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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/3388/2020

AARP/184/2022 du 20.06.2022 sur JTCO/128/2021 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : ACQUIS DE SCHENGEN;BASE DE DONNÉES;FIXATION DE LA PEINE;CONCOURS D'INFRACTIONS;EXPULSION(DROIT PÉNAL)
Normes : LStup.19; CP.47; CP.49; CP.66A.al1
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/3388/2020 AARP/184/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 20 juin 2022

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, ______, comparant par Me C______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTCO/128/2021 rendu le 15 novembre 2021 par le Tribunal correctionnel,

 

et

 

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 15 novembre 2021, par lequel le Tribunal correctionnel (TCO) l'a notamment reconnu coupable d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes (art. 19 al. 1 let. c et d et al. 2 let. a LStup) et de rupture de ban (art. 291 du code pénal suisse [CP]), a révoqué le sursis à la peine privative de liberté de 14 mois, sous déduction de 104 jours de détention avant jugement, octroyé par le Bezirksgericht de Zürich et l'a condamné à une peine privative de liberté d'ensemble de quatre ans, sous déduction de 438 jours de détention avant jugement, partiellement complémentaire à celle prononcée par le Bezirksgericht de Zürich. Le TCO a également ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de 20 ans et le signalement de celle-ci dans le système d'information Schengen (SIS) et rejeté ses conclusions en indemnisation.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement, s'agissant du trafic d'héroïne, à ce que sa participation au trafic de cocaïne ne soit reconnue que pour la période postérieure au 21 novembre 2020, au prononcé d'une peine d'ensemble clémente ne dépassant pas 12 mois, à son indemnisation à raison de CHF 200.- par jour de détention injustifiée et à la mise partielle des frais de la procédure à la charge de l'État, dans la mesure de l'admission de ses conclusions d'appel. Il conteste également le signalement de son expulsion dans le SIS.

b. Selon l'acte d'accusation du 22 juillet 2021, il est reproché ce qui suit à A______ :

- à tout le moins en février 2020, il a participé, en Suisse, à un important trafic d'héroïne, en particulier en détenant et conditionnant, vraisemblablement à Saint-Gall, une quantité brute de 1'013.9 grammes d'héroïne, présentant un taux de pureté entre 27.7% et 28.1%, laquelle a ensuite été transportée par D______, le 17 février 2020, de Saint-Gall à Genève, étant précisé que cette drogue était destinée à la vente;

- à tout le moins entre novembre et le 17 décembre 2020, il a participé, en Suisse, à un important trafic de cocaïne, en particulier en fournissant en plusieurs fois, à Saint-Gall, de concert avec son père, E______, à tout le moins une quantité totale de 80 grammes de cocaïne, présentant un taux de pureté entre 56.4% et 59.4%, à F______, que ce dernier a revendue pour le compte du père et du fils à un tiers, dont il ignorait qu'il s'agissait d'un agent de police ; ce faisant, il a agi en coactivité avec E______ et F______, en s'associant et en participant pleinement et sans réserve à la décision, l'organisation et la réalisation de l'infraction ;

- à tout le moins le 21 novembre 2020, il a pénétré en Suisse, puis y a séjourné, notamment à Saint-Gall, jusqu'à son arrestation survenue le 17 décembre 2020, et ce alors qu'il avait été expulsé de Suisse le 13 juillet 2020, pour une durée de sept ans, par décision du Bezirksgericht de Zürich du 8 juin 2020.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

Du trafic d'héroïne

a. Le 18 février 2020, à 21h20, la police a arrêté à Genève un ressortissant monténégrin, D______, qui transportait dans son véhicule, immatriculé à Zürich, deux pucks d'héroïne de respectivement 507.4 grammes et 506.5 grammes. D______ était par ailleurs en possession de trois téléphones et de CHF 500.- et EUR 50.-.

b. La perquisition de la chambre occupée par D______ dans un hôtel à G______ (SG) a conduit notamment à la découverte, dans le coffre-fort, de matériel de conditionnement (scotch, sachets "caninette", balance électronique) et, dans l'armoire, d'une boîte contenant initialement 1'000 sachets en papier avec zip de type "minigrip".

c. L'analyse des téléphones de D______ a permis de déterminer qu'il s'était rendu le 17 janvier 2020, à 14h51, à H______ (SG), où il avait rencontré, après 15h24, dans une pizzeria, un individu séjournant dans le même hôtel que lui à G______.

Il était ensuite parti à 15h38 de I______ (SG), s'était arrêté de 16h19 à 16h24 dans le village de J______ (SG), puis s'était rendu à Genève.

d. La drogue transportée par D______ a été analysée. Il s'agit de deux blocs de poudre brune compactée, conditionnés dans deux sachets de type minigrips enveloppés dans plusieurs couches de plastique transparent et fermés par de l'adhésif, d'un poids total net de 986.2 grammes, soit un paquet de 494.1 grammes et un paquet de 492.1 grammes d'héroïne, coupée avec du paracétamol et de la caféine, d'un taux de pureté de respectivement 27.7% et 28.15%.

Sur les couches intérieures des emballages des deux pucks et sur l'ouverture des deux sachets minigrip, l'ADN de A______ a été mis en évidence.

e. Interrogé par la police et le Ministère public (MP), D______ a expliqué être arrivé le 2 ou 3 février 2020 à Zürich dans le but de trouver des véhicules à exporter au Monténégro. Le 17 février 2020, il s'était fait accoster, vers 14h, dans la rue à H______ par un individu qui lui avait proposé de se faire de l'argent facilement en transportant des stéroïdes. Entre 16h et 17h, il s'était rendu à l'adresse sise à quelques kilomètres de Saint-Gall donnée par l'individu pour récupérer les paquets. La personne qui l'y attendait lui avait dit de se rendre pour 22h à Genève, où quelqu'un viendrait à sa rencontre. Il avait ensuite pris la route sans s'arrêter, excepté pour prendre de l'essence et aller aux toilettes. Il ne connaissait pas A______.

f. Ce dernier a été interpellé à Zürich le 25 février 2020, après avoir offert à la vente 1.93 grammes d'héroïne à un agent infiltré et remis un sac contenant 70.6 grammes d'héroïne à un tiers.

Le lien n'a pas été fait, dans le cadre de la procédure ouverte à cette occasion, avec les traces d'ADN découvertes sur les pucks de drogue transportés par D______.

Le 8 juin 2020, A______ a été condamné pour les faits du 25 février 2020, par le Bezirksgericht de Zürich, pour infraction grave à la LStup (art. 19 al. 1 let. b et c et al. 2 let. a LStup), à une peine privative de liberté de 14 mois avec sursis et à une amende de CHF 1'000.-. Son expulsion a été ordonnée pour une durée de sept ans, avec signalement dans le SIS. Il a quitté la Suisse le 14 juillet 2020 pour l'Albanie, après avoir été détenu administrativement à sa sortie de prison.

Du trafic de cocaïne

g. En octobre 2020, une surveillance a été mise en place dans le canton de Saint-Gall, visant un dénommé F______, soupçonné d'être impliqué dans un trafic de cocaïne.

Le 2 novembre 2020, une transaction a été conclue entre F______ et un agent infiltré à K______ (SG), portant sur une quantité de 12 grammes de cocaïne pour un montant de CHF 1'000.-. F______ a garanti à cette occasion que la drogue avait été analysée et présentait un taux de pureté de 87%.

Deux nouvelles transactions sont intervenues entre les précités, les 5 et 16 novembre 2020, portant respectivement sur 30 grammes de cocaïne pour un montant de CHF 2'100.- et 50 grammes de cocaïne.

F______ a été arrêté le 17 décembre 2020, après une dernière transaction portant sur 50 grammes de cocaïne pour un montant de CHF 3'500.-.

Dans son téléphone figurait une photographie d'un pain d'un demi kilo de cocaïne, prise le 5 octobre 2020 à J______.

Une feuille d'aluminium a été retrouvée dans son véhicule. Elle contenait 1.28 grammes de cocaïne et portait l'empreinte digitale de E______.

L'ADN de E______ a également été mis en évidence sur le sachet zip contenant les 50 grammes de cocaïne vendus à l'agent infiltré le 16 novembre 2020.

Le numéro de E______ était enregistré dans le téléphone de F______ sous le nom de "T______" (C-570). Tous deux ont eu des échanges soutenus par WhatsApp à tout le moins du 25 juillet au 16 décembre 2020, notamment en lien avec le trafic de cocaïne (C-477 et C-612ss).

h. L'analyse de la cocaïne remise par F______ a révélé un poids net de 11.9 grammes, d'un taux de pureté de 56.4%, pour la première transaction, des poids nets de 14.7 et 14.8 grammes, d'un taux de pureté de respectivement 59% et 59.4%, pour la deuxième transaction, des poids nets de 14.9, 20.6 et 15 grammes, d'un taux de pureté de respectivement 58.6%, 57.2% et 58.8% pour la troisième transaction et un poids net de 51.4 grammes, d'un taux de pureté de 21.7%, pour la transaction du 17 décembre 2020.

i. La balise GPS installée sur le véhicule de F______ a permis d'établir qu'entre le 10 novembre et le 15 décembre 2020, il s'était rendu à neuf reprises à l'hôtel "L______" à J______.

La perquisition de cet hôtel le 17 décembre 2020, en particulier celle de la chambre n° 11, a conduit à la découverte d'un téléphone de marque "M______" dont la carte SIM était enregistrée au nom d'un dénommé N______, de deux balances électroniques et d'un bocal en verre, dont l'analyse a révélé qu'il avait été contaminé par de la cocaïne et présentait des traces de terre.

j. Deux hommes ont été interpellés à cette occasion dans la chambre n° 11 : E______ et son fils, A______.

Ce dernier s'est légitimé auprès de la police en présentant un passeport albanais établi au nom de O______, qui s'est révélé ultérieurement être son jeune frère.

L'analyse de son urine a révélé la présence de benzoylecgonine, un dérivé de la cocaïne, démontrant une absorption de cette drogue dans les quatre jours précédents. Ses mains présentaient des traces de cocaïne et de caféine.

k. Selon P______, A______ a reçu, entre le 3 mars et le 21 septembre 2020, un montant total de CHF 18'663.14, en 27 transactions différentes, de trois individus ayant donné une fois ou l'autre comme adresse l'hôtel "L______" à J______, soit N______, E______ et R______ (C -923ss et C-1'015ss).

N______ a été arrêté à Berne en septembre 2020 en possession de 250 grammes de cocaïne.

l. Lors de son audition par la police saint-galloise (cf. C-560ss), F______ a mis en cause A______ et son père comme étant ceux lui ayant vendu la cocaïne (C-561 et C-574 verso), désignant E______ comme le chef du réseau de trafiquants, pour le compte duquel il revendait la drogue (cf. C-567 verso, C-569 et C-577). Il avait fait sa connaissance en mai à J______ (C-574 verso) et lui servait également de chauffeur (C-575 verso). Il leur avait acheté environ 150 grammes de cocaïne au total (C-433, C-562 et C-569), mais savait, pour l'avoir vu, E______ être actif également dans le trafic d'héroïne (C-576 et C-577). La photo du pain de cocaïne trouvée dans son téléphone avait été prise en accord avec ce dernier, dans le but de la montrer à d'éventuels clients (C-458, C-570 verso, C-639).

E______ lui avait présenté son fils, A______, en juin ou juillet 2020, à l'occasion d'un appel vidéo (C-577). A______ était arrivé pour la première fois en Suisse en novembre 2020 (C-577) ou, selon une autre version, dix jours avant son arrestation (C-570). Lui-même ignorait l'étendue de l'implication de A______ dans le trafic de drogue (C-639), mais savait qu'il en avait connaissance (C-639) : A______ le contactait de temps en temps par téléphone ou Whatsapp pour lui demander, notamment, s'il avait d'autres acheteurs (C-639 verso) et avait assisté à tout le moins au dernier transfert de drogue avec son père (il n'était pas sûr pour les précédents ;
C-570). Il n'était pas en mesure de préciser le rôle exact de A______, ne l'avait jamais vu vendre de la drogue, mais présumait, en raison de leurs liens familiaux, que père et fils faisaient la même chose (C-408, C-569, C-579 et C-639 verso). Ils étaient les chefs (C-609).

Lorsqu'il a été confronté à E______ et A______, F______ s'est montré extrêmement mal à l'aise, renvoyant la plupart du temps à ce qu'il avait dit la veille à la police, sans toutefois vouloir le répéter (cf. C-432), indiquant à plusieurs reprises avoir peur de E______ (cf. C-643). Il a néanmoins confirmé devant eux ses précédentes déclarations.

m. Entendu en janvier 2021, E______ a expliqué être arrivé d'Allemagne en train fin septembre-début octobre 2020 et avoir logé depuis lors dans l'hôtel de J______, travaillant de temps à autre au noir dans la construction (étant précisé que le 18 décembre 2020, il avait affirmé ne pas pouvoir travailler en raison d'un accident survenu plusieurs années auparavant et vivre d'une petite entreprise qu'il possédait en Albanie ; cf. C-975 verso). Il était déjà venu en Suisse auparavant, pays qu'il avait quitté en janvier 2020, pour y revenir en mars ou avril dans le but de trouver un avocat pour son fils A______ (C-454 et C-455).

Il avait été arrêté par les autorités zurichoises le 14 novembre 2020 et une injonction de quitter la Suisse au plus tard le 18 novembre 2020 lui avait été signifiée à cette occasion (C-421 et C-452). Il n'avait toutefois pas pu y donner suite, car les frontières étaient fermées en raison du coronavirus et l'ami qui devait venir le chercher n'avait pu passer la frontière ; il n'avait par ailleurs pas d'argent et était tombé malade, un refroidissement l'empêchant de quitter sa chambre depuis trois semaines (C-422 et C-456).

Dans un premier temps, E______ a affirmé ne pas connaître F______ et n'avoir jamais participé à un quelconque trafic de drogue (C-430, C-431, C-434 et C-452). Par la suite, confronté au fait que le numéro de téléphone de F______ était enregistré dans son appareil et qu'ils avaient des contacts à tout le moins depuis mai 2020, il a admis qu'il était possible qu'il le connaisse depuis cette époque, alors qu'il se trouvait en Suisse pour son fils, et qu'il lui ait téléphoné car il avait besoin de sa voiture et de ses services pour trouver un avocat (C-459-460).

Lors de son deuxième interrogatoire par la police saint-galloise, le 23 février 2021, il a déclaré vouloir dire toute la vérité. Lui-même et F______ avaient été approchés, en août ou septembre 2020, par un dénommé "Q______", qui leur avait proposé de gagner de l'argent grâce à la drogue. Fin septembre, "Q______" avait remis à F______ un bocal contenant 10 à 20 grammes de cocaïne et lui-même s'était engagé à payer la marchandise si F______ ne le faisait pas. Entre octobre et décembre 2020, "Q______" avait amené à plusieurs reprises de la cocaïne, mais lui-même n'avait participé à aucun trafic et n'avait pas perçu d'argent (C-468). Les balances retrouvées dans sa chambre appartenaient à "Q______", de même que le bocal (C-471).

Le 14 juillet 2020, il avait envoyé à son fils O______ (ndr : le vrai) le nouveau numéro de téléphone de N______, afin qu'il le transmette à A______ (C-516). Il voulait en effet que N______ envoie CHF 200.- à ce dernier. N______ ayant refusé, il avait dû envoyer l'argent lui-même (C-505).

Il a persisté à affirmer que son fils n'avait rien à voir avec le trafic de drogue (C-503) et ne pouvait se prononcer sur les messages que ce dernier avait échangés avec F______, notamment en août 2020 (cf. C-506ss, infra let. n.b.).

n.a. Il ressort de l'analyse des téléphones et des données rétroactives que A______ se trouvait en Suisse à tout le moins depuis le 21 novembre 2020, date à laquelle son téléphone avait activé une borne en Suisse (C-411).

L'arrestation de N______ excluant que les messages échangés via le téléphone M______ saisi – soit notamment celui, envoyé à différents contacts le 2 décembre 2020, dont la teneur est la suivante : "Ich bin ein Freund Ihres Freundes, um etwas Gutes zu geben, ich bin ein Freund dieses Albaners" (C-549) – puissent lui être imputés, la police a estimé vraisemblable que A______ en soit l'auteur (C-411).

n.b. A______ et F______ étaient en contact étroit à tout le moins depuis le mois de mai 2020 (C-410 et C-606ss). Entre le 17 juillet et le 2 décembre 2020, ils ont notamment échangé sur la fixation de rendez-vous en Suisse, des personnes à rencontrer, du travail à exécuter, le premier donnant diverses instructions au second sur ce qu'il devait faire – y compris effacer certains numéros – et où il devait se rendre. F______ ayant également évoqué à plusieurs reprises ses activités avec E______, A______ lui a recommandé, également à plusieurs reprises, de rester calme ("bleib ruhig") et fait mention, à une reprise, que son père était un peu fâché mais qu'il ne fallait pas que son interlocuteur se fasse du souci (cf. C-519).

Le 8 novembre 2020, A______ a demandé à F______: "wen ich bis Deutschland komme kannst du mich abholen" "weil ich werde in den nächsten Tagen los gehen" (C-526).

Le 15 novembre 2020, A______ a demandé à F______ de se rendre dans la chambre de son père : "Es soll niemand ausser dir ins Zimmer gehen", "Nimm die Sachen und sag mir wie viel es noch hat und für die anderen", "Weil ich werde selbst bis nach Deutschland kommen" (C-529). Il a ensuite ajouté : "Sammle auch seine Kleider", "Und schaue gut im Zimmer", "Schau auch dort, wo ich dir gesagt habe" (C-530).

Le 17 novembre 2020, A______ a écrit à F______: "Er hat das andere versteckt", "Dort wo ich dir gesagt habe", "Weil er hat noch 300 andere denke ich", puis encore "hast du nur das oder auch das was die anderen nehmen" (C-531), ce à quoi F______ répond : "diese 60", "30 habe ich gestern Abend verkauft". La suite de la conversation se déroule de la manière suivante : A______ : "hast du nur den Alten oder auch andere" "Sag ich"; F______ : "Heute ist er auch gekommen und die 10 die ich hatte habe ich gegeben" "Die 10 die ich hatte mir der alte gegeben" ; A______: "O F______, hast du nur diesen Klient und keinen anderen" ; F______: "Habe nur ihm", "Der eine schuldet mir 700 Fr. er muss es bringen", "Dein Vater hat ihm gegeben" ; A______: "Ok", "Macht nichts nimm es", "Ich will sagen" ; F______: "Rede" ; A______: "Wir nehmen das was noch versteckt ist und holen dann das andere verstehst du"; F______: "Ich verstehe", "Besser wen du auch hier kommst"; A______: "Ich komme nicht", "Ich kann nichts machen", "Ich bin Eingesperrt"; F______: "Bis nach Deutschland" ; A______: "Ja" ; F______: " V______ [Allemagne]", "Dan nehme ich dich rüber", "Ohne Problem"; A______: "Es ist zu" ; F______ : "Ich bringe dich in die Schweiz" ; A______: "Wen du zum Abendessen dort gehst nimm mich mit ich zeige dir dann wo es ist" ; F______: "Kannst du in Italien kommen" ; A______ : "Nein" "Das was du hast sollst du weg bringen ich bringe einen Jungen" "Wir bringen zuerst das weg" "Verstehst du" ; F______: "OK" "Ich möchte nicht viel mischen" "Ohne das du oder dein Vater hier sind" ; A______: "OK F______ wir reden", "Du kommst auch deinen über", "Bis ich den Jungen bringe", "Wen du Leute hast die es nehmen verstehst du" ; F______: "Wann kommt der Junge"; A______: "Zuerst bringen wir das weg" ; F______: "Ich bringe es weg"; A______ : "Bring du das weg dann schaue ich was mit den Grenzen ist", "Weil die haben gestern 10 Autos zurückgeschickt" ; F______: "Durch Italien kannst du nicht durch"; A______: "Nein" ; F______: "Ok, Soll ich die Papiere dem Freund in K______ den ihr habt übergeben" ; A______: "Ich sage es dir bis dann"; F______: "Ich habe jetzt 1650 fr."; A______: "Ok" ; F______: " Plus 10 heute Abend ich nehme 550 Fr."; [...] ; F______: "Ich habe Angst", "Das sie ihm das Handy weggenommen haben"; A______ : Oke Vater ist zuhause angekommen", [ ] "Ich habe ihm auch wegen dem gesagt was du weggebracht hat".

Leur conversation se poursuit plus tard dans la soirée (C-538) : A______ : "Hast du den Alten getroffen", puis le lendemain : A______: "F______, hast du geredet" ; F______: "Habe mit einigen Leute geredet sie haben mir gesagt geht nicht", "Ich warte noch auf einen bis er sich meldet"; A______: "Ok", "Sag ihm ich will Ungarn überqueren", "Weil ich kann nicht zu dir kommen sag ihm nein"; F______: "oke, es ist nicht meine Firma"; A______: "Ich weiss F______ ich weiss"; "Hoffentlich kommst du gut an", "Wie weit ist W______ [Allemagne] von dir"; F______: "3 oder 4 Stunden, vielleicht noch mehr"; A______: "Weil er wird mich dort lassen", "Wen wir Morgen los gehen", "Ich gehe sonst selber mit dem Zug bis nach X______ [Allemagne]"; F______: "Morgen bin weit am Arbeiten", "Komm bis nach V______ [Allemagne]".

Le 20 novembre 2020 dans la soirée, A______, qui explique se trouver en Hongrie et arriver quelques heures plus tard à Vienne, demande à F______ de venir le chercher à sa sortie du train, tous deux convenant d'un rendez-vous le lendemain à U______ [Autriche] (cf. C-542 et C-543).

Le 2 décembre 2020, A______ indique à F______: "Habe ein paar Nummern genommen aber ich muss mit denen Reden", "Ich muss es probieren" (C-548).

n.c. Interrogé par la police sur ces échanges, F______ n'a, dans un premier temps, fourni aucune explication, notamment sur la signification de l'injonction du 15 novembre 2020 de prendre les affaires se trouvant dans la chambre, se bornant à affirmer qu'il ne s'agissait pas de drogue, qu'il ne se rappelait pas ce qu'il y avait en plus des habits et qu'il avait exécuté les instructions sans poser de questions (C-607). Il ne se rappelait pas davantage ce qui avait pu être caché et à quel endroit, le chiffre de 300 articulé le 17 novembre 2020 pouvant se rapporter à de la drogue, ou pas. Par la suite, il a admis que leur conversation se rapportait bien à la drogue que lui-même devait vendre (C-609). S'agissant des "300" qu'il devait chercher, A______ lui avait dit que de la drogue – 300 grammes de cocaïne – et de l'argent étaient cachés (C-640, C-640 verso, C-642-verso) dans la chambre (C-639 verso). Les chiffres de 60-30 étaient susceptibles de concerner de la drogue, la vente de la veille étant celle faite à l'agent infiltré (C-608). Le chiffre 10 correspondait à dix grammes de cocaïne restitués à E______ (C-608). C'était lui qui était allé chercher A______ à la gare pour l'amener à J______ (C-611). Chaque fois qu'il vendait de la drogue, il se rendait ensuite directement à J______ pour restituer l'argent à E______ (C-642 verso).

o. Selon l'agent infiltré, F______ lui a dit être actif dans le trafic de drogue depuis une dizaine d'années (C-364, C-368 et C-568), responsable du trafic de cocaïne pour le canton de Saint-Gall, se fournir auprès d'un Albanais et être en mesure de proposer de la "brune" ("Braunes" – C-368), ce à la demande de E______, qu'il avait rencontré entre mai et juillet 2020 à J______ (C-568).

p. A______ a persisté à se présenter comme étant O______ jusqu'à sa troisième audition, le 26 janvier 2021. Dans un premier temps, il a affirmé n'être arrivé en Suisse qu'une dizaine de jours avant son arrestation, pour chercher son père, malade, après avoir transité par la Serbie, la Hongrie, l'Autriche et l'Allemagne, où il était demeuré jusqu'en décembre pour chercher du travail (C-433). Il ne savait rien d'un trafic de cocaïne et ignorait même à quoi elle ressemblait (C-438). Il n'avait d'ailleurs reconnu à l'époque, à Zürich, une participation à un trafic de drogue que sur les conseils de son avocat (C-408). Les objets retrouvés dans sa chambre ne lui appartenaient pas (C-408). La présence de cocaïne et de caféine sur ses mains pouvait s'expliquer par la manipulation de billets de banque contaminés (C-408). Il ne connaissait F______ que de vue, pour l'avoir rencontré à l'hôtel par l'entremise de son père. Ils n'étaient pas amis et n'avaient discuté que d'Albanie et de choses de ce genre (C-408).

Ce n'est que le 24 février 2021, lors de sa quatrième audition, qu'il a reconnu que le numéro de téléphone albanais avec lequel des échanges WhatsApp étaient intervenus avec F______ était le sien, mais il a refusé de répondre à toutes les questions qui lui étaient posées à propos de ceux-ci (C-408). La police saint-galloise l'a qualifié de peu coopératif (C-407).

Au MP, A______ a confirmé les déclarations faites à Saint-Gall et déclaré n'avoir rien à ajouter, car "il n'avait rien à voir avec cette affaire" (C-1'022). Il était arrivé le 21 novembre 2020 en Suisse pour voir son père malade, mais avait immédiatement quitté le pays pour aller travailler en Allemagne, où il était resté jusqu'au 10 ou 12 décembre. S'agissant de ses échanges avec F______, il a expliqué que ce qu'il attendait de recevoir et la mauvaise humeur de son père, sujets évoqués dans son échange du 17 juillet 2020, concernaient ses affaires en Albanie et qu'il n'avait pas de raison d'en parler (C-1'024). Les affaires ("Sachen") évoquées dans leur échange du 18 novembre 2020 se référaient aux vêtements de son père restés dans la chambre ; les "300" était de l'argent caché par son père, qui ne pouvait pas le garder sur lui
(C-1'024). Il ne savait pas ce que vendait F______, ni ce à quoi il faisait référence en parlant de "diese 60", "30", "1'650" et "550". Il ne savait pas de quoi ils parlaient ensemble, mais ce n'était pas de cocaïne (C-1025). Le fait que, le soir en question, F______ avait vendu de la cocaïne à un agent infiltré, était pure coïncidence
(C-1'026). Lorsqu'il avait dit, le 17 novembre 2020, être coincé ("eingesperrt"), il voulait dire que les frontières allemandes étaient fermées, de sorte qu'il ne pouvait se rendre dans ce pays (C-1'026). "Jungen" le désignait ; il parlait de lui-même à la troisième personne car il utilisait le passeport de son frère (C-1'026). F______ devait lui remettre les vêtements de son père, dont il ignorait à cette date qu'il avait été libéré. Il ne l'avait en effet appris qu'à minuit, par un appel de sa famille, et avait demandé à F______ de ramener les habits à l'hôtel.

N______ était un ami de la famille. Les envois de CHF 200.- respectivement les 23 juillet et 6 août 2020 correspondaient à des prêts que ce dernier lui avait consentis (C-1'028). Il ignorait qui était D______. Le 31 janvier 2020, un Albanais l'avait appelé pour lui proposer un transport de haschich de Saint-Gall à S______ [TI]. Lorsqu'il s'était rendu à Saint-Gall, il avait toutefois constaté que les paquets ne contenaient pas du haschich mais de l'héroïne et avait refusé d'effectuer le transport. Son ADN s'était retrouvé sur les couches intérieures des pucks et l'ouverture des sachets minigrips car il les avait déballés pour voir ce qu'ils contenaient, ne connaissant rien à la drogue. Il avait accepté de participer à un trafic d'héroïne une semaine plus tard car il s'agissait de petites quantités et qu'il n'avait plus d'argent. Par ailleurs, il l'avait juste transportée (C-1'028). Il était revenu en Suisse malgré l'expulsion dont il faisait l'objet pour des raisons financières, avait besoin d'argent et était mal payé en Allemagne.

Il avait fait la connaissance de F______ après sa sortie de prison, un ami lui ayant demandé de lui transmettre un message. Au début, ils se contentaient de s'envoyer des messages, discutant notamment de ce que lui-même faisait en Albanie. À cette époque, F______ avait fait la connaissance de son père, qui travaillait en Suisse. Lui-même ne l'avait en revanche rencontré que deux fois, le 21 novembre 2020, lorsque F______ était venu le chercher à U______ [Autriche], et le 5 décembre 2020. Il ne lui avait jamais donné de drogue.

Il était revenu en Suisse, malgré l'expulsion dont il faisait l'objet, car son père était sorti de prison, à Zürich, et avait été malade pendant un mois. Il voulait par ailleurs travailler. Il était resté dans le logement de J______ durant deux à trois jours, puis était allé en Allemagne, où il était demeuré environ une semaine, avant de revenir à J______, où il avait séjourné jusqu'à son interpellation.

C. a. Devant la CPAR, A______ a persisté à nier toute participation au trafic d'héroïne, se référant aux explications déjà fournies. Il ne pouvait donner le nom de l'Albanais qui l'avait approché, car il craignait les représailles dans ce pays. Il aurait dû prendre en charge la drogue à la nuit tombée, vers 18h ou 19h.

En ce qui concernait le trafic de cocaïne, il ne pouvait prouver son arrivée en Suisse le 21 novembre 2020, le passeport avec lequel il s'était légitimé auprès de la police ayant été rendu à son frère (cf. C-767), qui ne l'avait plus.

Après son arrivée en Suisse, il avait logé sans interruption à l'hôtel de J______, à l'exception d'un séjour de deux ou trois jours maximum en Allemagne, où il s'était rendu en train, pensant y trouver du travail, sans succès, ce qui l'avait poussé à revenir en Suisse.

Il ne se trouvait pas en Allemagne, le 8 novembre 2020, mais avait demandé à F______ de venir l'y chercher, au cas où il devrait s'y trouver.

Lorsque, le 15 novembre 2020, il avait demandé à F______ qu'il n'y ait personne d'autre dans la chambre, de prendre les "choses", de lui dire combien il y en avait et, pour le reste, "car je viendrai tout seul jusqu'en Allemagne", il se référait aux affaires de son père, dont il avait appris qu'il se trouvait en prison. Il avait demandé à F______ de bien regarder, car son père possédait également CHF 300.- ou CHF 400.-. Il se référait également à de l'argent, le 17 novembre 2020, lorsqu'il avait dit au précité : "il a caché l'autre là où je t'ai dit, il doit y en avoir encore 300 je pense". Il ne réconciliait pas ces indications avec ce que lui répondait son interlocuteur, qui lui expliquait avoir vendu "60", car il ignorait tout des affaires de F______ et ne se sentait pas concerné.

Il refusait de répondre à la question de savoir s'il admettait avoir participé à un trafic de cocaïne, à tout le moins après le 21 novembre 2020, et sur quelle quantité ce trafic avait porté.

À sa sortie de prison, il souhaitait poursuivre ses études et retrouver sa famille.

b. Par la voix de son conseil, A______ a persisté dans ses conclusions.

Aucun élément du dossier ne permettait d'établir sa culpabilité au-delà de tout doute raisonnable.

En ce qui concernait le trafic d'héroïne, il avait expliqué de manière constante et crédible que les traces ADN découvertes sur les sachets transportés par D______ résultaient uniquement du fait qu'il les avait manipulés pour en examiner le contenu. Que D______ se soit arrêté brièvement à J______ était une pure coïncidence, lui-même ne s'étant rendu dans ce village qu'en novembre et décembre 2020. La décision du TCO violait la jurisprudence selon laquelle une seule preuve scientifique était insuffisante pour fonder une condamnation pénale.

S'agissant de la cocaïne, dans la mesure où il n'était arrivé en Suisse que le 21 novembre 2020, puis avait séjourné en Allemagne du 24 novembre au 4 décembre 2020, seule la transaction du 17 décembre 2020 pouvait lui être imputée. En effet, les messages échangés entre juillet et novembre 2020 ne permettaient pas d'affirmer qu'il s'agissait d'un trafic de drogue. Ses explications à ce propos (cf. C-1'024) n'avaient d'ailleurs pas varié et ses échanges avec F______ du 17 novembre 2020 ne démontraient pas qu'il avait orchestré les ventes, quelles qu'elles soient, alors qu'il ne se trouvait pas encore en Suisse. Son acquittement de tout trafic antérieur au 21 novembre 2020 devait donc être prononcé.

Vu son jeune âge et dans la mesure où il souhaitait, après sa libération, se rendre en Italie pour se marier et travailler, le signalement de son expulsion dans le SIS était disproportionné.

A______ a déposé des conclusions en indemnisation, réclamant une somme de CHF 22'400.- pour la détention injustifiée du 16 décembre 2021 au 7 avril 2022, soit 112 jours, et de CHF 10'000.- à titre de réparation du tort moral subi en raison des conséquences de son incarcération sur sa santé physique et psychique et de l'atteinte portée à son honneur.

c. Le MP a conclu au rejet de l'appel.

Même si le rôle de A______ dans le trafic d'héroïne n'avait pas été déterminé avec exactitude, les traces ADN à l'intérieur des sachets démontraient qu'il avait participé à leur conditionnement, conclusion qui était renforcée par le fait qu'à la même époque, il vendait de l'héroïne à Zürich.

Le trafic de cocaïne était établi, le taux de pureté de celle-ci élevé et la drogue coupée avec un produit la rendant particulièrement dangereuse. F______ s'était arrêté à de nombreuses reprises à l'hôtel à J______. Certes, on n'y avait pas retrouvé de drogue, laquelle avait vraisemblablement été déplacée, mais il était manifeste qu'elle transitait par la chambre occupée par A______, ce que le père de ce dernier avait admis. A______ avait par ailleurs des traces de cocaïne sur les mains et son appel à F______ après l'arrestation de son père témoignait du fait qu'il jouait un rôle majeur dans le trafic. F______ avait d'ailleurs admis qu'ils parlaient de drogue. L'implication de A______ dans le trafic était ainsi établie, peu importe qu'il ait agi depuis l'étranger.

La peine infligée était par ailleurs conforme aux principes applicables, l'expulsion obligatoire et l'inscription au SIS justifiée par le fait que l'appelant n'avait aucun lien concret avec un autre pays que l'Albanie, l'évocation d'une fiancée en Italie demeurant trop vague pour être prise en considération.

D. A______ est né le ______ 1997 en Albanie. Sa mère, son frère et sa sœur vivent dans ce pays.

Il a, tour à tour, déclaré travailler en Albanie comme ingénieur pour un revenu de CHF 400.- par mois (C-441), avoir une fiancée en Italie, avoir étudié l'architecture en Albanie durant deux ans, puis travaillé comme serveur et pizzaiolo.

À la prison de B______, il travaille au service d'étage et sa détention se déroule sans problème.

Il n'a pas d'antécédents connus à l'étranger et son casier judiciaire suisse est vierge, sous réserve de la condamnation prononcée par le Bezirksgericht de Zürich le 8 juin 2020.

E. Me C______, défenseur d'office de A______, a déposé un état de frais pour la procédure d'appel, d'un montant total de CHF 4'593.33, majoré d'un forfait de 20% pour la correspondance et les téléphones, hors TVA, correspondant à 15h30 d'activité au tarif horaire de chef d'étude (trois entretiens de 1h30 avec le client, 8h30 pour l'étude du dossier et la préparation de l'audience, 3h pour la durée estimée de celle-ci – laquelle a duré 1h55 – et une vacation) et à 12h40 d'activité au tarif horaire de stagiaire (7h10 d'étude de dossier et de préparation d'audience, 5h d'audience, y compris 2h pour celle devant le TCO, et une vacation).

En première instance, il a été indemnisé à hauteur de 39 heures 30 d'activité.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, il signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé et non à ce dernier de démontrer son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 40 et les arrêts cités).

Comme principe présidant à l'appréciation des preuves, la présomption d'innocence est violée si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 40). Il dispose à cet égard d'un large pouvoir dans l'appréciation (ATF 120 Ia 31 consid. 4b). L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble et l'état de fait déduit du rapprochement de divers éléments ou indices. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_623/2012 du 6 février 2013 consid. 2.1 et 6B_642/2012 du 22 janvier 2013 consid. 1.1).

2.2. L'art. 19 al. 1 LStup punit notamment celui qui, sans droit, aliène ou prescrit des stupéfiants, en procure de toute autre manière à un tiers ou en met dans le commerce (let. c), possède, détient ou acquiert des stupéfiants ou s'en procure de toute autre manière (let. d).

La possession mentionnée à l'art. 19 al. 1 let. d LStup n'est pas un état, mais un comportement causal, à savoir le fait de créer ou maintenir la situation illégale. Cette disposition vise tous les cas où l'on ne peut pas déterminer dans quelles circonstances et par qui la drogue a été acquise, mais où l'on a constaté que l'auteur avait la possibilité réelle d'y accéder et la connaissance du lieu où elle se trouvait (ATF
119 IV 266 consid. 3c p. 269).

Les actes visés par l'art. 19 ch. 1 LStup constituent des infractions indépendantes et achevées punissables comme telles (ATF 137 IV 33 consid. 2.1.3 p. 39).

L'on se trouve en présence d'un cas grave lorsque l'auteur sait ou ne pouvait ignorer que l'infraction pouvait, directement ou indirectement, mettre en danger la santé de nombreuses personnes (art. 19 al. 2 let. a Stup), ce qui est notamment le cas lorsque la quantité de drogue pure est de plus de 12 grammes pour l'héroïne et de 18 grammes pour la cocaïne (ATF 122 IV 299 consid. 2a et 2b p. 301).

2.3.1. En l'espèce, l'appelant soutient que les preuves sont insuffisantes pour établir sa participation au trafic d'héroïne dans lequel D______ était impliqué.

Certes, le fait que celui-ci se soit, sur sa route pour Genève, arrêté quelques minutes à J______, ne signifie pas que l'appelant s'y trouvait au même moment. Il n'en demeure pas moins que ce village était manifestement au cœur d'un trafic de drogue organisé par le père de l'appelant, dont il ressort du dossier qu'il s'étendait aussi à l'héroïne. Les éléments recueillis à la suite de l'arrestation de l'appelant, le 17 décembre 2020, démontrent par ailleurs que père et fils étaient proches et travaillaient de concert (cf. infra ch. 2.3.2.). L'appelant a admis avoir manipulé les pucks de cocaïne après avoir, selon ses propres dires, accepté d'effectuer un transport de drogue sur appel d'un compatriote. Ses explications selon lesquelles il aurait ensuite refusé la mission en s'apercevant qu'il s'agissait d'héroïne, et non pas de haschich, n'emportent pas la conviction. Tout d'abord, l'appelant n'a pas expliqué ce qui aurait pu susciter ses soupçons quant à la substance qu'il devait acheminer. En outre, il a soutenu avec vigueur ne rien connaître à la drogue et ne pas même savoir à quoi celle-ci ressemblait. L'on ne voit donc pas ce qu'il aurait été en mesure de vérifier si le but de l'ouverture des pucks avait été de s'assurer de la nature de leur contenu. Il est par ailleurs hautement improbable qu'un commanditaire se montre disposé à laisser un transporteur inconnu et sans expérience ouvrir les pucks et les sachets minigrips pour s'assurer de la nature de la marchandise dont il allait se charger. La version de l'appelant laisse également sans réponse la question de savoir pourquoi le lieu de livraison qui lui aurait été indiqué (S______ [TI]) diffère de celui désigné à D______ (Genève), un changement de dernière minute de destinataire étant peu probable.

Le fait qu'une semaine plus tard, l'appelant se soit fait interpeller dans le cadre d'un trafic portant précisément sur de l'héroïne achève d'ôter toute crédibilité à ses explications.

La Chambre de céans partage dès lors l'avis du TCO, selon lequel seul un conditionnement de la drogue par l'appelant permet d'expliquer la présence de son ADN sur les pucks transportés par D______.

La culpabilité de l'appelant du chef d'infraction à l'art. 19 al. 1 let. d et al. 2 let. a LStup sera ainsi confirmée sur ce point.

2.3.2. L'appelant nie également son implication dans le trafic de cocaïne avant le 21 novembre 2020.

Il est vrai que rien n'indique qu'il se soit trouvé en Suisse avant cette date.

Ce nonobstant, dès son retour en Albanie, en juillet 2020, il a eu des contacts soutenus avec plusieurs personnes notoirement actives dans ce domaine, soit son père, F______ et N______, présenté comme un ami de la famille. Les explications qu'il a fournies à ce sujet sont demeurées vagues et divergent de celles avancées par les autres protagonistes ou encore des pièces produites, de sorte qu'elles sont dénuées de toute crédibilité.

En particulier, il a affirmé dans un premier temps ne connaître F______ que de vue, pour l'avoir rencontré dans l'hôtel de J______ par l'entremise de son père, et ce n'est que lors de sa quatrième audition, le 24 février 2021, confronté à des preuves matérielles, qu'il a admis avoir été en contact téléphonique avec lui depuis le mois de juillet 2020.

Il a refusé de répondre à la plupart des questions qui lui étaient posées en lien avec ces échanges, alléguant qu'il s'agissait de ses affaires en Albanie et qu'il n'avait pas de raison d'en parler. Or, le contenu de ces conversations démontre qu'elles ne concernent pas des activités à l'étranger, mais en Suisse et qu'il donne dans ce contexte des instructions à F______, lequel a confirmé qu'il s'agissait de trafic de drogue, quand bien même ce mot n'y est pas évoqué.

Entre mars et septembre 2020, il a reçu une somme d'argent importante – si l'on se réfère au salaire mensuel de CHF 400.- qu'il a déclaré réaliser dans son pays – de trois personnes ayant logé dans l'hôtel de J______, dont deux qui ont été arrêtées ultérieurement pour trafic de cocaïne, sans que ses explications au sujet de prétendus prêts accordés emportent la conviction, ne serait-ce que parce qu'elles diffèrent de celles fournies par E______.

Il y a dès lors lieu de considérer, au vu de ces éléments, qu'à tout le moins dès sa sortie de prison, en juillet 2020, il était impliqué à un échelon organisationnel dans le trafic de drogue au sein duquel son père était également actif.

Ce constat est renforcé par le fait qu'aussitôt l'arrestation de E______ connue, l'appelant s'est immédiatement mis en route pour J______, à l'évidence non pas pour se rendre au chevet de son père malade – aucun signe en ce sens ne ressort du dossier d'arrestation – mais pour prendre les choses en main en l'absence de ce dernier et donner les instructions qui s'imposaient. Au vu des circonstances, les messages Whatsapp qui ont suivi ne peuvent en effet être interprétés que comme la crainte des conséquences d'une arrestation en lien avec le trafic de cocaïne en cours et la volonté de soustraire à une éventuelle enquête toute trace compromettante. La concordance entre la date des transactions opérées par F______ avec l'agent infiltré et les chiffres communiqués par ce dernier à l'appelant ne laissent pas non plus place au doute sur le fait que le premier rendait des comptes au second quant aux ventes de cocaïne et au chiffre d'affaires réalisé (cf. échanges du 17 novembre 2020 en particulier). L'on ne peut enfin guère manquer de faire le lien entre le message du 2 décembre 2020 envoyé par l'appelant à F______ (cf. supra let. n.b. : "Habe ein paar Nummern genommen aber ich muss mit denen Reden", "Ich muss es probieren") et ceux adressés le même jour à différents contacts depuis le téléphone de marque M______ ("Ich bin ein Freund Ihres Freundes, um etwas Gutes zu geben, ich bin ein Freund dieses Albaners"), dont tout porte à croire qu'il était utilisé par l'appelant, alors que son absence de Suisse entre le 21 novembre et le 17 décembre 2020 n'est pas démontrée, ni même rendue vraisemblable.

Pour ces motifs, la Chambre de céans est convaincue, au-delà de tout doute possible et à l'instar du TCO, que l'appelant s'est associé pleinement à toutes les activités liées au trafic de cocaïne dirigé par son père et que, partant, les agissements décrits dans l'acte d'accusation peuvent lui être imputés à titre de coauteur, peu importe que lui-même se soit ou non trouvé physiquement sur le territoire suisse au moment où ils ont été exécutés et qu'il n'ait pas remis personnellement la drogue au vendeur (cf. ATF 137 IV 33 consid. 2.1.3 p. 39).

Au vu des quantités en jeu, le cas grave de l'art. 19 al. 2 let. a LStup est réalisé.

L'appel sera donc aussi rejeté sur ce point.

3. 3.1.1. L'art. 19 al. 1 LStup punit d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire les comportements notamment décrits aux let. c et d de cette même disposition.

La peine privative de liberté est d'un an au moins, cette sanction pouvant être cumulée avec une peine pécuniaire, en présence du cas grave prévu par l'art. 19 al. 2 let. a Stup.

3.1.2. À teneur de l'art. 291 al. 1 CP, celui qui aura contrevenu à une décision d'expulsion du territoire de la Confédération ou d'un canton prononcée par une autorité compétente sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

3.2. Le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge. Le critère essentiel est celui de la faute. Ainsi, même si le juge doit éviter les sanctions qui pourraient détourner l'intéressé de l'évolution souhaitable (ATF 128 IV 73 consid. 4 p. 79 ;
127 IV 97 consid. 3 p. 101), cet aspect de prévention spéciale ne permet que des corrections marginales, la peine devant toujours rester proportionnée à la faute (arrêt du Tribunal fédéral 6B_362/2008 du 14 juillet 2008 consid. 3.2).

En matière de trafic de stupéfiants, il y a lieu de tenir compte, plus spécialement, des circonstances suivantes : même si la quantité de drogue ne joue pas un rôle prépondérant, elle constitue sans conteste un élément important. Elle perd cependant de l'importance au fur et à mesure que l'on s'éloigne de la limite à partir de laquelle le cas doit être considéré comme grave au sens de l'art. 19 ch. 2 let. a LStup. Le type de drogue et sa pureté doivent aussi être pris en considération. Si l'auteur sait que la drogue est particulièrement pure, sa culpabilité sera plus grande ; en revanche, sa culpabilité sera moindre s'il sait qu'elle est diluée plus que normalement (ATF
122 IV 299 consid. 2c p. 301 ; 121 IV 193 consid. 2b/aa p. 196). Le type et la nature du trafic en cause sont aussi déterminants. L'appréciation est différente selon que l'auteur a agi de manière autonome ou comme membre d'une organisation. Dans ce dernier cas, il importera de déterminer la nature de sa participation et sa position au sein de l'organisation : un simple passeur sera ainsi moins coupable que celui qui joue un rôle décisif dans la mise sur pied des opérations et qui participe de manière importante au bénéfice illicite (ATF 121 IV 202 consid. 2d/cc p. 206). L'étendue du trafic entrera également en considération. Un trafic purement local sera en règle générale considéré comme moins grave qu'un trafic avec des ramifications internationales. Le délinquant qui traverse les frontières (qui sont surveillées) doit en effet déployer une énergie criminelle plus grande que celui qui transporte des drogues à l'intérieur du pays et qui limite son risque à une arrestation fortuite lors d'un contrôle ; à cela s'ajoute que l'importation en Suisse de drogues a des répercussions plus graves que le seul transport à l'intérieur des frontières. Enfin, le nombre d'opérations constitue un indice pour mesurer l'intensité du comportement délictueux ; celui qui écoule une fois un kilo d'héroïne sera en principe moins sévèrement puni que celui qui vend cent grammes à dix reprises. Outre les éléments qui portent sur l'acte lui-même, le juge doit prendre en considération la situation personnelle du délinquant. Les mobiles, c'est-à-dire les raisons qui ont poussé l'auteur à agir, ont aussi une influence sur la détermination de la peine. Il conviendra ainsi de distinguer le cas de l'auteur qui est lui-même toxicomane et qui agit pour financer sa propre consommation de celui qui participe à un trafic uniquement poussé par l'appât du gain (ATF 122 IV 299 consid. 2b p. 301).

Bien que la récidive ne constitue plus un motif d'aggravation obligatoire de la peine (art. 67 aCP), les antécédents continuent en outre de jouer un rôle très important dans la fixation de celle-ci (M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER [éds], Basler Kommentar Strafrecht I : Art. 1-110 StGB, Jugendstrafgesetz, 4ème éd., Bâle 2019, n. 130 ad art. 47 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1202/2014 du 14 avril 2016 consid. 3.5). En général, la culpabilité de l'auteur est amplifiée du fait qu'il n'a pas tenu compte de l'avertissement constitué par la précédente condamnation, et sa rechute témoigne d'une énergie criminelle accrue (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, n. 54 et 55 ad art. 47). Une série d'infractions semblables pèse par ailleurs plus lourd que des actes de nature différente (ATF 120 IV 136 consid. 3b p. 145).

3.3. D'après l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion, mais pas au-delà de la moitié en sus du maximum de la peine prévue pour cette infraction et pas au-delà du maximum légal du genre de peine.

Pour satisfaire à cette règle, le juge, dans un premier temps, fixera donc la peine pour l'infraction abstraitement la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes ou une éventuelle diminution de la responsabilité pénale. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner les autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 121 IV 101 consid. 2b ;
116 IV 300 consid. 2c/dd p. 305).

3.4. À teneur de l'art. 49 al. 2 CP, si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement (ATF 142 IV 329 consid. 1.4.1 p. 331 ; 142 IV 265 consid. 2.3.3 p. 268 ; 141 IV 61 consid. 6.1.2 p. 67 ; 138 IV 113 consid. 3.4.1 p. 115 et les références citées).

Concrètement, le juge doit se demander comment il aurait fixé la peine en cas de concours simultané, puis déduire de cette peine d'ensemble hypothétique la peine de base, soit celle qui a déjà été prononcée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_28/2008 du 10 avril 2008 consid. 3.3.1).

3.5. Si, durant le délai d'épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu'il y a dès lors lieu de prévoir qu'il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel. Si la peine révoquée et la nouvelle peine sont du même genre, il fixe une peine d'ensemble en appliquant par analogie l'art. 49 CP (art. 46 al.  1 CP).

Concrètement, le juge doit partir de la peine fixée pour l'infraction la plus grave qu'il prononce pour les actes commis pendant le délai d'épreuve en considération des facteurs d'appréciation de la peine de l'art. 47 CP. Cette peine forme la peine de base, qui peut être augmentée en vertu du principe d'aggravation (art. 49 CP) pour tenir compte de la peine antérieure. En d'autres termes, la nouvelle peine, comme peine de base, est augmentée pour tenir compte de la peine révoquée selon une application par analogie du principe d'aggravation. Si la peine de base et la peine à prononcer pour les nouvelles infractions constituent de leur côté des peines d'ensemble, le juge peut, pour fixer la peine complémentaire, tenir compte de façon modérée de l'effet déjà produit de l'application du principe de l'aggravation lors de la fixation de ces peines d'ensemble (ATF 145 IV 146 consid. 2.4 p. 152 s.).

3.6. Dans le cas présent, le type et les quantités de drogue en cause, que ce soit l'héroïne ou la cocaïne, étaient de nature à mettre en danger la santé de très nombreuses personnes, ce que l'appelant ne pouvait ignorer.

Loin de s'amender après sa libération, l'appelant s'est aussitôt réimpliqué dans le trafic de drogue développé par son père en Suisse, que ce soit depuis l'étranger ou en revenant à J______.

La diversité de ses tâches (contacts soutenus avec les membres du réseau sur le terrain, instructions données, réception d'argent, recherche de clientèle) témoigne de sa place privilégiée dans le réseau, de même que le fait qu'il ait été immédiatement fait appel à lui lorsque son père a été arrêté. Qu'il n'ait pas hésité à revenir – sous une fausse identité – pour gérer la situation, malgré l'interdiction de pénétrer le territoire Suisse dont il faisait l'objet et les difficultés liées à la fermeture des frontières en raison de la pandémie, témoigne de l'intensité de sa volonté délictuelle.

Il a agi par pur appât du gain et sa faute doit être considérée comme importante.

Il a un antécédent récent et spécifique.

Il y a concours d'infractions.

Sa collaboration à la procédure ne peut qu'être qualifiée de mauvaise, dans la mesure où il a persisté à nier toute implication dans les faits reprochés et a refusé de répondre – ou répondu de manière plus qu'évasive – à la plupart des questions qui lui ont été posées.

Il n'a exprimé aucun regret et sa prise de conscience paraît nulle.

Pour sanctionner les infractions à la LStup et la rupture de ban, seules des peines privatives de liberté peuvent être envisagées.

Les peines à prononcer étant de même genre, l'art. 49 CP relatif au concours trouve application.

L'on peut considérer que, si la CPAR avait eu à juger tant l'infraction en lien avec le trafic d'héroïne pour laquelle l'appelant a été déclaré coupable dans la présente procédure, que les faits que le Bezirksgericht de Zürich a jugés, elle aurait fixé la peine privative de liberté globale minimale à 36 mois, tenant compte des principes relatifs au concours exposés aux chiffres 3.3. et 3.4. supra.

La peine privative de liberté complémentaire aurait ainsi été fixée à 22 mois.

Le trafic de cocaïne reproché à l'appelant porte sur des quantités de drogue moindre. Même si l'appelant n'a pas directement remis celles-ci à F______, il s'est cependant à l'évidence associé à tous les agissements de son père, dans le réseau au sein duquel il occupait manifestement une place prépondérante. Les éléments mis en lumière dans la présente procédure, de même que l'antécédent spécifique auraient justifié de fixer la peine théorique en lien avec ces faits à un minimum de 22 mois de peine privative de liberté, à aggraver de quatre mois (peine théorique : six mois) pour réprimer la rupture de ban.

La peine privative de liberté adéquate à ce stade serait donc de 26 mois pour ces faits.

La récidive intervenue moins de six mois après la libération de l'appelant et son absence totale de remise en question commandent, en outre, compte tenu du pronostic défavorable, de révoquer le sursis octroyé par le Bezirksgericht de Zürich.

C'est ainsi une peine privative de liberté d'ensemble de l'ordre de 60 mois qui aurait dû être prononcée, compte tenu du principe de l'aggravation. Toutefois, au vu de l'interdiction de la reformatio in pejus, la peine d'ensemble de 48 mois prononcée par le TCO sera confirmée.

4. 4.1. À teneur de l'art. 66a al. 1 let. o CP, le juge expulse de Suisse, pour une durée de cinq à quinze ans, l'étranger qui est condamné pour infraction à l'art. 19 al. 2 LStup.

Lorsqu'une personne contre qui une expulsion a été ordonnée commet une nouvelle infraction remplissant les conditions d'une expulsion au sens de l'art. 66a CP, une nouvelle expulsion est prononcée pour une durée de 20 ans (art. 66b al. 1 CP). L'expulsion peut être prononcée à vie si le nouvel acte a été commis alors que la première expulsion avait encore effet (art. 66b al. 2 CP).

Le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse. à cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse (art. 66a al. 2 CP).

La jurisprudence du Tribunal fédéral reconnaît, en matière de drogue, l'existence d'intérêts publics importants à l'expulsion, compte tenu en particulier des ravages qu'elle provoque dans la population, alors que la CourEDH admet pour sa part que les autorités sont fondées à faire preuve d'une grande fermeté à l'encontre des personnes qui contribuent à la propagation de ce fléau (cf. arrêts CourEDH K.M. c. Suisse du 2 juin 2015 [requête n° 6009/10], § 55 ; Dalia c. France du 19 février 1998, Recueil CourEDH 1998-I 76 § 54 ; aussi arrêts 6B_93/2021 du 6 octobre 2021 consid. 5.2 ; 6B_40/2021 du 29 septembre 2021 consid. 7.3).

4.2. Si le tribunal prononce une expulsion, il doit, s'agissant de ressortissants d'États tiers, obligatoirement aussi décider si l'expulsion doit être signalée dans le SIS, indépendamment d'une requête en ce sens du ministère public (art. 20 de l'ordonnance sur la partie nationale du Système d'Information Schengen (N-SIS) et sur le bureau SIRENE ; ATF 147 IV 340 ; 146 IV 172 consid. 3.3.4).

Selon le règlement SIS II (règlement CE n° 1987/2006), le signalement dans le SIS doit respecter le principe de la proportionnalité et suppose, entre autres, une menace pour l'ordre public et la sécurité publique fondée sur une évaluation individuelle ; c'est notamment le cas si la personne concernée a été condamnée dans un État membre pour une infraction passible d'une peine privative de liberté d'au moins un an (ATF 146 IV 172 consid. 3.2.2).

4.3. En l'espèce, l'expulsion de l'appelant, qui ne remet pas en cause son principe, sera confirmée dans la mesure où elle respecte les critères légaux de l'art. 66a CP. Compte tenu du fait que l'appelant a récidivé en commettant une infraction passible d'une expulsion obligatoire alors qu'il faisait déjà l'objet d'une mesure d'expulsion, celle-ci doit être prononcée pour une durée d'au minimum 20 ans.

Les infractions graves et répétées à la LStup pour lesquelles l'appelant a été condamné constituent à l'évidence une menace pour l'ordre et la sécurité publics, au sens du règlement CE susmentionné, ce d'autant que l'intéressé n'a exprimé aucun regret par rapport à la commission de celles-ci et que sa volonté de s'amender n'est dès lors pas garantie.

Les projets de travail et de famille dont l'appelant estime qu'ils seraient compromis par ce signalement ne sont par ailleurs pas étayés. De son propre aveu, toute la famille proche de l'appelant habite en Albanie. Lui-même n'a fourni aucun élément permettant de penser qu'il aurait développé, ces dernières années, une activité professionnelle légale en dehors de ce pays. L'existence d'une fiancée en Italie n'est pas davantage établie, fût-ce par des messages qu'elle aurait été susceptible de lui adresser durant sa détention. Au demeurant, même si l'appelant avait apporté des éléments témoignant de l'existence concrète de projets professionnels et familiaux dans l'espace Schengen, la réalisation de ceux-ci aurait été rendue hypothétique par l'inscription au SIS de l'expulsion prononcée par le Bezirksgericht de Zürich.

Dans ces circonstances, le principe de proportionnalité ne fait pas obstacle à l'extension de la mesure d'expulsion prononcée à l'ensemble de l'espace Schengen.

L'appel sera rejeté, sur ce point également.

5. Les motifs ayant conduit le TCO à prononcer, par ordonnance séparée, le maintien de l'appelant en détention pour des motifs de sûreté sont toujours d'actualité, ce que celui-ci ne conteste au demeurant pas, de sorte que la mesure sera reconduite mutatis mutandis (ATF 139 IV 277 consid. 2.2 à 2.3).

6. L'appelant, qui succombe, supportera les frais de la procédure envers l'État (art. 428 CPP).

Il sera, partant, débouté de ses prétentions en indemnisation.

Il n'y a pas lieu de revenir sur les frais de première instance, lesquels seront confirmés.

7. 7.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire de CHF 110.- pour l'avocat stagiaire (let. a) et de CHF 200.- pour le chef d'étude (let. c), débours de l'étude inclus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. REISER / B. CHAPPUIS (éds), Commentaire romand, Loi fédérale sur la libre circulation des avocats, Bâle 2010, n. 257 ad art. 12). Dans le cadre des mandats d'office, l'État n'indemnise ainsi que les démarches nécessaires à la bonne conduite de la procédure pour la partie qui jouit d'une défense d'office ou de l'assistance judiciaire. Il ne saurait être question d'indemniser toutes les démarches souhaitables ou envisageables. Le mandataire d'office doit en effet gérer son mandat conformément au principe d'économie de procédure (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.22 du 31 octobre 2013 consid. 5.2.3).

7.2.1. Le temps consacré à la consultation et à l'étude du dossier doit ainsi répondre à l'exigence de nécessité (ex. AARP/189/2016 du 28 avril 2016 consid. 6.3). D'autant plus de retenue s'imposera à cet égard que la constitution de l'avocat est ancienne, de sorte qu'il est censé bien connaître la cause et/ou que le dossier n'a pas connu de développements particuliers (AARP/187/2016 du 11 mai 2016 ; AARP/54/2016 du 25 janvier 2016 consid. 5.3 ; AARP/295/2015 du 12 juillet 2015 consid. 8.3.2.1).

7.2.2. Dans le cas des prévenus en détention provisoire, une visite par mois, d'une durée d'une heure 30, temps de déplacement inclus, est admise, indépendamment des besoins de la procédure, pour tenir compte de la situation particulière de la personne détenue (AARP/181/2017 du 30 mai 2017 consid. 8.2.2.2 et 8.3.5 ; AARP/235/2015 du 18 mai 2015 ; AARP/480/2014 du 29 octobre 2014).

7.2.3. Lorsque tant le maître de stage que le stagiaire assistent à l'audience, seule l'activité de l'un d'eux, soit celui étant concrètement intervenu, sera indemnisée, au taux réservé à son statut (AARP/504/2015 du 17 novembre 2015 consid. 7.2 ; AARP/262/2015 du 29 mai 2015 consid. 4.2.1 ; AARP/186/2015 du 2 avril 2015 consid. 10.2 ; AARP/146/2013 du 4 avril 2013).

7.2.4. Le temps de déplacement de l'avocat est considéré comme nécessaire pour la défense d'office au sens de l'art. 135 CPP (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2015.33 du 28 juillet 2015 consid. 4.3 et les références). La rémunération forfaitaire de la vacation aller/retour au et du Palais de justice ou au et du bâtiment du Ministère public est arrêtée à CHF 55.- pour les stagiaires, dite rémunération étant allouée d'office par la juridiction d'appel pour les débats devant elle.

7.2.5. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3).

7.3. En l'occurrence, il y a lieu d'admettre, au tarif de chef d'étude, les trois entretiens avec le client, dès lors que celui-ci était détenu. En revanche, la difficulté de la cause ne nécessitait pas qu'elle soit suivie par deux avocats. Dès lors que l'avocate stagiaire a assisté l'appelant lors de l'audience de première instance, lors de laquelle elle a plaidé en sa faveur, seule son activité, à l'exclusion de celle du chef d'étude, se justifie pour la procédure d'appel. À cet égard, au vu de la durée de sa plaidoirie – 15 minutes – et des arguments développés, la préparation de l'audience sera ramenée à cinq heures ; la durée de celle-ci, soit une heure 55, sera ajoutée, à l'exclusion de celle devant le TCO, laquelle a déjà été prise en considération par les premiers juges ; une vacation au tarif de CHF 55.- sera également prise en considération et le forfait de 10% appliqué, compte tenu de l'ampleur de l'activité déployée depuis le début de la procédure.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 2'032.80 TTC, correspondant à 4 heures 30 minutes d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 900.-), 6 heures 55 minutes d'activité au tarif de CHF 110.-/heure (CHF 760,85), une vacation à CHF 55.-, plus la majoration forfaitaire de 10% (CHF 171.60) et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% (CHF 145.35).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTCO/128/2021 rendu le 15 novembre 2021 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/3388/2020.

Le rejette.

Ordonne le maintien de A______ en détention pour des motifs de sûreté.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 2'305.-, qui comprennent un émolument de CHF 1'500.-.

Arrête à CHF 2'032.80, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me C______, défenseur d'office de A______.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

"Déclare A______ coupable de crime contre la loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19 al. 1 let. c et d et al. 2 let. a LStup) et de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP).

Révoque le sursis octroyé le 8 juin 2020 par le Bezirksgericht Zürich à la peine privative de liberté de 14 mois, sous déduction de 104 jours de détention avant jugement (art. 46 al. 1 CP).

Condamne A______ à une peine privative de liberté d'ensemble de 4 ans, sous déduction de 438 jours de détention avant jugement (334 et 104 jours de détention avant jugement) (art. 40 CP).

Dit que cette peine est partiellement complémentaire à celle prononcée le 8 juin 2020 par le Bezirksgericht Zürich (art. 49 al. 2 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de 20 ans (art. 66a al. 1 CP et 66b al. 1 CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) (art. 20 de l'ordonnance N-SIS ; RS 362.0).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de A______ (art. 231 al. 1 CPP).

Ordonne la confiscation et la destruction [du téléphone portable de la marque] Y______ blanc (IMEI 1______) figurant sous chiffre 1 de l'inventaire du 10 mai 2021 (art. 69 CP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 CPP).

Fixe à CHF 8'565.40 l'indemnité de procédure due à Me C______, défenseur d'office de A______ (art. 135 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 7'818.80, y compris un émolument de jugement de CHF 750.- (art. 426 al. 1 CPP)."

Notifie le présent arrêt à l'appelant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Le communique, pour information, au Tribunal correctionnel, au Service de l'application des peines et des mesures, à l'Office cantonal de la population et des migrations ainsi qu'à l'Office fédéral de la police.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

Le président :

Vincent FOURNIER

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal correctionnel :

CHF

7'568.80

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

640.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

90.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'305.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

9'873.80