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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2226/2015

ATA/1417/2017 du 17.10.2017 sur JTAPI/1252/2016 ( ICCIFD ) , REJETE

Descripteurs : DROIT FISCAL ; IMPÔT ; IMPÔT CANTONAL ET COMMUNAL ; IMPÔT FÉDÉRAL DIRECT ; IMPÔT SUR LE BÉNÉFICE DES ENTREPRISES ; DÉCLARATION D'IMPÔT ; TAXATION CONSÉCUTIVE À UNE PROCÉDURE ; PRESTATION APPRÉCIABLE EN ARGENT ; AMENDE ; NÉGLIGENCE ; FARDEAU DE LA PREUVE
Normes : Cst.29.al2 ; LIFD.151.al1 ; LIFD.57 ; LIFD.58.al1 ; LHID.53.al1 ; LHID.24.al1 ; aLIPM.121 ; LPFisc.59.al1
Résumé : Procédure en rappel et en soustraction d'impôts. La société recourante a octroyé des prêts sans intérêts à des sociétés du même groupe, ces intérêts non perçus constituant des prestations appréciables en argent. Problématique de la réalisation des conditions d'une procédure de rappel d'impôt : compte tenu des déclarations fiscales de la recourante, l'AFC-GE n'était aucunement en mesure de constater l'existence de prestations appréciables en argent. Examen du bien-fondé des reprises effectuées : la recourante soutient qu'il conviendrait de porter en déduction du bénéfice imposable une charge d'intérêt pour les prêts reçus de son actionnaire qui lui auraient permis de supporter les prêts accordés aux filiales. Ce raisonnement ne peut être suivi. Le droit fiscal ne permettant pas de tenir compte des relations existant entre sociétés d'un même groupe, les opérations entre sociétés d'un groupe doivent intervenir comme si elles étaient effectuées avec des tiers dans un environnement de libre concurrence. Par ailleurs, la recourante n'ayant pas effectivement payé d'intérêts pour ces emprunts, elle ne peut prétendre à la déduction d'intérêts fictifs dont elle n'a pas eu à s'acquitter. Enfin, elle ne démontre aucunement que les emprunts contractés auraient effectivement servi à financer les prêts litigieux. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2226/2015-ICCIFD ATA/1417/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 octobre 2017

4ème section

 

dans la cause

 

A______ SA
représentée par Monsieur Patrick Jeanneret, mandataire

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE
et
ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 novembre 2016 (JTAPI/1252/2016)


EN FAIT

1) Le présent litige concerne l'imposition pour les années fiscales 2004 à 2012 de la société A______ SA (ci-après : la contribuable ou A______), dont le siège se trouvait alors à Genève et a été transféré à Fribourg en août 2017.

À teneur du registre du commerce, A______ a pour but de fournir des « prestations de service dans le domaine administratif et financier ».

2) La contribuable a été mise au bénéfice de trois statuts fiscaux successifs, applicables aux périodes 2001 à 2005, 2006 à 2010, et 2011 à 2016.

Selon le premier de ces statuts, les produits nets de placements étaient pleinement imposables. À teneur des statuts fiscaux afférents aux périodes 2006 à 2010, puis 2011 à 2016, son bénéfice était imposé, au niveau cantonal, conformément aux prescriptions applicables aux sociétés auxiliaires selon leur source, et, au niveau fédéral, dans son intégralité au taux prévu à l'art. 68 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11).

À teneur du premier accord sur le statut fiscal de la contribuable, l'activité de celle-ci consistait principalement à refacturer à des clients de sociétés étrangères des factures que ces sociétés lui adressaient. Les deux accords suivants précisent que la contribuable refacturait les produits du groupe issus d'usines à l'étranger à des succursales du groupe (agents étrangers) chargées de la commercialisation desdits produits.

3) Les taxations fiscales opérées par l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) sur la base des déclarations et des pièces annexées que la contribuable avait remises pour les années 2004 à 2012 n'ont pas été contestées et sont ainsi entrées en force.

4) Hormis celles relatives aux années 2011 et 2012, chaque déclaration de la contribuable contenait, dans les dettes de la société, une rubrique « prêt actionnaire ». La contribuable n'a fait valoir des intérêts de dettes sur ces prêts actionnaires que lors des années 2009 (EUR 234'350.-) et 2010 (EUR 197'314.-).

Durant toutes ces années, la contribuable n'a jamais déclaré de créances ou prêts accordés aux actionnaires, associés ou personnes proches. Tous les bilans produits en annexe aux déclarations classaient les débiteurs en deux catégories, « clients » et « divers ». Aucune autre pièce accompagnant les déclarations fiscales n'en détaillait l'identité précise. Selon les comptes d'exploitation produits, la contribuable a déclaré des revenus d'intérêts oscillant entre CHF 8.51 et CHF 21'858.73, hormis lors de l'année 2005 où ils étaient de CHF 88'957.76.

5) Les 19 et 20 mai 2014, l'administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) a effectué un contrôle des comptes 2009 à 2012 de A______, durant lequel il a été constaté que quatre avances consenties à des sociétés apparentées à l'étranger revêtaient un caractère de prêt. Aucun intérêt n'ayant été comptabilisé par A______, il s'agissait de prestations appréciables en argent. Celles-ci s'élevaient à CHF 237'754.- en 2009, CHF 207'266.- en 2010, CHF 179'670.- en 2011 et CHF 157'092.- en 2012.

6) Les décisions de l'AFC-CH sont entrées en force.

7) Par pli du 25 novembre 2014, l'AFC-GE a informé la contribuable qu'elle ouvrait à son encontre une procédure en rappel d'impôts et soustraction s'agissant des impôts cantonaux et communaux (ci-après : ICC) et de l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 2004 à 2012. Elle avait été informée par l'AFC-CH des prestations appréciables en argent susmentionnées. Des reprises correspondant aux montants desdites prestations allaient être effectuées en cas de déclaration inexacte.

Afin de pouvoir déterminer le montant des intérêts non perçus durant les années 2004 à 2008, l'AFC-GE a demandé à la contribuable de lui remettre les extraits des comptes « débiteurs » au 31 décembre desdites années, ainsi que tout autre document utile.

8) La contribuable a fourni des explications et des documents à l'AFC-GE lors d'un entretien tenu dans les locaux de celle-ci, ainsi que par courrier.

Elle a notamment expliqué le fonctionnement du groupe auquel elle appartenait et a remis deux tableaux indiquant le détail des postes « débiteurs » et « créanciers » portant sur chaque année contrôlée, ainsi que la liste des prêts octroyés en diverses monnaies à trois sociétés du groupe mentionnées lors de cet entretien, à savoir B______ Sàrl, Italie, C______SA, Suisse, et D______Inc, USA.

9) Le 13 mars 2015, l'AFC-GE a informé la contribuable que les procédures en rappel et soustraction d'impôts étaient terminées. Elle lui a notifié des bordereaux de rappel d'impôt et des bordereaux d'amende ICC/IFD pour les années 2004 à 2012.

Les montants fixés dans ces bordereaux du 13 mars 2015 étaient les suivants :

année

impôt

rappel d'impôt (CHF)

amende (CHF)

2004

ICC

65'771.30

32'885.-

IFD

23'791.50

11'895.-

2005

ICC

88'014.-

44'007.-

IFD

31'849.50

15'924.-

2006

ICC

2'227.30

1'113.-

IFD

23'893.50

11'946.-

2007

ICC

3'529.25

1'764.-

IFD

27'846.-

13'923.-

2008

ICC

3'261.85

1'630.-

IFD

24'803.-

12'401.-

2009

ICC

760.90

380.-

IFD

20'213.-

10'106.-

2010

ICC

2'357.-

1'178.-

IFD

17'620.50

8'810.-

2011

ICC

2'070.30

1'035.-

IFD

15'266.-

7'633.-

2012

ICC

418.50

209.-

IFD

13'353.50

6'676.-

Les prestations appréciables en argent (absence d'intérêts sur prêts) ajoutées aux bénéfices de la société s'élevaient respectivement à : CHF 279'997.- pour 2004, CHF 374'687.- pour 2005, CHF 281'048.- pour 2006, CHF 327'566.- pour 2007, CHF 291'751.- pour 2008, CHF 237'754.- pour 2009, CHF 207'266.- pour 2010, CHF 179'670.- pour 2011, et CHF 157'092.- pour 2012.

Les amendes étaient infligées au motif que la contribuable n'avait pas été imposée sur sa réelle capacité contributive faute d'avoir omis de comptabiliser des intérêts sur les prêts octroyés à des sociétés de son groupe. Leur quotité avait été fixée à la moitié du montant des impôts soustraits, compte tenu du caractère non intentionnel de la soustraction et de sa bonne collaboration.

10) Le 10 avril 2015, la contribuable a élevé réclamation à l'encontre des bordereaux susmentionnés.

Durant les années en cause, A______ avait fonctionné en tant que société de « factoring » pour le compte de ses filiales. La filiale italienne étant en perte de façon récurrente, il était économiquement impossible de lui demander de payer des intérêts sur les balances courantes entre A______ et cette société ; ceux-ci auraient encore aggravé sa situation. En outre, les soldes de trésorerie ne constituaient pas des prêts aux filiales, mais une forme de crédit courant de nature commerciale sur les transferts de fonds des positions débitrices de l'activité des filiales. Ces créances représentaient donc des balances à vue de courte durée et non de véritables prêts pouvant justifier un loyer.

Par ailleurs, le régime du statut de société auxiliaire devait lui être appliqué déjà pour les périodes 2004 et 2005, et non seulement à compter de l'année 2006.

Si l'AFC-GE exigeait des intérêts pour les prêts accordés à des filiales, elle devrait alors tenir compte, pour demeurer cohérente et appliquer correctement le principe de la pleine concurrence, d'une charge d'intérêts sur les prêts reçus de son actionnaire, qui lui avaient sans doute permis de supporter financièrement les prêts accordés aux filiales. En application des taux des circulaires de l'AFC-CH, il fallait porter en déduction du bénéfice imposable les intérêts passifs suivants : CHF 381'534.- en 2004, CHF 147'750.- en 2005, CHF 207'009.- en 2006, CHF 256'133.- en 2007, CHF 255'887.- en 2008, CHF 10'997.- en 2009, CHF 45'035.- en 2011 et CHF 2'720.- en 2012.

Les amendes devaient être annulées puisque la contribuable n'avait pas cherché à dissimuler des éléments de revenus ni commis un crime ou un délit. Si une tentative de soustraction devait néanmoins être retenue, la quotité des amendes devait être réduite aux deux neuvièmes de l'impôt soustrait.

11) Par décisions sur réclamation du 28 mai 2015, l'AFC-GE a maintenu les reprises et les amendes infligées pour l'ICC et l'IFD 2004 à 2012.

12) Par acte du 25 juin 2015, la contribuable a interjeté recours contre ces décisions auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI), concluant principalement à leur annulation et à ce qu'il soit considéré qu'elle était légitimée à ne pas facturer d'intérêts aux sociétés affiliées, et subsidiairement à ce que les amendes soient réduites au deux neuvièmes de l'impôt soustrait.

Elle n'avait pas contesté les reprises effectuées par l'AFC-CH pour les années 2009 à 2012, mais cela ne préjugeait en rien des moyens de droit pouvant être invoqués dans le cadre du contrôle effectué par l'AFC-GE.

La recourante n'avait pas eu la possibilité de faire valoir d'autres motifs de reprises et corrections de taxation qui lui auraient été favorables, alors que la réouverture des procédures de taxation devait permettre la révision de l'ensemble de la taxation. Son droit d'être entendue avait donc été violé. L'autorité intimée s'était limitée à reprendre les éléments arrêtés par l'AFC-CH pour 2009 à 2012 et avait procédé par analogie pour 2004 à 2008, sans revoir l'ensemble des taxations. De même, les décisions sur réclamation reprenaient les termes des décisions initiales, sans qu'il n'ait été procédé à un examen des motifs soulevés dans la réclamation.

Pour le surplus, elle reprenait les arguments développés dans sa réclamation.

13) L'AFC-GE a conclu au rejet du recours.

14) Dans sa réplique, la recourante a persisté dans ses conclusions et développé notamment certains arguments.

La question de savoir si une société telle que la recourante ne pouvait ignorer que les prêts octroyés ou les emprunts obtenus n'étaient en principe pas exempts d'intérêts était une question subjective et de nature économique. Pour une société dite de « factoring » et de prestations de services, « il s'agissait avant tout de gestion de balances liquides et de positions débitrices et créancières à très court terme liées aux prestations rendues et non à des prêts en bonne et due forme, [la recourante] n'ayant pas pour vocation de financer des sociétés du groupe ». C'était en toute bonne foi qu'elle estimait ne pas avoir à comptabiliser des intérêts sur des prêts à des filiales en difficulté financière et donc ne pas en acquitter à ses bailleurs de fonds du même groupe. On ne pouvait lui reprocher de ne pas avoir fait valoir des charges liées à des revenus qu'elle estimait ne pas avoir.

La recourante n'avait pas abandonné ses créances à ses filiales, mais avait estimé qu'il ne se justifiait commercialement pas d'exiger des intérêts sur des soldes de prestations impayées. Un tiers n'agirait d'ailleurs pas autrement et n'exigerait pas de ses clients le paiement d'un intérêt sur des factures impayées sans nuire à leur relation commerciale et renoncerait éventuellement à l'encaissement du principal si ces débiteurs étaient fortement endettés, ce qui était le cas en l'espèce.

En fait, l'autorité intimée utilisait la procédure de rappel d'impôt pour corriger une taxation qu'elle aurait pu aisément établir dans la procédure de taxation ordinaire. L'AFC-GE, qui n'avait jamais manifesté une velléité de corriger la façon de faire de la recourante jusqu'à l'intervention de l'AFC-CH, aurait pu contester l'absence d'intérêts lors de chaque déclaration d'impôt. À cet égard, la recourante n'avait jamais tenté de dissimuler cette absence d'intérêts ; au contraire, lors de ses demandes de statut fiscal, elle avait expliqué par le biais de son mandataire la nature exacte de ses activités, ce qui avait entraîné une modification dudit statut en 2006 afin de tenir compte de cette réalité spécifique.

15) L'AFC-GE a dupliqué, persistant intégralement dans les termes et considérants de sa réponse.

16) Faisant suite à une demande de renseignements du TAPI, l'AFC-GE a également produit un tableau expliquant le calcul des reprises effectuées.

À teneur dudit tableau, l'AFC-GE a déterminé le total des prêts effectifs moyens effectués chaque année en CHF, USD et EUR en faveur de quatre sociétés du groupe, et appliqué un taux d'intérêts variant, en fonction des années et des monnaies, de 1,5 % à 5 %. Une fois les reprises calculées, les montants ont été convertis en CHF.

17) Par jugement du 28 novembre 2016, le TAPI a rejeté le recours de A______ et confirmé les décisions entreprises.

Les conditions fixées par la loi pour permettre l'ouverture de procédures de rappel d'impôt étaient réunies. Compte tenu des déclarations fiscales et des pièces annexées à ces dernières, l'AFC-GE n'était aucunement en mesure de se rendre compte d'une inexactitude flagrante : elle ne pouvait pas constater que la recourante avait transmis des sommes importantes à des sociétés soeurs, et ne pouvait dès lors pas s'interroger sur l'éventuelle perception d'intérêts à ce titre. Ce n'était qu'à l'occasion de l'information reçue de l'AFC-CH qu'elle avait eu connaissance du détail de ces éléments.

Le droit suisse ne permettant pas de tenir compte des relations existant entre sociétés d'un même groupe, la recourante ne pouvait se dispenser de demander des intérêts sur les sommes remises à ses sociétés soeurs. Dans un contexte de pleine concurrence, il était manifeste que le taux d'intérêts d'un prêt dépendait du risque et était ainsi plus élevé dans le cas où la société à laquelle des fonds étaient prêtés était dans une situation financière obérée.

Le rappel d'impôt n'équivalait pas à un nouvel examen de la situation mais ne portait que sur les points pour lesquels l'autorité fiscale disposait de nouveaux éléments. En l'espèce, les nouveaux éléments ne concernaient que les prestations appréciables en argent résultant de l'absence d'intérêts sur les avances effectuées aux sociétés soeurs et nullement l'absence de rémunération des prêts de l'actionnaire. Ce dernier élément, que la recourante aurait dû faire valoir dans ses déclarations fiscales, ne pouvait être pris en compte. Par ailleurs, celle-ci ne démontrait pas avoir effectivement payé des intérêts pour les sommes empruntées, et ne pouvait ainsi prétendre à la déduction de charges dont elle n'avait pas eu à s'acquitter.

Le statut accordé le 8 décembre 2006 prévoyant explicitement une exonération à hauteur de 80 % pour l'ICC alors que celui du 4 octobre 2000 ne le spécifiait pas démontrait qu'une telle exonération ne résultait pas simplement des dispositions légales sur lesquelles ces statuts étaient fondés. Cette exonération ne se justifiait ainsi pas pour les années 2004 et 2005.

Enfin, la recourante avait transmis à l'AFC-GE des déclarations fiscales incorrectes et ne comptabilisant pas des revenus, engendrant ainsi une irrégularité dans sa comptabilité. Soustraction avait donc bien été commise, indépendamment de la représentation subjective qu'avait la recourante des événements à l'époque. L'autorité intimée avait retenu que la contribuable n'avait pas déclaré les revenus équivalents aux intérêts litigieux par négligence. Le TAPI ne pouvait se montrer plus compréhensif, la recourante n'étant pas censée ignorer que la question de la rémunération des prêts consentis à des sociétés soeurs se posait en droit fiscal sous l'angle des prestations appréciables en argent.

Quant à la quotité de l'amende, elle s'inscrivait dans le cadre légal et ne consacrait pas un abus ou un excès du large pouvoir d'appréciation de l'autorité intimée.

18) Par acte du 31 décembre 2016, A______ a interjeté recours à l'encontre du jugement précité auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative), concluant principalement à son annulation, et subsidiairement à ce que la cause soit renvoyée à l'AFC-GE afin que les taxations soient revues en prenant en compte les charges d'intérêts qui auraient dû être payées aux créanciers et à l'actionnaire sur le compte débiteur de A______.

A______ renonçait à demander l'application rétroactive du statut fiscal accordé le 8 décembre 2006 et acceptait les conclusions du TAPI sur ce point.

L'AFC-GE n'avait pas le droit d'ouvrir une procédure en rappel d'impôts, au motif qu'elle disposait des éléments nécessaires pour procéder aux investigations souhaitées : elle connaissait le caractère de « groupe » des activités de A______ et ses liens quasi exclusifs avec des sociétés apparentées, et il lui était aisé, sans expertise particulière, de constater d'importants actifs débiteurs sans rémunération ou avec de très faibles rémunérations. À cet égard, selon les règles du droit comptable et de droit fiscal, A______ n'était nullement tenue de fournir l'identité de ses débiteurs, sous réserve d'une demande expresse de l'autorité de taxation, qui ne l'avait jamais fait lors des procédures de taxation.

Les conditions du rappel d'impôt n'étant pas remplies, les amendes ne se justifiaient pas et devaient être annulées.

Si l'ouverture de la procédure en rappel d'impôts devait néanmoins être considérée comme légale, A______ contestait la méthode et la détermination de la reprise des intérêts actifs. Dès lors qu'il s'agissait de déterminer si une transaction entre sociétés apparentées avait été établie telle qu'elle l'aurait été entre tiers, il fallait prendre en compte l'ensemble des éléments qui se rapportaient à cette transaction. Le TAPI, qui se référait à la méthode du « prix comparable » pour déterminer le prix de pleine concurrence, ne l'appliquait pas conformément aux directives de l'OCDE, puisqu'il se limitait à comparer le prix de transfert « externe » sans tenir compte de ce qui constituait le prix de la transaction. Il convenait d'appliquer plutôt la méthode du « coût majoré ». Le raisonnement du TAPI privait A______ d'obtenir une taxation équitable et proportionnelle à sa capacité contributive. Si A______ ne percevait pas d'intérêts sur les prêts octroyés c'était parce qu'elle-même n'en payait pas sur les fonds précisément utilisés pour effectuer ces « prêts ». Elle ne pouvait dès lors prétendre à la déduction d'une charge qu'elle-même ne refacturait pas.

19) L'AFC-GE a conclu au rejet du recours.

L'AFC-GE ne pouvait constater, à la lecture des déclarations fiscales, que A______ avait transmis des sommes importantes à des sociétés soeurs. Sa connaissance du lien étroit de A______ avec des sociétés apparentées ne pouvait lui permettre de savoir qu'elle avait octroyé des prêts, ce d'autant plus que le but de A______ n'était pas l'octroi de prêts. Sans indice particulier, l'AFC-GE n'avait aucune obligation de procéder à des investigations complémentaires, de sorte que les conditions autorisant l'ouverture d'une procédure de rappel d'impôt étaient réalisées.

Le rappel d'impôt n'équivalait pas à un nouvel examen complet de la taxation, mais ne portait que sur les points pour lesquels l'autorité fiscale disposait de nouveaux éléments. En l'espèce, la recourante n'avait pas fait valoir la déduction qu'elle requérait actuellement dans les déclarations fiscales litigieuses.

C'était enfin à juste titre que le TAPI avait fait référence aux diverses directives émises par l'AFC-CH portant sur les taux d'intérêts déterminants pour le calcul des prestations appréciables en argent, directives utilisées par l'AFC-GE pour établir les reprises.

20) A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions et reprenant pour l'essentiel les arguments contenus dans son recours.

21) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 2 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17  ; art. 145 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige concerne les périodes fiscales 2004 à 2012 tant en matière d'ICC qu'en matière d'IFD. Il convient préalablement d'examiner le droit matériel applicable.

a. De jurisprudence constante, les questions de droit matériel sont résolues par le droit en vigueur au cours des périodes fiscales litigieuses (arrêts du Tribunal fédéral 2C_663/2014 du 25 avril 2015 consid. 4 ; 2C_476/2014 du
21 novembre 2014 consid. 4.1 ; ATA/1017/2015, ATA/1018/2015 et ATA/1019/2015 du 29 septembre 2015). Le rappel d'impôts relevant du droit matériel, le droit applicable obéit aux mêmes règles (arrêts du Tribunal fédéral 2C_663/2014 précité consid. 4 ; 2C_620/2012 du 14 février 2013 consid. 3.1 ; ATA/1017/2015, ATA/1018/2015 et ATA/1019/2015 précités).

b. La question étant traitée de la même manière en droit fédéral et en droit cantonal harmonisé, le présent arrêt traite simultanément des deux impôts, comme cela est admis par la jurisprudence (ATF 135 II 260 consid. 1.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_662/2014 du 25 avril 2015 consid. 1 ; 2C_394/2013 du 24 octobre 2013 consid. 1.1 ; ATA/778/2016 du 13 septembre 2016 consid. 3).

c. Le présent litige porte sur la procédure en rappel et en soustraction d'impôts ouverte en 2014 concernant les périodes fiscales 2004 à 2012. La cause est ainsi régie par le droit en vigueur durant cette période, à savoir respectivement les dispositions de la LIFD et celles de la loi cantonale sur l'imposition des personnes morales du 23 septembre 1994 (LIPM - D 3 15), sous réserve de l'amende, pour laquelle le principe de la lex mitior s'applique.

3) Sans conclure formellement à son audition, la recourante mentionne le nom d'un témoin dans sa réplique, à savoir Monsieur E______- son mandataire à l'époque des faits -, indiquant que ce dernier aurait précisé en janvier 2015, lors de son entretien dans les locaux de l'AFC-GE, que A______ avait transmis des sommes importantes à ces sociétés soeurs, et qu'il aurait rappelé la nature de l'activité de A______ et les liens entre les soldes créanciers et débiteurs.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (ATF 137 IV 33 consid. 9.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_265/2016 du 23 mai 2016 consid. 5.1 et les arrêts cités).

Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 131 I 153 consid. 3 ; ATA/643/2016 du 26 juillet 2016 et les arrêts cités).

b. Dans la mesure où l'AFC-GE ne conteste pas avoir reçu ces informations de la part de M. E______lors de l'entretien s'étant déroulé dans ses locaux en janvier 2015, la chambre administrative renoncera à procéder à son audition, si tant est qu'il faille comprendre des écritures de la recourante que celle-ci la sollicite.

Par ailleurs, ce fait ne peut aucunement démontrer, comme semble le suggérer la recourante, que l'AFC-GE aurait dû constater, à la lecture des déclarations fiscales de A______, que celle-ci avait transféré des sommes importantes à ses sociétés soeurs.

4) L'objet du litige est la légalité du rappel d'impôt et la légitimité des diverses reprises effectuées par l'AFC-GE pour les années 2004 à 2012 dans le cadre d'une procédure en rappel et en soustraction d'impôt ouverte en 2014. Il s'agit en d'autres termes de déterminer l'existence ou non de prestations appréciables en argent résultant de l'absence d'intérêts sur prêts accordés par la société intimée à des sociétés apparentées.

5) Dans un premier grief, la recourante conteste que les conditions d'un rappel d'impôt aient été réalisées lorsque l'ouverture de la procédure de rappel d'impôt a été décidée.

6) a. Les décisions de taxation entrées en force mais inexactes peuvent faire l'objet, à certaines conditions, d'un rappel d'impôt. Lesdites conditions sont réglementées de manière similaire au plan fédéral ou cantonal. Lorsque des moyens de preuve ou des faits jusque-là inconnus de l'autorité fiscale lui permettent d'établir qu'une taxation n'a pas été effectuée, alors qu'elle aurait dû l'être, ou qu'une taxation entrée en force est incomplète ou qu'une taxation non effectuée ou incomplète est due à un crime ou à un délit commis contre l'autorité fiscale, cette dernière procède au rappel de l'impôt qui n'a pas été perçu, y compris les intérêts (art. 151 al. 1 LIFD ; art. 53 al. 1 1ère phr. LHID ; art. 59 al. 1 LPFisc).

En revanche, lorsque le contribuable a déposé une déclaration complète et précise concernant son revenu, sa fortune et son bénéfice net, qu'il a déterminé son capital propre de façon adéquate et que l'autorité fiscale en a admis l'évaluation, tout rappel d'impôt est exclu, même si l'évaluation était insuffisante (art. 151 al. 2 LIFD ; art. 53 al. 1 in fine LHID ; art. 59 al. 2 LPFisc). De même, vu la maxime d'office, si elle renonce à procéder aux investigations nécessaires en raison d'un état de fait déclaré de manière incomplète, le lien de causalité adéquate entre la déclaration lacunaire et la taxation insuffisante peut être interrompu (Hugo CASANOVA/Claude-Emmanuel DUBEY in Commentaire romand, op. cit., ad art. 151, p. 1813, n. 13).

b. Le rappel d'impôt n'est soumis qu'à des conditions objectives et implique qu'une taxation n'a, à tort, pas été établie ou est restée incomplète, de sorte que la collectivité publique a subi une perte fiscale.

Il suppose également un motif de rappel d'impôt, qui peut résider dans la découverte de faits ou de moyens de preuve qui ne ressortaient pas du dossier dont l'autorité disposait au moment de la taxation, une faute du contribuable n'étant pas exigée (arrêts du Tribunal fédéral 2C_416/2013 du 5 novembre 2013 consid. 8.1 ; 2C_1225/2012 du 7 juin 2013 consid. 3.1 ; 2C_724/2010 du 27 juillet 2011 consid. 8.1).

En d'autres termes, au moment de procéder à la taxation, l'autorité fiscale peut se fonder sur les éléments déclarés sans se livrer à des investigations complémentaires. Elle n'a cette obligation que si la déclaration contient des inexactitudes flagrantes. Lorsque l'autorité fiscale aurait dû se rendre compte de l'état de fait incomplet ou inexact, par exemple à la lecture des indications contenues dans la déclaration ou des pièces déposées par le contribuable, celui-ci n'est plus censé être inconnu et le rapport de causalité adéquate entre la déclaration lacunaire et la taxation insuffisante est interrompu, de sorte que les conditions pour procéder ultérieurement à un rappel d'impôt font défaut (arrêt du Tribunal fédéral 2C_104/2008 précité consid. 3.3 ; Hugo CASANOVA, Le rappel d'impôt, RDAF 1999 II 3 p. 11). Dans tous les cas, la rupture du lien de causalité doit être soumise à des exigences sévères, à savoir une négligence grave de l'autorité fiscale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_416/2013 précité consid. 8.1 ; 2C_1225/2012 précité consid. 3.1 ; 2C_123/2012 du 8 août 2012 consid. 5.3.4).

En revanche, des inexactitudes qui ne sont que décelables, sans être flagrantes, ne permettent pas de considérer que certains faits ou moyens de preuve étaient déjà connus des autorités au moment de la taxation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_632/2012 du 28 juin 2013 consid. 3.4 ; 2C_26/2007 du 10 octobre 2007 consid. 3.2.2). En effet, l'autorité fiscale peut en principe considérer que la déclaration d'impôt est conforme à la vérité et complète. Elle n'a pas l'obligation, en l'absence d'indice particulier, de se mettre à la recherche de renseignements supplémentaires. En particulier, que l'autorité de taxation puisse déduire de l'augmentation de fortune d'une année à l'autre qu'il y a eu des revenus non déclarés ne remplace pas une déclaration complète du revenu (arrêts du Tribunal fédéral 2C_123/2012 précité consid. 5.1 ; 2P.15/2014 du 22 décembre 2004 consid. 5.3), tout comme il ne peut être exigé de l'autorité fiscale qu'elle confronte les déclarations remplies par les sociétés, traitées par un service, à celles remplies par un contribuable, personne physique, examinées par un autre de ses services (arrêt du Tribunal fédéral 2C_898/2015 du 12 octobre 2016 consid. 3.7 ; ATA/513/2016 du 14 juin 2016 consid. 4e ; ATA/1017/2015 du 29 septembre 2015 consid. 3d ; Hugo CASANOVA, op. cit., p. 12). À cet égard, le grand nombre de décisions à prendre rend illusoire une vérification de toutes les indications du contribuable (Hugo CASANOVA, op. cit., p. 11).

Dans la mesure où le contribuable déclare de manière complète, sur un plan quantitatif, les éléments imposables et que leur évaluation a été acceptée sans changement lors de la taxation, une procédure en rappel d'impôt n'est plus possible, même si l'évaluation était insuffisante (administration fédérale des contributions, Circulaire no 21, Le droit de rappel d'impôt et le droit pénal fiscal dans la LIFD, 7 avril 1995, ch. 2.2). De plus, de manière générale, la découverte d'une mauvaise appréciation des preuves ou une mauvaise application du droit ne saurait donner lieu à un rappel d'impôt, tout comme celle d'une simple sous-évaluation des éléments imposables pour laquelle les art. 151 al. 2 LIFD et 53 al. 1 LHID excluent explicitement l'adaptation ultérieure de la taxation (Hugo CASANOVA, op. cit., p. 12).

7) En l'espèce, la recourante soutient que les comptes présentés auraient aisément permis à l'AFC-GE de constater les soldes débiteurs importants et l'absence d'intérêts leur étant liés : l'autorité intimée aurait selon elle dû s'inquiéter de cette absence d'intérêts et utiliser son pouvoir inquisitoire à cet effet. Elle était d'ailleurs parfaitement informée que la société appartenait à un groupe, le statut fiscal accordé précisant tant la nature de l'activité de la recourante que le « caractère groupe » de cette activité.

S'il est exact que l'AFC-GE avait connaissance, du fait du statut fiscal accordé, du lien étroit de la recourante dans ses opérations avec des sociétés apparentées, cette connaissance ne pouvait pas lui permettre de savoir que la recourante avait octroyé des prêts à ses sociétés soeurs, comme le relève l'autorité intimée. À teneur desdits statuts fiscaux, l'activité de la recourante consistait principalement à refacturer à des clients de sociétés allemandes, hollandaises et anglaises des factures que ces sociétés lui avaient adressées, et non à octroyer des prêts. L'AFC-GE n'avait donc pas à s'interroger sur l'existence de prêts importants. Par ailleurs, aucun des prêts accordés par la recourante à ces sociétés proches ne figuraient dans la rubrique « créances et prêts moyens aux actionnaires, associés et personnes proches (physiques ou morales) » de ses déclarations fiscales. Il n'est dès lors pas surprenant que l'AFC-GE ne se soit pas interrogée sur l'éventuelle perception d'intérêts à ce titre. Enfin, et comme l'a à juste titre retenu le TAPI, les montants déclarés à titre de revenus d'intérêts ont certes été faibles lors de certaines années fiscales, mais ils ont été importants d'autres années. Il n'est dès lors pas question d' « absence d'intérêts », comme le soutient la recourante. Les déclarations fiscales de la recourante ne contenant aucune inexactitude flagrante, l'AFC-GE n'avait aucune obligation de procéder à des investigations complémentaires.

À cet égard, et contrairement à ce que soutient la recourante, le fait que l'AFC-CH se soit rendu compte de la situation à la suite d'un contrôle « sporadique » ne signifie aucunement que l'AFC-GE n'aurait pas usé de la diligence requise lors de l'examen des déclarations de la contribuable, au vu des considérations qui précèdent. L'AFC-CH et l'AFC-GE sont deux autorités distinctes, qui agissent dans un cadre légal différent et disposent de moyens différents. Il ressort notamment du dossier que l'AFC-CH a effectué son contrôle dans les locaux de la fiduciaire genevoise de la recourante, et que c'est à cette occasion qu'elle a constaté l'existence de prêts consentis sans intérêts. Elle ne disposait dès lors pas des mêmes informations que l'AFC-GE, qui n'a effectué la taxation que sur la base de la déclaration de la recourante et de ses pièces annexes, insuffisantes pour constater l'existence de prestations appréciables en argent.

Mal fondé, ce grief sera rejeté.

8) Les conditions permettant de procéder au rappel d'impôt étant réalisées, il convient d'examiner le bien-fondé des diverses reprises effectuées par l'AFC-GE.

9) a. Selon la jurisprudence, le rappel d'impôt n'équivaut pas à un nouvel examen complet de la taxation, mais ne porte que sur les points pour lesquels l'autorité fiscale dispose de nouveaux éléments. L'existence d'un rappel d'impôt ne saurait ainsi autoriser le contribuable à revenir librement sur l'ensemble de sa taxation. Sous réserve d'une erreur manifeste, celui-ci peut uniquement demander que la taxation soit reprise en sa faveur sur les points qui, précisément, font l'objet du rappel d'impôt (ATF 98 Ia 22 consid. 2 p. 25 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_277/2008 du 26 septembre 2008 consid. 5.3 ; ATA/57/2014 du 4 février 2014 consid. 3 ; ATA/86/2008 du 26 février 2008 consid. 2a).

b. La question se pose toutefois de savoir si, pour pouvoir être pris en compte dans la procédure en rappel d'impôt, des faits diminuant la dette fiscale du contribuable doivent avoir une connexité avec les éléments justifiant le rappel. Ce point est controversé dans la doctrine (arrêts du Tribunal fédéral 2C_123/2012 et 2C_124/2012 du 8 août 2012 consid. 7.3 ; 2A.300/2006 du 27 février 2007 consid. 3.3). Certains auteurs jugent qu'il doit y avoir une connexité suffisante (Hugo CASANOVA in Danielle YERSIN/Yves NOËL [éd.], op. cit., n. 7
ad art. 153 ; Hugo CASANOVA, Le rappel d'impôt, RDAF 1999 II 3 p. 17 ; Peter KUBLI, Nachsteuerrecht und Nachsteuerverfahrensrecht mit Nachsteuersicherstellungsrecht erläutert am Zürcher Steuergesetz über die direkten Steuern, 1984, § 17 n. 2 p. 38 ss.; Thomas MEISTER, Rechtsmittelsystem der Steuerharmonisierung, Der Rechtsschutz nach StHG und DBG, 1995, p. 243), d'autres qu'un tel élément n'est pas requis (Klaus A. VALLENDER/Martin E. LOOSER in Martin ZWEIFEL/Peter ATHANAS [éd.], Kommentar zum schweizerischen Steuerrecht, I/2b, Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer [DBG], 2ème éd., 2008, n. 14
ad art. 151).

Le Tribunal fédéral n'a pas tranché la question (arrêts du Tribunal fédéral 2C_123/2012 et 2C_124/2012 du 8 août 2012 consid. 7.3 ; 2A.300/2006 du 27 février 2007 consid. 3.3), relevant toutefois qu'un argument pouvait être invoqué à l'appui de la seconde opinion : dès lors que le rappel constituait une nouvelle taxation, obéissant aux mêmes règles que la procédure initiale, l'exigence de la connexité avec les éléments justifiant le rappel devrait être réduite au minimum, afin que la nouvelle taxation respecte la capacité contributive du contribuable (arrêt du Tribunal fédéral 2A.300/2006 précité consid. 3.3).

10) a. Selon l'art. 57 de la LIFD, l'impôt sur le bénéfice a pour objet le bénéfice net. Celui-ci comprend - outre le bénéfice net résultant du solde du compte de résultats, compte tenu du solde reporté de l'exercice précédent
(art. 58 al. 1 let. a LIFD) - tous les prélèvements opérés sur le résultat commercial avant le calcul du solde du compte de résultat qui ne servent pas à couvrir les dépenses justifiées par l'usage commercial tels que notamment les frais d'acquisition, de production ou d'amélioration d'actifs immobilisés, les distributions ouvertes ou dissimulées de bénéfice et les avantages procurés à des tiers qui ne sont pas justifiés par l'usage commercial ainsi que les produits qui n'ont pas été comptabilisés dans le compte de résultats (art. 58 al. 1 let. b et c LIFD).

b. Les cantons doivent imposer l'ensemble du bénéfice net dans lequel doivent notamment être inclus les charges non justifiées par l'usage commercial, portées au débit du compte de résultats ainsi que les produits et les bénéfices en capital, de liquidation et de réévaluation qui n'ont pas été portés au crédit du compte de résultats (art. 24 al.1 let. a et b de la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 - LHID - RS 642.14).

c. Dans le canton de Genève, en matière d'ICC, le 30 mars 2016 est entrée en vigueur la nouvelle teneur de l'art. 12 de la LIPM, adoptée le 29 janvier 2016 par le Grand Conseil.

La LIPM ne comprend aucune disposition transitoire prévoyant notamment l'application de la nouvelle teneur de son art. 12 aux causes pendantes au moment de son entrée en vigueur. Il sera ainsi fait application des dispositions légales idoines dans leurs teneurs antérieures aux décisions de taxation en cause
(ci-après : aLIPM ; ATA/1151/2017 du 2 août 2017 consid. 8c).

Selon l'art. 12 let. a aLIPM, constitue le bénéfice net imposable celui qui résulte du compte de pertes et profits augmenté de certains prélèvement énoncés aux art. 12 let. b à i aLIPM, ainsi que des produits qui n'ont pas été comptabilisés dans le compte de résultat, y compris les bénéfices en capital, les bénéfices de réévaluation ou de liquidation, ainsi que les montants des réserves et provisions transférées à l'étranger qui avaient été constituées en franchises d'impôt (art. 12 let. j aLIPM). L'art. 12 aLIPM, même rédigé différemment, est de même portée que l'art. 58 al. 1 LIFD (ATA/869/2015 du 25 août 2015 ; ATA/337/2013 du 28 mai 2013 et les arrêts cités).

11) a. Font partie des avantages appréciables en argent au sens de ces dispositions les distributions dissimulées de bénéfice (art. 58 al. 1 let. b LIFD ; art. 12 let. h aLIPM), soit des attributions de la société aux détenteurs de parts auxquelles ne correspondent aucune contre-prestation ou une contre-prestation insuffisante et qui ne seraient pas effectuées ou dans une moindre mesure en faveur d'un tiers non participant (ATF 138 II 57 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_605/2014 et 2C_606/2014 du 25 février 2015 consid. 6 ; ATA/56/2017 du 24 janvier 2017 consid. 4d ; ATA/17/2016 du 12 janvier 2016 consid. 4b).

De jurisprudence constante, il y a avantage appréciable en argent si la société fait une prestation sans obtenir de contre-prestation correspondante, que cette prestation est accordée à un actionnaire ou à une personne le ou la touchant de près, qu'elle n'aurait pas été accordée à de telles conditions à un tiers et que la disproportion entre la prestation et la contre-prestation est manifeste, de telle sorte que les organes de la société savaient ou auraient pu se rendre compte de l'avantage qu'ils accordaient (ATF 140 II 88 consid. 4.1 ; 138 II 57 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_605/2014 et 2C_606/2014 précités consid. 6).

L'évaluation de la prestation se mesure par comparaison avec une transaction qui aurait été effectuée entre des parties non liées entre elles et en tenant compte de toutes les circonstances concrètes du cas d'espèce, soit si elle a respecté le principe de pleine concurrence (ATF 140 II 88 consid. 4.1 ; 138 II 545 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_605/2014 et 2C_606/2014 précités consid. 6). En application de l'approche économique qui prévaut en la matière, les faits doivent être appréciés non seulement du point de vue de leur forme de droit civil, mais également du point de vue de leur contenu réel, en particulier économique (arrêts du Tribunal fédéral 2C_898/2015 et 2C_899/2015 du 12 octobre 2016 consid. 3.3 et les références citées).

b. Les formes d'apparition des prestations appréciables en argent sont multiples : elles peuvent être réalisées par un accroissement injustifié des frais généraux (salaire excessif, paiement d'intérêts disproportionnés pour un prêt de l'actionnaire, rémunération trop importante d'un service rendu par l'actionnaire), ou par une comptabilisation insuffisante d'un produit (la société n'exige pas une contre-prestation appropriée pour un service rendu à l'actionnaire). Elles peuvent également apparaître sous la forme d'une diminution exagérée d'actifs (acquisition d'actifs sans valeur, octroi d'un prêt dont le remboursement n'est pas concevable, renonciation à une créance) ou d'un accroissement de passifs (la société se reconnaît débitrice pour une prestation qu'elle n'a jamais reçue ; Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 4ème éd., 2012, p. 236).

c. Le droit fiscal suisse ne connaissant pas, sauf disposition légale expresse, de régime spécial pour les groupes de sociétés, les opérations entre sociétés d'un même groupe doivent également intervenir comme si elles étaient effectuées avec des tiers dans un environnement de libre concurrence (ATF 140 II 88 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1108/2014 du 10 août 2015 consid. 2.3 ATA/433/2016 précité consid. 8c). En conséquence, il n'est pas pertinent que la disproportion d'une prestation soit justifiée par l'intérêt du groupe (ATF 140 II 88 consid. 4.1 et les arrêts cités ; ATA/433/2016 précité consid. 8c). À cet égard, il est évident qu'un groupe a, du point de vue fiscal, intérêt à reporter autant que possible les charges de la holding qui le chapeaute (celle-ci ne payant pas d'impôt sur le bénéfice) sur les sociétés-filles, dont l'augmentation des charges aura un effet réflexe de diminution du bénéfice imposable (ATA/433/2016 précité consid. 6c ; ATA/291/2016 précité consid. 6c).

d. L'obligation du contribuable de déclarer tous les éléments de bénéfice et de capital couvre également les prix de transfert concernant les transactions effectuées entre des entreprises appartenant au même groupe. Les prix de transfert sont les prix auxquels une entreprise transfère des biens ou rend des services à une entreprise associée (Jean-Frédéric MARAIA, Prix de transfert des biens incorporels, thèse, 2008, n. 46 ss). La particularité de ce domaine porte sur la détermination des prix de transfert. En effet, lorsque des entreprises associées entre elles exercent des activités dans différents États et dépendent d'une direction centrale unique, elles peuvent adopter, pour les transactions effectuées à l'intérieur du groupe, des prix de transfert qui s'écartent des prix du marché, dans le but de réduire leur charge fiscale (Xavier OBERSON, Précis de droit fiscal international, 4ème éd., 2014, n. 863 ; Charles CONSTANTIN, Prix de transfert : L'OCDE remet ça..., RDAF 1996 p. 1 ss). Ce risque est pallié par l'application du principe de pleine concurrence, également dénommé arm's length principle ou Drittvergleich. Ce principe trouve, au niveau international, son fondement juridique à l'art. 9 du Modèle de Convention de double imposition de l'OCDE (Xavier OBERSON, op. cit., 2014, n. 869 ss ; Jean-Frédéric MARAIA, op. cit., n. 62 ; Charles CONSTANTIN, op. cit., n. 2.1). Bien qu'il ne soit pas ancré dans une base légale expresse, ce principe est également reconnu, en droit suisse, par la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de prestations appréciables en argent. Selon ce principe, les prestations effectuées entre des entreprises liées entre elles doivent correspondre à celles qui seraient fournies à des tiers indépendants. Il permet de mettre en évidence, en cas d'un prix de transfert inférieur au prix du marché fixé dans un environnement de libre concurrence, l'existence d'une prestation appréciable en argent entre entreprises apparentées (ATF 140 II 88 consid. 4 et 5 ; 2C_724/2010 du 27 juillet 2011 consid. 7.1 ; 2C_788/2010 du 18 mai 2011 consid. 4.1 ; Xavier OBERSON, 2009, op. cit., n. 748 s. et n. 755 ss ; Jean-Frédéric MARAIA, op. cit., n. 64 ; Robert DANON in Danielle YERSIN/ Yves NOËL [éd.], Impôt fédéral direct, Commentaire de la loi sur l'impôt fédéral direct, 2008, ad art. 57-58 n. 107).

12) La mise en oeuvre du principe de pleine concurrence suppose l'identification de la valeur vénale du bien transféré ou du service rendu. Lorsqu'il existe un marché libre, les prix de celui-ci sont déterminants et permettent une comparaison effective avec les prix appliqués entre sociétés associées (ATF 140 II 88 consid 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1082/2013 du 14 janvier 2015 consid. 5.2 ; ATA/433/2016 du 24 mai 2016 consid. 8b ; ATA/291/2016 du
5 avril 2016 consid. 6b).

S'il n'existe pas de marché libre permettant une comparaison effective, il convient alors de procéder selon la méthode de la comparaison avec une transaction comparable (ou méthode du prix comparable), qui consiste à procéder à une comparaison avec le prix appliqué entre tiers dans une transaction présentant les mêmes caractéristiques, soit en tenant compte de l'ensemble des circonstances déterminantes (ATF 138 II 57 consid. 2.2 et les références citées in RDAF 2012 II p. 299).

À défaut de transaction comparable, la détermination du prix de pleine concurrence s'effectue alors selon d'autres méthodes, telles que la méthode du coût majoré ou celle du prix de revente qui font partie, à côté de la méthode de la transaction comparable, des méthodes traditionnelles fondées sur les transactions selon la classification opérée par l'OCDE en matière de prix de transfert (OCDE, Principes applicables en matière de prix de transfert à l'intention des entreprises multinationales et des administrations fiscales, 2010, § 2.12 ss).

La méthode du coût majoré consiste en particulier à déterminer les coûts supportés par la société qui fournit la prestation, à quoi s'ajoute une marge appropriée de manière à obtenir un bénéfice approprié compte tenu des fonctions exercées et des conditions du marché (ATF 140 II 88 consid. 4.2 et les références citées). Cette méthode est notamment adéquate pour les biens ou les services pour lesquels il n'existe pas de marché comparable entre entreprises indépendantes (Xavier OBERSON, op. cit., 2014, n. 894).

Sous réserve de cas exceptionnels, la méthode du coût majoré n'est aujourd'hui plus employée pour des services de nature financière ou des fonctions de management, la circulaire n° 4 considérant cette méthode comme inadéquate (ATA/474/2014 du 26 juin 2014 consid. 6c).

13) Lorsqu'une société anonyme accorde un prêt à son actionnaire, ce prêt ne respecte pas le principe de pleine concurrence si le taux d'intérêt appliqué est inférieur au taux du marché ou s'il est accordé sans intérêt. La prestation appréciable en argent se mesure alors par la différence entre le taux d'intérêt conforme au principe de pleine concurrence et le taux effectivement appliqué (ATF 138 II 545 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_788/2010 du 18 mai 2011 consid. 4.4 ; 2C_557/2010 du 4 novembre 2010 consid. 3.2.1).

a. L'AFC-CH édicte chaque année des directives sur les taux d'intérêts déterminants pour le calcul des prestations appréciables en argent, publiées sous la forme de lettres-circulaires, destinées à simplifier la mise en oeuvre du principe de pleine concurrence en relation avec les taux d'intérêts de prêts conclus en francs suisses entre des sociétés et leurs actionnaires ou associés - ou leurs proches (ATF 140 II 88 consid. 5.1).

b. Les lettres-circulaires concernant les prestations appréciables en francs suisses prévoient des taux d'intérêts déterminants minimums en cas d'avances accordées aux actionnaires ou associés (ou des personnes les touchant de près) (ch. 1) et des taux d'intérêts déterminants maximums en cas d'avances accordées par les actionnaires ou associés (ou leurs proches) (ch. 2). En matière d'avances accordées aux actionnaires ou associés, le ch. 1 distingue deux hypothèses. Si l'avance est financée au moyen de fonds propres et si aucun intérêt n'est dû sur du capital étranger, le taux d'intérêts minimum s'élève à 1.50 % pour l'année 2012, à 2.25 % pour les années 2006, 2010 et 2011, à 2.50 % pour les années 2004, 2005 et 2009, à 2.75 % pour l'années 2007 et à 3.25 % pour l'année 2008 (ch. 1.1). En revanche, si l'avance est financée au moyen de capitaux étrangers, le taux d'intérêts minimum se calcule par référence à la charge d'intérêts due sur ces capitaux étrangers par la société prêteuse, à quoi s'ajoute un pourcentage de 0.5 % ou de 0.25 %, selon que l'avance est inférieure (ou égale) ou supérieure à CHF 10'000'000.-, le taux devant dans tous les cas s'élever au moins au taux prévu au ch. 1.1 (ch. 1.2).

c. Le chiffre 1.2 des lettres-circulaires concernant les prestations appréciables en argent permet de vérifier que l'opération assure à la société de dégager une marge bénéficiaire, puisque le taux d'intérêts minimum du prêt accordé à l'actionnaire ou à l'associé doit être supérieur de 0,25 % ou de 0,5 % au taux d'intérêts payé par la société sur ses propres charges d'intérêts (ATF 140 II 88 consid. 6.2). L'irrespect du taux découlant de l'application du chiffre 1.2 ne crée qu'un indice d'existence de prestation appréciable en argent, le contribuable conservant toujours la possibilité de prouver que le taux inférieur qu'il a appliqué respecte néanmoins le principe de pleine concurrence (ATF 140 II 88 consid. 6.3).

d. Les lettres-circulaires relatives aux prestations appréciables en devises et monnaies étrangères fonctionnent de manière semblable, distinguant entre les avances accordées aux actionnaires ou associés et celles reçues par ces derniers. S'agissant des avances accordées aux actionnaires ou associés, elles prévoient des taux en fonction des devises ou monnaies concernées pour autant qu'elles soient financées au moyen de fonds propres et qu'aucun fonds étranger ne doit être rémunéré, tout en spécifiant que si la société ou coopérative rémunère les engagements qu'elle détient, les taux applicables aux avances aux actionnaires, associés, coopérateurs ou à des tiers les touchant de près, doivent correspondre à ceux servis sur ces fonds étrangers augmentés d'une marge de 0,5 %, sachant toutefois que les taux appliqués doivent au minimum correspondre à ceux publiés dans la lettre-circulaire (ch. 1).

e. Le Tribunal fédéral a tendance à appliquer dans sa jurisprudence la méthode de la comparaison avec une transaction comparable pour déterminer le taux d'intérêts qui aurait été appliqué à un prêt entre tiers indépendants. Cette méthode est également celle qui est préconisée par l'OCDE lorsque la problématique du prix de transfert concerne un prêt d'argent, au motif qu'elle est aisée à mettre en oeuvre dans ce contexte (OCDE, op. cit., § 1.9; ATF 140 II 88 consid. 6.1).

14) a. Faisant partie des instructions et directives internes à l'administration, la lettre-circulaire de l'AFC-CH sur les taux d'intérêts déterminants pour le calcul des prestations appréciables en argent n'appartient pas au droit fédéral. Elle ne lie donc ni le contribuable, ni l'autorité de taxation, ni les tribunaux (ATF 138 II 536 consid. 5.4.3 ; 133 II 305 consid. 8.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_116/2013 et 2C_117/2013 du 2 septembre 2013 consid. 3.7.1). Toutefois, dès lors qu'elle tend à une application uniforme et égale du droit, il ne convient de s'en écarter que dans la mesure où elle ne traduit pas une concrétisation convaincante des dispositions légales applicables (arrêts du Tribunal fédéral 2C_95/2011 du 11 octobre 2011 consid. 2.3 = RDAF 2012 II p. 72 ; 2C_103/2009 du 10 juillet 2009 consid. 2.2 = RF 64/2009 p. 906). Plus particulièrement, la lettre-circulaire de l'AFC-CH poursuit un but de simplification : son ch. 1.2 propose en effet une règle simplificatrice aisément praticable, tant à l'attention des contribuables, qui peuvent la suivre et exclure ainsi tout risque de reprise fiscale, qu'à celle des administrations fiscales, qui sont confrontées à une administration de masse (ATF 140 II 88 consid. 6.3).

b. L'application du taux d'intérêts minimum fixe prévu au ch. 1.1 de la lettre-circulaire de l'AFC-CH suppose la réalisation de deux conditions cumulatives : il faut ainsi que le prêt ait été financé au moyen de fonds propres et qu'aucun intérêt ne soit dû par la société prêteuse sur des capitaux étrangers. En conséquence, il suffit qu'il existe des capitaux étrangers portant charge d'intérêts au bilan de la société prêteuse pour que le taux d'intérêts minimum se calcule conformément au ch. 1.2, indépendamment de la question de savoir si ces capitaux étrangers ont effectivement servi à mobiliser les fonds nécessaires à l'octroi du prêt. La lettre-circulaire postule ainsi implicitement que la société prêteuse a financé le prêt accordé à son actionnaire ou associé au moyen d'un emprunt et que pour respecter le principe de pleine concurrence, une telle opération doit conduire à la réalisation d'un bénéfice. C'est la raison pour laquelle le taux d'intérêts minimum se calcule dans ce cas non pas par référence à un taux fixe, comme le prévoit le ch. 1.1, mais par référence aux « propres charges » de la société prêteuse, à quoi s'ajoute une marge de 0,5 % ou de 0,25 % selon le montant du prêt, de manière à permettre la réalisation d'une marge bénéficiaire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_291/2013 précité consid. 6.4, se référant à l'ATF 107 Ib 325).

Il s'agit donc de prendre le coût d'acquisition des fonds étrangers en pourcents, soit les intérêts effectivement payés, et d'y ajouter une marge de 0,5 % ou 0,25 % (mais au total 2,5 % au minimum) pour obtenir le pourcentage minimal que la société doit exiger (en recette) sur le prêt à son actionnaire ; il s'agit d'un taux minimum (ATA/183/2014 du 25 mars 2014 consid. 9c).

15) a. En matière fiscale, il appartient à l'autorité fiscale de démontrer l'existence d'éléments créant ou augmentant la charge fiscale, tandis que le contribuable doit supporter le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation fiscale. S'agissant de ces derniers, il appartient au contribuable non seulement de les alléguer, mais encore d'en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l'échec de cette preuve, ces règles s'appliquant également à la procédure devant les autorités de recours (ATF 133 II 153 consid. 4.3 ; 121 II 257 consid. 4c.aa ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_89/2014 du 26 novembre 2014 consid. 7.2 ; 2C_319/2014 du 9 septembre 2014 consid. 2.2 ; ATA/652/2016 du 26 juillet 2016 consid. 3d ; ATA/332/2016 du 19 avril 2016).

b. De même, en ce qui concerne les prestations appréciables en argent faites par la société sans contre-prestation à ses actionnaires, il appartient en principe à l'autorité fiscale de les prouver, de sorte que le contribuable n'a pas à supporter les conséquences d'un manque de preuves, à moins qu'une violation de ses devoirs de collaboration puisse lui être reprochée (ATF 138 II 57 consid. 7.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_605/2014 et 2C_606/2014 précités consid. 6 ; ATA/778/2016 du 13 septembre 2016 consid. 5c).

c. Dans la taxation des sociétés, s'agissant de charges représentant des prestations insolites, il appartient à la société contribuable d'établir leur caractère de charge justifiée par l'usage commercial, afin que les autorités fiscales puissent s'assurer que seules des raisons commerciales et non les étroites relations personnelles et économiques entre la société et le bénéficiaire de la prestation, ont conduit à la prestation insolite (ATF 119 Ib 431 consid. 2c ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_275/2010 du 24 août 2010 et 2A.355/2004 du 20 juin 2005 ; ATA/17/2016 du 12 janvier 2016 consid. 6e ; ATA/995/2014 du 16 décembre 2014 consid. 6d).

Des explications générales et non étayées ne suffisent pas à établir que l'usage commercial justifie les frais en cause. En effet, conformément à la répartition du fardeau de la preuve, il incombe au contribuable d'apporter la preuve que la totalité des dépenses comptabilisées est en relation directe avec l'acquisition ou le maintien du chiffre d'affaires (arrêt du Tribunal fédéral 2A.461/2001 du 21 février 2002 consid. 3.1 ; ATA/562/2015 du 2 juin 2015 consid. 9b ; ATA/201/2014 du 1er avril 2014).

16) En l'espèce, la recourante conteste la manière de procéder de l'AFC-GE et du TAPI : selon elle, il conviendrait d'appliquer le principe de pleine concurrence non seulement pour déterminer les prestations hypothétiquement faites à des sociétés apparentées, mais également pour établir le prix correspondant aux dettes contractées par la société pour être en mesure d'octroyer ces prêts. Elle soutient que la méthode du « prix comparable sur le marché libre », citée par le TAPI, ne pourrait pas s'appliquer au cas d'espèce au motif qu'elle se limiterait à comparer le prix de transfert « externe » sans tenir compte de ce qui constituait le prix de la transaction. Il conviendrait donc, selon la recourante, d'appliquer la méthode du « coût majoré », qui serait « implicitement retenue par la circulaire de l'AFC-CH ».

Son raisonnement ne saurait être suivi.

a. Le TAPI relève en premier lieu que ce grief se heurterait à la jurisprudence constante selon laquelle le rappel d'impôt n'équivaut pas à un nouvel examen de la taxation et que dans le cas d'espèce, les nouveaux éléments ne concernent que les prestations appréciables en argent résultant de l'absence d'intérêts sur les avances effectuées aux sociétés soeurs de la recourante.

Cette position peut être discutée, le Tribunal fédéral n'ayant pas tranché la question de savoir si, pour pouvoir être pris en compte dans la procédure en rappel d'impôt, des faits diminuant la dette fiscale du contribuable doivent avoir une connexité avec les éléments justifiant le rappel, et ce point étant controversé en doctrine.

Cette question peut toutefois souffrir de demeurer indécise en l'espèce, eu égard à ce qui suit.

b. La recourante prône l'application de la méthode du « coût majoré » en lieu et place de celle du « coût comparable » au motif que la première permettrait de prendre en considération le coût des fonds prêtés par la recourante.

Toutefois, elle indique avoir dû emprunter des fonds pour être en mesure d'octroyer des prêts à des sociétés proches, mais elle reconnaît ne pas avoir payé d'intérêts pour ces emprunts. Elle ne peut dès lors prétendre à la déduction d'intérêts fictifs dont elle n'a pas eu à s'acquitter, ce qu'a également retenu le TAPI. S'agissant d'éléments venant réduire son obligation fiscale, il lui appartenait de prouver avoir versé lesdits intérêts pour prétendre à leur prise en considération par l'autorité intimée.

La recourante se fonde sur l'ATF 140 II 88 pour soutenir que le Tribunal fédéral aurait « confirmé le lien qui existe entre les fonds prêtés et ceux qui sont disponibles à cette fin ». Or, au considérant n° 6 cité par la recourante, le Tribunal fédéral a uniquement expliqué les raisons pour lesquelles la circulaire de l'AFC-CH fait une distinction entre les prêts financés au moyen de fonds propres et les prêts financés au moyen de fonds étrangers : si la société présente à son bilan des capitaux étrangers portant charge d'intérêts, le prêt octroyé à son actionnaire ou associé doit conduire à la réalisation d'un bénéfice, ce qui justifie l'application d'un taux d'intérêts plus élevé que si le prêt est financé au moyen de ses propres fonds. L'on ne peut déduire de cet arrêt qu'il conviendrait de « prendre en compte les fonds étrangers dans la formation de la marge d'intérêt éventuellement applicable », comme le soutient la recourante.

Par surabondance, il sied de relever que la recourante n'apporte aucune preuve à l'appui de ses allégations selon lesquelles les emprunts qu'elle a contractés auraient effectivement servi à financer les prêts litigieux. Or, ces emprunts pourraient tout autant avoir servi à financer d'autres activités de la société.

c. Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que l'autorité intimée, suivie par le TAPI, a considéré que les prêts sans intérêts octroyés par la recourante à des sociétés soeurs constituaient des prestations appréciables en argent. Le droit fiscal ne permettant pas de tenir compte des relations existant entre sociétés d'un même groupe, les opérations entre sociétés d'un groupe doivent intervenir comme si elles étaient effectuées avec des tiers dans un environnement de libre concurrence. En l'espèce, la recourante n'a pas réclamé d'intérêts pour les prêts qu'elle a octroyés et n'en a pas payés sur les sommes qui lui ont été prêtées. Or, elle ne peut maintenant, par une opération comptable ne correspondant pas à la réalité, chercher à présenter les faits à son avantage en invoquant des charges qu'elle n'a pas effectivement supportées.

Il sied enfin de relever que si l'activité de « factoring » implique effectivement, comme le soutient la recourante, des balances débitrices et créditrices, il n'en demeure pas moins qu'il lui appartenait de facturer des intérêts aux prêts qu'elle a octroyés aux sociétés du même groupe, et de prouver avoir effectivement payé des intérêts sur les prêts contractés pour pouvoir éventuellement en demander la prise en considération d'un point de vue fiscal.

Mal fondé, ce grief sera écarté.

17) La recourante allègue, sans développer cette question, que le raisonnement de l'AFC-GE la priverait d'obtenir une taxation équitable et proportionnelle à sa capacité contributive.

Ce grief se confond avec ceux déjà examinés. En effet, les règles correctrices fiscales figurant à l'art. 58 al. 1 let. b et c LIFD visent précisément à compenser le fait que le résultat comptable d'une société puisse s'éloigner de la réalité économique ; elles assurent une imposition du bénéfice qui tienne compte au mieux de la réelle situation patrimoniale d'une société (ATA/174/2016 du 23 février 2016 consid. 8 ; Pierre-Marie GLAUSER, Apports et impôt sur le bénéfice, vol. 2, 2005, p. 96 s.).

Ce grief sera dès lors écarté.

18) Contrairement aux conclusions prises devant le TAPI, la recourante ne conteste plus la quotité des amendes prononcées, se contentant de soutenir que les amendes devraient être annulées dès lors que les conditions pour un rappel d'impôt ne seraient pas remplies. Seul le principe des amendes et non leur quotité demeure dès lors contesté.

a. Le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu'une taxation ne soit pas effectuée alors qu'elle devrait l'être, ou qu'une taxation entrée en force soit incomplète, est puni d'une amende (art. 175 al. 1 LIFD ; art. 56 al. 1 LHID ; art. 69 al. 1 LPFisc). À teneur de l'art. 175 al. 2 LIFD et des art. 56 al. 1 LHID et 69 al. 2 LPFisc, l'amende est en règle générale équivalente au montant soustrait. Elle peut être réduite jusqu'au tiers de ce montant si la faute est légère et au triple de celui-ci en cas de faute grave.

Pour qu'une soustraction fiscale soit réalisée, trois éléments doivent dès lors être réunis : la soustraction d'un montant d'impôt, la violation d'une obligation légale incombant au contribuable et la faute de ce dernier (arrêt du Tribunal fédéral 2C_907/2012 du 22 mai 2012 consid. 5). Les deux premières conditions sont des éléments constitutifs objectifs de la soustraction fiscale, tandis que la faute en est un élément constitutif subjectif (Pietro SANSONETTI/ Danielle HOSTETTLER, in Yves NOËL/Florence AUBRY GIRARDIN [éd.], op. cit., ad art. 175 LIFD, p. 1986 n. 7 ss ; Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 4ème éd., 2012, p. 586 ss n. 15 ss).

b. Sur le plan subjectif, il y a négligence lorsque, par une imprévoyance coupable, un contribuable ne se rend pas compte ou ne tient pas compte des conséquences de son acte. Tel est le cas lorsque le contribuable n'a pas use des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle (art. 12 al. 3 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0 ; RDAF 2003 II 622, p. 631 ; Xavier OBERSON, op. cit., p. 587 n. 18). Agit par négligence, au sens de l'art. 12 CP, quiconque, par une imprévoyance coupable, agit sans se rendre compte (négligence inconsciente) ou sans tenir compte des conséquences de son acte (négligence consciente). L'imprévoyance est coupable quand l'auteur n'a pas use des précautions commandées objectivement par les circonstances et subjectivement par sa situation personnelle, par quoi on entend sa formation, ses capacités intellectuelles, sa situation économique et sociale ainsi que son expérience professionnelle. Le fait que le contribuable ait obtenu de faux renseignements de la part d'une fiduciaire mandatée par lui ne joue pas de role dans la détermination de la négligence (Pietro SANSONETTI/Danielle HOSTETTLER, op. cit., ad art. 175 LIFD, p. 1993 n. 38). Si le contribuable a des doutes sur ses droits ou obligations, il doit faire en sorte de lever ce doute ou, au moins, en informer l'autorité fiscale (ATF 135 II 86 consid. 4.3 ; ATA/907/2016 du 25 octobre 2016). La négligence implique de porter un jugement sur le comportement de l'auteur, en se demandant ce qu'il aurait pu et du faire, et non de rechercher ce qu'il avait a l'esprit (ATA/907/2016 précité).

c. Lorsqu'une soustraction fiscale est commise par une personne morale, celle-ci est elle-même punissable d'une amende en matière d'IFD et d'ICC (art. 181 al. 1 LIFD et 74 al. 1 LPFisc) et le comportement de ses organes lui est imputable pour examiner les éléments subjectifs de l'infraction (ATF 135 II 86 consid. 4.2).

d. En l'espèce, comme l'a à juste titre retenu le TAPI, la recourante a transmis à l'AFC-GE des déclarations fiscales incorrectes : elle a contrevenu à ses obligations en ne comptabilisant pas des revenus, engendrant ainsi une irrégularité dans sa comptabilité, si bien qu'une soustraction a été commise. Si ses organes, qui connaissaient l'existence de prêts octroyés à des sociétés soeurs, avaient usé des précautions commandées par les circonstances, ils auraient comptabilisé et déclaré les intérêts correspondant à ces prêts. La faute de la recourante a engendré un dommage pour la collectivité équivalant au montant des reprises, de sorte que la condition de la soustraction d'impôt est remplie.

S'agissant de la quotité des amendes, qui n'est plus contestée, l'AFC-GE, suivie par le TAPI, a retenu que la recourante avait été négligente. En fixant l'amende à la moitié de l'impôt soustrait, l'AFC-GE n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation. Proche du minimum prévu par la loi, cette quotité prend en compte les circonstances du cas d'espèce, la recourante n'invoquant aucun autre élément qui devrait être pris en compte dans la fixation des amendes. Celles-ci n'apparaissent donc pas disproportionnées.

19) Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

20) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 31 décembre 2016 par A______ SA contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 28 novembre 2016 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de A______ SA un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur Patrick Jeanneret, mandataire de A______ SA, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Junod, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le la greffière :