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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1921/2008

ATA/687/2013 du 15.10.2013 sur JTAPI/1211/2011 ( ICC ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : ; ASSUJETTISSEMENT(IMPÔT) ; APPARTENANCE PERSONNELLE ; IMPÔT SUR LE REVENU ; PRESCRIPTION ; ACTIVITÉ LUCRATIVE DÉPENDANTE ; ACTIVITÉ LUCRATIVE INDÉPENDANTE ; EXONÉRATION FISCALE ; ACTIONNAIRE ; PRESTATION APPRÉCIABLE EN ARGENT ; DISTRIBUTION DISSIMULÉE DE BÉNÉFICES ; FORTUNE MOBILIÈRE ET SON REVENU(DOUBLE IMPOSITION) ; SOUSTRACTION D'IMPÔT ; AMENDE ; DÉNONCIATION SPONTANÉE
Normes : LPA.69.al1; LIFD.143.al1; LPFisc.51; LIFD.3.al1; LIFD.6.al1; LIFD.7.al1; LIFD.20.al1.letc; aLCP.2.al1.leta; aLCP.16.al1.leta; aLCP.16.al2.leta; aLCP.26.al2; aLCP.14.al1; aLCP.16.al2.letf; aLIPP-I.2.al1; aLIPP-I.5.al1; aLIPP-I.6; aLIPP-IV.6.letc; LIFD.175; LPFisc.69
Résumé : Rappels d'impôts concernant des revenus non déclarés acquis à l'étranger. Détermination du caractère dépendant ou indépendant d'une activité de consultant à temps partiel, exercée par un contribuable domicilié en Suisse pour le compte d'une société sise au Nigéria, dont il est l'actionnaire majoritaire et dont il a précédemment été le directeur. Qualification d'activité lucrative indépendante retenue en l'espèce, en raison de l'absence de lien de subordination du contribuable vis-à-vis de la société. Admission également de ce que cette activité s'est exercée par le biais d'une entreprise sise à l'étranger, en raison de locaux propres et de personnel travaillant sur place pour le compte du contribuable. Exonération partielle des honoraires perçus par le biais de cette entreprise (avec réserve de progressivité) et reprise du solde imposé en tant que rendement de la fortune mobilière, s'agissant d'une prestation appréciable en argent, soit d'une rémunération excessive versée en raison de la seule qualité d'actionnaire du contribuable. Confirmation du principe et de la quotité des amendes infligées par l'AFC pour soustraction consommée d'impôts, une dénonciation spontanée du contribuable ne pouvant être retenue en l'espèce.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1921/2008-ICC ATA/687/2013

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 15 octobre 2013

 

dans la cause

 

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

contre

Monsieur et Madame D______
représentés par Mes Dominique Gay et Jérôme Meyer, avocats

et

ADMINISTRATION FéDéRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 31 octobre 2011 (JTAPI/1211/2011)


EN FAIT

1) D'origine hongroise, naturalisé nigérian en 2008, Monsieur D______ est ingénieur électricien de formation.

2) En 1989, il a fondé la société X______Ltd (ci-après : X______Ltd), au Nigeria (Kaduna), où il résidait avec son épouse Madame D______, de nationalité nigériane.

Il en était l'actionnaire majoritaire, l'un des administrateurs et le directeur général.

3) Par contrat du 1er janvier 1995, X______Ltd a renouvelé son engagement au poste de directeur général (managing director).

M. D______ devait s'acquitter de toutes les tâches et devoirs relevant de ses fonctions (art. 2 et 3), dont il devait rendre directement compte au conseil d'administration de la société (art. 4). Il devait se consacrer exclusivement aux affaires de la société (art. 8) et était soumis à un devoir de confidentialité subsistant à l'échéance du contrat (art. 13).

Son salaire mensuel, payable treize fois l'an (art. 20), s'élevait à USD 20'000.- (art. 6), auquel s'ajoutaient diverses prestations en nature (prise en charge des frais médicaux selon l'art. 12, des frais de scolarité des enfants selon l'art. 14, financement de billets d'avion aller-retour pour la Hongrie à raison d'une fois par an selon l'art. 15, prise en charge des frais professionnels selon l'art. 17, mise à disposition d'une maison indépendante avec personnel de maison et d'un véhicule selon les art. 18 et 19).

Le contrat réglait également les délais de congé (art. 5), le droit aux vacances (art. 16) et la prévoyance professionnelle en cas de décès (art. 11).

4) Le 31 janvier 1997, M. D______ a été nommé consul général honoraire de la République de Hongrie à Kaduna.

5) Dès 1999, X______Ltd n'a pas pu obtenir le renouvellement du permis de travail de M. D______, la législation nigériane ne permettant pas aux entreprises d'engager des étrangers pour une période supérieure à dix ans.

Par courrier du 23 novembre 2000, répondant à une demande de renouvellement de quota des postes d'expatriés d'X______Ltd, le Ministère fédéral des affaires intérieures de la République fédérale du Nigéria a pris acte du retrait de son directeur général.

6) Le 18 février 1999, M. D______ a obtenu un permis de travail, délivré par le Ministère fédéral des industries nigérian, l'autorisant à exercer toutes sortes d'activités de conseil en matière d'ingénierie électrique, en gestion, en planification et élaboration d'électrification rurale.

7) A compter de cette date, l'intéressé a exercé une activité de consultant pour le compte d'X______Ltd, dont il demeurait l'actionnaire majoritaire.

8) Le 12 avril 1999, M. D______ a constitué la société Y______ (Switzerland) S.A. sise à Genève (ci-après : Y______), dont il a été le directeur jusqu'à sa dissolution par décision de l'assemblée générale du 24 avril 2008.

Selon son inscription au registre du commerce, cette société, dont Monsieur T______ était l'administrateur, avait pour but la formation technique, les services administratifs et d'ingénierie notamment liés à des projets de développement et d'entreprise à l'échelle internationale, les acquisitions au niveau international et la collaboration avec d'autres entreprises, l'engagement de personnel qualifié, la collaboration avec les activités du groupe X______LTD depuis la Suisse et/ou la liaison avec des entreprises en Suisse, ainsi que les activités en relation avec les précédentes.

9) Le 14 septembre 1999, M. D______ s'est installé à Genève au bénéfice d'une autorisation de séjour de type B.

10) Le 2 novembre 1999, il a retourné au service de l'impôt à la source de l'administration fiscale cantonale (ci-après : l'AFC-GE) le « questionnaire fiscal concernant les étrangers au bénéfice d'un permis de séjour », en y indiquant qu'il percevait des revenus autres que ceux découlant de son activité en Suisse à hauteur de CHF 50'000.- et qu'il était propriétaire de deux maisons au Nigéria, respectivement en Hongrie, d'une valeur de CHF 1'200'000.-.

Sur cette base, M. D______ et son épouse ont été inscrits au rôle ordinaire de l'AFC-GE.

11) Le 5 janvier 2000, M. D______ et X______Ltd ont formalisé leur nouveau mode de collaboration par la conclusion d'un contrat de conseils-services en management.

En sa qualité de consultant, M. D______ s'engageait à fournir des conseils dans les affaires générales et techniques de la société. Il devait exercer cette activité au Nigéria, en étroite coordination avec le directeur général pour les affaires de gestion, ainsi qu'avec le chef de projet pour les domaines techniques. La nouvelle équipe de direction de la société visait à obtenir une amélioration du processus de soumission des offres, d'établissement et d'exécution des contrats. Elle entendait développer de nouveaux champs d'activités dans le cadre desquels M. D______ devait fournir des conseils techniques et autres conseils professionnels (art. 1.2).

M. D______ ne devait pas participer aux affaires courantes de la société, son activité consistant exclusivement à obtenir et à transmettre toute information pertinente en rapport avec les procédures de soumission d'offres, d'établissement de contrats et de supervision (art. 2.1). La société s'engageait à suivre ses conseils en la matière, ainsi que ceux relatifs aux procédures de planification et d'évaluation, y compris l'aide à la bonne réputation et les procédures de bienfaisance si nécessaire (art. 2.2). M. D______ n'était pas habilité à signer, modifier ou résilier, que ce soit pour son compte ou pour le compte de la société, un ancien ou nouveau contrat conclu entre celle-ci et des parties contractantes. Il n'était pas en droit de faire des déclarations de nature juridique au nom de la société (art. 2.3). Il devait apporter son aide dans les rapports de la société avec le Ministère fédéral de l'énergie et de l'acier à Abuja pour la conclusion de contrats d'électrification rurale, ainsi qu'avec le Ministère d'état du développement rural à Kaduna et les Etats de Yobe et Zamfara (art. 2.4).

Pour ses activités, M. D______ percevrait USD 360'000.- par année civile, avant déduction de l'impôt à la source dû sur ce montant au taux en vigueur au moment du paiement (art. 3.1). Au cas où cette rémunération ne pourrait pas être versée en monnaie étrangère, le paiement serait effectué en monnaie locale, la conversion étant faite au risque de M. D______ (art. 3.4).

Le contrat était valable jusqu'au 31 décembre 2005, sauf résiliation à la demande de l'une ou l'autre des parties contractantes avec un préavis de six mois (art. 4.1) ou renouvellement par les parties pour une année civile (art. 4.3).

12) Par décision de son assemblée générale extraordinaire du 18 décembre 2000, X______Ltd a révoqué le mandat d'administrateur de M. D______.

13) Dans leur déclaration fiscale définitive pour l'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) 2000 et pour l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD) (période transitoire) du 4 octobre 2000, M. D______ et son épouse (ci-après : les contribuables) ont déclaré n'avoir perçu aucun revenu en 1999. A compter du 1er février 2000, M. D______ avait perçu un salaire annuel de CHF 180'000.- de la part d'Y______ S.A.

14) Le 15 novembre 2001, l'AFC-GE leur a notifié un bordereau de taxation définitive pour l'ICC 2000 s'élevant à CHF 21'259.-, compte tenu d'un revenu imposable de CHF 70'531.- au taux de CHF 143'249.- et d'une fortune imposable de CHF 45'587.- au taux de CHF 1'550'000.-.

15) Dans leur déclaration fiscale 2001-A (brèche de calcul) du 1er octobre 2001, les contribuables ont déclaré un revenu brut de CHF 165'000.-, correspondant au salaire perçu par M. D______ pour son activité dépendante auprès d'Y______. Sous la rubrique « Immeubles », ils ont mentionné une villa acquise le 16 août 2000 sise à Veyrier, d'une valeur de CHF 1'080'000.-.

16) Dans leur déclaration fiscale 2001-B du 28 août 2002, les contribuables ont fait état d'un revenu brut de CHF 150'000.- provenant de l'activité dépendante de M. D______ auprès d'Y______. Aucun autre immeuble que celui situé à Veyrier n'était déclaré. La fortune mobilière du couple était essentiellement constituée de comptes détenus auprès de l'UBS S.A., ainsi que par l'avance et le compte courant du contribuable auprès d'Y______. Le revenu imposable s'élevait à CHF 126'967.- pour l'ICC, à CHF 136'837.- pour l'IFD et la fortune imposable à CHF 990'545.-.

17) Le 20 juin 2003, l'AFC-GE a notifié aux contribuables un bordereau de taxation définitive pour l'ICC 2001-B de CHF 22'988,50, compte tenu d'un revenu et d'une fortune imposables de, respectivement, CHF 104'751.- et CHF 1'082'017.-.

Le même jour, elle leur a notifié un bordereau de taxation définitive pour l'IFD 2001 de CHF 3'242.-, compte tenu d'un revenu imposable de CHF 111'500.-.

18) Dans leur déclaration fiscale 2002 du 29 septembre 2003, les contribuables ont déclaré un revenu brut de CHF 150'000.- provenant de l'activité dépendante de M. D______ auprès d'Y______. Aucun autre immeuble que celui situé à Veyrier n'était mentionné. Comme pour la période fiscale 2001-B, la fortune mobilière des contribuables était constituée de comptes détenus auprès de l'UBS, d'actions et d'un compte courant de la société Y______ S.A. sise à Genève (également fondée par le contribuable et désormais en liquidation), ainsi que d'avances et d'un compte courant auprès d'Y______. Le revenu imposable s'élevait à CHF 139'722.- pour l'ICC, respectivement à CHF 151'382.- pour l'IFD, pour une fortune imposable de CHF 4'903'001.-.

19) Le 26 janvier 2004, l'AFC-GE a notifié aux contribuables un bordereau de taxation définitive pour l'ICC 2002 de CHF 53'358,90, compte tenu d'un revenu et d'une fortune imposables de CHF 140'790.-, respectivement de CHF 3'207'828.-.

Le même jour, elle leur a notifié un bordereau de taxation pour l'IFD 2002 d'un montant de CHF 6'244.-, compte tenu d'un revenu imposable de CHF 139'000.-.

20) Par courrier du 22 novembre 2004, Madame N______, cheffe du service de la taxation B auprès de l'AFC-GE, a imparti aux époux D______ un délai au 2 décembre 2004 pour remplir, dater et signer une déclaration concernant l'ICC et l'IFD 1999, pour compléter l'annexe concernant leurs biens immobiliers, notamment ceux se trouvant au Nigéria et en Hongrie, pour indiquer s'ils percevaient d'autres revenus de sources étrangères et produire les éventuels justificatifs d'imposition de ces derniers.

21) Le 10 décembre 2004, M. D______ a donné procuration à M. T______ afin qu'il agisse en son nom et pour son compte auprès de l'AFC-GE.

22) Par courrier du 17 décembre 2004, M. T______ a répondu à Mme N______ pour le compte des époux D______.

Faisant suite à sa lettre du 22 novembre 2004 et aux deux entretiens téléphoniques qu'il avait eus avec ses services, il lui remettait les bordereaux de taxation et de paiement d'impôts de ses mandants à Budapest. M. D______ se trouvait au Nigéria d'où il ramènerait les justificatifs de paiement d'impôts à Kaduna. A son retour, il fournirait également le reste des pièces demandées.

23) Les contribuables n'ont pas retourné leurs déclarations fiscales 2003 et 2004 dans les délais, de sorte qu'ils ont été taxés d'office.

24) Le 21 janvier 2005, l'AFC-GE leur a notifié un bordereau de taxation d'office pour l'ICC 2003 de CHF 28'280,85, fondé sur un revenu et une fortune imposables estimés à CHF 115'226.-, respectivement à CHF 1'190'219.-.

Le même jour, elle leur a notifié un bordereau de taxation d'office pour l'IFD 2003 de CHF 2'551.-, compte tenu d'un revenu imposable de CHF 117'000.-.

25) Par courrier du 13 octobre 2005, l'AFC-GE a informé les contribuables de l'ouverture d'une procédure en rappel d'impôts pour les années fiscales 2000, 2001-B, 2002 et 2003 s'agissant de l'ICC et 1999-2000, 2001-B, 2002 et 2003 s'agissant de l'IFD.

Suite à une information, elle avait constaté qu'un certain nombre d'éléments de leur revenu et de leur fortune n'avaient pas été déclarés ou que leur imposition avait été établie d'office.

Elle leur impartissait un délai au 2 novembre 2005 pour produire :

- les justificatifs des revenus provenant d'une activité lucrative en Hongrie pour les années 1999 à 2003 (le cas échéant) ;

- l'acte d'achat de leurs biens immobiliers sis en Hongrie et au Nigéria pour une valeur d'environ CHF 1'200'000.- ;

- le cas échéant, les justificatifs des intérêts et des dettes hypothécaires concernant lesdits biens immobiliers pour les années 1999 à 2003 ;

- les relevés bancaires concernant l'intégralité de leur patrimoine mobilier indiquant le capital et les intérêts au 31 décembre des années 1999 et 2003 ;

- les justificatifs indiquant la provenance des fonds ayant servi à financer l'achat du bien immobilier sis à Veyrier sous déduction du prêt hypothécaire de CHF 500'000.- accordé par la I______ ;

- toute explication concernant la provenance des fonds leur ayant permis de rembourser, dans le courant de l'année 2002, le prêt hypothécaire de CHF 500'000.- mentionné ci-dessus ;

- leur déclaration fiscale 2003 dûment remplie, datée et signée, munie des justificatifs concernant les revenus et les déductions qu'ils pourraient faire valoir.

26) Le 28 octobre 2005, l'AFC-GE a notifié aux contribuables un bordereau de taxation d'office pour l'ICC 2004 de CHF 32'738.-, fondé sur un revenu et une fortune imposables estimés à CHF 126'759.-, respectivement à CHF 1'309'241.-.

Le même jour, elle leur a notifié un bordereau de taxation d'office pour l'IFD 2004 de CHF 4'983.-, compte tenu d'un revenu imposable estimé à CHF 129'300.-

27) Les contribuables n'ont pas contesté les différents bordereaux mentionnés ci-avant qui sont, partant, entrés en force.

28) Le 31 octobre 2005, M. D______, accompagné de son mandataire M. T______, a rencontré des représentants de l'AFC-GE.

En cette occasion, il aurait admis percevoir des revenus d'une activité exercée à l'étranger pour un montant annuel de CHF 600'000.- et posséder un immeuble en Hongrie, ainsi qu'au Nigéria. Il aurait en particulier reconnu avoir reçu d'X______Ltd un montant annuel de USD 360'000.- pour ses activités de consultant exercées durant les années 2000 à 2004, sous déduction d'une retenue à la source de 25%, et n'avoir pas déclaré ces revenus.

29) Par courrier du 3 novembre 2005, l'AFC-GE a informé les contribuables que la procédure en rappel d'impôts ouverte le 13 octobre 2005 était étendue à l'ICC et l'IFD dus pour l'année 2004.

Les déclarations fiscales 2003 et 2004 leur étaient à nouveau transmises, afin qu'ils les remplissent d'ici au 30 novembre 2005, justificatifs à l'appui.

30) Dans leurs déclarations fiscales 2003 et 2004 remplies à la demande de l'AFC-GE, les contribuables ont fait état, pour chacune des deux années, d'un revenu brut de l'activité dépendante s'élevant à CHF 120'000.-, ainsi que d'honoraires de gestion (management fees) versés par X______LTD à hauteur de CHF 333'909.-, respectivement CHF 307'017.-, ces montants représentant la contre-valeur en francs suisses de 75% de USD 360'000.-. En sus de leur villa à Veyrier, ils ont en outre déclaré un immeuble à Kaduna, ainsi qu'un autre à Budapest d'une valeur de CHF 600'000.- chacun.

Un certificat de salaire d'Y______ et une attestation d'X______Ltd datée du 14 novembre 2005 étaient produits en annexe. Selon cette attestation, des « management fees » s'élevant à USD 360'000.- avaient été annuellement versés à M. D______, administrateur d'X______Ltd, de 2000 à 2004. L'impôt à la source avait été prélevé à hauteur de 25%.

31) Par courrier du 10 janvier 2006, X______Ltd a confirmé à M. D______ la fin de son contrat de consulting en management, décidée d'un commun accord en prévision de la retraite prochaine de l'intéressé.

32) Par courrier du 23 mars 2006, l'AFC-GE a informé les contribuables qu'après examen et nouveau calcul, des erreurs de transcription avaient été constatées, soit lors des taxations ordinaires, soit lors des taxations établies d'office, concernant leur commune professionnelle et de domicile. Ces erreurs avaient été corrigées.

Concernant le revenu réalisé au Nigéria, en l'absence d'une convention de double imposition entre la Suisse et cet Etat, il y avait lieu d'imposer ce salaire sur la commune de domicile en retranchant les impôts payés au Nigéria à titre d'acquisition du revenu, liés aux frais professionnels, comme le prévoyait la lettre circulaire n° 5 de l'Administration fédérale des contributions (ci-après : AFC) du 6 janvier 1997, reprise et citée dans les dispositions de l'art. 32 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11).

S'agissant des biens immobiliers sis à l'étranger, une valeur locative avait été calculée, dès la période fiscale 2001-B à 4,5% de l'estimation fiscale desdits biens. Des frais d'entretien avaient été admis à hauteur de 20% de la valeur locative fédérale et de 17,5% sur la valeur locative cantonale prise en considération à 60% après un amortissement admis de 40% en fonction des années d'occupation.

Suivait le détail des reprises d'impôts ICC et IFD envisagées pour les années litigieuses.

33) Par courrier du 18 mai 2006, M. D______ a fait valoir qu'il exerçait ses activités professionnelles au Nigéria au sein d'un établissement stable en tant qu'indépendant. Ses revenus n'étaient donc pas taxables en Suisse et ne devaient servir qu'à déterminer son taux d'imposition. Au Nigéria, les impôts étaient essentiellement prélevés à la source. Les déclarations fiscales de personnes physiques étaient rares et la tenue d'une comptabilité pour les indépendants n'était pas requise.

Il utilisait un papier à lettre dont l'en-tête portait l'adresse de son lieu d'habitation et d'exploitation « D______ Msc., ELECTRICAL ENGINEERING AND CONSULTING, ______,______V______ road, Kaduna, Nigeria », bureau dont des photographies étaient produites. Il supportait les coûts de fonctionnement de l'exercice de sa profession indépendante, comme l'attestaient des factures du 13 février 2004 concernant l'achat de matériel informatique, du 26 mars 2004 concernant l'achat de mobilier de bureau, d'électricité du 28 février 2004 et du 31 mars 2004, ainsi qu'une note d'un hôtel à Lagos du 7 mars 2004. En cas de besoin, il pourrait en outre produire des quittances de rémunération (non déclarée) de sa secrétaire.

Il produisait en outre une convention de conseils-services (consulting service agreement), conclue le 15 janvier 2004 entre W______Ltd à Kaduna (The employer) et lui-même (The consultant). Selon ce document, il devait assister la société nigériane en cause dans son projet d'électrification de la zone rurale de Zaria Town, à conclure et exécuter pour le compte du gouvernement nigérian pour un montant d'environ USD 5'500'000.- (art. 1.1). A ce titre, il n'était pas habilité à signer, modifier ou résilier, pour son compte ou celui de la société, un contrat antérieur conclu par celle-ci avec des cocontractants. Il ne pouvait faire aucune déclaration juridique au nom de la société (art. 2.3). Sa rémunération était fixée à USD 75'000.- ou tout paiement partiel du contrat payé à la société par son cocontractant au pro rata (art. 3.1).

Des courriers de la société Z______Ltd du 27 février 2004, respectivement de la société A______Ltd du 5 mai 2004, faisant appel à ses compétences en matière d'ingénierie électrique et adressés au ______, ______V______ road à Kaduna, étaient également joints à son envoi.

34) Le 6 juillet 2006, M. D______ a réintégré le conseil d'administration d'X______Ltd.

35) Le 7 juillet 2006, l'AFC-GE a clôturé la procédure de rappel d'impôts 2000 à 2004 dirigée contre les contribuables. Après examen des pièces produites, elle ne pouvait admettre le caractère indépendant de l'activité exercée par M. D______ au Nigéria.

Neuf bordereaux rectificatifs étaient notifiés aux époux D______, comportant les suppléments d'impôts suivants :

ICC

Supplément d'impôts

Intérêt de retard

2000

CHF 190'204,10

CHF 33'773,50

2001-B

CHF 234'314,75

CHF 19'366,10

2002

CHF 184'809,35

CHF 11'424,30

2003

CHF 177'842,65

CHF 7'229,30

2004

CHF 161'622,80

CHF 2'421,65

IFD

Supplément d'impôts

Intérêt de retard

2001-B

CHF 80'733,50

CHF 8'537,55

2002

CHF 73'569,70

CHF 6'072,55

2003

CHF 63'353,40

CHF 3'363.-

2004

CHF 56'810,50

CHF 1'027,30

L'AFC-GE se réservait en outre le droit de leur infliger des amendes pour soustraction d'impôts.

36) Le 4 août 2006, l'AFC-GE a infligé aux contribuables une amende de CHF 711'500.- pour soustraction d'ICC 2000, 2001-B, 2002, 2003 et 2004, ainsi qu'une amende de CHF 205'800.- pour soustraction d'IFD 2001-B, 2002, 2003 et 2004.

Des éléments de revenu et de fortune n'avaient pas été déclarés pour les périodes en cause où des impositions avaient été établies d'office. Pour tenir compte de certains motifs évoqués, le montant des amendes avait été réduit au ¾ des impôts soustraits.

37) Le 7 août 2006, les contribuables ont élevé réclamation contre les neufs bordereaux rectificatifs d'impôts précités.

Ils faisaient grief à l'AFC-GE de n'avoir pas reconnu le caractère indépendant de l'activité exercée par M. D______ au Nigéria, malgré les évidences fournies. Ils contestaient également le montant des revenus pris en considération, à savoir USD 360'000.-, lequel n'avait pas consisté dans un revenu net, mais au contraire d'un revenu brut dont 25% d'impôt prélevé à la source aurait dû être retranché.

38) Par courrier de leur avocat du 4 septembre 2006, les contribuables ont élevé réclamation contre les bordereaux amendes ICC et IFD reçus le 5 août 2006.

Ils les contestaient pour les mêmes raisons que celles exposées dans leur réclamation contre les bordereaux rectificatifs du 7 juillet 2006. Les reprises d'impôt et amendes provenaient, pour l'essentiel, d'une réintégration dans le revenu imposable en Suisse des revenus que M. D______ avait perçus de son activité indépendante au Nigéria. L'intéressé ne pouvait toutefois pas être considéré comme un employé de sa société X______Ltd. Durant toute la période concernée, cette dernière ne pouvait pas engager des étrangers et avait dû donner la priorité à des travailleurs locaux, raison pour laquelle M. D______ avait exercé son activité en tant que consultant indépendant. Une attestation du Ministère du commerce et de l'industrie de l'Etat de Kaduna du 23 août 2006 le confirmait.

Selon ce document, l'intéressé était actionnaire majoritaire d'X______Ltd, inscrite au registre du commerce d'Abuja depuis 1989. Il en était également l'un des administrateurs. Cette société n'avait pas de quota d'expatriés (permis de travail pour l'engagement d'étrangers) pour des positions dirigeantes, raison pour laquelle elle ne l'employait pas. Compte tenu de ses connaissances spécifiques et de son expérience en ingénierie électrique, M. D______ avait néanmoins obtenu le droit de travailler en tant que consultant indépendant et d'ingénieur conseil. En cette qualité, il était autorisé à conclure, à signer et à agir sur la base de différents contrats de conseils, d'ingénierie et de management dans l'Etat de Kaduna et/ou dans tout autre lieu de la Fédération avec les ministères gouvernementaux de la Fédération ou d'un Etat, des organisations ou des sociétés (y compris X______Ltd) sur une base strictement professionnelle. Les rémunérations, honoraires de conseils ou de management et autres revenus découlant de telles activités de conseils étaient soumis à un impôt à la source.

Les revenus dérivés d'une entreprise à l'étranger n'étaient pas imposables en Suisse. En dépit de cette exonération, de tels revenus devaient néanmoins être déclarés afin que la progressivité des taux soit respectée. C'était ce que M. D______ avait fait en déclarant année après année le revenu de son activité indépendante au Nigéria en tant qu'autre revenu non imposable. Avec son conseiller M. T______, il s'était rendu dans les locaux de l'AFC-GE pour expliquer sa situation et mettre ses taxations en ordre.

Il était résident fiscal en Suisse et au Nigéria, dans la mesure où il passait à peu près la moitié de son temps dans chacun de ces deux pays. Au Nigéria, il payait un impôt à la source de 25% sur ses revenus d'activité indépendante. L'AFC-GE avait toutefois considéré à tort que les honoraires annuels qui lui avaient été payés de 2000 à 2004, soit USD 360'000.-, étaient des montants nets, alors qu'ils s'agissaient de montants bruts. L'intéressé n'avait ainsi perçu que USD 270'000.- par an.

Il contestait tant le principe d'une amende que sa quotité dans la mesure où il n'avait nullement cherché à dissimuler ses revenus, ni même à créer une situation où certains de ceux-ci auraient échappé à toute taxation.

39) Par courrier de leur avocat du 18 septembre 2006, les contribuables ont complété leur réclamation de manière à démontrer que dès 1999, M. D______ n'était plus l'employé d'X______Ltd.

Au Nigéria, les entreprises n'avaient le droit d'engager une personne étrangère que pendant dix ans au plus ; au-delà, ses connaissances et son savoir-faire devaient être transférés à des employés nigérians, afin de lutter contre le chômage.

M. D______ avait créé X______Ltd en 1989 et en était devenu le « Managing Director », de sorte qu'en 1999, la société n'avait plus pu obtenir de permis de travail en sa faveur. Par courrier du 23 novembre 2000, le Ministère fédéral des affaires intérieures avait refusé l'attribution du poste précité à un expatrié. Ce n'était que grâce à son passeport diplomatique que M. D______ avait pu continuer à résider au Nigéria. Le 18 février 1999, il avait obtenu un « Business Permit » et avait ainsi pu continuer à s'occuper de sa société en tant que consultant indépendant, relation qu'il avait formalisée par contrat de conseils-services en management du 5 janvier 2000. La même situation prévalait en 1999, conformément à l'attestation établie par X______Ltd le 12 avril 2000 à teneur de laquelle USD 360'000.-, sous déduction d'un impôt à la source de 25%, avaient été versés à M. D______ l'année en question.

40) Le 31 août 2007, l'AFC-GE a indiqué aux contribuables qu'elle considérait l'activité couverte par le contrat du 5 janvier 2000 comme une activité dépendante, au motif que M. D______ devait notamment suivre les instructions de X______Ltd, qu'il avait perçu une rémunération fixe payée par son employeur, qu'il n'avait pas pris de risque économique et qu'il avait été imposé à la source. Les caractéristiques du permis de séjour de l'intéressé n'étaient pas déterminantes pour la qualification de son activité et ne constituaient qu'un indice parmi d'autres.

L'activité visée par la convention de conseils-services du 15 janvier 2004 conclue avec W______Ltd à Kaduna pouvait également être qualifiée de dépendante, de sorte que la rémunération de USD 75'000.- perçue à ce titre était imposable en Suisse. La taxation 2004 des contribuables serait rectifiée en ce sens, soit en leur défaveur, et l'amende ajustée sur cette base.

Un délai au 15 octobre 2007 leur était imparti pour se déterminer.

41) Le 30 octobre 2007, M. D______, assisté de son avocat, s'est entretenu avec des représentants de l'AFC-GE concernant la qualification de son activité professionnelle au Nigéria.

42) Le 14 décembre 2007, M. D______ a fourni à l'AFC-GE une copie de la traduction anglaise de son contrat de travail du 1er janvier 1995 lorsqu'il était directeur d'X______Ltd, une copie de sa fiche de paie pour le premier trimestre 1998 et un reçu fiscal adressé à X______Ltd par les autorités fiscales nigérianes pour l'impôt sur le revenu prélevé sur son salaire à la même période.

Ces documents démontraient que l'activité et la rémunération de l'intéressé étaient différentes lorsqu'il était directeur salarié, puis conseiller indépendant de la société. Comme directeur salarié, M. D______ était subordonné au conseil d'administration de la société auquel il devait rendre des comptes (art. 4 du contrat du 1er janvier 1995). Il était lié à son employeur par une clause d'exclusivité (art. 8), recevait un salaire en espèces de USD 20'000.- par mois (art. 6), soit environ 1'800'000.- Nairas nigérians, sans compter diverses prestations en nature et la prise en charge, par son employeur, de l'intégralité de ses frais professionnels. Le contrat de consultant du 5 janvier 2000 était totalement différent. Dans l'exercice de cette seconde activité, l'intéressé n'était pas soumis à des contraintes horaires, ne recevait d'ordres de personne et prenait en charge le risque de change, sa rémunération dépendant du paiement des prestations d'X______Ltd par ses cocontractants.

Son changement d'activités avait également entraîné des modifications de sa situation fiscale. En tant que salarié, M. D______ avait été soumis à un impôt sur le revenu perçu selon le système Pay As You Earn (P.A.Y.E) connu dans les pays anglo-saxons, soit prélevé par l'employeur selon un barème progressif qui s'élevait dans son cas à 24% de son salaire en espèces. Les commissions versées aux indépendants étaient en revanche soumises à un impôt à la source (withholding tax) au taux fixe de 25%.

Contrairement aux années précédentes pendant lesquelles il avait été employé par X______Ltd, M. D______ avait donc bien exercé une activité indépendante de 1999 à 2006.

43) Par décisions sur réclamation du 25 avril 2008, l'AFC-GE a maintenu le statut de salarié de M. D______, a modifié le revenu brut (avant prélèvement de l'impôt) réalisé par l'intéressé au sein de X______Ltd de 2000 à 2004, a modifié en défaveur des contribuables la taxation 2004 en y intégrant le revenu réalisé auprès de W______Ltd, a maintenu le principe et la quotité des amendes, tout en en adaptant le montant et les intérêts de retard en fonction des rectifications opérées.

Elle avait inclus dans l'assiette fiscale le revenu provenant de l'activité exercée par M. D______ pour le compte d'X______Ltd. Ce revenu devait être considéré comme provenant d'une activité dépendante, aux motifs que le contrat du 5 janvier 2000 avait été conclu pour une durée de cinq ans (art. 4), qu'il prévoyait une rémunération fixe de USD 360'000.- par année civile (art. 3), qu'il induisait un lien de subordination et une absence d'autonomie vis-à-vis des tiers (art. 2.3) et que M. D______ n'avait pas tenu de comptabilité, ni facturé les montants qui lui avaient été versés. Elle avait en revanche retranché de ces revenus imposables les impôts prélevés par le Nigéria pour chaque année civile, selon les justificatifs remis. Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés ci-dessus, elle avait également inclus dans l'assiette fiscale le revenu provenant de l'activité exercée par M. D______ pour le compte de W______Ltd. Elle avait au surplus rajouté les valeurs locatives liées aux biens immobiliers sis sur le canton de Genève (Veyrier), en Hongrie (Budapest) et au Nigéria (Kaduna). La fortune mobilière des contribuables avait été estimée à CHF 4'000'000.- en fonction des informations données lors de l'entretien du 31 octobre 2005 et des déclarations fiscales remplies par la suite. Les biens immobiliers avaient été estimés à CHF 1'200'000.- pour celui de Genève, à CHF 600'000.- pour celui sis en Hongrie et à CHF 600'000.- également pour celui situé au Nigéria.

La quotité des amendes, fixée aux ¾ de l'impôt éludé, tenait compte de l'importance des montants soustraits, du fait que la soustraction avait duré plusieurs années, des connaissances en fiscalité du mandataire et de la bonne collaboration des contribuables.

Le fait que M. D______ ait cessé d'être le directeur d'X______Ltd pour en devenir le consultant externe dès 1999 entrait en contradiction avec les comptes de cette société pour l'année 2004, sur lesquels l'intéressé avait apposé sa signature en tant que directeur. Le fait que le contrat du 5 janvier 2000 ne prévoyait pas de remboursement des frais de déplacement et de représentation de M. D______ était admissible, dans la mesure où celui-ci travaillait depuis la Suisse, pays dans lequel il résidait. Concernant les assurances sociales, aucun des contrats fournis ne faisait état de retenues prélevées à ce titre sur les rémunérations versées. Les prescriptions de droit du travail nigérianes ne suffisaient pas à modifier, en droit suisse, le caractère dépendant de l'activité exercée. Il en allait de même de l'argument tenant dans le risque de perte de change, à charge de l'intéressé, en cas de versement de son salaire en monnaie locale, ce d'autant que les attestations fournies ne mentionnaient que des montants versés en USD sans perte de change.

44) Sur cette base, l'AFC-GE a notifié aux contribuables neufs bordereaux de rappel d'impôt rectificatifs, ainsi que deux bordereaux « amende » d'un montant de CHF 566'650.- (ICC) et de CHF 156'000.- (IFD).

Les montants d'impôts supplémentaires se présentaient comme suit :

ICC

Supplément/Dégrèvement

Intérêt de retard

2000

CHF 134'192.-

CHF 23'827,85

2001-B

-CHF 51'710,35

CHF 15'418,50

2002

-CHF 47'669,85

CHF 8'649.-

2003

-CHF 40'106,20

CHF 5'662,65

2004

-CHF 6'078,55

CHF 2'332,95

IFD

Supplément/Dégrèvement

Intérêt de retard

2001-B

-CHF 27'686,75

CHF 6'512,55

2002

-CHF 19'507,60

CHF 4'585,15

2003

-CHF 16'365,15

CHF 2'538,10

2004

-CHF 2'434,65

CHF 984,10

45) Par acte du 26 mai 2008, les contribuables ont recouru contre les décisions sur réclamation du 25 avril 2008 auprès de la Commission cantonale de recours en matière d'impôts et de la Commission cantonale de recours de l'impôt fédéral direct, devenues depuis le 1er janvier 2011 le Tribunal administratif de première instance (ci-après le TAPI), en concluant à leur annulation « sous suite de frais et dépens ».

Ils contestaient les reprises afférentes aux revenus perçus par M. D______ pour ses activités au Nigéria. L'intéressé exploitait une entreprise indépendante dans ce pays, de sorte que les revenus provenant de cette activité ne pouvaient être pris en considération que pour la détermination du taux d'imposition. M. D______ menait ses activités au Nigéria selon une organisation propre. Selon un courrier daté du 27 février 2004, Z______Ltd avait sollicité ses services pour l'installation d'un générateur dans son usine à Kaduna. Le 5 mai 2004, A______Ltd avait également requis son assistance pour la planification, la conception et la rétribution de l'alimentation électrique de son école de formation professionnelle et technique à Kaduna. Ces différents courriers étaient adressés à son bureau de la rue V______ où il exerçait ses activités qui étaient reconnaissables sur le marché, puisque plusieurs sociétés s'étaient adressées à lui. Il n'était pas soumis à des contraintes horaires, ni à des jours de présence. Il était libre de choisir et prenait à sa charge les moyens à mettre en oeuvre pour atteindre les buts recherchés par ses mandants. Il n'était pas subordonné aux organes de ses clients. Selon l'art. 2.2 du contrat conclu le 5 janvier 2000, X______Ltd s'était engagée à suivre ses conseils et non l'inverse. L'art. 2.3 de ce même contrat était typique de l'activité d'un consultant indépendant, lequel ne pouvait habituellement pas représenter ses clients, et n'illustrait pas son absence d'indépendance vis-à-vis des tiers. Il mobilisait son propre travail et celui de sa secrétaire, ainsi qu'un certain capital constitué de son matériel informatique et de bureau, ainsi que d'une grande pièce de sa villa à Kaduna. Il exerçait ses activités de consultant pour son compte et à ses propres risques. Bien que les services rendus à X______Ltd fussent rémunérés sur une base annuelle, il n'était pas défrayé et assumait ses propres charges, comme le risque que ces dernières soient supérieures à la rémunération convenue. Les attestations établies par X______Ltd au sujet de sa rémunération laissaient à tort entendre que celle-ci lui avait été versée en raison de sa qualité d'administrateur. Le contrat conclu démontrait néanmoins qu'il avait été rémunéré pour ses activités de conseil auprès des nouveaux dirigeants de la société. Il signait les comptes de celle-ci en tant qu'administrateur (director en anglais) et non en tant que directeur (manager en anglais). En 1999, il avait non seulement quitté son poste de directeur au sein d'X______Ltd, mais avait également radicalement modifié ses activités pour celle-ci. La rémunération convenue avec W______Ltd n'était pas fixe, mais dépendait du succès de ses démarches dont il assumait seul le risque (art. 3.1 du contrat du 15 janvier 2004). De 2000 à 2004, il avait donc exercé une activité indépendante au travers d'un établissement stable lorsqu'il séjournait au Nigéria et s'était concentré sur ses activités de directeur d'Y______ lorsqu'il séjournait en Suisse.

Ils ne contestaient pas le principe d'une amende mais considéraient que celle-ci devait être réduite au cinquième de l'impôt soustrait. Lors de leur arrivée à Genève, ils ne connaissaient rien de la fiscalité suisse. Ils s'étaient adressés à une fiduciaire qui leur avait affirmée s'être renseignée auprès de l'AFC-GE et leur avait indiqué qu'ils n'avaient pas à déclarer les revenus de consultant de M. D______ réalisés au Nigéria. Après leur taxation d'office en 2004, ils avaient réalisé que leurs affaires fiscales n'étaient sans doute pas en règle et avaient demandé à M. T______ d'intervenir auprès de l'AFC-GE pour exposer l'ensemble de leur situation, tant en Suisse qu'en Hongrie et au Nigéria, ce que ce dernier avait fait le 17 décembre 2004, soit avant l'ouverture de la procédure de soustraction d'impôts en 2005. M. D______ avait ensuite rencontré les représentants de l'AFC-GE et leur avait fourni tous les renseignements demandés. Il avait toujours eu l'intention de respecter ses obligations fiscales et avait spontanément annoncé à l'AFC-GE que ses déclarations étaient inexactes et incomplètes.

46) Le 12 mars 2009, l'AFC-GE a conclu au rejet des recours.

Pour qu'une activité lucrative puisse être qualifiée d'indépendante en droit fiscal, les conditions d'indépendance personnelle et d'indépendance économique devaient être cumulativement remplies. Selon le contrat du 5 janvier 2000, M. D______ avait perçu une rémunération annuelle forfaitaire de USD 360'000.- pour ses activités au sein d'X______Ltd et la couverture de ses charges. Il se trouvait, sur ce point, dans la même situation qu'un administrateur, dont la liberté économique était limitée et qui n'exerçait pas d'activité à ses risques et profits à teneur de la jurisprudence. Sa rémunération ne constituait pas des honoraires de consultant externe, mais des honoraires d'administrateur, comme le mentionnait l'attestation d'X______Ltd du 14 novembre 2005 (« management fees »). L'intéressé ayant été l'actionnaire et le directeur de cette société jusqu'en 1998, la question de savoir si le versement annuel de USD 360'000.- ne constituait pas une distribution dissimulée de dividende pouvait même se poser. Une telle rémunération apparaissait excessive, compte tenu du fait que le contribuable exerçait à la même période une activité de directeur auprès d'Y______, et ne pouvait s'expliquer que par la relation d'actionnaire le liant à X______Ltd.

Il était douteux que le contrat du 5 janvier 2000 puisse, sur le plan civil, être qualifié de contrat de mandat. Lorsqu'un contrat portait sur des prestations caractéristiques des professions dites libérales, où une certaine autonomie était admise dans les deux situations de contrat de travail et de contrat de mandat, la distinction entre service indépendant et service dépendant était difficile à opérer. La difficulté s'était encore accrue avec l'apparition des collaborateurs libres (freie Mitarbeiter / freelancer), en raison d'un besoin accru de flexibilité des employeurs et de modifications sociologiques dans la conception du travail de la part des employés. Les travailleurs libres se définissaient comme des personnes indépendantes agissant seules et mettant à disposition d'un autre entrepreneur leur activité personnelle, sans l'aide d'un tiers, pendant un temps plus ou moins long, de manière exclusive ou presque, étant précisé qu'ils demeuraient autonomes dans l'organisation de leur travail, tant d'un point de vue temporel que matériel. Malgré l'absence de lien de subordination, M. D______ se trouvait dans une situation très proche de celle du travailleur dans le cadre d'un contrat de travail. Le contrat du 5 janvier 2000 prévoyait un délai de résiliation de 6 mois qui n'était pas caractéristique d'un contrat de mandat, ainsi qu'une rémunération équivalant à un salaire. Hormis durant l'année 2004, ce « mandat » avait été exclusif et avait représenté le 80% des revenus annuels de l'intéressé. La même analyse pouvait être effectuée pour le contrat conclu avec W______Ltd le 15 janvier 2004 qui prévoyait des conditions de rémunération similaires. La liberté économique de M. D______ y était également limitée, ce dernier n'exerçant pas l'activité prévue à ses risques et profits.

A considérer même que les activités de M. D______ au Nigéria puissent être qualifiées d'indépendantes, les revenus en découlant n'en seraient pas moins imposables à Genève, soit au lieu de son domicile, puisque l'existence d'un établissement stable à Kaduna n'avait pas été prouvée. Aucune réponse n'avait apparemment été donnée aux lettres d'Z______Ltd et A______ (Nig.) Ltd qui, en 2004, avaient sollicité les services de M. D______. Ce dernier avait produit des factures concernant l'acquisition de matériel informatique et de meubles de bureau, datées respectivement des 13 février et 26 mars 2004, tandis que les deux photos de son prétendu bureau n'avaient aucune valeur probante. Aucun justificatif concernant les charges relatives à ces locaux ou les frais de personnel n'avait été fourni. Les recourants n'avaient jamais prouvé que M. D______ séjournait six mois par année au Nigéria comme ils le prétendaient.

La quotité de l'amende fixée au ¾ de l'impôt éludé était parfaitement justifiée. M. D______ n'avait annoncé ses revenus découlant de ses activités au Nigéria et sa fortune mobilière que le 31 octobre 2005, soit après l'ouverture d'une procédure pour soustraction d'impôt.

47) Le 29 mai 2009, les contribuables ont répliqué, persistant dans leurs conclusions du 26 mai 2008.

Les faits relatés par l'AFC-GE au sujet de l'amende étaient inexacts. Sur demande de M. D______, M. T______ avait pris contact avec la cheffe du service de la taxation B, Mme N______, dans la deuxième moitié de l'année 2004. Cette dernière lui avait présenté M. U______ qui travaillait alors au service de la vérification. M. T______ lui avait expliqué que M. D______ était propriétaire d'une villa au Nigéria et en Hongrie et qu'il exerçait une activité indépendante dans ce premier pays où il résidait la moitié de l'année environ. Faisant suite à une demande de renseignements de novembre 2004, M. T______ avait alors fourni à Mme N______ les justificatifs des impôts payés par M. D______ à Budapest et lui avait expliqué que celui-ci lui fournirait les justificatifs du paiement de ses impôts au Nigéria concernant son activité indépendante. Ce n'était que suite à un deuxième entretien de M. T______ avec M. U______, en présence de M. D______, que celui-là avait formellement ouvert la procédure en rappel d'impôt. Par l'intermédiaire de M. T______, M. D______ s'était donc bien spontanément adressé à l'AFC-GE pour régulariser sa situation.

Lorsque M. D______ avait cessé d'être employé par X______Ltd, il avait également été écarté de son conseil d'administration par décision du 19 février 2000 versée à la procédure. Il n'avait pu reprendre son activité d'administrateur qu'en 2006, soit lorsqu'il avait cessé son activité indépendante de consultant. « Managment fees » ne signifiaient pas honoraires d'administrateurs, mais honoraires de gestion. Comme l'attestait le passeport hongrois de M. D______ du 18 mai 2004, ce dernier bénéficiait de visas annuels qui lui permettaient d'entrer à plusieurs reprises au Nigéria, pays dans lequel il passait plusieurs mois par année. Dans ses locaux professionnels situés dans sa maison à Kaduna, il employait une secrétaire à plein temps, un chauffeur et un contrôleur-qualité à temps partiel, dont les déclarations étaient produites en annexe.

Dans le cadre de son activité de consultant externe, M. D______ conseillait les dirigeants d'X______Ltd et ses autres mandants dans la négociation de contrats, les mesures d'exécution de ceux-ci, leur fournissait des conseils techniques en sa qualité d'ingénieur électricien, les aidait dans leurs calculs des prix de revient et de faisabilité et leur faisait part de son expérience en matière économique (gestion des coûts, approvisionnement, prix de revient, marges bénéficiaires, financement, etc). Il avait répondu positivement à la demande d'Z______Ltd, comme l'attestait son courrier à cette société du 12 mars 2004, et avait dû décliner celle d'A______Ltd par courrier du 12 mai 2004. Il rencontrait les représentants d'X______Ltd une fois par semaine à son bureau. Dès 2000, il n'était plus lié à cette société par une clause d'exclusivité. Si X______Ltd avait été son seul mandant jusqu'en 2004, c'était parce qu'il n'avait pas trouvé d'autres clients dans l'intervalle. M. D______ ne recevait aucune instruction particulière de ses mandants qu'il conseillait en organisant librement son travail. Ses activités n'avaient rien à voir avec celles de collaborateurs libres, soumis aux instructions de leur employeur, ni avec celles d'un administrateur dirigeant et assumant la responsabilité de sa société. Il assumait seul ses charges en personnel, ses frais de bureau et ses frais de voyage, de sorte que, bien que rémunéré sur une base fixe par l'un de ses mandants, il supportait un véritable risque d'entrepreneur, ce d'autant que ses clients n'étaient pas toujours à même de le payer dans les délais convenus.

Sa présence au Nigéria plusieurs mois par an lui avait permis d'acquérir la nationalité nigériane. L'art. 27 de la Constitution nigériane prévoyait que pour acquérir la nationalité de ce pays, une personne sans parenté avec un Nigérian devait notamment démontrer son intention de s'établir au Nigéria et justifier d'une résidence de quinze ans dans ce pays.

Si les employés locaux étaient peu rémunérés au Nigéria, tous les expatriés, ingénieurs, techniciens et autres collaborateurs étrangers qui venaient y travailler recevaient des salaires largement supérieurs à ceux perçus en Europe, compte tenu de l'inconfort et du risque que représentait la vie dans ce pays. X______Ltd pouvait donc légitimement verser à M. D______ la rémunération prévue, compte notamment tenu de l'âge de ce dernier, de son expérience professionnelle et de sa longue connaissance du pays. Une indemnité forfaitaire annuelle de USD 360'000.- n'avait rien d'excessif dans le contexte et ne constituait nullement une distribution dissimulée de dividendes.

48) Les contribuables ont produit trois déclarations faites par-devant un avocat nigérian et en présence de témoins, pour les employés de M. D______.

a. Le 30 avril 2008, Monsieur K______ a déclaré que le contribuable l'employait occasionnellement depuis 2000 en tant que contrôleur-qualité, lorsque ses activités de conseil en ingénierie le nécessitaient. Il le rémunérait pour ses services selon leurs arrangements initiaux.

b. Le 27 avril 2009, Monsieur P______ a déclaré être employé par M. D______ en tant que chauffeur personnel. De 1992 à 1999, soit lorsque l'intéressé siégeait au conseil d'administration d'X______Ltd, il avait été rémunéré par cette société. Quand M. D______ avait quitté celle-ci et commencé à travailler depuis chez lui en tant que consul et consultant indépendant, soit aux alentours de janvier 2000, il l'avait suivi. Depuis lors, M. D______ était son employeur et lui versait un salaire mensuel de NGN 10'000.-.

c. Le 25 mai 2009, Madame J______ a déclaré que M. D______ l'avait engagée en mars 2000 en tant que dactylographe, opératrice informatique et assistante personnelle. Elle l'avait assisté dans ses activités de consul honoraire, ainsi que de consultant en ingénierie et en management, en effectuant divers travaux administratifs, jusqu'à ce que l'intéressé prenne sa retraite en 2006. Depuis lors, elle travaillait en tant que secrétaire privée et effectuait les tâches administratives liées à ses activités de consul honoraire et de recherches scientifiques en matière d'usage et d'application de la lumière polarisée. M. D______ lui versait un salaire de NGN 15'000.- par mois, allocations en sus.

49) Dans sa duplique du 7 juillet 2009, l'AFC-GE a persisté dans ses conclusions du 12 mars 2009.

Les contribuables n'apportaient pas la preuve d'une dénonciation spontanée des soustractions d'impôt en cause. Le courrier de M. T______ du 17 décembre 2004 n'indiquait pas que M. D______ avait omis de déclarer ses revenus découlant de son activité auprès d'X______Ltd. Il répondait à une demande de renseignements de l'AFC-GE pour l'ICC et l'IFD 1999. Aucun élément du dossier ne permettait par ailleurs d'affirmer qu'un entretien, lors duquel M. D______ aurait exprimé des doutes sur l'exactitude de ses déclarations fiscales, avait précédé celui du 31 octobre 2005. La lettre d'ouverture de la procédure en rappel d'impôts du 13 octobre 2005 ne se référait pas non plus à un quelconque entretien préalable.

M. D______ ne fournissait pas de renseignements précis et documentés de sa prétendue activité de consultant au Nigéria. L'attestation d'X______Ltd du 14 novembre 2005 était libellée de la manière suivante : « we hereby certify that the following amounts were paid for management fees to Mr P. D______, Executive Director of our company ». Selon le dictionnaire économique et juridique Français/Anglais, éd. L.G.D.J., 5ème éd., 2000, le terme « management fee » signifiait : indemnité de direction, commission de chef de file, tandis que le terme « executive director » signifiait administrateur à temps plein. Pour autant que l'intéressé ait eu une activité lucrative au Nigéria, celle-ci devait donc être qualifiée de dépendante, puisqu'elle avait été exercée en qualité de directeur ou d'administrateur d'X______Ltd.

Cette activité ne s'était nullement déroulée dans le cadre d'un établissement stable. Les différentes attestations des employés de M. D______, dont la valeur probante était douteuse, entraient en effet en contradiction avec celle d'X______Ltd du 14 novembre 2005.

Compte tenu du salaire qu'il percevait à Genève comme directeur d'R______ , la somme de USD 360'000.- pour six mois d'activité au Nigéria apparaissait excessive, ce d'autant que M. D______ n'avait pas établi à satisfaction de droit qu'il l'avait réellement exercée de 2000 à 2004.

50) Par jugement du 31 octobre 2011 (JTAPI/1211/2011), le TAPI a admis les recours des contribuables et annulé les bordereaux « rappel d'impôt » et « amende » ICC et IFD des 7 juillet 2006, 4 août 2006 et 25 avril 2008.

Le contribuable avait été lié à X______Ltd dès le 1er janvier 1995 par un contrat de travail. Celui-ci avait été remplacé dès le 5 janvier 2000, par un contrat de service de conseil en gestion, puis, dès le 15 janvier 2004, par un contrat de service de conseil avec W______Ltd.

A la lecture des documents contractuels liant les parties à compter du 1er janvier 1995, M. D______, qui exerçait une activité de consultant, n'était pas soumis à des contraintes horaires et ne recevait d'ordres de personne. La question de savoir si, durant cet intervalle, cette activité relevait du contrat de mandat ou du contrat de travail n'avait toutefois pas à être tranchée, la période en cause n'étant pas litigieuse.

Les parties avaient conclu deux autres accords, par lesquels X______Ltd avait recouru au contribuable en raison de ses compétences techniques, dans le cadre d'un projet d'électrification d'une zone rurale (contrat du 15 janvier 2004), respectivement pour assister le management général et technique de l'équipe des employeurs pour une performance plus efficiente et donner des conseils techniques (contrat du 5 janvier 2000). A teneur du second contrat précité, X______Ltd devait suivre les conseils du contribuable dans les domaines du management, des procédures d'offres et de contracter. Une telle clause se révélait totalement opposée au critère de subordination, caractéristique du contrat de travail, dans lequel le travailleur devait suivre les instructions de son employeur. Les relations entre M. D______ et X______Ltd à compter de cette date relevaient ainsi du contrat de mandat, l'activité exercée par le premier devant être qualifiée d'indépendante.

Cette entité faisait partie d'un groupe de sociétés inscrites au registre du commerce au Nigéria. L'un de ses projets - pour lequel elle avait utilisé les compétences du recourant - avait consisté dans l'électrification d'une zone rurale pour le compte du gouvernement nigérian. Au vu de l'activité déployée par X______Ltd et son organisation (une société de capitaux), il ne faisait aucun doute qu'elle entrait dans les catégories des « entreprises » au sens de l'art. 6 al. 1 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11).

Partant, le revenu réalisé par le contribuable au Nigéria devait être exempté des impôts suisses.

51) Par acte du 2 décembre 2011, l'AFC-GE a recouru contre ce jugement, reçu le 11 novembre 2011, auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant à son annulation et à la confirmation de ses décisions du 25 avril 2008.

En annulant l'ensemble des bordereaux de rappel d'impôt et d'amende, le TAPI avait statué ultra petita, en violation de l'art. 69 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). Les reprises, qu'elle avait notifiées aux contribuables pour l'ICC et l'IFD, concernaient non seulement les revenus non déclarés perçus par M. D______ à l'étranger, mais également deux immeubles sis respectivement en Hongrie et au Nigéria, ainsi que de la fortune mobilière, représentant des montants non négligeables. Or, les contribuables n'avaient jamais contesté les reprises d'impôts relatives à ces éléments non déclarés. La fortune mobilière en cause était imposable au lieu de domicile des contribuables, tandis que leurs immeubles devaient être pris en compte pour fixer leur taux d'imposition. Ces reprises non contestées devaient être rétablies et le jugement querellé annulé pour ce seul motif.

Elle contestait en outre le caractère indépendant de l'activité exercée par M. D______ au Nigéria durant les années 2000 à 2004. En l'absence de convention de double imposition avec le Nigéria, le droit suisse déterminait l'imposition du revenu et de la fortune des contribuables. La fortune investie et le produit d'une activité lucrative indépendante, tel celui d'une profession libérale exercée au moyen d'installations fixes et permanentes, étaient imposables au for de l'établissement stable. En revanche, les revenus provenant d'une activité lucrative dépendante étaient imposables dans le canton de domicile du contribuable indépendamment du lieu où s'exerçait cette activité. Pour déterminer si une activité devait être considérée comme dépendante ou indépendante du point de vue fiscal, l'élément décisif était la mesure de l'indépendance personnelle et économique de l'intéressé dans l'accomplissement de sa tâche.

Le TAPI avait méconnu de nombreux indices qui démontraient le caractère dépendant de l'activité exercée par le contribuable au Nigéria. Le contrat du 5 janvier 2000 conclu avec X______Ltd prévoyait une rémunération annuelle forfaitaire de USD 360'000.- couvrant les activités et l'ensemble des charges de M. D______ (art. 3). Il était valable jusqu'au 31 décembre 2005 (art. 4.1). Le contribuable devait suivre les instructions données (art. 2) et n'avait pas d'autonomie vis-à-vis des tiers (art. 2.3), de sorte qu'un lien de subordination existait. A cela s'ajoutait encore le fait que M. D______ n'avait tenu aucune comptabilité, ni facturé ses services.

Durant les périodes fiscales litigieuses, M. D______ se trouvait donc dans la même situation qu'un administrateur. Sa liberté économique avait été limitée et il n'avait pas exercé son activité à ses risques et profits. Il était par ailleurs douteux que le contrat du 5 janvier 2000 puisse être qualifié de contrat de mandat sur le plan civil pour les motifs déjà exposés. Il s'agissait d'un contrat de travail sui generis, de même que celui conclu le 15 janvier 2004 avec W______ Ltd. A considérer même que l'activité du contribuable au Nigéria puisse être qualifiée d'indépendante, les revenus en découlant seraient imposables en Suisse, compte tenu du fait que l'existence d'un établissement stable dans ce pays n'avait pas été prouvée à satisfaction de droit.

En réalité, la rémunération forfaitaire de USD 360'000.-, qui, hormis durant l'année 2004, avait représenté plus de 80% des revenus annuels du contribuable, ne constituait pas des honoraires de consultant externe mais des honoraires d'administrateur, comme l'indiquait l'attestation d'X______Ltd du 14 novembre 2005.

Le TAPI n'avait de même pas tranché la question de savoir si la rémunération annuelle versée par X______Ltd ne constituait pas une distribution dissimulée de dividendes, question qui se posait dans la mesure où M. D______ était actionnaire d'X______Ltd et n'avait pas fourni de preuves suffisantes attestant le fait qu'il aurait exercé une quelconque activité pour le compte de sa société.

52) Le 4 janvier 2012, le TAPI a transmis son dossier, sans observation.

53) Le 14 février 2012, les contribuables ont conclu au rejet du recours, à la confirmation du jugement du 31 octobre 2011 dans la mesure où celui-ci annulait les décisions sur réclamation du 25 avril 2008, au renvoi du dossier à l'AFC-GE pour établissement de nouveaux bordereaux ICC 2000 à 2004, IFD 2001B à 2004 et de nouvelles amendes, « sous suite de frais et dépens ».

Ils persistaient à alléguer qu'ils s'étaient spontanément dénoncés auprès de l'AFC-GE afin de régulariser leur situation et offraient de faire entendre M. T______, Mme E______ et M. U______ pour le prouver.

Le recours de l'AFC-GE portait sur les reprises opérées sur les revenus découlant de la raison individuelle de M. D______ au Nigéria, ainsi que sur les amendes infligées. Comme indiqué dans la procédure de première instance, eux-mêmes ne contestaient pas avoir omis de déclarer leurs biens immobiliers en Hongrie et au Nigéria, ainsi que les revenus susmentionnés pour la détermination de leur taux d'imposition, de sorte qu'ils ne s'opposaient pas au renvoi du dossier à l'AFC-GE pour nouvelle taxation, ce que le jugement du TAPI ne prévoyait pas.

Ils avaient démontré devant le TAPI que M. D______ exerçait une activité indépendante au travers d'un établissement stable au Nigéria, de sorte que les revenus découlant de cette activité ne pouvaient être pris en considération que pour la détermination du taux d'imposition.

La problématique de la distribution dissimulée de bénéfice, à laquelle l'AFC-GE se référait, était liée à la double imposition économique qui prévalait en Suisse jusqu'au 1er janvier 2009. A cette époque, l'entreprise était imposée sur son bénéfice lorsqu'elle le réalisait, tandis que ses actionnaires étaient imposés sur les dividendes reçus lorsque l'entreprise distribuait ledit bénéfice. Afin d'éviter cette double imposition, certains actionnaires étaient tentés de se faire distribuer leurs dividendes de façon dissimulée à travers, notamment, un salaire excessif. Pour qu'il y ait prestation appréciable en argent, il fallait qu'un lien d'actionnariat existe entre la société et le bénéficiaire de la prestation ou à tout le moins que ce dernier soit un proche. Si un tel lien existait bien en l'espèce entre M. D______ et X______Ltd, tel n'était pas le cas entre celui-ci et W______ Ltd. Il fallait en outre qu'une rémunération excessive par rapport à l'activité (dépendante ou indépendante) exercée par l'actionnaire ou le proche de ce dernier ait été versée. Or, cette condition n'était pas réalisée. En soutenant le contraire, l'AFC-GE ignorait totalement les conditions de rémunération des expatriés au Nigéria, lesquelles tenaient compte de l'inconfort et des risques encourus dans ce pays. En comparaison du salaire mensuel de USD 20'000.- qu'il avait perçu lorsqu'il était directeur d'X______Ltd, M. D______ pouvait parfaitement prétendre à une rémunération annuelle de USD 360'000.- pour ses activités de consultant. Cette indemnité forfaitaire n'avait rien d'excessif compte tenu de son âge, de son expérience et de sa connaissance du pays et ne constituait pas une distribution dissimulée de dividende.

Enfin, et dans la mesure où l'AFC-GE concluait à la confirmation de ses décisions du 25 avril 2008, ils persistaient à considérer que la quotité des amendes infligées devait être réduite au cinquième de l'impôt soustrait, une fois celui-ci recalculé, dans la mesure où M. D______ avait toujours eu l'intention de respecter ses obligations fiscales et avait spontanément annoncé le caractère inexact et incomplet de ses déclarations.

54) Le 16 février 2012, le juge délégué a enjoint aux contribuables de produire une traduction officielle des contrats conclus par M. D______ et des courriers émanant des autorités nigérianes, ainsi qu'une traduction libre de toute autre pièce dont ils entendaient se prévaloir.

55) Le 5 avril 2012, les contribuables ont déposé un classeur de pièces contenant les traductions susmentionnées.

56) Le 12 avril 2012, le juge délégué a imparti aux parties un délai au 21 mai 2012 pour formuler toute requête complémentaire concernant l'instruction de la cause.

57) Le 22 août 2012, il les a informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Le litige porte sur les bordereaux de rappel d'impôt rectificatifs ICC 2000 à 2004 et IFD 2001-B à 2004 que l'AFC-GE a notifiés aux contribuables le 25 avril 2008, ainsi qu'aux bordereaux de rappel d'impôt rectificatifs ICC et IFD du 7 juillet 2006, puisque ceux-ci n'ont pas été annulés lors de la procédure de réclamation, mais uniquement corrigés sur certains points par les premiers bordereaux cités. Il s'étend également aux deux bordereaux « amende » qui ont été notifiés aux contribuables le 25 avril 2008 pour soustractions consommées d'impôts ICC et IFD durant les périodes fiscales en cause.

2) S'agissant des circonstances à l'origine de l'ouverture des procédures de rappel et de soustraction d'impôts ICC et IFD en cause, les contribuables ont requis l'audition de leur mandataire de l'époque, M. T______, ainsi que de représentants de l'AFC-GE, Mme E______ et M. U______.

Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (Arrêt du Tribunal fédéral 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3), de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 p. 157; 138 V 125 consid. 2.1 p. 127; 137 II 266 consid. 3.2 p. 270; 137 I 195 consid. 2.3.1 p. 197; 136 I 265 consid. 3.2; 135 II 286 consid. 5.1 p. 293 ; Arrêts du Tribunal fédéral 5A_ 12/2013 du 8 mars 2013 consid. 4.1; 2C_552/2011 du 15 mars 2012 consid. 3.1). Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 p. 236 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 131 I 153 consid. 3 p. 158 ; Arrêts du Tribunal fédéral 4A_108/2012 du 11 juin 2012 consid. 3.2; 8C_799/2011 du 20 juin 2012 consid. 6.1 ; 2D_2/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3 ; 4A_15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.2 et les arrêts cités; ATA/404/2012 du 26 juin 2012; ATA/275/2012 du 8 mai 2012).

En l'espèce, la chambre de céans est en mesure de trancher le litige sans procéder aux auditions requises. Les circonstances ayant entouré l'ouverture des procédures de rappel et de soustraction d'impôt en cause ressortent déjà des déclarations des parties et des pièces figurant au dossier. Par souci d'économie de procédure, ces offres de preuve seront, en conséquence, rejetées.

3) Concernant le droit applicable, les questions de droit matériel doivent être résolues à l'aune du droit en vigueur lors des périodes fiscales litigieuses (Arrêt non publié du Tribunal fédéral 2A.568/1998 du 31 janvier 2000 ; ATA/197/2013 du 26 mars 2013 ; ATA/124/2013 du 26 février 2013 ; ATA/724/2012 du 30 octobre 2012 ; ATA/505/2008 du 30 septembre 2008).

a. En l'espèce, les rappels d'impôt IFD 2001-B à 2004 et l'amende y relative sont soumis à la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11), entrée en vigueur le 1er janvier 1995.

b. Concernant l'ICC, les prétentions relatives à l'année 2000 sont réglées par la loi générale sur les contributions publiques du 9 novembre 1887 (LCP - D 3 05), dans sa teneur antérieure au 1er janvier 2001 (ci-après : aLCP). Les dispositions fiscales entrées en vigueur le 1er janvier 2001 ont en effet abrogé la plupart des dispositions de la LCP. Toutefois, ces dernières demeurent applicables, notamment en ce qui concerne l'imposition des personnes physiques, pour les périodes fiscales antérieures à l'année 2001 (ATA/197/2013 du 26 mars 2013 ; ATA/346/2006 du 20 juin 2006 ; ATA/373/2004 du 11 mai 2004 et les références citées).

c. S'agissant de l'ICC dû pour les années 2001 à 2004, il est régi par l'ancienne loi genevoise sur l'imposition des personnes physiques du 22 septembre 2000 (aLIPP), divisée en quatre parties (LIPP-I, LIPP-II, LIPP-III et LIPP-IV) et entrée en vigueur le 1er janvier 2001. Trouve en particulier application la loi sur l'imposition des personnes physiques - Objet de l'impôt - Assujettissement à l'impôt du 22 septembre 2000 (aLIPP-I - D 3 11).

d. Quant aux règles de procédure, elles sont soumises à la loi genevoise de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17), entrée en vigueur le 1er janvier 2002. La LPFisc s'applique depuis lors, y compris aux causes encore pendantes (art. 86 LPFisc). En application du principe de la lex mitior, la LPFisc prévoit toutefois la rétroactivité en matière de sanctions pénales. Elle dispose à son art. 84 que les sanctions pénales afférentes à des infractions réalisées avant son entrée en vigueur sont prononcées conformément à l'ancien droit, dans la mesure où le nouveau droit n'est pas plus favorable. La LPA est au surplus applicable dans la mesure où la LPFisc n'y déroge par (art. 2 al. 2 LPFisc).

4) L'éventuelle prescription des créances et amendes fiscales en cause doit être examinée. En droit public, de jurisprudence constante, cette question doit être constatée d'office lorsqu'un particulier est débiteur de l'Etat (ATF 106 Ib 364 ; ATA/197/2013 du 26 mars 2013 ; ATA/632/2012 du 18 septembre 2012 ; ATA/346/2006 du 20 juin 2006 ; ATA/21/2005 du 18 janvier 2005). La prescription est une institution de droit matériel qui concerne directement l'existence de la créance fiscale (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.227/2002 du 19 juin 2003 ; RDAF 2002 II 89, p. 94 et les arrêts cités ; ATA/164/2010 du 9 mars 2010). Elle est soumise au droit en vigueur au cours des périodes fiscales litigieuses.

a. Selon l'art. 152 al. 1 LIFD, le droit d'introduire une procédure de rappel d'impôt s'éteint dix ans après la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'a pas été effectuée, alors qu'elle aurait dû l'être, ou pour laquelle la taxation entrée en force est incomplète. Le droit de procéder au rappel de l'impôt s'éteint en tout état de cause quinze ans après la fin de la période fiscale à laquelle il se rapporte (art. 152 al. 3 LIFD). En l'espèce, la procédure relative aux rappels d'impôt IFD pour les années 2001-B à 2004 a été ouverte par courriers du 13 octobre 2005 et 3 novembre 2005, soit dans les dix ans après la fin des périodes fiscales pour lesquelles des taxations entrées en force se sont avérées incomplètes. Les bordereaux y relatifs ayant été notifiés le 25 avril 2008, l'AFC-GE a en outre respecté le délai de prescription absolu prévu par l'art. 152 al. 3 LIFD. Quant aux créances fiscales issues de ces bordereaux, elles ne sont pas prescrites. Contestées dans le cadre de la présente procédure, elles ne sont pas entrées en force, de sorte que les délais de prescription prévus par l'art. 121 LIFD n'ont pas encore commencé à courir.

Concernant l'amende IFD 2001-B à 2004 pour soustraction consommée d'impôt, la poursuite pénale y relative n'est pas prescrite dans la mesure où elle a été ouverte par courriers des 13 octobre et 3 novembre 2005, soit dans le délai de dix ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation a été effectuée de façon incomplète (art. 184 al. 1 let. b LIFD). Quant à l'amende afférente à ces années fiscales, elle n'est pas non plus prescrite. Contestée dans le cadre de la présente procédure, elle n'est pas encore entrée en force, de sorte que les délais de prescription déterminants n'ont pas encore commencé à courir (art. 185 al. 2 LIFD cum art. 121 LIFD).

b. Concernant l'ICC 2000, la prescription du droit d'introduire la procédure de rappel d'impôt est régie par les art. 340 et 341A aLCP. Elle est soumise à un délai de cinq ans dès l'entrée en force de la décision de taxation initiale (ATA/197/2013 du 26 mars 2013 ; ATA/374/2010 du 1er juin 2010 consid. 6b), l'aLCP ne contenant en outre pas de délai de prescription absolu (ATA/346/2006 du 20 juin 2006 et les références citées). En l'espèce, le bordereau initial ICC 2000 a été notifié le 15 novembre 2001 et n'a pas été contesté par les contribuables. Il est entré en force en décembre 2001, tandis que l'AFC-GE a introduit la procédure de rappel d'impôt par courrier du 13 octobre 2005. Le délai de prescription de cinq ans a donc été respecté.

Concernant l'ICC 2001-B à 2004, le droit d'introduire une procédure de rappel d'impôt s'éteint dix ans après la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'a pas été effectuée, alors qu'elle aurait dû l'être, ou pour laquelle la taxation entrée en force était incomplète (art. 61 al. 1 LPFisc). Ce droit s'éteint en tous les cas quinze ans après la fin de la période fiscale à laquelle il se rapporte (art. 61 al. 3 LPFisc). Ces délais ont en l'espèce été respectés, compte tenu de l'ouverture des procédures de rappel d'impôt par courriers des 13 octobre et 3 novembre 2005.

S'agissant de la prescription des amendes ICC 2000 à 2004, l'art. 341A aLCP prévoit un délai de prescription relatif de cinq ans, année courante non comprise. Ce délai court dès la commission de l'infraction, soit dès la remise de la déclaration et est interrompu par tout acte tendant à la poursuite de l'infraction (ATA/197/2013 du 26 mars 2013 ; ATA/359/2011 du 7 juin 2011 ; ATA/267/2008 du 27 mai 2008 ; ATA/346/2006 du 20 juin 2006). Bien que l'aLCP ne renferme pas de délai de prescription absolu, l'amende pour soustraction d'impôt est soumise, en raison de son caractère pénal, à un délai de prescription absolu de dix ans, conformément à la jurisprudence et au droit pénal spécifique applicable à ce type de sanction à l'époque (ATA/346/2006 du 20 juin 2006 et les références citées). Ce délai commence à courir dès la commission de l'infraction, soit dès l'établissement de la déclaration fiscale inexacte ou incomplète de la part du contribuable (ATA G. du 6 octobre 1992, résumé in SJ 1993 p. 569 ; ATA D. du 24 octobre 2000). Quant au nouveau droit, l'art. 77 al. 1 let. b LPFisc soumet la poursuite pénale en cas de soustraction consommée d'impôt à un délai de dix ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'a pas été effectuée ou l'a été de façon incomplète. Ladite prescription est interrompue par tout acte de procédure tendant à la poursuite du contribuable, un nouveau délai commençant à courir à chaque interruption. Elle ne peut toutefois être prolongée de plus de la moitié de sa durée initiale (art. 77 al. 2 LPFisc). L'AFC-GE ayant ouvert la procédure de soustraction d'impôt par courriers des 13 octobre et 3 novembre 2005, ces différents délais ont en l'espèce été respectés. A ce stade, il n'est donc pas nécessaire de trancher la question de savoir lequel, de l'ancien ou du nouveau droit, est plus favorable aux contribuables et doit ainsi s'appliquer à l'amende infligée pour soustraction d'ICC durant l'année 2000, étant précisé que les autres périodes fiscales litigieuses (ICC 2001-B à 2004) sont, en toute hypothèse, régies par la LPFisc.

5) L'AFC-GE reproche au TAPI d'avoir annulé purement et simplement l'ensemble des bordereaux de rappel d'impôt et d'amende notifiés aux contribuables, alors que ces derniers n'avaient pas contesté deux des trois reprises contenues dans ces décisions, à savoir celle afférente à leurs immeubles au Nigéria et en Hongrie estimés à CHF 600'000.- chacun, ainsi que celle relative à leur fortune mobilière évaluée à CHF 4'000'000.-, éléments qui n'avaient pas été déclarés jusque-là. Ce faisant, la juridiction de première instance aurait statué au-delà des conclusions des contribuables, en violation de l'art. 69 al. 1 LPA.

Ce grief tombe à faux, puisqu'en vertu des art. 51 LPFisc et 143 al. 1 LIFD, le TAPI n'était pas lié par les conclusions des parties. En dérogation à la règle de l'art. 69 al. 1 LPA, il pouvait en effet déterminer tous les éléments imposables et, après avoir entendu les contribuables, modifier leur taxation, cas échéant, à leur désavantage. Les art. 51 LPFisc et 143 al. 1 LIFD permettent en effet à la juridiction de première instance d'aller au-delà des conclusions des parties, au désavantage du contribuable notamment, indépendamment des motifs invoqués (ATA/99/2010 du 16 février 2010 ; ATA/682/2004 du 31 août 2004).

En l'espèce, le TAPI a considéré que l'une des reprises effectuées par l'AFC-GE dans la procédure de rappel d'impôt ICC et IFD était injustifiée. Selon son appréciation, les activités exercées par M. D______ pour le compte d'X______Ltd et de W______Ltd étaient de nature indépendante et s'étaient déployées par le biais d'un établissement stable sis au Nigéria, de sorte que les revenus en résultant ne pouvaient être imposés en tant que produits d'une activité lucrative dépendante.

Cette conclusion, contraire à l'approche suivie par l'AFC-GE, imposait d'annuler les bordereaux de rappel d'impôt IFD et ICC du 25 avril 2008, ainsi que ceux du 7 juillet 2006. Chacune de ces décisions procédait en effet à la reprise de revenus que le TAPI jugeait illégale. L'annulation des bordereaux « amende » IFD et ICC du 25 avril 2008 s'imposait également, puisque le montant des pénalités dues dépendait de celui de l'impôt soustrait (art. 175 al. 2 LIFD, art. 69 al. 2 LPFisc, art. 341 al. 1 aLCP). En statuant de la sorte, le TAPI n'a donc pas outrepassé l'objet du litige.

En revanche et dans la mesure où les bordereaux de rappel d'impôt IFD et ICC des 7 juillet 2006 et 25 avril 2008 procédaient à deux autres reprises qui n'étaient pas contestées par les contribuables, le TAPI aurait dû en prendre acte et renvoyer le dossier à l'AFC-GE pour établissement de nouveaux bordereaux de rappel d'impôt dans le sens des considérants.

Dans son recours, l'AFC-GE persiste à vouloir effectuer ces reprises afférentes à la fortune mobilière et immobilière des contribuables, tandis que ces derniers ne s'y opposent pas plus qu'en première instance. Quelle que soit l'issue du présent litige, le droit de l'AFC-GE d'y procéder, dans la mesure prévue par les décisions sur réclamation du 25 avril 2008, sera, en conséquence, rétabli.

6) Il reste à déterminer si les revenus perçus par M. D______ durant les années 2000 à 2004 pour ses activités au Nigéria sont ou non imposables en Suisse.

Selon l'AFC-GE, les activités exercées par M. D______ pour le compte d'X______Ltd, d'une part, et de W______ Ltd Ltd d'autre part, étaient de nature dépendante. En l'absence de convention de double imposition (ci-après : CDI) conclue avec le Nigéria, les revenus en résultant (soit les montants de USD 360'000.- perçus chaque année de 2000 à 2004, ainsi que la somme de USD 75'000.- perçue en 2004) seraient donc imposables dans le canton de domicile du contribuable, déduction faite des impôts payés par le contribuable au pays précité.

Les contribuables soutiennent à l'inverse que les activités de M. D______ au Nigéria étaient de nature indépendante et qu'elles ont été exercées par le biais d'un établissement stable, de sorte que les revenus en résultant ne devraient être pris en considération que pour la détermination de leur taux d'imposition.

IFD 2001-B à 2004

7) a. Selon l'art. 3 al. 1 LIFD, les personnes physiques sont assujetties à l'impôt à raison du rattachement personnel lorsque, au regard du droit fiscal, elles sont domiciliées ou séjournent en Suisse.

b. L'assujettissement fondé sur un rattachement personnel est illimité ; en vertu de l'art. 6 al. 1 LIFD, il ne s'étend toutefois pas aux entreprises, aux établissements stables et aux immeubles situés à l'étranger. Cette disposition pose une règle unilatérale en vue d'éviter les doubles impositions, en excluant du champ de l'assujettissement les entreprises, établissements stables et immeubles situés à l'étranger. Elle applique la méthode de l'exemption avec réserve de progressivité, puisqu'à teneur de l'art. 7 al. 1 LIFD, les personnes physiques qui ne sont que partiellement assujetties à l'impôt sur le revenu en Suisse se voient appliquer le taux auquel leur revenu serait imposé si tous les éléments étaient imposables en Suisse. L'exemption est en principe inconditionnelle : elle n'est pas subordonnée à la condition d'une imposition à l'étranger des éléments de revenu exemptés (M. REICH, Steuerrecht, 2ème éd., 2012, p. 238, n. 25 et 26 ; D. DE VRIES REILINGH, Le droit fiscal intercantonal et le droit fiscal international de la Suisse - système, relations, comparaison et examen de la jurisprudence, 2011, p. 110, n. 255 ss ; J.-B. PASCHOUD, Commentaire romand - Impôt fédéral direct - Commentaire sur la loi sur l'impôt fédéral direct, Bâle 2008, ad. art. 6, p. 112, n. 5 ; X. OBERSON, Précis de droit fiscal international, 3ème éd., 2009, p. 85, n. 270 ss ; P. LOCHER, Kommentar zum DBG - Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer, 2001, ad. art. 6, p. 150, n. 7).

c. De la réglementation qui précède, il résulte que les personnes physiques domiciliées en Suisse sont en principe imposables sur tous leurs revenus de source étrangère, dès l'instant où elles sont domiciliées ou en séjour en Suisse. En l'absence d'une CDI, les revenus d'une activité dépendante exercée à l'étranger sont, en effet, pleinement imposables en Suisse. Il en va de même des revenus d'une activité indépendante exercée à l'étranger, sauf à ce que celle-ci se déploie dans le cadre d'une entreprise ou d'un établissement stable dans l'autre pays (X. OBERSON, op. cit., p. 87, n. 274). La distinction entre les revenus provenant d'une activité lucrative dépendante et ceux résultant d'une activité lucrative indépendante est donc essentielle pour déterminer le lieu d'imposition de ces revenus dans les rapports internationaux.

d. La LIFD ne définit pas les notions d'activité lucrative dépendante et indépendante. Ce sont la doctrine et la jurisprudence qui ont dégagé plusieurs critères permettant de les distinguer. L'élément décisif pour savoir si une activité doit être considérée comme dépendante ou indépendante du point de vue fiscal est la mesure de l'indépendance personnelle et économique de l'intéressé dans l'accomplissement de sa tâche (X. OBERSON, Droit fiscal suisse, 2012, p. 100, n. 15 ; J.-B. ECKERT, Commentaire romand - Impôt fédéral direct - Commentaire sur la loi sur l'impôt fédéral direct, Bâle 2008, ad. art. 17, p. 220, n. 6 ; P. LOCHER, op. cit., ad. art. 17, p. 317, n. 16). Exerce une activité dépendante celui qui s'engage pour une durée déterminée ou indéterminée à fournir des prestations contre rémunération en se soumettant aux instructions de son employeur. Est indépendant celui qui exerce son activité selon sa propre organisation librement choisie - reconnaissable de l'extérieur - et à ses propres risques et profits. Si elles constituent des indices, la nature juridique des rapports civils (contrat de travail ou de mandat) et la qualification des revenus qui en découlent pour les assurances sociales ne sont pas décisives. La qualification d'une activité comme dépendante ou indépendante doit se faire dans chaque cas particulier en fonction de l'ensemble des circonstances. Le poids respectif des divers critères applicables en la matière peut varier selon les cas. Le fait que le contribuable fournisse ses prestations sur la base d'un mandat ou qu'il jouisse d'une grande liberté personnelle dans l'organisation de son travail n'exclut pas nécessairement que l'activité en question soit, du point de vue fiscal, qualifiée de dépendante, lorsque d'autres éléments - tels la réglementation légale et statutaire, la structure en principe collective de l'organe et l'absence de risque économique pour les administrateurs de société ou les restrictions imposées au médecin chef d'un hôpital en matière de fixation des honoraires qu'il facture à sa clientèle privée - militent en faveur d'une telle qualification (ATF 121 I 259 consid. 3c ; Arrêt du Tribunal fédéral 2A.400/2006 du 17 avril 2007 consid. 6.3 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2A.4/2002 du 28 juin 2002 consid. 4.1).

e. En substance, on admettra l'existence d'une activité lucrative dépendante si le contribuable est soumis à un rapport de subordination et s'il n'encourt aucun risque d'entrepreneur, ce qui sera notamment le cas s'il travaille exclusivement pour un employeur, s'il n'a procédé à aucun investissement ou à des investissements limités, s'il ne dispose pas de ses propres locaux et si ses prestations sont uniquement personnelles (J.-B. ECKERT, op. cit., p. 220, n. 6 et les références jurisprudentielle citées). Tel est également le cas d'un patron d'une entreprise en raison individuelle générant son chiffre d'affaires exclusivement par le biais de deux sociétés anonymes qu'il domine, dont il est à la fois membre du conseil d'administration et directeur, et dont il peut de plus utiliser l'infrastructure (Arrêt de la Commission cantonale pour l'impôt fédéral direct du canton de Schwyz du 14 avril 2003 in RF 2004 p. 17-21).

f. A l'inverse, l'activité lucrative indépendante se définit comme celle entreprise par une personne à ses propres risques, moyennant la mise en oeuvre de travail et de capital, dans une organisation librement choisie, reconnaissable de l'extérieur et à des fins lucratives. Elle peut être exercée à titre principal ou accessoire, être durable ou temporaire. Les critères caractéristiques de cette activité ne doivent pas être considérés de manière isolée et peuvent apparaître avec des intensités variables (ATF 125 II 113 = RDAF 1999 II 385). La doctrine en identifie cinq (Y. NOËL, Commentaire romand - Impôt fédéral direct - Commentaire sur la loi sur l'impôt fédéral direct, Bâle 2008, ad. art. 18, p. 238, n. 2 ; X. OBERSON, Droit fiscal suisse, 2012, p. 108, n. 40 ss ; J. VON AH, Die Besteuerung Selbständigerwerbender, 2ème éd., 2011, p. 4 ss) :

- une organisation propre et librement choisie : critère qui met en exergue l'absence de rapport de subordination et la liberté de choix dans l'organisation qui caractérisent une activité indépendante. Une simple activité non dépendante ne devient pas indépendante si elle ne se développe pas à l'intérieur d'un cadre quelque peu structuré (locaux, horaires, etc.). L'organisation, qui ne doit pas être imposée par un tiers, peut toutefois être minimale ;

- reconnaissable de l'extérieur : le cocontractant de l'indépendant doit pouvoir reconnaître qu'il agit pour son propre compte et non pour celui d'un employeur. L'organisation n'a pas en revanche à être reconnaissable par tous, elle peut rester confidentielle pour toute personne autre que les clients ;

- mettant en oeuvre du travail et du capital : le travailleur dépendant ne met à disposition que sa force de travail, tandis que son employeur lui fournit les moyens matériels et financiers permettant de transformer ce travail en produits ou en services. Dans l'activité indépendante, ces deux apports sont effectués par la même personne, à savoir l'indépendant lui-même. La force de travail peut toutefois provenir également de tierces personnes que l'indépendant engage à son service, tant que ce dernier continue de collaborer personnellement à la bonne marche de l'affaire. La part de capital peut être minime, en particulier dans les activités de conseil ;

- aux compte et risques propres du contribuable : le salarié ne voit pas sa rémunération fluctuer en fonction de la bonne marche des affaires de l'entreprise (sauf pour la partie variable de sa rémunération), contrairement à l'indépendant, dont le revenu dépend directement du nombre et de la qualité de ses cocontractants et qui supporte personnellement les pertes ;

- dans le but de réaliser un profit : en l'absence de cette volonté lucrative, l'activité exercée revêt les caractéristiques du hobby.

g. Les notions d'entreprise et d'établissement stable visées par l'art. 6 al. 1 LIFD sont en principes les mêmes que celles auxquelles recourt l'art. 4 LIFD (J.-B. PASCHOUD, op. cit., ad. art. 6, p. 112, n. 8 ; M. REICH, op. cit., p. 238, n. 26). Celle d'entreprise n'est toutefois pas définie par la LIFD. Selon la doctrine, l'on entend par entreprise une entité organisée de façon identifiable pour les tiers comme agent économique autonome, offrant ses prestations de façon systématique, en vue d'obtenir un résultat, soit de réaliser un bénéfice (X. OBERSON, Droit fiscal suisse, 2012, p. 79, n. 16). En général, il s'agit d'entreprises commerciales, artisanales, industrielles ou agricoles exploitées par le contribuable à titre individuel ou comme associé d'une société de personnes (société simple, société en nom collectif ou en commandite ou tout autre société similaire de droit étranger). Une entreprise à l'étranger suppose la présence d'installations fixes et permanentes situées hors de nos frontières, l'inscription d'un siège statutaire à l'étranger n'étant pas suffisante (D. DE VRIES REILINGH, op. cit., p. 120, n. 279-280). Dans une affaire concernant un contribuable domicilié en Suisse, mais exerçant des activités de consultant indépendant en Malaisie, le Tribunal fédéral a en effet jugé qu'une adresse de domiciliation dans cet autre Etat ne suffisait pas pour bénéficier de l'exemption prévue par l'art. 6 al. 1 LIFD, en l'absence d'installations fixes et permanentes constitutives d'une entreprise au sens visé par cette disposition. Le recours à un « Office Center » pouvait devenir une installation commerciale fixe lorsque les bureaux étaient loués de manière durable et utilisés à des fins commerciales. Tel n'était toutefois pas le cas du contribuable en cause, lequel avait lui-même déclaré avoir eu la plupart de ses contacts commerciaux dans les bureaux de la société qu'il conseillait ou dans des hôtels. Les infrastructures de son « entreprise » ne constituaient qu'une pure « boîte aux lettres », couplée avec des prestations de service occasionnelles et des bureaux. Les revenus provenant de ses activités à l'étranger étaient donc imposables en Suisse (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.119/2007 et 2A.120/2007 du 13 août 2007, traduit in RDAF 2008 II p. 356). La notion d'entreprise ne se recoupe pas entièrement avec celle d'établissement stable : ce dernier fait partie d'une unité plus grande, dont il forme un élément tandis que l'entreprise est une entité autonome (D. DE VRIES REILINGH, op. cit., p. 131, n.309).

h. Selon l'art. 4 al. 2 LIFD, on entend par établissement stable toute installation fixe dans laquelle s'exerce tout ou partie de l'activité d'une entreprise ou d'une personne exerçant une profession libérale. Sont notamment considérés comme établissements stables les succursales, usines, ateliers, comptoirs de vente, représentations permanentes, mines et autres lieux d'exploitation de ressources naturelles, ainsi que les chantiers de construction ou de montage ouverts pendant douze mois au moins. Selon la doctrine, trois conditions doivent être réunies pour être en présence d'un établissement stable : il doit s'agir d'installations de l'entreprise, ce qui signifie que la présence d'une entreprise doit se manifester physiquement en un point géographique donné (i), fixes et permanentes et non seulement provisoires ou temporaires (ii), dans lesquelles s'exerce une partie de l'activité de l'entreprise, des activités purement administratives étant suffisantes (iii) (D. DE VRIES REILINGH, op. cit., p. 158, n.371 ss).

i. De jurisprudence constante et selon un principe généralement admis en matière fiscale, il appartient à l'autorité fiscale de démontrer l'existence d'éléments créant ou augmentant la charge fiscale, alors que le contribuable supporte le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation fiscale. S'agissant de ces derniers, il appartient au contribuable non seulement de les alléguer, mais encore d'en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l'échec de cette preuve (ATF 133 II 153 consid. 4.3 ; 121 II 257 consid. 4c/aa ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C_477/2009 du 8 janvier 2010 consid. 3.5 ; 2C_199/2009 du 14 septembre 2009 consid. 3.1 ; 2C_76/2009 du 23 juillet 2009 consid. 2.2 ; 2A.295/2006 du 16 octobre 2006 consid. 4.3 ; 2A.543/2004 du 18 février 2005 ; ATA/124/2013 du 26 février 2013 ; ATA/742/2012 du 30 octobre 2012 ; ATA/633/2011 du 11 octobre 2011 et les références citées). Le Tribunal fédéral considère que la détermination d'un établissement stable à l'étranger est soumise à des exigences un peu plus élevées que celle d'un établissement stable sis en Suisse. En cas de doute, l'établissement stable sis à l'étranger est, dans le cadre d'un assujettissement illimité en Suisse, généralement imposé en Suisse (ATF 139 II 78 consid. 3.1.2).

8) En l'espèce, il n'est pas contesté que M. D______ a exercé une activité lucrative dépendante pour le compte d'X______Ltd jusqu'en 1999. A cette époque, il travaillait en tant que directeur général de cette société dont il était, par ailleurs, l'un des administrateurs. Selon son contrat de travail du 1er janvier 1995, il remplissait ses tâches sous la surveillance du conseil d'administration d'X______Ltd, auquel il devait rendre des comptes (art. 4 ). Il était soumis à une clause d'exclusivité (art. 8) et percevait un salaire mensuel de USD 20'000.-, en sus de diverses prestations en nature. En tant que salarié, il était soumis à un impôt sur ses revenus, perçu par les autorités nigérianes selon le système P.A.Y.E, soit directement prélevé par son employeur sur son salaire et s'élevant à 24 % de ce dernier.

Le contribuable soutient que son statut se serait ensuite modifié et qu'il aurait exercé une activité lucrative indépendante de consultant durant les années 2000 à 2004, ce que l'AFC-GE conteste. L'analyse du contrat de conseils-services en management conclu par M. D______ et X______Ltd le 5 janvier 2000 ne permet pas de départager les parties. La durée de validité du contrat (cinq ans selon l'art. 4.1), le long délai de résiliation prévu (six mois selon la même disposition) et la clause de rémunération annuelle forfaitaire de USD 360'000.- (art. 3.1) sont plutôt propres à un contrat de travail, mais d'autres clauses s'opposent à une telle qualification. M. D______ devait fournir ses conseils techniques et professionnels à la nouvelle équipe dirigeante de la société (art. 1.2), mais n'était pas autorisé à participer aux affaires courantes de celle-ci (art. 2.1), ni n'était habilité à la représenter dans ses relations avec les tiers (art. 2.3). Ses tâches correspondaient donc bien à celles d'un mandataire externe, plutôt qu'à celles d'un employé. Aucune clause ne lui imposait en outre de suivre les instructions d'X______Ltd, laquelle s'engageait au contraire à suivre ses conseils (art. 2.2), ni de travailler dans un cadre organisationnel prédéfini. M. D______ ne se trouvait donc plus dans un rapport de subordination vis-à-vis d'X______Ltd et n'était notamment plus obligé de lui réserver ses services. Le contrat de conseils-services conclu le 15 janvier 2004 avec W______Ltd réglementait de manière similaire les rapports de cette société avec M. D______. Celui-ci devait fournir des conseils techniques et professionnels, afin d'obtenir du Ministère fédéral de l'énergie et de l'acier la conclusion d'un contrat d'électrification de la zone rurale de Zaria Town devisé à UDS 5'500'000.- (art. 1.1 et 2.4), mais n'était pas habilité à représenter sa cliente (art. 2.3). Le contrat était conclu pour une durée d'un an (art. 4.1) et prévoyait une rémunération de USD 75'000.-, respectivement proportionnelle aux sommes reçues par la société de son cocontractant dans le cadre de l'exécution du contrat d'électrification susmentionné. Cette rémunération devait couvrir tous les coûts et frais de M. D______ pour la durée de ses activités (art. 3). Mise à part l'obligation de rendre compte (art. 2.1 et 2.6), le contribuable ne se trouvait pas dans un rapport de subordination vis-à-vis de la société qui requérait ses services.

Outre l'évolution des conditions de travail ressortant des contrats du 1er janvier 1995 et 5 janvier 2000, d'autres éléments tendent à confirmer le changement de statut du contribuable à compter de cette dernière date. M. D______ a notamment fourni des explications crédibles sur les raisons qui l'ont conduit à quitter son poste de directeur pour celui de consultant externe d'X______Ltd. Il a fait valoir que les entreprises sises au Nigéria ne pouvaient pas employer des étrangers au-delà de dix ans et que sa société, fondée en 1989, avait dû se séparer de lui à l'échéance de ce délai, ce que confirme un courrier du Ministère fédéral des affaires intérieures du Nigéria du 23 novembre 2000 prenant acte du retrait de son directeur général. A la même période, soit le 18 février 1999, M. D______ a en outre requis et obtenu du Ministère fédéral des industries du Nigéria un permis de travail (« Business Permit »), l'autorisant à exercer toutes sortes d'activités de conseil en matière d'ingénierie électrique, de gestion, de planification et d'élaboration de projets d'électrification rurale. En parallèle, il a pris domicile à Genève, où il a fondé et occupé le poste de directeur d'Y______, partageant depuis lors son temps entre la Suisse et le Nigéria.

Par attestation du 23 août 2006, le Ministère du commerce et de l'industrie de l'état de Kaduna a confirmé qu'X______Ltd n'avait pas de quotas d'expatriés, soit de permis de travail pour l'engagement d'étrangers, pour des positions dirigeantes, raison pour laquelle elle n'avait pu employer M. D______. En raison de ses connaissances spécifiques et de son expérience en ingénierie électrique, celui-ci avait néanmoins été autorisé à travailler en tant que consultant indépendant et ingénieur conseil. En cette qualité, il pouvait conclure, signer et agir sur la base de différents contrats de conseils, d'ingénierie et de management dans l'état de Kaduna et/ou dans tout autre lieu de la Fédération avec les ministères gouvernementaux de la Fédération ou d'un état, des organisations ou des sociétés (y compris X______Ltd) sur une base strictement professionnelle. Les rémunérations, honoraires de conseils ou de management et autres revenus découlant de telles activités de conseils étaient soumises à un impôt à la source. Le départ de M. D______ d'X______Ltd a donc également eu des conséquences fiscales, celui-ci ayant depuis lors été soumis à un impôt à la source (« Withholding Tax ») à un taux fixe de 25%.

Confrontés aux cinq critères caractéristiques d'une activité lucrative indépendante, les explications et éléments de preuve fournis par le contribuable font définitivement pencher la balance en faveur de cette qualification :

-                 durant les périodes litigieuses, M. D______ a exercé ses activités de consultant selon une organisation propre et librement choisie. Il s'est aménagé un bureau dans sa résidence de Kaduna, s'est créé une adresse professionnelle et a organisé librement son travail, sans recevoir d'instructions particulières de ses clients ;

-                 son indépendance était reconnaissable de l'extérieur. Il correspondait avec ses clients à l'aide d'un papier à en-tête qui mentionnait son nom, ses domaines d'activité et l'adresse de son bureau. Dans un premier temps, ses activités se sont exercées pour le compte d'un seul client (X______Ltd) et ont ainsi revêtu un caractère confidentiel. Mais elles n'en demeuraient pas moins connues des autorités nigérianes (qui lui ont délivré un permis de travail pour ce faire) et de ses potentiels clients, puisque ceux-ci ont su faire appel à ses services au moment opportun. Outre ses deux cocontractants, deux autres sociétés (Z______Ltd et A______Ltd Limited) ont en effet sollicité ses services en 2004. M. D______ a accepté le mandat proposé par la première d'entre elles et a orienté la seconde vers un confrère en raison d'une surcharge de travail.

-                 Pour exercer son activité de consultant, le contribuable a non seulement mis en oeuvre sa force de travail, mais également du capital, bien que dans une mesure limitée, compte tenu de la nature de ses tâches. Dans sa résidence au Nigéria, il a aménagé une pièce en bureau, l'équipant en mobilier et en matériel informatique. Il a engagé et rémunéré une secrétaire, un chauffeur et un contrôleur-qualité pour l'assister dans ses tâches. Par-devant un avocat nigérian et en présence de témoins, ces personnes ont en effet toutes confirmé avoir travaillé pour le compte propre de M. D______ durant les périodes fiscales litigieuses. Le contribuable a ainsi mobilisé non seulement sa propre force de travail, mais également celle de plusieurs employés pour atteindre les buts recherchés par ses clients ;

-                 Bien qu'X______Ltd ait été son unique client durant plusieurs années et l'ait rémunéré au moyen d'une indemnité annuelle forfaitaire, M. D______ n'en a pas moins exercé ses activités de consultant pour son compte et à ses propres risques. En effet, il a assumé seul ses charges en personnel, ses frais de bureau et ses frais de voyage et a donc supporté les coûts des moyens à mettre en oeuvre pour l'exécution de ses mandats ;

-                 Il a poursuivi ses activités de consultant dans le but de réaliser un profit, celles-ci s'étant effectivement révélées profitables.

La position de M. D______ vis-à-vis d'X______Ltd ne peut au surplus pas être assimilée à celle d'un administrateur, dont la liberté personnelle et économique est limitée. Certes, l'attestation établie par cette société le 14 novembre 2005 qualifie d'honoraires de gestion (« management fees ») les montants annuels de USD 360'000.-, perçus par le contribuable durant les années 2000 à 2004. Elle indique également que ces sommes lui ont été versées en sa qualité d'administrateur de la société. Plusieurs pièces du dossier contredisent toutefois cette thèse. Le contribuable a notamment démontré que son mandat d'administrateur avait été révoqué par X______Ltd le 18 décembre 2000 et qu'il n'avait été réintégré dans cet organe qu'en juillet 2006, soit après que son mandat de consultant ait été résilié. Le contrat du 5 janvier 2000 prévoyait en outre les mêmes montants que ceux visés par l'attestation du 14 novembre 2005, à titre de rémunération des prestations de M. D______ comme consultant externe. Force est ainsi d'admettre que les termes de « management fees » et d'« Executive Director » figurant dans cette attestation prêtent à confusion mais que prises dans le contexte, elles ne peuvent être retenues dans leur sens strict.

Enfin, bien que M. D______ ait exclusivement fourni ses prestations pour le compte d'X______Ltd durant les années 2000 à 2003, il ne se trouvait pas dans un rapport de subordination vis-à-vis de cette dernière, dans la mesure où il n'en était plus ni l'administrateur, ni le directeur, sa seule qualité d'actionnaire majoritaire ne lui permettant pas de s'immiscer dans les affaires courantes de la société.

Sur le vu de toutes ces circonstances, les prestations de conseil en ingénierie et en management fournies par le contribuable en faveur d'X______Ltd et de W______Ltd durant les années 2000 à 2004 doivent, en conséquence, être qualifiées d'activité lucrative indépendante.

9) La question de savoir si cette activité lucrative indépendante s'est exercée par le biais d'une entreprise doit encore être tranchée pour que M. D______ puisse bénéficier de l'exemption prévue par l'art. 6 al. 1 LIFD.

Les différents éléments de preuve fournis par l'intéressé conduisent à une réponse positive. Ils établissent de manière suffisante le fait que M. D______ disposait à Kaduna d'une entité organisée de façon identifiable pour les tiers comme agent économique autonome, offrant ses prestations en vue de réaliser un bénéfice. L'existence d'un bureau aménagé dans sa résidence au Nigéria doit être admise, dans la mesure où le contribuable utilisait cette adresse dans sa correspondance commerciale et où sa secrétaire a confirmé qu'elle y travaillait. Compte tenu de la nature des prestations à fournir, il est également crédible que ce bureau ait été le lieu d'exécution d'une partie de ces dernières, M. D______ ayant notamment déclaré y recevoir les représentants d'X______Ltd à raison d'une fois par semaine. Il s'agissait donc bien d'une installation fixe et permanente et non d'une pure « boîte aux lettres », laquelle était reconnaissable pour les tiers, comme l'attestent les courriers envoyés à cette adresse non seulement par les mandants de l'intéressé, mais également par d'autres clients potentiels. Le fait que l'intéressé a résidé plusieurs mois par année au Nigéria, depuis la fin de son contrat de directeur d'X______Ltd et après qu'il eut pris domicile en Suisse, n'apparaît de même pas douteux, au vu des tampons figurant sur son passeport hongrois et de sa naturalisation par les autorités nigérianes en 2008.

M. D______ ayant exercé une activité lucrative indépendante au travers d'une entreprise sise au Nigéria, il bénéficie de l'exemption prévue par l'art. 6 al. 1 LIFD. Les revenus qu'il a perçus d'X______Ltd et de W______Ltd durant les périodes fiscales litigieuses ne sont donc pas imposables en Suisse en tant que produits de cette activité et ne peuvent a priori être pris en considération que pour la détermination de son taux d'imposition (art. 7 al. 1 LIFD).

10) A titre subsidiaire, l'AFC-GE soutient que la rémunération annuelle de USD 360'000 versée par X______Ltd en faveur de M. D______ a consisté dans une distribution dissimulée de dividendes, dans la mesure où le contribuable est actionnaire de cette société et n'aurait pas fourni de preuves suffisantes attestant l'exercice d'une quelconque activité pour le compte de celle-ci. Les contribuables contestent l'existence d'une prestation imposable en argent au motif que la rémunération perçue par M. D______ ne serait pas excessive par rapport à l'activité indépendante qu'il a exercée, son âge, son expérience et sa connaissance du Nigéria. Le TAPI ne s'est, quant à lui, pas prononcé sur la question.

a. Selon l'art. 20 al. 1 let. c LIFD dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2008, les dividendes, les parts de bénéfice, l'excédent de liquidation et tous autres avantages appréciables en argent provenant de participations de tout genre (y compris les actions gratuites, les augmentation gratuites de la valeur nominale, etc.) sont imposables en tant que rendement de la fortune mobilière.

b. La fortune mobilière peut être constituée de participations du contribuable au capital de sociétés suisses ou étrangères (Y. NOËL, Commentaire romand - Impôt fédéral direct - Commentaire sur la loi sur l'impôt fédéral direct, Bâle 2008, ad. art. 20, p. 299, n. 41). En l'absence de CDI, les rendements de la fortune mobilière placée à l'étranger sont imposables au domicile du contribuable (X. OBERSON, Précis de droit fiscal international, 2009, p. 87, n. 274).

c. Une société dispose de deux manières de gratifier son actionnaire de ses bénéfices commerciaux et la compétence décisionnelle est différente dans les deux cas. La première consiste à lui distribuer un dividende, décision qui échoit à l'assemblée générale ou à l'assemblée des associés. La seconde est de passer avec lui des transactions qui le favorisent, compétence qui relève de la direction ou d'échelons qui lui sont subordonnés, selon l'organisation propre de la société, plus rarement du conseil d'administration. Le titulaire d'une participation peut donc tirer économiquement profit de sa participation par d'autres moyens que le dividende. Il peut profiter de sa qualité d'actionnaire pour obtenir de sa société des avantages, financiers ou en nature, que celle-ci ne consentirait pas à des tiers. Le législateur a prévu que ces avantages seraient également traités comme des dividendes et imposés en conséquence, au titre de revenus de participation. L'art. 20 al. 1 let. c LIFD parle d'« avantages appréciables en argent », adoptant à leur égard une approche extensive. Contrairement à la notion de dividende ou d'excédent de liquidation, celle d'« avantage appréciable en argent » n'est pas juridique. Il s'agit d'une notion économique, plus précisément d'un concept non juridique que l'autorité d'application doit interpréter de façon économique, en se référant au contenu matériel et non pas formel de l'avantage en question (Y. NOËL, Commentaire romand - Impôt fédéral direct - Commentaire sur la loi sur l'impôt fédéral direct, Bâle 2008, ad. art. 20, p. 308 ss, n. 78 à 80 et la jurisprudence citée).

d. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, est une prestation appréciable en argent toute attribution faite par la société, sans contre-prestation équivalente, à ses actionnaires ou à toute personne la ou les touchant de près et qu'elle n'aurait pas fait dans les mêmes circonstances à des tiers non participants ; encore faut-il que le caractère insolite de cette prestation soit reconnaissable par les organes de la société (ATF 119 Ib 431 consid. 2b). L'existence d'une prestation appréciable en argent suppose ainsi la réalisation de quatre conditions cumulatives : 1) la société fait une prestation sans obtenir de contre-prestation correspondante ; 2) cette prestation est accordée à un actionnaire ou à une personne le touchant de près ; 3) elle n'aurait pas été accordée dans de telles conditions à un tiers ; 4) la disproportion entre la prestation et la contre-prestation est manifeste, de telle sorte que le caractère insolite de la prestation est reconnaissable par les organes de la société (Arrêts du Tribunal fédéral 2C_421/2009 du 11 janvier 2010 ; 2C_188/2008 du 19 août 2008 ; ATA/532/2013 du 27 août 2013 ; ATA/633/2011 du 11 octobre 2011 ; et ATA/152/2011 du 8 mars 2011 ; X. OBERSON, Droit fiscal suisse, 2012, p. 236 n. 41 et les références citées). Selon la jurisprudence, il ne s'agit pas d'examiner si les parties ont reconnu la disproportion, mais plutôt si elles auraient dû la reconnaître (E. MELLER / J. SALOM, Le salaire excessif en droit fiscal suisse, RDAF 2011 II, p. 105, 110 et les références citées).

e. L'avantage appréciable en argent peut prendre autant de formes qu'il y a de contrats possibles entre une société et son actionnaire. En raison de sa position, l'actionnaire-directeur d'une société peut par exemple être tenté de se faire verser par la société un salaire supérieur à celui auquel il pourrait prétendre dans une entreprise dont il ne serait pas propriétaire. Toute partie de salaire qui excède un salaire admissible compte tenu du secteur d'activité, de la marche des affaires et des responsabilités du directeur sera alors requalifié d'avantage appréciable en argent auprès de l'actionnaire (Y. NOËL, Commentaire romand - Impôt fédéral direct - Commentaire sur la loi sur l'impôt fédéral direct, Bâle 2008, ad. art. 20, p. 311, n. 90).

f. Du point de vue de l'actionnaire, les conséquences fiscales de cette qualification consistent dans l'imposition au titre de l'impôt sur le revenu comme si un dividende (occulte) avait été distribué (ATA/538/2011 du 30 août 2011 consid. 19.d et les références citées).

g. Lorsqu'elle doit déterminer si la rémunération servie par la société à ses employés actionnaires est en rapport avec l'importance de leur prestation de travail, l'autorité fiscale n'a pas à substituer sa propre appréciation en matière de salaire à celle de la société mais la liberté de l'employeur n'est pas sans limite. En effet, la rémunération doit correspondre à celle qui aurait été octroyée à une tierce personne dans des circonstances identiques. L'élément pertinent est donc la rémunération conforme au marché. Pour savoir si la rémunération est excessive et constitue une distribution dissimulée de bénéfice, il convient de prendre en compte l'ensemble des circonstances du cas d'espèce (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_421/2009 du 11 janvier 2010 consid. 3.1 et 3.3 et les références citées ; E. MELLER / J. SALOM, op. cit., p. 111). Parmi les critères pertinents, figure notamment la rémunération des personnes de rang et de fonction identiques ou similaires, les salaires versés par d'autres entreprises opérant dans le même domaine, la taille de l'entreprise, sa situation financière, ainsi que la position du salarié dans l'entreprise, sa formation et son expérience (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_421/2009 précité).

11) En l'espèce, M. D______ était actionnaire majoritaire d'X______Ltd, mais ne disposait pas de participation dans W______Ltd. La question d'une éventuelle requalification de ses honoraires de consultant externe ne peut ainsi se poser qu'à l'égard de ceux qui lui ont été versés par la première de ces sociétés durant les périodes fiscales litigieuses.

X______Ltd a versé à son actionnaire majoritaire une rémunération annuelle brute de USD 360'000.- pour les prestations de conseils en ingénierie et en management que ce dernier lui a fournies de 2000 à 2004. Lorsque ce même actionnaire majoritaire était son directeur, elle lui versait, outre diverses prestations en nature (prise en charge des frais médicaux, des frais de scolarité des enfants, du financement de billets d'avion aller-retour pour la Hongrie à raison d'une fois par an, prise en charge des frais professionnels justifiés, mise à disposition d'une maison indépendante avec personnel de maison et d'un véhicule), un salaire mensuel brut de USD 20'000.- payé treize fois l'an, soit USD 260'000.- par an. La rémunération du contribuable en tant que consultant indépendant a donc augmenté de plus de 38 % par rapport à celle qu'il percevait en tant que directeur d'X______Ltd (à une époque où il en était également l'administrateur).

L'âge, l'expérience, la connaissance du Nigéria du contribuable, de même que les risques encourus par les expatriés dans ce pays ne suffisent pas à expliquer une telle augmentation. Le changement de statut du contribuable auprès d'X______Ltd aurait au contraire dû conduire à une diminution de sa rémunération. L'on comprend en effet mal comment un consultant indépendant, partageant son temps entre la Suisse (où l'intéressé était directeur d'Y______) et le Nigéria (où il était chargé de conseiller les dirigeants d'une société, sans être responsable de sa gestion), ait pu percevoir des honoraires beaucoup plus élevés que le salaire versé par cette même société alors qu'il était directeur et devait consacrer tout son temps à la gestion de l'entreprise. La disproportion de la rémunération annuelle versée par X______Ltd à son actionnaire majoritaire en tant que consultant indépendant est encore plus manifeste, si on la compare à celle offerte au contribuable en 2004 par W______Ltd pour des services de même nature. Ce second mandataire a en effet versé au contribuable une rémunération annuelle de USD 75'000.-, soit des honoraires près de cinq fois inférieurs à ceux versés par X______Ltd pour des prestations équivalentes. La comparaison suffit à démontrer qu'X______Ltd n'aurait pas versé USD 360'000.- d'honoraires annuels à son consultant externe, si celui-ci n'avait pas été son actionnaire majoritaire. En offrant cette rémunération très supérieure à celle valant sur le marché des consultants indépendants en ingénierie, X______Ltd a en réalité gratifié son fondateur et actionnaire majoritaire de ses bénéfices commerciaux, en compensation de son éviction du poste de directeur due aux spécificités de la législation nigériane de droit du travail.

Faute de plus amples éléments de comparaison, il n'est néanmoins pas possible de déterminer les honoraires moyens, perçus par les consultants en ingénierie et en management qui travaillent au Nigéria. C'est donc en fonction des circonstances propres au cas d'espèce qu'il convient de déterminer la part de la rémunération perçue par M. D______ pouvant être considérée comme excessive et qui doit, partant, être requalifiée d'avantage appréciable en argent au sens de l'art. 20 al. 1 let. c LIFD. Le contribuable a réellement exercé une activité de consultant indépendant pour le compte d'X______Ltd, de sorte qu'une rémunération lui était incontestablement due à ce titre. Cette société, qui avait été contrainte de se séparer de l'intéressé en tant que directeur, avait vraisemblablement tout intérêt à pouvoir s'assurer les services de ce consultant, compte tenu de sa connaissance avancée de l'entreprise et de ses compétences en matière d'ingénierie et de management, à un moment où elle comptait de nouveaux dirigeants. Dans ces conditions particulières, l'on peut ainsi admettre qu'il se justifiait de verser à M. D______ des honoraires équivalents à la rémunération qu'il avait perçue jusque-là en tant que directeur. Sur les USD 360'000.- annuellement versés par X______Ltd durant les années 2000 à 2004, USD 260'000.- peuvent ainsi être considérés comme équivalant à des honoraires pour les prestations fournies par M. D______ en tant que consultant indépendant exerçant ses activités à temps partiel, vu celles qu'il exerçait à la même époque comme salarié d'Y______ S.A., et devant assumer ses propres frais et charges. Le solde (USD 100'000.-) représente en revanche des avantages appréciables en argent, perçus en raison de la seule qualité d'actionnaire de l'intéressé et imposables en Suisse en application de l'art. 20 al. 1 let. c LIFD.

12) En résumé, les revenus perçus par M. D______ pour ses activités au Nigéria durant les périodes fiscales litigieuses sont imposables de la manière suivante :

-                 Sur les USD 360'000.- annuellement versés par X______Ltd, USD 260'000.- doivent être considérés comme les produits d'une activité lucrative indépendante exercée au travers d'une entreprise sise à l'étranger. En tant que tels, ils bénéficient de l'exemption prévue par l'art. 6 al. 1 LIFD et ne doivent être pris en considération que pour la détermination du taux d'imposition des contribuables (art. 7 al. 1 LIFD), déduction faite des 25 % d'impôt payé aux autorités nigérianes. Les USD 100'000.- restant sont en revanche imposables à titre de rendement de la fortune mobilière en application de l'art. 20 al. 1 let. c LIFD, après déduction des 25 % d'impôt nigérian que le contribuable a payés.

-                 Les USD 75'000.- versés par W______Ltd en 2004 sont des revenus résultant de l'exercice d'une activité indépendante, qui s'est déployée par le biais d'une entreprise, et ne sont, de ce fait, pas imposables en Suisse (art. 6 al. 1 LIFD). Ces revenus doivent en revanche être pris en compte dans la détermination du taux d'imposition des contribuables en vertu de l'art. 7 al. 1 LIFD.

Les bordereaux de rappel d'impôt rectificatifs IFD 2001-B à 2004 du 7 juillet 2006 et du 25 avril 2008 doivent donc être annulés et le dossier renvoyé à l'AFC-GE pour nouvelles décisions de taxation dans le sens de ce qui précède.

ICC 2000 à 2004

13) Examinée sous l'angle du droit cantonal, la problématique tenant dans une éventuelle imposition des revenus perçus par M. D______ pour ses activités au Nigéria nécessite une analyse différenciée, dans la mesure où le litige concerne cinq années fiscales durant lesquelles des changements de systèmes légaux sont intervenus.

14) Concernant l'ICC 2000, la situation doit s'apprécier à l'aune de l'aLCP.

a. Selon l'art. 2 al. 1 let. a aLCP, les personnes physiques domiciliées dans le canton étaient astreintes au paiement des impôts sur le revenu et sur leur fortune, dans les limites résultant de ladite loi.

b. L'impôt sur le revenu était perçu sur l'ensemble des revenus nets annuels des contribuables sous la forme de prestations périodiques ou de versements en capital, tant en argent qu'en nature, et qu'elle qu'en fût l'origine (art. 16 al. 1 aLCP). Le produit du travail, de l'exercice d'un métier ou d'une profession, d'un commerce, d'une industrie ou d'une entreprise lucrative, les salaires, traitements, allocations, honoraires, gratifications, commissions, tantièmes et jetons de présence étaient notamment considérés comme des revenus (art. 16 al. 2 let. a aLCP).

c. Sous la note marginale « revenu provenant de l'étranger », l'art. 26 al. 2 aLCP précisait que les personnes domiciliées dans le canton, qui retiraient un revenu d'une entreprise lucrative exploitée à l'étranger, pouvaient, si elles étaient imposables à l'étranger sur cette entreprise, déduire de leur revenu total une part proportionnelle au revenu de cette entreprise par rapport à leur revenu total, mais seulement de telle manière que la moitié au moins de leur revenu total fût imposable dans le canton. Les revenus issus de l'exercice d'une activité lucrative indépendante se déployant dans le cadre d'une entreprise sise à l'étranger étaient donc partiellement exemptés, à condition qu'ils aient été imposés à l'étranger.

d. Pour les personnes qui n'étaient imposables dans le canton que sur une partie de leur revenu ou de leur fortune, le taux de l'impôt devait toutefois être celui qui aurait été applicable au revenu total ou à la fortune totale du contribuable (art. 14 al. 1 aLCP)

e. Comme le droit fédéral, l'aLCP distinguait encore les intérêts de capitaux, créances, obligations et dépôts d'argent, les dividendes d'actions, les répartitions faites aux membres de sociétés à responsabilité limitée, les répartitions sur des parts d'intérêts, parts de fondateurs, bons ou actions de jouissance et autres avantages attachés à tous titres de sociétés anonymes, en commandite par actions, à responsabilité limitée et de sociétés coopératives (art. 16 al. 2 let. f aLCP), à savoir les rendements de la fortune mobilière. Ceux-ci étaient entièrement imposables en Suisse, indépendamment de l'origine suisse ou étrangère de la fortune qui les générait. Ils englobaient les prestations appréciables en argent, soit les distributions dissimulées de dividendes, visées par les termes « tous autres avantages attachés à tous titres de sociétés ».

En l'espèce, et pour les mêmes motifs que ceux déjà exposés en regard du droit fédéral, il convient de considérer que sur les USD 360'000.- versés à M. D______ durant l'année 2000 par X______Ltd, USD 100'000.- constituaient des avantages perçus par l'intéressé en raison de son seul statut d'actionnaire majoritaire, lesquels sont donc entièrement imposables à Genève en vertu de l'art. 16 al. 2 let. f aLCP, après déduction des 25% d'impôt payé sur cette somme au Nigéria.

Les USD 260'000.- restant doivent en revanche être qualifiés de revenus provenant d'une activité lucrative indépendante, exercée par le biais d'une entreprise sise à l'étranger. Dans la mesure où le contribuable a prouvé avoir payé 25% d'impôt nigérian sur ce montant, le solde en résultant doit donc être exempté de l'ICC dans la mesure prévue par l'art. 26 al. 2 aLCP, la moitié au moins de tous les revenus perçus par les contribuables durant l'année 2000 demeurant soumise à imposition. Ce montant de USD 260'000.- devra pour le surplus être pris en compte dans la détermination du taux d'imposition des contribuables (art. 14 al. 1 aLCP).

Les bordereaux de rappel d'impôt rectificatifs ICC 2000 du 7 juillet 2006 et 25 avril 2008 doivent, partant, être annulés et le dossier renvoyé à l'AFC-GE pour nouvelle décision de taxation dans le sens du présent considérant.

15) Concernant l'ICC dû pour les années 2001-B à 2004, il est régi par l'aLIPP.

a. Selon l'art. 2 al. 1 aLIPP-I, les personnes physiques étaient assujetties à l'impôt en raison de leur rattachement personnel lorsqu'elles étaient domiciliées ou séjournaient dans le canton.

b. L'assujettissement fondé sur un rattachement personnel était illimité ; il ne s'étendait toutefois pas aux entreprises, aux établissements stables et aux immeubles situés hors du canton (art. 5 al. 1 aLIPP-I). Pour les personnes qui n'étaient imposables dans le canton que sur une partie de leur revenu ou de leur fortune, le taux de l'impôt devait être celui qui aurait été applicable au revenu total ou à la fortune totale du contribuable (art. 6 aLIPP-I).

c. A teneur de l'art. 6 let. c aLIPP-IV dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2008, les dividendes, les parts de bénéfice, l'excédent de liquidation et tous autres avantages appréciables en argent provenant de participation de tout genre étaient en revanche imposables en tant que rendement de la fortune mobilière.

Strictement identiques à celles qui prévalaient en droit fédéral, ces dispositions relatives à l'assujettissement illimité des personnes physiques à raison de leur domicile, à l'exemption inconditionnelle bénéficiant aux entreprises situées hors du canton (avec réserve de progressivité) et à l'imposition des distributions dissimulées de dividendes en tant que rendements de la fortune mobilière, doivent, par souci d'harmonisation fiscale verticale et horizontale, être interprétées de la même manière (D. DE VRIES REILINGH, op. cit., p. 108 ss, n. 252 et 253).

Ainsi, s'agissant de la qualification des revenus perçus par le contribuable durant les années 2001 à 2004 pour ses activités en faveur d'X______Ltd et de W______Ltd et de leurs modes d'imposition, les solutions retenues en application de la LIFD valent mutatis mutandis pour l'impôt cantonal dû sur ces mêmes périodes (cf. supra consid. 12).

Les bordereaux de rappel d'impôt rectificatifs 2001-B à 2004 du 7 juillet 2006 et du 25 avril 2008 doivent, en conséquence, être annulés et le dossier renvoyé à l'AFC-GE pour nouvelles décisions de taxation dans le sens des considérants.

Amendes

16) L'AFC-GE conclut au rétablissement de ses décisions du 25 avril 2008, dont les deux bordereaux « amendes » de CHF 566'650.- (ICC) et de CHF 156'000.- (IFD) notifiés à cette même date. Ces amendes ont été réduites au ¾ des impôts soustraits en raison de l'importance de ces derniers, du fait que la soustraction s'est poursuivie sur plusieurs années, des connaissances en fiscalité du mandataire et de la bonne collaboration des contribuables.

Ces derniers ne contestent pas le principe des amendes, mais uniquement leur quotité. Ils considèrent que cette dernière aurait dû être réduite au cinquième de l'impôt soustrait, dans la mesure où ils auraient toujours eu l'intention de respecter leurs obligations fiscales et auraient spontanément annoncé le caractère inexact et incomplet de leurs déclarations.

Le TAPI ne s'est prononcé ni sur le principe, ni sur la quotité des amendes qu'il a purement et simplement annulées. Le fait que ces amendes demeuraient pertinentes, quel que soit le traitement fiscal réservé aux revenus perçus par M. D______ pour ses activités au Nigéria, dans la mesure où d'autres reprises sur la fortune mobilière et immobilière, non contestées par les contribuables, étaient notamment prévues, lui a manifestement échappé.

La chambre administrative ayant partiellement rétabli le droit pour l'AFC-GE d'imposer les revenus perçus par M. D______ pour ses activités au Nigéria, comme de procéder aux reprises sur la fortune mobilière et immobilière non contestées par les contribuables, la question de la quotité des amendes infligées pour soustraction d'impôt IFD et ICC doit être tranchée. Cela fait, le dossier sera renvoyé à l'AFC-GE pour qu'elle fixe à nouveau le montant exact desdites amendes, lequel dépendra du montant des impôts IFD et ICC soustraits, une fois recalculés conformément aux considérants qui précèdent.

17) a. Selon l'art. 175 LIFD, le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu'une taxation ne soit pas effectuée alors qu'elle devrait l'être, ou qu'une taxation entrée en force soit incomplète, est puni de l'amende (al. 1). En règle générale, l'amende est fixée au montant de l'impôt soustrait. Si la faute est légère, l'amende peut être réduite jusqu'au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut être triplée (al. 2).

b. La quotité de l'amende n'est pas déterminée en fonction de l'intention de soustraire ou de la négligence qui peut être reprochée aux contribuables, mais de l'intensité de sa faute qui doit être fixée en fonction de sa culpabilité (art. 106 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 [CP - RS 311.0] ; ATF 135 II 86 consid. 4.4 ; ATA/18/2013 du 8 janvier 2013 consid. 8). En revanche, le fait que l'auteur ait agi intentionnellement ou par négligence peut avoir une incidence sur l'intensité de la faute et, partant, sur la quotité de l'amende. Il y a négligence lorsque, par une imprévoyance coupable, un contribuable ne se rend pas compte ou ne tient pas compte des conséquences de son acte (RDAF 2003 II 622, 631 ; X. OBERSON, Droit fiscal suisse, 2012, § 26, p. 587, n. 18). Le comportement est intentionnel dès lors qu'il est établi avec une sécurité suffisante que le contribuable était conscient que les informations données étaient incomplètes ou incorrectes ; si cette conscience est établie, on peut alors présumer l'intention ou tout du moins le dol éventuel (X. OBERSON, op. cit., § 26, p. 586, n. 17). Une telle présomption est difficile à renverser à teneur de la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, celui-ci estimant que l'on peine à imaginer quel autre motif que la volonté de se soustraire à l'impôt pourrait conduire un contribuable à fournir au fisc des informations qu'il sait incorrectes ou incomplètes (ATF 114 Ib 27 consid. 3a ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C_898/2011 du 28 mars 2012 consid. 2.2 ; 2C_528/2011 du 17 janvier 2012 consid. 2 et les arrêts cités ; RDAF 2003 II 632 ss, notamment 637 et la jurisprudence citée ; ATA/18/2013 précité ; ATA/646/2012 du 25 septembre 2012 ; ATA/611/2012 du 11 septembre 2012).

c. Selon l'art. 126 al. 1 LIFD, le contribuable doit faire tout ce qui est nécessaire pour assurer une taxation complète et exacte. Il doit en particulier remplir la formule de déclaration d'impôt de manière conforme à la vérité et complète (art. 124 al. 2 LIFD). Le contribuable assume à cet effet la responsabilité de l'exactitude et de l'intégralité de sa déclaration d'impôt. S'il se heurte à une incertitude quant à un élément de fait, il ne doit pas la dissimuler, mais bien la signaler dans sa déclaration. En tout état de cause, il lui incombe de présenter les faits de manière complète et correcte (RDAF 2003 II 622, 627). Le contribuable qui mandate une fiduciaire pour remplir sa déclaration d'impôt n'est pas déchargé de ses obligations et responsabilités fiscales, mais doit supporter les inconvénients d'une telle intervention ; il répond en particulier des erreurs de l'auxiliaire qu'il n'instruit pas correctement ou dont il ne contrôle pas l'activité, s'il était en mesure de reconnaître ces erreurs (RDAF 2003 II 632, 639).

d. Jusqu'au 31 décembre 2009, la dénonciation spontanée entraînait une réduction de la peine au cinquième de l'impôt soustrait (art. 175 al. 3 aLIFD). Depuis le 1er janvier 2010, le législateur a prévu que le contribuable n'encourt pas d'amende pour sa première dénonciation spontanée, l'amende demeurant réduite d'un cinquième pour toute dénonciation spontanée ultérieure (art. 175 al. 3 et 4 LIFD). On peut ainsi se demander si, en vertu de la lex mitior applicable à la répression des infractions fiscales (art. 2 al. 2 et 333 al. 1 CP ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C_480/2009 du 16 mars 2010 consid. 6.1), cette modification légale ne devrait pas être prise en compte. La question peut toutefois souffrir de demeurer indécise, dans la mesure où la définition de la notion de dénonciation spontanée n'a pas varié avec l'entrée en vigueur du nouveau droit.

e. La notion même de dénonciation suppose que le contribuable annonce de lui-même son infraction à l'autorité fiscale alors que celle-ci n'en a encore pas eu connaissance d'une autre manière (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_480/2009 précité consid. 6.1 et les références citées). Une telle dénonciation doit intervenir spontanément et comprendre tous les éléments de revenus et de fortune non déclarés jusque-là. Elle est possible aussi longtemps que l'autorité fiscale n'a pas eu connaissance de l'infraction d'une autre manière, soit par elle-même, soit par l'effet des indications de tierces personnes. La spontanéité fait défaut lorsque le contribuable agit sous la menace de tiers ou alors que les autorités fiscales sont déjà en train d'enquêter sur son dossier. En d'autres termes, le contribuable ne doit pas être amené à procéder à une déclaration spontanée sous l'emprise d'une crainte fondée quant à l'imminence de la découverte de la soustraction par l'autorité fiscale (P. Sansonetti, Commentaire romand - Impôt fédéral direct - Commentaire sur la loi sur l'impôt fédéral direct, Bâle 2008, ad. art. 175, p. 1502, n. 49).

f. L'administration doit faire preuve de sévérité afin d'assurer le respect de la loi et jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour infliger une amende et pour en fixer son montant (A. GRISEL, Traité de droit administratif, Neuchâtel 1984, p. 646-648 ; ATA/18/2013 précité ; ATA/693/2009 du 22 décembre 2009 ; ATA/632/2001 du 9 octobre 2001). La chambre de céans ne la censure qu'en cas d'excès (ATA/410/2007 du 28 août 2007 consid. 20 ; ATA/317/2007 du 12 juin 2007 consid. 7). L'amende doit en particulier respecter le principe de la proportionnalité (ATA/518/2004 du 8 juin 2004).

En l'espèce, il est établi que les contribuables ont omis d'indiquer dans leurs déclarations fiscales 2001B et 2002 non seulement les revenus perçus par M. D______ pour ses activités au Nigéria, mais également les rendements de leurs immeubles à l'étranger, ainsi que ceux résultant de leur fortune mobilière. Ces omissions, dont les effets se sont reportés sur les taxations d'office pour l'IFD 2003 et 2004, réalisent, au plan objectif, les conditions d'une soustraction consommée d'impôts au sens de l'art. 175 al. 1 LIFD, point qui n'est pas contesté.

Au plan subjectif, les contribuables se prévalent de leur ignorance en matière fiscale, ainsi que d'erreurs et de négligences commises par leurs mandataires successifs. A l'époque des faits, M. D______ exerçait toutefois la profession de directeur d'Y______, de sorte qu'il disposait nécessairement d'une expérience du monde des affaires et d'une connaissance, même limitée, de la fiscalité. Eussent-elles été commises par ses seuls mandataires, les omissions en cause ne pouvaient ainsi pas lui échapper, compte notamment tenu de leur ampleur et de leur répétition. Le fait que ses revenus issus de ses activités au Nigéria étaient susceptibles d'être exemptés ne le dispensait en effet pas de les déclarer, ni de fournir toutes explications utiles sur leur mode d'acquisition, ce dont M. D______ pouvait se rendre compte à la seule lecture des formules de déclaration. L'intéressé ne pouvait de même pas ignorer que les immeubles, dont il était propriétaire à l'étranger, devaient figurer dans ses déclarations. Il était parfaitement conscient de la pertinence fiscale de tous ces éléments que le formulaire du service de l'impôt à la source, auquel il avait répondu le 2 novembre 1999, avait déjà mis en exergue. Dans pareilles circonstances où tous ses revenus en provenance de l'étranger n'ont pas été déclarés, l'on peut suspecter que M. D______ a volontairement transmis des informations incomplètes et inexactes à ses mandataires ou que ces derniers ont agi sur ses instructions, en vue de réduire son imposition. Si tel n'a pas été le cas, force est à tout le moins d'admettre que le contribuable avait les moyens de se rendre compte du caractère incomplet et inexact de ses déclarations fiscales à la signature de celles-ci et qu'il en a accepté les conséquences, soit qu'il a agi par dol éventuel pour obtenir une taxation moins élevée. C'est donc intentionnellement que M. D______ a commis l'infraction de soustraction consommée prévue par l'art. 175 LIFD.

Il reste à déterminer si les contribuables se sont spontanément dénoncés à l'AFC-GE, circonstance qui entraînerait soit la suppression de toute amende (art. 175 al. 3 LIFD), soit une réduction de sa quotité au cinquième des impôts soustraits (art. 175 al. 3 aLIFD) suivant le droit applicable. La chronologie des événements, telle qu'elle résulte de différentes pièces figurant au dossier, infirme toutefois cette thèse. Le 22 novembre 2004, alors qu'elle enquêtait sur l'ICC et l'IFD 1999, l'AFC-GE a sollicité des contribuables des renseignements sur leurs biens immobiliers en Hongrie et au Nigéria. Elle leur a enjoint d'indiquer s'ils percevaient d'autres revenus de sources étrangères, respectivement de fournir les éventuels justificatifs d'imposition de ceux-ci. Le 10 décembre 2004, M. D______ a mandaté M. T______ afin qu'il le représente auprès de l'AFC-GE, mandataire qui a répondu à la demande de renseignements de l'AFC-GE par courrier du 17 décembre 2004. La procédure en rappel d'impôts IFD et ICC a été ouverte le 13 octobre 2005, tandis que MM. D______ et T______ ont rencontré des représentants de l'AFC-GE le 31 octobre 2005 pour leur exposer la situation fiscale du premier cité. Ce n'est donc pas leur taxation d'office pour les années 2003 et 2004, lesquelles sont intervenues ultérieurement (soit les 21 janvier 2005 et 28 octobre 2005), mais bien le courrier de l'AFC-GE du 22 novembre 2004 qui a conduit les contribuables à collaborer et à fournir les renseignements nécessaires au complètement de leur taxation. L'allégué selon lequel M. T______ aurait rencontré Mme N______, avant que celle-ci n'adresse le courrier du 22 novembre 2004, n'est en outre pas crédible, dans la mesure où il n'y pas trace d'une telle rencontre dans le dossier, contrairement aux entretiens des 13 octobre 2005 et 30 octobre 2007. Il est également contredit par le fait que M. D______ n'avait, à cette époque, pas encore mandaté M. T______ pour qu'il le représente auprès de l'AFC-GE. Enfin, l'ouverture de la procédure de rappel d'impôts a bien eu lieu avant l'entretien du 31 octobre 2005, de sorte que la chronologie des faits proposée par les contribuables est entièrement tronquée. Force est ainsi de constater que les contribuables ne se sont pas dénoncés spontanément auprès de l'AFC-GE, dans la mesure où cette dernière enquêtait déjà sur leur dossier lorsqu'ils se sont résolus à collaborer. Ils ne peuvent par conséquent pas bénéficier d'une réduction ou d'une suppression de leur peine à ce titre, que ce soit en application de l'ancien ou du nouveau droit.

L'AFC-GE n'a donc pas excédé son pouvoir d'appréciation en fixant la quotité de l'amende due pour soustraction consommée d'IFD au ¾ de l'impôt soustrait. Cette quotité réduite tient dûment compte de la bonne collaboration dont les contribuables ont fait preuve ultérieurement, collaboration sans laquelle l'AFC-GE aurait sans doute pu s'en tenir à la règle générale prévue par l'art. 175 al. 2 LIFD, compte tenu de l'ampleur de la soustraction et de la faute commises par les intéressés.

Tant dans son principe que dans sa quotité (¾ des impôts soustraits), l'amende due par les contribuables pour soustraction consommée d'IFD doit, en conséquence, être confirmée. Le bordereau « amende » IFD du 25 avril 2008, qui s'est substitué à celui du 4 août 2006, sera annulé sous cette réserve et le dossier renvoyé à l'AFC-GE pour nouveau calcul de la pénalité due.

18) S'agissant de l'amende due par les contribuables pour soustraction consommée d'ICC, elle est régie par l'art. 69 LPFisc.

Bien que des soustractions afférentes à l'année 2000 aient été commises, cette disposition doit également leur être appliquée en vertu du principe de la lex mitior. L'ancien droit serait en effet moins favorable aux contribuables, puisqu'une soustraction d'impôt commise intentionnellement était alors passible d'une amende pouvant s'élever jusqu'à dix fois le montant de l'impôt éludé (art. 341 al. 1 aLCP ; ATA/306/2012 du 15 mai 2012, consid. 10a). Selon le nouveau droit, cette amende ne peut s'élever que jusqu'au triple de l'impôt soustrait, un montant équivalant à ce dernier étant en règle générale retenu (art. 69 al. 2 LPFisc).

L'art. 69 LPFisc étant par ailleurs strictement identique à l'art. 175 LIFD, les considérations qui précèdent quant au principe et à la quotité de l'amende due au titre du droit fédéral valent mutatis mutandis pour celle qui doit être infligée aux contribuables en application du droit cantonal.

Tout en en confirmant le principe et la quotité fixée au ¾ des impôts soustraits, la chambre administrative annulera donc le bordereau « amende » ICC du 25 avril 2008, qui s'est substitué à celui du 4 août 2006, et renverra le dossier à l'AFC-GE pour nouveau calcul de la pénalité due.

19) Le recours sera donc partiellement admis, le jugement du TAPI annulé, les décisions sur réclamation du 25 avril 2008 partiellement maintenues et le dossier renvoyé à l'AFC-GE pour nouvelles décisions de rappel d'impôts et d'amende dans le sens des considérants.

Vu l'issue du litige, un émolument - réduit - de CHF 500.- sera mis à la charge de Monsieur et Madame D______ qui succombent en partie (art. 87 al.1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'000.- leur sera en revanche allouée, à charge de l'Etat de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

 

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 décembre 2011 par l'administration fiscale cantonale contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 31 octobre 2011 (JTAPI/1211/2011) ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 31 octobre 2011 (JTAPI/1211/2011) ;

confirme les décisions sur réclamation du 25 avril 2008, en tant qu'elles procèdent à des rappels d'impôt IFD 2001-B à 2004 et ICC 2000 à 2004 en lien avec la fortune mobilière et immobilière de Monsieur et Madame D______ et leur infligent des amendes IFD et ICC pour soustraction consommée d'impôts ;

les annule pour le surplus ;

annule les bordereaux de rappel d'impôt IFD 2001-B à 2004 et ICC 2000 à 2004 du 7 juillet 2006 et du 25 avril 2008, ainsi que les bordereaux « amende » IFD et ICC du 25 avril 2008 ;

renvoie le dossier à l'administration fiscale cantonale pour établissement de nouveaux bordereaux de rappel d'impôt IFD 2001-B à 2004 et ICC 2000 à 2004, ainsi que de nouveaux bordereaux « amende » IFD et ICC dans le sens des considérants ;

met à la charge de Madame et Monsieur D______ un émolument de CHF 500.- ;

alloue à Madame et Monsieur D______ une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à charge de l'Etat de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à l'administration fiscale cantonale, à Mes Dominique Gay et Jérôme Meyer, avocats de Madame et Monsieur D______, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'à l'administration fédérale des contributions.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

J.- M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :