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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/109/2018

ATA/83/2018 du 30.01.2018 ( PROC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/109/2018-PROC ATA/83/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 janvier 2018

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Samir Djaziri, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

et

COUR DE JUSTICE – CHAMBRE ADMINISTRATIVE

 



EN FAIT

1) Par acte du 6 juin 2017, Madame A______ a formé un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) du 2 mai 2017 (JTAPI/440/2017), dans la cause A/990/2017 qui l’opposait à l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM).

2) Par décision du juge délégué du 14 novembre 2017 (ATA/1493/2017), la chambre administrative a déclaré irrecevable le recours qu’elle avait interjeté contre le jugement précité du TAPI, et dit qu'il n’était pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure.

Par lettre datée du 7 juin 2017, envoyée sous pli simple, la chambre de céans avait invité la recourante à s'acquitter d'une avance de frais d'un montant de CHF 400.- dans un délai échéant le 7 juillet 2017, sous peine d'irrecevabilité de son recours. Cette demande d’avance de frais avait été annulée le 29 juin 2017, la recourante ayant sollicité l’assistance juridique pour la procédure de recours devant la chambre administrative. Dite requête ayant été rejetée, une nouvelle demande d’avance de frais, envoyée par pli simple et pli recommandé, avait été formulée auprès de la recourante par courrier du 27 septembre 2017, avec un délai arrivant à échéance le 12 octobre 2017. Dans ledit délai, la recourante avait sollicité, oralement, au guichet du greffe, en expliquant les raisons, une prolongation du délai. Par courrier du 12 octobre 2017, une prolongation lui avait été accordée jusqu’au 20 octobre 2017. Ledit courrier rappelait que, si la somme n’était pas payée dans le délai, en l’occurrence prolongé, le recours serait déclaré irrecevable. La recourante avait effectué l'avance de frais le 23 octobre 2017 selon le récépissé postal, si bien que son recours était déclaré irrecevable.

3) Par acte expédié le 5 janvier 2018 au greffe de la chambre administrative, Mme A______ a conclu à ce que la décision du 14 novembre 2017 soit annulée et à ce que la procédure de recours soit reprise.

Son époux avait contacté téléphoniquement le greffe de la chambre administrative le 19 octobre 2017, soit avant l’expiration du délai de paiement afin de savoir s’il était possible de régler l’avance sollicitée le 23 octobre 2017. Il lui avait été indiqué téléphoniquement qu’elle pourrait être acquittée le 23 octobre 2017 « sans que cela ne pose un quelconque problème ». De ce fait, et fort de ce renseignement, l’avance de frais avait été réglée le 23 octobre 2017.

4) Le courrier du 5 janvier 2018 ayant été transmis au Tribunal fédéral comme « recours », ladite juridiction l’a retourné en indiquant que « dès lors que le grief tend[ait] à obtenir la restitution du délai, le recours immédiat auprès du Tribunal fédéral [était] en principe irrecevable ».

5) La correspondance du Tribunal fédéral du 12 janvier 2018 a été transmise à l’intéressée avec la mention que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Il y a lieu à révision lorsque, dans une affaire réglée par une décision, il apparaît :

« que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente » (art. 80 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA-GE - E 5 10).

2) La demande doit être adressée par écrit à la juridiction qui a rendu la décision dans les trois mois dès la découverte du motif de révision (art. 81
al. 1 LPA).

Les art. 64 à 65 LPA sont applicables par analogie, la demande devant indiquer notamment le motif de révision et contenir les conclusions du requérant (art. 81 al. 3 LPA).

La décision rendue le 14 novembre 2017 par la chambre de céans n’a pas fait l’objet d’un recours de droit public et est à ce jour définitive.

3) a. L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non-paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Par conséquent, les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1077/2015 du 6 octobre 2015 consid. 2 ; ATA/916/2015 du 8 septembre 2015 consid. 2a et la jurisprudence citée). Ils ne sont en particulier pas tenus d'adopter la solution du délai supplémentaire figurant à l'art. 62 al. 3 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005
(LTF - RS 173.110) si le versement de l’avance de frais n’intervient pas à l’échéance fixée (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 précité consid. 5.1).

Les juridictions administratives disposent d'une grande liberté d’organiser la mise en pratique de cette disposition et peuvent donc opter pour une communication des délais de paiement par pli recommandé (ATA/194/2016 du 1er mars 2016 consid. 2b ; ATA/916/2015 précité consid. 2b et la jurisprudence citée).

b. Selon l’art. 86 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10), la juridiction saisie invite le recourant à payer une avance de frais destinée à couvrir les frais et émoluments de procédure présumables. À cette fin, elle lui fixe un délai suffisant (al. 1).

4) En cas de non-paiement de l’avance de frais dans le délai imparti, le recours est déclaré irrecevable (art. 86 al. 2 LPA). À rigueur de texte, cette disposition ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l’avance de frais n’intervienne pas dans le délai imparti. La référence au « délai suffisant » de l’art. 86 al. 1 LPA laisse une certaine marge d’appréciation à l’autorité judiciaire saisie dans la fixation du délai (ATA/916/2015 précité consid. 2c ; ATA/881/2010 du 14 décembre 2010 consid. 4a), voire de sa prolongation, mais seulement lorsqu’une telle requête intervient avant son échéance et qu’elle est justifiée (art. 16 al. 2 LPA).

5) à l’instar du non-respect d’un délai fixé par la loi, le non-respect du délai imparti par le juge pour effectuer l’avance de frais en raison de l’inactivité ou d’un défaut dans l’activité du mandataire ou du représentant est opposable au mandant ou au représenté (ATA/294/2016 du 5 avril 2016 ; ATA/264/2016 du 22 mars 2016 ; ATA/465/2013 du 30 juillet 2013 ; ATA/453/2012 du 30 juillet 2012).

6) a. L’inobservation d’un délai imparti par le juge peut cependant faire l’objet d’une restitution si l’administré ou son mandataire a été empêché d’agir sans sa faute (art. 16 al. 3 LPA). Selon la jurisprudence, il convient d’appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l’art. 16 al. 1 LPA afin d’examiner si l’intéressé a été empêché sans sa faute de verser l’avance de frais dans le délai fixé (ATA/916/2015 précité consid. 2c et la jurisprudence citée). Tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’activité de l’intéressé et qui s’imposent à lui de façon irrésistible (ATA/916/2015 précité consid 2c ; ATA/378/2014 précité consid. 3d ; ATA/515/2009 du 13 octobre 2009 consid. 4b ; ATA/40/1998 du 27 janvier 1998 consid. 3a).

b. Pour établir l'existence d'un cas de force majeure, le fardeau de la preuve incombe à celui qui s’en prévaut (ATA/544/2013 du 27 août 2013 et les références citées).

c. Les conditions pour admettre un empêchement sont très strictes. Ce dernier doit être imprévisible et sa survenance ne doit pas être imputable à faute à l'administré (arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.2 et la jurisprudence citée ; ATA/735/2015 du 14 juillet 2015 consid. 3b et la jurisprudence citée), partant de son représentant. Il doit être de nature telle que le respect des délais aurait exigé la prise de dispositions que l'on ne peut raisonnablement attendre de la part d'un homme d'affaires avisé (ATA/544/2013 précité ; ATA/397/2013 du 25 juin 2013 consid. 9 ; ATA/744/2012 du 30 octobre 2012 ; ATA/38/2011 du 25 janvier 2011 ; Danielle YERSIN/Yves NOËL, Commentaire de la loi sur l'impôt fédéral direct, 2007, ad art. 133, n. 14 et 15 p. 1283).

A été considéré comme un cas de force majeure donnant lieu à restitution de délai le fait qu’un détenu, qui disposait d’un délai de recours de trois jours, n’ait pu expédier son recours dans ce délai, du fait qu’il ne pouvait le poster
lui-même et qu’en outre, ce pli avait été soumis à la censure de l’autorité (ATA/515/2009 précité consid. 6). Il en allait de même du recourant qui se voyait impartir, par pli recommandé, un délai de quinze jours pour s’acquitter d’une avance de frais alors que le délai de garde pour retirer le pli en question était de sept jours, de sorte qu’il ne restait qu’une semaine au justiciable pour s’exécuter (ATA/477/2009 du 20 septembre 2009 consid. 5)

En revanche, n’ont pas été considérés comme des cas de force majeure : le fait qu’une demande d’avance de frais ne soit pas retirée à la poste par le mandataire d’un recourant auprès duquel celui-ci avait élu domicile parce que celui-ci s’était absenté de Genève en raison de problèmes familiaux sans prendre les dispositions nécessaires pour pouvoir retirer son courrier recommandé en son absence (ATA/294/2016 précité consid. 3c) ; le fait qu’un recourant se soit trouvé à l’étranger et n’ait pu de ce fait effectuer le paiement dans le délai imparti, ceci par défaut d’organisation (ATA/262/2016 du 22 mars 2016 consid. 5), le fait qu’un recourant domicilié à l’étranger n’ait pu utiliser sans autre le bulletin de versement que son mandataire, qui l’avait reçu, lui avait transmis et n’ait pu payer ladite avance de frais dans le délai imparti en raison d’une organisation trop lourde de sa fiduciaire (ATA/262/2016 du 22 mars 2016 consid. 5) ; le fait qu'un avocat ait transmis à son client la demande d'avance de frais par pli simple en prenant le risque que celui-ci ne reçoive pas ce courrier (ATA/596/2009 du 17 novembre 2009 consid. 6) ; une panne du système informatique du mandataire du recourant l’ayant empêché de déposer un acte de recours dans le délai légal (ATA/222/2007 du 8 mai 2007 consid. 3b) ; la maladie si celle-ci n’empêchait pas le recourant d’agir par lui-même ou de donner à un tiers les instructions nécessaires pour agir à sa place (ATA/50/2009 du 27 janvier 2009 consid. 3c).

7) a. Le formalisme excessif, prohibé par l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1 ; 134 II 244 consid. 2.4.2 ; 130 V 177 consid. 5.4.1 ; 128 II 139 consid. 2a ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2012 du 25 mars 2013 consid. 3.1 ; 2C_133/2009 du 24 juillet 2009 consid. 2.1 ; ATA/836/2014 du 28 octobre 2014 consid. 7a).

b. Il n'y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d'une avance de frais dans un délai déterminé. Il faut cependant que son auteur ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l'inobservation de ce délai (ATF 104 Ia 105 consid. 5 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2012 précité consid. 3.1 ; 2C_645/2008 du 24 juin 2009 consid. 2.2 ; 2C_250/2009 du 2 juin 2009 consid. 5.1). La gravité des conséquences d'un retard dans le paiement de l'avance sur la situation du recourant n'est pas pertinente (arrêts du Tribunal fédéral 2C_703/2009 du 21 septembre 2010 consid. 4.4.2 ; 2C_645/2008 précité consid. 2.2 ; 2C_450/2008 du 1er juillet 2008 consid. 2.3.4).

8) En l’espèce, après avoir interjeté recours le 6 juin 2017, Mme A______ a été invitée, par courrier de la chambre administrative daté du 7 juin 2017 à s’acquitter d’une avance de frais d’un montant de CHF 400.- dans un délai échéant le 7 juillet 2017 sous peine d’irrecevabilité de son recours (art. 86 al. 2 LPA). Dite demande d’avance de frais a été annulée le 29 juin 2017, la recourante ayant sollicité l’assistance juridique pour la procédure de recours devant la chambre de céans. La requête d’assistance juridique ayant été rejetée, une nouvelle demande d’avance de frais, envoyée par pli simple et pli recommandé, a été formulée auprès de la recourante par courrier du 27 septembre 2017, avec un délai arrivant à échéance le 12 octobre 2017. Dans ledit délai, la recourante a sollicité et obtenu une prolongation du délai jusqu’au 20 octobre 2017, conformément au courrier du 12 octobre 2017. Ledit courrier rappelait que, si la somme n’était pas payée dans le délai, en l’occurrence prolongé, le recours serait déclaré irrecevable. Ainsi, entre le moment où la recourante a interjeté recours le 6 juin 2017 et le délai pour s’acquitter de l’avance de frais le 20 octobre 2017, la recourante a eu plusieurs semaines pour se préparer au paiement du montant concerné. Le fait qu’elle ait, entretemps, sollicité l’assistance juridique, n’est pas déterminant dès lors qu’elle devait savoir qu’il existait un risque que sa requête soit rejetée. De surcroît, après le rejet de la demande d’assistance juridique, la recourante a bénéficié d’un délai entre le 27 septembre 2017 et le 12 octobre 2017. Elle a de surcroît bénéficié, à titre exceptionnel, après avoir expliqué oralement les raisons de sa demande de report au guichet du greffe, d’une prolongation du délai, accordée par le juge délégué, entre le 12 et le 20 octobre 2017, ce que le courrier du 12 octobre 2017 a confirmé. Le délai à disposition pour s’acquitter de l’avance de frais était en conséquence raisonnable, ce que la recourante ne conteste pas.

L’avance de frais n’ayant pas été versée à l’échéance fixée, la chambre administrative a déclaré le recours irrecevable en application de l’art. 86
al. 2 LPA.

9) Il reste à examiner si la recourante peut se prévaloir d’un cas de force majeure autorisant une restitution de délai.

En l’espèce, elle se prévaut d’une prolongation obtenue dans le cadre d’un entretien téléphonique entre son époux et le greffe de la chambre administrative le 20 octobre 2017.

Les personnes travaillant au greffe n’ont pas compétence pour accorder une telle prolongation. De surcroît, l’allégation de la recourante n’est étayée par aucun document écrit.

Au vu de ce qui précède, le délai, échu, ne peut être restitué.

10) Manifestement mal fondée, la demande de révision sera rejetée, sans autre acte d'instruction conformément à l'art. 72 LPA.

 


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable la demande en révision interjetée le 5 janvier 2018 par Madame A______ contre la décision d'irrecevabilité de la chambre administrative de la Cour de justice du 14 novembre 2017 ;

au fond :

la rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure dans la présente cause ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me Samir Djaziri, avocat de la recourante ainsi qu'à l'office cantonal de la population et des migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :