Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/761/2023 du 11.07.2023 sur JTAPI/1079/2022 ( ICC ) , PARTIELMNT ADMIS
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/3529/2021-ICCIFD ATA/761/2023 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 11 juillet 2023 4ème section |
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dans la cause
A______ et B______ recourants
représentés par Me Pierre-Alain GUILLAUME, avocat
contre
ADMINISTRATION CANTONALE DES CONTRIBUTIONS intimée
et
ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS intimée
_________
Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 octobre 2022 (JTAPI/1079/2022)
A. a. B______ est actionnaire unique des sociétés offshore C______, D______, E______ et F______, toutes sises au G______ et titulaires de comptes bancaires à H______ et I______. Au cours des années 2005 à 2009, elle était domiciliée à Genève et y a été soumise à l’impôt fédéral direct (IFD) et à l’impôt cantonal et communal (ICC) de manière illimitée. Durant ces années, elle a exercé, à mi-temps, une activité salariée auprès d’J______, sise à Genève et détenue par K______, qui est un homme d'affaires actif dans le commerce d'œuvres d'art. Elle était par ailleurs vice‑présidente de cette société. Son époux, A______, exerçait durant ces années une activité de dentiste.
b. Dans leurs déclarations fiscales 2005 à 2009, les époux n’ont pas fait état de l’existence des sociétés offshore susmentionnées, ni des éléments de revenu et de fortune y relatifs. B______ n’y avait indiqué que son salaire perçu auprès de J______, qui se situait entre CHF xxx.- CHF xxx.-.
c. Pour les années 2007 à 2009, les contribuables ont été taxés sur les revenus de respectivement de CHF xxx.-, CHF xxx.- et CHF xxx.- et sur une fortune de respectivement CHF xxx.-, CHF xxx.- et CHF xxx.-.
d. Les taxations pour ces années sont entrées en force.
e. Le 12 janvier 2015, deux sociétés appartenant à L______, soit M______ et N______, ont déposé une dénonciation pénale contre K______ et B______ auprès des autorités de H______ pour escroquerie et faux en écritures.
f. Le 27 février 2015, de H______ a formé auprès des autorités pénales suisses une demande d'entraide tendant à obtenir, notamment, le séquestre, puis la transmission, de documents bancaires liés à des comptes d’K______ et ses sociétés à Genève. Cette requête a été intégralement exécutée par le Ministère public de Genève dans le cadre de la procédure CP/1______/2015 et les pièces saisies à cette occasion ont été transmises à l'autorité requérante en date du 19 juillet 2017.
g. Au printemps 2015, plusieurs articles de presse ont rapporté qu'une plainte pénale avait été déposée par L______ à l'encontre d’K______ et de B______ devant la justice H______. La plainte portait sur une affaire d'escroquerie. K______ aurait surfacturé des tableaux de maîtres au plaignant et/ou à ses sociétés, tout en percevant directement des commissions correspondant à 2 % du prix de vente. En dix ans, il aurait ainsi vendu à son client une quarantaine d'œuvres d’art majeures pour une valeur totale d’environ CHF xxx. Sur les ventes réalisées, il aurait versé des commissions à B______, pour son rôle d'intermédiaire, ce que cette dernière aurait reconnu (article paru dans la ______ le ______ 2015). Pour percevoir ces commissions, représentant parfois jusqu'à 18 % du prix des œuvres d’art, B______ aurait utilisé les sociétés écrans susmentionnées.
h. Informée des procédures pénales ouvertes à l’encontre de B______, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a, par courrier du 8 avril 2015, sollicité du Ministère public genevois l’accès à son dossier, à savoir uniquement aux documents propres à la renseigner sur une éventuelle soustraction d’impôt, ce qui a été autorisé le 9 juin suivant, le Ministère public précisant qu’il y avait une procédure d’entraide H______ et une procédure nationale ouverte à la suite de divers signalements LBA par des intermédiaires financiers via le Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent (MROS). L'AFC-GE a alors pris connaissance en particulier de documents d'ouverture de comptes au nom de D______, C______, F______ précédemment nommée O______) et E______, indiquant qu’elle en était l’ayant droit économique, et les relevés bancaires faisant état des commissions versées, en sa faveur, sur les comptes desdites sociétés. Il ressort en particulier de ces documents que B______ avait souhaité ouvrir une structure afin de défiscaliser les « économies » provenant de son activité professionnelle (vente d'œuvres d'art), les fonds attendus étant le fruit des commissions générées en dehors de la Suisse, qu'elle percevait sur les ventes de marchandises (les documents d'ouverture du compte n° 2______ auprès de la banque P______ au nom de D______, indiquant que la contribuable en est l'ayant droit économique).
Les commissions versées en faveur de la contribuable sur les comptes de ses sociétés étaient les suivantes :
Année | Bénéficiaire | Montant |
2005 | C______ | USD xxx |
2006 | D______ | USD xxx |
2007 | C______ | USD xxx |
2008 | F______ | EUR xxx |
C______ | EUR xxx | |
E______ | EUR xxx | |
| D______ | USD xxx |
i. Par courrier recommandé daté du 25 avril 2015, envoyé au domicile H______ des contribuables, l'AFC-GE les a invités à désigner un représentant en Suisse, précisant qu’à défaut, les décisions ou prononcés les concernant seraient publiés dans la feuille d'avis officielle (FAO).
Aucune suite n'a été donnée à ce courrier.
j. Le 8 décembre 2015, est apparue dans la FAO une publication informant les contribuables que « des décisions » les concernant avaient été prises par l'AFC-GE pour les ICC et IFD 2005 à 2009 et que les copies complètes de celles-ci pouvaient être retirées auprès d’elle.
k. Par courrier du 18 mars 2016, les époux ont indiqué à l'AFC-GE qu’ils venaient de prendre connaissance de la publication précitée et ont demandé que toute future communication leur soit notifiée à leur mandataire.
l. Par courrier recommandé du 2 mai 2016, l'AFC-GE, se référant à la procédure de rappel et soustraction d’impôt 2005 à 2009, a remis à ce mandataire sa lettre du 8 décembre 2015 et a invité les contribuables à se présenter au service de contrôle le 30 mai suivant.
m. À teneur d’un « pv d’entretien » du 30 mai 2016, établi par l'AFC-GE et signé uniquement par deux de ses collaborateurs, le premier conseil des contribuables a exposé que :
- des commissions de « xxx » avaient été perçues durant la période d'assujettissement (2005 à 2009) et ne figuraient pas dans les déclarations d'impôts des contribuables ;
- ces commissions ne constituaient pas des donations et étaient versées à des sociétés situées dans des paradis fiscaux ;
- « les choses ét[ant] peu protocolées », il n'existait pas de contrats écrits pour les versements effectués, mais des documents écrits (factures) établis la plupart du temps quelques jours avant le paiement ;
- le montant des commissions était très « variable, flexible et probablement déterminé en fonction du prix de l'œuvre » ; celles-ci étaient à la discrétion d’K______ ;
- B______ était très « passive » et n'avait pas un rôle actif dans l'achat et la vente des œuvres d’art ;
- il n'y avait pas de comptabilité pour les sociétés de la contribuable, qui ne détenaient qu'un compte bancaire ;
- Le représentant de la contribuable avait par ailleurs précisé que la position de celle-ci dépendrait du « traitement fiscal retenu », notamment de la qualification fiscale des sociétés offshore, et qu’il disposait de peu d'informations à ce stade de la procédure, de sorte qu’il ne pouvait répondre de manière « certaine » aux interrogations de l'AFC-GE.
n. Selon un « rapport d’entretien » du 21 octobre 2016, établi par l'AFC-GE, le même représentant des contribuables a notamment exposé que, selon lui, la solution acceptable pour sa cliente et qui « permettrait vraisemblablement de continuer les discussions » serait : « reconnaissance des entités juridiques et de leur lieu de siège ; traitement des entités en fortunes (état des titres) et traitement des distributions effectuées par ses entités en revenus (état des titres) ». Selon cette solution, l'impôt estimé pour toute les années sous revue (hors amendes) et les intérêts s’élevaient à environ CHF xxx.-. Sa cliente « ne part[ait] pas forcément sur une hypothèse ou sur une autre mais sur une somme globale (maximum) acceptable à ses yeux pour continuer les discussions et clore le contentieux ». Cette estimation d’impôt était calculée sur des revenus de CHF xxx.- (2006), CHF xxx.- (2007), CHF xxx (2008) et CHF xxx (2009), ainsi que sur une fortune de CHF xxx (2005), CHF xxx (2006), CHF xxx (2007), CHF xxx (2008) et CHF xxx (2009). S’agissant des pénalités, il a évoqué une quotité correspondant à 0,5 fois les impôts soustraits.
Il a remis à l'AFC-GE un tableau intitulé « situation générale en vue de discussion », mentionnant les quatre sociétés offshore de la contribuable et les « revenus de commissions encaissés entre 2005 et 2008 », à savoir USD xxx.- et EUR xxx.-.
o. Le 8 mars 2017, trois sociétés de L______ ont déposé une plainte pénale contre K______ et B______ auprès du Ministère public du canton de Berne du chef d'escroquerie par métier, blanchiment d'argent et gestion déloyale dans le cadre de la vente de 38 tableaux de maître aux plaignantes. Le 6 septembre 2017, le Ministère public genevois a accepté la demande de reprise de for que son homologue bernois lui avait soumise en date du 28 juillet 2017.
p. Par courrier du 20 octobre 2017, la Division des affaires pénales et enquêtes au sein du département fédéral des finances (ci-après: DAPE) a informé B______ que l’enquête menée à l’encontre d’K______ était étendue à elle-même. Dans le cadre de cette enquête, étaient apparus des soupçons concrets à son égard. Des commissions à hauteur de plusieurs dizaines de millions de CHF avait été versées auprès des sociétés dont elle était l'ayant droit économique. Il était soupçonné qu’elle, domiciliée en Suisse au moment des faits, avait bénéficié directement (transparence) ou indirectement (distribution) des revenus en question. Ceux-ci ainsi que les sociétés qu'elle détenait n'avaient pas été déclarés, ce qui constituait une soustraction fiscale.
q. Le 15 décembre 2017, l'AFC-GE a notifié aux contribuables des bordereaux de rappel d’impôt pour les années 2005 à 2007 - faisant état de suppléments d’impôt de CHF xxx (ICC 2005), CHF xxx.- (IFD 2005), CHF xxx (ICC 2006), CHF xxx.- (IFD 2006), CHF xxx (ICC 2007) et CHF xxx (IFD 2007) - et, à la contribuable uniquement, les bordereaux d’amende pour l’année 2007, précisant que les procédures s’étaient terminées sans amendes pour les périodes 2005 et 2006. Retenant une faute intentionnelle grave et compte tenu des montants des revenus non déclarés et de comportement astucieux de la contribuable durant plusieurs exercices, elle a fixé les amendes à 1,5 fois les impôts soustraits.
r. Les contribuables ont contesté ces bordereaux.
De manière tout à fait fortuite, B______ avait eu l'occasion de présenter à l'une de ses connaissances très fortunée une personne ayant des contacts dans le domaine de l'art. Par la suite, cela avait donné lieu à une véritable relation d'affaires entre les deux parties, engendrant plusieurs transactions, dans lesquelles elle n'avait pas été impliquée. Elle n'avait d'ailleurs conclu aucun contrat de commissionnement avec l'une ou l'autre partie. Elle était actionnaire de D______, C______, F______ et E______, qui étaient « valablement organisées ». Aucune d'elles n'exerçait d'activité à Genève. En prenant en considération leurs fortunes et revenus dans le calcul de l'impôt dû par eux-mêmes, l'AFC-GE avait « percé le voile corporatif », ne respectant pas le principe « du voile corporatif » et de la personnalité juridique distincte d'une compagnie. B______ n'avait effectué aucune activité en lien avec les transactions de vente, hormis une mise en contact initiale entre l'acheteur et le vendeur. Elle n'avait aucune base fixe d'affaires en Suisse et n'y avait déployé aucune activité.
Ses sociétés ne pouvaient être vues en transparence fiscale, puisque leur structure juridique avait été respectée par l'actionnaire. Elles constituaient des holdings personnelles qui avaient servi de réceptacles pour des « versements discrétionnaires » de la part de l'une des parties auxdites transactions. L'AFC-GE admettait la réalité économique de holdings personnelles. Les quatre sociétés devaient être appréhendées comme de « vraies sociétés » et leurs fortunes et/ou revenus ne pouvaient être imputés directement aux époux A______ B______ qu'au titre de la valeur de leurs actions et des distributions effectives.
Les dettes de rappel d’impôt et les intérêts y relatifs devaient être déduits de leur fortune, respectivement de leurs revenus. Le montant des amendes devait être ajusté en fonction de la baisse du montant des rappels d’impôt. B______ n'avait jamais escompté pouvoir recevoir une rémunération pour son « introduction ». Totalement profane en matière fiscale et non récidiviste, l'omission de déclarer ses « actions » ne procédait pas d'un plan ou d'une intention de soustraction. Elle « aurait voulu » déclarer ses revenus comme elle l'avait toujours fait auparavant. Selon la pratique de l'AFC-GE, une quotité de 0,75 était généralement retenue pour une première infraction. Aucun motif ne semblait justifier de s'en écarter.
s. Par courrier du 1er juin 2018, le conseil des contribuables a notamment sollicité de l'AFC-GE un accès « complet » au dossier de ces derniers, en vue de sa prochaine entrevue avec cette dernière.
t. Le 14 juin 2018, l'AFC-GE a communiqué à ce conseil les pièces nos 1 à 68, mais a refusé la consultation des pièces nos 69 à 79 au motif de « sauvegarde d’intérêts privés », en résumant toutefois leur contenu de manière suivante :
- pièce n° 69 : « un document relatant les prétendus rôle, implication et montants perçus par Mme B______ dans le cadre de ses relations d’affaires » ;
- pièce n° 70 : « un document et ses annexes relatant les prétendus rôle et implication par Mme B______ dans le cadre de ses relations d’affaires » ;
- pièces nos 71 à 74 : « un document et ses annexes, relatant les prétendus rôle, implication et montants perçus par Mme B______ dans le cadre de ses relations d'affaires. Ces documents précisent pour diverses opérations : l'entité bénéficiaire, la banque dépositaire, l'entité débitrice, la date de l'opération, l'objet de l'opération, la devise et le montant de l'opération » ;
- pièces nos 75 à 79 : « des documents bancaires de tiers attestant de versements, de manière directe ou indirecte, en faveur de Mme B______ ».
u. Par courriel du 25 juin et courrier du 27 juin 2018, le conseil des contribuables a fait savoir à l'AFC-GE qu’il ne se présenterait pas à l’entrevue prévue avec elle, sans avoir eu préalablement un accès complet au dossier. Il sollicitait qu’une décision formelle soit rendue s’agissant de l’accès restreint au dossier.
v. À teneur d’un « compte rendu d’entretien » du 7 août 2018, établi par l'AFC‑GE, trois conseils des contribuables, dont le précité, se sont entretenus avec cette dernière, en exposant notamment que :
- A______ était le ______ de L______ et lui avait présenté son épouse, car elle parlait Q______. Celle-ci avait ensuite donné, à titre gracieux, divers conseils à L______ pour faciliter son installation en Suisse (club de golf, agence immobilière, école, etc.) ;
- L______ avait souhaité acquérir une œuvre pour une valeur de CHF xxx. B______ l'avait informé que la valeur de l'œuvre n'était que de CHF xxx et lui avait ainsi permis de l'acquérir pour ce prix ;
- Une rencontre avait eu lieu aux R______ entre L______, B______ et K______. Les formalités en lien avec l'acquisition de l'œuvre avaient été réalisées et facilitées par ce dernier. L’acquéreur avait dit à B______ qu’K______ était « l'homme qu’il lui fallait » ;
- À la suite de cette rencontre, K______ avait sollicité B______ pour qu'elle organise une nouvelle rencontre avec L______ ;
- Par la suite, elle avait perçu d'importantes sommes en raison de cette mise en relation. Elle avait été surprise par ces versements. Les factures « réalisées étaient énoncées » directement par K______ ;
- Elle n'était ensuite pas intervenue dans le cadre de l'achat ou de la vente des œuvres et n’en connaissait pas les prix d’achat et de vente ;
- Ses sociétés avaient une comptabilité et des « PV » d'assemblées générales.
Sur question des avocats quant aux moyens ayant permis à l'AFC-GE de réunir les pièces dont ils sollicitaient la consultation, cette dernière a répondu que ces pièces avaient été obtenues de manière légale, précisant qu’elle pouvait obtenir des informations de la part d'autres administrations, telles que l'office cantonal de la population, le Ministère public, l'administration fédérale des contributions, etc. L'AFC-GE a indiqué que selon les informations dont elle disposait, le montant des commissions perçues en 2008 était de l’ordre de CHF xxx, ce à quoi les conseils des contribuables ont répondu que ce montant n’était pas « cohérent » avec les informations dont ils disposaient.
w. Par courriel du 9 août 2018, l'AFC-GE a communiqué au conseil des contribuables une copie de ce « compte rendu d’entretien » du 7 août 2018, ainsi que le contenu essentiel des pièces nos 69 à 79.
x. Par courriel du 22 août 2018, remerciant l'AFC-GE pour ce compte rendu « très clair », ledit conseil a demandé que la phrase « [Mme B______] n'était ensuite pas intervenue » soit modifiée comme suit : « [Mme B______ avait] organisé cette rencontre, mais par la suite, n’[était] pas intervenue dans le cadre de l’achat ou de la vente des œuvres, elle ne connai[ss]ait pas les prix (achat et vente) ». Les contribuables n’étaient pas d’accord avec le montant des commissions évoqué lors de cet entretien, en particulier en ce qui concernait l’année 2008. Il leur paraissait indispensable d’avoir une communication complète des pièces nos 69 à 79. Le secret fiscal invoqué pour refuser leur consultation ne leur était pas opposable dès lors que B______ y était mise en cause. L’identité des autres contribuables pouvait être caviardée.
y. Le 7 décembre 2018, l'AFC-GE a notifié aux contribuables des bordereaux de rappel d’impôt pour l’année 2008 – faisant état de suppléments d’impôt de CHF xxx (ICC) et CHF xxx (IFD) – et, à la contribuable uniquement, les bordereaux d’amende pour la soustraction de ces impôts. Retenant une faute intentionnelle grave et compte tenu des montants des revenus non déclarés et de comportement astucieux de la contribuable durant plusieurs exercices, elle a fixé les amendes à 1,5 fois les impôts soustraits.
z. Le 10 décembre 2018, l'AFC-GE a remis aux contribuables une copie des pièces nos 88, 91, 100 à 127, 130 et 131, refusant de le faire pour celles pour les pièces nos 80 à 87, 89, 90, 92 à 99, 128, 129 et 132 à 138, au motif de la « sauvegarde d’intérêts privés ».
aa. Le 20 décembre 2018, les contribuables ont formé réclamation contre les bordereaux du 7 décembre 2018, concluant à leur annulation et précisant que, leur acte ne comportant aucune motivation, en raison du fait qu’ils n’avaient pas été « en mesure d’analyser en détail les nombreuses pièces et de réconcilier les chiffres retenus », ils sollicitaient un délai pour le compléter.
bb. À teneur du dossier, cette réclamation n’a pas été complétée.
cc. Par arrêt du 12 décembre 2019, la Cour d'appel de H______ a annulé l’ensemble des actes de procédure à partir de la cote D56 dans la procédure faisant suite à la plainte pénale du 12 janvier 2015. Lesdits actes étaient retirés du dossier et il était fait interdiction à quiconque d’en faire état. Cette décision a été confirmée par arrêt de la Cour de révision de H______, soit l'instance judiciaire suprême de H______, du 8 juillet 2020.
dd. Le 21 juillet 2020, les contribuables ont à nouveau sollicité l’accès à toutes les pièces de leur dossier.
ee. Par courrier du 29 juillet 2020, l'AFC-GE a rappelé que lesdites pièces leur avaient déjà été communiquées les 14 juin et 10 décembre 2018 et que depuis lors, aucune nouvelle pièce n’avait été versée au dossier.
ff. Le 12 octobre 2020, l'AFC-GE a à nouveau remis aux contribuables les pièces nos 1 à 68, 88, 91, 100 à 127, 130, 131, 139 et 140, refusant de transmettre les pièces nos 70 à 79, 89, 90, 92 à 99, 128, 129 et 132 à 138, au motif de la « sauvegarde d’intérêts privés ».
gg. Par courrier du 17 septembre 2021, sous la plume de leur nouveau conseil, les contribuables ont demandé à l'AFC-GE d’entendre B______ oralement.
hh. Par courrier du 20 septembre 2021, ils ont une nouvelle fois sollicité l’accès à leur dossier.
Le dossier que l'AFC-GE leur avait remis précédemment était incomplet. Certains documents avaient manifestement été soustraits du dossier et l'AFC-GE avait indûment restreint l'accès à certains documents, soit notamment : le courrier du 8 avril 2015 par lequel l'AFC-GE avait sollicité d'accéder au dossier tenu par le Ministère public ; la réponse du Ministère public du 9 juin 2015 autorisant l'AFC‑GE à prendre connaissance des procédures impliquant B______ et K______ ; le « compte rendu » de la réunion tenue le 7 août 2018 entre les représentants de l'AFC-GE et ceux des contribuables ; les bordereaux de rappel d'impôts et d'amende 2008 du 7 décembre 2018 ; leur réclamation du 20 décembre 2018 ; les courriers de leurs conseils des 25 janvier 2019, 17 septembre 2019, 21 juillet 2020 et 1er octobre 2020 ; le courrier de l'AFC-GE du 29 juillet 2020.
En plus, le dossier qui leur avait été remis le 12 octobre 2020 ne comportait pas la pièce n° 130, soit un courrier de la banque S______ du 18 février 2015. Ainsi, au moins une dizaine de pièces manquaient au dossier, qui n'était donc pas tenu de manière « régulière ». Il y avait lieu de craindre que d'autres pièces manquaient qu'on n’avait pas encore pu identifier.
L'AFC-GE persistait à lui refuser l'accès à de nombreuses pièces. Les pièces nos 69 à 87, 89 et 90, 92 à 99, 128, 129, 132 à 138 avaient été intégralement caviardées. L'AFC-GE s'était satisfaite d'apposer sur ces pièces des « mentions sibyllines » qui ne permettaient pas à B______ d'exercer utilement son droit d'être entendue. Les restrictions élevées posées par l'AFC-GE en l’espèce pour refuser l’accès aux pièces ne satisfaisaient pas aux conditions légales et jurisprudentielles. Des bordereaux de rappel d'impôt et d'amende avaient d'ores et déjà été rendus par l'AFC-GE, si bien que les faits devaient être considérés comme établis, de sorte qu’aucune restriction à l'accès au dossier n'était permise à ce titre. Selon toute vraisemblance, les pièces caviardées étaient issues du dossier constitué par le Ministère public genevois dans le cadre de la demande d'entraide ainsi que de « la procédure nationale » ouverte sur plaintes de L______ à l’encontre d’K______ et de B______. Dans cette mesure, ces pièces concernaient vraisemblablement K______ et les sociétés qu'il contrôlait. Dès lors que B______ était personnellement visée par les procédures pénales en question et dans la mesure où elle était en outre soupçonnée par la DAPE d'avoir participé aux infractions fiscales reprochées à K______ et ses sociétés, elle devait être admise à accéder à ces pièces sans restriction et, donc, sans caviardage.
Dans l'hypothèse, contestée, où un intérêt privé justifierait de restreindre l'accès à certaines pièces du dossier fiscal, l'AFC-GE ne pouvait se baser sur ces documents pour prendre une décision à son détriment que si elle lui en donnait connaissance, oralement ou par écrit, du contenu essentiel des pièces et qu'elle lui permettait au surplus de s'exprimer et d'apporter ses propres moyens de preuve.
B______ demandait que l'intégralité des pièces de son dossier lui soit remise sans le moindre caviardage. Si par impossible l'AFC-GE persistait à restreindre l'accès à certaines pièces, elle devrait démontrer de manière circonstanciée que les conditions légales en étaient remplies, la renseigner sur la nature de chaque document et procéder à un caviardage sélectif pour lui permettre d'accéder aux informations utiles. Enfin, si l'AFC-GE devait refuser les requêtes, elle devait alors le confirmer par une décision susceptible de recours.
ii. Par décisions du 21 septembre 2021, statuant sur les réclamations des 16 janvier 2018 (2005 à 2007) et 20 décembre 2018 (2008), l'AFC-GE a annulé les bordereaux de rappel d’impôt 2005, motif pris de la prescription du droit de procéder au rappel d’impôt, et a confirmé les bordereaux de rappel d’impôt 2006 à 2008 et les bordereaux d’amende 2007 et 2008.
La contribuable avait été collaboratrice d’J______, connaissait personnellement les époux L______ et avait servi d’interprète à K______. Elle avait perçu des commissions s'élevant à plusieurs millions de francs suisses, au travers de sociétés offshore qui ne détenaient que des comptes bancaires. Ces sociétés, récipiendaires des commissions, devaient être traitées en transparence et, par conséquent, ces commissions devaient être imposées au titre de revenus auprès de la contribuable. Les reprises sur le revenu pour les années 2006 à 2008 s’élevaient respectivement à CHF xxx, CHF xxx et CHF xxx et celles sur la fortune CHF xxx.- (2006), CHF xxx.- (2007), CHF xxx.- (2008 et 2009).
D______, sise au G______, disposait d'un compte bancaire auprès de la banque P______ (P______) à H______, ouvert le 14 avril 2006 et clôturé le 7 août 2012. Ce compte était quasi exclusivement alimenté par des versements de T______ et U______, détenues par K______. Les fonds reçus sur ce compte avaient permis, entre autres, l'achat de biens immobiliers.
C______, également sise à G______, disposait d'un compte bancaire auprès de la banque S______ à H______, ouvert le 3 décembre 2004 et clos le 28 août 2012. Ce compte était quasi exclusivement alimenté par des versements de T______. Les fonds reçus sur ce compte avaient également permis l'achat de biens immobiliers.
F______, elle aussi sise à G______, disposait d'un compte bancaire auprès de la banque V______à H______, ouvert le 9 janvier 2008. Ce compte était quasi exclusivement alimenté par des versements de T______, W______ et X______, toutes détenues par K______. Les fonds reçus sur ce compte avaient notamment permis l'achat de biens immobiliers.
E______, également sise au G______, avait un compte bancaire auprès de Y______ à I______.
Les sociétés susmentionnées ne disposaient pas de personnel bénéficiant de pouvoirs et de compétences nécessaires pour réaliser les affaires ayant généré des commissions, n'avaient pas de locaux propres pour exercer leur activité, n'étaient pas présentes sur le marché et aucune comptabilité n'avait été tenue pour ces entités.
II n'était pas démontré que la contribuable ou ses sociétés avaient des relations commerciales avec d'autres partenaires qu’K______ ou ses sociétés. Les commissions avaient été versées en raison de ses relations personnelles de confiance avec la famille L______. La contribuable n’avait pas été salariée, ne disposait pas d'un contrat de travail et n'avait pas été rémunérée au titre d'une activité lucrative dépendante exercée pour le compte des sociétés bénéficiaires des commissions, alors qu’elle avait intervenue personnellement. Ces sociétés avaient toutes leur siège dans des juridictions que l'on pouvait qualifier « d'avantageuses », étant relevé que ce n'était pas dans ces lieux que les revenus avaient été réalisés. Selon la documentation bancaire relative à D______, la contribuable avait souhaité « ouvrir une structure afin de défiscaliser les économies provenant de son activité professionnelle ».
Les conditions d’une évasion fiscale étaient réunies, la forme juridique choisie étant insolite, inadéquate, anormale, n'ayant été utilisée qu'aux fins d'éluder l'impôt et conduisant à une économie d'impôt. Les entités récipiendaires des commissions étaient traitées en transparence, dès lors qu’elles n’étaient pas actives.
La faute de la contribuable revêtait un caractère intentionnel, cette dernière ayant été consciente que les informations fournies à l'AFC-GE étaient incomplètes. La faute était grave, notamment en raison de l’importance des montants soustraits. Au vu de la disproportion manifeste entre les montants déclarés et non déclarés, il n'y avait pas de doute quant au caractère intentionnel de la faute. Le comportement astucieux avait été retenu comme circonstance aggravante. Les amendes étaient maintenues tant dans leur principe que dans leur quotité.
jj. Le même jour, l'AFC-GE a notifié aux contribuables des bordereaux de rappel d’impôt pour l’année 2009 – faisant état de suppléments d’impôt de CHF xxx (ICC) et CHF xxx.- (IFD).
kk. Par courrier du 22 septembre 2021, répondant à la demande de B______ d’être auditionnée, l'AFC-GE l’a refusée dès lors que le droit d’être entendu de celle-ci avait été respecté durant l’instruction des procédures, qui étaient terminées.
ll. Le 25 septembre 2021, le Ministère public genevois a ordonné le classement de la procédure ouverte à l’encontre d’K______ et B______ à la suite de la plainte pénale de trois sociétés de L______.
À teneur de cette ordonnance, « entendue le 4 mars 2020 en qualité de personne appelée à donner des renseignements, B______ a[vait] confirmé avoir été inculpée suite à la plainte pénale déposée en février 2015 par les sociétés de L______ à H______. Elle avait fait la connaissance de ce dernier en 2000 ou 2001 et celle d'K______ à Genève en 2002 ou 2003. Elle avait reçu des commissions de la part d’K______ sur la vente de 37 œuvres d'art en faveur de L______. Elle estimait avoir reçu EUR xxx et USD xxx à titre de commissions. Elle n'avait jamais informé L______ de l'existence de cette rétribution mais pensait qu'il savait qu'elle recevait cet argent. Elle n'avait jamais déployé aucune activité en lien avec l'acquisition des œuvres d'art et les montants correspondaient uniquement à une sorte de commission d'affaires pour avoir mis K______ en relation avec L______ ».
mm. Par arrêt du 26 juillet 2022, la chambre pénale de recours de la Cour de justice a annulé cette ordonnance et renvoyé l'affaire au Ministère public en vue de la reprise de l'instruction.
Jugeant de la position du Ministère public – selon laquelle les vices ayant affecté la procédure pénale H______ justifiaient la clôture de celle menée à Genève –, la chambre pénale de recours a considéré que l'atteinte aux droits procéduraux d’K______ constatée à H______ résultait de l'attitude adoptée, dans cette H______, aussi bien par L______ que par des membres de la police et du Parquet de cette juridiction. Or, rien de tel n'était survenu à Genève, où l'instruction avait été menée conformément aux exigences de l'art. 6 CEDH. L’on distinguait mal pourquoi les agissements d'une partie plaignante à l'étranger devraient être sanctionnés, en Suisse, par un classement. Autre était la question de savoir si les pièces H______ versées à la présente procédure ou si les allégués/actes d'enquête se fondant sur elles, devaient être retirés du dossier. Il appartiendrait au Procureur de la résoudre, en appliquant les règles sur l'(in)exploitabilité des preuves. Le résultat auquel il parviendrait, quel qu'il fût, ne l'empêcherait nullement de poursuivre l'instruction. La cause comportait moult documents obtenus par les parties « avant/après/indépendamment de la procédure H______ », de sorte que rien ne s'opposait, prima facie, à ce qu'ils figurent (aussi) à la cause genevoise. Si des pièces nécessaires pour l'issue du litige devaient être caviardées/retirées de la procédure, le Ministère public pourrait alors, soit répéter les actes écartés – cette autorité étant tenue de mener sa propre enquête, sans se limiter aux investigations effectuées par des tiers –, soit demander aux parties de reformuler certains de leurs écrits (en faisant abstraction des données exclues). À cette aune, la continuation de l'enquête dans le respect des droits fondamentaux du prévenu était réalisable.
nn. Par décision incidente du 27 septembre 2021, l'AFC-GE a statué sur la demande d’accès au dossier du 20 septembre 2021.
En annexe à cette décision, elle remettait les pièces manquantes énumérées dans ladite demande, relevant que l’échange entre le Ministère public et elle-même était sans pertinence dans la démonstration de la soustraction commise par B______, que le droit à la consultation ne s'étendait pas aux documents à usage interne de l’administration, tel que le « compte rendu » de la réunion du 7 août 2018, que les bordereaux de rappel d'impôt et d'amende 2008 avaient déjà été remis aux précédents représentants des contribuables, que les courriers de ces derniers des 25 janvier 2019, 17 septembre 2019, 21 juillet 2020 et 1er octobre 2020 étaient déjà en leur possession et que la pièce n° 130 avait déjà été remise aux mandataires, en date du 12 octobre 2020.
Au cours de la procédure devant elle, les contribuables avaient été représentés successivement par quatre mandataires différents. À l’exception des courriers entre le Ministère public et elle-même, tous les autres documents visés par la demande du 20 septembre 2021 correspondaient à des courriers échangés entre lesdits mandataires et elle ou à des pièces qui avaient déjà été portées à leur connaissance.
Considérant que les contribuables avaient eu un accès complet à leur dossier en dates des 10 décembre 2018 et 12 octobre 2020, elle n'entendait pas leur donner une nouvelle fois la possibilité de consulter leur dossier en ses locaux.
Enfin, considérant que les pièces nos 69 à 87, 89, 90, 92 à 99, 128, 129 et 132 à 138 étaient couvertes par le secret fiscal, elle ne pouvait y donner un accès plein et entier. À l’égard de ces pièces, il y avait lieu de souligner la tardiveté de la démarche des contribuables. Pour chacune d’entre elles, elle avait fourni une description détaillée, par courriel du 9 août 2018 pour les pièces nos 69 à 79, puis en dates des 10 décembre 2018 et 12 octobre 2020 pour l'ensemble des pièces.
B. a. Par acte du 8 octobre 2021 (cause A/3529/2021), les époux A______ B______ ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI), concluant principalement à ce qu’ils soient admis à consulter leur dossier fiscal (physique ou électronique) dans les locaux de l'AFC-GE sous la supervision de l'un de ses représentants et à ce que les pièces nos 69 à 87, 89, 90, 92 à 99, 128, 129 et 132 à 138 leur soient communiquées, le cas échéant en caviardant les informations de tiers.
Au moins une dizaine de documents – certains d'importance majeure – leur avaient été cachés par l’AFC-GE, ce qui laissait à penser que d'autres pièces avaient été occultées par cette dernière. L'AFC-GE refusait intégralement l’accès à un grand nombre de pièces au dossier, mais intégralement caviardées. Ils n’avaient donc pas été mis en situation de compléter utilement leurs réclamations. Ils n’étaient pas en mesure non plus de se positionner sur les décisions sur réclamation avant un recours. De nombreux documents issus d'autres procédures menées en Suisse ou à l'étranger impliquant B______ avaient été versés au dossier. Tel était notamment le cas de pièces issues directement ou indirectement de la procédure pénale H______. Or, compte tenu de l'annulation de la procédure H______ à raison de graves vices procéduraux, la question de l'exploitabilité des pièces issues de ces procédures était une problématique centrale dans la contestation des décisions sur réclamation et de rappel d'impôts pour les années 2005 à 2009.
Il n'existait pas d'inventaire ou de courrier établissant une liste précise des documents que l'AFC-GE avait obtenus auprès du Ministère public. Il était pourtant manifeste que des pièces issues de cette consultation avaient été versées à leur dossier fiscal. Tel était notamment le cas des pièces nos 88, 100 à 127, 130 et 131 qui avaient été établies ou obtenues par les autorités pénales H______ (par exemple : procès-verbaux de la police H______, documents bancaires requis auprès de banques H______). Il était vraisemblable que l'AFC-GE avait également obtenu accès aux documents indirectement issus de la procédure H______, soit ceux recueillis en Suisse par le Ministère public genevois en exécution de la demande d'entraide du 27 février 2015. Ils soupçonnaient ainsi que les pièces dont l'accès leur avait été refusé, à raison de la prétendue sauvegarde d'intérêts privés, étaient des pièces issues directement ou indirectement de la procédure H______ concernant K______ ou ses sociétés.
Le procès-verbal d'entretien du 30 mai 2016 et le rapport d'entretien du 21 octobre 2016 n'avaient pas été soumis à leur représentant et ne portaient pas sa signature. Leur contenu était contesté. Leurs mandataires avaient à plusieurs reprises réitéré la demande d’accès au dossier afin notamment de s'assurer que la copie reçue par des précédents mandataires était bien complète, des doutes subsistant à ce sujet.
L'exercice du droit d'accès au dossier ne dépendait pas de l'influence des pièces sur la décision au fond. L'AFC-GE n'avait pas jugé pertinent de leur communiquer « un document » permettant d'établir que la plupart des pièces du dossier était issue de la procédure H______. Selon elle, le compte rendu d'entretien du 7 août 2018 avait été soustrait à consultation à raison de son caractère de « document interne ». Or, les procès-verbaux des entretiens des 30 mai 2016 et 21 octobre 2021 n’étaient pas non plus signés par leurs représentants et figuraient pourtant au dossier. II n'était pas contesté que certains des courriers communiqués par l'AFC-GE dans sa décision du 27 septembre 2021 avaient déjà été remis à leurs précédents mandataires. C'était précisément parce que leur nouveau conseil avait eu connaissance de ces pièces autrement, notamment par transmission de ses prédécesseurs, qu'il avait pu identifier qu'elles manquaient au dossier fourni le 12 octobre 2020. Le but de la consultation était de vérifier que le dossier en possession de l'AFC-GE était complet. Ce constat ne dispensait pas l'AFC-GE de tenir correctement ses dossiers.
Ils peinaient à comprendre quelle faute pourrait leur être reprochée. L'accès au dossier pouvait être sollicité à plusieurs reprises dans le cadre d'une même procédure, même à l'égard de dossiers dont le contenu était déjà connu de la personne concernée. Il ne devait être refusé que s'il s'avérait dilatoire ou abusif, ce qui ne pouvait être le cas d'une demande d'accès effectuée plus de deux ans après la dernière. Par sa décision du 27 septembre 2021, l'AFC-GE s'était contentée de communiquer les documents manquants identifiés par eux-mêmes et de tenter de reporter sur eux la responsabilité de ses propres manquements. Elle n'avait en revanche ni confirmé avoir complété son dossier ni remis à jour un bordereau de pièces. Elle leur avait par ailleurs refusé un nouvel accès au dossier. Compte tenu de l'attitude générale de l'AFC-GE et des nombreuses irrégularités entachant le dernier accès octroyé, il était légitime qu’ils souhaitent obtenir une nouvelle consultation sur place afin de s'assurer que leur dossier était bien complet et qu'aucun autre document n'avait été soustrait à leur connaissance. Sans connaître la teneur exacte de leur dossier fiscal, ils avaient été privés de la possibilité de se déterminer utilement dans le cadre de la procédure de réclamation. Ils n’étaient désormais pas en mesure de le faire dans le cadre de leur recours contre la décision sur réclamation de l'AFC-GE.
S’agissant des pièces dont la consultation était refusée en raison du secret fiscal, selon toute vraisemblance, elles étaient issues du dossier constitué par le Ministère public genevois dans le cadre de la demande d'entraide. Elles concernaient donc vraisemblablement K______ et ses sociétés. Dans la mesure où B______ était également personnellement visée par la procédure H______ où elle était soupçonnée par la DAPE d'avoir participé aux infractions reprochées à K______, elle devait être admise à accéder à ces pièces sans restriction. Dans l'hypothèse où un intérêt privé justifierait néanmoins de restreindre l'accès à ces pièces, les restrictions effectuées par l'AFC-GE violaient le principe de proportionnalité et leur droit d'être entendus. L'AFC-GE avait intégralement refusé de divulguer les documents concernés. Or, en application du principe de proportionnalité, elle était tenue d'opter pour la mesure la moins invasive possible et pouvait par exemple permettre une consultation partielle des documents en procédant à des caviardages, lorsque le maintien du secret ne se justifiait pas pour l'entier du document. Selon les indications très limitées fournies par l'AFC-GE sur le contenu de ces pièces, il semblait qu'il s'agissait essentiellement de documents bancaires ou d'attestations de tiers concernant des versements prétendument effectués à Mme B______. Le caviardage de tels documents ne paraissait pas une mesure excessivement complexe, dans la mesure où le travail d'identification des opérations et/ou indications pertinentes avait vraisemblablement déjà été effectué par l'AFC-GE et que les informations les concernant directement « ne sauraient être très nombreuses ». II était donc aisé de donner accès à B______ aux informations utiles la concernant en sélectionnant par exemple uniquement les pages utiles et en caviardant les informations couvertes par les intérêts privés de tiers. Le résumé du contenu de ces pièces que l'AFC-GE leur avait donné ne contenait aucune information utile sur leur contenu. Sans indications concrètes sur la nature de la pièce (relevé bancaire, formulaire, contrat etc.), le nom de l'établissement bancaire ou du cocontractant, la date, la transaction, le montant, l'émetteur, le bénéficiaire présumé, la nature des rôles et des implications prétendument établies concernant B______, ils n’étaient pas mis en situation de se déterminer utilement et de défendre correctement leurs droits.
b. Le 22 octobre 2021, les contribuables ont formé réclamation contre le bordereau de rappel d’impôt ICC 2009 du 21 septembre 2021.
Lorsqu'elle vivait en Suisse, B______, avait présenté L______ à K______. Cette rencontre avait donné lieu à une importante relation d'affaires entre les sociétés détenues par ces derniers. Agissant toujours pour ses sociétés à elle, B______ avait continué à apporter son soutien à cette relation commerciale. Comme cela était d'usage sur le marché de l'art, les sociétés venderesses avaient décidé, par l'intermédiaire de leurs organes, de verser des commissions à ses sociétés, dont le montant avait été fixé conformément aux usages de la branche, à savoir le syndicat des antiquaires français. Un tel procédé était usuel et avait pour but de fidéliser les intermédiaires et les encourager à apporter d'éventuels nouveaux clients. L'utilisation de sociétés étrangères dans le cadre de transactions sur le marché de l'art international était une pratique courante qui répondait avant tout à des « impératifs de confidentialité, de sécurité juridique, de discrétion et de flexibilité administrative ». Le recours à des structures offshore pour déployer l'activité d'intermédiaire avait d’ailleurs été exigé par ses partenaires.
Le 20 octobre 2017, l’enquête que la DAPE menait à l’encontre d’K______ avait été étendue à elle. L’enquête menée à son encontre avait pour unique but d'établir les éventuelles infractions fiscales commises par elle comme participante aux contraventions d’K______, et en aucun cas les infractions fiscales commises par elle dans son propre chapitre fiscal.
Ils demandaient la suspension de la procédure de réclamation jusqu’à droit connu dans la procédure A/3529/2021. Ils sollicitaient l'audition d’K______. En sa qualité de représentant de ses sociétés et par sa connaissance du marché de l'art, il pourrait fournir des indications essentielles sur la nature du rôle de B______ et les commissions versées par ses sociétés aux sociétés de cette dernière. Ils requéraient également l'audition de Z______ qui travaillait au sein de AA______, à H______, qui était administratrice d’C______ et F______. Cette personne pourrait fournir des informations utiles « sur l'organisation des sociétés et les flux ayant été reçus » au cours des périodes fiscales litigieuses.
Dans sa taxation du 21 septembre 2019, l'AFC-GE faisait état d'un supplément de fortune de CHF xxx.-, lequel correspondrait au cumul des commissions prétendument perçues par B______. Après un examen approfondi, ce montant n'avait pas pu être réconcilié avec « les données figurant dans le dossier fiscal des réclamants et notamment les comptes bancaires H______s ». L'AFC-GE avait donc failli à son obligation d’apporter la preuve de l’existence des éléments non déclarés qu’elle leur imputait.
Les rapports issus des entretiens que leurs représentants avaient eus avec l'AFC-GE les 30 mai et 21 octobre 2016 et 7 août 2018 n’avaient pas été soumis à ces derniers et ne reflétaient pas « fidèlement la réalité des faits ». Ces pièces ne leur étaient pas opposables et devaient être écartées du dossier. Le dossier contenait des pièces issues du dossier pénal constitué par le Ministère public genevois dans le cadre de la demande d'entraide. Tel était en particulier le cas des pièces nos 88, 100 à 127, 130 et 131, qui portaient très distinctement la cote caractéristique de la procédure H______. Ils soupçonnaient que d'autres pièces, notamment celles dont l'accès leur était refusé, étaient également issues directement ou indirectement de la procédure H______. En tant qu'elle découlait de la violation des droits fondamentaux garantis par l'art. 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), l'illicéité de preuves recueillies à H______ devait être admise tant sous l'angle du droit H______ que sous l'angle du droit suisse.
Les sociétés de B______ étaient « valablement organisées ». Le « schéma de détention », soit l'utilisation de sociétés étrangères pour percevoir les commissions d'apporteur d'affaires, répondait avant tout à un impératif de confidentialité et de sécurité très commun sur le marché de l'art. Les acteurs de ce marché souhaitaient rester discrets compte tenu des montants en jeu et de « l'intérêt suscité par ce type de transactions ». Le but d'évasion fiscale n'était donc pas réalisé. Il existait au contraire un intérêt autre que fiscal à « l'interposition des structures étrangères ». Partant, les éléments attribuables à celles-ci ne pouvaient être imposés en transparence auprès d’eux.
Les dettes de rappel d’impôt et les intérêts y relatifs devaient respectivement être déduits de leur fortune et de leurs revenus.
c. Par acte du 22 octobre 2021 (enregistré sous A/3757/2021), les contribuables ont recouru auprès du TAPI contre la décision sur réclamation du 21 septembre 2021 relative aux années 2005 à 2008, concluant principalement à ce qu’il leur soit donnée acte de ce qu’ils ne la contestaient pas en tant qu’elle portait sur l’année 2005 et à l’annulation des bordereaux de rappel d’impôt de d’amende 2006 à 2008. Subsidiairement, ils ont conclu à ce que ces bordereaux soient modifiés dans le sens « des développements juridiques qui précèdent ». Préalablement, ils ont requis l’audition de B______ et des « témoins cités », la suspension de cette procédure jusqu'à droit jugé dans la procédure A/3529/2021 et, subsidiairement, la jonction des deux procédures.
Reprenant l’argumentation exposée dans leurs écritures précédentes, ils ont notamment ajouté que, désireux de collaborer pleinement avec l'AFC-GE, ils avaient demandé à un premier mandataire de les représenter à l'occasion des entretiens des 30 mai 2016 et 21 octobre 2016. Le procès-verbal d'entretien, respectivement le rapport d'entretien, issus de ces deux rencontres n'avaient toutefois pas été soumis pour vérification à ce mandataire et ne portaient pas sa signature. Leur contenu était contesté. B______ n’avait pas pu faire usage de son droit d'être entendue oralement puisqu'elle n'avait pas participé personnellement aux entretiens organisés par l’AFC-GE.
Il ressortait d’un courrier de la DAPE du 16 juin 2020 que celle-ci fondait l'essentiel de ses soupçons sur des pièces issues directement ou indirectement de la procédure H______, soit des extraits des comptes bancaires H______ des sociétés liées à B______ ou encore des tableaux et documents établis sur la base d'informations tirées de ces mêmes comptes. Par un courrier du 9 juillet 2020, la DAPE avait précisé que l'enquête menée à son encontre avait pour unique but de déterminer son rôle dans les soustractions d'impôt prétendument commises par K______ et ses sociétés, et non d'établir la commission d'éventuelles soustractions d'impôt par elle. En conséquence, la DAPE avait retranché du dossier « l'audition écrite du 16 juin 2020 ».
La suspension de la procédure devait être ordonnée jusqu'à droit connu dans la cause A/3529/2021.
Dans la mesure où l'AFC-GE s'était elle-même octroyée un délai de six ans au total pour traiter le dossier, le principe de célérité ne pouvait être invoqué pour justifier la nécessité de réparer la violation de leur droit d'être entendu. Il se justifiait de leur permettre de se déterminer utilement sur la base d'un dossier complet avant qu'une nouvelle décision ne soit prise par l'AFC-GE. Subsidiairement, une fois le dossier complet obtenu, un délai devait leur être octroyé pour leurs déterminations complémentaires.
L'AFC-GE ayant refusé d’entendre oralement B______, la décision sur réclamation du 21 septembre 2021 devait être annulée et le dossier renvoyé afin qu'elle l’auditionne et, cela fait, afin qu’elle rende une nouvelle décision. Si la violation du droit d'être entendu devait être néanmoins considérée comme réparable devant le TAPI, il convenait que celui-ci procède à son audition.
Par ailleurs, elle sollicitait l’audition d’K______ et de Z______. En tant qu'il était au cœur de l'activité sous-jacente, sur la base de laquelle des commissions d'apporteur d'affaires avaient été octroyées aux sociétés de B______, K______ pourrait fournir des indications essentielles sur la « nature du rôle » de B______ et les commissions versées par les sociétés d’K______ aux sociétés de cette dernière. Z______ travaillait au sein de AA______, administratrice d’C______ et F______. Son témoignage permettrait d’obtenir des informations sur l'organisation des sociétés et les flux ayant été reçus au cours des périodes fiscales litigieuses.
Il était établi que l'AFC-GE avait été autorisée par le Ministère public genevois à prendre connaissance de la procédure d'entraide pénale sollicitée par H______ et que de nombreuses pièces issues de cette consultation avaient été versées à leur dossier fiscal, soit notamment les pièces nos 88, 100 à 127 et 130 à 131, qui étaient des documents établis ou obtenus par les autorités pénales H______ (exemple : procès-verbaux de la police H______, documents bancaires requis auprès de banques H______ etc.). II était également « probable » que l'AFC-GE avait versé au dossier des documents indirectement issus de la procédure H______, soit ceux recueillis en Suisse par le Ministère public genevois en exécution de la demande d'entraide du 27 février 2015, notamment dans le cadre de réquisitions de documents et perquisitions liées à K______ et à ses sociétés. Ils soupçonnaient qu'il s'agissait des pièces de leur dossier fiscal dont l'accès leur était refusé à raison de la prétendue sauvegarde d'intérêts privés, soit les pièces nos 69 à 87, 89, 90, 92 à 99, 128, 129 et 132 à 138.
Les pièces issues directement ou indirectement de la procédure H______ constituaient vraisemblablement l'essentiel de leur dossier fiscal. Elles représentaient la majorité, voire la totalité des preuves en mains de l'AFC-GE, dès lors que les autres pièces du dossier regroupaient uniquement les déclarations fiscales, les bordereaux de taxation, les bordereaux de rappel d'impôt et d'amende, quelques articles de presse et les échanges entre l'AFC-GE et leurs conseils. L'AFC‑GE s’était fondée exclusivement sur des documents issus de la procédure H______, soit notamment les informations bancaires relatives à des comptes H______ et les rapports d'audition devant les autorités judiciaires H______. La procédure pénale H______ ayant été annulée, les pièces issues directement ou indirectement de cette procédure H______, versées à leur dossier, devaient être considérées comme illicites et inexploitables. En les intégrant dans la procédure suisse, les autorités suisses perpétuaient la violation des droits fondamentaux de B______. La procédure suisse devenait alors elle-même contraire au droit à un procès équitable garanti par la CEDH.
Cette analyse était corroborée par la décision de classement du Ministère public genevois. Il s’agissait de preuves si gravement illicites qu'elles étaient absolument inexploitables. L'interdiction d'exploiter s'étendait en outre également aux preuves recueillies par le Ministère public en application de la commission rogatoire H______ du ______ 2017. L'exécution des actes d'enquête par le Ministère public genevois avait pour unique but de faciliter la poursuite et la répression des infractions pénales à H______. Les preuves recueillies en Suisse l'avaient été sur la base des informations réunies par les autorités H______ et pour le compte de ces dernières. Le Ministère public genevois n'aurait pas été légitimé à agir en dehors du cadre de l'entraide pénale. Il n'aurait donc pas obtenu les preuves en Suisse sans l'administration des preuves H______ viciées. La violation des droits fondamentaux dans la procédure H______ se répercutait donc inéluctablement sur la procédure menée en Suisse, puisque sans les éléments recueillis dans la première, la seconde n'aurait pas pu avoir lieu. La nullité prononcée de l'ensemble des actes d'enquête et notamment de la demande d'entraide entrainait donc celle des actes effectués par le Ministère public genevois. Il en allait de même pour les éventuelles pièces que l'AFC-GE aurait ou pourrait obtenir de la DAPE. Ce n'était qu'en raison des preuves découlant de la procédure H______ que la DAPE avait pu réunir les éléments permettant de fonder les soupçons nécessaires à l'ouverture de son enquête. Les preuves réunies par la DAPE étaient dérivées de preuves inexploitables.
Il ne leur avait pas été possible de réconcilier les montants retenus par l'AFC-GE avec les données figurant dans leur dossier fiscal. Celle-ci présentait dans sa décision sur réclamation du 21 septembre 2021 un tableau des commissions prétendument perçues par les entités traitées en transparence et imposées auprès des contribuables. Or, les pièces du dossier ne permettaient pas d'obtenir les renseignements indiqués dans ce tableau. Les comptes bancaires H______ figurant au dossier ne fournissaient pas systématiquement d'information sur « l'émetteur des transactions ». Il n'avait pas été possible de rattacher certaines transactions aux documents figurant dans le dossier. L'AFC-GE avait ainsi failli à son obligation d'apporter la preuve de l'existence des éléments non déclarés. Elle ne pouvait se contenter de fournir un tableau faisant état de commissions sans qu'il ne soit possible de comprendre sur quelle base et preuve ce document avait été établi.
Les commissions avaient été versées par les sociétés d’K______ en faveur de sociétés de B______, lesquelles étaient valablement organisées, de sorte que le voile corporatif devait être respecté. Le schéma de détention ne remplissait pas les conditions cumulatives du « Durchgriff », dès lors que le but d'évasion fiscale n'était pas réalisé. La forme juridique choisie répondait à un impératif de confidentialité extrêmement commun sur le marché de l'art. II existait un intérêt autre que fiscal à l'interposition des structures étrangères. Ainsi, le voile corporatif ne pouvait être levé. Les prétentions fiscales devaient être limitées aux « éventuels » revenus tirés de ces sociétés ainsi qu'à la valeur de leurs actions.
Les dettes de rappel d’impôt et les intérêts y relatifs devaient être déduits de leur fortune, respectivement de leurs revenus.
S’agissant du principe des amendes, contrairement à la soustraction, l'évasion fiscale ne connaissait pas de sanction pénale. Lorsqu'elle était établie, elle emportait uniquement une imposition conforme à la forme usuelle correspondant au résultat économique que le contribuable souhaitait atteindre. Dans sa décision sur réclamation, l'AFC-GE soutenait que l'utilisation des sociétés de B______ était constitutive d'un abus de droit. Elle y indiquait que les conditions de l'évasion fiscale étaient réunies et, en conséquence, attribuait à celle-ci les revenus et la fortune liés à ses sociétés, en lui infligeant une amende pour soustraction fiscale. Or, l'évasion fiscale ne pouvait être sanctionnée d'une amende.
Les commissions avaient été reçues par des sociétés non domiciliées en Suisse. B______ était totalement profane en matière fiscale, l'omission de déclarer des commissions perçues par les sociétés valablement formées, « domiciliées et administrées » à l'étranger ne procédait donc pas d'un plan ou d'une intention de soustraction. L'utilisation de structures offshore pour déployer l'activité d'intermédiaire avait d'ailleurs été exigé par les partenaires de B______ car il s'agissait de la manière ordinaire de procéder dans les relations commerciales sur le marché de l'art pour des raisons notamment de confidentialité et de sécurité. B______ n'avait pas d'antécédents en matière d'infractions fiscales et un important laps de temps s'était écoulé depuis la commission des infractions reprochées. Ainsi, aucune circonstance particulière ne justifiait l'application d'une quotité supérieure à 100 % des impôts soustrait. Pour tenir compte de l'écoulement du temps, la quotité de l'amende devrait donc être progressive et se limiter à 75 % pour les années 2006 et 2007 [recte : 2007], puis augmentée à 100 % pour l’année 2008.
d. Par décision du 12 novembre 2021, l'AFC-GE a rejeté la réclamation relative à l’année 2009.
Reprenant, en substance, la motivation de sa décision sur réclamation relative aux années 2005 à 2008, elle a notamment ajouté que B______ et ses mandataires successifs avaient expressément reconnu au cours de la procédure avoir perçu des commissions importantes, pendant plusieurs années, par le biais de structures offshore. En reconnaissant ces éléments, B______ avait admis le bien-fondé de l'ouverture de procédures en rappel et en soustraction d'impôt, procédures justifiant, au terme de l'instruction, la notification de bordereaux rappels d'impôts.
L'AFC-GE avait manifesté son intérêt à recevoir toute information en lien avec lesdites procédures et s'était déclarée réceptive quant à la recherche d'une solution non contentieuse, dans la mesure du possible. De nombreux entretiens avec différents mandataires avaient eu lieu, lors desquels la position de l'AFC-GE avait été exposée. Il était dès lors surprenant d’invoquer le non-respect du droit d'être entendu et de conclure qu’elle avait failli à son obligation d'apporter la preuve que les commissions n'avaient pas été déclarées.
Les quatre différents représentants des contribuables avaient pu avoir accès aux pièces du dossier fiscal. Elle ne pouvait subir les conséquences des changements consécutifs de mandataires. Le contenu essentiel des pièces soumises au secret fiscal avait fait l'objet d'une description. Il n'y avait dès lors pas lieu de suspendre la procédure.
Quant à l’exploitabilité des preuves, il ressortait des pièces qu’elle avait recueillies que durant les périodes 2005 à 2009, les contribuables n’avaient pas déclaré des sommes substantielles, ce qui avait un impact important sur les intérêts pécuniaires de la collectivité. Les montants d’impôts soustraits s’élevaient à près de CHF 25 millions. Les contribuables étant tenus de révéler leur situation personnelle et financière aux autorités fiscales, l'intérêt public à la manifestation de la vérité était prépondérant, de sorte que les pièces pouvaient être exploitées. Elle avait demandé la production de pièces en vertu de devoir de collaborer et utilisé la demande d'entraide auprès du Ministère public ainsi que la collaboration avec la DAPE. L'utilisation des pièces versées au dossier n'était en aucun cas compromise.
Elle ne disposait pas de prérogative d’auditionner des témoins. La collaboration des contribuables durant l'instruction n'avait été que très partielle et s'était limitée à des entretiens avec leurs représentants. Les intéressés n’avaient jamais fourni d'explications détaillées, circonstanciées et, surtout, documentées pour les activités de B______. L'AFC-GE s'en était remise aux pièces obtenues auprès d'autres administrations et par le biais de « recoupements ». Compte tenu des éléments à sa disposition, le dossier contenait l'ensemble des éléments fiscaux permettant de statuer sur les rappels d'impôt. Il n'y avait donc pas lieu de procéder à l'audition de témoins.
Sur la base des informations à sa disposition, elle avait évalué, par appréciation, la fortune imposable à reprendre. Les éléments de revenus avaient été capitalisés et imposés en fortune. Ainsi, une fortune de CHF xxx.- avait été imposée pour la période fiscale 2009.
Enfin, constatant que les dettes et intérêts relatifs aux rappels d’impôt étaient contestés et que certaines périodes pourraient être prescrites, elle n'entendait pas, à ce stade, entrer en matière sur les déductions revendiquées à ce titre.
e. Par courrier du 15 novembre 2021, l'AFC-GE s’est opposée à la suspension de la procédure A/3757/2021.
f. Par acte du 15 décembre 2021 (enregistré sous A/4268/2021), les contribuables ont recouru auprès du TAPI également contre la décision sur réclamation relative à l’année fiscale 2009, concluant principalement à l’annulation du bordereau de rappel d’impôt ICC 2009. Subsidiairement, ils ont conclu à ce que ce bordereau soit modifié dans le sens « des développements juridiques qui précèdent ». Préalablement, ils ont requis l’audition des témoins cités, la suspension de cette procédure jusqu'à droit jugé dans la procédure A/3529/2021 et, subsidiairement, la jonction des deux procédures et en tout état la jonction de la présente procédure et de celle portant le numéro A/3757/2021 (2005 à 2008).
Reprenant les termes de leur recours relatif aux années 2005 à 2008, ils ont notamment ajouté qu’ils n’avaient changé de mandataire, de leur propre chef, qu’à une seule reprise, leur second représentant ayant dû cesser son activité à la demande de la DAPE, en raison d’un prétendu conflit d’intérêts. Ils n’avaient sollicité l’accès à leur dossier que deux fois, en 2018 et en 2020.
L'AFC-GE indiquait expressément qu'elle avait utilisé des moyens de preuve issus de sa collaboration avec la DAPE. Pourtant, à l'examen du dossier fourni par l'AFC‑GE et en procédant à une comparaison avec le dossier établi par la DAPE, ils ne parvenaient pas à déterminer quelles pièces auraient été communiquées à l'AFC-GE par la DAPE. Il n'y avait aucun courrier faisant état de la collaboration entre les deux autorités et des informations échangées entre elles. Cela démontrait que le dossier communiqué par l'AFC-GE n'était pas complet. Il ne leur permettait pas de connaître l'étendue, la teneur et la provenance exacte des pièces qui y figuraient. Ces éléments étaient pourtant essentiels pour leur permettre de faire valoir correctement leur droit d'être entendu.
Ils sollicitaient l’audition d’K______ et de Z______ pour les mêmes motifs que ceux formulés dans la procédure A/3757/2021, étant relevé que cette demande intervenait après six années d'instruction au cours desquelles l'AFC-GE s'était contentée de procéder seulement à trois entretiens en 2016 et 2018 qui n'avaient pas été correctement protocolés et n’étaient donc pas exploitables. Compte tenu de son « inaction générale », il était étonnant que l'AFC-GE leur reproche un manque de collaboration.
S’agissant de l’exploitabilité des preuves, du fardeau de la preuve, de l’imposition en transparence des sociétés et de la déductibilité des rappels d’impôts et des intérêts y relatifs, ils ont repris leur argumentation précédente, précisant que l'AFC‑GE devait évaluer ces sociétés conformément à la circulaire n° 28 et déduire auprès de celles-ci les dettes de rappels d’impôt et des intérêts moratoires. Si leurs griefs devaient être rejetés, les dettes fiscales correspondant aux rappels d'impôts et amendes et les intérêts moratoires devaient être déduits de leur fortune.
g. L'AFC-GE s’est opposée également à la suspension de la procédure A/4268/2021. Elle a accepté la demande tendant à la jonction des trois procédures et a sollicité un seul délai pour communiquer sa réponse.
h. Par décision du 21 janvier 2022, le TAPI a joint les trois causes, décision contre laquelle les époux ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative).
i. Dans sa réponse du 25 février 2022, l'AFC-GE a conclu à ce qu’il soit constaté que les créances d'impôt relatives à l'année fiscale 2006 étaient prescrites, qu’il lui soit donné acte de ce qu'elle retenait, en faveur des contribuables pour l'année fiscale 2007, un revenu supplémentaire de CHF xxx.-, au lieu de CHF xxx, qu’il lui soit donné acte de ce qu'elle arrêtait, en faveur des époux A______ B______ pour l'année fiscale 2008, le revenu supplémentaire à CHF xxx, au lieu de CHF xxx, qu’il lui soit donné acte de ce qu’elle acceptait la déduction des dettes de rappels d'impôt de la fortune et des intérêts sur rappel d'impôt du revenu et de la fortune conformément à la jurisprudence, que le TAPI procède à une reformatio in pejus en retenant, pour la fortune imposable en 2007 à 2009, les montants de respectivement CHF xxx, CHF xxx et CHF xxx, au lieu de CHF xxx.-, CHF xxx.- et CHF xxx.- et que les recours soient rejetés pour le surplus.
Afin de limiter des échanges d'écritures sur des points non essentiels, elle produisait exclusivement les documents justifiant l'ouverture des procédures en rappel et en soustraction d'impôt et ceux permettant de constater le bien-fondé des reprises demeurant litigieuses. Au cours de l’instruction des procédures en rappel et soustraction d'impôt, les intéressés avaient soit eu accès aux pièces du dossier, soit, s'agissant des pièces ne pouvant leur être remises car concernant des tiers, pu prendre connaissance de leur contenu essentiel (pièces nos 19, 26, 29, 37 et 43). Dans un souci d'exhaustivité, un très grand nombre de pièces leur avait été remis. Or, seuls certains documents permettaient concrètement d'appréhender le contexte juridique du cas d'espèce et de justifier les reprises opérées, de sorte que ces seules pièces étaient produites au stade du recours. Elles permettaient de reconstituer l'ensemble des reprises litigieuses ainsi que le bien-fondé de l'ouverture de la procédure de rappel d'impôt. Les documents concernant d'autres périodes fiscales, notamment celles prescrites (2005 et 2006), qui n’était pas pertinents pour justifier les reprises litigieuses (2007 à 2009) n’étaient pas produits. Les pièces soumises au secret fiscal décrites lors de la procédure de contrôle, si elles permettaient de comprendre le contexte général, ne fondaient pas, en tant que telles, les reprises. Ces pièces n'avaient dès lors pas été utilisées au désavantage des justiciables et, par conséquent, n’étaient pas non plus produites. Certaines pièces étaient désormais produites sous forme caviardée, afin de faciliter aux intéressés la reconstitution des montants des reprises (pièces nos 56c, 56e et 56i).
B______ avait été invitée à de nombreuses reprises à participer aux entretiens avec l'AFC-GE, mais s’était toujours fait représenter. Dans le cadre des procédures en rappel et en soustraction d'impôt, les contribuables avaient eu à de nombreuses reprises l'occasion de se prononcer par écrit. Dans les interviews donnés par B______ à la presse, elle avait expressément reconnu avoir perçu, au travers de sociétés offshore lui appartenant, des commissions de la part d’K______, pour son rôle d'intermédiaire dans les ventes de tableaux de maîtres à L______. Cet élément avait été corroboré par ses différents mandataires tout au long de la procédure (cf. pièces nos 3, 12, 13, 15, 17, 25, 30 et 44). Dès lors, l’on peinait à comprendre quels autres éléments B______, K______ et Z______ pourraient faire valoir lors de leur audition.
L’existence des conditions d'ouverture des procédures en rappel et en soustraction d'impôt n’était pas remise en cause. Néanmoins, elle relevait que c'était par le biais d'articles parus dans les médias qu’elle avait pu constater que B______ avait perçu de substantielles commissions de la part d’K______ et que celles-ci n'avaient jamais été indiquées dans les déclarations fiscales des époux. Dès lors, il se justifiait qu’elle ouvre ces procédures au cours desquelles ces derniers avaient au demeurant reconnus que leurs déclarations fiscales étaient incomplètes.
Les mandataires des époux avaient expressément reconnu, tout au long de la procédure, que B______ était actionnaire unique des sociétés offshore. Celles‑ci, situées dans des paradis fiscaux, se limitaient à disposer de comptes bancaires permettant à B______ de recevoir des commissions de sociétés appartenant à K______, pour son activité d'intermédiaire dans la vente d'objets d'arts. Ces éléments étaient corroborés par les pièces nos 49 à 52). Ces sociétés disposaient d'un siège social au G______ et de comptes bancaires à H______ ou à I______. Aucune ne disposait de personnel bénéficiant de pouvoirs et de compétences nécessaires pour réaliser les affaires ayant généré les commissions litigieuses. Elles ne possédaient pas non plus de locaux propres et n'étaient pas présentes sur le marché. Aucune comptabilité n'avait été produite pour ces sociétés. Elles servaient uniquement de réceptacle pour les commissions versées par T______ et W______, qui, selon les articles publiés dans la presse, appartenaient à K______. En particulier, il ressortait des documents d'ouverture du compte n° 2______ auprès de la banque P______, au nom de D______, que B______ avait pour volonté d'ouvrir une structure afin de défiscaliser les économies provenant de son activité professionnelle (vente d'œuvres d'art).
Les conditions de l'évasion fiscale étaient clairement réalisées. B______ avait constitué de nombreuses sociétés offshore aux fins de recevoir les commissions versées par K______. Ces sociétés, toutes sises dans des paradis fiscaux, avaient manifestement été créées aux fins d'éluder l'impôt et avaient permis à la contribuable de ne pas payer, dans le canton de Genève et en Suisse, des montants substantiels d'impôts, soit un montant totalisant plus de CHF 21 millions pour les seules années encore litigieuses. C’était donc à bon droit qu’elle avait traité les entités récipiendaires des commissions en transparence et, par conséquent, qu’elle avait taxé les époux sur les revenus en question. Ainsi, pour les années 2007 et 2008, les reprises opérées en transparence l’étaient sur les commissions suivantes :
Année | Date | Bénéficiaire | Commissions | CHF | Pièce n° |
2007 | 03.05. | C______ | EUR xxx | xxx | 55a |
2007 | 14.11. | C______ | EUR xxx | xxx | 55b |
Total | xxx | ||||
2008 | 25.01. | F______ | EUR xxx | xxx | 56a |
2008 | 11.03. | C______ | EUR xxx | xxx | 56b |
2008 | 21.05. | E______ | EUR xxx | xxx | 56c |
2008 | 30.07. | F______ | EUR xxx | xxx | 56d |
2008 | 25.08. | E______ | EUR xxx | xxx | 56e |
2008 | 22.09. | C______ | EUR xxx | xxx | 56f |
2008 | 06.11. | D______ | USD xxx | xxx | 56g |
2008 | 13.11. | C______ | EUR xxx. | xxx | 56h |
2008 | 10.11. | E______ | EUR xxx | xxx | 56i |
Total | xxx |
Ces montants correspondaient à ceux ressortant des relevés de comptes créditeurs, en lieu et place de ceux découlant des relevés de comptes débiteurs qu’elle avait pris en considération initialement. Par ailleurs, des erreurs de plume dans les taux de change 2006 et 2008 avaient été corrigées. Elle s’engageait donc à rectifier, en faveur des contribuables, les montants de la reprise pour l'année 2007 à CHF xxx (au lieu de CHF xxx) et de celle de l'année 2008 à CHF xxx (au lieu de CHF xxx).
S'agissant des reprises sur la fortune, elle avait capitalisé les éléments de revenus pour fixer la fortune imposable pour chacune des années litigieuses. Les montants des commissions ayant été rectifiés selon les explications ci-dessus, un montant de CHF xxx devait être repris en 2007 (cumul des commissions 2005 à 2007) et une somme de CHF xxx devait être reprise en 2008 et en 2009 (cumul des commissions 2005 à 2008). Elle concluait dès lors à ce que la taxation de la fortune pour les années 2007 à 2009 soit rectifiée en défaveur des époux.
Il n'était pas contesté que les montants susmentionnés n'avaient pas été déclarés par ceux-ci. Or, il avait été démontré qu'il s'agissait de revenus imposables dans le chef de B______. Chaque reprise opérée était documentée et chaque transaction identifiable, comme cela ressortait des pièces produites en annexe à sa réponse. Les contribuables n’avaient amené aucun élément probant venant infirmer les reprises.
Les justiciables avaient pu prendre connaissance, à de nombreuses reprises (pièces nos 19, 26, 29, 37 et 43), des comptes rendus d'entretien des 30 mai 2016, 21 octobre 2016 et 7 août 2018. Ils avaient ainsi connaissance du fait qu'ils faisaient partie du dossier. Il leur était loisible de contester leur contenu, ce que le premier représentant des époux avait d’ailleurs fait dans un courriel du 22 août 2018, remerciant pour le « compte rendu très clair » du procès-verbal du 7 août 2018 et requérant deux modifications mineures de ce document. Loin de s'être opposés à l'utilisation de ces procès-verbaux, les mandataires les avaient relus et pu y apporter les modifications souhaitées. Il pouvait dès lors être présumé que ces procès-verbaux avaient été acceptés. Le revirement de la position des contribuables contrevenait au principe de la bonne foi.
Quant aux pièces issues directement ou indirectement de la procédure H______, l'intérêt public à la manifestation de la vérité était prépondérant par rapport à celui des époux. Un éventuel caractère illicite des preuves dérivées n'excluait pas, à lui seul, toute exploitation de celles-ci au cours de la procédure. La justice H______ avait sollicité la Suisse dans le cadre d'une demande d'entraide qui avait été exécutée par le Ministère public genevois. C’était dans cette configuration qu’elle avait sollicité l'entraide auprès de cette juridiction afin d'éclaircir les faits lui permettant de procéder à une taxation correcte des époux. Ainsi, l'obtention des pièces découlant de la procédure H______ par le biais de la procédure d'entraide, s'agissant de preuves dérivées, ne revêtait pas, d'emblée, un caractère manifestement illicite. Il n'apparaissait pas que les procédures d'entraide internationale entre la Suisse et H______ et entre le Ministère public et l'AFC-GE étaient viciées. Le fait que la procédure H______ avait été annulée n'impliquait pas de facto le défaut des preuves recueillies dans ce cadre. Une preuve illégale pouvait être utilisée dans la procédure de taxation si elle aurait pu être obtenue légalement par l'autorité fiscale. Or, non seulement elle avait demandé aux époux la production de pièces, en vertu de leur devoir de collaborer, mais avait utilisé les moyens à sa disposition, soit l'entraide auprès du Ministère public.
Les conditions objectives de la soustraction d'impôt étaient remplies. Les époux avaient passé sous silence les importantes commissions. Ils n'avaient pas indiqué être détenteurs économiques des sociétés. En ne déclarant pas les commissions substantielles, B______ avait clairement manifesté son intention de soustraire aux impôts genevois et suisses une part très importante de ses revenus et de sa fortune. Les amendes devaient donc être confirmées dans leur principe.
Le déploiement de l'activité d'intermédiaire dans le commerce d'art ainsi que la rémunération perçue pour cette activité au travers d'une multitude de sociétés offshore rendant difficile un traçage des fonds, une faute grave pouvait être imputée à B______, qui avait sciemment et volontairement omis de déclarer les revenus et la fortune en question. Des circonstances aggravantes étaient retenues pour la fixation de la peine, soit le fait que les soustractions d'impôt avaient été commises de manière répétée pendant de nombreuses périodes fiscales et que les montants en jeu étaient très importants (plus de CHF xxx, ICC et IFD confondus). Elle avait retenu le comportement astucieux de B______ pour dissimuler une partie de ses revenus et de sa fortune et pour déjouer la mise au jour de graves infractions fiscales, par la création de structures offshore opaques servant de réceptacles aux commissions non déclarées. Selon la documentation bancaire relative à D______, elle souhaitait ouvrir une structure afin de défiscaliser les économies provenant de son activité professionnelle. Cette indication permettait d'écarter l'argument de B______ selon lequel elle serait totalement profane en matière fiscale. Les changements successifs de mandataires ainsi que le report des dates d'entretien proposées avaient allongé la durée de la procédure, avec pour conséquence la prescription de deux années fiscales. Aucune circonstance atténuante n'était réalisée, en particulier pas celle du bon comportement, au vu de la réitération des infractions fiscales pour les périodes fiscales 2005 à 2009. La quotité de l'amende était justifiée.
Elle s’engageait à déduire les dettes et intérêts sur rappel d'impôt conformément à la pratique validée par la jurisprudence cantonale. Les montants déductibles seraient fixés en fonction de l'issue définitive du litige.
j. Par courrier du 1er mars 2022, le TAPI a imparti aux époux un délai pour répliquer.
k. Les contribuables ayant contesté ce délai, considérant que le recours devant la chambre administrative avait un effet dévolutif, de sorte que le TAPI était dessaisi notamment de la question de la suspension des procédures, le TAPI a rendu une décision incidente leur impartissant un délai au 29 août 2022 pour déposer leur éventuelle réplique, précisant que cette décision était exécutoire nonobstant recours.
l. Les justiciables ont également recouru contre cette décision.
m. Par arrêt du 9 août 2022, la chambre administrative a déclaré irrecevable le recours contre la décision de jonction des causes.
n. Le 18 août 2022, les époux A______ B______ ont consulté le dossier.
o. Le 25 août 2022, informés par la chambre administrative que leur recours contre la décision incidente leur impartissant un délai de réplique n’avait plus d’objet et invités à se déterminer sur l’éventuel caractère abusif de ce recours s’ils le maintenaient, les intéressés l’ont retiré.
p. Par courrier du même jour, ils ont demandé au TAPI de leur remettre une copie des pièces nos 11 p. 1, 19 p. 1, 20 p. 3, 22 p. 1, 23, 24, 27, 38, 56c, 56e et 56i figurant au dossier que l'AFC-GE avait fourni avec sa réponse.
q. Par courrier du même jour, le TAPI les a informés qu’une copie desdites pièces étaient à leur disposition au greffe.
r. Le 30 août 2022, le représentant des époux a obtenu copie de ces pièces.
s. Par réplique du 29 août 2022, ces derniers ont persisté dans leurs conclusions, tout en en formulant une nouvelle tendant à ce que le TAPI rende un jugement sur partie sur la question de l’accès au dossier.
Ils sollicitaient que le premier juge traite la question de l'accès au dossier de manière préalable, avant de statuer sur leurs autres griefs, et qu'il rende, comme l’avait suggéré la chambre administrative dans son arrêt du 6 août 2022, un jugement sur partie sur cette problématique.
Reprenant leur argumentation précédente, ils ont en particulier ajouté que la pièce « A » que l'AFC-GE avait versée en annexe à sa réponse, sous couvert du secret fiscal, devait être écartée de la procédure. À l'exception de trois procès-verbaux non signés offrant des informations imprécises et dont ils contestaient l'exploitabilité, l'AFC-GE fondait exclusivement ses allégués et ses reprises sur la base de pièces issues directement ou indirectement de la procédure pénale H______.
En sus de l'impératif de confidentialité, le recours à des sociétés étrangères était nécessaire pour limiter la responsabilité des acteurs du marché. Au vu des montants colossaux engendrés par les transactions, aucune personne physique ne pouvait engager sa responsabilité personnelle dans ce type d'affaires. Le recours à ces sociétés était justifié pour des motifs visant à limiter la responsabilité civile si un litige venait à survenir avec les partenaires d'affaires. Grâce à cela, B______ avait été protégée d'une action civile de L______. Le recours à des sociétés étrangères avait été imposé par ses partenaires d'affaires, qui faisaient également usage de ce type de structures pour les transactions sous-jacentes à l'activité d'apporteur d'affaires. Faute d'existence de telles sociétés, jamais ces partenaires n'auraient consenti à lui verser une commission ou même à faire appel à elle en tant qu'intermédiaire. L'utilisation de ces sociétés avait également pour but de faciliter sa succession future, dès lors que ses deux enfants n'avaient pas le même père. Elle avait maintenu ses sociétés offshore après son départ de Suisse, alors qu'elle vivait à H______ où les revenus des personnes physiques n’étaient pas imposés. Son audition permettrait de confirmer qu'en agissant pour ses sociétés, elle n'avait pour volonté première que de se plier aux usages du marché de l'art et de ses partenaires d'affaires.
Des nouvelles pièces avaient été produites par l'AFC-GE dans le cadre de sa réponse, lesquelles ne figuraient pas dans le dossier leur ayant été communiqué précédemment et dans le bordereau y relatif. Il en allait ainsi des pièces nos 11 p. l, 19 p. l, 20 p. 3, 22 p. l, 23, 24, 27 et 38. Il était effarant qu'à ce stade de la procédure des pièces manquaient encore alors même que cette problématique avait été signalée à l'AFC-GE déjà par leur courrier du 20 septembre 2021.
Ils n’étaient toujours pas en possession de leur dossier fiscal complet, dans une procédure où la nature et la source des preuves utilisées était une question centrale. Ils n’étaient donc pas mis en situation de défendre utilement leurs droits et leur droit d'être entendus était violé.
L'AFC-GE avait refusé d’auditionner B______, alors que celle-ci en avait fait une demande le 17 septembre 2021, de sorte que son droit d’être entendue avait été violé. Elle avait le droit d’être entendue oralement par le TAPI.
Les conditions d’une imposition en transparence et de l’évasion fiscale n’étaient pas remplies. Les sociétés offshore avaient été utilisées pour déployer l'activité d'intermédiaire mise en place au soutien de la relation d'affaire nouée entre les sociétés d’K______ et L______. Ces derniers avaient eux aussi recours à des sociétés offshore pour l'organisation des opérations financières relatives au commerce d'œuvre d'art. Il était donc cohérent que le recours à des structures offshore ait également été exigé pour déployer l'activité d'intermédiaire de B______. Ces dernières n’avaient donc rien d’insolite. Quand bien même l’on ne pourrait pas exclure qu’elle aurait profité de la mise en place d’une structure pour économiser des impôts lorsque qu'elle résidait en Suisse, cela n'était pas le critère décisif : seul l'impératif de confidentialité l'était. Son comportement ne confinait donc pas à l'abus de droit.
Subsidiairement, si les commissions litigieuses devaient être imposées en Suisse, elles ne pouvaient l’être auprès des contribuables. On pourrait tout au plus admettre que des reprises intervenaient à l'encontre de ces entités en Suisse à raison de leur administration effective depuis ce lieu, notamment par B______. Il conviendrait donc d’imposer ces sociétés pour imposer les commissions en Suisse et non de tenter de les imposer en revenus et en fortune dans le chapitre fiscal des époux.
Les auditions d’K______ et de Z______ étaient nécessaires car elles permettraient d’établir les faits ayant justifié le recours à des sociétés offshore pour déployer l'activité d'intermédiaire ainsi que l'organisation de ces sociétés et de l'activité en question. En tant qu'acteurs « directs » pour des commissions et de la gestion de certaines des sociétés de la contribuable, ils apporteraient un regard distinct pour remettre en cause l'application « de tout Durchgriff ».
Les nouvelles prétentions de l'AFC-GE relatives aux périodes pour lesquelles le droit de taxer était prescrit, soit 2005 et 2006, devaient être rejetées. Le TAPI devait entendre B______ avant de procéder à la reformatio in pejus requise par l'AFC-GE pour la fortune des années 2007 et 2008. Dès lors qu’ils avaient démontré que les commissions ne pouvaient être imposées auprès d’eux, cette reformatio in pejus n’avait pas lieu d’être. Si le TAPI venait à admettre l'application d'un « Durchgriff », ils contestaient que l'AFC-GE puisse leur imputer au titre de fortune imposable l'ensemble des commissions perçues sous forme capitalisée. Il s'agissait plutôt d'une simple addition. En procédant ainsi, l'AFC-GE partait de la fiction que des commissions avaient été perçues, mais qu'aucune charge n'avait été induite pour leur obtention ou pour l'administration des sociétés qui y étaient liées. Ainsi, c'était l'actif net des sociétés qui devrait être imposé, soit les commissions réduites des charges supportées par les sociétés. Dans la mesure où ils contestaient que ces commissions puissent faire l'objet d'un « Durchgriff », ils renonçaient à produire tout justificatif à cet égard.
Dans le cadre de sa demande de consultation du dossier pénal, l'AFC-GE avait vraisemblablement obtenu également des documents indirectement issus de la procédure H______, soit des documents recueillis par le Ministère public genevois en exécution de la demande d'entraide du 27 février 2015. Ils n’étaient pas en mesure de se prononcer sur les pièces du dossier fiscal qui ne leur avaient pas été communiquées ainsi que sur la pièce « A » pour laquelle I'AFC-GE n'avait pas indiqué la source. L'AFC-GE fondait la quasi-totalité de ses allégués et l'ensemble de ses reprises figurant dans sa réponse sur des documents issus directement de la procédure H______. L'ensemble des preuves en main de l'AFC-GE découlait de la procédure H______ puisque sans celle-ci, ni l'AFC-GE, ni le Ministère public genevois, ni la DAPE n'auraient été légitimés à procéder à des actes d'enquête à leur encontre. Ces preuves devaient être considérées comme illicites et inexploitables.
Ils ont repris leurs arguments relatifs à l’amende. Tout au plus, pouvaient-ils se voir reprocher d'avoir omis de déclarer les actions des sociétés. Si tel était le cas, en aucun cas l'entier des résultats de l'activité de ces sociétés et leurs liquidités « en lien avec les commissions » ne devraient leur être imputés. L'AFC‑GE ne pouvait retenir aucune circonstance aggravante dès lors qu’elle n’avait pas entendu oralement B______. Cette dernière avait eu la volonté de collaborer, mais l'AFC-GE avait refusé de l’entendre. Après son audition, toute éventuelle amende ne pourrait donc excéder une fois le montant de l'impôt soustrait. L'AFC-GE devrait plutôt reconnaître des circonstances atténuantes dès lors que B______ n'avait eu de cesse de vouloir collaborer et d'être auditionnée par l'AFC-GE. L’amende ne devrait donc pas excéder 0,75 fois le montant de l'impôt soustrait.
t. Par courrier du 1er septembre 2022, le TAPI a convoqué B______ à une audience de comparution personnelle le 4 octobre 2022.
u. Dans sa duplique du 13 septembre 2022, l'AFC-GE s’est opposée à ce que le TAPI rende un jugement sur partie.
v. Le TAPI a imparti aux époux un délai au 30 septembre 2023 pour se déterminer sur cette duplique.
w. Par courrier du 22 septembre 2022, les contribuables ont répondu que dans son écriture, l'AFC-GE se référait à un jugement du TAPI du 31 août 2022, qui n’était pas publié sur le site Internet du Pouvoir judiciaire, raison pour laquelle ils sollicitaient une copie de ce jugement.
x. Par courrier du 23 septembre 2022, le TAPI a informé les justiciables qu’il n'était pas possible de leur communiquer une copie du jugement précité. La question de l'exploitabilité des pièces dans la procédure les concernant avait fait l'objet de déterminations complètes de leur part ainsi que de la part de l'AFC-GE et serait examinée pour dans le cadre de la présente procédure, sans aucune référence à ce jugement. Le délai imparti au 30 septembre 2022 et qui tenait compte de la brièveté des écritures de l'AFC-GE du 13 septembre 2022 était maintenu.
y. Le 30 septembre 2022, le conseil des intéressés a remis au greffe du TAPI télécopie d’un certificat médical daté du même jour, signé par un médecin H______, à teneur duquel l’état de santé de B______ nécessitait une hospitalisation pour ______. Elle était hospitalisée depuis ce jour au sein du service ______. Le conseil des contribuables a exposé qu’un trouble majeur de la santé accablait B______. De l'avis des médecins, cela découlait des multiples procédures dont elle était la cible depuis 2015. Si ce trouble de la santé existait déjà depuis plusieurs années, il s'était trouvé empiré ces dernières semaines en raison de l'évolution des procédures judiciaires auxquelles elle était partie. Cela étant, elle était déterminée à déférer à la convocation du TAPI sitôt que son état de santé le permettrait. De l'avis des médecins, la phase aigüe dont elle souffrait alors ne devrait pas perdurer. Elle devrait être en état de soutenir une audition dans quatre à six semaines environ et sollicitait que l'audience soit reportée au mois de novembre 2022.
z. Par courrier du même jour, faisant suite à la duplique de l'AFC-GE du 13 septembre 2022, les époux ont maintenu leurs conclusions.
aa. L'AFC-GE s’est opposée au report de l’audition de B______.
bb. Les contribuables ont persisté dans leur demande d’audition de B______.
cc. Par jugement du 17 octobre 2022, le TAPI a partiellement admis le recours du 22 octobre 2021 et rejeté les recours des 8 octobre et 15 décembre 2021, annulé les bordereaux de rappel d’impôt ICC et IFD 2006 et renvoyé le dossier à l’administration fiscale cantonale pour nouveaux bordereaux de rappel d’impôt ICC et IFD 2007 et 2008 et ICC 2009 et nouveaux bordereaux d’amende 2007 et 2008, dans le sens des considérants.
Il n’était pas donné suite à la demande d’audition de l’intéressée, qui apparaissait abusive. L’audition d’K______ et de Z______ n’était pas de nature à apporter des éléments susceptibles d'influer sur l'issue du litige. Les contribuables avaient eu accès à toutes les pièces produites par l’AFC-GE devant le TAPI. Il n’y avait donc pas violation de leur droit d’être entendus. L’autorité fiscale n’avait eu aucune obligation d’entendre la contribuable oralement, étant relevé que, convoquée à plusieurs entretiens, l’intéressée ne s’était jamais présentée, choisissant de se faire représenter. Son grief était abusif.
Les contribuables avaient eu la possibilité de consulter l’entier du dossier transmis par l’AFC-GE au TAPI, ne précisaient pas quelles pièces en particulier auraient été obtenues de manière illicite, se limitant à soutenir, de manière générale, que l’annulation de la procédure pénale H______ impliquerait en soi l’inexploitabilité de toutes les pièces récoltées par l'AFC-GE. Or, pour permettre de déterminer l’exploitabilité de pièces obtenues prétendument de manière illicite, il incombait aux intéressés de les désigner spécifiquement. En outre, la totalité des pièces ayant servi aux reprises, dont principalement les relevés de comptes bancaires des quatre sociétés offshore, avaient été obtenues par les autorités suisses, à savoir le Ministère public genevois et l'AFC-GE elle-même, dans le cadre des procédures pénales et de contrôle qu’elles avaient elles-mêmes ouvertes. L'AFC-GE s’était fondée pour déterminer les montants à reprendre sur les pièces obtenues soit directement par B______, soit par le Ministère public genevois (notamment les pièces nos 49 à 56i), étant précisé que lorsqu’elle avait requis auprès de ce dernier la consultation du dossier pénal, l'AFC-GE avait expressément indiqué qu’elle n’était intéressée que par des pièces en lien avec la situation fiscale ou propres à la renseigner sur une éventuelle soustraction fiscale. Les procédures menées par ces autorités suisses, ainsi que celle d’entraide entre le Ministère public et l’autorité H______, n’étaient pas illégales. Comme l’avait retenu l’ARP dans son arrêt du 26 juillet 2022, la cause pénale comportait moult autres documents obtenus par les parties « avant/après/indépendamment de la procédure H______ », de sorte que rien ne s'opposait à ce qu'ils figurent (aussi) à la cause genevoise.
Les contribuables avaient eux-mêmes produit de nombreuses pièces du dossier pénal H______, dont notamment de la correspondance bancaire attestant de comptes détenus par B______, notamment sous le pseudonyme « AB______ », et du fait qu’elle était l’ayant droit économique d’autres sociétés que celles en cause ici, à savoir AC______, AD______, AE______, AF______, AG______, AH______, AI______, AJ______ et AK______, les procès-verbaux de ses auditions par la police judiciaire H______ des 25, 26 et 27 février 2015 (qu’elle avait signés), lors desquelles elle avait confirmé avoir « dû percevoir plusieurs dizaines de millions d’euros » de commissions de la part d’K______ et sa société T______, qu’elle avait investi celles-ci dans l’achat de cinq appartements (un à H______, deux à AL______ et deux à AM______), qu’elle avait créé des sociétés « destinées à recevoir [ces] commissions », soit AF______, C______, D______ et F______, qu’elle avait ouvert au noms de ces sociétés des comptes bancaires auprès des banques V______, S______, P______ et AO______ situées à H______, qu’elle avait créé un trust dénommé AP______ dont les bénéficiaires étaient ses enfants, dans lequel elle avait « injecté une partie des commissions reçues » et un très grand nombre de relevés et mouvements desdits comptes bancaires.
B______ avait elle-même confirmé au Ministère public avoir reçu environ EUR xxx et USD xxx à titre de commissions – soit des montants bien plus élevés que ceux que l'AFC-GE avait repris sur la base de documents concrets qu’elle n'avait pas pu obtenir auprès des contribuables – et qu’elle avait remis à l'AFC-GE, en vue de « discussions », un tableau indiquant les « revenus de commissions encaissés entre 2005 et 2008 », soit « USD xxx » et « EUR xxx ».
Les autorités suisses n’avaient pas participé à l'acte illicite imputé aux autorités H______ ni n’y avaient contribué. Même si les pièces et informations déterminantes pour établir les revenus et fortune non déclarés avaient été obtenues de manière illicite, elles seraient exploitables puisque l'AFC-GE aurait pu les obtenir de façon légale, à savoir auprès des contribuables eux-mêmes, en vertu de leur devoir de collaboration dans le cadre de la procédure de rappel d’impôt. Ainsi, l’annulation de la procédure H______ n’avait aucune incidence sur l’exploitabilité des preuves récoltées dans celle-ci.
L’ouverture des procédures de rappel d’impôt était justifiée tant en raison des informations relatées dans les médias qu’après l’ouverture de la procédure H______. De telles informations étaient propres à faire naître des soupçons de soustraction d'impôt. L’examen des documents bancaires récoltés légalement dans le cadre de la procédure de rappel d'impôt, auprès du Ministère public notamment, avait permis la découverte d'un certain nombre de faits nouveaux justifiant un rappel d'impôt, notamment l'existence des sociétés offshore et des commissions leur ayant été versées pour une activité déployée par B______. Les conditions du rappel d'impôt étaient réalisées, ce que les contribuables ne contestaient pas.
B______ était l’ayant droit économique et actionnaire unique des quatre sociétés offshore. L'AFC-GE avait effectué toutes les reprises sur la base des preuves matérielles, notamment bancaires, récoltées au cours de la procédure (pièces n° 49 à 56i), et n’avait pas procédé par estimation. Ces documents faisaient état des versements des commissions concernées. Les époux ne remettaient pas en cause les montants de ces commissions, mais le fait que celles-ci soient imposées auprès d’eux en application de la théorie de la transparence. Ils indiquent que B______ les avait fondées exclusivement aux fins de percevoir lesdites commissions. L’existence d’une comptabilité pour les exercices litigieux n’avait pas été alléguée. À cet égard, ils contestaient après coup le contenu du compte rendu d’entretien du 7 août 2018, à teneur duquel leurs conseils avaient affirmé que ces sociétés auraient « une comptabilité et des PV d'assemblées générales », ce qui contredisait l’affirmation de leur premier conseil selon laquelle ces sociétés n’avaient pas de comptabilité et qu’elles ne détenaient qu'un compte bancaire. Aucune pièce comptable, ni aucune facture que ces sociétés auraient établie pour leur propre activité d’intermédiaire et afin d’encaisser les commissions en cause n’était produite. Ils ne prétendaient pas non plus que ces sociétés disposaient de locaux et de personnel propres. B______ n’avait produit aucun contrat de travail, de représentation ou de mandant qu’elle aurait signé avec ces sociétés en vue d’exercer cette activité pour elles, étant précisé que durant les années en cause, elle avait exercé, à Genève, une activité salariée. Enfin, à teneur d’un document relatif à l’ouverture du compte bancaire de D______, elle souhaitait « ouvrir une structure afin de défiscaliser les économies provenant de son activité professionnelle ». Ces sociétés se limitaient donc à détenir des comptes bancaires étrangers pour la réception des commissions que B______ a réalisées pour elle-même. Dans ces conditions, invoquer la diversité des sujets constituait manifestement un abus de droit.
Les conditions de l’évasion fiscale étaient manifestement remplies. Le recours auxdites sociétés écrans offshore était manifestement insolite. L’on ne voyait pas en quoi un versement des commissions directement à B______ aurait mis en péril les « impératifs de confidentialité, de sécurité juridique, de discrétion et de flexibilité administrative », alors qu’il ne s’agissait que de rémunérations que les sociétés d’K______ versaient à la contribuable. Il n’y avait aucun lien direct entre elle et l’acquéreur final d’œuvres d’art. Si l’on pourrait comprendre les explications données à l’égard desdits « impératifs », il n’en demeurait pas moins que dans ses déclarations fiscales, l’intéressée n’avait pas mentionné l’existence de ses sociétés, ce qui démontrait plutôt sa volonté de ne pas porter à la connaissance de l’autorité intimée la réalisation de ces commissions, que ce soit dans son propre chef ou celui de ses sociétés. Il était paradoxal de soutenir, d’une part, que la création des sociétés visait essentiellement à créer un « voile de confidentialité » (ce qui constituait l’une des raisons d’être d’une société-écran) et, d’autre part, qu’il serait illégitime de considérer qu’il ne s’agissait précisément que d’un voile et de traiter ces sociétés en transparence.
En outre, l’allégation selon laquelle ces sociétés avaient été créées afin de « limiter [sa] responsabilité civile » ne convainquait pas : la création de sociétés en Suisse lui aurait donné le même résultat. Il en allait de même de son autre allégation, toute générale, selon laquelle elle l’aurait fait à des fins successorales, puisqu’en cas de sa succession, il serait question uniquement du partage de tous ses avoirs, entre ses héritiers, indépendamment de la forme sous laquelle elle les détenait, de sorte que l’on percevait mal en quoi la création de sociétés écrans offshore préserverait les intérêts successoraux de ses deux enfants. En toute hypothèse, il appartenait à la contribuable de déclarer tous les éléments de revenu et fortune liés aux sociétés lui appartenant, afin de permettre à l’autorité de déterminer si ces dernières devaient être taxées en transparence ou non. Enfin, B______ ne pouvait pas légitimement s'attendre à pouvoir se contenter de proposer, à titre de preuve, des témoignages des personnes qui avaient participé avec elle à la mise en place d’un système visant précisément à échapper à toute traçabilité des transactions en question. Compte tenu de tous ces éléments, l’on ne pouvait qu’en conclure que le procédé avait été choisi aux fins d'éluder l'impôt qui s’élevait, pour les années encore litigieuses à environ CHF xxx.
Les conditions d’une imposition en transparence étaient remplies, si bien que les commissions en cause devaient être imposées auprès des époux A______ B______, au titre de leurs propres revenus. Les reprises y relatives étaient donc confirmées.
Les contribuables n’avaient apporté aucun élément de preuve concret permettant de réduire les montants que l'AFC-GE entendait finalement réintégrer dans leur fortune imposable (CHF xxx en 2007 et CHF xxx en 2008 et 2009), étant précisé que ces sommes correspondaient à l’addition des reprises sur le revenu dont le bien-fondé était confirmé. Ils se limitaient à alléguer, à titre subsidiaire, l’existence de charges liées aux commissions encaissées, mais n’en fournissaient aucune preuve et ne les chiffraient pas. L’AFC-GE avait donc à bon droit considéré qu’en vertu des art. 1 et 4 aLIPP-III, il fallait tenir compte des reprises sur le revenu susmentionnées dans la fortune imposable au 31 décembre 2007, 2008 et 2009. Le grief tendant à ce que les amendes litigieuses soient également déduites de cette fortune était écarté, ces dernières n’étant pas entrées en force.
Les circonstances aggravantes imputables à B______ (infractions commises sur plusieurs périodes fiscales en lien avec des montants d’impôt très importants, totalisant près de CHF xxx pour les périodes 2007 et 2008) n’étaient contrebalancées par aucune circonstance atténuante, en particulier celle de la bonne collaboration. B______ n’avait pas produit les pièces pertinentes et s’était opposée à l’utilisation de toute pièce récoltée par l’autorité, démontrant une absence totale de prise de conscience et de volonté d’amendement. Elle niait désormais les éléments admis lors des entretiens des 30 mai 2016, 21 octobre 2016 et 7 août 2018, en insistant sur leur exclusion du dossier. Or, les éléments ressortant de ces pièces airaient pu être de nature à démontrer une bonne collaboration, ce qui n’était plus le cas. Le fait d'appliquer, comme elle le souhaitait, une quotité d'amende correspondant seulement aux trois quarts des impôts soustrait, alors qu'elle avait commis intentionnellement et de manière durable une grave soustraction fiscale, en l’absence de toute circonstance atténuante, reviendrait à la traiter de manière privilégiée par rapport aux contribuables qui ne commettaient qu'une faute moyenne ou légère.
Il devait certes également être tenu compte de l'ancienneté de l'infraction, qui remontait à plus de dix ans. Toutefois, au vu du caractère intentionnel de l'infraction, de la gravité de la faute et de l'importance des montants soustraits, il n'était pas insoutenable de considérer que ce seul élément était insuffisant pour contrebalancer ceux prévalant en défaveur de la contribuable. L'amende devait être fixée dans une fourchette pouvant aller jusqu'au triple de l'impôt soustrait dans les cas les plus graves. Le législateur avait accepté qu'un contribuable coupable d'une soustraction d'impôt doive verser à la collectivité publique une somme totale correspondant finalement à quatre fois le montant de l'impôt, ce même en cas de soustraction de montants importants, la loi ne prévoyant aucun traitement privilégié en pareilles circonstances. La quotité des amendes était proportionnée à l’intensité de la faute et aux circonstances, sans que l’on puisse lui reprocher un abus du pouvoir d’appréciation. Il n'y avait donc pas lieu de s'en écarter.
L'AFC-GE devait toutefois recalculer le montant des amendes pour l’ICC et l’IFD 2007 et 2008 en fonction des nouveaux bordereaux de rappel d’impôts qu'il lui appartiendrait d'établir pour ces deux périodes.
Les recours portant sur la consultation du dossier et sur l’année fiscale 2009 étaient rejetés. Le recours relatif aux années 2005 à 2008 était admis très partiellement, dans la mesure reconnue par l'AFC-GE et compte tenu de l’annulation des bordereaux de rappel d’impôt ICC et IFD 2006. En conséquence, le dossier était renvoyé à l'AFC-GE pour nouveaux bordereaux de rappel d’impôt ICC et IFD 2007 à 2009, en tenant compte des rectifications qu’elle avait admises dans le cadre de la présente procédure (2007 et 2008) et de celles devant être effectuées, en défaveur des contribuables, au niveau de la fortune pour les années 2007 à 2009, et pour nouveaux bordereaux d’amende 2007 et 2008, tenant compte de la réduction des rappels d’impôt y relatifs.
C. a. Par acte expédié le 23 novembre 2022 à la chambre administrative, B______ et A______ ont recouru contre ce jugement, dont ils ont demandé l’annulation. Ils ont conclu, principalement, à l’annulation des décisions relatives aux périodes fiscales 2006 à 2009 ainsi que celles relatives aux rappels d’impôts IFD et ICC 2007 et 2008, ICC 2009 et d’amende ICC et IFD 2007 et 2008 et à ce qu’il soit dit que les procédures de rappel d’impôts et de soustraction de 2005 à 2009 soient clôturées sans amende. Subsidiairement, il convenait d’annuler le jugement et de renvoyer la cause à l’AFC-GE afin qu’elle auditionne la recourante, K______ et Z______, qu’elle communique l’intégralité des pièces, notamment les 69 à 87, 89 et 90, 92 à 99, 128 et 129 ainsi que 132 à 138 et les pièces A, 56c, e et i produite par l’AFC-GE le 25 février 2022, que soient retranchées du dossier les pièces 69 à 138, les pièces A , 46 à 52, 53a et b, 54a et b, 55a et b, 56a à i produites par l’AFC-GE le 25 février 2022, les PV des 30 mai 2016, 21 octobre 2016 et 27 août 2018. Plus subsidiairement, le jugement étant annulé, la cause devait être renvoyée au TAPI pour qu’il procède aux mêmes actes d’instruction. Plus subsidiairement encore, ces actes d’instruction devaient être menés par la chambre administrative.
Ils ont repris, en grande partie, les arguments avancés devant le TAPI et ont décrit la procédure H______, qui s’était terminée par le constat de graves atteintes aux droits procéduraux de la recourante ayant conduit à l’annulation de tous les actes de procédure. Informée par la presse des procédures H______, l’AFC-GE avait consulté la procédure pénale d’entraide ouverte à Genève. L’étendue de cette consultation n’était pas documentée. Il était cependant manifeste que les pièces 88, 100 à 127 et 130 à 131 avaient été extraites de la procédure pénale. Ils avaient ainsi des soupçons que les pièces dont l’accès leur avait été refusé étaient « directement ou indirectement » issues de la procédure H______.
Les PV établis par l’AFC-GE avaient uniquement le caractère de notes internes ; ils n’établissaient en particulier pas les circonstances personnelles relatives aux faits ayant donné lieu à amende. Ils ont retracé l’histoire de la consultation de leur dossier auprès de l’AFC-GE par leurs différents conseils, détaillant comme devant le TAPI les pièces auxquelles ils n’avaient pas eu accès. Ils ont également retracé la procédure devant le TAPI et la DAPE.
Le TAPI avait commis un déni de justice en ne se prononçant pas sur la question de l’exploitabilité des PV des 30 mai 2016, 21 octobre 2016 et 7 août 2018. L’AFC‑GE avait à tort procédé par publication pour notifier l’ouverture de la procédure de rappel d’impôts. Le TAPI n’avait pas tenu compte que la Cour d’appel de H______ avait fait interdiction à quiconque de faire état des actes d’instruction dont la nullité avait été prononcée. Les pièces issues de cette procédure ne pouvaient donc être utilisées par l’AFC-GE. Les remarques « acerbes » du TAPI sur l’attitude dilatoire des recourants n’étaient pas fondées, le fisc portant seul la responsabilité de la durée de la procédure.
Ils avaient énuméré précisément les pièces inexploitables, sollicité l’accès aux pièces dont la communication leur avait été refusée. Ce n’était qu’après de multiples demandes qu’ils avaient obtenu l’accès à ces pièces, le 18 août 2022. Toutefois, certaines pièces n’étaient toujours pas accessibles ou excessivement caviardées. Le TAPI ayant commis de nombreuses inexactitudes dans l’établissement de l’état de fait, il convenait de lui renvoyer le dossier.
Le refus du TAPI d’auditionner la recourante violait son droit d’être entendue. Il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir assisté aux entretiens avec l’AFC-GE, qui ne lui avait pas demandé de se présenter personnellement, contrairement à ce qu’elle aurait dû faire. Le refus d’auditionner les deux témoins cités violait leur droit d’être entendus. K______ était aguerri au marché de l’art, contrairement à la recourante. Expert, acteur direct dans ce domaine et ayant procédé aux versements litigieux, ce témoin était à même d’exposer en quoi la préservation de l’anonymat dans le marché de l’art était capital. Le témoin Z______ pourrait corroborer le fait que c’était pour préserver l’anonymat de tous les intervenants que des sociétés offshore avaient été utilisées.
Ils n’avaient eu qu’un accès limité aux pièces du dossier. Les résumés succincts des pièces qu’ils n’avaient pas pu consulter étaient insuffisants. Ce n’était qu’avec sa décision incidente que l’AFC-GE avait communiqué les pièces manquantes identifiées par les recourants, mais persisté à ne pas en produire certaines, tout en indiquant que les pièces déterminantes étaient désormais toutes produites. La nouvelle numérotation des pièces adoptée par l’AFC-GE avait compliqué la comparaison entre celles figurant précédemment au dossier, mais n’étant pas accessibles, et celles finalement produites. Ils supputaient que les pièces soustraites concernaient K______, également visé par la procédure d’entraide, notamment des extraits bancaires relatifs à des virements effectués en faveur de la recourante. Le caviardage de ces pièces ne paraissait pas excessivement complexe, de sorte qu’il était aisé de donner à la recourante accès à celles-ci. Ils requéraient que l’intégralité des pièces, non caviardées ou à tout le moins avec un caviardage « sélectif » leur permettant de connaître l’origine des pièces, leur soit remise.
Les PV d’entretien établis par l’AFC-GE étaient dépourvus de force probante. L’ensemble des pièces issues de la procédure pénale H______ était inexploitable. Cela concernait également celles issues de la procédure d’entraide. Il en allait notamment des pièces 53a et b, 54 a et b, 55a et b et 56a à i de l’AFC-GE, dont la cote « D-[chiffre] » était caractéristique de la numérotation des pièces de la procédure H______. Il était rappelé que l’annulation de celle-ci avait concerné chaque acte de procédure y relatif. Or, la procédure suisse était fondée essentiellement sur les pièces issues de la procédure annulée, de sorte que leur utilisation était contraire aux art. 6 CEDH et 141 CPP.
Les conditions du « Durchgriff » n’étaient pas réalisées. L’utilisation de sociétés offshore dans le domaine de la vente d’œuvres d’art n’étant pas insolite, pour des raisons de confidentialité, de responsabilité personnelle. Il n’y avait pas d’intention abusive. Même si l’on ne pouvait exclure que la recourante avait profité de la mise en place de la structure de sociétés pour économiser des impôts, l’impératif de confidentialité en avait été le critère décisif. Il n’y avait donc pas d’éléments d’une évasion fiscale.
Si celle-ci était retenue, aucune amende ne pouvait être prononcée. En outre, la recourante n’avait pas été impliquée dans les questions d’ordre technique, juridique ou financières des transactions ; elle ne décidait même pas des montants de ses commissions. Elle n’était donc pas « rompue aux affaires ». Elle avait collaboré et n’avait pas d’antécédents.
Enfin, le TAPI avait à tort considéré que les recourants avaient succombé « dans une large mesure ». Or, l’AFC-GE avait admis qu’elle avait omis de déduire des bordereaux de rappel les dettes de rappel d’impôt de la fortune et les intérêts de rappels d’impôt du revenu et de la fortune des années concernées. Le TAPI aurait ainsi dû mettre, même partiellement, les frais de procédure à la charge de l’AFC‑GE et allouer aux recourants une indemnité de procédure, même minime.
b. L’AFC-GE a conclu au rejet du recours. Subsidiairement, si le dossier devait être renvoyé au TAPI pour procéder à l’audition de la recourante, les procédures fiscales devaient être disjointes.
Compte tenu du fait que les recourants répétaient les arguments avancés devant le TAPI, elle renvoyait expressément à ses écritures précédentes.
Elle relevait qu’en application du nouveau droit, la poursuite pénale concernant l’année fiscale 2007 n’était pas prescrite. La violation du droit d’être entendu était contestée, les recourants ayant pu à de nombreuses reprises exprimer leur point de vue, tant en procédure non contentieuse que contentieuse. L’audition sollicitée de deux témoins devait être écartée par appréciation anticipée des preuves.
Les recourants avaient eu accès à toutes les pièces. Celles dont un intérêt privé empêchait la communication avaient été résumées, de manière à ce que les recourants aient connaissance de l’essentiel de leur contenu. Il n’y avait qu’une seule pièce couverte par le secret fiscal, la pièce A, décrite de manière détaillée dans sa réponse devant le TAPI.
L’AFC-GE avait produit les PV d’entretien, conformément à son obligation. Bien que ceux-ci n’aient pas la même valeur probante qu’un PV d’audience, les conseils des recourants, rompus au droit fiscal, ne pouvaient ignorer que des PV seraient établis et qu’en cas de désaccord, ils pouvaient les contester, ce qui avait d’ailleurs été le cas à réception du PV du 7 août 2018. De toute manière, ces PV n’avaient pas été déterminants pour la fixation des reprises et amendes.
Les pièces obtenues lors de la consultation du dossier pénal l’avaient été en toute légalité. Elles étaient donc exploitables.
Tant l’application de la théorie de la transparence que les reprises étaient justifiées.
Les amendes étaient fondées tant en leur principe qu’en leur quotité.
c. Dans le délai de réplique, prolongé au motif d’un changement de mandataire – soit d’un conseil ayant été précédemment déjà constitué –, les recourants ont signalé que la DAPE avait clôturé l’enquête spéciale le 24 janvier 2023, rendant un non‑lieu concernant la recourante. Le renvoi de l’AFC-GE à ses écritures précédentes n’était pas admissible. La motivation de sa réponse était ainsi insuffisante.
Les prétentions relatives à l’année fiscale 2007 étaient prescrites. Ils sont revenus sur des arguments déjà développés. Le TAPI leur avait refusé l’accès au jugement JTAPI/4______/2022, auquel l’AFC-GE s’était référé, au motif qu’il n’était pas entré en force. Les premiers juges avaient toutefois repris à l’identique la subsomption développée dans ledit jugement concernant K______, alors que, contrairement à ce dernier, les recourants avaient identifié les pièces non exploitables. Le TAPI avait aussi retenu à tort qu’ils ne s’étaient pas déterminés dans la duplique de l’AFC-GE. Ils insistaient sur le fait que la recourante aurait dû être entendue oralement lors de la procédure non contentieuse ; elle devait l’être à tout le moins par une autorité judiciaire.
Ils ont repris et développé les arguments relatifs à l’audition des témoins, l’accès aux pièces et l’utilisation des pièces issues de la procédure pénale.
Le recours à l’évasion fiscale pour justifier le « Durchgriff » entrait en contradiction avec le principe de la légalité. Il ne pouvait ainsi être appliqué que dans des cas « extrêmes et particulièrement choquants » dans lesquels l’existence d’une personne morale était artificielle et uniquement destinée à éluder l’impôt. Pour les motifs déjà exposés, le recours aux sociétés offshore avait été dicté par des impératifs liés au marché de l’art et n’avait nullement été justifié par l’intention d’éluder l’impôt.
Le principe et la quotité de l’amende demeuraient contestés, étant précisé qu’en l’absence de l’audition de la recourante, les éléments subjectifs à apprécier n’avaient pas été recueillis.
d. L’AFC-GE a produit le rapport complet de la DAPE du 24 janvier 2023.
e. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.
f. Par courrier du 12 mai 2023, le conseil des recourants a informé la chambre administrative de ce que la recourante et sa famille venaient d’être frappés d’un terrible drame provoqué par les procédures. La recourante était dévastée. Le drame vécu récemment rendait d’autant plus indispensable de l’entendre. Bien que fragilisée, elle se tenait à disposition pour être auditionnée.
g. a. Lors de l’audience, qui s’est tenue le 12 juin 2023 devant la chambre administrative, la recourante a déclaré que son fils s'était suicidé deux mois auparavant. Cette tragédie était liée à ce qui s'était passé récemment. Elle regrettait tout ce qui s'était passé. Elle était broyée par les procédures depuis huit ans. Ses enfants, très proches d’elle, avaient vécu tout cela. Son fils, qui était ______, était très sensible. Elle n’avait pas réussi à protéger ses enfants de l'AQ______.
La procédure fiscale à Berne était violente ; elle ne comprenait pas ce qui lui était reproché. C'était violent, tout était dans la presse. Son fils avait été choqué. Avant de partir, il lui avait demandé comment elle tenait le coup. Selon lui, « le AQ______» allait toujours gagner. Alors qu’elle était entendue en garde à vue à H______, le chef de la police avait reçu un cadeau « du AQ______» et avait en réponse assuré celui-ci de sa fidélité. Son fils trouvait choquant d'utiliser les pièces obtenues dans ce contexte‑là. Tout cela l'avait beaucoup affectée.
La seule chose qu’elle regrettait était de ne pas avoir été en règle avec les impôts. Elle avait demandé à ses avocats de régulariser la situation. Elle venait d'un pays communiste, ne connaissait rien en finance, en administration et n'avait pas de culture dans ce domaine. L'histoire avec « le AQ______» n'était que du mensonge. En revanche, elle regrettait sincèrement de ne pas avoir été en règle avec les impôts. Toute cette histoire avait rendu toute la famille malade ; elle-même avait été en dépression et l’était toujours.
Elle était abrutie par le chagrin. L'« histoire » avait commencé en 2014. Elle avait tenu le coup car elle savait qu’elle n'avait rien fait. Quand elle avait été arrêtée à H______ pendant trois jours, les premières 24 heures, ses enfants n'ayant plus de ses nouvelles, l’avaient crue morte. Quand la corruption avait été révélée, il y avait eu une récompense morale. Toutefois, lorsque la presse avait révélé la procédure fiscale à Berne et que la procédure pénale à Genève avait été rouverte, les deux utilisant des pièces H______, les choses avaient basculé. Elle était suivie depuis 2019 par un psychiatre. À cette époque, son fils s'était également écroulé ; il était aussi suivi par un psychiatre.
Elle savait qu'ignorer les choses n'excusait rien. Quand K______ avait vendu la première œuvre à L______, il lui avait dit qu'il y aurait une commission pour elle. N'étant pas rompue aux affaires, elle n'y avait pas cru. Lorsqu'il avait voulu verser la commission, il lui avait dit qu'il fallait qu’elle ait une société à qui verser la commission. Il lui avait dit que cela se faisait pour des motifs de confidentialité, pour des questions de responsabilités personnelles au cas où il y aurait un problème avec l'œuvre d'art et que c'était l'usage. C'étaient les conditions auxquelles la commission lui serait versée. Il l’avait mise en relation avec une société à AR______qui avait créé la première société offshore. Cela remontait à près de 20 ans et elle ne se souvenait plus bien des détails. K______ pourrait mieux les expliquer.
Quand celui-ci lui avait parlé des sociétés, elle avait demandé à un avocat si c'était normal de percevoir des commissions, ce que celui-ci lui avait confirmé. C'était aussi l'avis du comptable du cabinet de son mari. Il lui avait confirmé qu'il était usuel dans le monde de l'art d’utiliser des sociétés étrangères. Il lui avait dit que les sociétés étrangères n'étaient pas soumises à la taxation en Suisse.
Quand la famille avait voulu déménager à H______ en 2008, on lui avait recommandé les services de AA______ et de Z______. C'est eux qui avaient conseillé de créer plus de sociétés, pour diversifier et parce que ce serait plus simple en cas de succession, étant précisé qu’elle avait des enfants de deux pères différents. Elle avait alors beaucoup parlé avec ses comptables et financiers. Finalement, la famille s’était rendue en AS______car sa mère qui y vivait était malade. Ils s’étaient établis à H______ en 2010. K______ lui avait conseillé de créer une société pour chaque commission perçue, cela pour des raisons de responsabilités. Elle n’avait toutefois pas suivi son conseil.
Z______ avait géré l'administration et la comptabilité de ces sociétés et s’était occupé de l'ouverture des comptes. Il le faisait là où il avait des contacts. Elle n’avait pas créé ces sociétés pour échapper au fisc suisse. Elle n'avait pas les signatures sur les comptes bancaires.
g.b À la fin de l’audience, le conseil des recourants a sollicité un délai pour formuler des observations sur les déclarations de sa cliente.
g.c Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger, y compris sur la question des actes d’instruction complémentaires sollicités.
h. Le 13 juin 2023, les recourants ont demandé la composition de la chambre administrative qui allait statuer sur leur recours.
i. La juge déléguée a répondu que, contrairement au Code de procédure pénale, la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) ne prévoyait pas de communiquer la composition qui allait siéger. Il n’était donc pas fait suite à la demande.
j. Dans des observations spontanées du 16 juin 2023, les recourants ont rappelé les éléments pertinents pour la fixation de l’amende en matière fiscale, insistant sur la détresse profonde dans laquelle se trouvait la contribuable. Harcelée par les procédures judiciaires menées par l’AQ______et les procédures fiscales, vilipendée par la presse, elle avait non seulement perdu ses amis, mais surtout son fils, qui ne soutenait plus l’opprobre jeté sur elle.
Ils persistaient à requérir l’audition des témoins K______ et Z______, aptes à apporter des éléments pertinents pour apprécier l’application de la théorie du « Durchgriff » et la culpabilité de la recourante.
k. La chambre de céans a accusé réception de ce courrier et rappelé que la cause était gardée à juger, y compris sur la question des actes d’instruction complémentaires sollicités.
l. Par nouvelle écriture spontanée du 19 juin 2023, les recourants ont informé la chambre administrative qu’une instruction pénale relative aux vices graves de procédure qui avaient conduit à la nullité de la procédure pénale H______ dirigée contre la recourante était en cours. Les conseils de celle-ci avaient déposé une plainte à H______ pour « recel de corruption passive, recel de trafic d’influence passif et recel de prise illégale d’intérêts en rapport avec l’utilisation dans des procédures civiles et pénales à l’étranger des pièces interdites issues de la procédure CAB/3______/04 ». Ils réitéraient que les pièces issues de cette procédure pénale étaient inexploitables.
m. Sur ce, la chambre administrative a informé les parties que la cause était gardée à juger, y compris sur la question des actes d’instruction complémentaires sollicités.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).
2. Le litige porte sur la conformité au droit du jugement du TAPI concernant la consultation du dossier fiscal et les bordereaux de rappels d’impôts ICC et IFD 2007 et 2008 et ICC 2009 ainsi que les amendes 2007 et 2008.
2.1 De jurisprudence constante, les questions de droit matériel sont résolues en fonction du droit en vigueur lors des périodes fiscales litigieuses (arrêt du Tribunal fédéral 2C_60/2020 du 27 avril 2021 consid. 3.1 ; ATA/1399/2021 du 21 décembre 2021 consid. 3a). Le rappel d'impôt relevant du droit matériel, le droit applicable obéit aux mêmes règles (ATF 140 I 68).
2.2 S'agissant de l'ICC, le 1er janvier 2010 est entrée en vigueur la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), dont l'art. 69 a abrogé les cinq anciennes lois sur l'imposition des personnes physiques (aLIPP-I à aLIPP-V du 22 septembre 2000). L'art. 72 al. 1 LIPP prévoit que cette loi s'applique pour la première fois pour les impôts de la période fiscale 2010. Pour les périodes fiscales antérieures, les dispositions des anciennes lois s'appliquent même après l'entrée en vigueur de la loi. Il s'ensuit que la présente cause est régie, pour l’ICC, par les dispositions de l'ancien droit (aLIPP-I à V) ainsi que par la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID – RS 642.14), dans sa teneur en vigueur durant les exercices litigieux.
La taxation de l'IFD et la poursuite des infractions pénales fiscales y relatives sont soumises aux dispositions de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11) et de sa législation d'application.
3. Les recourants concluent à l’irrecevabilité de la réponse de l’AFC-GE déposée devant la chambre de céans, au motif que celle-ci serait insuffisamment motivée.
Cette conclusion est manifestement infondée. D’une part, quand bien même l’autorité intimée s’est référée dans sa réponse à ses écritures de première instance, elle a pris plus spécifiquement position sur les griefs soulevés devant la chambre administrative. D’autre part, l’obligation de motiver se rapporte aux décisions que rend l’autorité administrative et non à ses écritures de réponse dans le cadre d’un recours.
Le chef de conclusions est donc rejeté.
4. Se pose la question de la prescription et de la péremption.
4.1 L'art. 152 al. 1 LIFD prévoit que le droit d'introduire une procédure de rappel d'impôt s'éteint dix ans après la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'a pas été effectuée, alors qu'elle aurait dû l'être, ou pour laquelle la taxation entrée en force était incomplète. Le droit de procéder au rappel d'impôt s'éteint quinze ans après la fin de la période fiscale à laquelle il se rapporte (art. 152 al. 3 LIFD ; ATF 140 I 68 consid. 6.1). Les art. 61 al. 1 et 3 loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17) et 53 al. 2 et 3 LHID posent les mêmes principes. La problématique peut donc être examinée conjointement pour l'IFD et l’ICC.
4.2 En l'occurrence, un avis d'ouverture de la procédure de rappel et soustraction d'impôt a été notifié aux recourants pour I’IFD et les ICC 2005 à 2009, par voie de publication dans la FAO le 8 décembre 2015. Le délai de péremption de dix ans des art. 152 al. 1 LIFD, 61 al. 1 LPFisc et 53 al. 2 LHID a ainsi été respecté. Le délai de péremption du droit de procéder au rappel d'impôt pour les années 2005 et 2006 est échu, ce que l’AFC-GE, puis le TAPI ont constaté à juste titre (art. 152 al. 3 LIFD, 61 al. 3 LPFisc et 53 al. 3 LHID). Pour le rappel d’impôt 2007, la péremption est survenue à la fin de la période fiscale 2022, de sorte que le droit de procéder au rappel d'impôt pour cette période est périmé au jour de la notification du présent arrêt. Le rappel d’impôt ne peut plus porter que sur les années fiscales 2008 et 2009. À noter que même si, comme le soutiennent les recourants, l’AFC-GE avait à tort notifié l’ouverture de la procédure de rappel d’impôts par voie de publication, il n’en demeure pas moins que ceux-ci ont, au plus tard, été informés par le courrier recommandé adressé à leur représentant le 2 mai 2016 de l’ouverture de la procédure en rappel et soustraction d’impôt 2005 à 2009, de sorte que le droit de procéder au rappel d'impôt pour les périodes encore litigieuses a de toute manière été respecté.
4.3 Avant le 1er janvier 2017, la poursuite pénale de la soustraction consommée se prescrivait dans tous les cas par quinze ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'avait pas été effectuée ou l'avait été de façon incomplète, ce délai ne pouvant être prolongé (art. 184 al. 1 let. b aLIFD cum art. 333 al. 6 let. b du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0, en relation avec l'ATF 134 IV 328 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_444/2018 du 31 mai 2019 consid. 4 relatif aux années 2006 à 2008). La prescription était en outre interrompue par tout acte de procédure tendant à la poursuite du contribuable (art. 184 al. 2 aLIFD). Depuis le 1er janvier 2017, la poursuite pénale se prescrit, en cas de soustraction d'impôt consommée, au plus tôt, par dix ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'a pas été effectuée ou l'a été de façon incomplète (art. 184 al. 1 let. b ch. 1 LIFD). Selon l'art. 184 al. 2 LIFD actuellement en vigueur, la prescription ne court plus si une décision a été rendue par l'autorité cantonale compétente (art. 182 al. 1 LIFD) avant l'échéance du délai de prescription.
L'art. 58 al. 1, 2 let. a et 3 LHID, en vigueur depuis le 1er janvier 2017, a un contenu identique à celui de l'art. 184 LIFD ; il est directement applicable si les cantons n'ont pas adapté leur législation au 1er janvier 2017 (art. 72s LHID). Tel est le cas à Genève. En vertu des art. 205f LIFD et 78f LHID, le nouveau droit est applicable au jugement des infractions commises au cours des périodes fiscales précédant le 1er janvier 2017 s'il est plus favorable que le droit en vigueur au cours de ces périodes fiscales (arrêts du Tribunal fédéral 2C_333/2017 du 12 avril 2018 consid. 8.2; 2C_12/2017 du 23 mars 2018 consid. 4.3, non publié in ATF 144 IV 136). Dans la mesure où il empêche la prescription de courir, en particulier durant la procédure devant le Tribunal fédéral, le nouveau droit se révèle être en principe moins favorable aux contribuables que l'ancien droit. Il est en revanche plus favorable si aucune décision n'a été rendue dans les dix ans à compter de la fin de la période fiscale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_333/2017 du 12 avril 2018 consid. 8.2).
4.4 En l'occurrence, l’autorité intimée a notifié le bordereau d’amende d'amende 2007 le 15 décembre 2017 et celui relatif à l’année fiscale 2008 le 7 décembre 2018, soit avant la fin du délai de dix ans après l’année fiscale en cause. Cela étant, selon l’ancien droit, l’action pénale était frappée d’une prescription absolue après quinze ans. Dès lors que le nouveau droit prévoit que la prescription ne court plus si une décision a été rendue par l'autorité cantonale compétente avant l'échéance du délai de prescription, il est moins favorable aux recourants. L’AFC-GE avait, d’ailleurs, dans sa détermination du 25 février 2022 au TAPI, examiné le cours de la prescription de la même manière. Partant, il convient de retenir qu’au regard du principe de la lex mitior, l’action pénale relative à l’année fiscale 2007 est prescrite. Il y aura donc lieu d’annuler les bordereaux d’amendes relatifs à l’année fiscale 2007.
En application du nouveau droit, la poursuite pénale de la soustraction d'impôt consommée reprochée aux recourants au cours de la période fiscale 2008 n'est pas prescrite, dès lors que l'AFC-GE a rendu une décision y relative le 7 décembre 2018, soit moins de dix ans avant la fin de la période fiscale en cause. Il en va de même en application de l'ancien droit, le délai de quinze ans ne s'étant pas écoulé depuis la fin de la période fiscale 2008.
5. Les recourants ont sollicité, lors de l’audience du 12 juin 2023, à pouvoir formuler des remarques écrites à la suite de leur audition.
Ayant spontanément produit une telle détermination, recevable, dans les jours qui ont suivi l’audience, la requête n’a plus d’objet.
6. La recourante se plaint de la violation de son droit d’être entendue du fait que ni l’AFC-GE, ni le TAPI ne l’avait entendue oralement.
6.1 Comme l’a correctement exposé le TAPI, l'art. 6 CEDH ne trouve pas application dans les procédures fiscales qui n'ont pas un caractère pénal. Les procédures en rappel d'impôt n'y sont donc pas soumises. En revanche, la procédure réprimant la soustraction fiscale est une procédure à caractère pénal à laquelle l'art. 6 CEDH est applicable. En ce domaine, le contribuable peut en principe se prévaloir d'un droit à être entendu oralement. Cette audition n'est cependant pas automatique, il faut que le contribuable en fasse la demande. En outre, le fait que le contribuable ait pu s'expliquer par oral devant les autorités administratives n'est pas déterminant, car le droit à être entendu oralement et en personne découlant de l'art. 6 par. 1 CEDH ne se rapporte qu'à la procédure judiciaire (ATF 140 I 68 consid. 9.2 et les réf.). À cet égard, il suffit, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (CourEDH), que les parties ait eu la possibilité de s’exprimer devant un tribunal indépendant au moins une fois au cours de la procédure (ATF 124 I 322 consid. 4a; 121 I 30 consid. 5d-f ; arrêt du Tribunal fédéral 8D_5/2022 du 22 février 2023 consid. 4.2.2).
La réparation d'un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d'être entendu, n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure (ATF 138 I 97 consid. 4.16.1 ; ATF 137 I 195 consid. 2.3.2). Elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 126 I 68 consid. 2) ; elle peut cependant se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 ; 136 V 117 consid. 4.2.2.2).
6.2 En l’espèce, il ressort de ce qui précède que, contrairement à ce qu’elle soutient, la recourante n’avait pas de droit à son audition orale par l’AFC-GE durant la procédure non contentieuse. Par ailleurs, son droit d’être entendue a été largement respecté par l’autorité intimée durant cette phase, comme cela ressort des réunions qui se sont tenues entre les parties, lors desquelles les recourants, singulièrement la contribuable, ont pu exprimer leur point de vue par le truchement de leurs mandataires, ainsi que des nombreux courriers adressés à l’AFC-GE.
La recourante a eu l’occasion de s’exprimer oralement devant la chambre administrative, qui dispose du même pouvoir d’examen que le TAPI. Ainsi, à supposer qu’il faille admettre une violation de son droit d’être entendue par les premiers juges, celle-ci aurait été réparée par la chambre de céans. Il n’y a pas lieu de renvoyer la cause au TAPI afin qu’il procède à l’audition de la recourante, dès lors qu’un tel renvoi constituerait, in casu, une vaine formalité. En effet, l’intéressée a eu l’occasion de s’expliquer largement dans ses écritures et pu, lors de son audition, comme elle le souhaitait, apporter les éléments, notamment subjectifs, liés à l’appréciation de sa faute. Enfin, en tant que la CourEDH exige que l’audition par l’instance judiciaire ait lieu au moins une fois durant la procédure judiciaire, l’audition à laquelle la chambre de céans a procédé satisfait cette exigence.
Le grief sera ainsi rejeté.
7. Les recourants sollicitent l’audition d’K______ et de Z______.
7.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas la juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1. ; 140 I 285 consid. 6.3.1).
7.2 En l’espèce, les auditions sollicitées visent, selon les recourants, à démontrer la nécessité de recourir, pour la perception de commissions liées à la vente d’œuvres d’art, à des sociétés offshore, le fait que K______, qu’ils qualifient d’expert, avait dit à la recourante que c’était la seule manière de les percevoir, que cette manière de faire lui avait été conseillée par Z______ et que les commissions perçues ne devaient pas être imputées à la recourante. Ces auditions devaient aussi permettre d’exclure l’application du « Durchgriff ».
Or, les recourants se sont largement expliqués sur ces points et ont produit les pièces qu’ils estimaient pertinentes. Par ailleurs, comme cela sera exposé ci-après (consid. 12), les éléments figurant au dossier, notamment les explications et allégations de la recourante elle-même, permettent de trancher le litige sans procéder aux auditions sollicitées. Pour le surplus, la question de savoir si les conseils donnés à la recourante par ces deux personnes étaient judicieux ou non ne fait pas l’objet de la présente procédure.
Il ne sera donc pas donné suite à la demande d’auditionner ces deux témoins.
8. Dans un autre grief de nature formelle, les recourants se plaignent de ne pas avoir eu un accès complet au dossier, sollicitant l’accès complet aux pièces 56c, 69 à 87, 89 et 90, 128, 129 et 132 à 138, subsidiairement à les retrancher du dossier, comme les pièces 88, 100 à 127 et 130 à 131.
8.1 Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu'une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_157/2018 du 28 mai 2018 consid. 3.1 et les références citées).
8.2 Les parties et leurs mandataires sont admis à consulter au siège de l'autorité les pièces du dossier destinées à servir de fondement à la décision (art. 44 al. 1 LPA). L'autorité peut interdire la consultation du dossier ou d'une partie de celui-ci si l'intérêt public ou des intérêts privés prépondérants l'exigent, le refus d'autoriser la consultation des pièces ne pouvant s'étendre toutefois qu'aux pièces qu'il y a lieu de garder secrètes (art. 45 al. 1 et 2 LPA). Une pièce dont la consultation est refusée à une partie ne peut être utilisée à son désavantage que si l’autorité lui en a communiqué par écrit le contenu essentiel se rapportant à l’affaire et lui a donné en outre l’occasion de s’exprimer et de proposer les contre-preuves (art. 45 al. 3 LPA).
8.3 En matière d'ICC, c'est l’art. 17 LPFisc, qui fixe les règles fiscales en matière de consultation des dossiers fiscaux est applicable par renvoi de l'art. 86 LPFisc qui reprend les principes décrits ci-dessus. Il prévoit ainsi que le contribuable peut prendre connaissance des autres pièces du dossier une fois les faits établis et à condition que la sauvegarde d'intérêts publics ou privés ne s'y oppose pas. En matière d'IFD, les principes sont identiques (art. 114 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_133/2020 du 15 juillet 2020 consid. 3.1).
Ainsi, le droit de consulter les pièces peut être supprimé ou limité dans la mesure où l'intérêt public ou l'intérêt prépondérant de tiers, voire du requérant lui-même exigent que tout ou partie des documents soient tenus secrets (François BELLANGER, Les principes constitutionnels et de procédure applicables en droit fiscal, in Les procédures en droit fiscal, 3ème éd., 2015, p. 61 et ss, p. 110).
Lorsque le département refuse au contribuable le droit de consulter une pièce du dossier, il ne peut se baser sur ce document pour trancher au détriment du contribuable que s'il lui a donné connaissance, oralement ou par écrit, du contenu essentiel de la pièce ou qu'il lui a au surplus permis de s'exprimer et d'apporter ses propres moyens de preuve (arrêt du Tribunal fédéral 2P.186/2006 du 27 novembre 2006 consid. 4).
8.4 En l’espèce, il convient, en premier lieu, de constater que les pièces nos 69 à 87, 89, 90, 92 à 99, 128, 129 et 132 à 138, dont la consultation aurait été refusée aux recourants, n’ont pas été communiquées ni au TAPI ni à la chambre administrative. La seule pièce non consultable par les recourants produite par l’AFC-GE devant la chambre de céans, est la pièce A.
Le contenu de celle-ci n’ayant pas été communiqué aux recourants, le TAPI l’a à juste titre écartée du dossier. La chambre de céans en fera de même.
L’ensemble des autres pièces soumises à la chambre de céans a pu être consulté par les recourants, étant précisé que leurs conseils sont venus les consulter au greffe de la chambre administrative. Les pièces 49 à 52 AFC-GE (relatives à la qualité d’ayant droit économique de la recourante des sociétés offshore D______, C______, F______ et E______) et les pièces 53a à 56i (soit des relevés de comptes bancaires desdites sociétés faisant état des versements des commissions litigieuses), produites par l’AFC-GE devant le TAPI et la chambre administrative, comportent les éléments, non caviardés, sur lesquels reposent les décisions litigieuses. Contrairement à ce que soutiennent les recourants, la lecture conjointe de ces pièces permet de comprendre les flux financiers, de sorte qu’il n’est pas besoin de disposer des éléments qui ont été caviardés. À titre d’exemple, s’agissant de la pièce 56c de l’AFC-GE, sa lecture conjointe avec son annexe, permet de comprendre que la somme de EUR xxx en faveur de E______ représente la commission versée à la société détenue par la recourante en lien avec la vente d’une œuvre d’art.
En tant que les recourants réclament que soient écartées du dossier les pièces 11 p. l, 19 p. l, 20 p. 3, 22 p. l, 23, 24, 27 et 38 que l'AFC-GE a produites avec sa réponse devant le TAPI, tout en reconnaissant que ces pièces consistent en des courriers et courriels échangés entre leurs représentants et l'AFC-GE, ils ne sauraient soutenir ne pas avoir eu connaissance de leur contenu. Il n’y a donc pas lieu d’écarter ces pièces du dossier.
La chambre administrative, comme avant elle le TAPI, n’examinera le bien-fondé des décisions querellées qu’en se fondant sur les pièces produites par les parties, toutes consultables par les recourants, sous réserve de la pièce A, qui sera écartée du dossier.
Le grief sera donc également rejeté.
9. Dans un autre grief de nature formelle, les recourants font valoir que les PV d’entretien établis par l’AFC-GE ne peuvent être utilisés, dès lors qu’ils ont été établis de manière unilatérale par l’AFC-GE.
Il n’est pas contesté que lesdits PV ont été établis par les collaborateurs de l’AFC‑GE ayant assisté aux différents entretiens sur la base de leurs notes personnelles et n’ont pas été dictés, en présence des conseils de la recourante, ni signés par ceux-ci. Cela étant, il ressort du dossier qu’ils ont tous été transmis auxdits conseils, qui ont eu le loisir de faire des observations. Les avocats de la recourante, rompus au traitement des dossiers fiscaux complexes, connaissaient cette pratique et ont d’ailleurs réagi rapidement à réception des PV lorsque ceux-ci ne leur semblaient pas refléter les propos échangés. À titre d’exemple, le mandataire de la recourante a, par courriel du 22 août 2018, réagi à réception du PV de la réunion qui lui avait été adressé le 9 août 2018 – qu’il a qualifié de « compte rendu très clair » – et sollicité deux modifications.
Par ailleurs, si ces comptes rendus n’ont pas la même valeur probante qu’un procès‑verbal d’audience établi par les juridictions, n’étant pas dictés en présence des parties ni signés par elles, rien ne s’oppose à en tenir compte à titre d’éléments de preuve, qu’il appartient à l’autorité judiciaire d’apprécier, en tenant, notamment, compte du fait qu’ils n’ont pas été établis de manière contradictoire.
Il n’y a donc pas lieu de les écarter de la procédure.
10. Les recourants reprochent au TAPI, au titre d’un mauvais établissement des faits, de s’être référé à son jugement JTAPI/4______/2022 du 31 août 2022 rendu dans le dossier d’K______, jugement qui n’était alors pas disponible sur son site et dont il ne leur avait pas transmis copie avant de rendre le jugement querellé, malgré leur demande allant dans ce sens. Ils avaient cependant constaté que le TAPI avait repris mot pour mot le raisonnement développé dans le jugement précité.
Ce grief revient à reprocher aux premiers juges une violation de leur droit d’être entendus. Or, comme les recourants l’indiquent, ils sont manifestement en possession du jugement en question, dès lors qu’ils affirment avoir pu constater que le raisonnement relatif à l’exploitabilité des preuves était le même dans celui-ci et celui qu’ils contestent. Ainsi, à supposer qu’une violation du droit d’être entendu doive être retenue, celle-ci serait désormais réparée, dès lors que les recourants ont eu connaissance dudit jugement et pu se déterminer à cet égard dans leurs écritures devant la chambre de céans, qui dispose du même pouvoir d’examen que le TAPI.
11. Les recourants se plaignent du fait que, malgré l’interdiction d’utiliser les actes issus de la procédure H______, ceux-ci avaient été pris en considération dans la présente procédure. Ils listent les pièces issues de la procédure pénale H______ – détectables par la cote « D-[chiffre] » utilisée dans celle-ci – qui devraient, pour ce motif, être écartées.
11.1 Comme l’a rappelé le TAPI, les autorités fiscales fédérales, cantonales et communales sont habilitées à communiquer entre elles toutes les informations utiles à l’accomplissement de leur tâche et s’autorisent réciproquement à consulter leurs dossiers (art. 13 al. 1 LPFisc ; art. 111 al. 1 LIFD). Elles peuvent aussi spontanément se signaler les cas qui pourraient avoir fait l’objet d’une imposition incomplète (art. 112 al. 1 LIFD).
Les autorités de taxation peuvent, dans le cadre de l’instruction, ordonner des expertises, procéder à des inspections et examiner sur place les comptes et les pièces justificatives (art. 123 et 130 al. 1 LIFD ; 26 al. 2 LPFisc). Elles établissent la taxation sur la base de la déclaration d’impôt et des justificatifs déposés par le contribuable et des contrôles et investigations effectués (art. 36 al. 1 LPFisc).
11.2 Selon l'art. 101 al. 2 du Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP - RS 312.0), d'autres autorités peuvent consulter le dossier (pénal) lorsqu'elles en ont besoin pour traiter une procédure civile, pénale ou administrative pendante et si aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose. Il s'agit notamment de déterminer si l'intérêt public à ce que le procès se déroule avec célérité et dans la sérénité l'emporte sur les autres intérêts. Tel est en principe le cas d'une autorité fiscale qui dispose d'éléments concrets susceptibles de fonder le soupçon d'une situation contraire au droit (ATF 124 II 58 consid. 3 et 4).
L'autorité fiscale a le droit de consulter les documents bancaires qui ont été légalement exigés ou saisis dans le cadre d'une procédure pénale (ATF 124 II 58 consid. 3). L'art. 47 de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne du 8 novembre 1934 (Loi sur les banques - LB - RS 952.0LB), qui protège pénalement le secret bancaire, réserve expressément, à son al. 4, les dispositions fédérales et cantonales sur l’obligation de témoigner et de fournir des renseignements. C’est pourquoi le secret bancaire ne s'applique pas aux procédures pénales, sauf si le droit procédural applicable prévoit le contraire. Les autorités fiscales peuvent donc consulter les documents bancaires qui ont été obtenus dans le cadre d'une procédure pénale (ATF 134 II 318 consid. 6.1 ; 124 II 58 consid. 3e).
Elles peuvent utiliser les informations recueillies au cours de la consultation d'un dossier pénal également contre des tiers qui ne sont pas directement impliqués dans la procédure et dont la situation fiscale ne nécessitait initialement aucune investigation (ATF 134 II 318 consid. 6.1 ; 124 II 58 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.28/1997 du 20 novembre 1998, publié in StE 1999 B 92.13 n. 5, consid. 2a). La consultation des documents bancaires est toujours admissible s'ils ont été obtenus légalement dans le cadre de la procédure en question (ATF 124 II 58 consid. 3b ; arrêt du Tribunal du 20 novembre 1998 in RF 1999, p. 347, consid. 2c).
La jurisprudence pose toutefois des limites au droit de consultation de l'autorité fiscale. En particulier, il est exclu que celle-ci puisse demander l'accès à la documentation d'une procédure afin de conduire une recherche indéterminée, sans avoir un motif de supposer que la loi n'ait pas été appliquée correctement. L'obligation de collaboration ne permet pas au fisc de consulter sans distinction et sans objectif concret tous les documents en mains d'une autre autorité (ATF 134 II 318 consid. 6.1 = RDAF 2009 II 130).
11.3 La question de savoir quels sont les moyens de preuve admis en procédure administrative est régie, devant les autorités cantonales, par le droit cantonal, sous réserve de dispositions de droit fédéral (ATF 139 II 7 consid. 5). En procédure administrative genevoise, l'art. 10A LPA, applicable par renvoi de l’art. 2 al. 2 LPFisc, dispose que « [t]oute personne peut porter à la connaissance des autorités des faits susceptibles d'entraîner l'ouverture d'une procédure administrative. Toutefois, l'autorité ne donne aucune suite aux dénonciations anonymes ». Sous cet angle, un rapport de police transmis anonymement à une autorité est considéré comme étant obtenu de manière illicite (arrêt du Tribunal fédéral 2C_260/2020 du 20 octobre 2020 consid. 5.2). Le sort des preuves obtenues illégalement n'est toutefois pas réglé par la LPA.
La jurisprudence reconnaît qu'une interdiction de principe d'utiliser des preuves acquises illicitement peut être déduite du droit à un procès équitable au sens des art. 29 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH (ATF 143 II 443 consid. 6.3 ; 139 II 95 consid. 3.1 ; 139 II 7 consid. 6.4.1). L'exclusion de tels moyens n'est toutefois pas absolue, le juge devant opérer une pesée des intérêts en présence, à savoir, d'une part, l'intérêt public à la manifestation de la vérité et, d'autre part, l'intérêt de la personne concernée à ce que le moyen de preuve ne soit pas exploité (ATF 143 II 443 consid. 6.3 ; 139 II 95 consid. 3.1 ; 131 I 272 consid. 4). Dans ce cadre sont notamment déterminantes la gravité de l'acte répréhensible et la question de savoir si le moyen de preuve est en soi admissible et aurait pu être obtenu de façon légale (ATF 137 I 218 consid. 2.3.4 ; 131 I 272 consid. 4.1.2 et les références citées). Le juge peut s'inspirer au besoin des règles posées en matière pénale, à savoir les art. 3 et 139 ss CPP (ATA/240/2017 du 28 février 2017 consid. 6).
11.4 L'invalidité de la preuve initiale ne déploie pas d'effets sur les preuves subséquentes, sauf si elle en constitue un élément indispensable. Cette solution tient de manière adéquate compte des intérêts en jeu, soit d'une part du souci de ne pas priver l'interdiction légale de toute portée, sans toutefois rendre impossible la recherche de la vérité (ATF 133 IV 329 consid. 4.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_641/2009 du 18 février 2010 consid. 1.1.2). Les éventuelles violations relatives à l'administration des preuves qu'un État étranger commettrait dans le cadre d'une procédure ouverte sur son territoire n'entraînent pas automatiquement l'inexploitabilité desdites preuves dans le contexte d'une procédure ouverte dans un autre État. Pour que la procédure conduite par les autorités suisses s'en trouve affectée, il faudrait encore que l'on puisse reprocher à celles-ci d'avoir participé ou contribué au prétendu acte illicite ou à tout le moins d'avoir adopté un comportement contraire à la bonne foi (ATF 133 I 234 consid. 2.6 ; 139 IV 137 consid. 5.2.4).
11.5 En l’espèce, lors de la consultation de la procédure pénale genevoise, l’AFC‑GE avait précisé au Ministère public genevois que la consultation ne portait que sur les pièces propres à la renseigner sur « la mise en pratique des lois fiscales » et une éventuelle soustraction fiscale. Deux procédures étaient ouvertes auprès du Ministère public, l’une relative à la demande d’entraide pénale H______ et l’autre, nationale, avait été ouverte à la suite de divers signalements LBA par des intermédiaires financiers, via le MROS. À cet égard, il est relevé que rien ne permet de retenir que les procédures menées par les autorités suisses, y compris celle faisant suite à la demande d’entraide de l’autorité H______, seraient entachées d’un vice qui justifierait que les pièces issues de celles-ci soient écartées de la procédure. Aucun élément n’indique non plus que les autorités suisses auraient, dans le cadre de la demande d’entraide, donné des assurances quant à l’utilisation ou l’absence d’utilisation des documents remis par les autorités H______ ou ceux recueillis dans la procédure d’entraide.
Par ailleurs, les pièces pertinentes pour l’examen de la situation fiscale de la recourante, à savoir les relevés bancaires et la documentation relatives aux sociétés offshore dont celle-ci était ayant droit économique, soit notamment les pièces 49 à 56 de l’AFC-GE, qu’elles soient issues de la procédure suisse d’entraide ou de la procédure pénale nationale, constituent des éléments que la recourante aurait dû spontanément communiquer aux autorités fiscales. Elle ne peut donc se plaindre de l’apport de pièces à la procédure qu’il lui appartenait de produire dans le cadre de sa taxation ordinaire, qui aurait dû être complète, exacte et conforme à la vérité (art. 124 al. 2 LIFD ; art. 26 al. LPFisc).
En revanche, il convient, avec les recourants, de constater que les PV d’audition de la recourante dans la procédure pénale H______ doivent être écartés du dossier. Cette procédure a été invalidée et les éléments contenus dans celle-ci ne peuvent être utilisés. Cela étant, comme cela sera exposé ci-après, le fait que ces PV, à savoir les pièces 46 à 48 AFC-GE, soient écartés du dossier n’influe pas sur l’issue du litige.
12. Les recourants contestent le « Durchgriff » opéré par le TAPI. Le recours aux sociétés offshore n’était pas insolite, mais propre au marché de l’art. Faute d’une organisation ayant recours à des sociétés offshore, qui garantissait la confidentialité des différents acteurs, les partenaires d’affaires de la recourante n’auraient pas consenti à s’adjoindre ses services. Il n’y avait aucune intention abusive de sa part justifiant le « Durchgriff » ou de retenir une évasion fiscale. Ainsi, seuls d’éventuels dividendes perçus des sociétés offshore et la valeur des actions de celles-ci pourraient être repris dans le chapitre fiscal de la recourante.
12.1 Selon la jurisprudence (ATF 131 II 627 consid. 5.2 ; 109 Ib 110 consid. 3 ; 103 Ia 20 consid. 4), le principe de transparence (« Durchgriffstheorie »), fondé sur la réalité économique, permet de considérer que la forme juridique des relations d'où provient le revenu imposable n'est pas nécessairement décisive du point de vue fiscal. Sous certaines conditions, l'autorité peut s'en tenir à la réalité économique et admettre en particulier l'existence d'un seul contribuable en présence de plusieurs entités juridiquement distinctes (arrêt du Tribunal fédéral 2C_742/2008 du 11 février 2009 consid. 5.5). Le Tribunal fédéral n'admet ce mode de faire que si la forme juridique à laquelle a recouru le contribuable est insolite, inadéquate ou anormale, qu'elle n'a été choisie qu'aux fins d'éluder l'impôt et qu'elle conduirait effectivement à une économie d'impôt. En d'autres termes, il faut que l'on se trouve en présence d'un cas d'évasion fiscale (ATF 102 Ib 151 consid. 3a ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_724/2010 du 27 juillet 2011 consid. 7.4 ; 2P.92/2005 du 30 janvier 2006 consid. 7.2).
12.2 Selon la théorie de la transparence, qui s'applique à toutes les formes de personnes morales (arrêt du Tribunal fédéral 5A_587/2007 du 28 février 2008 consid. 2.3), on ne peut pas s'en tenir sans réserve à l'existence formelle de deux personnes juridiquement distinctes lorsque tout l'actif ou la quasi-totalité de l'actif d'une société appartient soit directement, soit par personnes interposées, à une même personne, physique ou morale ; malgré la dualité de personnes à la forme, il n'existe pas d’entités indépendantes, la société étant un simple instrument dans la main de son auteur, qui, économiquement, ne fait qu'un avec elle. On doit dès lors admettre, à certains égards, que, conformément à la réalité économique, il y a identité de personnes et que les rapports de droit liant l'une lient également l'autre; ce sera le cas chaque fois que le fait d'invoquer la diversité des sujets constitue un abus de droit ou a pour effet une atteinte manifeste à des intérêts légitimes (art. 2 al. 2 CC ; ATF 132 III 489 consid. 3.2, 737 consid. 2.3 ; 121 III 319 consid. 5 a/aa).
12.3 Les sociétés offshore sont définies comme des sociétés d'investissement passives qui possèdent uniquement un siège statutaire, ne disposent d'aucune infrastructure ni de personnel propre, n'exercent aucune activité à proprement parler, se limitent à se présenter en tant que détentrice d'un compte pour la réception d'argent ou en tant que propriétaire de fortune (par ex. un portefeuille de titres) et se voient fournir des prestations de services qui ne consistent, en règle générale, qu'en la gestion des valeurs patrimoniales qui sont en leur propriété. Il y a « Durchgriff » ou transparence de la société de domicile étrangère, en ce sens que les ayants droit économiques de la société, et non celle-ci, déterminent le sort fiscal des prestations. Il n'y a toutefois pas « Durchgriff » si les sociétés de domicile étrangères auxquelles les prestations litigieuses ont été fournies sont des entreprises actives (arrêt du Tribunal administratif fédéral A-3552/2009 du 12 septembre 2011 consid. 3.6.1, 3.6.2, 6.2 et les réf.).
12.4 En matière fiscale, l'autorité fiscale doit établir les faits qui justifient l'assujettissement et qui augmentent la taxation, tandis que le contribuable doit prouver les faits qui diminuent la dette ou la suppriment. Si les preuves recueillies par l'autorité fiscale apportent suffisamment d'indices révélant l'existence d'éléments imposables, il appartient au contribuable d'établir l'exactitude de ses allégations et de supporter le fardeau de la preuve du fait qui justifie son exonération (ATF 146 II 6 consid. 4.2 et les références; 144 II 427 consid. 8.3.1; 140 II 248 consid. 3.5; 133 II 153 consid. 4.3). Si les preuves recueillies par l'autorité fiscale fournissent suffisamment d'indices révélant l'existence d'un revenu non déclaré, il appartient alors au contribuable d'établir l'exactitude de ses allégations contraires (ATF 138 II 57 consid. 7.1 ; 133 II 153 consid. 4.3). Ce dernier devra justifier l'origine des montants non déclarés et devra fournir des renseignements supplémentaires sur les rapports contractuels mis à jour par l'autorité fiscale et sur les prestations qui en découlent (ATF 133 II 153 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_89/2014 du 26 novembre 2014 consid. 7.2).
Le devoir de collaboration du contribuable (art. 124 LIFD et 31 LPFisc) est particulièrement qualifié dans les relations internationales, notamment en présence de prestations réalisées depuis la Suisse vers un pays étranger sans convention de double imposition ou dont la clause d'échange de renseignements ne correspond pas aux standards actuels de l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en matière d'échange de renseignements, et en particulier lorsque ce pays favorise la création de domiciles fictifs (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1073/2018 et 2C_1089/2018 précités consid. 11.4 ; 2C_16/2015 du 6 août 2015 consid. 2.5.2).
12.5 En l’espèce, la recourante ne conteste pas être l’ayant droit économique des sociétés offshore D______, C______, F______ et E______ Son mandataire a reconnu, lors de l’entretien du 30 avril 2016 avec l’AFC-GE, que des commissions représentant « xxx » avaient été perçues par elle sur les comptes de ses sociétés offshore, qui ne tenaient pas de comptabilité et ne détenaient qu’un compte bancaire. Ces éléments ressortent également de l’entretien entre son mandataire et l’autorité intimée du 21 octobre 2016. Lors de l’entretien du 7 août 2018, les représentants de la recourante ont, notamment, apporté des précisions sur le rôle joué par celle-ci lors des acquisitions et vente des tableaux, relevant qu’elle n’était en aucune manière intervenue, mais avait perçu des commissions unilatéralement fixées par K______. Ainsi, aucune des sociétés de la recourante n’a déployé une quelconque activité autre que celle de recevoir les commissions perçues par la recourante. Cette dernière n’était d’ailleurs pas liée par un quelconque contrat de travail ou de mandat avec ces sociétés. Celles-ci n’avaient aucune activité propre, ni d’ailleurs de personnel.
Il ressort par ailleurs des documents d’ouverture de comptes relatifs à D______ que la recourante souhaitait « ouvrir une structure afin de défiscaliser les économies provenant de son activité professionnelle ». À cet égard, il était fait référence à la vente d’œuvres d’art organisée avec K______ du 22 au 29 mai 2006 à AT______, dont l’évaluation portait sur plus d’xxx d’Euros. Les fonds attendus étaient les commissions générées en dehors de Suisse. Deux fois par an, la recourante entendait retirer « entre xxx et xxx EUR pour ses besoins personnels ».
Lors de son audition par la chambre de céans, la recourante a expliqué qu’après qu’K______ eut vendu la première œuvre à L______, il lui avait dit qu'il y aurait une commission pour elle. Il lui avait dit qu'il fallait qu’elle ait une société à qui verser la commission ; cela se faisait pour des motifs de confidentialité, pour des questions de responsabilité personnelle au cas où il y aurait un problème avec l'œuvre d'art et que c'était l'usage dans le domaine du marché de l’art. Un avocat lui avait confirmé qu’il était normal de percevoir des commissions sur la vente d’œuvres d’art, et le comptable du cabinet de son mari lui avait confirmé qu'il était usuel dans le monde de l'art d’utiliser des sociétés étrangères pour ce faire. Ces explications confirment que le recours aux sociétés offshore avait pour seul but d’éviter de verser les commissions directement à la recourante, de manière à éviter toute traçabilité.
L’affirmation selon laquelle la constitution de ces sociétés répondait à la nécessité imposée par K______ de les constituer, car il s’agissait du réceptacle usuel dans le commerce des œuvres d’art des produits de la vente de celles-ci, tout comme l’allégation selon laquelle le choix de recourir à des sociétés offshore avait été dicté par des considérations successorales, entrent en contradiction avec les explications figurant sur les documents d’ouverture de comptes relatifs à D______, exposant qu’il s’agissait de « défiscaliser » les fonds en question. Or, ces indications sont bien antérieures à la présente procédure, de sorte qu’un poids prépondérant peut leur être attribué. En outre, elles émanent de la recourante elle-même. Ainsi, quand bien même K______ et Z______ viendraient confirmer qu’il était usuel dans le commerce des œuvres d’art de recourir à des sociétés offshore pour les transactions y relatives, il ne pourrait être retenu que le choix de la contribuable de recourir à ce type de sociétés pour percevoir ses commissions n’était pas, en premier lieu, dicté par la volonté de les cacher au fisc suisse. Quoi qu’il en soit, il n’en demeure pas moins que la recourante était la seule ayant droit économique des sociétés offshore, que les commissions lui étaient destinées, que lesdites sociétés n’avaient pas d’activité propre ni de personnel, ne fournissant aucun service ni aucune prestation et qu’elles lui ont permis des économies d’impôts substantielles.
Dans ces conditions, les sociétés offshore détenues par la recourante étaient un simple instrument dans ses mains et ne faisaient, économiquement, qu'un avec elle. Économiquement, il y avait donc identité entre cette dernière et ses sociétés. Le fait d’invoquer, sur le plan fiscal, la dualité des sujets constitue ainsi un abus de droit manifeste au sens de l’art. 2 al. 2 CC. Cette disposition prévoit expressément de ne pas protéger le recours abusif à un droit. Par conséquent et contrairement à ce que soutiennent les recourants, la théorie de la transparence se fonde sur une base légale et répond ainsi au principe de la légalité. La dualité des sujets étant invoquée de manière abusive, c’est à juste titre que l’AFC-GE a imputé, dans le chapitre fiscal de la recourante, les montants que celle-ci a perçus sur ses sociétés offshore.
Pour le surplus et comme l’a relevé le TAPI, les conditions de l’évasion fiscale sont remplies. Les impératifs de confidentialité et de responsabilité personnelle invoqués pour justifier le recours à des sociétés-écran pourraient éventuellement entrer en considération dans les transactions entre les vendeurs et acheteurs d’œuvres d’art. Toutefois, la recourante n’était pas partie à ces transactions, ayant d’ailleurs toujours soutenu qu’elle ne connaissait pas le montant de celles-ci. L’on ne voit ainsi pas en quoi sa responsabilité personnelle en lien avec les transactions aurait pu être engagée. Comme l’a relevé le TAPI, une telle protection ne nécessitait pas le recours à des sociétés offshore. En outre, le prétendu besoin de discrétion quant aux commissions perçues – même s’il était confirmé par K______ – aurait également pu être atteint par la création de sociétés de droit suisse. Il convient bien plutôt de constater que le paiement des commissions perçues par la recourante sur les comptes de ses sociétés offshore visait, en particulier, à soustraire au fisc suisse les revenus acquis par la recourante lors des transactions conclues entre K______ et son client ______. Il est à cet égard rappelé que selon les documents d’ouverture de compte de D______ SA, la contribuable « souhaitait ouvrir une structure afin de défiscaliser » les revenus issus de la vente d’œuvres d’art. La recourante n’a d’ailleurs pas déclaré l’existence de ses sociétés offshore dans ses déclarations fiscale 2005 à 2009. Le recours à ces structures avait donc pour but d'éluder l'impôt, étant précisé que l’économie d'impôt escomptée s’est élevée à xxx de francs.
Au vu de ce qui précède, les reprises opérées dans l’AFC-GE sont donc fondées. Les montants des reprises, y compris les rectifications apportées par l’AFC-GE devant le TAPI, ne sont pas contestés et il n’y a pas lieu d’y revenir. Ils ressortent, au demeurant, des pièces 56 produites par l’AFC-GE, et aucun élément ne justifie de s’écarter du tableau établi par celle-ci, mentionné ci-dessus (p. 26s), fondé sur ces pièces bancaires attestant des versements en faveur des sociétés offshore de la recourante.
13. Reste à examiner le principe et la quotité des amendes prononcées.
13.1 Le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu'une taxation ne soit pas effectuée alors qu'elle devrait l'être, ou qu'une taxation entrée en force soit incomplète, est puni d'une amende (art. 175 al. 1 LIFD ; art. 56 al. 1 LHID ; art. 69 al. 1 LPFisc).
Pour qu'une soustraction fiscale soit réalisée, trois éléments doivent dès lors être réunis : la soustraction d'un montant d'impôt, la violation d'une obligation légale incombant au contribuable et la faute de ce dernier. Les deux premières conditions sont des éléments constitutifs objectifs de la soustraction fiscale, tandis que la faute en est un élément constitutif subjectif (arrêts du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 9.1 et 11 ; 2C_874/2018 précité consid. 10.1 ; ATA/859/2018 du 21 août 2018 consid. 13b et la référence).
13.2 La violation d'une obligation légale peut résulter d'une irrégularité dans la comptabilité ou du fait de remplir sa déclaration fiscale de manière non conforme à la vérité et non complète, en violation de l'art. 124 al. 2 LIFD (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1018/2015 précité consid. 9.4.2 et les références citées).
13.3 La soustraction est punissable aussi bien intentionnellement que par négligence. La notion de négligence des art. 175 LIFD et 56 LHID est identique à celle de l'art. 12 CP : commet un crime ou un délit par négligence quiconque, par une imprévoyance coupable, agit sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. L'imprévoyance est coupable quand l'auteur n'a pas usé des précautions commandées par les circonstances et sa situation personnelle, par quoi l'on entend sa formation, ses capacités intellectuelles et son expérience professionnelle. Si le contribuable a des doutes sur ses droits ou obligations, il doit faire en sorte de lever ce doute ou, au moins, en informer l'autorité fiscale (ATF 135 II 86 consid. 4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_874/2018 précité consid. 10.1.3 ; 2C_129/2018 précité consid. 9.1 et les références ; ATA/407/2022 du 12 avril 2022 consid. 6 a).
La preuve d'un comportement intentionnel de la part du contribuable doit ainsi être considérée comme apportée lorsqu'il est établi avec une sécurité suffisante que celui-ci était conscient du caractère erroné ou incomplet des indications fournies. Si cette conscience est établie, il faut présumer qu'il a voulu tromper les autorités fiscales, afin d'obtenir une taxation plus favorable (arrêts du Tribunal fédéral 2C_792/2021 du 14 mars 2022 consid. 6.4.1 ; 2C_1052/2019 du 18 mai 2020 consid. 3.7.1 ; 2C_184/2019 du 25 septembre 2019 consid. 3.2 et 2C_444/2018 du 31 mai 2019 consid. 10.4.1). Cette présomption ne se laisse pas facilement renverser, car l'on peine à imaginer quel autre motif pourrait conduire un contribuable à fournir au fisc des informations qu'il sait incorrectes ou incomplètes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1066/2018 du 21 juin 2019 consid. 4.1 ; 2C_129/2018 précité consid. 9.1). Le dol éventuel suffit pour retenir l'intention (arrêts du Tribunal fédéral 2C_78/2019 du 20 septembre 2019 consid. 6.2 ; 2C_444/2018 précité consid. 9.2) : il suppose que l'auteur envisage le résultat dommageable, mais agit néanmoins, parce qu'il s'en accommode au cas où il se produirait (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1073/2018 précité consid. 17.3.1 et les arrêts cités ; ATA/407/2022 précité consid. 6b). En revanche, agit par négligence celui qui, par une imprévoyance coupable, ne se rend pas compte ou ne tient pas compte des conséquences de son acte. L'imprévoyance est coupable lorsque l'auteur n'a pas usé des précautions commandées par les circonstances et sa situation personnelle, ce par quoi l'on entend sa formation, ses capacités intellectuelles et son expérience professionnelle (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1052/2019 précité consid. 3.7.1 ; 2C_1066/2018 précité consid. 4.1 ; 2C_1018/2015 précité consid. 9.4.4).
13.4 En cas de soustraction consommée, l’amende est, en règle générale, fixée au montant de l’impôt soustrait. Si la faute est légère, l’amende peut être réduite jusqu’au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD ; art. 56 al. 1 LHID ; art. 69 al. 2 LPFisc). Le montant de l’impôt soustrait constitue donc le premier critère de fixation de l’amende, la faute intervenant seulement, mais de manière limitée, comme facteur de réduction ou d’augmentation de sa quotité (ATA/407/2022du 12 avril 2022 consid. 6c).
La quotité précise de l’amende doit par ailleurs être fixée en tenant compte des dispositions de la partie générale du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), les principes de l’art. 47 CP régissant la fixation de la peine s’appliquant. En droit pénal fiscal, les éléments principaux à prendre en considération sont le montant de l’impôt éludé, la manière de procéder, les motivations ainsi que les circonstances personnelles et économiques de l’auteur. Les circonstances atténuantes de l’art. 48 CP sont aussi applicables par analogie (ATF 144 IV 136 consid. 7.2.1). Il en va ainsi du temps écoulé depuis l’infraction (art. 48 let. e CP ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_78/2019 du 20 septembre 2019 consid. 9.4 ; 2C_14/2021 précité consid. 7) ou encore des problèmes de santé du conjoint de l’auteur qui considérait que sa détention était la cause du décès de celui‑ci (arrêt du Tribunal fédéral 6B_107/2012 du 25 avril 2012 consid. 4.2).
13.5 Dans la mesure où elles respectent le cadre légal, les autorités fiscales cantonales, qui doivent faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi, disposent d’un large pouvoir d’appréciation lors de la fixation de l’amende, l’autorité de recours ne censurant que l’abus du pouvoir d’appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_12/2017 du 23 mars 2018 consid. 7.2.1 ; ATA/1002/2020 du 6 octobre 2020 consid. 9b et les références citées).
13.6 En l’espèce, l’autorité fiscale a appris par la presse, dont elle a produit les articles, que la recourante avait perçu des commissions importantes en lien avec la vente d’œuvres d’art par K______ à L______. Elle était donc fondée, sur cette base, à ouvrir une procédure en rappel d’impôts.
13.7 Contrairement à ce que soutient la recourante, il n’y a pas de contradiction à examiner, dans le cadre du « Durchgriff », si les conditions de l’évasion fiscale sont remplies et de s’intéresser aux éléments constitutifs d’une soustraction fiscale pour déterminer le principe et la quotité de l’amende pouvant être prononcée pour soustraction fiscale. En effet, les critères de l’évasion fiscale permettent ou viennent renforcer la nécessité d’appliquer la théorie de la transparence à des sociétés, notamment offshore, dont la contribuable est ayant droit économique, alors que les amendes visent à réprimer la soustraction fiscale, parce qu’elle a fautivement omis de déclarer les revenus en cause. Comme l’a retenu le TAPI, c’est en raison d’une évasion fiscale que les revenus des sociétés offshore ont été attribués à la recourante, alors que les amendes trouvent leur fondement dans le fait qu’elle ne les a délibérément pas déclarés.
La recourante a reconnu, notamment lors de l’entretien de son représentant du 30 mai 2016 avec l’AFC-GE, avoir perçu des commissions sur la vente des œuvres d’art par K______ à L______ et que ces commissions, représentant plusieurs millions d’euros, ne figuraient pas dans ses déclarations fiscales. Lors de l’entretien du 21 octobre 2016, le mandataire a articulé une proposition de quotité d’amende de 0.5. Si, certes, comme l’ont relevé les recourants, ces comptes rendus ne sont pas signés par leur mandataire, rien ne permet de mettre en doute leur contenu en ce qui concerne les éléments précités. En effet, ces comptes rendus ont été adressés au mandataire des recourants, qui avaient le loisir d’en demander la modification s’ils estimaient qu’ils ne reflétaient pas le contenu des propos échangés. À réception du compte rendu de l’entretien du 7 août 2018, l’un des conseils des recourants a d’ailleurs apporté à celui-ci une modification par courriel du 22 août 2018. En outre, lors de l’entretien du 21 octobre 2016, le mandataire des contribuables, qui avait proposé que l’amende soit fixée à 0.5 l’impôt soustrait, a produit une « situation générale en vue de discussion », dont il ressort que les quatre sociétés offshore de la recourante ont perçu des « revenus de commissions encaissées entre 2005 et 2008 » de US$ xxx et Euro xxx.
Il découle de ce qui précède que la recourante a violé son obligation légale de déclarer les commissions perçues dans le cadre des transactions portant sur des œuvres d’art et que, ce faisant, des impôts ont été soustraits au fisc. Les conditions objectives d’une soustraction fiscale sont donc remplies.
La condition subjective l’est également. Bien que la recourante s’en défende, elle ne peut prétendre avoir ignoré son obligation de devoir déclarer les revenus réalisés au travers des commissions perçues lors des ventes d’œuvres d’art effectuées. Elle avait d’ailleurs, avant les périodes fiscales litigieuses, déclaré ses revenus. Comme déjà exposé, il y a, au contraire, lieu de retenir que la création des sociétés offshore avait, notamment, pour but de soustraire les revenus réalisés au fisc suisse. L’AFC‑GE était ainsi fondée à retenir l’intention à cet égard. Le principe du prononcé d’amendes doit donc être confirmé.
13.8 En ce qui concerne la quotité de celles-ci, il y a lieu de tenir compte, comme facteurs aggravants, de la répétition de la soustraction sur plusieurs années ainsi que de l’importance des montants en jeu (plus de 18 millions pour l’année 2008). La collaboration de la recourante a, en début de la procédure de rappel d’impôts, été plutôt bonne, celle-ci ayant fourni des documents et des explications relatifs à la structure de sociétés offshore mise en place, reconnu que celles-ci n’avaient pas d’activité, ni de comptabilité et ne faisaient que détenir un compte bancaire. Elle a également donné des indications sur les montants soustraits et fait part, par le truchement de son mandataire, de sa volonté de régler sa situation fiscale. Par la suite, ses mandataires – dont les actes lui sont imputables – ont adopté une attitude moins collaborante, revenant au contraire sur certains points auparavant admis. Contrairement à ce que soutient la recourante, si, certes, il ne peut être considéré qu’elle était rompue aux affaires, notamment dans le domaine de la vente d’œuvres d’art, elle ne peut être suivie lorsqu’elle soutient avoir ignoré que la perception de ses commissions réalisées en lien avec le vente d’œuvres d’art sur le compte de sociétés offshore permettait de les soustraire au fisc, sauf à les mentionner dans ses déclarations fiscales, ce qu’elle a cependant omis de faire. Au contraire, sa volonté de « défiscaliser » ces sommes ressort notamment des documents d’ouverture de comptes de D______
Il y a toutefois également lieu de tenir compte de l’écoulement du temps depuis les faits reprochés, de l’absence d’antécédents et de la situation personnelle de la recourante. Il ressort, en effet, du dossier que la procédure pénale initiée à son encontre à l’étranger a été affectée de vices procéduraux particulièrement graves. Cette procédure ne se rapportait, certes, pas aux soustractions fiscales. Elle a toutefois été fortement médiatisée – ce qui a d’ailleurs conduit à l’ouverture de la présente procédure de rappel d’impôt – comme l’ont ensuite été les procédures pénale et fiscale nationales. Ni la recourante ni son mari n’étant des personnages publics, des chefs d’entreprise ou des personnalités habituées à une exposition médiatique, celle-ci les a lourdement affectés, en particulier la recourante, dont l’état dépressif depuis plusieurs années est attesté par les certificats médicaux produits. Il est, en sus, ressorti de son audition qu’elle considérait ne pas avoir su protéger ses enfants, singulièrement son fils, particulièrement sensible, des difficultés qu’elle-même traversait.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, il se justifie de réduire la quotité de l’amende à une fois les montants soustraits.
Le recours sera ainsi très partiellement admis. Le jugement du TAPI ainsi que les bordereaux ICC et IFD 2008 seront donc annulés, uniquement en ce qui concerne l’année fiscale 2007 (prescrite) et la quotité des amendes pour l’année fiscale 2008, qui sera réduite à une fois les montants soustraits.
14. Vu l’issue du litige, un émolument, réduit, de CHF 16'000.- couvrant les deux instances cantonales, sera mis à la charge solidaire des recourants, et une indemnité de procédure, réduite, de CHF xxx, valant également pour les deux instances, leur sera allouée (art. 87 al. 2 et 3 LPA). Il est précisé que, contrairement à ce que souhaitent les recourants, l’autorité intimée ne peut se voir imposer des émoluments, dès lors qu’elle a défendu ses propres décisions (art. 87 al. 1 2ème phrase LPA).
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 23 novembre 2022 par B______ et A______contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 octobre 2022 ;
au fond :
l’admet partiellement ;
annule le jugement précité ainsi que les bordereaux d’amende ICC et IFD 2008 uniquement en ce qui concerne la quotité de l’amende et les frais de la procédure de première instance ;
renvoie la cause à l’administration fiscale cantonale pour nouveaux bordereaux d’amende ICC et IFD 2008, dans le sens des considérants ;
annule les bordereaux de rappel d’impôt et d’amende ICC et IFD 2007 ;
confirme le jugement susmentionné pour le surplus ;
met un émolument de CHF 16'000.- couvrant les deux instances cantonales à la charge solidaire de B______ et A______ ;
alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- valant pour les deux instances cantonales à B______ et A______, solidairement entre eux, à la charge de l’État de Genève (administration fiscale cantonale) ;
dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la demanderesse, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;
communique le présent arrêt à Me Pierre-Alain GUILLAUME, avocat des recourants, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.
Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Fabienne MICHON RIEBEN, juges.
Au nom de la chambre administrative :
le greffier-juriste :
M. MAZZA |
| la présidente siégeant :
F. KRAUSKOPF |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
Genève, le
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| la greffière : |