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Décisions | Tribunal pénal

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P/4177/2023

JTCO/135/2023 du 14.12.2023 ( PENAL ) , JUGE

Normes : CP.111; LStup.19a; LEI.115
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL CORRECTIONNEL

Chambre 20


14 décembre 2023

 

MINISTÈRE PUBLIC

A______, partie plaignante, assisté de Me B______

contre

X______, né le ______1973, actuellement en exécution anticipée de mesure à la Prison de Champ-Dollon, prévenu, assisté de Me C______


CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public conclut à ce que X______ soit reconnu coupable de tentative de meurtre, de séjour illégal et de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants, à ce que la libération conditionnelle octroyée le 28 mars 2022 par le Tribunal d'application des peines et mesures soit révoquée, à ce que le prévenu soit condamné à une peine privative de liberté de 5 ans, sous déduction de la détention avant jugement, ainsi qu'à une amende de CHF 300.-, à ce qu'il soit expulsé de Suisse pour une durée de 10 ans avec inscription au SIS, à ce qu'il soit maintenu en détention pour des motifs de sûreté et à ce qu'il soit condamné aux frais de la procédure. Il conclut enfin à ce qu'un bon accueil soit réservé aux conclusions civiles.

A______, par la voix de son Conseil, conclut à ce que X______ soit reconnu coupable de tentative de meurtre, persiste dans les conclusions civiles déposées à l'audience de jugement et conclut à ce que les pièces figurant à l'inventaire sous chiffres 453055 à 453064 lui soient restituées.

X______, par la voix de son Conseil, conclut, principalement, à son acquittement s'agissant des faits qui lui sont reprochés au point 1.1.1. de l'acte d'accusation, s'en rapporte à justice s'agissant des faits qui lui sont reprochés aux points 1.1.2. et 1.1.3. de l'acte d'accusation, conclut à l'indemnisation de sa détention subie au-delà de la peine prononcée, à hauteur de CHF 200.- par jour, soit une indemnité de CHF 59'000.- moins CHF 200.- par jour de détention prononcée, et au rejet des conclusions civiles de la partie plaignante. Subsidiairement, en cas de verdict de culpabilité, il conclut à ce que la peine soit suspendue au profit de la mesure préconisée par l'expert qui devra être ordonnée, à ce qu'il soit condamné à verser une indemnité entre CHF 10'000.- et CHF 20'000.- à la partie plaignante en réparation du tort moral, s'en rapporte à justice s'agissant du prononcé de l'expulsion mais s'oppose à l'inscription de celle-ci au registre SIS.

EN FAIT

A.a. Par acte d'accusation du 27 septembre 2023, il est reproché à X______ d'avoir à Genève, le 21 février 2023 vers 19h30, à proximité du Quai 9, tenté de tuer A______ en lui assénant un coup de poing puis trois coups avec un objet tranchant et piquant, soit un couteau qui n'a pas été retrouvé, agissant intentionnellement ou à tout le moins en envisageant et acceptant pleinement et sans réserve l'issue fatale au cas où elle se produirait, sans toutefois obtenir le résultat escompté, les lésions, soit deux plaies au niveau de l'abdomen gauche et une au niveau de l'avant-bras gauche, n'ayant pas entraîné la mort mais une résection chirurgicale de la rate ayant dû être réalisée durant la prise en charge hospitalière,

faits qualifiés de tentative de meurtre, voire de tentative de meurtre en concours avec des lésions corporelles graves, subsidiairement de lésions corporelles graves, au sens des art. 111 cum art. 22 al. 1 et art. 122 du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (RS 311.0 ; CP).

b. Il lui est également reproché d'avoir, du 11 janvier 2023, lendemain de sa dernière condamnation, au 21 février 2023, jour de son interpellation, persisté à séjourner sur le territoire helvétique alors qu'il n'était pas en possession d'un passeport valable indiquant sa nationalité, qu'il n'était pas au bénéfice des autorisations nécessaires et qu'il ne disposait pas des moyens financiers suffisants permettant d'assurer sa subsistance durant son séjour et ses frais de retour,

faits qualifiés de séjour illégal au sens de l'art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (RS 142.20 ; LEI).

c. Enfin, il lui est reproché d'avoir, à tout le moins le 21 février 2023, intentionnellement consommé sans droit des stupéfiants, soit notamment du crack,

faits qualifiés de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes (RS 812.121 ; LStup).

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure.

a.a. Le 22 février 2023, A______ a déposé plainte contre X______. A l'appui de celle-ci, il a exposé que le 21 février 2023 vers 19h00, il se trouvait derrière le Quai 9 avec ses deux chiens et qu'il fumait un peu de crack. X______, qu'il avait rencontré au Quai 9 en décembre 2022, était également présent. Il l'avait vu gratter sa pipe à crack avec un couteau suisse dont la lame mesurait environ 10 centimètres.

Ce soir-là, X______, lequel était "défoncé" au "benzo" et en état de manque, lui avait réclamé de l'héroïne. Il lui avait répondu qu'il n'en avait pas, ce qui avait énervé X______ qui s'était saisi de son sac à dos et l'avait jeté au sol. Il s'était alors approché de ce dernier, lequel avait essayé de lui asséner un coup de poing au visage avec sa main gauche. Il avait esquivé ce coup et avait reculé d'un pas avant de recevoir un coup latéral de la main droite de l'intéressé en direction de son flanc gauche. Il n'avait pas vu ce que X______ tenait dans sa main mais il avait immédiatement senti "un coup de froid" à l'endroit où il avait été touché. Il avait alors posé sa main sur sa blessure et, remarquant qu'il saignait beaucoup, avait pensé qu'il avait reçu un coup de couteau. X______ avait enchaîné avec un deuxième coup, donné de sa main droite, coup qu'il avait paré en mettant son bras gauche en opposition. Les choses s'étaient passées très rapidement et sans échange de paroles ni d'insultes. Ses chiens avaient voulu "bouffer" X______ mais n'avaient pas pu car ils étaient "plus loin", attachés à son sac à dos. Au moment des faits, il portait une veste en cuir par-dessus un t-shirt ainsi qu'une veste polaire, et il lui semblait que le coup reçu au flanc avait traversé ces trois couches de vêtements.

Il avait ensuite pris une barrière de sécurité et l'avait jetée sur X______, faisant ainsi tomber ce dernier. Puis il avait demandé à son ami "D______" de s'occuper de ses chiens et était parti en courant. X______ l'avait brièvement poursuivi en levant une béquille en l'air. Il était passé sous le "passage de Montbrillant" (recte : rue Cité-de-la-Corderie) et s'était arrêté devant le Burger King de la gare de Cornavin. Sur place, il avait demandé que les secours soient appelés et "quelqu'un", qui s'était présenté comme un médecin, lui avait fait un point de compression jusqu'à l'arrivée de l'ambulance.

a.b. Entendu en audience de confrontation par-devant le Ministère public le 6 juin 2023, A______ a confirmé les déclarations qu'il avait faites à la police le 22 février 2023.

Le soir du 21 février 2023, X______ lui avait demandé s'il pouvait lui prêter CHF 10.- ou lui dépanner une dose d'héroïne. Frustré par le refus qui lui était opposé, l'intéressé avait jeté son sac à dos par terre, alors que ses chiens y étaient encore attachés. C'est au moment où il avait attrapé son sac à dos pour le remettre sur le muret qu'il avait été "piqué" d'un coup sur le flanc gauche. Il avait senti une chaleur et n'avait pas compris ce qui lui arrivait. Puis, X______ avait fait un geste "du haut vers le bas", qu'il avait esquivé avec son bras gauche, lequel avait été blessé. Il avait, pour se défendre, jeté une barrière sur X______, puis s'était éloigné du Quai 9, en direction de la gare. Le précité l'avait poursuivi sur une vingtaine de mètres avec une béquille, qu'il avait jetée dans sa direction. Arrivé au niveau du Burger King, un médecin espagnol lui avait prodigué les premiers soins, puis il avait été pris en charge par une ambulance. Il n'avait pas détenu de couteau ni aucun autre objet dangereux sur lui. Il ne s'était pas battu et, du fait qu'il saignait, avait simplement pensé à se rendre rapidement aux urgences. C'était probablement cette pensée qui lui avait permis de courir et de ne pas s'effondrer.

Avant l'altercation, ses chiens étaient "couchés et tranquilles". Lorsque X______ était venu lui parler, il n'avait jamais été question de ses chiens. Au moment de l'altercation, ceux-ci avaient été retenus par l'un de ses amis car, au vu des faits, ils "voulaient bouffer" X______.

Il venait de terminer le suivi dont il avait bénéficié suite à son opération, laquelle avait été très douloureuse et dont il avait eu beaucoup de mal à se remettre. Sa rate, laquelle contenait 1.5 litre de pus s'était complètement dissoute. Il prenait encore régulièrement des antidouleurs et avait dû recevoir deux vaccins, lesquels nécessiteraient des rappels annuels durant 5 ans. Il était beaucoup plus fragile, car ses défenses immunitaires étaient amoindries, et il faisait régulièrement des malaises. Mentalement, cela avait été un choc. Il était quasiment insomniaque et se réveillait toutes les deux heures. Il éprouvait un sentiment de mal-être et envisageait de débuter un suivi psychologique. Il travaillait habituellement huit mois par année, en tant que saisonnier, dans la cueillette des fruits et dans les vendanges, ce qu'il ne pourrait plus faire car, sans rate, son corps n'était plus en mesure de savoir s'il forçait trop, ce qui créait un risque d'infarctus ou d'AVC. Quelques années auparavant, il avait créé une entreprise en prestation de services pour former des saisonniers et il pensait désormais se concentrer sur cela, faute de pouvoir exercer des travaux physiques.

b.a. X______ a été arrêté le 21 février 2023 au Quai 9. Selon le rapport d'interpellation du 22 février 2023, il était en possession d'un comprimé de DORMICUM, d'un comprimé de TEMESTA, ainsi que d'un petit couteau. Questionné au sujet du couteau qui avait servi au cours de l'agression, l'intéressé, qui tenait des propos peu cohérents, a déclaré que cet objet se trouvait "dans un sac à un endroit inconnu".

b.b. Entendu par la police le 22 février 2023, X______ a refusé de répondre aux questions qui lui ont été posées.

b.c. Entendu par-devant le Ministère public le 23 février 2023, X______ a contesté avoir demandé de l'héroïne à A______. Il lui avait en revanche demandé de mettre une muselière à ses chiens. A______ lui avait répondu que c'était à lui qu'il voulait en mettre une, l'avait menacé de servir de nourriture à ses chiens et avait fait en sorte que ceux-ci se dirigent vers lui. Il avait donc donné des coups de pied aux chiens et A______ avait sorti "une sorte de couteau bizarre". Il lui avait pris le couteau d'une main et, de l'autre, l'avait frappé.

Il ne voyait clair que jusqu'à ce moment-là et ne se souvenait pas vraiment de ce qui s'était passé par la suite. Il était possible qu'il ait couru derrière A______, mais "pas longtemps". S'il lui avait fait du mal, cela n'avait pas été volontaire, et il ne savait pas où ni de quelle manière cela était arrivé. Il était soulagé que A______ ait eu la vie sauve.

L'objet, qu'il avait retiré de la main de A______, était "une sorte de couteau bizarre comme une étoile de ninja". Il ne s'agissait ni d'un couteau de cuisine ni d'un couteau suisse mais d'un objet rare, "que l'on ne sait pas comment saisir", et c'est pour cette raison qu'il avait parlé d'"étoile". Il ne savait plus ce qu'il avait fait de cet objet et il était possible qu'il l'ait lancé une fois A______ parti.

Le soir des faits, il avait consommé du crack et du XANAX. Il avait reçu une boite de ce médicament la veille des faits et, du 20 février 2023 à 23h00 jusqu'au moment de l'altercation le lendemain, il en avait consommé environ 40 comprimés.

Il a déclaré ne pas être sorti de Suisse depuis sa condamnation du 11 janvier 2023 car il avait "un programme" avec la Croix-Rouge visant à obtenir le statut de réfugié en Algérie.

b.d. Entendu par-devant le Ministère public le 24 avril 2023, X______ a déclaré qu'il aurait voulu voir A______ pour lui demander pardon.

Ce qu'avait déclaré le témoin E______ (infra c.) à son sujet correspondait plutôt au portrait de A______ et il lui semblait que ces déclarations n'avaient eu d'autre but que de "justifier l'agression". Du reste, il avait par le passé eu un différend avec ce témoin, au sujet d'une veste.

Il savait que l'un des chiens de A______ était dangereux car ce dernier le disait aux gens pour les effrayer. Il a confirmé qu'il n'avait pas sorti son couteau suisse de son pantalon mais qu'il avait retiré le couteau des mains de A______. Son couteau suisse, qui était tout petit, n'était d'ailleurs pas susceptible de causer une plaie profonde.

L'arme qu'il avait décrite au cours de la procédure comme étant un "couteau bizarre comme une étoile de ninja" était en fait une lame de blender de cuisine. C'était lors d'une promenade à Champ-Dollon qu'une personne lui avait dit que c'était cet objet qui avait été utilisé lors des faits qui lui étaient reprochés. Il ignorait le nom de la personne en question, laquelle était sortie de détention deux jours après leur échange.

b.e. Entendu par-devant le Ministère public en audience de confrontation le 6 juin 2023, X______ a confirmé qu'il avait frappé A______ avec un couteau qu'il avait pris des mains de ce dernier.

c. Entendu par la police en qualité de témoin le 28 février 2023, E______ a déclaré qu'il avait connu A______ dans la rue, plusieurs années auparavant, et que celui-ci était un "bon pote".

Il connaissait également X______, qu'il avait rencontré au Quai 9. Celui-ci était une connaissance qu'il n'appréciait pas. C'était quelqu'un de "cultivé", de "gratteur" et d'agressif lorsqu'on ne lui donnait pas ce qu'il demandait. Il s'était d'ailleurs battu avec ce dernier un ou deux mois plus tôt pour ce motif.

Il avait vu X______ pour la dernière fois le soir de l'agression. Il n'avait pas vu tout ce qui s'était passé entre X______ et A______ mais, de ce qu'il avait entendu, l'altercation avait eu lieu car A______ avait promis à X______ de lui dépanner une dose de drogue. Dans ce contexte, A______ lui avait demandé de "lâcher" une dose à X______, ce qu'il avait refusé.

L'altercation avec le couteau avait eu lieu cinq minutes plus tard. Il n'avait rien vu mais avait entendu A______ crier quelque chose avant de partir en courant.

d. Le 9 juin 2023, X______ a adressé à A______ le courrier suivant :

"Champ-Dollon, le 9 juin 2023,

Cher A______,

Je veux te demander pardon pour ce que je t'ai fait.

Malheureusement, je n'étais pas dans mon état normal et je comprends que je dois arrêter de consommer pour que cela ne puisse pas se reproduire. Je dois te dire que je suis soulagé de te savoir en vie, mais je me sens mal de ton état actuel sans rate. Je te souhaite de tout mon cœur que tu récupères ta santé. Que Dieu te garde !".

e. Sur les images de la caméra de vidéo-surveillance (dont le champ ne couvre pas les lieux de l'altercation) située à l'angle de la rue de la Servette et de la rue de Lyon, à 19h38'06, A______ apparaît alors qu'il contourne le bâtiment du Quai 9 et se dirige, au pas de course, vers la rue de Malatrex. Il est suivi par X______, qui marche quelques mètres derrière lui en tenant à la main un objet ressemblant à une barre en métal. A______ et X______ sortent du champ de la caméra au moment où ils arrivent sur la rue de Malatrex.

f.a. D'après le constat de lésions traumatiques des Drs F______ et G______ du 29 mars 2023, le 23 février 2023 X______ leur a expliqué que l'altercation avait été provoquée par la menace de A______ de le donner en nourriture à ses chiens. Il avait arraché le couteau de la main de A______ et lui avait asséné un coup avec cet objet. Lui-même n'avait reçu aucun coup. Durant les deux jours qui avaient précédé les faits, il avait consommé environ 40 comprimés de XANAX, ce qui pour lui était une consommation inhabituelle.

L'examen médico-légal effectué le 23 février 2023 a mis en évidence les lésions traumatiques suivantes pouvant entrer chronologiquement en lien avec les évènements survenus durant la soirée du 21 février 2023 :

- une plaie linéaire à bords nets de la face palmaire du pouce droit;

- une plaie superficielle, linéaire et à bords nets, du pouce gauche;

- une fine dermabrasion de la pulpe du 5ème doigt de la main gauche.

Les plaies constatées au niveau des deux pouces présentent les caractéristiques de lésions provoquée par un objet tranchant ou tranchant et piquant, tel qu'un couteau par exemple, comme proposé par X______. Compte tenu de sa localisation, celle constatée au niveau de la face palmaire du pouce droit est compatible avec l'utilisation et/ou la manipulation d'un couteau, tel que proposé par l'expertisé.

Le couteau présenté par la police, soit un couteau suisse contenant une lame lisse et uni-tranchante mesurant 3.5 centimètres de longueur, peut être à l'origine des plaies constatées.

La fine dermabrasion est la conséquence d'un traumatisme contondant mineur, trop peu spécifique pour que son origine soit précisée.

f.b. A teneur du constat de lésions traumatiques des Drs F______ et G______ du 30 mars 2023, le 21 février 2023, A______ leur a expliqué que, le jour même vers 19h15, un individu "défoncé aux benzos", soit X______, avait fait tomber son sac à dos au sol. Il l'avait repoussé avec ses mains, puis ce dernier avait essayé de lui donner un coup de poing de la main gauche, avant de faire un mouvement latéral avec sa main droite, laquelle tenait un couteau, qu'il n'avait pas vu mais dont il avait senti le coup. L'intéressé avait essayé d'asséner un deuxième coup, qu'il avait évité en mettant son bras gauche en opposition, ce qui l'avait blessé. Il avait ensuite jeté une barrière sur X______ et avait couru en direction de la gare de Cornavin tandis que son agresseur le poursuivait avec un couteau. Il avait finalement été pris en charge par un médecin devant la gare. Lui-même n'avait porté aucun coup.

Il a précisé que, plus tôt dans la soirée, il avait vu X______ avec un couteau suisse dont la lame mesurait environ 8 centimètres. Il avait imaginé que ce dernier comptait l'utiliser pour nettoyer une pipe.

L'examen clinique médico-légal effectué le 21 février 2023 a mis en évidence les lésions traumatiques suivantes pouvant entrer chronologiquement en lien avec les évènements survenus durant la soirée du 21 février 2023 :

- une plaie à bords nets de l'hypochondre gauche (abdomen) de laquelle s'extériorise du tissu adipeux (plaie cutanée n°1);

- une plaie superficielle à bords nets de l'hypochondre gauche (abdomen) (plaie cutanée n°2);

- une plaie de la face postérieure de l'avant-bras (plaie cutanée n°3).

La plaie cutanée n°1 présente les caractéristiques d'une lésion provoquée par un objet piquant et tranchant tel qu'un couteau par exemple, comme proposé par l'expertisé. Elle présente un caractère pénétrant (de type "estoc").

Sur la base des images radiologiques (et sous réserve des mouvements respiratoires et de la position allongée lors de la réalisation du CT-scanner), la trajectoire intracorporelle de la plaie cutanée n°1 va de l'avant vers l'arrière, de la gauche vers la droite et du bas vers le haut. Sa profondeur minimale est de 11.9 centimètres (mesure toutefois possiblement surestimée en raison des remaniements sous-cutanés post-traumatiques).

Sur sa trajectoire, l'objet vulnérant à l'origine de la plaie cutanée n°1 a pénétré dans la cavité abdominale au niveau de l'hypochondre gauche, a lacéré la rate (avec saignement artériel actif) et engendré une contusion du rein gauche en regard, provoquant ainsi un hémopéritoine. Plus tard, les lésions de la rate se sont compliquées d'une infection abcédante qui a notamment nécessité une résection de l'organe (splénectomie).

La plaie cutanée n°2 est superficielle et présente les caractéristiques d'une lésion provoquée par un objet tranchant ou tranchant et piquant tel qu'un couteau par exemple.

La plaie cutanée n°3 présente les caractéristiques d'une lésion provoquée par un objet tranchant, ou tranchant et piquant, tel qu'un couteau par exemple. Elle présente un caractère tranchant (de type "taille"). Compte tenu de sa localisation et de sa morphologie, elle est directement évocatrice d'une lésion défensive, et compatible avec le mécanisme proposé par l'expertisé.

L'ensemble des plaies cutanées constatées peuvent avoir été provoquées par le même objet vulnérant. Le couteau présenté par la police, à savoir un couteau suisse contenant une lame lisse et uni-tranchante mesurant 3.5 centimètres de longueur, peut être à l'origine de ces plaies.

Le tableau lésionnel constaté est compatible avec les déclarations de A______.

Les lésions constatées n'ont pas concrètement mis en danger la vie de A______ d'un point de vue médico-légal.

f.c. Selon le rapport d'expertise toxicologique du 26 avril 2023 basé sur les prélèvements effectués sur A______ le 21 février 2023 à 20h20, les analyses effectuées ont mis en évidence une consommation récente de cocaïne.

f.d. A teneur du rapport d'expertise toxicologique du 3 mai 2023, basé sur les prélèvements effectués sur X______ le 23 février 2023 à 12h50, les analyses effectuées ont mis en évidence une concentration d'ALPRAZOLAM (benzodiazépine suggérant une consommation de XANAX) se situant dans la fourchette des valeurs thérapeutiques, ainsi qu'une consommation non récente d'opiacés, de cocaïne et de cannabis devant dater de plusieurs heures, voire jours, avant le prélèvement.

g. A teneur du rapport d'expertise psychiatrique du 7 août 2023 établi par les Dres H______ et I______, X______ présente un trouble de la personnalité avec des traits d'impulsivité, de clivage, voire de sentiment de persécution. Il présente également une dépendance importante à la cocaïne ainsi qu'une consommation nocive d'anxiolytiques, laquelle est en rémission dans le contexte de l'incarcération.

La capacité volitive de X______ était légèrement diminuée au moment des faits dans le contexte d'une probable levée d'inhibition avec un état de perte de contrôle, en lien avec le trouble de la personnalité associé à des consommations vraisemblables de cocaïne et d'un état d'imprégnation très probable sous benzodiazépines. Par conséquent, sa responsabilité vis-à-vis des actes du 21 février 2023 était légèrement diminuée.

X______ présentait un risque de récidive violente (générale) modéré. Les facteurs de risque étaient principalement liés à son trouble de la personnalité, à ses consommations de substances psychoactives, mais également à ses conditions de vie précaires.

Ce risque de récidive pouvait être diminué au moyen d'une mesure thérapeutique tel qu'un traitement institutionnel contre les addictions au sens de l'art. 60 CP, dans un centre spécialisé ou un foyer avec suivi psychiatrique régulier, pour une durée de six mois à un an. Un tel traitement pouvait être mis en œuvre via un placement en centre spécialisé en addictologie ouvert tel que l'association J______. S'agissant de la prise en charge du trouble de la personnalité, la poursuite de la stabilisation semblait davantage passer par un projet social que purement psychothérapeutique (une aide sur le plan social serait en soi thérapeutique), le trouble étant relativement léger à moyen.

C.a. Lors de l'audience de jugement, le Tribunal a rejeté, pour les motifs figurant au procès-verbal, la question préjudicielle du Conseil de X______ visant au retrait du dossier du procès-verbal d'audition de E______.

b.a. A______, par l'entremise de son conseil, a déposé :

- des conclusions civiles visant à ce que X______ soit condamné aux frais de la procédure ainsi qu'à lui payer les sommes de CHF 30'000.- avec intérêts à 5% l'an dès le 21 février 2023 à titre de réparation de son tort moral et CHF 46'093.75.- à titre de remboursement de ses frais médicaux; et

- un chargé de pièces comprenant une facture d'hospitalisation des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) d'un montant de CHF 46'093.75 du 3 juillet 2023, ainsi que son courrier de rappel du 18 octobre 2023.

b.b. X______, par l'entremise de son conseil, a déposé une impression d'images de lames de blenders prises sur internet.

c.a. X______ a confirmé qu'il n'avait demandé ni argent ni drogue à A______ le soir du 21 février 2023 et que c'était ce dernier qui détenait "l'objet".

Il avait commencé par discuter avec A______, à qui il avait demandé de mettre une muselière à son chien pour éviter qu'il ne puisse mordre. A______ lui avait répondu que c'était lui qui devrait porter une muselière, avait jeté ses chiens contre lui et avait sorti l'"objet". Il avait eu peur, raison pour laquelle, il le lui avait pris des mains. Il n'avait fait que se défendre, de façon mécanique, c’est-à-dire sans l'avoir planifié et sans y penser, comme il l'avait appris durant sa formation (infra D.a). Il a admis avoir donné un ou plusieurs coups à A______, sans pouvoir préciser exactement combien car, au moment des faits, il était "très drogué" et avait peur. L'"objet" avec lequel il avait donné ce ou ces coups était un couteau qu'on utilise "pour triturer des fruits, un Moulinex".

Il a confirmé ses déclarations faites par-devant le Ministère public, selon lesquelles, lors de la promenade à Champ-Dollon, une personne lui avait dit que l'objet utilisé, qu'il avait pensé être, le soir des faits, une étoile ninja, était en réalité un "couteau de blender" à deux lames. Cette personne était sortie de prison deux jours après lui avoir dit cela. Puis, sur intervention de son Conseil, et contrairement à ce qu'il avait déclaré, il a expliqué qu'il avait en réalité revu ce co-détenu à une autre occasion mais que celui-ci lui avait fait promettre de ne pas parler de lui car il ne voulait pas être appelé à témoigner.

Il n'arrivait pas expliquer la raison pour laquelle il n'avait pas choisi de fuir plutôt que de s'emparer de l'"objet" pour donner un coup. Il n'avait pas été dans une situation qui lui permettait de réfléchir et il avait agi pour se défendre, alors qu'il était mû par la peur.

Il était possible qu'il ait couru après A______ alors que celui-ci, blessé, s'enfuyait, mais cela n'avait pas été sur une longue distance. Il ne savait pas pourquoi il avait agi de la sorte. Il était également possible qu'il ait, à ce moment-là, jeté un objet dans la direction de A______. Il imaginait que ce qu'il avait jeté était ce qu'il avait pris des mains de ce dernier.

Il était conscient des risques qu'impliquait un coup sur le haut du corps lorsqu'il s'agissait d'un acte planifié, mais non pas lorsqu'il s'agissait d'un acte mécanique, soit d'un acte commis sans réfléchir et sans avoir été planifié. Dans le cas d'espèce, il pensait à se défendre et non pas à tuer. Il admettait avoir une part de culpabilité dans les faits qui lui étaient reprochés mais estimait que celle-ci était le résultat d'autres actes, à savoir du fait que A______ avait jeté ses chiens contre lui, sorti un couteau, et qu'une dispute s'en était suivie.

Lorsqu'il avait écrit, dans sa lettre d'excuses à A______, qu'il devait "arrêter de consommer pour que cela ne puisse pas se reproduire", il avait voulu dire qu'il ne devait plus se retrouver dans une situation dans laquelle il n'arrivait pas à se maitriser. Cette lettre avait été écrite par quelqu'un à qui il avait dicté ce qu'il avait sur le cœur.

Il était d'accord avec la mesure préconisée par l'expert et a acquiescé sur le principe aux conclusions civiles de A______.

Il espérait que celui-ci se portait bien, lui souhaitait un bon rétablissement et tout de bon pour sa vie. Il espérait qu'il lui pardonnait et regrettait ce qu'il s'était passé.

S'agissant du séjour illégal, il a confirmé que, avant d'être placé en détention, il avait contacté la Croix-Rouge afin qu'elle puisse l'aider dans ses démarches visant à retourner dans son pays.

Il reconnaissait la consommation de stupéfiants qui lui était reprochée.

c.b. A______ a confirmé sa plainte pénale et ses précédentes déclarations.

Le matin du 21 février 2023, il avait fumé un peu de crack et pris de la méthadone. A aucun moment il n'avait vu une lame de blender et à aucun moment il n'avait eu un objet tranchant dans les mains. Il n'avait jamais jeté ses chiens sur X______ et ceux-ci ne s'étaient pas non plus montrés menaçants envers ce dernier.

X______ était venu lui demander CHF 10.- ou une dose d'héroïne, ce qu'il n'avait pas. Ce dernier, énervé, avait jeté son sac à dos auquel ses chiens étaient attachés à terre. Après avoir reposé son sac sur un muret, il était allé vers X______ pour lui demander ce qu'il se passait. C'était à ce moment-là qu'il avait reçu un coup. Puis, il avait reçu un deuxième coup, à l'avant-bras, et avait alors constaté que X______ tenait un couteau suisse. Il ne s'était pas tout de suite rendu compte du coup qu'il avait reçu mais il avait senti une chaleur et réalisé qu'il saignait. Lorsqu'il avait compris qu'il avait été blessé et comme X______ l'attaquait encore, il avait jeté une barrière à son encontre, ce qui avait fait tomber ce dernier. Il était ensuite parti et X______ l'avait poursuivi durant environ 15 secondes, une béquille à la main, qu'il avait fini par jeter dans sa direction. Il était allé jusqu'à la gare de Cornavin, d'où les secours avaient été appelés.

Il n'avait pas vu ce que X______ avait fait du couteau. Après avoir fait tomber le précité en jetant la barrière dans sa direction, il n'avait pensé qu'à se sauver. Il avait eu peur pour sa vie car il perdait beaucoup de sang.

Il souffrait encore aujourd'hui de "pas mal de lacunes". Il avait essayé de travailler en cette fin d'année, dans le cadre d'une mission de récolte de pommes, mais il n'allait pas bien physiquement. Il était très fatigué et dormait mal; ses défenses immunitaires étaient diminuées. En conséquence, il n'avait pu travailler qu'une semaine au lieu d'un mois. Il souffrait toujours d'insomnies ainsi que de baisses de tension. Cet évènement l'avait beaucoup pénalisé dans sa vie. Il avait été difficile pour lui de se remettre "dans l'action" et dans le travail. Les choses étaient difficiles à la fois physiquement et psychologiquement.

Il ne bénéficiait pas encore d'un suivi psychothérapeutique mais il avait, le 13 novembre 2023, contacté l'association K______ afin d'obtenir un rendez-vous.

Ses frais médicaux n'avaient pas été remboursés car il ne bénéficiait pas d'assurance. Suite aux faits, il avait entamé des démarches en France afin d'être assuré par la sécurité sociale. Il n'avait pas effectué de démarches visant aux remboursement des frais médicaux résultant des faits.

Il n'avait pas payé la facture des HUG (supra C.b.a.) car il n'en avait pas eu connaissance. Il avait été informé le matin même du montant réclamé car son Conseil avait reçu cette facture tardivement.

D.a. X______ est né le ______1973 à ______, au Sahara occidental. Il n'a ni document d'identité ni titre de séjour en Suisse.

Il expose qu'il est divorcé et père d'une fille, qui vit avec sa mère en Espagne et avec laquelle il n'a que de rares contacts téléphoniques.

Il est issu d'une fratrie de dix-huit frères et sœurs de trois mères différentes. Son père est décédé et sa mère vit en Algérie avec ses filles. D'autres de ses frères et sœurs vivent en Italie et en Espagne.

Il est arrivé en Algérie à l'âge de 4 ans où il a débuté sa scolarité. A partir de 1982, il vivait 9 mois par an en Libye, où il allait à l'école, et passait les 3 mois restants en Algérie pour "les grandes vacances".

En 1987 ou 1988, vers l'âge de 16 ans, il a été enrôlé dans l'armée au Sahara occidental. Il y a travaillé en tant que démineur et y a suivi une formation d'auto-défense.

En 1993 il est retourné en Libye où il a travaillé en qualité de plongeur en mer, profession qu'il a également exercée en Algérie et en Mauritanie.

A partir de 1996, il a fait des aller-retours entre la Mauritanie, les îles Canaries et l'Algérie. De 1996 et 2002, il a exercé la profession de ferrailleur en Mauritanie et aux Iles Canaries.

Il a séjourné en France, au Portugal, en Italie et en Espagne durant plusieurs années. Il y a exercé divers emplois manuels, dont celui de peintre industriel.

Il est arrivé en Suisse en 2018 et entreprend actuellement des démarches avec la Croix-Rouge pour que l'Algérie l'accepte en tant que réfugié et qu'il puisse retourner au Sahara occidental.

Avant son interpellation, il était sans profession et sans domicile fixe.

En prison, il a consulté un psychologue à deux reprises. Il n'a pas bénéficié de suivi addictologique.

A sa sortie de prison il souhaite rentrer chez lui, au Sahara occidental, afin d'y reprendre son activité dans le déminage.

b. A teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse, X______ a été condamné :

- le 5 septembre 2019, par le Ministère public du canton de Genève, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 10.- le jour, peine assortie du sursis avec délai d'épreuve de 3 ans, et à une amende de CHF 200.- pour entrée illégale, séjour illégal et contravention à la loi sur les stupéfiants;

- le 7 décembre 2019, par le Ministère public du canton de Genève, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 10.- le jour pour séjour illégal;

- le 12 juin 2020, par le Ministère public du canton de Genève, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 30.- le jour pour séjour illégal;

- le 13 septembre 2022, par le Ministère public du canton de Genève, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 10.- le jour pour séjour illégal;

- le 10 janvier 2023, par le Ministère public du canton de Genève, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 30.- le jour, après révocation de la libération conditionnelle accordée le 28 mars 2022 (peine restante de 32 jours), et à une amende de CHF 500.- pour séjour illégal et contravention à la loi sur les stupéfiants.

 

EN DROIT

Culpabilité

1.1.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (RS 0.101 ; CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 ; Cst.) et 10 al. 3 du Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (RS 312.0 ; CPP), concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 c.2.2.3.1 ; ATF 127 I 28 c.2a).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, ce principe signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé, et non à ce dernier de démontrer son innocence. Il est violé lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que l'accusé n'a pas prouvé son innocence (ATF 127 I 38 c.2a; 120 Ia 31 c. 2c et 2d).

Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo signifie que le juge ne peut se déclarer convaincu d'un état de fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence de cet état de fait (ATF 127 I 38 c. 2a ; 124 IV 86 c. 2a; 120 Ia 31 c. 2c).

1.1.2.1. Selon l'art. 111 CP, quiconque tue une personne intentionnellement est puni d’une peine privative de liberté de cinq ans au moins, en tant que les conditions prévues aux articles suivants ne sont pas réalisées.

L'intention homicide peut être retenue lors d'un unique coup de couteau sur le haut du corps de la victime. Même un seul coup de couteau porté contre le torse de la victime peut être considéré comme un homicide volontaire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_775/2011 du 4 juin 2012, consid. 2.4.2). En cas de coup de couteau dans la région thoracique, le risque de blessure mortelle doit être considéré comme élevé. Une conséquence mortelle se situe donc dans le cadre généralement connu du déroulement de la causalité et est donc couverte par l'intention. L'hypothèse de l'intention ne requiert pas que le résultat (de l'homicide) soit le but de l'action. Agit déjà intentionnellement celui qui considère la réalisation de l'acte comme possible et l'accepte. Plus la violation de la diligence est grave, plus il est facile de conclure à l'acceptation de la réalisation de l'infraction (arrêt du Tribunal fédéral 6B_230/2012 du 18 septembre 2012, consid. 2.3). Lors d'un coup de couteau dans la région thoracique, le risque de réalisation de l'infraction, c'est-à-dire de décès de la victime, doit être considéré comme élevé, même avec une lame de couteau plutôt courte, comme en l'occurrence une lame de 41 millimètres (arrêt du Tribunal fédéral 6B_239/2009 du 13 juillet 2009, consid. 1 et 2.3). Enfin, celui qui frappe quelqu'un avec un couteau dans la région abdominale ne peut qu'accepter la mort de la victime (arrêt du Tribunal fédéral 6B_560/2018 du 13 août 2018, consid. 2.1).

1.1.2.2. L'infraction n'est que tentée si l'exécution du crime n'est pas poursuivie jusqu'à son terme ou que le résultat nécessaire à la consommation de l'infraction ne se produit pas ou ne pouvait pas se produire (art. 22 al. 1 CP).

1.1.2.3. Quiconque, de manière contraire au droit, est attaqué ou menacé d'une attaque imminente a le droit de repousser l'attaque par des moyens proportionnés aux circonstances; le même droit appartient aux tiers (art. 15 CP).

La légitime défense suppose une attaque, c'est-à-dire un comportement visant à porter atteinte à un bien juridiquement protégé, ou la menace d'une attaque, soit le risque que l'atteinte se réalise. Il doit s'agir d'une attaque actuelle ou à tout le moins imminente, ce qui implique que l'atteinte soit effective ou qu'elle menace de se produire incessamment (ATF 106 IV 12 consid. 2a p. 14; arrêts du TF 6B_130/2017 du 27 février 2018 consid. 3.1; arrêt du TF 6B_600/2014 du 23 janvier 2015 consid. 5.1 non publié aux ATF 141 IV 61 et les références citées). L'acte de celui qui est attaqué ou menacé de l'être doit tendre à la défense. Un comportement visant à se venger ou à punir ne relève pas de la légitime défense. Il en va de même du comportement qui tend à prévenir une attaque certes possible mais encore incertaine, c'est-à-dire à neutraliser l'adversaire selon le principe que la meilleure défense est l'attaque (ATF 93 IV 81 p. 83; arrêt 6B_130/2017 du 27 février 2018 consid. 3.1).

Dans le domaine des faits justificatifs, le renversement du fardeau de la preuve n'est pas absolu, car l'on n'exige pas une preuve stricte du prévenu qui invoque des causes de non-responsabilité. Néanmoins, une simple affirmation ou des allégations imprécises du prévenu ne suffisent pas à faire admettre l'existence du fait justificatif ; on exige à tout le moins qu'il les rende vraisemblables. Ainsi, en matière de légitime défense, il convient d'examiner dans chaque cas si la version des faits invoquée pour justifier la licéité des actes apparaît crédible eu égard à l'ensemble des circonstances ; en d'autres termes, il faut déterminer si les faits allégués par le prévenu sont plausibles (arrêt du Tribunal fédéral 6B_788/2015 du 13 mai 2016 consid. 3.1; AARP/281/2016 du 11 juillet 2016, consid. 3.2¸G. PIQUEREZ / A. MACALUSO, Procédure pénale suisse, 3e éd., Genève 2011, n. 555).

1.1.3. L'art. 115 al. 1 let. b LEI prévoit que quiconque séjourne illégalement en Suisse, notamment après l'expiration de la durée du séjour non soumis à autorisation ou du séjour autorisé, est puni d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire.

1.1.4. Selon l'art. 19a ch. 1 LStup, quiconque, sans droit, consomme intentionnellement des stupéfiants ou commet une infraction à l’art. 19 pour assurer sa propre consommation est passible d’une amende.

1.2.1. En l'espèce, il est établi que, dans le cadre d'une altercation dont la cause ne peut être déterminée de manière précise, le prévenu a porté à tout le moins deux coups au plaignant avec un objet piquant et tranchant à dire d'expert.

Il ressort de l'expertise médico-légale que les coups portés ont causé une plaie superficielle de l'hypochondre gauche, soit la partie gauche de l'abdomen, une plaie de la face postérieure de l'avant-bras gauche et une plaie de l'hypochondre gauche d'une profondeur minimale de 11.9 cm, associée à une lacération du pôle inférieur de la rate, ce qui a engendré une contusion du rein gauche et provoqué un hémopéritoine. Le plaignant a dû subir une splénectomie, en raison d'une infection des lésions de la rate.

L'objet qui a causé ces lésions n'a pas été retrouvé. Le plaignant a toujours affirmé qu'il s'agissait d'un couteau, contrairement au prévenu qui a varié dans ses déclarations, parlant dans un premier temps d'une étoile ninja ou d'un "couteau bizarre", avant d'affirmer devant le Ministère public, le 24 avril 2023, qu'un co-détenu lui avait dit qu'il s'agissait d'une lame de blender. Il a déclaré à l'audience de jugement que ce co-détenu ne lui en avait fait part qu'à ce moment-là, avant de sortir de prison, deux jours plus tard. Puis, sur intervention de son Conseil, il a affirmé que son co-détenu lui en avait reparlé à Champ-Dollon quelques jours avant l'audience de jugement. Le Tribunal n'a pas pu auditionner cette personne, le prévenu affirmant avoir promis de ne pas donner son nom. Cela étant, le seul fait qu'un co-détenu aurait dit au prévenu avoir trouvé un tel objet à proximité, peu après les faits, ne signifie pas encore qu'il s'agirait de l'objet en cause. Il paraît par ailleurs étonnant qu'une lame de blender à deux lames, comme décrit par le prévenu à l'audience de jugement, puisse avoir l'aspect d'une étoile. S'il apparaît ainsi plus probable que les lésions aient été causées au moyen d'un couteau, cette question peut néanmoins rester ouverte. En tout état, il s'agit d'un objet tranchant et piquant propre à causer une lésion d'une profondeur minimale de 11.9 cm, peut-être un peu moins en raison des remaniements sous-cutanés post-traumatiques à dire d'experts, étant encore précisé que la lame a traversé trois couches de vêtements avant de pénétrer dans la peau.

Aucun élément au dossier ne va dans le sens d'une attaque du plaignant. Lors de ses premières déclarations par-devant le Ministère public, lesquelles sont souvent les plus spontanées, le prévenu a indiqué que les chiens du plaignant étaient venus vers lui pour l'attaquer, qu'il leur avait donné des coups de pied, que, suite à cela, le plaignant avait sorti un "couteau bizarre" et qu'il avait pris cet objet des mains de l'intéressé pour frapper ce dernier, sans pour autant décrire aucune attaque du plaignant. Il ne ressort par ailleurs pas du dossier que les chiens du plaignant aient fait montre de signes concrets annonçant un danger pour le prévenu ni que ce dernier ait pu se croire attaqué, étant précisé qu'une simple affirmation ou des allégations imprécises du prévenu ne suffisent pas à faire admettre l'existence du fait justificatif ; on exige à tout le moins que le prévenu les rende vraisemblables. Il ne ressort pas non plus de la procédure que le prévenu n'aurait pas pu quitter les lieux plutôt que d'agir tel qu'il l'a fait, celui-ci ne l'expliquant pas non plus. La compatibilité de la plaie à l'avant-bras du plaignant avec une lésion de défense plaide également contre une attaque de ce dernier. Enfin, le fait que le prévenu, muni d'une béquille à la main, suive le plaignant qui quittait les lieux en courant, suite aux coups qu'il avait reçus, ce qui ressort tant des images de vidéosurveillance que des déclarations du plaignant et que le prévenu ne conteste pas, ne plaide pas davantage en faveur d'une situation de légitime défense.

Compte tenu de ces éléments, le Tribunal considère que le prévenu ne se trouvait pas en situation de légitime défense, ni de légitime défense putative, lorsqu'il a asséné les coups au plaignant.

En assénant à tout le moins deux coups sur le haut du corps de la victime, où se situent les organes vitaux, dont l'un avec une force certaine, vu la profondeur de la plaie après que la lame avait traversé plusieurs couches de vêtements, alors que les protagonistes étaient en mouvement, et en quittant les lieux après s'être débarrassé de son arme tandis que le plaignant saignait abondement, le prévenu a accepté et s'est accommodé de le tuer.

Par conséquent, le prévenu sera reconnu coupable de tentative de meurtre par dol éventuel au sens de l'art. 111 CP cum art. 22 al. 1 CP, laquelle absorbe les lésions corporelles graves.

1.2.2. Le prévenu sera également reconnu coupable de séjour illégal au sens de l'art. 115 al. 1 let. b LEI. Le fait qu'il serait en train d'effectuer des démarches pour retourner au Sahara occidental ne l'autorisait pas à rester en Suisse.

1.2.3. Il sera enfin reconnu coupable de consommation de stupéfiants au sens de l'art.  19a ch. 1 LStup, faits établis et admis par le prévenu.

Responsabilité

2.1. Selon l'art. 19 CP, l'auteur n'est pas punissable si, au moment d'agir, il ne possédait pas la faculté d'apprécier le caractère illicite de son acte ou de se déterminer d'après cette appréciation (al. 1). Le juge atténue la peine si, au moment d'agir, l'auteur ne possédait que partiellement la faculté d'apprécier le caractère illicite de son acte ou de se déterminer d'après cette appréciation (al. 2). Les mesures prévues aux art. 59 à 61, 63, 64, 67, 67b et 67e peuvent cependant être ordonnées (al. 3).

2.2. Conformément aux conclusions des experts, dont il n'y a pas lieu de s'écarter, le Tribunal retiendra que la responsabilité du prévenu était légèrement restreinte au moment des faits les plus graves.

Peine

3.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

3.1.2. La durée minimale de la peine privative de liberté est de trois jours; elle peut être plus courte si la peine privative de liberté est prononcée par conversion d'une peine pécuniaire ou d'une amende non payées. La durée de la peine privative de liberté est de 20 ans au plus. Lorsque la loi le prévoit expressément, la peine privative de liberté est prononcée à vie (art. 40 CP).

Le juge impute sur la peine la détention avant jugement subie par l'auteur dans le cadre de l'affaire qui vient d'être jugée ou d'une autre procédure. Un jour de détention correspond à un jour-amende (art. 51 CP).

3.1.3. Si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine (art. 49 al. 1 CP).

3.1.4. Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (art. 42 al. 1 CP). Si, durant les cinq ans qui précèdent l'infraction, l'auteur a été condamné à une peine privative de liberté ferme ou avec sursis de plus de six mois, il ne peut y avoir de sursis à l'exécution de la peine qu'en cas de circonstances particulièrement favorables (art. 42 al. 2 CP).

Le juge doit poser, pour l'octroi du sursis – ou du sursis partiel –, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. En l'absence de pronostic défavorable, il doit prononcer le sursis. Celui-ci est ainsi la règle dont le juge ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable ou hautement incertain (ATF 135 IV 180 c.2.1 p. 185 s. ; 134 IV 1 c.4.2.2 p. 5).

Le juge peut suspendre partiellement l’exécution d’une peine privative de liberté d’un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute de l’auteur (art. 43 CP).

3.1.5. Selon l'art. 106 CP, sauf disposition contraire de la loi, le montant maximum de l'amende est de 10'000 francs.

3.2. En l'espèce, la faute du prévenu est lourde. Il s'en est pris à la vie et l'intégrité physique du plaignant, biens juridiques les plus précieux de l'ordre juridique suisse.

Il a porté à tout le moins deux coups avec un objet tranchant et piquant causant deux lésions dont l'une très importante à l'abdomen du plaignant, laquelle aurait pu être fatale. Le plaignant a dû subir une splénectomie et garde des séquelles importantes à ce jour.

Le mobile est difficile à déterminer mais il s'est agi vraisemblablement d'un comportement colérique dû à une certaine frustration dans un contexte de consommation de substances.

Il y a concours d'infractions et cumul de peines d'un genre différent.

La situation personnelle du prévenu n'était pas facile au vu de sa polytoxicomanie. Il semble, compte tenu des déclarations des parties, qu'il avait consommé une quantité importante de benzodiazépines le jour des faits. Toutefois, si cela permet d'expliquer en partie ses agissements, cela ne les justifie aucunement.

La collaboration du prévenu a été médiocre. S'il a admis avoir frappé le plaignant, il a déclaré n'avoir fait que se défendre.

Il a présenté des excuses, exprimé des regrets et semble faire preuve d'une ébauche de prise de conscience, laquelle n'est toutefois pas aboutie.

Le prévenu a plusieurs antécédents mais limités à des infractions à la loi sur les étrangers et l'intégration et à de la consommation de stupéfiants.

Compte tenu de ce qui précède, seule une peine privative de liberté entre en ligne de compte.

Sans tenir compte de la responsabilité faiblement restreinte du prévenu, le Tribunal prononcerait une peine de quatre ans. En tenant compte de la responsabilité faiblement restreinte et du concours avec le séjour illégal, le Tribunal prononcera une peine de trois ans, étant précisé que la période pénale de cette dernière infraction est courte et ne devrait pas être sanctionnée d'une peine hypothétique de plus d'un mois.

La libération conditionnelle octroyée par jugement du 28 mars 2022 a déjà été révoquée par ordonnance pénale du 10 janvier 2023.

Compte tenu du risque de récidive qui existe à dire d'experts, le pronostic s'annonce sous un jour défavorable et le sursis ne saurait être accordé au prévenu.

Le prévenu sera condamné à une amende de CHF 100.- pour la consommation de stupéfiants, assortie d'une peine privative de liberté de substitution d'1 jour.

Mesures

4.1. Selon l'art. 60 CP, lorsque l’auteur est toxico-dépendant ou qu’il souffre d’une autre addiction, le juge peut ordonner un traitement institutionnel aux conditions suivantes : l’auteur a commis un crime ou un délit en relation avec cette addiction (al. 1 let. a); il est à prévoir que ce traitement le détournera d’autres infractions en relation avec cette addiction (al. 1 let. b). Le juge tient compte de la demande et de la motivation de l’auteur (al. 2). Le traitement s’effectue dans un établissement spécialisé ou, si besoin est, dans un hôpital psychiatrique. Il doit être adapté aux besoins particuliers de l’auteur et à l’évolution de son état (al. 3).

Si les conditions sont remplies aussi bien pour le prononcé d'une peine que pour celui d'une mesure, le juge ordonne les deux sanctions. L'exécution d'une des mesures prévues aux art. 59 à 61 prime une peine privative de liberté prononcée conjointement ainsi qu'une peine privative de liberté qui doit être exécutée en raison d'une révocation ou d'une réintégration. De même, la réintégration dans une mesure en application de l'art. 62a prime une peine d'ensemble prononcée conjointement. La durée de la privation de liberté entraînée par l'exécution de la mesure est imputée sur la durée de la peine (art. 57 CP).

4.2. En l'espèce, une mesure sera ordonnée, telle que préconisée par les experts, et la peine sera suspendue au profit de la mesure.

5.1.1. A teneur de l'art. 66a al. 1 let. a CP, le juge expulse de Suisse l'étranger qui est condamné pour meurtre (art. 111 CP), quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre, pour une durée de cinq à quinze ans. La solution est identique en cas de tentative (DUPUIS et al., Petit commentaire du code pénal, 2ème éd., 2017, n°1 ad art. 66a).

Le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse. À cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse (66a al. 2 CP).

Il s'agit de faire une pesée des intérêts entre l'intérêt à l'éloignement et la situation personnelle du condamné (art. 8 CEDH), avec comme critères déterminants : la gravité de l'infraction, la culpabilité de l'auteur, le temps écoulé depuis l'infraction, le comportement de celui-ci pendant cette période, le degré de son intégration et la durée de son séjour antérieur, ainsi qu'aux inconvénients qui le menacent, lui et sa famille, en cas de renvoi, la durée du séjour en Suisse, l'intensité des liens de l'étranger avec la Suisse et des difficultés de réintégration dans son pays d'origine (GRODECKI, Nouveautés en droit des sanctions: de la peine pécuniaire à l'expulsion, Conférence organisée par le Comité de la Société genevoise de droit et de législation, janvier 2017).

L'art. 66a al. 2 CP est formulé comme une norme potestative (Kannvorschrift), en ce sens que le juge n'a pas l'obligation de renoncer à l'expulsion, mais peut le faire si les conditions fixées par cette disposition sont remplies. Ces conditions sont cumulatives. Afin de pouvoir renoncer à une expulsion prévue par l'art. 66a al. 1 CP, il faut donc, d'une part, que cette mesure mette l'étranger dans une situation personnelle grave et, d'autre part, que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse (arrêts du Tribunal fédéral 6B_724/2018 du 30 octobre 2018 c.2.3.1; 6B_296/2018 du 13 juillet 2018 c.3.2; 6B_506/2017 du 14 février 2018 c.1.1 et les références citées). Le fait que la clause de rigueur soit une norme potestative ne signifie pas que le juge pénal pourrait librement décider d'appliquer ou non l'exception de l'art. 66a al. 2 CP. Le juge doit ainsi renoncer à l'expulsion lorsque les conditions de l'art. 66a al. 2 CP sont réunies, conformément au principe de proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_724/2018 du 30 octobre 2018 c.2.3.1).

5.1.2. Selon l'art. 66c al. 2 CP, la peine ou partie de peine ferme ou la mesure privative de liberté doit être exécutée avant l'expulsion.

5.1.3.  A teneur de l'art. 20 de l'Ordonnance sur la partie nationale du Système d'information Schengen (N-SIS) et sur le bureau SIRENE du 8 mars 2013 (Ordonnance N-SIS), les ressortissants d'Etats tiers ne peuvent être signalés aux fins de non-admission ou d'interdiction de séjour que sur la base d'une décision prononcée par une autorité administrative ou judiciaire. L'inscription dans le SIS des signalements aux fins d'expulsion pénale est requise par le juge ayant ordonné cette mesure.

5.2. En l'espèce, l'expulsion du prévenu est obligatoire. Les conditions de la clause de rigueur ne trouvent par ailleurs pas application, le prévenu n'ayant pas de famille, ni de travail en Suisse, pays dont il ne parle pas la langue et où il n'est pas intégré. Le principe de la proportionnalité, en particulier la gravité des faits pour lesquels le prévenu est condamné, commande d'inscrire l'expulsion au registre SIS, étant précisé que ce dernier n'a que de rares contacts téléphoniques avec sa fille, en Espagne, qu'il pourra poursuivre depuis le Sahara occidental. La durée de l'expulsion sera fixée à 8 ans.

L'expulsion sera exécutée après l'exécution de la mesure qui devrait durer de six mois à un an à dire d'experts, cas échéant de celle de la peine.

Conclusions civiles

6.1.1. Selon l'art. 122 al. 1 CPP, en qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale.

En vertu de l'art. 126 al. 1 let. a CPP, le tribunal statue sur les prétentions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu. En revanche, il renvoie la partie plaignante à agir par la voie civile lorsqu'elle n'a pas chiffré ses conclusions de manière suffisamment précise ou ne les a pas suffisamment motivées (art. 126 al. 2 let. b CPP).

Selon l'art. 124 al. 3 CPP, si le prévenu acquiesce aux conclusions civiles, sa déclaration doit être consignée au procès-verbal et constatée dans la décision finale.

6.1.2. A teneur de l'art. 41 al. 1 de la loi fédérale complétant le code civil suisse du 30 mars 1911 (RS 220 ; CO), chacun est tenu de réparer le dommage qu'il cause à autrui d'une manière illicite, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence. La preuve du dommage incombe au demandeur (art. 42 al. 1 CO).

6.1.3. En cas de lésions corporelles, la partie qui en est victime a droit au remboursement des frais et aux dommages-intérêts qui résultent de son incapacité de travail totale ou partielle, ainsi que de l’atteinte portée à son avenir économique (art. 46 CO).

6.1.4. Aux termes de l'art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale. Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé.

Les circonstances particulières évoquées dans la norme consistent dans l'importance de l'atteinte à la personnalité du lésé, l'art. 47 CO étant un cas d'application de l'art. 49 CO. Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé. Parmi les circonstances qui peuvent, selon les cas, justifier l'application de l'art. 47 CO, figurent avant tout le genre et la gravité de la lésion, l'intensité et la durée des répercussions sur la personnalité de la personne concernée, le degré de la faute de l'auteur ainsi que l'éventuelle faute concomitante du lésé (ATF 141 III 97 consid. 11.2 et les références citées). A titre d'exemple, une longue période de souffrance et d'incapacité de travail, de même que les préjudices psychiques importants sont des éléments déterminants (arrêt du Tribunal fédéral 4A_373/2007 du 8 janvier 2008 consid. 3.2 non publié in ATF 134 III 97 ; ATF 132 II 117 consid. 2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1066/2014 du 27 février 2014 consid. 6.1.2).

6.2.1. En l'espèce, même si les conclusions civiles en réparation du tort moral ne sont pas documentées et que le plaignant n'a pas entamé de suivi psychothérapeutique, il se justifie de lui allouer une telle indemnité. En effet, le plaignant a des séquelles importantes consistant en des insomnies, une grande fatigue, une immunité moins bonne qui nécessite des vaccins réguliers et des douleurs au ventre, étant précisé que le prévenu a acquiescé à ces conclusions sur le principe. Le montant de l'indemnité réclamée sera toutefois revu à la baisse. X______ sera ainsi condamné à payer à A______ la somme de CHF 15'000.-, avec intérêts à 5% dès le 21 février 2023, à titre de réparation du tort moral.

6.2.2. En revanche, le plaignant n'ayant pas essayé d'obtenir le remboursement de ses frais médicaux, son dommage est incertain à ce stade.

Par conséquent, il sera renvoyé à agir par la voie civile s'agissant de ses conclusions en réparation du dommage matériel.

Inventaires, indemnités et frais

7.1.1. Selon l'art. 263 al. 1 CPP, des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être mis sous séquestre, lorsqu’il est probable: a) qu’ils seront utilisés comme moyens de preuves; b) qu’ils seront utilisés pour garantir le paiement des frais de procédure, des peines pécuniaires, des amendes et des indemnités; c) qu’ils devront être restitués au lésé; d) qu’ils devront être confisqués; e) qu’ils seront utilisés pour couvrir les créances compensatrices de l’État selon l’art. 71 CP.

7.1.2. Selon l'art. 267 al. 1 CPP, si le motif du séquestre disparaît, le ministère public ou le tribunal lève la mesure et restitue les objets et valeurs patrimoniales à l’ayant droit.

La restitution à l’ayant droit des objets et des valeurs patrimoniales séquestrés qui n’ont pas été libérés auparavant, leur utilisation pour couvrir les frais ou leur confiscation sont statuées dans la décision finale (art. 267 al. 3 CPP).

7.1.3. Alors même qu’aucune personne déterminée n’est punissable, le juge prononce la confiscation des objets qui ont servi ou devaient servir à commettre une infraction ou qui sont le produit d’une infraction, si ces objets compromettent la sécurité des personnes, la morale ou l’ordre public (art. 69 al. 1 CP). Le juge peut ordonner que les objets confisqués soient mis hors d’usage ou détruits (art. 69 al. 2 CP).

7.2. En l'espèce, les comprimés et le couteau figurant sous chiffres 1 à 3 de l'inventaire n°40122120230222 du 22 février 2023 seront séquestrés, confisqués et détruits.

Les habits du plaignant (chiffres 1 à 10 de l'inventaire n°40115020230221 du 21 février 2023) seront restitués à ce dernier tout comme les habits du prévenu (chiffres 1 à 4 de l'inventaire n°40118420230222 du 22 février 2023 et chiffres 4 et 5 de l'inventaire n°40122120230222 du 22 février 2023) à celui-ci.

8. Les indemnités dues au conseil nommé d'office et au conseil juridique gratuit seront fixées conformément aux art. 135 et 138 CPP.

9. Le prévenu sera condamné aux frais de la procédure et ses conclusions en indemnisation seront rejetées (art. 426 al. 1 et 429 CPP).

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL

statuant contradictoirement :

Déclare X______ coupable de tentative de meurtre (art. 111 CP cum art. 22 al. 1 CP), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et d'infraction à l'art. 19a ch. 1 de la loi fédérale sur les stupéfiants (LStup).

Condamne X______ à une peine privative de liberté de 3 ans, sous déduction de 297 jours de détention avant jugement (dont 101 jours en exécution anticipée de mesure) (art. 40 et art. 51 CP).

Condamne X______ à une amende de CHF 100.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution d'1 jour.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne que X______ soit soumis à un traitement institutionnel des addictions (art. 60 al. 1 CP).

Suspend l'exécution de la peine privative de liberté au profit de la mesure (art. 57 al. 2 CP).

Ordonne la transmission du présent jugement, du procès-verbal de l'audience de jugement et du rapport d'expertise psychiatrique du 7 août 2023 au Service de l'application des peines et mesures.

Ordonne l'expulsion de Suisse de X______ pour une durée de 8 ans (art. 66a al. 1 let. a CP).

Dit que l'exécution de la mesure et de la peine priment celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) (art. 20 de l'ordonnance N-SIS; RS 362.0).

Constate que X______ acquiesce aux conclusions civiles sur le principe (art. 124 al. 3 CPP).

Condamne X______ à payer à A______ CHF 15'000.-, avec intérêts à 5% dès le 21 février 2023, à titre de réparation du tort moral (art. 47 CO).

Renvoie A______ à agir par la voie civile s'agissant de ses conclusions civiles en réparation du dommage matériel (art. 126 al. 2 CPP).

Ordonne le séquestre, la confiscation et la destruction des comprimés et du couteau figurant sous chiffres 1 à 3 de l'inventaire n° 40122120230222 du 22 février 2023 (art. 263 al. 1 CPP et art. 69 CP).

Ordonne la restitution à A______ des vêtements et objets figurant sous chiffres 1 à 10 de l'inventaire n° 40115020230221 du 21 février 2023 et à X______ des vêtements et objets figurant sous chiffres 1 à 4 de l'inventaire n° 40118420230222 du 22 février 2023 et sous chiffres 4 et 5 de l'inventaire n° 40122120230222 du 22 février 2023 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Rejette les conclusions en indemnisation de X______ (art. 429 CPP).

Condamne X______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 24'209.60.-, y compris un émolument de jugement de CHF 1'500.- (art. 426 al. 1 CPP).

Fixe à CHF 9'364.50.- l'indemnité de procédure due à Me C______, défenseur d'office de X______ (art. 135 CPP).

Fixe à CHF 5'367.- l'indemnité de procédure due à Me B______, conseil juridique gratuit de A______ (art. 138 CPP).

Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Secrétariat d'Etat aux migrations, Office cantonal de la population et des migrations, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).

 

La Greffière

Léa Audrey GARCIA

La Présidente

Anne JUNG BOURQUIN

 

 

Voies de recours

Les parties peuvent annoncer un appel contre le présent jugement, oralement pour mention au procès-verbal, ou par écrit au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans le délai de 10 jours à compter de la communication du dispositif écrit du jugement (art. 398, 399 al. 1 et 384 let. a CPP).

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

Si le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit conteste également son indemnisation, il peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours dès la notification du jugement motivé, à la Chambre pénale d'appel et de révision contre la décision fixant son indemnité (art. 396 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

22'465.60

Convocations devant le Tribunal

CHF

180.00

Frais postaux (convocation)

CHF

14.00

Emolument de jugement

CHF

1'500.00

Etat de frais

CHF

50.00

Total

CHF

24'209.60

==========

 

Indemnisation du défenseur d'office

Vu les art. 135 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

X______

Avocat :  

C______

Etat de frais reçu le :  

13 décembre 2023

 

Indemnité :

Fr.

7'450.00

Forfait 10 % :

Fr.

745.00

Déplacements :

Fr.

500.00

Sous-total :

Fr.

8'695.00

TVA :

Fr.

669.50

Débours :

Fr.

0

Total :

Fr.

9'364.50

Observations :

- 37h15 à Fr. 200.00/h = Fr. 7'450.–.

- Total : Fr. 7'450.– + forfait courriers/téléphones arrêté à 10 % vu l'importance de l'activité déployée (art 16 al 2 RAJ) = Fr. 8'195.–

- 5 déplacements A/R à Fr. 100.– = Fr. 500.–

- TVA 7.7 % Fr. 669.50

En application de l'art. 16 al. 2 RAJ, réduction de :

2h00 et 1 déplacement pour le poste "Audiences" : la rémunération de l'avocat-e de la première heure devant être sollicitée auprès des Services financiers du Pouvoir judiciaire moyennant la formule idoine.

Ajout du temps de l'audience de jugement et de la lecture du verdict : 4h40 + 2 déplacements.

 

Indemnisation du conseil juridique gratuit

Vu les art. 138 al. 1 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

A______

Avocate :  

B______

Etat de frais reçu le :  

13 décembre 2023

 

Indemnité :

Fr.

4'370.00

Forfait 10 % :

Fr.

437.00

Déplacements :

Fr.

560.00

Sous-total :

Fr.

5'367.00

TVA :

Fr.

Débours :

Fr.

0

Total :

Fr.

5'367.00

Observations :

- 20h20 *admises à Fr. 150.00/h = Fr. 3'050.–.
- 12h *admises à Fr. 110.00/h = Fr. 1'320.–.

- Total : Fr. 4'370.– + forfait courriers/téléphones arrêté à 10 % vu l'importance de l'activité déployée (art 16 al 2 RAJ) = Fr. 4'807.–

- 2 déplacements A/R (Vacation) à Fr. 55.– = Fr. 110.–
- 6 déplacements A/R (Vacations) à Fr. 75.– = Fr. 450.–

* En application de l'art. 16 al. 2 RAJ réduction de :

- 0h20 au tarif collaboratrice pour les observations au MP (ces activités ne nécessitant pas d'investissement particulier en terme de travail juridique, sont des prestations comprises dans le forfait "courriers/téléphones");

- 4h30 au tarif stagiaire pour les recherches juridiques, l'assistance juridique admet 1h00, à bien plaire, pour les recherches juridiques pour les stagiaires (cf. remarque "in fine"**).

(**) Nous profitons de cette décision de taxation pour attirer votre attention sur le fait que les heures consacrées à l'acquisition de connaissances ainsi qu’à la formation du stagiaire en général, ne peuvent ni ne doivent être prises en charge par l'assistance juridique.

Ajout du temps de l'audience de jugement et de la lecture du verdict : 4h40 + 2 déplacements (Collaborateur).


 

Voie de recours si seule l'indemnisation ou seul le séquestre est contesté

Le défenseur d'office peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours, devant la Chambre pénale de recours contre la décision fixant son indemnité (art. 135 al. 3 let. a et 396 al. 1 CPP; art. 128 al. 1 LOJ).

Le conseil juridique gratuit peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours, devant la Chambre pénale de recours contre la décision fixant son indemnité (art. 135 al. 3 let. a et 396 al. 1 CPP; art. 128 al. 1 LOJ).

Restitution de valeurs patrimoniales et/ou d'objets

Lorsque le présent jugement sera devenu définitif et exécutoire, il appartiendra à l'ayant-droit de s'adresser aux Services financiers du pouvoir judiciaire (finances.palais@justice.ge.ch et +41 22 327 63 20) afin d'obtenir la restitution de valeurs patrimoniales ou le paiement de l'indemnité allouée, ainsi que, sur rendez-vous, au Greffe des pièces à conviction (gpc@justice.ge.ch et +41 22 327 60 75) pour la restitution d'objets.

 

Notification à X______, soit pour lui son Conseil Me C______
Par voie postale

Notification à A______
Par voie postale

Notification au Ministère public
Par voie postale