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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1559/2015

ATA/262/2016 du 22.03.2016 sur JTAPI/786/2015 ( ICCIFD ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1559/2015-ICCIFD ATA/262/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 22 mars 2016

2ème section

 

dans la cause

 

Madame et Monsieur A______
représentés par KPMG SA Conseil fiscal, mandataire

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 juin 2015 (JTAPI/786/2015)


EN FAIT

1. Par jugement du 29 juin 2015, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a déclaré irrecevable le recours interjeté le 11 mai 2015 par Madame et Monsieur A______, représentés par un mandataire, contre la décision sur réclamation du 15 avril 2015 de l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC) concernant l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 2013 et la décision sur réclamation du même jour de l’AFC concernant les impôts cantonaux et communaux (ci-après : ICC) 2013.

Par courrier recommandé du 13 mai 2015, le TAPI avait imparti aux époux A______ un délai au 12 juin 2015 pour effectuer une avance de frais de CHF 500.-, sous peine d’irrecevabilité du recours. Ce courrier avait été distribué le 15 mai 2015. L’avance de frais requise avait été versée le 18 juin 2015, soit au-delà du délai imparti, sans que l’on puisse retenir que les intéressés aient été victime d’un empêchement non fautif de s’acquitter en temps utiles du montant réclamé.

2. Par acte du 2 juillet 2015, les époux A______ ont recouru par l’intermédiaire de leur mandataire, auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement susmentionné, concluant à son annulation et au renvoi de la cause au TAPI pour examen au fond.

M. A______ résidait aux États-Unis et il n’était pas possible d’utiliser de BVR depuis l’étranger. Le courrier du TAPI demandant le versement de l’avance de frais ne comportait pas la mention de référence bancaire nécessaire pour un paiement international. Compte tenu de cette situation et afin de sauvegarder les droits de son mandant, le mandataire de M. A______ - société fiduciaire internationale - avait procédé à l’avance de frais. Toutefois, en raison de procédures internes, une telle avance de frais devait être soumise à diverses approbations. L’ordre de paiement n’avait ainsi été approuvé que le 12 juin 2015. Le paiement était ainsi parvenu trois jours après la date limite, si on considérait que les 13 et 14 juin 2015 étaient des jours fériés. Le refus d’examiner le fond de la cause était dénué de bon sens, vu les montants en cause et l’importance de l’affaire.

3. Le 8 juillet 2015, le TAPI a transmis son dossier, sans observations.

4. Le 10 juillet 2015, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable dans son principe (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. a. L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non-paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Par conséquent, les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1077/2015 du 6 octobre 2015 consid. 2 ; ATA/916/2015 du 8 septembre 2015 consid. 2a et la jurisprudence citée).

b. Selon l’art. 86 LPA, la juridiction saisie invite le recourant à payer une avance de frais destinée à couvrir les frais et émoluments de procédure présumables. À cette fin, elle lui fixe un délai suffisant (al. 1). Si l’avance de frais n’est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2).

Les juridictions administratives disposent d'une grande liberté d’organiser la mise en pratique de cette disposition et peuvent donc opter pour une communication des délais de paiement par pli recommandé (ATA/916/2015 précité consid. 2b et jurisprudence citée).

c. À rigueur de texte, l'art. 86 LPA ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l’avance de frais n’intervienne pas dans le délai imparti. La référence au « délai suffisant » de l’al. 1 de cette disposition laisse une certaine marge d’appréciation à l’autorité judiciaire saisie (ATA/916/2015 précité consid 2c ; ATA/881/2010 du 14 décembre 2010 consid. 4a). En outre, selon la jurisprudence, il convient d’appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l’art. 16 al. 1 LPA afin d’examiner si l’intéressé a été empêché sans sa faute de verser l’avance de frais dans le délai fixé (ATA/916/2015 précité consid. 2c et la jurisprudence citée). Tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’activité de l’intéressé et qui s’imposent à lui de façon irrésistible (ATA/916/2015 précité consid 2c ; ATA/378/2014 précité consid. 3d).

A été considéré comme un cas de force majeure donnant lieu à restitution de délai le fait qu’un détenu, qui disposait d’un délai de recours de trois jours, n’ait pu expédier son recours dans ce délai, du fait qu’il ne pouvait le poster lui-même et qu’en outre ce pli avait été soumis à la censure de l’autorité (ATA/515/2009 précité consid. 6). Il en allait de même du recourant qui se voyait impartir, par pli recommandé, un délai de quinze jours pour s’acquitter d’une avance de frais alors que le délai de garde pour retirer le pli en question était de sept jours, de sorte qu’il ne restait qu’une semaine au justiciable pour s’exécuter (ATA/477/2009 du 20 septembre 2009 consid. 5). En revanche, n’ont pas été considérés comme des cas de force majeure une panne du système informatique du mandataire du recourant l’ayant empêché de déposer un acte de recours dans le délai légal (ATA/222/2007 du 8 mai 2007 consid. 3b), le fait qu'un avocat ait transmis à son client la demande d'avance de frais par pli simple en prenant le risque que celui-ci ne reçoive pas ce courrier (ATA/596/2009 du 17 novembre 2009 consid. 6), pas plus que la maladie, celle-ci n'étant admise comme motif d’excuse que si elle empêche le recourant d’agir par lui-même ou de donner à un tiers les instructions nécessaires pour agir à sa place (ATA/50/2009 du 27 janvier 2009 consid. 3c).

3. En l’espèce, le délai de paiement imparti aux recourants par pli recommandé du 12 mai 2015 distribué le 15 suivant, a été fixé au 12 juin 2015, ce qui constitue un délai raisonnable, permettant à ceux-ci de prendre les dispositions nécessaires pour que le montant soit acquitté en temps utile.

4. a. Le formalisme excessif, prohibé par l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1 p. 9 ; 134 II 244 consid. 2.4.2 ; ATA/1077/2015 du 6 octobre 2015 consid. 6a ; ATA/836/2014 du 28 octobre 2014 consid. 7a).

b. Il n'y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d'une avance de frais dans un délai déterminé. Il faut cependant que son auteur ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l'inobservation de ce délai (ATF 104 Ia 105 consid. 5 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2012 précité consid. 3.1 ; 2C_645/2008 du 24 juin 2009 consid. 2.2). La gravité des conséquences d'un retard dans le paiement de l'avance sur la situation du recourant n'est pas pertinente (arrêts du Tribunal fédéral 2C_703/2009 du 21 septembre 2010 consid. 4.4.2 ; 2C_645/2008 précité consid. 2.2 ; 2C_450/2008 du 1er juillet 2008 consid. 2.3.4).

5. Les recourants n’ont pas versé l’avance de frais au TAPI dans le délai imparti par cette juridiction.

Ils ne font état d’aucune circonstance propre à envisager un empêchement non fautif, qui ne leur aurait pas permis de s’acquitter de l’avance de frais dans le délai. Le fait que le recourant résidait aux États-Unis et ne puisse utiliser le BVR alors que la demande d’avance de frais ne mentionnait pas de référence de paiement international n’est pas un argument pertinent dès lors que les recourants étaient représentés par un mandataire à Genève et pouvaient aisément obtenir lesdites références ou, solution qui a été retenue, faire effectuer le paiement par ledit mandataire. La lenteur ou la complexité des procédures internes de ce dernier pour que le règlement de cette avance de frais soit approuvée ne constitue pas davantage un élément pertinent pour envisager l’existence d’un empêchement non fautif, étant rappelé qu’en tout état, les actes ou manquements du représentant sont opposables au représenté (ATA/93/2016 du 2 février 2016 et les références citées).

6. Dans ces circonstances, le TAPI était en droit de déclarer le recours irrecevable, vu l’absence de paiement dans le délai imparti.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

7. Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge conjointe et solidaire des recourants (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 juillet 2015 par Madame et Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 juin 2015 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à KPMG SA, Conseil fiscal, mandataire des recourants, à l’administration fiscale cantonale, à l’administration fédérale des contributions, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : Mme Junod, présidente, MM. Thélin et Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :