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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3773/2015

ATA/1231/2015 du 12.11.2015 ( FPUBL ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3773/2015-FPUBL ATA/1231/2015

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 12 novembre 2015

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Philippe Eigenheer, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE

 



Attendu, en fait, que :

1) Madame A______ a été engagée par la Ville de Genève (ci-après : la ville) le 30 juillet 2013 en tant qu'éducatrice à 50 % au service de la petite enfance, avec effet au 1er août 2013.

2) Mme A______ a fait l'objet de deux entretiens d'évaluation, les 25 novembre 2014 et 10 février 2015.

3) Elle a été convoquée à un troisième entretien d'évaluation qui s'est tenu le 9 juin 2015. À cette occasion, sa hiérarchie lui a indiqué qu'elle ne répondait pas aux attentes. Après près de deux ans de fonctionnement au sein du Bureau d'information petite enfance (ci-après : BIPE), elle peinait à cerner l'ensemble des tâches liées à sa fonction, et son intégration au sein de l'équipe était problématique.

4) Le 24 juin 2015, la ville a fait savoir à Mme A______ qu'elle envisageait de résilier les rapports de service. Un délai lui était imparti pour se déterminer et solliciter le cas échéant son audition par une délégation du Conseil administratif (ci-après : CA).

5) Le 17 juillet 2015, Mme A______ a adressé ses observations, et a fait savoir à son employeur qu'elle était en incapacité de travail.

Elle soulignait les carences de la ville en ce qui concernait notamment les entretiens d'évaluation la concernant. Le laps de temps entre les entretiens de février et juin 2015 étaient très courts, car le BIPE avait durant cette période fermé plus d'un mois, et cette fermeture avait été suivie par les vacances de Pâques ; en outre, le 9 juin 2015, la période fixée en février 2015 pour l'amélioration des points discutés n'était pas terminée. Elle réfutait en outre divers reproches qui lui étaient adressés.

6) Par décision du 25 septembre 2015 déclarée exécutoire nonobstant recours, le CA de la ville a prononcé le licenciement de Mme A______, avec effet au 30 novembre 2015. Des manquements trop importants subsistaient à ce jour pour permettre une bonne exécution des tâches qui lui avaient été confiées.

7) Par acte déposé le 28 octobre 2015, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée, concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif, et principalement à l'annulation de la décision attaquée et à ce que la chambre administrative propose sa réintégration. En cas de refus de la ville de procéder à une telle réintégration, elle devait être condamnée à lui verser une indemnité équivalant à vingt-quatre mois de traitement brut, avec intérêts à 5 % l'an à partir du 30 novembre 2015.

À titre préalable, Mme A______ a sollicité la restitution de l’effet suspensif. Elle ne percevrait plus aucun revenu à compter du 30 novembre 2015, à l’exception des prestations de l’assurance-chômage qui ne couvriraient pas l’intégralité de son salaire, alors que sur le fond, son recours avait toutes chances de succès et pouvait déboucher sur une proposition de réintégration.

8) Le 9 novembre 2015, la ville a conclu au rejet de la demande de restitution de l'effet suspensif.

Le recours n'avait que très peu de chances de succès, et l'intérêt public au bon fonctionnement et à la bonne image de l'administration communale l'emportait sur l'intérêt privé, exclusivement pécuniaire, de Mme A______.

9) Sur ce, la cause a été gardée à juger sur la question de l'effet suspensif.

Considérant, en droit, que :

1) Aux termes de l’art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3).

2) Les décisions sur mesures provisionnelles sont prises par le président ou le vice-président de la chambre administrative ou, en cas d’empêchement de ceux-ci, par un autre juge (art. 21 al. 2 LPA et art. 7 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 26 septembre 2010).

3) a. Lorsque l'effet suspensif a été retiré ou n'est pas prévu par la loi, l'autorité de recours doit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution. Elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire. La restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l’absence d’exécution immédiate de la décision ou de la norme (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1). Pour effectuer la pesée des intérêts en présence qu’un tel examen implique, l'autorité de recours n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités).

b. Toutefois et de jurisprudence constante, la chambre de céans considère que lorsque le statut applicable à l'agent public ne permet pas d'imposer la réintégration en cas d'admission du recours, elle ne peut faire droit à une demande de restitution de l’effet suspensif, car elle rendrait alors une décision allant au-delà des compétences qui sont les siennes sur le fond (ATA/1000/2015 du 28 septembre 2015 ; ATA/986/2014 du 10 décembre 2014 ; ATA/42/2014 du 24 janvier 2014 consid. 6 ; ATA/610/2013 du 16 septembre 2013 consid. 5 ; ATA/182/2012 du 3 avril 2012 consid. 5 ; ATA/107/2012 du 22 février 2012 ; ATA/92/2012 du 17 février 2012 ; ATA/371/2011 du 7 juin 2011 ; ATA/343/2011 du 25 mai 2011 ; ATA/160/2011 du 11 mars 2011 ; ATA/341/2009 du 21 juillet 2009 et les références citées).

4) L'art. 105 du statut du personnel de la Ville de Genève, du 29 juin 2010 (LC 21 151 – ci-après : le statut) ne permet pas à la chambre de céans d'imposer la réintégration d’un agent public en cas d'admission du recours. L'art. 106 du statut ne fait exception à ce principe que dans trois hypothèses, non réalisées en l'espèce.

5) En l'occurrence, l’autorité intimée a d’emblée manifesté, par le retrait de l’effet suspensif au recours, son refus de réengager la recourante, même en cas d’admission du recours. Au vu notamment des motifs a priori importants sur lesquels la décision de licenciement est fondée tels qu’ils ressortent du dossier, il y a lieu d'appliquer au cas d'espèce le principe tiré de la jurisprudence précitée et de rejeter la requête en restitution de l’effet suspensif au recours.

6) La recourante invoque le préjudice financier que la décision attaquée va impliquer pour elle dès le 30 novembre 2015. Au-delà des considérations qui précèdent relatives à l’impossibilité d’ordonner sa réintégration en cas d’admission du recours, rien ne permet de déroger à la jurisprudence tout aussi constante de la chambre de céans, s’il y avait lieu d’effectuer une pesée des intérêts en présence : l’intérêt privé de la recourante à conserver l’intégralité de ses revenus doit céder le pas à l’intérêt public à la préservation des finances de l’État (ATA/1000/2015 précité ; ATA/330/2015 du 24 mars 2015 ; ATA/266/2015 du 13 mars 2015 et la jurisprudence citée). Il y a en effet une incertitude quant à la capacité de Mme A______ à rembourser les montants perçus en cas de confirmation de la décision querellée, alors que la ville serait à même de verser les indemnités dues en cas d’issue favorable du recours, cela même si la cause ne pouvait être tranchée rapidement.

7) Le sort des frais sera réservé jusqu'à droit jugé au fond.

Vu le recours interjeté le 28 octobre 2015 par Madame A______ contre une décision de la Ville de Genève du 25 septembre 2015 ;

vu l’art. 66 al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ;

vu l’art. 7 al. 1 du règlement de la chambre administrative du 21 décembre 2010 ;

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse de restituer l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me Philippe Eigenheer, avocat de la recourante ainsi qu'à la Ville de Genève.

 

 

Le président :

 

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :