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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/8/2014

ATA/42/2014 du 24.01.2014 ( FPUBL ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/8/2014-FPUBL ATA/42/2014

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 24 janvier 2014

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Madame X______
représentée par Me Mattia Deberti, avocat

contre

COMMUNE d’Y______
représentée par Me Christian Bruchez, avocat

 



Attendu, en fait, que :

1) Madame X______, née le ______ 1966, a été engagée le 30 août 1999 par la commune d’Y______ (ci-après : la commune) en qualité d'hôtesse-caissière au club de tennis Z______.

2) En septembre 2003, Mme X______ a fait l'objet d'un courrier d'avertissement de la part du responsable du service des sports et du responsable de la gestion du personnel.

3) En janvier 2010, plusieurs usagers du centre sportif Z______ se sont plaints du comportement de Mme X______. Le 9 février 2010, le maire ainsi que le directeur du service des sports lui ont écrit en lui demandant instamment de modifier son comportement vis-à-vis des usagers. Mme X______ a également été convoquée par le maire à un entretien le 3 mai 2010.

4) Le 19 mars 2012, le responsable du service des sports et le responsable des ressources humaines ont adressé un courrier à Mme X______. Suite à de nouvelles plaintes d'usagers, un entretien avait eu lieu le 16 mars 2012 entre les signataires et Mme X______. Si cette dernière n'améliorait pas rapidement son attitude, la fin des rapports de service devrait être envisagée.

5) Suite à une nouvelle doléance formulée par un usager en décembre 2012, le conseiller administratif responsable a convoqué Mme X______ à un entretien le 16 janvier 2013, auquel ont participé, outre ledit conseiller administratif, le secrétaire général adjoint en charge des ressources humaines, le secrétaire général adjoint administratif et le responsable du service des sports.

6) Le 21 janvier 2013, le conseiller administratif a adressé un courrier à Mme X______. Faisant suite à l'entretien précité, cette dernière était informée qu'en cas de nouvelle plainte émanant d'usagers, il serait mis un terme aux rapports de service.

7) Le 1er mars 2013, Monsieur A______ a adressé au conseiller administratif une nouvelle plainte assortie d'une pétition signée par lui-même et quatorze autres usagers du tennis Z______.

8) Le 23 avril 2013, le maire s'est adressé à Mme X______. La pétition précitée avait été reçue, et plusieurs de ses auteurs avaient été auditionnés. Ces doléances faisaient suite à une cohorte d'autres dénonciations semblables et à plusieurs courriers d'avertissement. Le conseil administratif envisageait de prononcer son licenciement. Un délai au 7 mai 2013 lui était donné afin de s'exprimer sur ces motifs. Elle serait par ailleurs entendue oralement par le conseil administratif à cette même date.

9) Le 2 mai 2013, Mme X______ a produit un certificat médical selon lequel elle était en arrêt maladie à 100 % du 2 au 9 mai 2013 inclusivement. Le 3 mai 2013, son avocat s'est adressé aux ressources humaines de la commune en précisant qu'elle ne serait pas présente à l'entretien prévu pour le 7 mai 2013, et en sollicitant le report de celui-ci.

10) L'entretien a été déplacé à plusieurs reprises et annulé autant de fois suite à la production par Mme X______ de nouveaux certificats médicaux.

11) Le 3 juin 2013, le conseil administratif a écrit au conseil de Mme X______. Les certificats médicaux produits attestaient d'une incapacité de travail, et non de participer à l'entretien prévu. Celui-ci était cette fois reporté au 11 juin 2013. Le cas échéant, Mme X______ pouvait exercer son droit d'être entendue par écrit avant le 14 juin 2013.

12) Le 11 juin 2013, le conseil de Mme X______ a écrit à la commune que sa cliente n'était en état ni de se présenter à l'entretien, ni de se déterminer par écrit, fût-ce par son entremise, mais qu'elle ne renonçait pas pour autant à exercer son droit d'être entendue.

13) Mme X______ a produit des certificats médicaux attestant de son incapacité de travailler et de se déterminer au sujet de ses rapports de travail allant jusqu'au 15 novembre 2013.

14) Le 30 octobre 2013, par l'entremise de son conseil, Mme X______ a adressé à la commune ses observations.

Le statut du personnel de l'administration municipale de la commune d’Y______, du 23 juin 1998 (ci-après : le statut ; LC 43 151) lui était applicable. Le licenciement dont elle avait fait l'objet ne respectait pas les formes prévues par le statut, et la prétendue incapacité à établir des rapports empreints de compréhension et de tact avec le public ne constituait pas un motif fondé.

La pétition à l'origine du licenciement était le fait d'une quinzaine d'usagers, pour la plupart employés de B______ avec lesquels elle rencontrait certaines difficultés relationnelles et qui étaient déterminés par tous les moyens à obtenir son départ. Elle n'avait en revanche jamais eu aucun problème avec les autres usagers du club de tennis Z______. Elle s'opposait donc à la résiliation de son contrat de travail et sollicitait la protection de sa personnalité par le biais de l'exclusion des usagers dont le comportement était inadmissible ou par son affectation dans un autre service communal.

15) Par décision du 15 novembre 2013, déclarée exécutoire nonobstant recours, le conseil administratif a prononcé le licenciement de Mme X______ avec effet au 28 février 2014, en se référant à l'art. 335c de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220), applicable par renvoi de l'art. 3 al. 2 du statut.

Il ne pouvait que constater la fréquence et la régularité de plaintes circonstanciées d'usagers la concernant. Le constat d'une incapacité à établir des rapports empreints de compréhension et de tact avec une part significative du public devait être fait.

La décision serait identique si le statut lui était applicable en tant que fonctionnaire communale, les faits qui lui étaient reprochés étant constitutifs d'un motif fondé au sens de l'art. 71 al. 2 du statut.

16) Par acte déposé le 3 janvier 2014, Mme X______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée, concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif, et principalement à ce que sa réintégration soit prononcée (sic) et à ce qu'une indemnité de procédure lui soit octroyée.

Aucune motivation particulière n'était fournie à l'appui de la demande de restitution de l'effet suspensif.

17) Le 15 janvier 2014, la commune a conclu au rejet de la demande de restitution de l'effet suspensif.

Selon sa jurisprudence constante, la chambre administrative ne pouvait restituer l'effet suspensif à un recours interjeté contre un licenciement lorsqu'elle n'avait pas la possibilité d'ordonner la réintégration du membre du personnel en cause. Or, même si par impossible les rapports de travail devaient être considérés comme relevant du droit public, et que le statut soit applicable à Mme X______, ce dernier ne conférait pas à la chambre administrative le pouvoir d'ordonner la réintégration d'un agent public communal. Au surplus, la commune n'entendait en aucun cas poursuivre la collaboration avec Mme X______, même en cas d'admission du recours.

18) Sur ce, la cause a été gardée à juger sur effet suspensif.

Considérant, en droit, que :

1) La recevabilité du présent recours doit être réservée, dans la mesure où la compétence ratione materiae de la chambre de céans semble contestée par l'intimée au motif que les rapports de travail en cause seraient soumis au droit privé.

2) La compétence pour ordonner, d'office ou sur requête, des mesures provisionnelles en lien avec un recours appartient au président de la chambre administrative (art. 21 al. 1 de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 7 ch. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 21 décembre 2010).

3) Sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif (art. 66 al. 1 LPA).

L’autorité décisionnaire peut toutefois ordonner l’exécution immédiate de sa propre décision, nonobstant recours, tandis que l’autorité judiciaire saisie d’un recours peut, d’office ou sur requête, restituer l’effet suspensif à ce dernier (art. 66 al. 2 LPA).

4) Par ailleurs, selon la jurisprudence constante, les mesures provisionnelles - au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif - ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/248/2011 du 13 avril 2011 consid. 4 ; ATA/197/2011 du 28 mars 2011 ; ATA/248/2009 du 19 mai 2009 consid. 3 ; ATA/213/2009 du 29 avril 2009 consid. 2). Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités). Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (I. HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess, RDS 1997 II 253-420, 265).

5) Selon l'art. 88 al. 2 du statut – pour autant, une fois encore, que ce dernier soit applicable dans son intégralité à la présente espèce – la chambre administrative ne peut imposer la réintégration d’un agent public en cas de résiliation des rapports de travail.

6) Dans sa détermination, l’autorité intimée a clairement indiqué qu’elle n’entendait pas poursuivre les relations de travail avec la recourante, indiquant notamment que confirmaient leur intention de ne pas réintégrer Mme X______ quelle que soit l'issue du recours (mémoire de réponse sur effet suspensif, § 46).

Dès lors, s’il était fait droit à la demande de restitution de l’effet suspensif présentée par la recourante, la chambre de céans rendrait une décision allant au-delà des compétences qui sont les siennes sur le fond (ATA/610/2013 du 16 septembre 2013 consid. 5 ; ATA/182/2012 du 3 avril 2012 consid. 5 ; ATA/107/2012 du 22 février 2012 ; ATA/92/2012 du 17 février 2012 ; ATA/371/2011 du 7 juin 2011 ; ATA/343/2011 du 25 mai 2011 ; ATA/160/2011 du 11 mars 2011 ; ATA/627/2010 du 8 septembre 2010 ; ATA/388/2009 du 11 août 2009 ; ATA/341/2009 du 21 juillet 2009 et les références citées).

7) La recourante ne fournit par ailleurs aucun motif pouvant conduire à la restitution de l'effet suspensif, s'étant en effet abstenue de motiver sa demande sur ce point.

8) Ladite demande de restitution de l'effet suspensif sera ainsi rejetée, le sort des frais de la procédure étant réservé jusqu'à droit jugé au fond.

Vu l’art. 66 al. 2 LPA ;

vu l’art. 7 al. 1 du règlement de la chambre administrative du 21 décembre 2010 ;

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse de restituer l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me Mattia Deberti, avocat de la recourante ainsi qu'à Me Christian Bruchez, avocat de la commune d’Y______.

 

 

Le vice-président :

 

 

 

J.-M. Verniory

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :