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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3357/2014

ATA/643/2016 du 26.07.2016 sur JTAPI/861/2015 ( PE ) , REJETE

Descripteurs : DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; DROIT PÉNAL ; CHOSE JUGÉE ; ORDONNANCE PÉNALE ; AUTORISATION D'ÉTABLISSEMENT ; AUTORISATION DE SÉJOUR ; RENOUVELLEMENT DE L'AUTORISATION ; RÉVOCATION(EN GÉNÉRAL) ; DISSIMULATION(CHOSES, FAITS)
Normes : LPA.14 ; Cst.29.al2 ; LEtr.61.al2
Résumé : Les autorisations de séjour et d'établissement des recourants ont été révoquées par l'OCPM car ceux-ci ont vécu hors de Suisse d'avril 2010 à février 2012 sans prévenir les autorités. Ils avaient déjà été condamnés pénalement pour les mêmes faits et n'avaient pas fait opposition à leur ordonnance pénale, de sorte que l'état de fait ne pouvait pas, ou difficilement, être remis en question dans la présente procédure. Les recourants n'ont pas démontré avoir vécu en Suisse durant la période susmentionnée, leur recours a été rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3357/2014-PE ATA/643/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 juillet 2016

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______
représentés par Me Antoine Boesch, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 15 juillet 2015 (JTAPI/861/2015)


EN FAIT

1. Monsieur B______, né le ______1959, est ressortissant de Tunisie. Il est le père de deux enfants, soit Monsieur C______, né le ______1983 et issu d'un premier mariage, et Madame D______, née le ______ 1995, issue d'une autre relation postérieure audit mariage. Tous deux sont de nationalité suisse.

2. M. B______ est arrivé à Genève en septembre 1981 et a été mis au bénéfice par l'office cantonal de la population, devenu entretemps l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM), d'une autorisation d'établissement, valable jusqu'au 21 octobre 2015.

3. Le 19 juin 2008, M. B______ a épousé Madame A______, née le ______ 1970 et ressortissante du Maroc.

4. Mme A______, en date du 22 avril 2009, a emménagé dans l'appartement de son mari, sis au ______, rue de E______ à Genève et a été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour à titre de regroupement familial, laquelle a été régulièrement renouvelée jusqu'au 21 avril 2013.

5. Le 15 mai 2012, le Ministère public du canton de Genève a prononcé deux ordonnances pénales distinctes et a condamné respectivement Mme A______ et M. B______ à une peine pécuniaire de quarante jours-amende à CHF 40.- avec sursis de trois ans, pour comportement frauduleux à l'égard des autorités.

Les époux avaient omis d'informer les autorités compétentes qu'ils avaient quitté leur domicile à Genève pour résider en France voisine, et ce dans le but de garder leur titre de séjour.

Lors de son audition du 17 mars 2012, M. B______ avait en partie admis les faits qui lui étaient reprochés. L'appartement à Annemasse était un logement secondaire car leur domicile qui se situait chez un tiers, sis rue de F______ à Meyrin, était devenu trop exigu. Également entendue, Mme A______ avait déclaré que leur domicile était effectivement à l'adresse susmentionnée. Une fois accompagnée devant l'immeuble, elle n'avait pas su indiquer à quel étage et à quelle porte se trouvait l'appartement. Son nom ne figurait sur aucune boîte aux lettres et aucune porte. Elle avait fini par indiquer qu'elle et son mari vivaient en France depuis qu'ils avaient quitté leur précédent logement à la rue de E______, le 1er avril 2010 et avait précisé avoir peur de perdre son permis B. Le locataire qui vivait à la rue de F______ à Meyrin avait confirmé que le couple n'avait jamais habité à cet endroit.

Ni Mme A______, ni M. B______ n'ont formé opposition auxdites ordonnances pénales.

6. Ils ont respectivement reçu, le 21 septembre 2012, à l'adresse ______, rue du G______ à Annemasse, un courrier de l'OCPM leur indiquant que, suite à une enquête auprès du voisinage, il apparaissait que leur domicile genevois annoncé auprès de l'office était fictif et que selon la loi, ceci pouvait entraîner la caducité de leur autorisation de séjour et d’établissement. Un délai de trente jours leur a été donné pour fournir des observations.

7. Les époux ont répondu en date du 18 octobre 2012 à l'OCPM.

Ils avaient été expulsés de leur appartement à Genève et n'avaient eu d'autre choix que de s'installer temporairement chez un ami à Annemasse. Ils avaient quitté ce logement en décembre 2011 pour habiter au ______rue du H______ à Genève, puis le 10 octobre 2012, Mme A______ avait conclu un contrat de bail portant sur un appartement sis au ______, promenade I______, à Thônex. À partir de là, ils avaient vécu de manière ininterrompue à Genève.

8. Le 3 juillet 2013, l'OCPM a prié les époux de justifier par pièces la période passée en France ainsi que l'expulsion de leur appartement à Genève.

9. Le 23 juillet 2013, les époux ont fourni : une « lettre de quitter l'appartement » du 14 juillet 2013 signée par Monsieur J______, laquelle mentionnait qu'ils avaient sous-loué l'appartement, sis rue de E______ entre 2009 et 2010, mais qu'ils avaient dû quitter leur logement en 2010 ; une attestation de Monsieur K______ faisant état des périodes pendant lesquelles les époux avaient vécu chez ce dernier à Annemasse ainsi qu'une attestation sur l'honneur de M. B______ confirmant qu'il avait habité à Genève un peu partout entre juin 2011 et septembre 2011, sans savoir qu'il ne pouvait pas habiter en France.

10. Sans nouvelles de la part de l'OCPM, les époux se sont enquis de l'avancée du dossier par courriers du 2 décembre 2013, 7 avril 2014, 25 juin 2014 et 29 septembre 2014.

11. Par décision du 30 septembre 2014, l'OCPM a prononcé la caducité de l'autorisation d'établissement de M. B______ et a enregistré son départ de Suisse au 1er avril 2010.

M. B______ avait omis d'annoncer son départ de Suisse et la résiliation du bail de son appartement à Genève depuis le 1er avril 2010, date à laquelle il s'était établi en France avant de revenir à Genève en février 2012. Les éléments qu'il avait annoncés à l'OCPM contredisaient ceux ressortant de la procédure pénale. L'absence de M. B______ hors de Suisse avait duré plus de dix mois, raison pour laquelle son autorisation d'établissement était caduque.

Compte tenu du fait qu'il résidait à nouveau sur le sol genevois, M. B______ devait fournir à l'OCPM le formulaire M rempli, des justificatifs relatifs à ses moyens financiers ainsi qu'une copie de son passeport.

12. Par décision du même jour, l'OCPM a prononcé la caducité de l'autorisation de séjour de Mme A______ et a enregistré son départ de Suisse au 1er avril 2010 pour les mêmes motifs que ceux invoqués à l'appui de la décision adressée à M. B______.

13. Par actes séparés, les époux ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre leur décision respective en date du 31 octobre 2014 en concluant, « sous suite de frais et dépens » à leur annulation et à ce que le permis B de Mme A______ soit renouvelé.

Ils avaient séjourné à trois reprises à Annemasse, soit d'avril 2010 à juin 2010, de mars 2011 à mai 2011 et d'octobre 2011 à janvier 2012, et étaient revenus entre temps à Genève. Ces séjours de moins de trois mois n'avaient pas entraîné la caducité de leurs permis de séjour et d’établissement.

Ils n'avaient pas informé l'OCPM de cette situation, car les séjours en France étaient involontaires. Ils attendaient de trouver au plus vite un logement à Genève. Comparant en personne, ils n'avaient d'ailleurs pas recouru contre les ordonnances pénales car leurs préoccupations principales à l'époque étaient, d’une part, de trouver un logement à Genève et, d’autre part, l'état de santé de la mère de Mme A______. Les logeurs chez qui le couple avait habité à Genève ne voulaient pas fournir d'attestation écrite venant démontrer un domicile effectif car ils pratiquaient des sous-locations abusives ou non autorisées.

Quand bien même M. B______ aurait dû solliciter le maintien de son permis, il ne faisait aucun doute qu'il l'aurait obtenu sans difficulté. Il habitait à Genève depuis 1981. Ses séjours involontaires et temporaires à Annemasse n’avaient duré au total qu'une dizaine de mois.

Les décisions étaient choquantes, excessivement formalistes et abusives.

14. Les époux ont fourni des nouvelles pièces au TAPI le 17 novembre 2014, notamment

-          une attestation de Monsieur L______, lequel indiquait avoir hébergé le couple dans son appartement à plusieurs reprises, pour des courtes durées, entre le mois de juillet à décembre 2010 et de juin 2011 à octobre 2011 ;

-          une attestation de Monsieur M______ selon laquelle il les avait hébergés dans son appartement à plusieurs reprises, pour de courtes périodes, entre 2010 et 2011 ;

-          des certificats de salaire de M. B______ d'août à octobre 2014 ;

-          des certificats de salaire de Mme A______ de mai 2014 à septembre 2014 et de décembre 2013 à septembre 2014.

15. Par courrier du 5 janvier 2015, l'OCPM a conclu au rejet du recours en maintenant les termes de sa décision.

16. Par jugement du 5 juillet 2015, le TAPI, après avoir ordonné la jonction des deux procédures, a rejeté les recours et confirmé les décisions initiales.

Les recourants n'avaient pas réussi à démontrer avoir effectivement habité à Genève depuis avril 2010, date à laquelle ils avaient quitté leur logement. Les pièces produites ne venaient pas mettre à mal les éléments établis dans les ordonnances pénales entrées en force. En tout état, ils avaient habité à Annemasse pendant une période supérieure à six mois. L’autorisation de séjour de Mme A______, obtenue au titre du regroupement familial, avait suivi le sort de l’autorisation d’établissement de son époux.

17. Le 14 septembre 2015, les recourants ont saisi la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) d'un recours contre le jugement précité, concluant préalablement à la suspension de la procédure jusqu'à décision définitive sur les demandes de permis pendantes, à ce que tant le jugement du TAPI que les décisions initiales soient annulés, à ce qu'il soit ordonné le renouvellement du permis B de Mme A______ et à ce qu'il soit constaté que le permis C de M. B______ n'était pas caduc et à son renouvellement le moment venu.

Ils n'avaient jamais eu l'intention de quitter la Suisse pour aller vivre en France, où ils n'avaient séjourné que trois fois, pour des périodes inférieures à trois mois, de manière involontaire.

Les faits établis dans la procédure pénale, sur lesquels l'OCPM et le TAPI s'étaient basés pour déterminer pendant combien de temps les recourants avaient vécu en dehors de Suisse, ne devaient pas revêtir autant de poids. Comparant en personne et ayant d'autres préoccupations à ce moment-là, ils ignoraient les conséquences que pouvaient occasionner leurs déclarations devant les autorités pénales. L'OCPM comme le TAPI avaient occulté des pièces qu’ils avaient produites, celles-ci détaillant leurs séjours en France voisine, et avaient refusé d'administrer des preuves, telles que l'audition des parties et des personnes ayant émis les attestations, ce qui relevait de l'arbitraire.

18. Le 14 octobre 2015, l'OCPM s'est opposé à la demande de suspension formulée dans le recours précité. L'issue du litige était déterminante, en ce sens que si la chambre administrative admettait le recours, les autorisations d'établissement, respectivement de séjour, continuaient de déployer leurs effets, et si elle le rejetait, l'OCPM aurait dû entrer en matière sur lesdites demandes d'autorisations.

19. Le 12 novembre 2015, l'OCPM a conclu au rejet du recours, les éléments mis en avant par les recourants n'étant pas à même de démontrer qu'ils avaient vécu en Suisse d'avril 2010 à février 2012 et de contredire les faits retenus par le Ministère public dans ses ordonnances du 15 mai 2012.

20. Les recourants n'ayant formulé aucune observation complémentaire, la cause a été gardée à juger le 16 décembre 2015.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Les recourants demandent la suspension de la procédure jusqu'à décision définitive sur leur demande de permis pendante devant l'OCPM.

a. Lorsque le sort d’une procédure administrative dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d’une autre autorité et faisant l’objet d’une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu’à droit connu sur ces questions (art. 14 al. 1 LPA).

b. L’art. 14 LPA est une norme potestative et son texte clair ne prévoit pas la suspension systématique de la procédure chaque fois qu’une autorité civile, pénale ou administrative est parallèlement saisie (ATA/206/2015 du 24 février 2015 consid. 2c). La suspension de la procédure ne peut pas être ordonnée chaque fois que la connaissance du jugement ou de la décision d’une autre autorité serait utile à l’autorité saisie, mais seulement lorsque cette connaissance est nécessaire parce que le sort de la procédure en dépend (ATA/630/2008 du 16 décembre 2008 consid. 5). Une procédure ne saurait dès lors être suspendue sans que l’autorité saisie n’ait examiné les moyens de droit qui justifieraient une solution du litige sans attendre la fin d’une autre procédure. Il serait en effet contraire à la plus élémentaire économie de procédure et à l’interdiction du déni de justice formel fondé sur l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) d’attendre la décision d’une autre autorité, même si celle-ci est susceptible de fournir une solution au litige, si ledit litige peut être tranché sans délai sur la base d’autres motifs (ATA/801/2014 du 14 octobre 2014 consid. 8b).

c. En l'espèce, la solution de la présente procédure ne dépend pas de l'issue de celle concernant les nouvelles demandes d'autorisation. Comme l'a relevé à raison l'OCPM dans ses déterminations, lesdites nouvelles demandes seront examinées par l'intimée à la fin de la présente procédure.

Au vu de ce qui précède, la demande de suspension de procédure sera rejetée.

3. Les recourants se plaignent du fait que le TAPI n'ait pas ordonné de comparution personnelle des parties, ni d'audition de témoins.

Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_545/2014 du 9 janvier 2015 consid. 3.1), de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 p. 157). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 p. 236).

Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 138 I 232 consid. 5.1 p. 237).

En l’espèce, le TAPI a, à raison, refusé ces auditions dans la mesure où une comparution des parties et des auditions de témoins n'étaient pas susceptibles d’influencer l’issue du litige, le dossier contenant toutes les pièces utiles à la résolution de celui-là. Par ailleurs, le droit à une audition orale n'est pas garanti.

4. Les recourants contestent le bien-fondé de la décision du TAPI qui confirme la caducité de leur autorisation d'établissement et de séjour prononcée par l'OCPM.

5. Lorsque le complexe de faits soumis au juge administratif a fait l’objet d’une procédure pénale, le juge administratif est en principe lié par le jugement pénal et ne peut s’en écarter que s’il est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de faits inconnues du juge pénal ou que ce dernier n’a pas prises en considération, s’il existe des preuves nouvelles dont l’appréciation conduit à un autre résultat, si l’appréciation à laquelle s’est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés ou si celui-ci n’a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 139 II 95 consid. 3.2). Il convient d’éviter autant que possible que la sécurité du droit soit mise en péril par des jugements opposés, fondés sur les mêmes faits (ATF 137 I 363 consid. 2.3.2).

Ce principe s’applique non seulement lorsque le jugement pénal a été rendu au terme d’une procédure publique ordinaire au cours de laquelle les parties ont été entendues et des témoins interrogés, mais également, à certaines conditions, lorsque la décision a été rendue à l’issue d’une procédure sommaire, même si la décision pénale se fonde uniquement sur le rapport de police. Il en va notamment ainsi lorsque la personne impliquée savait ou aurait dû prévoir, en raison de la gravité des faits qui lui sont reprochés, qu’il y aurait également une procédure de retrait de permis. Dans cette situation, la personne impliquée est tenue, en vertu des règles de la bonne foi, de faire valoir ses moyens dans le cadre de la procédure pénale, le cas échéant en épuisant les voies de recours mises à sa disposition, et ne peut attendre la procédure administrative pour exposer ses arguments (ATF 123 II 97 consid. 3c/aa ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_708/2013 du 27 février 2014 consid. 3.1). La chambre administrative a considéré, dans plusieurs arrêts, que le juge administratif n’était pas lié par un jugement pénal qui n’avait pas été rendu à l’issue d’une procédure contradictoire (ATA/655/2013 précité ; ATA/99/2013 du 19 février 2013 ; ATA/277/2001 du 24 avril 2001).

6. Selon l’art. 61 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20), l’autorisation d’établissement d’un étranger quittant la Suisse sans déclarer son départ prend automatiquement fin après six mois. Sur demande, l’autorisation d’établissement peut être maintenue pendant quatre ans.

Les délais prévus à l’art. 61 al. 2 LEtr ne sont pas interrompus en cas de séjour temporaire en Suisse à des fins de visite, de tourisme ou d’affaires (art. 79 al. 1 OASA). La demande de maintien de l’autorisation d’établissement doit être déposée avant l’échéance du délai de six mois prévu par l'art. 61 al. 2 LEtr (art. 79 al. 2 OASA).

Selon la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 2C_853/2010 du 22 mars 2011), confirmant celle, constante, rendue à propos de l’art. 9 al. 3 let. c de l’ancienne loi fédérale sur le séjour et l’établissement des étrangers du 26 mars 1931 (aLSEE - RS 142.20) abrogé par la loi sur les étrangers mais qui reste applicable au regard de l'art. 61 al. 2 LEtr (arrêt du Tribunal fédéral 2C_408/2010 du 15 décembre 2010, consid. 3.3), l'autorisation d'établissement prend fin lorsque l'étranger séjourne à l'étranger de manière ininterrompue pendant six mois consécutifs, quels que soient les causes de cet éloignement et les motifs de l'intéressé (ATF 120 Ib 369 consid. 2c et d p. 372 s.).

7. En l'espèce, les recourants ont eu l'occasion de s'exprimer devant les autorités pénales durant la procédure ayant mené aux ordonnances pénales prononcées à leur encontre. Lors de leur audition devant le Ministère public en 2012, Mme A______ a reconnu avoir vécu en France depuis le 1er avril 2010 tandis que son mari a également partiellement reconnu les faits. Par ailleurs, Mme A______ a indiqué aux autorités pénales que le couple habitait à la rue de F______ à Meyrin alors même qu'en ayant été emmenée sur place, elle n'a pas su indiquer où se trouvait l'appartement et que le locataire de l'appartement où les époux étaient censés être domiciliés a confirmé qu'ils n'avaient jamais vécu à cette adresse. Il a été établi par l'autorité pénale que le couple est revenu vivre de manière stable à Genève en février 2012, ce qui n'est pas contesté par les recourants. Aucun des deux n'a fait opposition auxdites ordonnances, celles-ci étant entrées en force, ils ne peuvent dès lors plus contester les éléments de faits établis par le Ministère public genevois. Il sied de souligner que même si les recourants n'étaient à cette époque pas défendus par un avocat et avaient d'autres problèmes à régler, il est inconcevable qu'ils aient décidé de s'auto-incriminer en faisant des déclarations préjudiciables pour eux-mêmes.

Les faits retenus dans les ordonnances pénales étant considérés comme avérés, la chambre administrative se basera sur ceux-ci pour déterminer si les conditions de l'art. 61 al. 2 LEtr sont remplies. En tout état, les pièces produites par les recourants, telles que les attestations signées par MM. M______ et
L______, mentionnant que les recourants ont été logés chez ces deux personnes entre 2010 et 2011 pour de courtes durées, ne viennent pas mettre à mal les éléments établis par l'autorité pénale. En effet, ces déclarations écrites ne démontrent aucunement que les époux avaient leur centre de vie et d'intérêts en Suisse. Vu la sporadicité des séjours en Suisse, ces derniers constituent des séjours temporaires qui ne sauraient suspendre le délai prévu à l'art. 61 al. 2 LEtr.

Les recourants ont vécu d'avril 2010 à février 2012 à Annemasse, soit une période supérieure aux six mois prévus par l'art. 61 al. 2 LEtr. Ils n'ont à aucun moment déposé une demande de maintien d'autorisation d'établissement. Partant, les autorisations d'établissement, et respectivement de séjour, des époux ont pris fin bien avant leur retour en février 2012.

Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que l'OCPM, puis le TAPI, ont admis que les autorisations d'établissement, respectivement de séjour, avaient pris fin.

8. Mal fondé, le recours sera rejeté.

9. Vue l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge, conjointe et solidaire, des recourants qui succombent (art. 87 LPA). Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 septembre 2015 par Madame A______ et par Monsieur B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 15 juillet 2015 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge, conjointe et solidaire, de Monsieur B______ et de Madame A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Antoine Boesch, avocat des recourants, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeants : M. Verniory, président, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.