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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2393/2019

ATA/277/2021 du 02.03.2021 sur JTAPI/193/2020 ( PE ) , REJETE

Descripteurs : DROIT DES ÉTRANGERS;AUTORISATION DE SÉJOUR;CAS DE RIGUEUR;DÉCISION DE RENVOI;INTÉGRATION SOCIALE;PAYS D'ORIGINE;EXCÈS ET ABUS DU POUVOIR D'APPRÉCIATION;DROIT D'ÊTRE ENTENDU
Normes : Cst.29.al2; LPA.41; LEI.30.al1.letb; OASA.31.al1; LEI.64.al1; LEI.83.al1; LEI.83.al4
Résumé : Confirmation du refus de délivrance d'une autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité au recourant, ressortissant d’Albanie, arrivé en Suisse pour la première fois en 2003 dans le cadre d’un séjour pour études (de droit), mais ayant quitté à plusieurs reprises la Suisse, pour suivre des études ou travailler à l’étranger. Examen effectuée par l’OCPM également sous l’angle de l’affaire Papyrus.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2393/2019-PE ATA/277/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 mars 2021

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Jean Orso, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
26 février 2020 (JTAPI/193/2020)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1984, est ressortissant d'Albanie.

2) Arrivé à Fribourg en juillet 2003, M. A______ a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour de courte durée du 15 juillet 2003 au 4 juillet 2004, date de son départ pour l'Albanie, pour suivre une année de cours d'introduction aux études universitaires dans le canton de Fribourg.

3) Le 25 août 2004, M. A______ a déposé auprès de l'ambassade suisse en Albanie une demande d'autorisation de séjour pour études.

4) Arrivé à Genève le 12 octobre 2004, l'intéressé a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour pour études en date du 27 octobre 2004, laquelle a été régulièrement renouvelée jusqu'au 30 septembre 2007.

5) Après avoir obtenu son bachelor en droit en septembre 2007 auprès de la faculté de droit de l'Université de Genève (ci-après : l'université), M. A______ a annoncé, le 5 septembre 2007, son départ définitif de Suisse à destination de l'Albanie pour la fin du mois.

6) Le 20 juillet 2009, M. A______ a formé auprès de l'ambassade suisse en Albanie une autorisation de séjour pour études.

7) Arrivé en Suisse le 4 septembre 2009, il a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour pour études en date du 22 octobre 2009, laquelle a été régulièrement renouvelée jusqu'au 30 septembre 2012.

8) M. A______ a obtenu un master en droit auprès de l'université en septembre 2010, le certificat de spécialisation en matière d'avocature en juillet 2011 et un certificat de droit transnational en février 2012.

9) À compter du 1er septembre 2011 et jusqu'au 30 novembre 2012, l'intéressé a travaillé pour le compte de Maître B______.

10) Dans ce cadre, Me B______ a déposé, le 13 septembre 2011, une demande d'autorisation de séjour avec activité lucrative en faveur de M. A______.

11) Par décision du 12 octobre 2011, l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) a refusé de faire droit à cette demande. L'admission de M. A______ ne revêtait pas un intérêt économique prépondérant et l'ordre de priorité n'avait pas été respecté.

12) Par jugement du 18 septembre 2012 (JTAPI/1130/2012), le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a rejeté le recours formé par M. A______ contre la décision précitée de l'OCIRT et l'a confirmé.

13) M. A______ a quitté la Suisse fin novembre 2012.

14) Le 15 juillet 2015, Maître C______ a déposé une demande d'autorisation de séjour avec activité lucrative en faveur de M. A______ qu'il souhaitait engager dans son étude.

15) Par décision du 5 août 2015, l'OCIRT a refusé de faire droit à cette demande au motif que l'ordre de priorité n'avait pas été respecté.

16) Par jugement du 23 octobre 2015 (JTAPI/1237/2015), le TAPI a déclaré le recours interjeté contre la décision précitée irrecevable pour cause de tardiveté.

17) Par contrat du 1er janvier 2017, Me C______ a engagé M. A______ en qualité de juriste à plein temps, pour une durée indéterminée.

18) Par courriers des 24 et 25 juillet 2017, M. A______ a sollicité auprès de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) la régularisation de sa situation sur la base des critères de l'opération Papyrus.

Il était présent sur le territoire depuis quatorze ans, était indépendant financièrement et ne faisait l'objet d'aucune poursuite, n'avait jamais dépendu de l'aide sociale, bénéficiait d'une excellente intégration en Suisse et n'avait jamais fait l'objet d'une condamnation pénale.

Étaient jointes de nombreuses pièces, dont notamment : plusieurs lettres de recommandation louant les qualités sociales et professionnelles de l'intéressé ; une attestation de l'Hospice général du 29 juin 2017 à teneur de laquelle l'intéressé n'était pas aidé financièrement ; un extrait de l'office des poursuites du 30 juin 2017 à teneur duquel l'intéressé ne faisait l'objet d'aucune poursuite ni acte de défaut de biens ; un extrait de casier judiciaire vierge daté du 11 juillet 2017 et une attestation de Me C______ du 13 juillet 2017 selon laquelle il logeait l'intéressé chez lui depuis le 15 décembre 2016.

19) Le 20 juin 2018, M. A______ a fourni à l'OCPM différents documents, soit notamment une copie intégrale de son passeport, et des informations complémentaires.

Entre 2009 et 2012, il y avait eu chaque année de courtes interruptions de son séjour en Suisse pour aller voir sa famille en Albanie, pendant les vacances d'été et/ou d'hiver. Il en avait été de même en 2013, étant précisé qu'il avait également travaillé de manière ponctuelle pour F______ SA, tout en faisant la navette entre la Suisse et le Kosovo. Durant l'année 2014, il y avait eu de courtes interruptions de son séjour pour aller voir sa famille en Albanie. En sus, il avait travaillé pour l'Etude D______, en Albanie.

20) Le 1er février 2019, l'OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser sa demande et lui a imparti un délai pour exercer par écrit son droit d'être entendu.

Malgré une intégration professionnelle particulièrement marquée, M. A______ ne comptabilisait pas dix années de séjour continu en Suisse. Par conséquent, il ne remplissait pas les conditions de l'opération Papyrus, ni celles en lien avec les autres types de cas de rigueur.

21) Le 11 février 2019, M. A______ a sollicité un rendez-vous avec l'OCPM, lequel lui a été refusé, par courriel du 12 février 2019, au motif que personne n'était reçu en dehors des convocations officielles, sauf en cas de nécessité ou d'urgence.

22) Le 30 avril 2019, M. A______ a fait part de ses observations.

Étaient notamment jointes :

-       une attestation du mari de sa soeur, Monsieur E______, du 29 avril 2019, certifiant que l'intéressé avait vécu avec son épouse et lui-même à Genève du début de l'année 2013 jusqu'en août 2014, puis dans leur logement actuel jusqu'en décembre 2014 ;

-       une attestation de Me C______ du 26 avril 2019 à teneur de laquelle l'intéressé avait logé chez lui dans son appartement à Genève depuis 2015 et y était même resté après qu'il ait lui-même quitté ledit appartement en mars 2016. Entre 2013 et 2015, il avait souvent rencontré M. A______, lequel avait dormi occasionnellement chez lui ;

-       trois attestations d'amis confirmant avoir fréquenté l'intéressé entre 2013 et 2016.

23) Par décision du 21 mai 2019, l'OCPM a refusé de faire droit à la requête de M. A______ et ainsi de soumettre son dossier avec un préavis positif au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), a prononcé son renvoi et lui a imparti un délai au 31 juillet 2019 pour quitter la Suisse, son renvoi étant possible, licite et raisonnablement exigible.

Sa situation ne représentait pas un cas de détresse personnelle. Il avait effectué un premier séjour dans le canton de Genève à l'âge de 19 ans, du
12 octobre 2004 au 30 septembre 2007, pour suivre des études. Il avait donc vécu toute son enfance, son adolescence et une partie de sa vie d'adulte dans son pays d'origine et y avait forcément conservé des attaches tant sociales, culturelles que familiales. Puis, l'intéressé avait effectué un deuxième séjour dans le cadre de ses études à Genève du 4 septembre 2009 au 30 septembre 2012. Les séjours effectués en vue d'une formation étaient considérés comme des séjours temporaires, et M. A______ était censé quitter la Suisse à l'échéance de son permis. La durée du séjour de l'intéressé devait être relativisée vu les nombreuses interruptions de séjour durant les dix dernières années. M. A______ n'avait de plus pas été en mesure de prouver la continuité de son séjour par des justificatifs probants pour la période s'échelonnant entre octobre 2012 et juillet 2015. Suite à son recours rejeté le 18 septembre 2012 par le TAPI, il était parti à l'étranger et avait notamment travaillé en Albanie et au Kosovo. Dans sa détermination du
30 avril 2019, M. A______ avait soutenu ne pas avoir gardé de trace officielle de sa présence en Suisse étant donné son séjour illégal ; seuls des témoignages de connaissances et des copies de tampons d'entrée en Suisse dans son passeport avaient été transmis à l'OCPM pour justifier sa présence à Genève pour la période susmentionnée. Dans le courrier du 20 juin 2018, il avait indiqué avoir effectué de courtes interruptions de séjour pour aller voir sa famille en Albanie de 2009 à ce jour, ainsi qu'avoir travaillé de manière ponctuelle en qualité de juriste en Albanie et au Kosovo tout en faisant la navette entre la Suisse et le Kosovo en 2013 et 2014. Dès lors, une réintégration sociale et professionnelle en Albanie n'était pas gravement compromise. Par ailleurs, bien qu'ayant obtenu un bachelor et un master en droit à l'Université de Genève ainsi que divers certificats universitaires et occupant désormais une place de juriste au sein d'une étude genevoise, l'intégration socio-professionnelle de l'intéressé n'étaient pas suffisante pour l'octroi d'une autorisation de séjour. Enfin, ses parents résidaient toujours en Albanie, et lui-même était en bonne santé.

24) Par acte du 21 juin 2019, M. A______ a interjeté recours par-devant le TAPI contre la décision précitée, en concluant à son annulation et à ce qu'il soit constaté qu'il réalisait les conditions du permis de séjour et donc à ce qu'il soit ordonné à l'OCPM de préaviser favorablement sa demande de permis de séjour, subsidiairement au renvoi de son dossier à l'OCPM pour l'ouverture d'une procédure d'autorisation de séjour pour cas de rigueur « classique ».

25) Le 8 juillet 2019, M. A______ a notamment sollicité sa comparution personnelle devant le TAPI.

26) Le 15 août 2019, l'intéressé a transmis au TAPI un certificat médical de son médecin psychiatre du 14 août 2019, lequel indiquait notamment que ses difficultés à obtenir un permis de séjour avaient un impact très grave sur sa santé, générant de la maladie psychique.

27) Par jugement du 26 février 2020, le TAPI a rejeté le recours.

L'intéressé ne disposait d'aucun droit à être entendu oralement avant la prise de décision de l'autorité intimée alors qu'il avait lui-même sollicité une autorisation de séjour. Dès lors qu'il avait sollicité une autorisation de séjour pour cas de rigueur « Papyrus », il ne pouvait être reproché à l'OCPM d'avoir statué sans y être invité ou « par avance » sur une demande de permis de cas de rigueur « classique », l'une et l'autre ne se distinguant pas quant à leur essence mais uniquement quant aux conditions à respecter.

La situation du recourant ne réalisait pas les conditions très strictes permettant d'admettre l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité. Il ne séjournait pas en Suisse depuis dix ans et ne remplissait ainsi pas l'un des critères requis s'agissant de l'opération Papyrus. Dès lors que ses séjours légaux remontaient à plus de douze ans et qu'ils avaient été effectués sous le couvert d'une autorisation de séjour pour études, et que ses derniers séjours avaient été effectués d'abord de manière illégale, puis à la faveur d'une tolérance des autorités, on ne pouvait accorder un poids déterminant aux années qu'il avait passées en Suisse. Sur le plan social, il ne pouvait se prévaloir d'une intégration sociale intense au sens de la jurisprudence. Sur le plan professionnel, il ne pouvait se prévaloir d'une ascension professionnelle si spécifique qu'il ne puisse utiliser ses compétences qu'en Suisse. Il avait acquis des savoirs et des connaissances juridiques qui étaient, pour certaines d'entre elles, spécifiques à l'ordre juridique suisse, mais d'autres plus générales qui lui permettaient d'exercer une profession juridique ailleurs qu'en Suisse, preuve en était qu'il avait travaillé tant au Kosovo qu'à Tirana dans une étude d'avocat. Les conditions de sa réintégration en Albanie, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, n'apparaissaient pas gravement compromises. Son problème psychique, engendré par la crainte de voir définitivement perdues ses perspectives d'avenir en Suisse ou l'imminence d'un renvoi, n'étaient pas, selon la jurisprudence, susceptibles de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur.

28) a. Par acte du 20 avril 2020, M. A______ a interjeté recours par-devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, en concluant, principalement, à son annulation, à ce qu'il soit dit et constaté qu'il réalisait les conditions d'un cas de rigueur « classique » et que l'OCPM devait préaviser favorablement sa requête de permis de séjour, et à ce que l'OCPM soit condamné en tous les frais et « dépens ». Subsidiairement, le jugement querellé devait être annulé et le dossier renvoyé à l'OCPM pour qu'il ouvre une procédure « sérieuse et complète » d'autorisation de séjour pour cas de rigueur « classique ». À titre préalable, il demandait à ce que l'effet suspensif soit accordé à son recours, à ce qu'un délai lui soit octroyé pour compléter son recours et à ce que sa comparution personnelle soit ordonnée.

Après avoir obtenu son bachelor en septembre 2007, il avait effectué un séjour temporaire à New York afin de renforcer ses connaissances linguistiques dans les domaines du droit et des affaires. Durant sa maîtrise, il avait participé au programme Erasmus et avait étudié aux Pays-Bas pendant deux semestres, tout en étant immatriculé à l'université. Suite au jugement du 18 septembre 2012, il avait respecté l'injonction de quitter la Suisse et était parti en Albanie en novembre 2012. Il s'était pourtant vite rendu compte qu'il n'était plus capable de vivre dans son pays, qu'il avait quitté dix ans auparavant, et était ainsi revenu en Suisse fin 2012. De janvier 2013 à septembre 2015, il y avait séjourné sans papiers, dans la peur quotidienne. Aussi, de fin 2012 à 2015, il avait fait des allers-retours en Albanie et au Kosovo, mais en n'y séjournant à chaque fois que quelques jours ou semaines car il vivait à Genève. Son beau-frère avait attesté qu'il avait vécu chez eux de janvier 2013 à décembre 2014. Il était retourné en Albanie en automne 2015, mais en était revenu puisque ce pays, où il n'avait plus d'attache hormis ses parents, lui était devenu étranger et que le fossé culturel était tel qu'un retour en Suisse s'était imposé pour qu'il ne tombe pas en grave dépression. Entre 2015 et mars 2016, il avait vécu en colocation avec Me C______. En mars 2016, suite au déménagement de Me C______ avec sa femme, il avait habité avec le frère de Me C______ dans le même logement.

Bien qu'il était dans sa seizième années de vie en Suisse, il ne remplissait pas stricto sensu la condition des dix années continues sans sortir de Suisse dans le cadre de l'« opération Papyrus ». Toutefois, l'OCPM aurait dû l'informer que s'il ne remplissait pas les conditions de l'« opération Papyrus », il pouvait dès lors déposer une demande pour motifs individuels d'extrême gravité, dit cas de rigueur « classique », ce qu'il n'avait pas fait. Les conditions du cas de rigueur « Papyrus », au nombre de cinq, étaient en partie différentes des sept conditions du cas de rigueur « classique ».

L'autorité intimée avait violé son droit d'être entendu à double égard, soit d'une part en ne l'entendant pas dans ses locaux comme c'était ordinairement pratiqué, et, d'autre part, en statuant sur un cas de rigueur « non Papyrus », sans l'avoir au préalable invité à formaliser une demande de cas de rigueur « classique ».

Il remplissait les conditions du cas de rigueur « classique ». Son intégration était remarquable, ce que reconnaissait l'OCPM lui-même dans son courrier du
1er février 2019. Le TAPI ne pouvait dès lors retenir qu'il ne pouvait se prévaloir d'une intégration socio-culturelle exceptionnelle. Les diplômes obtenus et les rencontres faites au cours de sa formation l'avaient amené à se cultiver d'une manière très au-dessus de la moyenne. Il avait toujours eu un comportement exemplaire, comme l'attestait son casier judiciaire, et avait quitté la Suisse chaque fois que les autorités le lui avaient demandé, démontrant un profond respect pour les lois et décisions des autorités. Sa famille la plus proche, à savoir sa soeur et ses deux neveux, résidait en Suisse. Le TAPI n'avait pas pris en considération le fait que ses parents étaient âgés et qu'il les avait quittés lorsqu'il avait 18 ans. Il était indépendant financièrement et n'avait pas de dettes. Depuis 2003, il comptabilisait plus de seize ans de vie en Suisse, soit bientôt autant que les dix-huit ans qu'il avait passés dans son pays d'origine.

L'OCPM et le TAPI ne prenaient pas en compte le fait qu'il avait continué sa vie en Suisse entre fin 2012 et juillet 2015, à l'exception de quelques très courtes interruptions de séjour. Depuis des années, il était dans un état de profonde détresse personnelle suite à ces procédures, ce qui le conduisait à se faire soigner par un psychiatre. Ses troubles psychiques provenaient de sa non-reconnaissance par les autorités suisses. Alors que sa soeur s'était intégrée en Suisse et était devenue Suissesse par mariage, lui-même, presque avocat, n'était pas considéré. Intelligent, cultivé, parlant et écrivant le français à la perfection, il était intégré comme bien des Suisses ne l'étaient pas. Il ne pouvait pas guérir en Albanie qui n'était plus son pays et ne l'avait d'ailleurs jamais été. Les possibilités de réintégration dans son pays d'origine étaient nulles. Sa formation juridique lui permettait de pratiquer le droit suisse, mais ne lui était d'aucune utilité en Albanie, ce dont il s'était rendu compte lorsqu'il y était retourné. Sa situation professionnelle était telle qu'il lui était impossible de retourner vivre et travailler en Albanie avec ce même statut. Il n'avait par ailleurs pas la culture de son pays et ne l'avait d'ailleurs jamais eue. Un retour en Albanie engendrerait pour lui un tel traumatisme qu'il tomberait inexorablement dans une profonde et définitive dépression. Il était retourné plusieurs fois en Albanie chercher du travail, mais n'y était pas parvenu et était systématiquement revenu en Suisse.

L'OCPM et le TAPI avaient constaté les faits de manière incomplète et/ou erronée tant ceux-ci attestaient de la réalisation évidente des conditions d'application des dispositions légales relatives au cas de rigueur, et avaient partant violé la loi.

b. Était joint un chargé de trente-sept pièces dont le contenu sera repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit du présent arrêt.

29) Le 6 mai 2020, le recourant a transmis une attestation du 1er mai 2020 d'une personne louant ses qualités humaines et professionnelles.

30) Dans ses observations du 4 mai 2020, l'OCPM a conclu au rejet du recours et transmis son dossier.

Les arguments soulevés par le recourant n'étaient pas de nature à modifier sa position. Sa décision du 21 mai 2019 n'ayant pas été déclarée exécutoire nonobstant recours, le recours avait un effet suspensif de jure.

31) Le 11 mai 2020, le juge délégué a imparti un délai aux parties pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, avec la précision que passé cette date, la cause serait gardée à juger en l'état du dossier.

32) Le 4 juin 2020, l'OCPM a indiqué ne pas avoir d'observations complémentaires à formuler.

33) Le 7 août 2020, le recourant a persisté dans ses conclusions.

Le Tribunal fédéral avait dernièrement jugé que lorsqu'un étranger résidait légalement en Suisse depuis plus de dix ans, il y avait lieu de partir de l'idée que les liens sociaux qu'il avait développés étaient suffisamment étroits pour que le refus de prolonger, ou de renouveler ou la révocation de l'autorisation de rester en Suisse ne puissent être prononcés qu'en présence de motifs sérieux. Or, il répondait largement à toutes ces conditions.

L'OCPM et le TAPI faisaient preuve d'une double discrimination à son égard, fondée sur son origine et sa future profession. Étant originaire d'Albanie, pays soumis à un visa, il était sous le couvert des contrôles, contrairement aux étrangers originaires de pays non soumis au visa. Il s'était vu refuser une autorisation de séjour selon le cas de rigueur Papyrus pour avoir dû interrompre pendant quelques mois les dix ans de séjour, alors qu'il en avait déjà réalisé seize. Par ailleurs, il souhaitait devenir avocat en Suisse, ce qui semblait déranger les autorités qui délivraient majoritairement des autorisations pour cas de rigueur à des personnes travaillant dans l'économie domestique où il y avait une pénurie.

Il a notamment joint une attestation de sa soeur et de son beau-frère exposant le lien très fort qui s'était créé entre lui et ses neveux, ainsi que diverses photographies d'eux ensemble.

34) Le 29 septembre 2020, le recourant a indiqué à la chambre administrative que l'OCPM continuait à faire perdurer un traitement inégal et arbitraire à son égard. Alors qu'une autorisation de travail provisoire lui avait été délivrée lors de la procédure de première instance, l'OCPM lui refusait à présent de lui délivrer une telle autorisation, alors qu'une procédure était toujours pendante et qu'un employeur était prêt à l'engager immédiatement.

35) Par courrier du 5 octobre 2020, le recourant a réitéré sa demande de comparution personnelle, laquelle était importante pour appréhender tous les faits et griefs soulevés, relevant qu'une telle comparution avait été ordonnée dans d'autres procédures similaires.

Il a également joint une copie de sa requête en prestation de serment du
24 juillet 2019 auprès du département de la sécurité, de l'emploi et de la santé
(ci-après : DSES ou le département), laquelle était « en cours de traitement ».

36) Le 8 octobre 2020, le juge délégué a rappelé au recourant que la cause était gardée à juger depuis le 7 août 2020 et que les motifs du refus de sa comparution personnelle seraient consignés dans l'arrêt qui lui serait notifié.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant conclut à sa comparution personnelle, laquelle serait selon lui importante pour appréhender tous les faits et griefs soulevés.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du
18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF
132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

b. En l'espèce, le recourant, qui n'a pas de droit à être entendu oralement, a pu se prononcer par écrit au moyen de différentes écritures, auxquelles étaient jointes de nombreuses pièces, tant devant l'autorité intimée et l'instance précédente que la chambre de céans, qui dispose d'un dossier complet lui permettant de trancher le litige en toute connaissance de cause, tout comme le TAPI avant elle. Le recourant ne fournit en outre pas d'argument concret permettant de penser qu'une audience de comparution personnelle serait indispensable à la solution du litige.

Dans ces circonstances, il ne sera pas donné suite à sa demande de comparution personnelle devant la chambre administrative.

3) Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, la chambre administrative ne connaît pas de l'opportunité des décisions prises en matière de police des étrangers, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte
(art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario).

4) Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), devenue la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), et de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l'espèce, avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1.1).

5) Le recourant fait tout d'abord valoir que l'autorité intimée aurait violé son droit d'être entendu à double égard, soit d'une part en ne l'entendant pas dans ses locaux comme c'était ordinairement pratiqué, et, d'autre part, en statuant sur un cas de rigueur « non Papyrus », sans l'avoir au préalable invité à formaliser une demande de cas de rigueur classique.

a. À teneur de l'art. 41 LPA, les parties ont le droit d'être entendues par l'autorité compétente avant que ne soit prise une décision. Elles ne peuvent prétendre à une audition verbale sauf dispositions légales contraires.

b. Tel que garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend, notamment le droit pour l'intéressé de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.2 ; 137 I 195 consid. 2.3.1 ; 136 I 265 consid. 3.2 ; 135 II 286 consid. 5.1).

c. Dans une procédure initiée sur requête d'un administré, celui-ci est censé motiver sa requête en apportant tous les éléments pertinents ; il n'a donc pas un droit à être encore entendu par l'autorité avant que celle-ci ne prenne sa décision, afin de pouvoir présenter des observations complémentaires. Reste réservée l'hypothèse où l'autorité entendrait fonder sa décision sur des éléments auxquels l'intéressé ne pouvait s'attendre (ATA/523/2016 du 21 juin 2016 consid. 2b ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, p. 519 s., n. 1530).

d. La réparation du droit d'être entendu en instance de recours n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure. Elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception. Elle peut cependant se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_556/2017 du 5 juin 2018 consid. 2.1). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu'elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/154/2021 du 9 février 2021 consid. 3b ; ATA/944/2020 du 22 septembre 2020 consid. 4c).

Le recours à la chambre administrative ayant un effet dévolutif complet, celle-ci dispose d'un libre pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 61 LPA). Celui-ci implique la possibilité de guérir une violation du droit d'être entendu, même si l'autorité de recours n'a pas la compétence d'apprécier l'opportunité de la décision attaquée (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; 137 I 195 consid. 2.3.2), sous réserve que ledit vice ne revête pas un caractère de gravité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_541/2017 du 14 mai 2018 consid. 2.5 ; ATA/154/2021 précité
consid. 3c).

e. Dans le cadre du projet pilote Papyrus, le SEM a procédé à une concrétisation des critères légaux en vigueur pour l'examen des cas individuels d'extrême gravité dans le strict respect des dispositions légales et de ses directives internes. Il ne s'agit pas d'un nouveau droit de séjour en Suisse ni d'une nouvelle pratique. Une personne sans droit de séjour ne se voit pas délivrer une autorisation de séjour pour cas de rigueur parce qu'elle séjourne et travaille illégalement en Suisse, mais bien parce que sa situation est constitutive d'un cas de rigueur en raison notamment de la durée importante de son séjour en Suisse, de son intégration professionnelle ou encore de l'âge de scolarisation des enfants (ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 8a ; ATA/1000/2019 du 11 juin 2019 consid. 5b et les arrêts cités).

L'« opération Papyrus » étant un processus administratif simplifié de normalisation des étrangers en situation irrégulière à Genève, il n'emporte aucune dérogation aux dispositions légales applicables à la reconnaissance de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite du séjour en Suisse (art. 30 al. 1
let. b LEI), pas plus qu'à celles relatives à la reconnaissance d'un cas individuel d'extrême gravité (art. 31 al. 1 OASA), dont les critères peuvent entrer en ligne de compte pour l'examen desdites raisons personnelles majeures (ATA/121/2021 précité consid. 8a ; ATA/584/2017 du 23 mai 2017 consid. 4c).

6) En l'espèce, le recourant ne saurait se prévaloir d'une violation de son droit d'être entendu du fait qu'il n'aurait pas été auditionné par l'autorité intimée avant qu'elle ne rende la décision litigieuse. Le recourant a lui-même initié la procédure ayant abouti à ladite décision, au moyen d'une requête circonstanciée, de sorte qu'à la lumière de la jurisprudence précitée, il n'avait pas un droit à être encore entendu par l'autorité avant que celle-ci ne prenne position. Il ne prétend au demeurant pas que l'autorité aurait fondé sa décision sur des éléments auxquels il ne pouvait s'attendre. Quand bien même, il n'existe aucun droit à être entendu oralement par l'autorité avant sa prise de décision. Enfin, il a pu exercer son droit d'être entendu par écrit.

Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence précitée que l'« opération Papyrus » n'est qu'une concrétisation des critères légaux en vigueur pour l'examen des cas individuels d'extrême gravité. Dès lors, il ne saurait être reproché à l'autorité d'avoir examiné la requête du recourant sous l'angle des critères généraux du cas de rigueur des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA, lesquels sont d'ailleurs également examinés dans le cadre de l' « opération Papyrus ». Au demeurant, le recourant n'expose pas quels sont les arguments ou explications complémentaires qu'il aurait apportés avant que l'OCPM ne prenne la décision du 21 mai 2019, laquelle était par ailleurs précédée d'une lettre d'intention. Quand bien même il n'aurait pas été en mesure d'exposer tous ses arguments, il a depuis lors eu l'occasion de le faire, tant devant le TAPI que devant la chambre de céans, de sorte que même à admettre l'existence d'une violation du droit d'être entendu, celle-ci aurait été réparée.

Ce grief sera dès lors écarté.

7) Le recourant ne fait, à juste titre, plus valoir qu'il remplirait les conditions de l'« opération Papyrus », la condition d'un séjour de dix ans ininterrompu faisant défaut. Il considère en revanche que sa situation remplit tous les critères l'application des dispositions relatives aux cas d'extrême gravité, de sorte que l'autorité intimée et le TAPI auraient constaté les faits de manière incomplète et/ou erronée et auraient violé la loi en considérant que tel n'était pas le cas.

a. L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

b. L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (Directives du SEM, domaine des étrangers, octobre 2013, actualisées le 1er janvier 2021 - ci-après : Directives LEI - ch. 5.6.12).

c. Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200
consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c ; Directives LEI, op. cit., ch. 5.6).

d. La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Ses conditions de vie et d'existence doivent ainsi être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. En d'autres termes, le refus de le soustraire à la réglementation ordinaire en matière d'admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il y soit bien intégré, tant socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger qu'il vive dans un autre pays, notamment celui dont il est originaire. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que l'intéressé a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3 ; 124 II 110 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 7.2).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en oeuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.4 ; C-6379/2012 et C-6377/2012 du 17 novembre 2014 consid. 4.3).

e. Des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d'un cas de rigueur lorsque l'intéressé démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d'urgence, indisponibles dans le pays d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible d'entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d'obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d'origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; arrêt du TAF F-1851/2020 du 9 novembre 2020 consid. 6.4.2 ; ATA/121/2021 précité consid. 7e et les arrêts cités).

f. L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération (ATF 123 II 125 consid. 5b.dd ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du
13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/90/2021 du 26 janvier 2021 consid. 3e).

La question est donc de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (ATA/90/2021 précité consid. 3e ; ATA/1162/2020 du 17 novembre 2020
consid. 6b ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015
consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

Le Tribunal fédéral a déjà relevé que la réintégration dans le pays d'origine n'est pas déjà fortement compromise parce que l'étranger n'y retrouvera pas de travail dans le domaine d'activité qui était le sien en Suisse (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 précité consid. 5.2.2 ; 2C_956/2013 du 11 avril 2014
consid. 3.3).

8) En l'occurrence, la chambre administrative considère que l'examen effectué par le TAPI au consid. 16 du jugement querellé ne prête pas le flanc à la critique, de sorte qu'il y sera renvoyé, avec les précisions qui suivent.

Comme relevé à juste titre par le TAPI, le recourant a séjourné légalement en Suisse entre juillet 2003 et juillet 2004, puis entre octobre 2004 et septembre 2007 et enfin entre octobre 2009 et septembre 2012, au bénéfice d'autorisations de séjour pour études. Il ressort par ailleurs du dossier que si le recourant était effectivement présent en Suisse entre janvier 2013 et l'automne 2015, de manière illégale, il est établi qu'il n'y a pas vécu de manière continue, comme en attestent les tampons figurant dans son passeport et le fait qu'il ait travaillé pour des entreprises sises respectivement en Albanie et au Kosovo. Le recourant admet par ailleurs avoir quitté la Suisse en automne 2015 et y être revenu quelques mois plus tard. S'il ressort des attestations de témoins fournies que le recourant était également présent en Suisse durant l'année 2016, les pièces au dossier ne permettent d'établir avec précision la durée et la continuité dudit séjour. Il semble enfin qu'il réside à Genève depuis son engagement en qualité de juriste à compter du 1er janvier 2017, d'abord de manière illégale puis en faveur d'une simple tolérance dans le cadre de la présente procédure. Ainsi, s'il est exact que le recourant est arrivé pour la première fois en Suisse il y a plus de dix-sept ans, ses séjours ont été régulièrement interrompus, et ce pendant parfois plusieurs mois - comme lors de son séjour à New-York de sorte que la durée de séjour doit être fortement relativisée.

S'agissant de sa situation familiale, si sa soeur et ses deux neveux, auxquels il semble très attaché, résident effectivement à Genève, les parents du recourant vivent en Albanie. L'intéressé ne saurait prétendre ne pas avoir gardé de liens avec eux, dès lors qu'il a lui-même indiqué être retourné, entre 2009 et 2014, voir sa famille en Albanie durant les vacances d'été et/ou d'hiver, à tout le moins chaque année. Il ressort également du dossier que le recourant a formé des demandes de visa en septembre 2017 et 2018 au motif d'aller rendre visite à ses parents.

Si le parcours professionnel du recourant est très bon, comme le reconnaissent unanimement l'OCPM et le TAPI, tout comme la chambre de céans, et qu'il est vrai que le recourant a acquis certaines connaissances spécifiques en droit suisse, il ne peut être retenu que toutes ses connaissances professionnelles soient si spécifiques qu'il ne pourrait les mettre en oeuvre dans son pays d'origine ou que sa réintégration y serait fortement compromise. D'une part, le recourant a déjà travaillé dans son pays d'origine depuis l'obtention de ses différents diplômes, ainsi qu'au Kosovo. Par ailleurs, bien qu'ayant étudié le droit suisse, le recourant a résolument orienté sa formation sur un volet international, comme en attestent notamment le certificat de droit transnational obtenu, ses études durant deux semestres aux Pays-Bas et son séjour de plusieurs mois à New York réalisé dans le but, selon ses propres termes, de renforcer ses connaissances linguistiques dans les domaines du droit et des affaires. Enfin, il ressort de la demande d'autorisation de séjour avec prise d'emploi formée le 15 juillet 2015, jointe à son acte de recours, que ses aptitudes étaient en parfaite adéquation avec les besoins de l'étude de Me C______, s'agissant notamment de la maîtrise de la législation fiscale et bancaire de l'Albanie et du Kosovo, et de la connaissance des « moeurs locales et albanaises ». Ainsi, sans dénier les efforts que cela impliquerait pour l'intéressé, il n'en demeurait pas moins que compte tenu de son âge, de ses connaissances linguistiques et de ses compétences professionnelles acquises tant en Suisse qu'à l'étranger il apparaît qu'il pourra se réadapter dans son pays d'origine.

Il ressort par ailleurs des certificats médicaux produits que le recourant souffre d'un « mal-être » lié à la non-reconnaissance de son droit de finir ses études en Suisse et du fait de ne pas avoir un document suisse l'y autorisant, et que le traitement de ses troubles était en cours. Or, au sens de la jurisprudence précitée, ses difficultés psychiques ne peuvent être qualifiées de graves problèmes de santé nécessitant, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales d'urgence indisponibles dans le pays d'origine.

Pour le surplus, la jurisprudence à laquelle se réfère le recourant dans son écriture du 7 août 2020 n'est pas applicable au cas d'espèce, dès lors qu'elle concerne exclusivement les étrangers ayant séjourné légalement durant dix ans en Suisse, et dont l'autorisation de séjour n'aurait pas été renouvelée ou aurait été révoquée, ce qui n'est pas son cas.

On peine par ailleurs à comprendre le grief d'inégalité de traitement dont le recourant entend se prévaloir qu'il estime fondé sur son origine et sur la profession d'autant plus qu'il ne démontre pas que d'autres personnes soumises au même régime et dans la même situation personnelle que lui auraient été traitées différemment.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, l'OCPM en niant l'existence des conditions justifiant l'octroi au recourant d'une autorisation de séjour pour cas d'extrême gravité n'a ni violé la loi ni abusé ou excédé de son pouvoir d'appréciation, ce qu'a à juste titre confirmé le TAPI.

9) a. Selon l'art. 64 al. 1 LEI, les autorités compétentes renvoient de Suisse tout étranger qui n'a pas d'autorisation alors qu'il y est tenu (let. a), ainsi que tout étranger dont l'autorisation est refusée, révoquée ou n'a pas été prolongée (let. c) en assortissant ce renvoi d'un délai de départ raisonnable (al. 2). Le renvoi d'un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

b. En l'espèce, rien ne permet de retenir que l'exécution du renvoi du recourant ne serait pas possible, licite ou raisonnement exigible au sens de la disposition précitée ce que ce dernier ne prétend d'ailleurs pas , les considérations qui précèdent au sujet de l'état de santé du recourant ne permettant pas non plus de retenir une violation de l'art. 83 al. 4 LEI.

Dans ces circonstances, le jugement attaqué est conforme au droit.

Mal fondé, le recours sera ainsi rejeté.

10) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 550.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 avril 2020 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 26 février 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 550.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Jean Orso, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.