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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2413/2024

JTAPI/11/2025 du 07.01.2025 ( OCPM ) , REJETE

REJETE par ATA/429/2025

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR;REGROUPEMENT FAMILIAL;DROIT DES ÉTRANGERS;RESPECT DE LA VIE FAMILIALE
Normes : LEI.43; LEI.47; CDE.3; CEDH.8
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2413/2024

JTAPI/11/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 7 janvier 2025

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Mansour CHEEMA, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1973, est ressortissant du Pakistan.

2.             M. A______ est arrivé en Suisse le 16 août 1998.

3.             Le ______ 2000, M. A______ a épousé en France B______, ressortissante suisse née le ______ 1947, et a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour en Suisse. Leur divorce a été prononcé le ______ 2001.

4.             Le ______ 2001, M. A______ a épousé au Danemark C______, ressortissante suisse née le ______ 1953. Il a ensuite obtenu la naturalisation facilitée le 13 août 2007. Le 18 août 2008, le couple s'est séparé et leur divorce a été prononcé par le Tribunal de première instance (ci-après: TPI) le ______ 2009.

5.             Par arrêt du 10 avril 2014 (C-1633/2012), le Tribunal administratif fédéral (ci-après: TAF) a confirmé l'annulation de sa naturalisation facilitée.

6.             Depuis le jugement du TAF précité, M. A______ vivait en Suisse sans autorisation de séjour jusqu'au 2 janvier 2018, date à laquelle il a été mis au bénéfice d'une autorisation d'établissement.

7.             Par courrier du 21 avril 2021, M. A______ a formulé une demande de regroupement familial auprès de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM) en vue de faire venir sa conjointe, Madame D______, née le ______ 1989 et avec laquelle il s'est marié le ______ 2010 au Pakistan, ainsi que ses enfants, E______, né le ______ 2011, F______, née le ______ 2011, G______, née le ______ 2018, et H______, né le ______ 2020.

8.             Par courriers des 25 octobre 2021 et du 18 janvier 2022, l'OCPM a sollicité de M. A______ des informations supplémentaires quant à sa demande de regroupement familial.

9.             Le 3 mai 2022, M. A______ a transmis à l'OCPM des documents complémentaires, notamment trois fiches de décompte de versement de l'indemnité-chômage mentionnant un revenu mensuel de CHF 1'970.-, y compris une déduction d'une part de son revenu à destination de l'office des poursuites.

10.         Par courrier du 29 août 2023, l'OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser sa demande de regroupement familial, lui impartissant un délai de 30 jours pour faire valoir ses observations, ce qu'il a fait par courrier du 20 septembre 2023.

11.         Par décision du 11 juin 2024, l'OCPM a refusé la demande de regroupement familial formulée par M. A______.

Les conditions légales pour un regroupement familial n'étaient pas remplies. M. A______ avait cinq ans depuis le 21 mars 2010 pour déposer une demande d'entrée et d'autorisation de séjour dans le cadre du regroupement familial en faveur de sa conjointe. Or, la demande n'avait été déposée que le 21 avril 2021, soit plus de six ans après les délais légaux. De plus, l'acte de mariage n'avait pas été légalisé.

La demande en faveur de ses enfants E______ et F______ était aussi considérée comme étant hors-délai car M. A______ avait cinq ans depuis leur naissance, le 21 décembre 2011, pour déposer une demande d'entrée et d'autorisation de séjour dans le cadre du regroupement familial en leur faveur. La demande n'avait été déposée que le 21 avril 2021, soit quatre ans et quatre mois après les délais légaux.

Concernant la demande en faveur des enfants G______ et H______, même si celle-ci avait été effectuée dans les délais et que leurs actes de naissance avaient été légalisés, cela n'engendrait pas un nouveau délai pour Mme D______ et les deux premiers enfants du couple. Il n'était pas dans l'intérêt des deux enfants les plus jeunes d'être séparés de leur mère et de leur frère et sœur.

De plus, aucune raison familiale majeure n'avait été invoquée pour justifier un regroupement familial différé.

De surcroît, M. A______ ne disposait pas d'un logement convenable pour accueillir sa famille. L'OCPM avait réceptionné, le 29 septembre 2023, un contrat de location résidentiel pour un logement de 4 pièces, à partir du 18 septembre 2023, alors qu'il n'avait pas, à ce jour, effectué son changement d'adresse avec les documents requis.

Les conditions d'application de l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) n'étaient aussi pas remplies.

12.         Par acte du 15 juillet 2024, M. A______, sous la plume de son conseil, a formé recours contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après: le tribunal), concluant à ce qu'un bref délai lui soit accordé pour compléter son recours, à l'annulation de la décision litigieuse et à ce qu'il soit fait droit à sa demande, le tout sous suite de frais et dépens.

Son droit d'être entendu avait été violé. L'OCPM n'avait pas tenu compte des observations avancées notamment en lien avec le dies aquo du délai de cinq ans pour demander le regroupement familial et avec sa situation financière, alors même que ces éléments devaient être examinés dans le cadre d'une demande de regroupement familial.

L'OCPM avait pris comme dies aquo du calcul du délai du regroupement la date d'établissement du lien familial, soit pour l'épouse du recourant, la date du mariage célébré le ______ 2010, et pour les jumeaux, la date de leur naissance, soit le ______ 2011. Or, aux termes de la décision querellée, le recourant était au bénéfice d'une autorisation d'établissement depuis le 2 janvier 2018, et la situation antérieure à cette date n'avait pas été prise en compte. Dès lors, le dies acquo du délai pour demander le regroupement familial correspondait au moment où le recourant avait bénéficié de son autorisation d'établissement actuelle, soit le 2 janvier 2018. Suivre la position de l'OCPM reviendrait à vider de sa substance l'art. 47 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr).

Sa conjointe et ses enfants vivaient au Pakistan avec le père du recourant. Au décès de ce dernier, sa famille avait été contrainte de quitter le domicile qu'elle occupait. Ils avaient dû retourner vivre auprès de la famille de Mme D______, et n'y occupaient qu'une pièce. Cette situation était précaire. Ils étaient obligés de vivre dans un logement inadapté, ce qui portait atteinte au bon développement des enfants. Sa famille n'avait aucune possibilité de relogement ailleurs. En effet, le Pakistan était un pays notoirement dangereux pour les femmes isolées et sans soutien masculin. Il existait ainsi à tout le moins des raisons personnelles majeures justifiant le regroupement familial différé.

S'il était certes au chômage au début de l'année 2022, il avait depuis retrouvé un emploi et touchait aujourd'hui un salaire mensuel brut de CHF 4'500.-, ce qui lui permettrait d'assumer financièrement sa famille. Son épouse pourrait également trouver un emploi afin de ne pas émarger à l'aide sociale.

Il avait prévu de déménager dans un logement de 4 pièces dès le 1er décembre 2023, mais sans nouvelle de l'OCPM et ne nécessitant pas de logement plus grand pour lui-même, l'emménagement avait été reportée pour le 1er octobre 2024. Une tel logement de 4 pièces serait largement suffisant pour la famille.

S'agissant des deux plus jeunes enfants, il était dans leur intérêt de rejoindre leur père à Genève, dès lors qu'ils partageaient une pièce dans le logement de leur famille maternelle et qu'il était à même de s'occuper d'eux.

Enfin, la légalisation des documents officiels n'était pas une condition à l'octroi du regroupement familial, lequel nécessitait uniquement l'établissement de liens de filiation.

13.         Par décision du 15 juillet 2024, laquelle a annulé et remplacé celle du 11 juin 2024, l'OCPM a refusé la demande d'octroi et d'entrée et d'autorisation de séjour à titre de regroupement familial pour les membres de la famille de M. A______.

Les conditions légales pour un regroupement familial n'étaient pas remplies. M. A______ avait cinq ans depuis le 21 mars 2010 pour déposer une demande d'entrée et d'autorisation de séjour dans le cadre du regroupement familial en faveur de sa conjointe. Or, la demande n'avait été déposée que le 21 avril 2021 auprès de l'OCPM, soit plus de six ans après les délais légaux. Quand bien même il avait été sans autorisation de séjour de 2014 à 2018 suite à l'arrêt du TAF du 20 avril 2014 annulant sa naturalisation facilitée, il avait plus de quatre ans pour faire la demande de regroupement familial en faveur de sa conjointe entre mars 2010 et avril 2014 et presque onze mois, dès l'obtention de son autorisation d'établissement en janvier 2018, pour respecter les délais.

De plus, l'acte de mariage n'avait pas été légalisé. Selon le rapport de la représentation suisse à I______ (Pakistan) concernant la légalisation de l'acte de mariage, reçu en juin 2024, il était mentionné que l'acte de naissance de Mme D______ n'était pas valable, dès lors qu'elle était née en 1979 mais que sa naissance avait été enregistrée le ______ 2010. Les règles sur les inscriptions tardives n'avaient pas été respectées. Mme D______ devait faire annuler son inscription non valable dans le registre papier et dans le registre électronique par décision d'un tribunal civil. Ensuite, une nouvelle inscription (late registration) devait être faite dans le registre actuel, en respectant les règles relatives aux inscriptions tardives. L'acte de naissance de M. A______ n'était également pas valable, l'avocat de confiance n'ayant trouvé aucun acte de naissance dans aucun registre. Il convenait de partir du principe qu'il s'agissait d'un faux. M. A______ devait faire annuler l'inscription non valable dans le registre papier et dans le registre électronique par décision d'un tribunal civil compétent. Ensuite une nouvelle inscription devait être faite dans le registre actuel, en respectant toutes les règles relatives aux inscriptions tardives. De plus, le certificat de mariage n'était pas valable. D'après la loi au Pakistan, il fallait deux témoins lors du mariage. Or, les noms et détails des témoins du mariage, nécessaires à la validité juridique du « Nikahnama », n'avait pas été saisis. Le couple devait d'adresser au tribunal compétent afin d'obtenir l'autorisation de saisir ultérieurement les noms des témoins du mariage ainsi que leurs signatures sur les quatre pages du document et de rendre le document juridiquement valable.

La demande en faveur de ses enfants E______ et F______ était aussi considérée comme étant hors-délai car M. A______ avait cinq ans depuis le 21 décembre 2011 pour déposer une demande d'entrée et d'autorisation de séjour dans le cadre du regroupement familial en leur faveur. La demande n'avait été déposée que le 21 avril 2021 auprès de l'OCPM, soit quatre ans et quatre mois après les délais légaux. Quand bien même il avait été sans autorisation de séjour de 2014 à 2018 suite à l'arrêt du TAF du 20 avril 2014 annulant sa naturalisation facilitée, il avait eu plus de deux ans et quatre mois pour faire la demande de regroupement familial entre décembre 2011 et avril 2014 et deux ans et sept mois, dès l'obtention de son autorisation d'établissement en janvier 2018.

De plus, selon le rapport de juin 2024 de la représentation suisse au Pakistan, les enfants E______ et F______ étaient des jumeaux. Il était étrange que la naissance de E______ eut été enregistrée deux semaines après sa naissance et celle de F______ seulement presque 6 ans plus tard. L'avocat de confiance n'avait pas réussi à déterminer avec certitude qui étaient les parents biologiques des enfants. Dans la même maison, habitaient aussi trois frères de M. A______ avec leurs familles. Au Pakistan, il n'était pas inhabituel d'élever les enfants de ses frères et sœurs comme les siens. Il existait des doutes sur la filiation de ces deux enfants.

Concernant la demande en faveur des enfants G______ et H______, même si la demande était dans les délais et que leurs actes de naissance avaient été légalisés, cela n'engendrait pas un nouveau délai pour Mme D______ et les deux premiers enfants du couple. Il n'était pas dans l'intérêt des deux enfants plus jeunes de les séparer de leur mère et de leur frère et sœur.

De plus, aucune raison familiale majeure n'avait été invoquée pour justifier un regroupement familial différé.

De surcroit, M. A______ ne disposait pas d'un logement convenable pour accueillir sa famille. L'OCPM avait réceptionné, le 29 septembre 2023, un contrat de location résidentiel pour un logement de 4 pièces, à partir du 18 septembre 2023, alors qu'il n'avait pas, à ce jour, effectué son changement d'adresse avec les documents requis.

Les conditions d'application de l'art. 8 CEDH n'étaient aussi pas remplies.

14.         Par acte du 20 août 2024, M. A______, sous la plume de son conseil, a formé recours contre la décision du 15 juillet 2024 auprès du tribunal, concluant à la jonction avec la procédure A/2413/2024, à l'annulation de la décision litigieuse et à ce qu'il soit fait droit à sa demande, subsidiairement au renvoi de la cause à l'OCPM pour nouvelle décision au sens des considérants, le tout sous suite de frais et dépens.

Le contenu de ce recours était en substance identique à celui du 15 juillet 2024.

15.         Le 13 septembre 2024, l'OCPM a transmis ses observations, accompagnées de son dossier. Il a conclu au rejet du recours.

Contrairement à l'avis du recourant, le délai de cinq ans pour demander le regroupement familial débutait vis-à-vis de son épouse, le jour de la célébration du mariage, soit le ______ 2010, et pour les deux enfants E______ et F______, dès leur naissance en 2011, lorsque la nationalité suisse ne lui avait pas encore été retirée, conformément à l'art. 47 LEI.

Lui et son épouse n'avaient pas démontré que des motifs impérieux avaient empêché le dépôt d'une demande de regroupement familial dans les délais légaux. Leur vie séparée semblait découler d'un choix personnel.

S'agissant des deux plus jeunes enfants, bien que la demande avait été formulée dans les délais, une division de la famille ne semblait pas être dans leur intérêt.

Quoiqu'il en fut, ni les actes de naissance des recourants, ni le certificat de mariage n'avaient pu être légalisés par la représentation suisse au Pakistan.

16.         Par courrier du 15 octobre 2024, le recourant a informé le tribunal qu'il n'avait pas de réplique à formuler.

17.         Le détail des écritures et des pièces produites sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             D'emblée, s'agissant de la demande préalable de jonction, il sera relevé que conformément à l'art. 67 al. 2 et 3 LPA, dès lors que l'autorité intimé a annulé et remplacé sa précédente décision du 11 juin 2024 par la décision litigieuse, alors que le recours avait été introduit, le tribunal de céans a simplement continué d'instruire le recours interjeté en date du 15 juillet 2024, de sorte qu'aucune nouvelle procédure n'a été enregistrée suite à l'acte de recours du 20 août 2024. Il n'y a ainsi pas lieu de procéder à une quelconque jonction.

4.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

5.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

6.             Le recourant fait valoir une violation de son droit d'être entendu, au motif qu'au moment du prononcé de la première décision du 11 juin 2024, l'autorité intimée n'avait pas pris en compte les observations qu'il avait formulées en date du 20 septembre 2023 suite au courrier de l'OCPM l'informant de son intention de refuser de faire droit à sa demande de regroupement familial.

7.             Le droit d'être entendu garanti par 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 6 § 1 CEDH qui n'a pas de portée différente dans ce contexte comprend notamment le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, de produire des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (cf. ATF 142 II 218 consid. 2.3 p. 222 et 140 I 285 consid. 6.3.1 p. 299). Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 136 I 229 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_917/2018 du 29 janvier 2019 consid. 5.1). Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_51/2018 du 17 janvier 2019 consid. 4.1).

Dans une procédure initiée sur requête d'un administré, celui-ci est censé motiver sa requête en apportant tous les éléments pertinents ; il n'a donc pas un droit à être encore entendu avant que l'autorité ne prenne sa décision afin de pouvoir présenter des observations complémentaires (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n° 1528 ss, p. 509 s ; ATA/277/2021 du 2 mars 2021 consid. 5c ; ATA/523/2016 du 21 juin 2016 consid. 2b).

8.             En l'espèce, dans sa nouvelle décision du 15 juillet 2024, annulant et remplaçant la décision du 11 juin 2024, l'autorité intimé a manifestement pris en compte les éléments invoqués par le recourant dans son courrier d'observations du 20 septembre 2023.

En tout état, il ne faut pas perdre de vue que la demande de regroupement familial constitue une procédure initiée sur requête du recourant, de sorte qu'il lui appartenait, conformément aux principes précités, de transmettre à l'appui de sa demande l'ensemble des éléments en sa possession pouvant justifier l'octroi des autorisations sollicitées. L'OCPM n'avait ainsi aucune obligation de l'interpeller préalablement au prononcé des décisions du 11 juin et du 15 juillet 2024. Quoiqu'il en soit, le recourant, assisté d’un conseil, a été en mesure de s'exprimer par écrit à plusieurs reprises durant la présente procédure, d'exposer son point de vue et de produire toutes les pièces qu'il estimait utiles à l'appui de ses allégués. L'autorité intimée a également répondu à ses écritures, se prononçant sur les griefs qu'elle estimait pertinents pour l'issue du litige et le recourant a eu l'occasion de répliquer, ce qu'il n'a pas souhaité faire.

Compte tenu de ce qui précède, aucune violation de son droit d'être entendu n'est à relever et le grief sera écarté.

9.             Au fond, le recourant sollicite l'octroi d'autorisations de séjour à titre de regroupement familial pour sa conjointe et ses quatre enfants demeurant au Pakistan.

10.         La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants de Gambie.

11.         L'art. 43 al. 1 LEI prévoit que le conjoint étranger du titulaire d'une autorisation d'établissement ainsi que ses enfants célibataires étrangers de moins de 18 ans ont droit à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité aux conditions suivantes : ils vivent en ménage commun avec lui (let. a) ; ils disposent d'un logement approprié (let. b) ; ils ne dépendent pas de l'aide sociale (let. c) ; ils sont aptes à communiquer dans la langue nationale parlée au lieu de domicile (let. d); la personne à l'origine de la demande de regroupement familial ne perçoit pas de prestations complémentaires annuelles au sens de la loi du 6 octobre 2006 sur les prestations complémentaires (LPC - RS 831.30) ni ne pourrait en percevoir grâce au regroupement familial (let. e).

12.         Le Secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) a précisé les dispositions précitées dans ses directives (Directives LEI, Domaine des étrangers, octobre 2013, état au 1er janvier 2025 ; ci-après : Directives LEI) qui ne lient pas le juge mais dont celui-ci peut tenir compte pour assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré, pourvu qu'elles respectent le sens et le but de la norme applicable (ATA/1304/ 2019 du 27 août 2019 consid. 6), conformément à l'art. 89 OASA.

13.         Le regroupement familial doit être demandé dans un délai de cinq ans (art. 47 al. 1 LEI). Pour les enfants de plus 12 ans, le regroupement doit intervenir dans un délai de douze mois. Pour les membres de la famille d’étrangers, les délais commencent à courir lors de l’octroi de l’autorisation de séjour ou lors de l’établissement du lien familial (art. 47 al. 3 let. b LEI). Il est respecté si la demande de regroupement familial est déposée avant son échéance (ATA/1109/2023 du 10 octobre 2023 consid. 2.2 et les références citées). Ces délais sont valables tant pour le regroupement familial du conjoint que pour celui des enfants (arrêt du TF 2C_914/2014 du 18 mai 2015 consid. 4.1).

14.         Si l’étranger pouvait bénéficier du regroupement familial avant l’octroi de l’actuelle autorisation obtenue à la suite de la transformation de l’admission provisoire en autorisation de séjour ou de l’autorisation de séjour en autorisation d’établissement, il en est tenu compte pour calculer le délai pour demander le regroupement familial. Toutefois, les étrangers ne disposant pas d’un droit au regroupement familial qui ont sollicité en vain une première autorisation de séjour en faveur des membres de leur famille peuvent, ultérieurement à la survenance d’une circonstance leur ouvrant un véritable droit au regroupement familial, former une nouvelle demande pour autant que la première ait été déposée dans les délais visés à l’art. 47 LEI et que la seconde le soit également dans ces délais (cf. ATF 137 II 393 consid. 3.3 et arrêt 2C_888/2011 du 20 juin 2012 consid. 2.4 et 2.5 ; directive LEI, ch. 6.10.1 p. 127).

Le délai commence à courir lors de l’établissement du lien familial, soit la date du mariage pour les conjoints mariés. Selon le droit des étrangers, le lien de filiation au sens de l’art. 47 LEI naît en principe à la naissance de l’enfant, et ce, même si la paternité n’est enregistrée ou reconnue qu’ultérieurement. Demeurent réservés les cas dans lesquels la filiation n’était initialement pas connue ou était litigieuse. Le lien de filiation naît alors au moment de la reconnaissance de l’enfant ou de l’entrée en force de la décision du juge dans le procès en paternité ; par conséquent, le délai de dépôt de la demande de regroupement familial commence à courir seulement à partir de ce moment. De même, un lien de filiation naît au moment de l’adoption et le délai commence à courir à cette date (directive LEI, ch. 6.10.1 p. 127).

15.         Selon la jurisprudence, la survenance d'une circonstance ouvrant à l'étranger un véritable droit au regroupement familial (telle la délivrance d'une autorisation d'établissement ou l'octroi de la nationalité suisse à un étranger jusque-là titulaire d'une autorisation de séjour) fait courir un nouveau délai à compter de l'ouverture de ce droit, pour autant qu'une première demande (demeurée infructueuse) ait été déposée dans les délais prévus par l'art. 47 al. 1 et al. 3 LEI et que la seconde demande intervienne également dans ces délais (cf. ATF 137 II 393 consid. 3.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_409/2018 du 23 janvier 2019 consid. 3.10, 2C_323/2018 du 21 septembre 2018 consid. 3 ; 2C_259/2018 du 9 novembre 2018 consid. 3.1, 2C_787/2016 du 18 janvier 2017 consid. 5 et la jurisprudence citée).

16.         Les délais prévus à l’art. 47 LEI visent à permettre une intégration précoce (ATF 133 II 6 consid. 5.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1176/2016 du 26 juillet 2017 consid. 4.2.) et ont également pour objectif la régulation de l’afflux d’étrangers (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1/2017 du 22 mai 2017 consid. 4.1.2). Ces buts étatiques légitimes sont compatibles avec la CEDH (ATF 142 II 35 consid. 6.1). Le Tribunal fédéral a précisé que même si le législateur a voulu soutenir une intégration des enfants le plus tôt possible, les délais fixés par la loi sur les étrangers ne sont pas de simples prescriptions d'ordre, mais des délais impératifs, leur stricte application ne relevant dès lors pas d'un formalisme excessif (arrêt du Tribunal fédéral 2C_289/2019 du 28 mars 2019 consid. 5).

17.         Passé le délai de l’art. 47 al. 1 LEI, l’autorisation sollicité ne peut être délivrée que pour des raisons familiales majeures (al. 4).

Selon la volonté du législateur, l'octroi d'une autorisation en vue de regroupement familial, lorsque la demande déposée en ce sens intervient en dehors des délais prévus à cet effet, doit rester l'exception et ne pas constituer la règle (cf. notamment arrêts du Tribunal fédéral 2C_781/2015 du 1er avril 2016 consid. 4.2 ; 2C_767/2015 du 19 février 2016 consid. 5.1.1). Il n'est fait usage de l'art. 47 al. 4 LEI qu'avec retenue (cf. notamment ATF 137 I 284 consid. 2.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_969/2017 du 2 juillet 2018 consid. 3.3 ; 2C_1102/2016 du 25 avril 2017 consid. 3.2 ; 2C_363/2016 du 25 août 2016 consid. 2.3).

Les principes jurisprudentiels développés sous l'ancien droit en matière de regroupement familial partiel subsistent lorsque le regroupement familial est demandé pour des raisons familiales majeures (ATF 137 I 284 consid. 2.3.1 ; 136 II 78 consid. 4.7).

18.         Les raisons familiales majeures au sens des art. 47 al. 4 LEI et 73 al. 3 OASA peuvent être invoquées, selon l'art. 75 OASA, lorsque le bien de l'enfant ne peut être garanti que par un regroupement familial en Suisse. C'est l'intérêt de l'enfant, non les intérêts économiques (prise d'une activité lucrative en Suisse), qui prime. Selon la jurisprudence, il faut prendre en considération tous les éléments pertinents du cas particulier. Il y a lieu de tenir compte du sens et des buts de l'art. 47 LEI. Il s'agit également d'éviter que des demandes de regroupement familial différé soient déposées peu avant l'âge auquel une activité lucrative peut être exercée lorsque celles-ci permettent principalement une admission facilitée au marché du travail plutôt que la formation d'une véritable communauté familiale. D'une façon générale, il ne doit être fait usage de l'art. 47 al. 4 LEI qu'avec retenue (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1/2017 du 22 mai 2017 consid. 4.1.3 et les références citées).

Des raisons familiales majeures sont données au sens de l'art. 47 al. 4 LEI notamment le cas lorsque des enfants se trouveraient livrés à eux-mêmes dans leur pays d'origine, par exemple en cas de décès ou de maladie de la personne qui en a la charge (arrêt du Tribunal fédéral (2C_1025/2017 du 22 mai 2018 consid. 6.1).

Quand le regroupement familial est demandé en raison de changements importants des circonstances à l'étranger, il convient d'examiner s'il existe des solutions alternatives permettant à l'enfant de rester où il vit. De telles solutions correspondent en effet mieux au bien-être de l'enfant, parce qu'elles permettent d'éviter que celui-ci ne soit arraché à son milieu et à son réseau de relations de confiance. Cette exigence est d'autant plus importante pour les adolescents qui ont toujours vécu dans leur pays d'origine dès lors que plus un enfant est âgé, plus les difficultés d'intégration qui le menacent apparaissent importantes. Il ne serait toutefois pas compatible avec l'art. 8 CEDH de n'admettre le regroupement familial différé qu'en l'absence d'alternative. Simplement, une telle alternative doit être d'autant plus sérieusement envisagée et soigneusement examinée que l'âge de l'enfant est avancé et que la relation avec le parent vivant en Suisse n'est pas (encore) trop étroite. La question de la garde ne joue ainsi plus de rôle spécifique s'agissant d'enfants devenus majeurs (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1172/2016 du 26 juillet 2017 consid. 4.3.2 et les références citées).

Les motifs (et les preuves) susceptibles de justifier le regroupement familial tardif d'un enfant sont soumis à des exigences d'autant plus élevées que l'enfant est avancé en âge, a vécu longtemps séparé de son parent établi en Suisse et a accompli une partie importante de sa scolarité dans son pays d'origine (ATF 136 II 78 consid. 4.1).

En cas de regroupement familial ultérieur, l'âge des enfants concernés et les années qu'ils ont passées à l'étranger doivent être pris en compte afin de favoriser le regroupement en Suisse des enfants en bas âge. En règle générale, ces derniers ont conservé des liens plus étroits avec le parent vivant en Suisse que ceux qui sont déjà plus âgés et ont passé de nombreuses années à l'étranger. A cela s'ajoute que les enfants en bas âge sont plus à même de s'adapter à un nouvel environnement familial, social et culturel (nouvelles personnes de référence à la maison et à l'école, nouveau mode de vie, acquisition d'une nouvelle langue, éventuellement rattrapage de programmes scolaires, etc.). En effet, ils sont moins enclins à rencontrer des difficultés d'intégration dues au déracinement que les jeunes et les adolescents (ATF 133 II 6 consid. 5.3).

19.         Il faut également tenir compte de l'intérêt de l'enfant à maintenir des contacts réguliers avec ses parents, ainsi que l'exige l'art. 3 § 1 de la Convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (CDE - RS 0.107), étant précisé que les dispositions de la convention ne font toutefois pas de l'intérêt de l'enfant un critère exclusif, mais un élément d'appréciation dont l'autorité doit tenir compte lorsqu'il s'agit de mettre en balance les différents intérêts en présence (ATF 139 I 315 consid. 2.4). Enfin, les raisons familiales majeures pour le regroupement familial ultérieur doivent être interprétées d'une manière conforme au droit fondamental au respect de la vie familiale (art. 13 Cst. et 8 CEDH ; cf. not. arrêts du Tribunal fédéral 2C_969/2017 du 2 juillet 2018 consid. 3.3 ; 2C_1025/2017 du 22 mai 2018 consid. 6 ; 2C_207/2017 du 2 novembre 2017 consid. 5.3.1 ; 2C_781/2015 du 1er avril 2016 consid. 4.2 ; 2C_1129/2014 du 1er avril 2015 consid. 3.2).

20.         Selon la jurisprudence, le regroupement familial suppose que le parent établi en Suisse ait maintenu avec ses enfants une relation familiale prépondérante en dépit de la séparation et de la distance (ATF 133 II 6 consid. 3.1). On peut notamment admettre qu'il y a une relation familiale prépondérante entre les enfants et le parent vivant en Suisse lorsque celui-ci a continué d'assumer de manière effective pendant toute la période de son absence la responsabilité principale de leur éducation, en intervenant à distance de manière décisive pour régler leur existence sur les questions essentielles, au point de reléguer le rôle de l'autre parent à l'arrière-plan. Pour autant, le maintien d'une telle relation ne signifie pas encore que le parent établi en Suisse puisse faire venir ses enfants à tout moment et dans n'importe quelles conditions. Il faut, comme dans le cas où les deux parents vivent en Suisse séparés de leurs enfants depuis plusieurs années, réserver les situations d'abus de droit, soit notamment celles dans lesquelles la demande de regroupement vise en priorité une finalité autre que la réunion de la famille sous le même toit. Par ailleurs, indépendamment de ces situations d'abus, il convient, surtout lorsque la demande de regroupement familial intervient après de nombreuses années de séparation, de procéder à un examen de l'ensemble des circonstances portant en particulier sur la situation personnelle et familiale de l'enfant et sur ses réelles possibilités et chances de s'intégrer en Suisse et d'y vivre convenablement. Pour en juger, il y a notamment lieu de tenir compte de son âge, de son niveau de formation et de ses connaissances linguistiques. Un soudain déplacement de son centre de vie peut en effet constituer un véritable déracinement pour lui et s'accompagner de grandes difficultés d'intégration dans le nouveau cadre de vie ; celles-ci seront d'autant plus probables et potentiellement importantes que son âge sera avancé (ATF 133 II 6 consid. 3.1.1).

Les circonstances (politiques, économiques, sécuritaires, sociales, etc.) affectant l'ensemble de la population ne sauraient justifier, de manière générale, une autorisation fondée sur des raisons familiales majeures au sens de l'art. 47 al. 4 LEI (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_767/2013 du 6 mars 2014 consid. 3.5 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3819/2014 du 1er novembre 2016 consid. 6.3.3 ; C-5312/2011 du 15 janvier 2013 consid. 6.5).

21.         Le désir – pour compréhensible qu'il soit – de voir (tous) les membres de la famille réunis en Suisse, souhait qui est à la base de toute demande de regroupement familial et représente même une condition d'un tel regroupement, ne constitue pas en soi une raison familiale majeure. Lorsque la demande de regroupement familial est déposée hors délai et que la famille a vécu séparée volontairement, d'autres raisons sont nécessaires (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1025/2017 du 22 mai 2018 consid. 6.1 et 6.2 et la jurisprudence citée).

22.         S’agissant en particulier du regroupement familial du conjoint après l’échéance du délai légal, tant que des raisons objectives et plausibles ne justifient pas le contraire, il y a lieu d’admettre que les conjoints qui vivent volontairement séparés pendant des années manifestent ainsi un moindre intérêt à vivre ensemble (arrêts du Tribunal fédéral 2C_348/2016 du 17 mars 2017 consid. 2.3 et 2C_914/2014 du 18 mai 2015 consid. 4.1). Un motif apparaît d’autant plus sérieux que les époux ne pourraient remédier à leur situation de vie séparée qu’au prix d’un préjudice important (arrêt 2C_544/2010 du 23 décembre 2010 consid. 2.3.1 ; Directives LEI, ch. 6.10.3).

23.         Aux termes de l'art. 8 par. 1 CEDH, toute personne a notamment droit au respect de sa vie privée et familiale. Pour autant, les liens familiaux ne sauraient conférer de manière absolue un droit d'entrée et de séjour en Suisse, ni non plus, pour un étranger, le droit de choisir le lieu de domicile de sa famille (cf. ATF 142 II 35 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 5.1). Une ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'art. 8 par. 1 CEDH est en effet possible aux conditions de l'art. 8 par. 2 CEDH. La question de savoir si, dans un cas d'espèce, les autorités compétentes sont tenues d'accorder une autorisation de séjour fondée sur l'art. 8 CEDH doit être résolue sur la base d'une pesée de tous les intérêts publics et privés en présence (cf. ATF 137 I 284 consid. 2.1 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 5.1). S'agissant d'un regroupement familial, auquel peut notamment prétendre le conjoint de l'étranger qui possède le droit de résider durablement en Suisse (cf. ATF 146 I 185 consid. 6.1 et les arrêts cités), il convient notamment de tenir compte dans la pesée des intérêts des exigences auxquelles le droit interne soumet celui-ci. Il n'est en effet pas concevable que, par le biais de l'art. 8 CEDH, un étranger qui ne dispose, en vertu de la législation interne, d'aucun droit à faire venir sa famille proche en Suisse, puisse obtenir des autorisations de séjour pour celle-ci sans que les conditions posées par les art. 42 ss LEI ne soient réalisées (cf. ATF 146 I 185 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 5.1 ; 2C_153/2018 du 25 juin 2018 consid. 5.3 et les arrêts cités). Il faut ajouter à cela le respect des délais légaux imposés par l'art. 47 LEI (arrêt du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 5.1).

En résumé, un droit durable à une autorisation de séjour fondé sur l'art. 8 CEDH donne en principe droit au regroupement familial, pour autant que les conditions posées par le droit interne - en l'espèce les art. 43 et 47 LEI - à ce regroupement soient remplies (cf. ATF 146 I 185 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 5.1 in fine).

La jurisprudence relative à l'art. 8 CEDH dans le cadre du regroupement familial partiel relève que le parent qui a librement décidé de venir en Suisse et d'y vivre séparé de sa famille pendant de nombreuses années ne peut normalement pas se prévaloir d'un droit au regroupement familial en faveur de ses enfants restés au pays lorsqu'il entretient avec ceux-ci des contacts moins étroits que l'autre parent ou les membres de la famille qui en prennent soin, et qu'il peut maintenir les relations existantes (ATF 133 II 6 consid. 3.1.2 p. 10 et les arrêts cités; ATF 2C_941/2010 du 10 mai 2011).

24.         En l’espèce, conformément aux directives du SEM, pour la détermination du dies aquo du délai de l'art. 47 LEI, s'agissant de sa conjointe, c'est la date du mariage avec cette dernière qui est déterminante, soit le 21 mars 2010. S'agissant de ses enfants, la date déterminante est celle de leur naissance, soit le 21 décembre 2011.

Bien que titulaire d’une autorisation de séjour valable depuis le 2 janvier 2018, le recourant avait bénéficié d'une naturalisation facilitée, et partant de la nationalité suisse, depuis le 13 août 2007, avant d'en être déchu par arrêt du TAF du 10 avril 2014. Aux date déterminantes précitées, le recourant disposait de la nationalité suisse et, partant, devait solliciter le regroupement familial dans un délai impératif de cinq ans, soit jusqu’au 21 mars 2015 s'agissant de son épouse, et le 21 décembre 2016 pour ses jumeaux. Si l'acquisition de sa nationalité suisse a été annulée par arrêt du 10 avril 2014, force est de constater que dans l'intervalle, le recourant n'a formulé aucune demande de regroupement familial pour sa conjointe et ses jumeaux. Au bénéfice de son autorisation d'établissement actuelle depuis 2 janvier 2018, il n'a formulé sa demande de regroupement familial qu'en date du 25 octobre 2021. Or, il convient de calculer le délai pour solliciter le regroupement familial en prenant en considération le fait que le recourant pouvait en bénéficier avant l'octroi de son actuelle autorisation de séjour.

En l'occurrence, s'agissant de sa conjointe, le recourant disposait entre mars 2010 et avril 2014 d'un peu plus de quatre ans pour déposer sa demande et de presque onze mois, dès l'obtention de son autorisation d'établissement en janvier 2018, pour respecter les délais. S'agissant des jumeaux, le recourant disposait de plus de deux ans et quatre mois pour faire la demande de regroupement familial entre décembre 2011 et avril 2014 et deux ans et sept mois, dès l'obtention de son autorisation d'établissement en janvier 2018. Dans cette mesure, effectuée le 25 octobre 2021, sa demande est manifestement tardive s'agissant de sa conjointe et de ses jumeaux.

S'agissant de ses deux enfants les plus jeunes, G______ et H______, nés respectivement les ______ 2018 et ______ 2020, la demande de regroupement familial a été formulé dans le délai de cinq ans prévu par l'art. 47 LEI, ce que l'autorité intimée ne conteste pas. Cela étant, âgés respectivement de 5 et 4 ans, ces enfants n'ont à ce jour connu que la vie au Pakistan, auprès de leur mère et leur frère et sœur. En tout état, il doit être constaté que vu leur jeune âge, ils nécessiteraient une prise en charge totale que le recourant, qui exerce une activité lucrative dans le domaine de la restauration, serait difficilement à même de leur offrir seul. Le recourant n’a de plus jamais fait ménage commun avec ces derniers. Séparer ces enfants de leur mère, de leur sœur et de leur frère, avec lesquelles ils vivent depuis leur naissance afin de venir vivre dans un environnement inconnu auprès de leur père serait sans conteste un déracinement pour eux. Un tel regroupement partiel n’apparait ainsi manifestement pas dans leur intérêt prépondérant.

Reste encore à examiner si des raisons familiales majeures sont susceptibles de justifier un regroupement familial différé s’agissant Mme D______ et des jumeaux, seule hypothèse dans laquelle cette dernière et ses enfants pourraient voir leurs requêtes acceptées.

À l'appui de son recours, le recourant invoque la vie difficile de sa conjointe et ses enfants au Pakistan en raison des conséquences du décès de son père le ______ 2022. Or, le tribunal ne peut que constater que ces éléments ne constituent pas des raisons familiales majeures au sens de l’art. 47 al. 4 LEI. Outre le fait que ces difficultés ne constituent que des allégations non démontrées, il ne ressort pas des éléments au dossier ni des explications du recourant que les intéressés ne seraient plus en mesure de continuer à vivre au Pakistan, comme ils l’ont fait jusqu’alors, étant précisé que la demande de regroupement familiale a été formulée avant le décès du père du recourant le ______ 2022. L’on relèvera à cet égard que le recourant, lorsqu’il a épousé Mme D______, savait que cette dernière, en l’absence de dépôt d’une demande en vue de vivre ensemble en Suisse, ne pourrait faire ménage commun avec lui après leur union. Ainsi, le fait de vivre dans deux pays différents suite à la célébration de leur mariage il y a plus de dix ans découle d’un choix de vie que les époux ont fait en toute connaissance de cause et dans lequel ils ont persisté même après la naissance de leurs enfants. Il apparaît ainsi que Mme D______ et le recourant ont choisi de vivre séparés, nonobstant les inconvénients qui en découlaient. Partant, ils ne sauraient désormais valablement se prévaloir de ces inconvénients, étant rappelé que le désir des requérants de voir les membres de leur famille réunis en Suisse ne constitue, conformément à la jurisprudence précitée, pas une raison familiale majeure. Les conditions restrictives posées au regroupement familial différé par l’art. 47 al. 4 LEI, en relation avec les art. 73 al. 3 et 75 OASA ne sont ainsi pas remplies

Au vu de ce qui précède, c’est dès lors à juste titre que l’autorité intimée a refusé de donner une suite positive à la demande de regroupement familial déposée en faveur de Mme D______ et ses enfants.

25.         Enfin, la décision de refus querellée ne consacre aucune violation de l’art. 8 CEDH.

En effet, compte tenu du raisonnement qui précède, force est de constater que Mme D______ et ses enfants ne disposent, en vertu de la législation suisse, d’aucun droit à obtenir un titre de séjour sur le sol helvétique. Par conséquent, les conditions posées par les art. 43 ss LEI n'étant pas réalisées, ils ne sauraient valablement se prévaloir du droit conventionnel pour contourner la législation interne et obtenir un titre de séjour en leur faveur, étant rappelé que le droit au respect de la vie familiale n’est pas absolu et que la mise en œuvre d’une politique restrictive en matière de séjour des étrangers constitue précisément un but légitime susceptible de justifier une ingérence dans ce domaine, conformément à la jurisprudence citée supra.

En tout état, le tribunal constate que la famille pourra continuer d’entretenir des relations à distance, comme elle l’a fait jusqu’à présent.

Enfin, pour les motifs exposés précédemment, la décision litigieuse est également conforme au bien des enfants, notamment sous l’angle de la CDE, qui n'accorde, au demeurant, aucun droit à une réunification familiale.

26.         Compte tenu de ce qui précède, le tribunal considère que l'OCPM n'a violé ni le droit conventionnel, ni le droit fédéral, ni encore excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation (cf. art. 96 LEI) en rejetant la demande de regroupement familial déposée par le recourant en faveur des membres de sa famille.

27.         Mal fondé, le recours est rejeté.

28.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

29.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 15 juillet 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 15 juillet 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

Le greffier