagiaire CHF 110.- (let. a) ; collaborateur CHF 150.- (let. b) ; chef d'étude CHF 200.- (let. c). En cas d'assujettissement – l'assujettissement du patron de l'avocat au statut de collaborateur n'entrant pas en considération (arrêts du Tribunal fédéral 6B_486/2013 du 16 juillet 2013 consid. 4 et 6B_638/2012 du 10 décembre 2012 consid. 3.7) – l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

11.2. Me B______, défenseure d'office de A______ n'a pas déposé d'état de frais, bien qu'ayant été dûment invitée à le faire.

Son activité sera ainsi indemnisée en équité et la rémunération sera arrêtée à CHF 1'163.20 correspondant à quatre heures et 30 minutes d'activité au tarif de CHF 200.-/heure pour la rédaction du mémoire d'appel et du mémoire de réponse, plus la majoration forfaitaire de 20 %, et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 83.20.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ et l'appel joint du Ministère public contre le jugement rendu le 10 mars 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/16278/2021.

Rejette l'appel de A______.

Admet partiellement l'appel joint du Ministère public.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de lésions corporelles simples qualifiées (art. 123 ch. 1 et 2 al. 6 CP) pour les faits visés aux paragraphes 1, 3 et 4 à 6 du chiffre 1.1. de l'acte d'accusation, d'infraction à l'art. 19 al. 1 let. c LStup, de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et de non-respect d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminé (art. 119 al. 1 LEI).

Acquitte A______ de lésions corporelles simples qualifiées en lien avec les faits décrits aux paragraphes 2 et 4 du chiffre 1.1. de l'acte d'accusation (art. 123 ch. 1 et 2 al. 6 CP).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 9 mois, sous déduction de la détention avant jugement (art. 40 et 51 CP).

Renonce à révoquer le sursis octroyé le 30 mars 2017 par le Ministère public de Genève (art. 46 al. 2 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de 5 ans (art. 66abis CP).

Ordonne la confiscation et la destruction de téléphone figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 1______ (art. 69 CP).

Ordonne le séquestre des valeurs patrimoniales figurant sous chiffre 2 de l'inventaire n° 1______ (art. 268 al. 1 CPP).

Ordonne la restitution à A______ du téléphone figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 3______ (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 CPP).

Prend acte de ce que le Tribunal de police a fixé à CHF 8'465.20 l'indemnité de procédure de Me B______, défenseure d'office de A______, pour la procédure préliminaire et de première instance (art. 135 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent à CHF 3'611.30, y compris un émolument de base et un émolument complémentaire de jugement totalisant CHF 900.- (art. 426 al. 1 CPP).

Compense à due concurrence la créance de l'Etat portant sur les frais de la procédure préliminaire et de première instance avec les valeurs patrimoniales séquestrées figurant sous chiffre 2 de l'inventaire n° 1______ (art. 442 al. 4 CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'675.-, comprenant un émolument de jugement de CHF 1'500.-.

Les met à la charge de A______ à hauteur de 90 %.

Laisse le solde des frais de la procédure d'appel à la charge de l'Etat.

Arrête à CHF 1'163.20, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseure d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, à l'Office cantonal de la population et des migrations et au Secrétariat d'Etat aux migrations.

 

La greffière :

Andreia GRAÇA BOUÇA

 

La présidente :

Delphine GONSETH

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

3'611.30

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

100.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'675.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

5'286.30