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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3434/2014

ATA/986/2014 du 10.12.2014 ( FPUBL ) , REFUSE

Recours TF déposé le 30.01.2015, rendu le 10.03.2015, IRRECEVABLE, 8C_58/2015
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3434/2014-FPUBL ATA/986/2014

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 10 décembre 2014

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

Monsieur X______
représenté par DAS Protection juridique SA, soit pour elle Madame Sabrina Khoshbeen, mandataire

contre

COMMUNE DE CHÊNE-BOUGERIES
représentée par Me Thomas Barth, avocat

 



Attendu, en fait, que :

1) Monsieur X______, né le ______ 1966, a été engagé le 4 mars 2014 par la commune de Chêne-Bougeries (ci-après : la commune), en qualité d'auxiliaire de sécurité à 60 % au sein du service prévention et sécurité, avec entrée en fonction au 1er avril 2014. Selon le contrat d'engagement, qui se référait sur ce point à l'art. 8 du statut du personnel de la commune, de mars 2006 (recte : du 15 avril 1975 ; ci-après : le statut – LC 12 151) « le fonctionnaire est soumis à une période probatoire de trois ans ».

2) Le 16 juin 2014, le conseil administratif de la commune a accepté la demande de M. X______ d'augmenter son taux d'activité à 100 % avec effet au 17 juin 2014.

3) Par courriel du vendredi 26 septembre 2014 à 23h32, le secrétaire général de la commune a convoqué M. X______ – qui devait rentrer de vacances le lundi 29 septembre 2014 – à une rencontre avec les membres du conseil administratif prévue le 29 septembre 2014 à 10h00, sans indiquer le motif de cette entrevue.

4) Par courrier du 29 septembre 2014, le conseil administratif s'est référé à l'entrevue s'étant tenue le matin même, lors de laquelle il avait signifié à M. X______ son intention de mettre fin aux relations de travail dès le 30 novembre 2014, avec libération de l'obligation de travailler dès la prise de décision. Celle-ci devant être prise le 2 octobre 2014, M. X______ était invité à déposer ses observations avant cette date.

5) Le 2 octobre 2014, M. X______ a remis ses observations en mains propres au conseil administratif. Les remarques au sujet de son absence d'intégration et d'adaptation au sein de la police municipale l'avaient énormément heurté, car depuis plus de six mois il s'était mis entièrement au service de la police municipale et de la mairie. Il en voulait pour preuve l'augmentation de son taux d'occupation ainsi que la prise à son compte de nombreuses tâches administratives, et par deux fois le remplacement de la secrétaire de la police municipale. Il avait eu à plusieurs reprises des retours positifs de la part de la cheffe de service, Madame Y______, et de son supérieur le chef de poste de la police municipale, Monsieur Z______, et s'était toujours bien entendu avec ses collègues, en particulier Madame A______ avec laquelle il travaillait en binôme. Il souhaitait poursuivre les rapports de travail.

6) Le 4 octobre 2014, M. X______ s'est adressé à M. Z______. Il souhaitait être renseigné sur son sort, car il n'avait pu joindre le secrétaire général, et n'avait reçu aucune nouvelle depuis la séance du conseil administratif.

7) Par décision du 9 octobre 2014, le conseil administratif a mis fin aux rapports de service, avec effet au 30 novembre 2014, et libération de l'obligation de travailler « durant les mois d'octobre et novembre 2014 ».

Il était reproché à M. X______ d'avoir violé l'art. 12 du statut. En substance, il avait été porté à la connaissance du conseil administratif que son comportement, en particulier vis-à-vis de membres de l'administration communale, avait été « à certaines occasions parfaitement inapproprié », et qu'il avait à plusieurs reprises agi de manière incompatible avec les devoirs de sa fonction.

Cette décision – qui ne contenait aucune mention de la voie ou du délai de recours – a été envoyée le jour même par pli recommandé, qui a été refusé, et a été réexpédiée à M. X______ par pli simple le 15 octobre 2014.

Elle n'indiquait par ailleurs pas être exécutoire nonobstant recours.

8) Le 10 octobre 2014, M. X______ s'est adressé au conseil administratif par l'intermédiaire d'un mandataire. Son droit d'être entendu, ainsi que l'art. 77 du statut, avaient été violés. Il demandait à disposer d'une copie de son dossier d'ici au 17 octobre 2014.

9) Le mandataire de M. X______ s'est derechef adressé au conseil administratif le 17 octobre 2014. Le dossier ne lui avait pas été transmis. M. X______ contestait formellement la résiliation de ses rapports de travail, et demandait sa réintégration immédiate.

10) Le même jour, soit le 17 octobre 2014, le conseil de la commune s'est adressé à M. X______.

La disposition du statut en jeu était non pas l'art. 77 mais l'art. 8, qui permettait une résiliation ordinaire en période probatoire. M. X______ n'avait en effet pas été nommé fonctionnaire. Le droit d'être entendu de l'intéressé avait été respecté. La commune n'entendait pas revenir sur sa décision, qu'elle considérait comme ferme et définitive.

11) Le 20 octobre 2014, M. X______ a réitéré sa demande de disposer de son dossier, ainsi que sa contestation des motifs du licenciement. De plus, il avait été suspendu sans décision de résiliation et sans motif de suspension.

12) Un échange de courriers entre mandataires a encore eu lieu les 28 et 30 octobre 2014.

13) Par acte posté le 10 novembre 2014, M. X______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision de résiliation des rapports de service, concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif au recours en ordonnant sa réintégration immédiate ainsi que la production de l'intégralité de son dossier ; principalement, à l'annulation de la décision attaquée, au prononcé de sa réintégration et à l'octroi d'une indemnité de procédure ; et, subsidiairement, à la condamnation de la commune à payer une indemnité équivalant à six mois de traitement, avec intérêts à 5 % l'an dès le 1er décembre 2014.

S'agissant de l'effet suspensif, son délai de congé venait à échéance le 30 novembre 2014, si bien qu'il demandait sa réintégration jusqu'à droit jugé sur le fond.

14) Le 21 novembre 2014, la commune a conclu au rejet de la demande de restitution de l'effet suspensif ainsi que, sur le fond, au rejet du recours.

Le droit d'être entendu de M. X______ avait été respecté, et ce dernier avait été licencié dans le cadre de sa première année probatoire. Il convenait dès lors de refuser la restitution de l'effet suspensif, étant précisé au surplus qu'elle n'entendait en aucun cas le réintégrer.

15) Par décision du 5 décembre 2014 (ATA/968/2014), la présidence de la chambre administrative a déclaré la demande de restitution de l'effet suspensif irrecevable, et a constaté en tant que de besoin que le recours déployait effet suspensif.

La loi prévoyait l'effet suspensif au recours sauf disposition légale contraire ou sauf déclaration du caractère exécutoire nonobstant recours de la décision, or la décision attaquée ne prévoyait pas une telle exécution. La commune n'avait au surplus pas conclu au retrait de l'effet suspensif, tandis que les juridictions administratives étaient liées par les conclusions des parties et ne pouvaient aller au-delà.

16) Le 8 décembre 2014, la commune a présenté une requête de retrait de l'effet suspensif au recours.

Ses intérêts se trouvaient désormais menacés, un retour même provisoire de M. X______ au sein de l'administration municipale étant impensable, au risque de provoquer des remous non négligeables au sein de celle-ci.

La commune excluait d'ores et déjà toute réintégration, et sa solvabilité était notoire, de sorte que M. X______ aurait le cas échéant l'assurance de voir ses prétentions financières subsidiaires honorées.

17) Le 8 décembre 2014, M. X______ s'est opposé au retrait de l'effet suspensif au recours.

La commune n'avait pas fait valoir, dans son écriture du 21 novembre 2014, que ses intérêts seraient menacés. Il devait être réintégré au sein du personnel communal compte tenu de l'ATA/968/2014.

18) Sur ce, la cause a été gardée à juger sur effet suspensif.

Attendu, en droit, que :

1) La compétence pour ordonner, d’office ou sur requête, des mesures provisionnelles en lien avec un recours appartient au président de la chambre administrative (art. 21 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 7 ch. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 21 décembre 2010).

2) Sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif (art. 66 al. 1 LPA).

L’autorité décisionnaire peut toutefois ordonner l’exécution immédiate de sa propre décision, nonobstant recours, tandis que l’autorité judiciaire saisie d’un recours peut, d’office ou sur requête, restituer l’effet suspensif à ce dernier (art. 66 al. 1 et 3 LPA).

3) Le licenciement, qu'il soit fondé sur l'art. 8 ou l'art. 77 du statut, ouvre la voie à un recours devant la chambre de céans (ATA/289/2014 du 29 avril 2014 consid. 2), même si seule la seconde de ces dispositions le prévoit expressément.

4) Contrairement à la décision au fond, la décision sur effet suspensif n'est revêtue que d'une autorité de la chose jugée limitée et peut être facilement modifiée. La partie concernée par l'effet suspensif peut en effet demander en tout temps, en cas de changement de circonstances, que l'ordonnance d'effet suspensif soit modifiée par l'autorité dont elle émane ou par l'instance de recours (ATF 139 I 189 consid. 3.5).

Quand bien même les circonstances ne se sont pas modifiées depuis la décision sur effet suspensif du 5 décembre 2014, il y a lieu de considérer le caractère particulier de celle-ci, dès lors qu'elle n'entrait pas en matière sur la demande de restitution de l'effet suspensif. La présente demande constitue donc la première prise de décision effective de la chambre de céans sur la question, si bien qu'il y a lieu d'examiner son bien-fondé.

5) Selon la jurisprudence constante, les mesures provisionnelles - au nombre desquelles compte la restitution de l'effet suspensif - ne sont légitimes que si elles s’avèrent indispensables au maintien d’un état de fait ou à la sauvegarde d’intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/248/2011 du 13 avril 2011 consid. 4 ; ATA/197/2011 du 28 mars 2011 ; ATA/248/2009 du 19 mai 2009 consid. 3 ; ATA/213/2009 du 29 avril 2009 consid. 2). Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (arrêts précités). Ainsi, dans la plupart des cas, les mesures provisionnelles consistent en un minus, soit une mesure moins importante ou incisive que celle demandée au fond, ou en un aliud, soit une mesure différente de celle demandée au fond (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungs-verfahren und Verwaltungsprozess, RDS 1997 II 253-420, 265).

6) De jurisprudence également constante, la chambre de céans considère que lorsque le statut applicable à l'agent public ne permet pas d'imposer la réintégration en cas d'admission du recours, elle ne peut faire droit à une demande de restitution de l’effet suspensif, car elle rendrait alors une décision allant au-delà des compétences qui sont les siennes sur le fond (ATA/42/2014 du 24 janvier 2014 consid. 6 ; ATA/610/2013 du 16 septembre 2013 consid. 5 ; ATA/182/2012 du 3 avril 2012 consid. 5 ; ATA/107/2012 du 22 février 2012 ; ATA/92/2012 du 17 février 2012 ; ATA/371/2011 du 7 juin 2011 ; ATA/343/2011 du 25 mai 2011 ; ATA/160/2011 du 11 mars 2011 ; ATA/341/2009 du 21 juillet 2009 et les références citées).

7) En l'espèce, dans la mesure où le licenciement concerne un agent public en phase probatoire et où le statut ne permet pas à la chambre de céans d'imposer sa réintégration en cas d'admission du recours (art. 77 al. 8 du statut), il y a lieu d'appliquer la jurisprudence précitée au cas d'espèce, et de retirer l'effet suspensif au recours.

8) Dans la mesure néanmoins où la présente demande, à quelques jours d'intervalle de sa réponse sur effet suspensif où l'intimée a négligé de conclure au retrait de l'effet suspensif, il y a lieu de déroger à titre exceptionnel aux règles générales tirées de l'art. 87 al. 1 LPA – à savoir absence d'émolument à la partie qui obtient gain de cause, ainsi qu'à la collectivité publique en cas de recours contre les décisions qu'elle a prises – et de percevoir, à charge de la commune, un émolument de décision de CHF 500.-. Il sied de rappeler que la première de ces règles ne constitue qu'une pratique de la chambre de céans, et que la seconde, si elle est certes directement tirée du texte légal, peut connaître des exceptions en vertu de ce même texte légal (art. 87 al. 1 2ème phr. LPA commençant par l'expression « en règle générale »).

Vu l’art. 66 al. 3 LPA ;

vu l’art. 7 al. 1 du règlement de la chambre administrative du 21 décembre 2010 ;

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

retire l'effet suspensif au recours ;

met à la charge de la commune un émolument de CHF 500.- ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Monsieur X______ représenté par DAS Protection juridique SA, soit pour elle Madame Sabrina Khoshbeen, mandataire, ainsi qu'à Me Thomas Barth, avocat de la commune de Chêne-Bougeries.

 

 

Le président :

 

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :