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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2647/2013

ATA/818/2014 du 28.10.2014 ( PRISON ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : ÉTABLISSEMENT PÉNITENTIAIRE ; DÉTENTION(INCARCÉRATION) ; QUALITÉ POUR RECOURIR ; INTÉRÊT ACTUEL ; MESURE DISCIPLINAIRE ; VICE DE PROCÉDURE ; COMPÉTENCE ; AUTORITÉ ; NULLITÉ ; RÉGIME DE LA DÉTENTION ; GARANTIE DE LA PROPRIÉTÉ ; RESPONSABILITÉ SOLIDAIRE
Normes : LPA.60.al1.letb; LOPP.1.al3; RRIP.42; RRIP.44; RRIP.47.letf; RRIP.47.al5; RRIP.15.al3; Cst.26.al1; CPP.235; CO.50.al1
Résumé : Le placement en cellule forte pour dix jours au plus étant de la compétence du directeur général de l'office cantonal de la détention, sur proposition du directeur de la prison de Champ-Dollon, ce dernier ne pouvait pas prendre lui-même la décision de placer le recourant pendant dix jours en cellule forte. Cette compétence ne pouvait pas être déléguée au directeur de la prison, étant donné que ni la LOPP ni l'ancien RRIP ne prévoyait une telle possibilité. L'échange de courriels entre le directeur de la prison et la directrice générale de l'office est insuffisant pour fonder une délégation de compétence relative au placement en cellule forte au-delà d'une durée de cinq jours, malgré les problèmes de disponibilité et de célérité invoqués. La décision attaquée ayant été prise par une autorité incompétente, sa nullité doit être constatée et le recours déclaré irrecevable sur ce point. Les prélèvements effectués sur le compte bancaire du recourant, destinés à réparer les dommages perpétrés dans l'enceinte de l'établissement pénitentiaire, ne vont pas à l'encontre de la garantie constitutionnelle de la propriété dont ce dernier jouit. Le recourant ayant agi de concert avec d'autres détenus, il est solidairement responsable des dégâts à concurrence du montant total de ceux-ci.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2647/2013-PRISON ATA/818/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 28 octobre 2014

 

dans la cause

 

M. A______
représenté par Me Sébastien Fries, avocat

contre

PRISON DE CHAMP-DOLLON

 


EN FAIT

1) M. A______, ressortissant français né le ______ 1990, est détenu à la prison de Champ-Dollon (ci-après : la prison) depuis le 29 janvier 2013.

2) Il ressort du rapport établi le 8 avril 2013 par un responsable de secteur de la prison à l'attention du directeur de celle-ci que le même jour à 12h15, trente détenus, dont M. A______, ont refusé de rentrer en cellule, se plaignant de la surpopulation carcérale. Après avoir reçu des injonctions de la part du personnel de surveillance, une partie des détenus, restés dans le couloir a réintégré les cellules. Douze détenus dont M. A______, ont toutefois refusé d'obéir et sont restés dans le couloir. Ils ont tapé contre les portes des cellules avec des bancs et une boille à eau, cassé des chevalets, pris les morceaux de ceux-ci pour les coincer dans les barreaux de la porte de sécurité de quartier et ouvert la porte d'une salle fermée à clé pour en sortir une table, des bancs, des chevalets et un baby-foot pour se barricader. À 14h00 et à 14h10, le personnel de surveillance a répété en vain les injonctions de réintégrer les cellules. Le directeur de la prison en a fait de même à 15h00, sous la menace de l'intervention des forces de l'ordre. Les intéressés, dont M. A______, n'ayant pas obtempéré, la police est intervenue dans l'unité concernée en forçant la porte de sécurité de quartier derrière laquelle les détenus s'étaient barricadés. Étant donnée la gravité des faits, ils ont été dénoncés au ministère public.

3) Selon le constat établi le 8 avril 2013 à 15h00 par un sous-chef de la prison, les dégâts matériels liés à la « mutinerie » du même jour, causés par les douze détenus, dont M. A______, se sont élevés à CHF 2'928.30.

4) M. A______ a été placé en cellule forte le 8 avril 2013 à 15h35.

5) Par courriel du 8 avril 2013 à 18h38, le directeur de la prison (ci-après : le directeur) a transmis à la directrice générale de l'office cantonal de la détention (ci-après : la directrice de l'office) les rapports établis à la suite des incidents survenus l'après-midi même. Tout ou partie des douze détenus de l'unité étaient susceptibles d'être placés en cellule forte pour une durée supérieure à cinq jours. Il la priait de lui confirmer qu'il pouvait, dans ce cas, agir sur délégation de sa part.

6) Par courriel du même jour à 18h40, la directrice générale de l'office a confirmé au directeur qu'il pouvait agir sur sa délégation.

7) Par décision du 9 avril 2013, le directeur a ainsi infligé à M. A______ une sanction de dix jours de cellule forte en raison d'un refus d'obtempérer et de trouble à l'ordre de l'établissement. Celui-ci a été entendu sur les faits le 9 avril 2013 à 11h35. La sanction devait être infligée du 8 avril 2013 à 15h35 au 18 avril 2013 à 15h35. La décision a été notifiée oralement à M. A______ le jour-même à 11h40 puis par écrit à 18h30. Cette décision était directement exécutoire.

8) Le 25 avril 2013, le directeur a prélevé un montant de CHF 130.- sur le compte n° B______, ouvert au nom de M. A______ auprès de la prison.

9) Le 27 mai 2013, M. A______ a adressé deux courriers au directeur.

Dans le premier, il demandait une copie de la décision de mise en cellule forte.

Dans le second, il s'étonnait quant au prélèvement qui avait été effectué sur son compte le 25 avril 2013, opération dont il n'avait pas été averti et qu'il avait découverte le 2 mai 2013 en consultant son relevé de compte.

S'il admettait avoir participé à la « mutinerie » du 8 avril 2013, il contestait avoir commis des dégâts lors de celle-ci. En outre, il n'avait pas eu l'occasion de s'exprimer à ce sujet et aucune décision ne lui avait été notifiée. Il n'avait pas non plus été renseigné sur un quelconque moyen de contester ledit prélèvement.

Il demandait donc la restitution des CHF 130.- prélevés. En cas de refus, il demandait l'émission d'une décision respectant les exigences de forme et de procédure et établissant le dommage qui lui était reproché.

10) Le directeur a répondu à M. A______ par courriers successifs des 29 et 30 mai 2013.

L'intéressé avait pris une part active aux incidents survenus le 8 avril 2013 au cours desquels des dégâts considérables avaient été perpétrés, évalués à CHF 2'928,30.

C'était en application de l'art. 15 al. 3 du règlement sur le régime intérieur de la prison et le statut des personnes incarcérées du 30 septembre 1985 (RRIP -
F 1 50.04) que la somme de CHF 130.- avait été prélevée le 25 avril 2013 et qu'une somme de CHF 50.- avait été prélevée le 7 mai 2013, à titre d'acompte. En sus des prélèvements déjà effectués, une somme de CHF 64.- restait due par M. A______.

Une décision formelle justifiant ces opérations allait lui parvenir prochainement.

11) Le 3 juin 2013, M. A______ a répondu au directeur tout en adressant copie à la directrice de l'office.

Premièrement, la décision de mise en cellule forte avait été prise par le directeur, qui n'était pas compétent en la matière à la lecture de l'art. 47 al. 5 RRIP. Seule la directrice de l'office pouvait ordonner une telle sanction.

Cette décision était donc nulle, ce qui pouvait être constaté en tout temps et par toute autorité. L'intéressé avait été mis en cellule forte de façon illégale et demandait donc que des mesures soient prises de manière à rétablir ses droits, sans quoi il agirait par devant les autorités compétentes pour obtenir réparation du préjudice subi.

Deuxièmement, le prélèvement des CHF 130.- opéré sur le compte de l'intéressé ne trouvait de fondement dans aucune décision, ce qui n'était pas acceptable. En outre, l'art. 15 al. 3 RRIP n'établissait pas la compétence du directeur pour rendre une quelconque décision de prélèvement d'argent directement sur le compte de l'intéressé. Enfin, le dommage allégué n'était aucunement prouvé et était contesté.

M. A______ demandait donc la restitution du montant concerné sur son compte et l'émission d'un document prouvant ladite opération.

12) En réponse au courrier précité, le 5 juin 2013, le directeur a renvoyé l'intéressé à son argumentation du 30 mai 2013 et a maintenu ses positions.

13) Le 10 juin 2013, par courrier adressé à la directrice de l'office, M. A______ a repris l'essentiel de son argumentation des précédents échanges d'écriture.

D'une part, il avait été placé en cellule forte un jour avant que la décision ne soit prise. D'autre part, l'art. 15 al. 3 RRIP n'était pas une base légale suffisante pour justifier une atteinte à la garantie de la propriété.

14) Le 11 juin 2013, le directeur a rendu une décision formelle concernant les prélèvements bancaires effectués sur le compte de M. A______.

Les dégâts perpétrés par les douze participants à la mutinerie du 8 avril 2013 s'élevaient à CHF 2'928.30 et devaient être supportés à part égale par ceux-ci, soit un montant de CHF 244.- par personne. Il ne faisait aucun doute sur la responsabilité, la participation et les dommages causés par M. A______.

Par conséquent, un montant de CHF 244.- était prélevé sur le compte de l'intéressé en fonction du solde disponible. Cette décision était exécutoire nonobstant recours.

15) Par acte du 5 août 2013, en réponse au courrier de M. A______ du 10 juin 2013, la directrice de l'office a confirmé les décisions du directeur en y apportant quelques précisions.

Tout d'abord, la compétence pour mettre l'intéressé en cellule forte pendant 10 jours avait été déléguée au directeur le soir du 8 avril 2013, ce qui n'était pas interdit par l'art. 47 al. 5 RRIP. C'était plus précisément la compétence de mener la procédure comprenant l'exercice du droit d'être entendu de l'intéressé et de procéder à la notification de la sanction qui avait été déléguée. Cette délégation était valable et avait été effectuée pour motif de disponibilité et de célérité.

Ensuite, les prélèvements bancaires avaient été décidés sur la base de l'art. 15 al. 3 RRIP, ce qui était fondé et justifié.

Par conséquent, les griefs de l'intéressé étaient rejetés.

16) Par acte du 16 août 2013, M. A______ a formé recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision du 9 avril 2013 concernant sa mise en cellule forte ainsi que contre la décision du 11 juin 2013 concernant les prélèvements effectués sur son compte bancaire. Il a conclu pour l'essentiel à ce que l'instance de recours constate la nullité de la première décision ainsi que la nullité de la deuxième décision, voire les annule et ordonne la restitution de CHF 244.- sur son compte ainsi que la condamnation de l'État de Genève en tous les frais de la procédure et au paiement d'une équitable indemnité de procédure.

Concernant la décision du 9 avril 2013, l'art. 47 al. 5 RRIP réservait à la directrice de l'office la compétence de punir un détenu en le condamnant à la cellule forte pour une durée supérieure à cinq jours et la délégation de compétence effectuée par la directrice de l'office était invalide dès lors qu'elle n'était pas fondée sur une base légale expresse.

La directrice de l'office n'avait pas procédé à la ratification formelle de cette décision qui avait été prise par une autorité incompétente hiérarchiquement inférieure.

Le droit d'être entendu de M. A______ avait été violé. Celui-ci n'avait pas été entendu par la directrice de l'office mais par le directeur, seulement le jour suivant le début de la sanction.

La sécurité du droit n'était pas mise en danger par la constatation de la nullité de cette décision.

Concernant la décision du 11 juin 2013, l'art. 15 al. 3 RRIP ne permettait de prélever des sommes d'argent directement sur le compte du recourant qu'une fois la responsabilité de celui-ci établie pour avoir perpétré un dommage. Cet article n'octroyait aucune compétence au directeur pour juger le recourant responsable d'un dommage qu'il aurait commis ou pour fixer le montant dudit dommage.

Les sanctions disciplinaires pouvant être prises par le directeur étaient régies par le RRIP qui en dressait une liste exhaustive et le prélèvement sur le compte bancaire du recourant ne figurait pas dans celles-ci. Si le prélèvement d'un montant sur les avoirs d'un détenu était une sanction, le montant prélevé aurait dû être proportionné à la faute du recourant. Or, les dommages totaux qui s'élevaient à CHF 2'928.30 avaient simplement été divisés par le nombre de détenus qui avaient participé à la mutinerie.

La décision de mise en cellule forte du 9 avril 2013 ne mentionnait pas les dégâts que le recourant aurait commis. Celui-ci devait donc réparer un dommage qui ne donnait pas lieu à une sanction dans le milieu carcéral.

Les conditions d'une atteinte à la garantie constitutionnelle de la propriété dont jouissait M. A______ n'étaient pas remplies. Ladite opération de prélèvement ne répondait à aucun intérêt public et n'était pas proportionnée. En outre, l'art. 15 al. 3 RRIP n'était pas une base légale suffisante pour justifier une telle restriction.

Le droit d'être entendu de M. A______ avait été gravement violé. Il n'avait eu connaissance du prélèvement bancaire qu'une semaine après l’opération effectuée, ne connaissait pas le montant total qui allait être prélevé et n'avait jamais été consulté à ce propos. De plus, une décision formelle n'avait été prise à cet égard que le 14 juin 2013. En outre, Il n'avait pas eu accès au dossier jusqu'à la date du dépôt du recours. Il ne s'agissait donc pas d'une simple violation réparable du droit d'être entendu mais d'une négation totale de celui-ci, ce qui devait mener à l'annulation de la décision.

17) Le 22 août 2013, le Ministère public du canton de Genève a condamné M. A______ notamment à une peine pécuniaire de 15 jours-amende d'un montant de CHF 30.- pour avoir empêché d'accomplir un acte officiel au sens de l'art. 286 al. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) lors des événements du 8 avril 2013. Aux termes de l'ordonnance pénale, prononcée après visionnage des enregistrements de vidéosurveillance, cette infraction avait été commise sous forme de coactivité, dans la mesure où chaque protagoniste avait agi de concert avec l'autre, c'est-à-dire en s'associant et en participant pleinement et sans réserve à la décision, l'organisation et la réalisation de l'infraction dans une mesure et des conditions les faisant tous apparaître comme des auteurs principaux, chacun voulant les actes accomplis comme si c'était sa propre action, qu'il ait ou non pris part à l'exécution proprement dite.

18) Par acte du 3 septembre 2013, la vice-présidente du Tribunal civil a admis M. A______ au bénéfice de l'assistance juridique avec effet au 8 août 2013, dans le cadre du recours du 16 août 2013.

19) Le 26 septembre 2013, la directrice de l’office a notifié une nouvelle décision à M. A______ concernant la sanction de cellule forte infligée du 8 au 18 avril 2013.

La décision du 9 avril 2013 prise par le directeur était entachée de nullité. L’autorité compétente émettait donc une décision prononçant la sanction disciplinaire déjà infligée à M. A______ du 8 au 18 avril 2013, sur la base des mêmes faits et des mêmes motivations. Cette décision était susceptible de recours dans un délai de 30 jours. L’intéressé a été entendu le même jour sur les évènements du 8 avril 2013.

20) Le 27 septembre 2013, le directeur a notifié à M. A______ une nouvelle décision concernant les prélèvements bancaires effectués sur le compte de M. A______.

Cette dernière reprenait l’intégralité de la décision du 11 juin 2013, mais était cette fois motivée par la sanction infligée à M. A______ par la décision du 26 septembre, plutôt que par celle du 9 avril 2013.

21) Le 30 septembre 2013, dans ses observations concernant le recours de M. A______, le directeur a contesté tous les allégués du recourant non conformes aux siens propres, tout en alléguant des faits nouveaux.

La chambre administrative avait constaté la nullité de la décision du 9 avril 2013 prise par le directeur et infligée à un des douze mutins. Le directeur était incompétent pour prendre une telle sanction, malgré la délégation de la procédure par la directrice de l'office.

Le recours déposé contre la décision entachée de nullité du 9 avril 2013 était devenu sans objet. Une nouvelle décision prise par la directrice de l'office et notifiée à M. A______ en date du 26 septembre 2013, sanctionnait celui-ci par un placement en cellule forte d'une durée de dix jours, tout en précisant que la sanction avait déjà été effectuée.

Le directeur avait entendu M. A______ avant de rendre la décision du 9 avril 2013. Ce dernier n'avait pas contesté avoir participé à la mutinerie du 8 avril 2013. Son droit d'être entendu avait été respecté. Cette question pouvait cependant rester ouverte étant donné que le recours de M. A______ contre cette décision était devenu sans objet.

La décision du 11 juin 2013, qui se basait sur la décision nulle du 9 avril 2013, était retirée en application de l'art. 67 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et était remplacée par la décision du 27 septembre 2013 qui avait été notifiée sans délai aux parties et qui ordonnait le prélèvement d'un montant de CHF 244.- sur le compte du recourant.

Cette nouvelle décision reprenait le même état de fait que la décision du 9 avril 2013 et se basait notamment sur la décision prise le 26 septembre 2013 qui établissait pleinement la responsabilité de M. A______ dans les dégâts qu'il avait volontairement occasionnés. La responsabilité du recourant ayant été établie antérieurement à la décision formelle de prélèvement, cette dernière était parfaitement valable.

Les personnes détenues se situaient dans un rapport de sujétion spécial à l'égard de l'État et devaient tolérer ne pas pouvoir disposer librement des avoirs sur leur compte bancaire. L'opération du prélèvement sur le compte du recourant avait pour base légale, outre l'art. 15 al. 3 RRIP, notamment les art. 7 al. 1 et 9
al. 1 et 2 de la décision du 25 septembre 2008, relative à la rémunération et aux indemnités versées aux personnes détenues placées dans les établissements concordataires, de la Conférence latine des autorités cantonales compétentes en matière d'exécution des peines et mesures.

Le recourant avait été entendu dans le cadre de la prise des décisions du 9 avril 2013, du 26 septembre 2013 et du 27 septembre 2013. En outre, le recourant avait l'occasion de s'exprimer dans le cadre de la procédure en cours. Son droit d'être entendu avait donc été respecté.

22) Le 15 octobre 2013, M. A______ a rendu ses déterminations en lien avec les observations du directeur.

Il gardait un intérêt digne de protection à la constatation de la nullité de la décision du 9 avril 2013 et cela malgré le fait que, dans l'arrêt ATA/525/2013 du 27 août 2013, la chambre administrative avait tranché un litige semblable et était parvenue à la conclusion que la décision attaquée était nulle. Ce dernier jugement ne déployait pas d'effets directs et automatiques à l'égard de M. A______, ni à l'égard de la décision dont il avait personnellement subi les effets. Le recours n'était donc pas devenu sans objet.

Lors de la prise de cette décision, le recourant avait été entendu par le directeur et non pas par la directrice de l'office. L'audition, qui n'avait duré que cinq minutes, avait en outre été effectuée postérieurement à sa mise en cellule forte. Le droit d'être entendu du recourant avait donc été violé.

Quant à la décision du 11 juin 2013, elle restait valable, indépendamment de la nullité de la décision du 9 avril 2013.

Le visionnage par le ministère public des enregistrements de vidéosurveillance n'avait pas permis de prouver que M. A______ avait commis de dommage à la propriété au sens de l'art. 144 CP. Ce dernier contestait toujours avoir perpétré les dommages que le directeur lui imputait.

L'art. 67 al. 2 LPA consacrait le droit pour l'autorité précédente, en cours de procédure, de reconsidérer ou de retirer sa décision. Le directeur ne pouvait pas annuler une décision nulle et en prendre une seconde, identique à la première alors qu'un recours avait été déposé contre celle-ci. La décision du 11 juin 2013 existait donc toujours.

Aucune des bases légales avancées par le directeur n'établissait de compétence pour effectuer les prélèvements de somme d'argent sur le compte du recourant en réparation d'un dommage d'ailleurs contesté. En outre, celui-ci n'avait pas été entendu et avait découvert par hasard les prélèvements effectués en consultant son extrait de compte. Le directeur n'avait par ailleurs jamais visionné les enregistrements de vidéosurveillance malgré la demande du recourant.

23) Par acte du 28 octobre 2013, M. A______ a formé recours contre les décisions du 26 septembre 2013 et du 27 septembre 2013. Il a conclu à ce que la procédure soit jointe à celle du premier recours, à la constatation de la nullité, respectivement l'annulation de la décision du 26 septembre 2013, au constat de la nullité, respectivement l'annulation de la décision du 27 septembre 2013, à la restitution de CHF 244.- et à la condamnation de l'État de Genève en tous les frais de la procédure et au paiement d'une équitable indemnité en sa faveur.

Le recours se rapportait à une situation factuelle et juridique identique à celle du premier recours ce qui justifiait la jonction des deux procédures.

Ni l'acte du 5 août 2013, ni la décision du 26 septembre 2013 ne pouvaient être considérés comme des actes provenant d'une autorité hiérarchique supérieure ratifiant la décision du 9 avril 2013. Admettre cela allait à l'encontre du respect de la répartition des compétences fixée par la loi.

L'art. 67 al. 2 LPA ne permettait pas à la directrice de l'office de corriger la décision du 9 avril 2013, car elle n'était pas l'autorité de première instance.

Les agissements hautement contradictoires du directeur et de la directrice de l'office depuis le début des échanges d'écritures jusqu'à la prise de la décision du 26 septembre 2013 violaient les règles de la bonne foi de l'administration et constituaient un abus de droit.

M. A______ avait été entendu par les autorités plus de six mois après avoir exécuté la peine prévue par la décision du 26 septembre 2013, ce qui violait son droit d'être entendu.

Le fait que la décision du 26 septembre 2013 visait les mêmes faits que ceux pour lesquels le recourant avait déjà purgé dix jours de cellule forte constituait une violation du principe ne bis in idem.

L'art. 67 al. 2 LPA permettait à l'autorité de première instance de retirer ou de reconsidérer une décision en cours de procédure. Or, le directeur avait annulé la décision du 11 juin 2013 et avait remplacé celle-ci par une décision identique, celle du 27 septembre 2013, ce qui était illégal et mettait en danger la sécurité du droit. Cette dernière n'était pas une décision au sens de l'art. 4 LPA car elle ne créait, ne modifiait ni n'annulait ou constatait les droits et obligations du recourant. La décision du 27 septembre devait donc être considérée comme nulle ou annulable.

Le constat de dégâts du 8 avril 2013 avait été dressé par un sous-chef de la prison à 15h00, heure à laquelle la « mutinerie » n'était pas terminée. Cela mettait en doute la qualité probatoire de cette pièce.

Le directeur avait violé la garantie de la propriété du recourant en prélevant directement des sommes d'argent appartenant à celui-ci, opération qui ne répondait à aucun intérêt public. Le directeur aurait dû user de la voie traditionnelle d'une action en responsabilité suivie des voies de l'exécution forcée prévues par la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 (LP - RS 281.1), notamment en respect du principe de la proportionnalité.

Au surplus, le recourant répétait les arguments développés dans son recours du 16 août 2013.

24) Le 7 novembre 2013, la vice-présidente du Tribunal civil a admis M. A______ au bénéfice de l'assistance juridique avec effet au 1er novembre 2013, dans le cadre du recours du 28 octobre 2013.

25) Le 20 novembre 2013, considérant que les deux causes présentaient une situation identique et des éléments juridiques communs, le juge délégué les a jointes en une même procédure portant le numéro de cause A/2647/2013.

26) Par acte du 13 décembre 2013, en réponse au recours susmentionné, la direction de l'office et le directeur ont conclu au rejet du recours et au déboutement du recourant de toutes autres ou contraires conclusions.

La décision prise le 26 septembre 2013 ratifiait a posteriori la décision prise par une autorité non compétente le 9 avril 2013, soit le directeur. Une décision ratifiant une précédente et prise afin de respecter une jurisprudence récente de dernière instance cantonale ne pouvait être considérée comme étant contraire au principe de la bonne foi.

Le droit d'être entendu du recourant était respecté. Il avait été exercé par le recourant le 26 septembre 2013 devant la directrice de l'office. En outre, la coexistence entre une procédure pénale et une procédure administrative ne constituait pas une violation du principe ne bis in idem.

Au surplus, la direction de l'office et le directeur reprenaient l'argumentation développée par ce dernier dans sa réponse du 30 septembre 2013.

27) Dans ses observations du 31 janvier 2014, le recourant s'est limité à synthétiser l'ensemble des écritures échangées depuis la naissance du litige.

28) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjetés en temps utile devant la juridiction compétente, les recours interjetés le 16 août et le 28 octobre 2013, en tant qu’ils visent respectivement les décisions du 11 juin 2013 et du 27 septembre 2013 rendues par le directeur et en tant qu’ils visent la décision du 26 septembre 2013 rendue par la directrice de l’office sont recevables (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du
26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA ; art. 60 RRIP).

La question de la recevabilité du recours du 16 août 2013, en tant qu'il concerne la décision du 9 avril 2013, peut rester ouverte. La question d’une éventuelle nullité de cette décision sera examinée plus bas, une fois le fond du litige abordé.

2) a. Aux termes de l'art. 60 al. 1 let. b LPA, ont qualité pour recourir toutes les personnes qui sont touchées directement par une décision et ont un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée.

b. Selon la jurisprudence, le recourant doit avoir un intérêt pratique à l'admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage, de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 121 II 39 consid. 2 c/aa p. 43 ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.47/2002 du 16 avril 2002, consid. 3 ; ATA/307/2013 du 14 mai 2013 ; ATA/759/2012 du 6 novembre 2012 ; ATA/188/2011 du 22 mars 2011 ; ATA/146/2009 du 24 mars 2009).

c. Un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l’annulation de la décision attaquée (ATF 135 I 79 consid. 1 p. 81 ; 128 II 34 consid. 1b p. 36 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_133/2009 du 4 juin 2009 consid. 3 ; Hansjörg SEILER, Handkommentar zum Bundesgerichtsgesetz [BGG], Berne 2007, n. 33 ad art. 89 LTF p. 365 ; Karl SPUHLER/ Annette DOLGE/Dominik VOCK, Kurzkommentar zum Bundesgerichtsgesetz [BGG], Zurich/St-Gall 2006, n. 5 ad art. 89 LTF p. 167). L’existence d’un intérêt actuel s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours ; s’il s’éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1 p. 374 ; 118 Ib 1 consid. 2 p. 7 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_76/2009 du 30 avril 2009 consid. 2 ; ATA/175/2007 du 17 avril 2007 consid. 2a ; ATA/915/2004 du 23 novembre 2004 consid. 2b) ou déclaré irrecevable (ATF 123 II 285 consid. 4 p. 286 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_69/2007 du 11 juin 2007 consid. 2.3 ; ATA/307/2013 précité ; ATA/192/2009 du 21 avril 2009 ; ATA/640/2005 du 27 septembre 2005).

d. Il est toutefois renoncé à l’exigence d’un intérêt actuel lorsque cette condition fait obstacle au contrôle de la légalité d’un acte qui pourrait se reproduire en tout temps, dans des circonstances semblables, et qui, en raison de sa brève durée ou de ses effets limités dans le temps, échapperait ainsi toujours à la censure de l’autorité de recours (ATF 135 I 79 précité ; 131 II 361 consid. 1.2 p. 365 ; 128 II 34 précité ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_34/2009 du 20 avril 2009 consid. 3 ; ATA/307/2013 précité ; ATA/418/2012 du 3 juillet 2012 consid. 2d ; ATA/365/2009 du 28 juillet 2009).

e. En l’espèce, le recourant a été placé immédiatement en cellule forte pour une durée de dix jours. Compte tenu de la brièveté dudit délai, la chambre administrative, lorsque le recourant est encore en détention au moment du prononcé de l’arrêt, fait abstraction de l’exigence d’un intérêt actuel, faute de quoi les sanctions administratives infligées aux détenus de la prison de
Champ-Dollon échapperaient au contrôle de la chambre administrative (ATA/439/2013 précité et ATA/441/2013 du 30 juillet 2013). Le recourant dispose d'un intérêt digne de protection à recourir contre la sanction prononcée contre lui, dont la légalité doit pouvoir faire l’objet d’un contrôle en vertu de la jurisprudence du Tribunal fédéral précitée, nonobstant l’absence d’intérêt actuel, puisque cette sanction a déjà été exécutée, dans la mesure où cette situation pourrait encore se présenter (ATA/307/2013 précité ; ATA/183/2013 du 19 mars 2013 et la jurisprudence citée).

En outre, dès lors qu'il n'a pas obtenu restitution de la somme de CHF 244.- prélevée sur son compte par le directeur, le recourant à un intérêt digne de protection à recourir contre la décision litigieuse.

Le recours est donc recevable.

3) La présente procédure a pour objets le placement en cellule forte du recourant du 8 au 18 avril 2013, d’une part, et les prélèvements effectués par le directeur sur le compte bancaire de celui-ci, d’autre part.

4) S'agissant de la décision du 9 avril 2013 de placement en cellule forte pour une durée de dix jours, du 8 au 18 avril 2013, le recourant argue que le directeur n'était pas compétent pour prendre la décision litigieuse et que la délégation de compétence effectuée par la directrice de l'office en sa faveur était illégale.

a. Le droit disciplinaire est un ensemble de sanctions dont l'autorité dispose à l'égard d'une collectivité déterminée de personnes, soumises à un statut spécial ou qui, tenues par un régime particulier d'obligations, sont l'objet d'une surveillance spéciale. Il permet de sanctionner des comportements fautifs - la faute étant une condition de la répression - qui lèsent les devoirs caractéristiques de la personne assujettie à cette relation spécifique, lesquels en protègent le fonctionnement normal. Il s'applique aux divers régimes de rapports de puissance publique, et notamment aux détenus. Le droit disciplinaire se caractérise d'abord par la nature des obligations qu'il sanctionne, la justification en réside dans la nature réglementaire des relations entre l'administration et les intéressés. L'administration dispose d'un éventail de sanctions dont le choix doit respecter le principe de la proportionnalité (Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 142 à 145 et la jurisprudence citée).

Les sanctions disciplinaires sont régies par les principes généraux du droit pénal, de sorte qu’elles ne sauraient être prononcées en l’absence d’une faute. La notion de faute est admise de manière très large en droit disciplinaire et celle-ci peut être commise consciemment, par négligence ou par inconscience, la négligence n’ayant pas à être prévue dans une disposition expresse pour entraîner la punissabilité de l’auteur (ATA/727/2014 du 9 septembre 2014 ; ATA/785/2012 du 20 novembre 2012 ; ATA/238/2012 du 24 avril 2012 et les références citées).

b. Le statut des personnes incarcérées à la prison est régi par l’art. 1 al. 3 de la loi sur l’organisation et le personnel de la prison du 21 juin 1984 (LOPP - F 1 50), ainsi que par le RRIP.

Un détenu doit respecter les dispositions du RRIP, les instructions du directeur général de l’office, ainsi que les ordres du directeur et des fonctionnaires de la prison (art. 42 RRIP). Il doit en toutes circonstances adopter une attitude correcte à l’égard du personnel de la prison, des autres personnes incarcérées et des tiers (art. 44 RRIP). Il lui est notamment interdit de troubler l’ordre et la tranquillité de la prison (art. 45 let. h RRIP).

Si un détenu enfreint le RRIP, une sanction proportionnée à sa faute, ainsi qu’à la nature et à la gravité de l’infraction, lui est infligée (art. 47 al. 1 RRIP). Avant le prononcé de la sanction, le détenu doit être informé des faits qui lui sont reprochés et être entendu (art. 47 al. 2 RRIP).

Selon l'ancien art. 47 let. f aRRIP, applicable à l’époque des faits, le directeur de la prison était compétent pour prononcer un placement en cellule forte pour cinq jours au plus. Le directeur général de l’office cantonal de la détention (ci-après : OCD) pouvait ordonner, sur proposition du directeur de la prison, le placement en cellule forte pour dix jours au plus (art. 47 al. 5 aRRIP).

c. Il est des cas où les vices affectant une décision sont si graves et si évidents qu'ils empêchent celle-ci d'avoir une existence - et donc des effets - quelconques. La décision nulle est censée n'avoir jamais existé. L'écoulement des délais de recours non utilisés n'a aucun effet guérisseur. Une décision nulle n'a que l'apparence de la décision. La nullité renverse ainsi la présomption de validité des décisions formellement en force. La possibilité de la nullité d'une décision crée une grande insécurité juridique. La nullité ne peut être admise qu'exceptionnellement. Elle n'est reconnue que si le vice dont la décision est entachée est particulièrement grave, s'il est manifeste ou du moins facilement décelable, et si en outre, la constatation de la nullité ne met pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Ces conditions sont cumulatives et elles ont pour conséquence que la nullité n'est que très rarement admise. Par ailleurs, des vices de fond n'entraînent que très exceptionnellement la nullité d'une décision alors que de graves vices de procédure, ainsi que l'incompétence qualifiée, fonctionnelle ou matérielle, de l'autorité qui a rendu la décision sont des motifs de nullité (ATF 132 II 21 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_270/2011 du 29 août 2011 consid. 5.1 ; ATA/107/2013 du 19 février 2013 consid. 7 ; ATA/773/2011 du 20 décembre 2011 consid. 2 et les références citées ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 908 ss). Enfin, la nullité d'une décision peut être constatée en tout temps et par n'importe quelle autorité, y compris en instance de recours (ATF 136 II 415 consid. 1.2 ; 132 II 342 consid. 2.1). En cas de constat de nullité, le recours n'a pas ou plus d'objet, ce qui conduit en principe à son irrecevabilité (ATF 136 II 415 consid. 1.2 ; ATA/412/2013 du 2 juillet 2013 consid. 7).

d. En l’espèce, par courriel du 8 avril 2013, le directeur de la prison a prié la directrice générale de l’OCD de lui confirmer qu’il pouvait, à la suite de la « mutinerie » qui avait eu lieu le même jour, prendre des sanctions en agissant sur délégation de sa part, ce que la directrice a confirmé par courriel du même jour.

Le 9 avril 2013, le directeur de la prison, sur délégation de la directrice en question, a décidé que le recourant devait passer dix jours en cellule forte, du 8 avril 2013 au 18 avril 2013, en raison d’un refus d’obtempérer, de troubles à l’ordre de l’établissement, de la dégradation des locaux et de mobiliers et d’injures envers le personnel. Le recourant a déjà purgé cette sanction.

À teneur de l’art. 47 al. 5 aRRIP, le placement en cellule forte pour dix jours au plus est de la compétence du directeur général de l’OCD, sur proposition du directeur de la prison. Ni la LOPP ni le RRIP ne prévoient la possibilité pour le directeur général de l’OCD de déléguer la compétence précitée au directeur de la prison. Dans ces circonstances, admettre le contraire viderait l’art. 47 al. 5 aRRIP de son sens, dans la mesure où les sanctions plus importantes que celles figurant à l’art. 47 al. 3 aRRIP sont de la compétence du directeur général de l’OCD. À cet égard, l’échange de courriels entre le directeur de la prison et la directrice générale de l’OCD est insuffisant pour fonder une délégation de compétence relative au placement en cellule forte au-delà d’une durée de cinq jours, malgré les problèmes de disponibilité et de célérité invoqués (ATA/236/2014 du 8 août 2014 consid. 9 ; ATA/525/2013 du 27 août 2013).

Par conséquent, le directeur de la prison n’était pas compétent pour prendre la décision litigieuse, même sur délégation de la directrice générale de l’OCD. Tout au plus pouvait-il proposer à la directrice générale de l’OCD de placer le recourant en cellule forte pour une durée maximale de dix jours.

5) La décision du 9 avril 2013 a ainsi été prise par une autorité incompétente, ce qui constitue un vice particulièrement grave, manifeste et facilement décelable au sens de la jurisprudence précitée. Il s’agit d’un motif de nullité. En outre, constater la nullité de cette décision ne mettrait pas en danger la sécurité du droit.

6) a. Selon certains auteurs, l'incompétence fonctionnelle ou matérielle conduit, dans la règle, à la nullité de la décision, à moins que, dans le domaine en cause, l'autorité qui a statué dispose de compétences générales ou que la reconnaissance de la nullité soit incompatible avec la sécurité du droit. Cependant, cette solution s'avère être parfois excessivement rigoureuse, notamment dans les cas d'incompétence fonctionnelle. Lorsque l'autorité non compétente est dans une relation de supériorité hiérarchique avec la compétente, la sanction devrait être l'annulabilité : le vice n'est pas grave, ni le plus souvent manifeste. Il y aura pourtant nullité si, parce qu'il émane d'une autorité supérieure dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours, l'acte échappe au contrôle du juge administratif qui aurait été matériellement compétent pour en être saisi. Il n'y a en revanche aucun vice si l'autorité hiérarchique dispose d'un pouvoir d'évocation ou de révocation. Lorsque la décision émane d'une autorité hiérarchiquement inférieure, le vice présentera des caractéristiques analogues et la sanction devrait être la même ; de toute manière, l'autorité supérieure pourrait exercer son pouvoir de révocation ou au contraire de ratification (RDAF 2002 I 142 [145], TA VD). Du moins, lorsque la matière sur laquelle porte la décision présente quelque analogie avec les attributions de l'autorité incompétente (ce qui est généralement le cas) : ce n'est que dans l'hypothèse inverse qu'on pourra prononcer la nullité (Pierre MOOR/Etienne POLTIER, op. cit., p. 369s. et la jurisprudence citée).

b. En l’espèce, si la décision du 9 avril 2013 a été émise par une autorité hiérarchiquement inférieure à l’autorité compétente, elle a été assortie d’un effet exécutoire nonobstant recours. Le recourant a donc immédiatement subi dix jours de cellule forte, du 8 avril au 18 avril 2013.

Dans de telles circonstances, le vice particulièrement grave entraînant la nullité de ladite décision ne saurait en aucun cas être considéré comme réparable par une décision ultérieure.

Par ailleurs, prise cinq mois après l’exécution de la sanction, cette décision, rendue le 26 septembre 2013, même prise par l’autorité compétente, viole l’art. 47 al. 5 aRRIP.

7)La nullité de la décision du 9 avril 2013 sera donc constatée et le recours déclaré irrecevable, en tant qu’il concerne cette dernière.

Le recourant a donc été mis en cellule forte du 8 avril au 18 avril 2013 de manière illégale et la décision subséquente du 26 septembre 2013, émise par la directrice de l’office, ne saurait rendre cette situation conforme au droit.

Par conséquent, la décision du 26 septembre 2013 sera annulée.

8) Etant donné cette issue, il n'est pas nécessaire de trancher d'autres points de droit ayant trait à ces décisions.

9) Concernant les décisions de prélèvement des 11 juin 2013 et 27 septembre 2013, le recourant invoque, de prime abord, la violation de son droit d'être entendu.

10) Le 25 avril 2013 et le 7 mai 2013, le directeur a prélevé du compte du recourant respectivement les montants de CHF 130.- et de CHF 50.-. En tant que tels, les actes de prélèvement sont des mesures d’exécution.

Ces prélèvements effectués n’étaient fondés sur aucune décision, cette dernière n’ayant été émise que le 11 juin 2013.

Si la conformité au droit de ces prélèvements est douteuse, il n’en est pas résulté de préjudice pour le recourant, notamment dans la mesure où cet argent aurait pu lui être restitué sans difficulté.

11) En revanche, les actes du 11 juin et du 27 septembre 2013 sont des décisions au sens de l’art. 4 LPA. Elles doivent donc être prises en respect des règles de procédure administrative, notamment en respect du droit d’être entendu du recourant.

a. Le droit d’être entendu est une garantie de nature formelle dont la violation entraîne, lorsque sa réparation par l'autorité de recours n'est pas possible, l'annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 consid. 2.2 p. 197 ; 133 III 235 consid. 5.3 p. 250 ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_825/2012 du 17 avril 2013 consid. 3.1 ; 5A_ 846/2011 du 26 juin 2012; ATA/276/2012 du 8 mai 2012 consid. 2 et les arrêts cités). Ce moyen doit par conséquent être examiné en premier lieu (ATF 137 I 195 consid. 2.2 p. 197). Sa portée est déterminée en premier lieu par le droit cantonal (art. 41 ss LPA) et le droit administratif spécial (ATF 126 I 15 consid. 2 p. 16 ; 124 I 49 consid. 3a p. 51 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_11/2009 du 31 mars 2009 ; 2P.39/2006 du 3 juillet 2006 consid. 3.2). Si la protection prévue par ces lois est insuffisante, ce sont les règles minimales déduites de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) qui s’appliquent (art. 29 al. 2 Cst. ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.1 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 1526). Quant à l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), il n'accorde pas au justiciable de garanties plus étendues que celles découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. (arrêts du Tribunal fédéral 6B_24/2010 du 20 mai 2010 consid. 1 ; 4P.206/2005 du 11 novembre 2005 consid. 2.1 et les arrêts cités).

Tel qu’il est garanti par cette dernière disposition, le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 138 II 252 consid. 2.2 p. 255 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_866/2010 du 12 mars 2012 consid. 4.1.1 ; 8C_643/2011 du 9 mars 2012 consid. 4.3 et les références citées ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 ; ATA/276/2012 du 8 mai 2012 consid. 2 et les arrêts cités).

b. En l'espèce, le directeur a entendu le recourant, qui s'est exprimé sur les faits par les courriers des 27 mai 2013 et 3 juin 2013, avant de prendre la décision du 11 juin 2013. En outre, le recourant a eu l’occasion de s’exprimer sur les faits dans la procédure de recours concernant la décision du 27 septembre 2013.

Partant, le droit d'être entendu du recourant a été respecté.

12) Le recourant argue ensuite que l'art. 15 al. 3 RRIP est une disposition insuffisante pour fonder la compétence du directeur et pour justifier l'atteinte à la garantie de la propriété dont il a été l'objet de par le prélèvement effectué sur son compte bancaire. Selon lui, le directeur aurait dû intenter une action en responsabilité et suivre les voies de l'exécution forcée consacrées par la LP.

a. Selon l'art. 26 al. 1 de la Cst. et l'art. 37 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst - GE - RS A 2 00), la propriété est garantie.

b. Selon la doctrine, dans son acception première, la garantie de la propriété protège les droits patrimoniaux concrets du propriétaire : celui de conserver sa propriété, d’en jouir, de l’aliéner. On retrouve ici la fonction essentielle des libertés, qui est de protéger le particulier contre les mesures étatiques restrictives.
L’art. 26 al. 1 Cst. vise donc à protéger les droits de chaque propriétaire individuel, personne physique ou morale. La jurisprudence et la doctrine se réfèrent à ce propos à la « protection de la situation acquise » (Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. 2, 3ème éd., 2013, n. 807, p. 380/381).

c. L’art. 74 CP dispose que le détenu et la personne exécutant une mesure ont droit au respect de leur dignité. L'exercice de leurs droits ne peut être restreint que dans la mesure requise par la privation de liberté et par les exigences de la vie collective dans l'établissement.

L'art. 235 du Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP - RS 312.0) précise que la liberté des prévenus en détention ne peut être restreinte que dans la mesure requise par le but de la détention et par le respect de l'ordre et de la sécurité dans l'établissement (al. 1). Les cantons sont compétents pour régler les droits et les obligations des prévenus en détention, leurs droits de recours, les mesures disciplinaires ainsi que la surveillance des établissements de détention (al. 5).

d. Selon la jurisprudence, une fois incarcérés, les intéressés sont soumis aux restrictions qui découlent de la mesure de contrainte qui leur est imposée et du rapport spécial qui les lie à l'État. Si toutes ces restrictions ne doivent pas nécessairement résulter de dispositions spéciales et précises de la loi, il n'en demeure pas moins qu'elles n'ont pas à aller au-delà de ce qu'exigent le but de l'incarcération et les exigences raisonnables propres à assurer le fonctionnement normal de l'établissement de détention, et elles doivent respecter le principe de proportionnalité. Par ailleurs, le Tribunal fédéral a abandonné sa jurisprudence selon laquelle n'étaient pas soumis à l'exigence d'une base légale les actes limitant la liberté et les droits des personnes liées à l'État par un rapport de sujétion spécial. Dans son arrêt Minelli du 4 avril 1973, il a en effet suivi l'exemple du Bundesverfassungsgericht allemand (BVGE vol. 33, 1973, p. 9 ss.). Pour des raisons fondées sur la notion de l'État de droit, le Tribunal fédéral juge désormais indispensable de fixer dans un règlement ou une loi les limitations de la liberté personnelle que les prévenus et les condamnés doivent subir pendant leur détention en prison. Dès lors, le régime de détention ne peut pas être laissé à l'appréciation plus ou moins arbitraire de l'administration pénitentiaire. S'il n'a pas été réglé jusque dans les moindres détails, ce régime auquel les détenus sont soumis doit être, au moins dans les grandes lignes, fixé par un arrêté de portée générale que l'administration pénitentiaire sera tenue de respecter (ATF 106 Ia 277 consid. 3a et 3d p. 281 à 282 et les références citées).

e. Le législateur genevois a délégué au Conseil d'État la compétence de fixer, par règlement, le régime intérieur de la prison et le statut des personnes incarcérées (art. 1 al. 3 LOPP).

Le RRIP fixe notamment les conditions d'incarcération des détenus. Parmi celles-ci, l'art. 15 al. 3 RRIP dispose qu'en cas de dommage causé volontairement ou par négligence grave, le détenu doit rembourser les frais de réparation ou de remplacement. Une somme appropriée aux circonstances peut être prélevée à cette fin sur son dépôt. Est réservé le droit de déposer plainte pour dommage à la propriété.

f. La première phrase de l'art. 15 al. 3 RRIP consacre l'obligation pour le détenu de rembourser les frais de réparation ou de remplacement des biens de l'établissement qu'il aurait endommagé, volontairement ou par négligence grave. La deuxième phrase de cet alinéa règle plus spécifiquement la question du mode d'exécution par lequel le détenu doit effectuer le remboursement. Une somme d'argent peut être directement prélevée sur le compte du détenu.

Cet article ne précise pas qui détient la compétence pour prendre de telles décisions. Cependant, le directeur jouissant de l'essentiel des compétences consacrées par le règlement, il doit être admis qu'il peut également prendre les décisions liées aux remboursements pour les dommages perpétrés dans l'enceinte de l'établissement pénitentiaire.

L’art. 15 al. 3 RRIP, dont les conditions d'application sont similaires à celles de l'art. 41 de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220) applicable aux relations de droit privé, permet au directeur de constater les dommages perpétrés dans l'établissement, de déterminer quel détenu en est tenu responsable et d'en obtenir la réparation financière indépendamment du bon vouloir du détenu, au travers d'une unique décision contre laquelle il peut être fait recours.

Cet article restreint la liberté économique des détenus dans la mesure requise par le but de la détention et par le respect de l’ordre et de la sécurité de l’établissement pénitentiaire de Champ-Dollon, comme prévu par les art. 74 CP et 235 CPP. Partant, il ne saurait être considéré comme violant la liberté économique du recourant.

13) Il importe peu, à cet égard, que le prélèvement total litigieux de CHF 244.- ait été effectué sur de l’argent provenant d’une rémunération ou, comme l’allègue le recourant, de versements effectués par sa famille.

14) Le recourant conteste la validité du constat des dégâts effectué le 8 avril 2013 à 15h00 car, à ce moment, la « mutinerie » n’était pas terminée.

En l’espèce, selon le rapport, la police a commencé à briser la vitre de la porte PSQ qui la séparait des émeutiers à 15h05. Le constat des dégâts aurait quant à lui débuté à 15h00.

L’argument du recourant est irrelevant. En effet, celui-ci ne démontre à aucun moment que le constat aurait été différent s’il avait été fait ultérieurement. Au demeurant, il n’est pas invraisemblable que le sous-chef ait commencé à constater les dégâts dès le début de l’intervention de la police.

Par conséquent, le constat des dégâts effectué le 8 avril 2013 à 15h00, retenant une somme totale de CHF 2'928.30, est valable.

15) Le recourant argue que le directeur n’a pas établi les dommages perpétrés individuellement par le recourant lors des événements du 8 avril 2013.

Selon l’art. 50 al. 1 CO applicable par analogie, en cas d’acte illicite, lorsque plusieurs ont causé ensemble un dommage, ils sont tenus solidairement de le réparer, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre l'instigateur, l'auteur principal et le complice.

En l'espèce, il n'est pas contesté que le recourant a participé activement aux événements du 8 avril 2013, accompagné de onze autres détenus. Il n’apparaît pas que le recourant se soit opposé aux actes de ses codétenus ou ait tenté de les dissuader de les commettre. Il doit au contraire être considéré comme ayant participé et doit donc être tenu pour solidairement responsable des dégâts.

Par la décision du 11 juin 2013, le directeur a établi la responsabilité du recourant pour un dommage s'élevant à CHF 244.-, ce qui est égal à un douzième du montant total des dégâts perpétrés contre l'établissement de Champ-Dollon.

Par conséquent, cette décision est conforme à la loi et aux principes généraux du droit.

16) Contrairement à ce que semble penser l'intimé, une décision fondée sur
l'art. 15 al. 3 RRIP peut exister indépendamment de toute sanction. Comme vu plus haut, la décision du 11 juin 2013 était valable et déployait ses effets depuis ce jour, indépendamment du sort de la mise en cellule forte décidée le 9 avril 2013. Il n'était par conséquent pas nécessaire pour l'intimé de révoquer cette décision pour en reprendre une basée sur la ratification de la sanction par la directrice de l'office prononcée le 26 septembre 2013.

La décision du 27 septembre 2013 reste néanmoins valable, n'ayant pour seul effet que de faire courir un nouveau délai de recours et ne portant aucun préjudice au recourant.

17) Au vu de ce qui précède, dans la mesure où il est recevable, le recours devra être rejeté.

18) Le recourant étant au bénéfice de l'assistance judiciaire, aucun émolument ne sera perçu de sa part (art. 12 et 13 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucun émolument ne sera mis à charge des autorités (art. 87 al 1 LPA), et une indemnité de CHF 500.- sera allouée au recourant, à charge de l’État de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

préalablement :

constate la nullité de la décision du directeur de la prison de Champ-Dollon du
9 avril 2013 ;

à la forme :

déclare irrecevable le recours interjeté par M. A______ en tant qu’il concerne la décision du 9 avril 2013 rendue par le directeur de la prison de Champ-Dollon ;

déclare recevable le recours interjeté par M. A______ contre la décision du 26 septembre 2013 rendue par la directrice de l’office cantonal de la détention ;

déclare recevable le recours interjeté par M. A______ en tant qu’il concerne les décisions du 11 juin et du 27 septembre 2013 rendues par le directeur de la prison de Champ-Dollon ;

au fond :

admet partiellement le recours ;

annule la décision du 26 septembre 2013 rendue par la directrice de l’office cantonal de la détention ;

rejette le recours en tant qu’il concerne les décisions du 11 juin et du 27 septembre 2013 rendues par le directeur de la prison de Champ-Dollon ;

dit qu'il n'est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 500.- au recourant, à la charge de l’État de Genève ;

dit que conformément aux art. 78 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière pénale ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Sébastien Fries, avocat du recourant, à la prison de Champ-Dollon, ainsi qu’à la direction générale de l'office cantonal de la détention.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :