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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2270/2020

JTAPI/338/2021 du 31.03.2021 ( LCI ) , ADMIS

REJETE par ATA/963/2021

Descripteurs : QUALITÉ POUR RECOURIR;VOISIN;INTÉRÊT DIGNE DE PROTECTION;PLAN D'AFFECTATION SPÉCIAL;AUTORISATION DÉROGATOIRE(PERMIS DE CONSTRUIRE);AFFECTATION;ZONE LIBRE;CONSTRUCTION ET INSTALLATION;CONFORMITÉ À LA ZONE;INTÉRÊT PUBLIC;MODIFICATION(EN GÉNÉRAL);CONSTRUCTION PROVISOIRE
Normes : LPA.60.al1.letb; LGZD.3.al1; LGZD.3.al5; LGZD.3.al6; LGZD.3.al7
Parties : PIÇARRA TEIXEIRA Maria Margarida, MARGUET Olivier, CARROZZO CARLUCCIO Mirella, MCCOMISH Sonia, OUENNOUGHI Sandra, LORENZO Marcos, PIÇARRA TEIXEIRA Lina Maria, CARROZZO CARLUCCIO Salvatore, MCCOMISH Roland, OLIVEIRA PEREIRA Manuel Agostinho, LUONGO Letizia, OUENNOUGHI Zahir, HELFENSTEIN Audrey / COMMUNE DE MEYRIN, DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC, FONDATION QUALITE DE VIE DE QUARTIER
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2270/2020 LCI

JTAPI/338/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 31 mars 2021

 

dans la cause

 

Mesdames Maria Margarida et Lina Maria PIÇARRA TEIXEIRA, Monsieur Olivier MARGUET, Madame Mirella et Monsieur Salvatore CARROZZO CARLUCCIO, Madame Sonia et Monsieur Roland McCOMISH, Madame Sandra et Monsieur Zahir OUENNOUGHI, Monsieur Marcos LORENZO, Monsieur Manuel Agostinho OLIVEIRA PEREIRA, Madame Letizia LUONGO et Madame Audrey HELFENSTEIN

contre

COMMUNE DE MEYRIN et FONDATION QUALITÉ DE VIE DE QUARTIER, représentées par Me François BELLANGER, avocat, avec élection de domicile

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE


EN FAIT

1.             La commune de Meyrin (ci-après : la commune) est propriétaire de la parcelle n° 14'612, sise sur son propre territoire. Cette parcelle est située en troisième zone de développement, dans le périmètre du plan localisé de quartier (ci-après : PLQ) 29'674-526 « Les Vergers », adopté le 6 avril 2011 par le Conseil d'État.

2.             Selon la légende dudit PLQ, la parcelle n° 14'612, qui constitue l'Esplanade des Récréations, est inscrite comme « espaces aménagés en place publique, interdits aux véhicules sauf autorisation ».

3.             Madame Sonia et Monsieur Roland McCOMISH, Monsieur Olivier MARGUET, Madame Audrey HELFENSTEIN, Madame Maria Margarida PIÇARRA TEIXEIRA, Monsieur Marcos LORENZO et Madame Sandra et Monsieur Zahir OUENNOUGHI sont domiciliés promenade de l'Aubier 10, sur la parcelle n° 14'799 de la commune de Meyrin, sise dans le quartier des Vergers.

4.             Madame Mirella et Monsieur Salvatore CARROZZO CARLUCCIO, Madame Lina Maria PIÇARRA TEIXEIRA et Monsieur Manuel Agostinho OLIVEIRA PEREIRA sont domiciliés promenade de l'Aubier 14, sur la parcelle n° 14'801 de la commune de Meyrin, sise dans le quartier des Vergers.

5.             Madame Letizia LUONGO est domiciliée allée de l'Innovation 2, sur la parcelle n° 14'562 de la commune de Meyrin, sise dans le quartier des Vergers.

6.             Le quartier des Vergers est un écoquartier, basé sur les trois piliers du développement durable : la solidarité sociale, la responsabilité écologique et l'efficience économique. Il s'organise depuis avril 2014 en projets participatifs qui incluent les futurs habitants, les constructeurs et les autorités. Cette démarche participative vise notamment à impliquer les futurs habitants dans la réflexion autour de l'aménagements des espaces publics, l'animation du quartier, le choix des activités socioéconomiques et leur localisation dans les surfaces dédiées (https://www.lesvergers-meyrin.ch/ecoquartier/les-vergers; https://la-feve.ch/le-projet/#presentation).

7.             S'agissant des activités socioéconomiques, près de 10'000 m2 de surfaces d'activités ont été réalisées dans les rez-de-chaussée des immeubles d'habitation du quartier. Ces espaces ont été (et sont encore) attribués sur dossier, la commune ayant lancé, en 2012, un appel à projets, dans le but de garantir la cohérence, la diversité et la qualité de l'offre commerciale dans le quartier (https://www.lesvergers-meyrin.ch/ecoquartier/commerces-et-activit%C3%A9s).

8.             S'agissant de l'aménagement des espaces publics extérieurs, une charte « Mise en oeuvre de l'écoquartier Les Vergers - objectifs écoquartier » évolutive a été élaborée en 2012, afin de définir des objectifs de performance socioéconomique et environnementale à atteindre pour l'écoquartier.

9.             Selon le document « Ecoquartier des Vergers - Descriptif général des travaux des espaces publics », « habiter les Vergers n'est pas seulement occuper un logement. Le quartier ne sera un lieu de vie que s'il peut être approprié par ses habitants, investi d'usages répondant à la diversité des besoins (...) et des modes de vies (tranquillité vs animation, rencontre vs anonymat, etc.). Le projet des espaces publics met au coeur des préoccupations les futurs usagers en portant une attention particulière à des aménagements qui offrent un sentiment de sécurité (...), assurent le confort climatique (...) et permettent la diversité des activités (jouer, se reposer, parcourir, rencontrer, faire du sport, travailler, aller à pied à l'école, prendre son vélo quotidiennement, etc.) ».

De même, « la prise en compte des besoins des futurs usagers se traduit également par une posture offrant de la place pour les projets participatifs permettant aux futurs habitants de s'investir dans la définition de certains espaces prolongeant leurs logements. Le projet des espaces publics est ainsi attentif à ne pas "surdéterminer" les usages par un aménagement qui ne permettrait aucune évolution ou appropriation. Dans cet esprit, les aménagements sont conçus de manière simple (mais non simpliste) de sorte qu'ils puissent évoluer selon les besoins, recevoir des usage non programmés (aménagements réversibles) et ainsi bénéficier d'une réelle appropriation contribuant au respect des espaces et usages de chacun ».

10.         Selon ce même document, l'Esplanade des Récréations constitue une zone piétonne ; seuls les accès de service y sont autorisés. Situé au coeur du quartier, cet espace de 500 m de long et de 40 m de large constitue autant un important lieu de passage (accès quotidiens aux parkings souterrains, ainsi qu'aux commerces et services) qu'un espace de détente offrant de multiples possibilités d'appropriation. Au pied des façades des bâtiments de larges espaces sont prévus autant pour le passage des services que pour permettre le prolongement des activités implantées au rez-de-chaussée des immeubles : terrasses de café, jeux d'enfants en relation avec la crèche, etc., le détail des aménagements pouvant être modulé en fonction de l'activité prévue dans les rez-de-chaussée.

11.         Dans la brochure « Les Vergers : un écoquartier participatif - Processus de la démarche 2013-2018 », les thématiques phares des projets du quartier ont été abordées, dont l'alimentation et celle des activités sociales, économiques et culturelles.

Parmi les idées formulées pour développer une alimentation durable figure notamment la création d'un supermarché participatif paysan.

12.         En juillet 2016 a été constituée la société coopérative du Supermarché Participatif Paysan - La Fève (ci-après : la coopérative SPP), laquelle a notamment pour but de créer un supermarché autogéré par ses membres qui permettra de promouvoir l'agriculture paysanne locale et de saison en offrant des conditions dignes aux paysans-transformateurs et des denrées locales de qualité à des prix concurrentiels aux membres-consommateurs (https://la-feve.ch/le-projet/).

13.         En juin 2018, la coopérative SPP a ouvert la Mini-Fève, une épicerie participative implantée dans une arcade d'environ 50 m2 du quartier des Vergers.

Ce point de vente, « laboratoire d'expérimentation » du futur supermarché, était l'occasion de tester le modèle de participation (travail des membres) et d'approvisionnement (filière locale en circuit court) en vue de l'ouverture de la « grande » Fève en 2020-2021.

14.         Dans sa séance du 15 octobre 2019, le Conseil Municipal de la commune a octroyé un droit de superficie d'une durée de dix ans prolongeable en faveur de la Fondation Qualité de Vie de Quartier (ci-après : la fondation) sur une surface située sur l'Esplanade des Récréations en vue de la réalisation d'un pavillon démontable pour accueillir le futur supermarché, géré par la coopérative SPP.

15.         Le 12 décembre 2019, la fondation a déposé une demande d'autorisation de construire auprès du département du territoire (ci-après : le département), enregistrée sous DD 113'218, portant sur la construction d'un pavillon d'une surface brute de plancher (ci-après : SBP) de 550 m2 pour un supermarché participatif paysan pour une durée provisoire de dix ans, l'installation d'une pompe à chaleur et la pose de panneaux solaires en toiture.

16.         La lettre d'accompagnement de la coopérative SPP datée du 20 novembre 2019 déposée avec le dossier mettait notamment en avant le fait que plusieurs citoyens, parmi eux des consommateurs, des paysans et des artisans, s'étaient associés pour imaginer un supermarché de quartier qui répondrait aux principes d'un écoquartier participatif, plus respectueux du climat, des sols, des paysans et de la santé, visant à favoriser l'agriculture urbaine et la participation citoyenne.

Le bâtiment projeté serait implanté sur l'Esplanade des Récréations, à proximité immédiate des ateliers d'artisans concernés (boulanger, boucher, fromager). Ce bâtiment d'une surface de 500 m2 et d'un seul niveau n'ayant pas été prévu au PLQ, la demande d'autorisation de construire était assortie d'une demande de dérogation provisoire de dix ans, renouvelable.

17.         Dans le cadre de l'instruction de la demande, l'ensemble des instances consultées ont émis des préavis favorables, avec ou sans réserves. Parmi ceux-ci, notamment :

-          le 21 janvier 2020, l'office cantonal de l'énergie (ci-après : OCEN) a préavisé favorablement le projet sous diverses conditions, précisant qu'il était dérogé à l'équipement des bâtiments en capteurs solaires thermiques permettant de couvrir au moins 30 % des besoins de chaleur admissible pour l'eau chaude sanitaire, compte-tenu du fait qu'une quantité équivalente d'énergie était produite par une pompe à chaleur air-eau alimentée par l'électricité produite avec des panneaux solaires photovoltaïques (cf. art. 12P du règlement d'application de la loi sur l'énergie du 31 août 1988 - REn - L 2 30.01) ;

-          le 22 janvier 2020, l'office cantonal des transports (ci-après : OCT) a émis un préavis favorable sans observation ;

-          le 28 janvier 2020, la commune a préavisé favorablement le projet sous diverses conditions, rappelant notamment que conformément au PLQ des Vergers, il n'était pas prévu d'accès au pavillon (en pied de bâtiment) par des véhicules motorisés. Elle invitait ainsi les porteurs du projet à venir lui présenter les modalités d'accès prévues pour le projet (condition n° 2 du préavis) ;

-          le 3 février 2020, la direction de la planification directrice cantonale et régionale (ci-après : SPI) a préavisé favorablement le projet et la dérogation à l'art. 3 al. 5 de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35), vu le caractère provisoire de l'installation dont la réalisation correspondait à un motif d'intérêt général. Sous la rubrique remarque, elle indiquait : « le projet n'est pas conforme au PLQ n° 29'674-526. Cependant, l'opportunité de réaliser un supermarché participatif paysan qui favorise une agriculture locale à travers un commerce participatif, solidaire, contribue à l'animation de l'Esplanade des Récréations. Cette dernière est une véritable épine dorsale du quartier. Ce projet est soutenu par la commune et le département. L'office de l'urbanisme confirme l'intérêt de la réalisation de cet équipement de quartier qui relève d'un intérêt public général. Par conséquent, l'office de l'urbanisme est favorable au projet de supermarché participatif paysans provisoire, pour une durée de 10 ans, en application de l'art. 3 al. 5 LGZD, pour les raisons évoquées ci-dessus ».

18.         Le 27 janvier 2020, le conseiller d'État en charge du département a souscrit au projet et a admis une dérogation au PLQ les Vergers pour l'installation d'un bâtiment à titre provisoire pour une durée de dix ans. À l'échéance de ces dix ans, et en fonction des conclusions qui seraient tirées de cette expérience, la question d'une pérennisation du supermarché devrait être posée et, par là-même, de la modification du PLQ pour l'inscrire durablement dans un instrument de planification.

19.         Par arrêté du 19 juin 2020, le Conseil d'État a autorisé l'application des normes de la 3ème zone au bâtiment à construire, selon le dossier DD 113'218, sur la parcelle n° 14'612 de la commune de Meyrin.

20.         Par décision du 23 juin 2020, publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour, le département a autorisé le projet pour une durée provisoire de cinq ans.

21.         Par acte du 22 juillet 2020, Mme Maria PIÇARRA TEIXEIRA, M. MARGUET, Mme et M. CARROZZO CARLUCCIO, Mme et M. McCOMISH, Mme et M. OUENNOUGHI, M. LORENZO, Mme Lina PIÇARRA TEIXEIRA, M. OLIVEIRA PEREIRA, Mme LUONGO et Mme HELFENSTEIN (ci-après : les recourants) ont interjeté recours à l'encontre de cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, principalement, à son annulation, sous suite de frais et dépens.

Tous domiciliés au sein de l'écoquartier des Vergers, ils s'opposaient à l'autorisation de construire querellée pour les motifs suivants :

-          au sein du quartier, l'espace concerné par le projet était dédié aux activités récréatives, de sorte qu'il ne pouvait être retiré à la jouissance collective pour des motifs qui ne seraient pas absolument publics et dans l'intérêt de tous ;

-          la densité de construction du quartier ne laissait pas de place à l'édification de nouvelles structures. En effet, il s'agissait du seul espace demeuré libre, sans déclivité, qui servait aux activités récréatives et de rencontre de tous les habitants. Il s'agissait également de la seule surface importante qui pouvait se prêter à des activités ponctuelles telles que des kermesses ou autres fêtes de quartier propices à la rencontre, aux activités artistiques, collectives ou associatives au sens large ;

-          la construction d'un supermarché ne pourrait se faire sans générer du trafic automobile dans un quartier qui devait en être absolument dépourvu hors services essentiels ou d'urgence, ce qui prétériterait la sécurité des enfants du quartier ;

-          plusieurs arcades commerciales libres et d'accès aisé pour les livraisons existaient en bordure de quartier et seraient mieux à même de se prêter aux activités visées par le SPP, ce qui était d'ailleurs actuellement déjà le cas, puisque ledit supermarché était installé dans une telle arcade. De plus, un commerce généraliste (concessionnaire Migros) existait déjà dans le quartier et répondait, en complément au SPP déjà existant, aux besoins de la population en biens alimentaires et de première nécessité ;

-          la plus-value en terme de qualité de vie d'une partie de la population ne pouvait se faire au détriment de l'ensemble de la population ;

-          enfin, l'ensemble des logements du quartier des Vergers était relié sur la même pompe à chaleur, pour des raisons écologiques, qui s'inscrivaient dans le but recherché par cet écoquartier. Or, les locaux à construire disposeraient d'une pompe à chaleur supplémentaire destinée uniquement à l'exploitation du SPP, ce qui apparaissait comme contraire au but écologique recherché.

22.         Dans leurs déterminations du 28 septembre 2020, la commune et la fondation (ci-après : les intimées), ont conclu, sous suite de frais et dépens, au rejet du recours, s'en rapportant à justice quant à sa recevabilité.

L'argumentation des recourants ne permettait pas de dégager en quoi le département, en délivrant l'autorisation de construire litigieuse, aurait abusé ou excédé de son pouvoir d'appréciation. Le recours ne se rapportait en effet à aucune base légale. Les griefs des recourants n'étaient donc pas recevables, subsidiairement devaient être écartés. Certains de leurs arguments s'apparentaient en outre à des questions d'opportunité. Pour ce seul motif, le recours devait être rejeté.

Au demeurant, la totalité des services spécialisés consultés avait rendu des préavis favorables. En particulier, la commune, qui était propriétaire de la parcelle mais également un des principaux acteurs de la mise en oeuvre, puis de la gestion du quartier des Vergers, avait rendu un préavis favorable. Le département ayant suivi l'avis des spécialistes consultés, le tribunal devait ainsi faire preuve de retenue dans son examen.

Le projet était conforme au PLQ. Le quartier des Vergers était en effet un écoquartier destiné à se voir approprier par ses habitants. La volonté des autorités était donc de permettre aux espaces publics d'être aussi flexibles et malléables que possible dans ce but d'appropriation et la création d'un SPP en était l'exemple-même. Le supermarché permettrait non seulement aux habitants de consommer des produits cultivés et transformés dans leur propre quartier, mais il leur donnerait l'occasion de participer eux-mêmes à la distribution de ces produits. Cela signifiait qu'une grande partie des produits effectueraient des trajets extrêmement courts, contribuant à leur fraicheur et à une diminution de leur empreinte écologique due aux transports, mais également que les consommateurs savaient ce qu'ils consommaient, les produits étant cultivés à immédiate proximité de leurs habitations. La présence du supermarché au coeur du quartier, additionnée au fait que les clients-coopérateurs y travailleraient quelques heures par mois, ne pouvait que favoriser les échanges, la mixité et les rencontres entre habitants du quartier. Le modèle de SPP était également un moyen d'obtenir des prix meilleur marché que dans la grande distribution et de rémunérer correctement les paysans. Ces éléments répondaient en tous points aux critères d'un écoquartier, à savoir combiner des objectifs de performance énergétique, de mobilité, de mixité sociale et d'économie sociale et solidaire. Ils répondaient donc bel et bien à des intérêts publics et aux intérêts des habitants. En outre, ce projet avait toujours été présent dans les discussions au sujet du quartier des Vergers et de sa mise en oeuvre, de sorte que sa concrétisation n'était que l'aboutissement d'un projet avalisé par tous les acteurs concernés. La marge de manoeuvre laissée dans l'aménagement des espaces publics avait permis à la commune et aux acteurs impliqués dans le projet de définir l'emplacement approprié pour cette installation. Il ne s'agissait donc pas de « retirer » un espace public à la jouissance collective, mais plutôt de l'améliorer, de le valoriser et d'en faire un espace améliorant la vie du quartier. De plus, cette construction n'était autorisée qu'à titre provisoire, un bilan devant être effectué une fois la période d'autorisation écoulée avec, éventuellement à la clé, une modification du PLQ afin de pérenniser le supermarché. La flexibilité dans l'aménagement public permettrait, si le résultat n'était pas concluant, de supprimer cet aménagement et de réfléchir à une autre manière de mettre en valeur l'Esplanade des Récréations afin qu'elle profite au mieux aux habitants du quartier.

Le quartier des Vergers disposait d'autres espaces de jeux, existants ou à l'étude. En particulier, une zone de jeu ayant fait l'objet d'une démarche participative terminée figurait sur le plan à quelques dizaines de mètres de l'Esplanade des Récréations et une zone de jeu sur laquelle la réflexion était à venir était située à quelques mètres seulement. De même, le quartier disposait d'un grand nombre d'espaces libres par rapport à la plupart des quartiers urbanisés du canton et avec l'aménagement provisoire de l'Esplanade des Récréations, le quartier conserverait ce genre d'espace en nombre largement suffisant. L'Esplanade des Récréations ne constituait ainsi pas le seul espace libre du quartier.

Le SPP n'empêcherait pas les activités récréatives et les rencontres, ni l'organisation d'événements de quartier. Au contraire, il les favoriserait et les alimenterait. En outre, le bâtiment projeté n'occuperait pas la totalité de l'esplanade, de sorte que l'organisation d'événements sur cette dernière n'en serait aucunement prétéritée.

La zone en question était interdite aux véhicules ; les véhicules d'entretien et de livraison n'y avaient pas accès ou uniquement de manière très limitée. Le SPP ne ferait pas augmenter ce faible trafic ou alors de manière peu significative, étant rappelé qu'il s'approvisionnerait en grande partie chez les producteurs et commerces du quartier, de sorte que le trafic des livraisons ne serait pas ou que peu impacté. Ainsi, la sécurité des piétons ne serait pas mise en danger.

Le futur SPP serait dix fois plus grand que la Mini-Fève. Or, aucune arcade n'était disponible dans le quartier pour un tel magasin. Le facteur d'échelle était essentiel, une taille trop petite ne permettant pas de couvrir une gamme suffisamment grande de produits pour répondre aux besoins quotidiens de la majorité des habitants. La Moyenne-Fève ne répondait pas non plus à cette exigence. Par ailleurs, le SPP s'inscrivait dans un projet alimentaire de quartier dans lequel il assurait l'écoulement des produits en partie par le biais de la Coopérative agricole de la ferme du quartier des Vergers dont l'équipe s'installerait dans la ferme municipale de la Planche en cours de réhabilitation. La Mini-Fève ne pourrait assurer cette tâche à moyen terme au vu de sa trop petite taille.

Contrairement à ce que sous-entendaient les recourants, le projet était destiné à l'ensemble du quartier, voire au-delà, et profiterait à tous les habitants, sans que certains d'entre eux ne puissent en jouir plus que d'autres. La possibilité de devenir membre serait en outre ouverte à tous.

Les produits qu'offrait le concessionnaire Migros actuellement présent sur le site n'étaient pas les mêmes que ceux proposés par le SPP (provenance et qualité des produits, filière de production, objectifs sociaux et écologiques du SPP qui tranchaient avec le seul objectif de profit des grands distributeurs). La comparaison n'était ainsi pas possible.

Le projet de SPP comprenait plusieurs chambres froides pour le stockage de denrées alimentaires. Ces installations frigorifiques dégageaient de la chaleur, laquelle était récupérée afin de chauffer le bâtiment et l'eau chaude sanitaire. Par ailleurs, une grande partie de l'électricité utilisée était produite in situ par les panneaux photovoltaïques prévus en toiture. Ainsi, l'impact écologique du SPP serait moindre et n'impacterait que de manière limitée la consommation du quartier. D'un point de vue global, la présence du SPP, dont l'un des buts principaux était de limiter les impacts environnementaux et sociétaux négatifs, serait ainsi plus bénéfique à l'écoquartier que consommatrice d'énergie.

Les intimées ont notamment produit trois plans établis par la commune concernant l'accès et la gestion des espaces publics du quartier des Vergers, soit le plan d'accès des véhicules d'entretien (quotidien), le plan d'accès pour les livraisons (classique) et un plan guide des espaces publics.

23.         À la même date, le département a transmis son dossier, accompagné de ses observations. Il a conclu au rejet du recours, s'en rapportant à l'appréciation du tribunal quant à sa recevabilité.

S'il ne pouvait être contesté que le PLQ ne prévoyait pas l'édification du pavillon litigieux, il était justifié de l'autoriser, dès lors qu'il répondait à un intérêt général évident. Comme l'avait à juste titre retenu l'office de l'urbanisme, instance compétente en la matière, ce projet visait en effet à offrir une certaine visibilité à l'agriculture locale, tout en permettant de préserver au mieux l'environnement. L'emplacement de ce nouveau point de vente apparaissait être justifié par la présence à proximité des ateliers des artisans concernés et permettrait également de contribuer à l'animation de cette esplanade. Au vu de la superficie de cette parcelle, on voyait d'ailleurs mal en quoi les autres activités auxquelles les recourants faisaient référence seraient impactées, surtout que ce projet était limité à une durée provisoire de cinq ans et que la commune avait exigé qu'à cette issue, la remise en état se fasse aux frais de la requérante. Cette solution avait été préconisée, parce qu'il n'y avait plus aucune surface commerciale - suffisamment grande pour pouvoir accueillir les locaux de stockage et de vente - de disponible dans le quartier pour permettre l'installation du SPP. L'épicerie existante - qui avait démontré l'engouement des habitants du quartier pour ce genre de commerce - était trop petite pour en permettre son développement, raison pour laquelle il était proposé de créer un nouveau bâtiment sur cette esplanade. Le cadre de vie du quartier ne devrait en rien être impacté, puisqu'il ne serait pas possible d'accéder à ce pavillon en véhicules. Il suffisait pour s'en convaincre de lire les plans visés ne varietur, lesquels ne mettaient pas en évidence la création de nouvelles voies de communication, étant relevé que le DGAN s'était prononcé en faveur de ce projet sans émettre aucune réserve à ce sujet.

S'agissant de l'aspect écologique du projet, l'OCAN avait préavisé favorablement cette demande aux conditions ordinaires imposées par la loi, sans faire aucune allusion au réseau thermique existant dans ce quartier. Les recourants ne démontraient d'ailleurs pas en quoi l'autorisation de construire délivrée serait contraire aux dispositions légales applicables, voire au PLQ concerné, sans oublier que les installations de production de chaleur dont la puissance était - comme en l'espèce - inférieure ou égale à 70 kW n'étaient pas soumises à autorisation de construire.

24.         Par courrier du 12 octobre 2020, les intimées ont notamment produit une pétition munie de plus de trois-cent signatures en soutien à l'installation du SPP sur l'Esplanade des Récréations.

25.         Par courrier du 19 octobre 2020, les recourants ont demandé au tribunal d'écarter cette pièce de la procédure, dès lors qu'elle avait été déposée hors de tout délai imparti pour ce faire.

26.         Les recourants n'ont pas répliqué dans le délai, prolongé à leur demande, qui leur a été imparti.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l'espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La recevabilité du recours suppose encore que son auteur dispose de la qualité pour recourir.

4.             À teneur de l'art. 60 let. b LPA, toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée est titulaire de la qualité pour recourir.

Cette notion de l'intérêt digne de protection est identique à celle qui a été développée par le Tribunal fédéral sur la base de l'art. 103 let. a de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 et qui était, jusqu'à son abrogation le 1er janvier 2007, applicable aux juridictions administratives des cantons, conformément à l'art. 98a de la même loi (ATA/399/2009 du 25 août 2009; ATA/207/2009 du 28 avril 2009 et les arrêts cités). Elle correspond aux critères exposés à l'art. 89 al. 1 let. c de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005, en vigueur depuis le 1er janvier 2007 (LTF - RS 173.110) que les cantons sont tenus de respecter, en application de la règle d'unité de la procédure qui figure à l'art. 111 al. 1 LTF (arrêts du Tribunal fédéral 1C_152/2012 du 21 mai 2012 consid. 2.1 ; 1C_76/2007 du 20 juin 2007 consid. 3;  1C_69/2007 du 11 juin 2007 consid. 2.2 ; Message du Conseil fédéral concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 pp. 4126 ss et 4146 ss). Selon l'art. 89 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué (let. b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c).

L'intérêt digne de protection implique que le recourant soit touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés, répondant ainsi à l'exigence d'être particulièrement atteint par la décision. L'intérêt invoqué, qui peut être un intérêt de fait, doit se trouver dans un rapport étroit, spécial et digne d'être pris en considération avec l'objet de la contestation (arrêts du Tribunal fédéral 1C_56/2015 consid. 3.1 ; 1C_152/2012 consid. 2.1 ; ATA/1218/2015 du 10 novembre 2015 ; François BELLANGER/Thierry TANQUEREL ; Le contention administratif ; éd. 2013, pp. 115-116). Le lien de connexité est clair lorsque le recourant est l'un des destinataires de la décision. Si le recourant est un tiers, il devra démontrer l'existence d'une communauté de fait entre ses intérêts et ceux du destinataire. Par exemple, le voisin d'un fonds pourra recourir si la décision concernant ce fonds lui cause un préjudice réel, car il est suffisamment proche de celui-ci pour risquer de subir les nuisances alléguées (François BELLANGER/Thierry TANQUEREL ; op. cit., pp. 115-116).

5.             En ce qui concerne les voisins d'une construction ou d'une installation, il résulte de la jurisprudence que seuls ceux dont les intérêts sont lésés de façon directe et spéciale possèdent l'intérêt particulier requis par la loi (ATF 121 II 174 ; ATA/101/2006 du 7 mars 2006, consid. 4b). Cette lésion directe et spéciale suppose l'existence d'une communauté de fait entre les intérêts du destinataire de la décision et ceux des tiers. Les voisins peuvent ainsi recourir en invoquant des règles qui ne leur donnent aucun droit et qui ne sont pas directement destinées à protéger leurs intérêts (ATF 110 Ib 400 consid. 1b ; ATA/52/2007 du 6 février 2007 et réf. cit.).

Ces conditions sont en principe considérées comme remplies lorsque le recours émane du propriétaire d'un terrain directement voisin de la construction ou de l'installation litigieuse. Elles peuvent aussi être réalisées en l'absence de voisinage direct, quand une distance relativement faible sépare l'immeuble des recourants de l'installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b). La qualité pour recourir a ainsi été admise pour des distances variant entre 25 et 150 m. (ATA/793/2005 du 22 novembre 2005, consid. 2c et la jurisprudence citée).

Le critère de la distance n'est cependant pas pertinent à lui seul, car la détermination de la qualité pour recourir nécessite une appréciation de l'ensemble des circonstances (cf. arrêt du Tribunal fédéral du 8 avril 1997, RDAF 1997 I, p. 242, consid. 3a). La proximité avec l'objet du litige ne suffit ainsi pas à elle seule à conférer au voisin, respectivement au locataire d'un immeuble la qualité pour recourir contre l'octroi d'une autorisation de construire. Celui-ci doit en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de la décision contestée qui permette d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée de manière à exclure l'action populaire ; il doit ainsi invoquer des dispositions du droit public des constructions susceptibles d'avoir une incidence sur sa situation de fait ou de droit (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3 et 2.3 ; 133 II 249 consid. 1.3.1 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_61/2011 du 4 mai 2011, consid. 1). Le Tribunal fédéral considère en effet que le recourant n'est pas libre d'invoquer n'importe quel grief et il ne peut se prévaloir d'un intérêt digne de protection à invoquer des dispositions édictées dans l'intérêt général ou dans l'intérêt de tiers que si elles peuvent avoir une influence sur sa situation de fait ou de droit (ATF 133 II 249 consid. 1.3.2 ; arrêts 1C_64/2007 du 2 juillet 2007 consid. 2 ; 1C_141/2009 du 24 juin 2009 consid. 4.4). La jurisprudence a ainsi souligné que l'intérêt pratique est un élément central pour apprécier la recevabilité des griefs du recourant. Le voisin peut être habilité à se prévaloir de normes qui ne sont pas destinées à le protéger si l'admission de son grief est susceptible de lui procurer un avantage pratique. Un recours dont le seul but est de garantir l'application correcte du droit demeure en revanche irrecevable, parce qu'assimilable à une action populaire (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3 et 2.3 ; arrêt 1C_320/2010 du 9 février 2011 consid. 2.3 et les références citées).

6.             En cas d'atteinte purement idéale ou immatérielle, les conditions pour recourir sont plus strictes que pour les immissions dites matérielles (Laurent PFEIFFER, op. cit., p. 127).

7.             En matière d'autorisation de construire, la jurisprudence du Tribunal fédéral reconnaît la qualité pour recourir aux voisins s'ils invoquent la violation de dispositions du droit des constructions qui tendent non seulement à la sauvegarde des intérêts de la collectivité, mais aussi, voire principalement, à la protection de leurs propres intérêts de voisins (ATF 127 I 44 consid. 2c). Ils doivent en outre se trouver dans le champ de protection des dispositions dont ils allèguent la violation et être touchés par les effets prétendument illicites de la construction litigieuse ou de l'installation litigieuse (ATF 121 I 267 consid. 2 et les arrêts cités). La jurisprudence admet à ce propos que les règles sur les distances aux limites peuvent être considérés comme des règles mixtes tendant à protéger tant l'intérêt public que l'intérêt des voisins (cf. notamment ATF 127 I 44 consid. 2d; 118 Ia 232 consid. 1b ; 117 Ia 18 consid. 3b ; 115 Ib 456 consid. 1e et les arrêts cités). De même, une norme qui a pour effet de limiter la densité et le volume des constructions dans un quartier, comme par exemple un coefficient maximum d'utilisation ou d'occupation du sol peut aussi être considéré comme une règle mixte, au sens précité (ATF 127 I 44 consid. 2d; 117 Ia 18 consid. 3b). La densification des constructions dans une zone déterminée a en effet des incidences immédiates sur l'étendue des espaces verts qui profitent directement ou indirectement à tous, sur la charge de l'équipement générale qui sert aussi aux voisins, sur l'ampleur des nuisances qui en résultent, sur le mode de jouissance des aménagements collectifs du secteur, voire sur l'ensoleillement des immeubles qui se trouvent à proximité (ATF 113 Ia 468 consid. 1b et les arrêts cités).

8.             En l'espèce, le projet autorisé prévoit la construction d'un bâtiment de 550 m2, non prévu par le PLQ, comprenant l'installation d'une pompe à chaleur et la pose de panneaux solaires en toiture. Cette installation doit prendre place sur une zone piétonne aménagée en place publique - soit un espace collectif - située au centre du quartier des Vergers.

Comme cela ressort de la consultation du système d'information du territoire à Genève (SITG), les recourants sont tous domiciliés dans un rayon de moins de 150 m du projet contesté, soit dans les limites maximales de distances pour lesquelles la qualité pour recourir a été admise par la jurisprudence. Cela étant et comme rappelé ci-dessus, la proximité avec l'objet du litige ne suffit pas encore à leur conférer la qualité pour recourir. Si certes le voisin peut exiger l'examen d'un projet de construction à la lumière de toutes les normes juridiques susceptibles d'avoir une incidence sur sa situation de fait ou de droit, est décisif le fait que l'admission du recours pourrait lui procurer un avantage pratique.

En l'occurrence, les recourants font essentiellement valoir que le projet autorisé ne serait pas conforme au PLQ des Vergers. Ils se plaignent en particulier du fait que l'espace concerné par le projet est dédié aux activités récréatives et qu'il ne peut être retiré à la jouissance collective. À leur sens, la densité du quartier ne laisserait pas de place à l'édification de nouvelles structures, ce d'autant lorsqu'elles viennent s'implanter sur la plus grande surface demeurée libre et qui pourrait se prêter à d'autres activités ponctuelles. Ils ne comprennent pas les raisons pour lesquelles ce projet ne vient pas s'implanter dans des locaux existants, relevant qu'un commerce généraliste est déjà installé dans le quartier et qu'il répond à l'ensemble des besoins de la population. Ils se plaignent également du trafic automobile que pourrait générer le projet dans un quartier qui devait en être absolument dépourvu, faisant valoir un risque pour la sécurité des enfants. De leur avis, la plus-value en terme de qualité de vie d'une partie de la population (proximité) ne saurait se faire au détriment de son ensemble. Enfin, ils font valoir que l'installation d'une pompe à chaleur supplémentaire serait contraire au but écologique recherché de cet écoquartier.

Si, pour l'essentiel, les arguments invoqués relèvent de considérations d'ordre général - lesquelles ne sont pas propres à conférer la qualité pour recourir - et/ou de questions d'opportunité - aspects que le tribunal ne revoit pas (art. 61 al. 1 et 2 LPA) -, l'admission des griefs relatifs à la densification du quartier - s'agissant d'une construction non prévue par le PLQ - et aux éventuelles nuisances que le projet pourrait engendrer (trafic et sécurité) est susceptible de procurer aux recourants, tous habitants du quartier, un avantage pratique, soit le maintien de l'espace concerné libre de toute construction. Il convient par conséquent de leur reconnaître la qualité pour agir.

9.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée dans le cas d'espèce.

Il n'en résulte toutefois pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble, puisqu'elle ne peut pas faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/366/2013 du 11 juin 2013 consid. 3a et la référence citée).

10.         Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste ainsi libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur (ATA/1633/2019 du 5 novembre 2019 consid. 6b; ATA/1157/2018 du 30 octobre 2018 et les références citées). Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/873/2018 du 28 août 2018 et les références citées). Néanmoins, lorsque la consultation d'une instance de préavis est imposée par la loi, son préavis a un poids certain dans l'appréciation qu'est amenée à effectuer l'autorité de recours et il convient de ne pas le minimiser (ATA/1633/2019 du 5 novembre 2019 consid. 6b ; ATA/1275/2018du 27 novembre 2018 consid. 11).

11.         Selon une jurisprudence bien établie, les autorités de recours observent une certaine retenue pour éviter de substituer leur propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l'autorité inférieure suive l'avis de celles-ci. Elles se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/843/2019 du 30 avril 2019 consid. 8 et les arrêts cités).

12.         Les recourants vont valoir que le projet litigieux s'écarterait du PLQ, en ce sens que l'Esplanade des Récréations ne pourrait pas accueillir la construction projetée.

Les intimées estiment pour leur part que le projet serait conforme au PLQ, dans la mesure où la politique d'aménagement des espaces publics du quartier laisserait une certaine marge de manoeuvre afin de pouvoir moduler ces derniers pour servir au mieux le quartier. Le projet en cause répondrait en outre à des intérêts publics et à ceux des habitants. Il revêtait par ailleurs un caractère provisoire et n'empêchait pas les activités récréatives et les rencontres, l'Esplanade des Récréations ne constituant pas le seul espace libre du quartier.

Quant au département, il soutient que la dérogation au PLQ serait justifiée, dès lors que le projet répondrait à un intérêt général évident.

13.         En tant que plans d'affectation spéciaux, les PLQ permettent de préciser l'affectation et le régime d'aménagement des terrains compris à l'intérieur d'une ou plusieurs zones (art. 13 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire - LaLAT - L 1 30). Selon une jurisprudence constante, ils définissent de manière aussi précise et complète que possible tous les aspects contenus à l'intérieur du périmètre qu'ils fixent (ATA/315/2015 du 31 mars 2015 consid. 5b ; ATA/463/2011 du 26 juillet 2011 consid. 6c ; ATA/505/2007 du 9 octobre 2007 consid. 4d ; ATA/618/2005 du 20 septembre 2005 ; ATA/684/2002 du 12 novembre 2002).

14.         À teneur de l'art. 3 al. 1 LGZD, les PLQ prévoient notamment l'implantation à l'intérieur d'une aire d'implantation d'une surface supérieure d'au plus le double de celle d'implantation, le gabarit et la destination des bâtiments à construire (let. a), les espaces libres, privés ou publics, notamment les places, promenades, espaces vertes et places de jeux pour enfants (let. b), les terrains réservés aux équipements publics (let. c), la végétation à sauvegarder ou à créer (let. d), un concept énergétique territorial (let. f) ; un tableau et schéma de répartition et localisation des droits à bâtir (let. g).

15.         En vertu de l'art. 22 al. 2 LAT, l'autorisation de construire est délivrée si la construction ou l'installation est « conforme à l'affectation de la zone » (let. a) et si le terrain est équipé (let. b). Le droit fédéral et le droit cantonal peuvent poser d'autres conditions (art. 22 al. 3 LAT).

16.         Conformément à l'art. 3 al. 5 LGZD, les projets de construction établis selon les normes d'une zone de développement doivent être conformes aux PLQ adoptés en application de l'art. 2 LGZD. Toutefois, lors du contrôle de conformité des requêtes en autorisation de construire avec le PLQ, le département compétent peut admettre, ou même prescrire s'agissant du nombre de places de parcage pour autant que ce nombre ne varie pas de plus de 10 %, que le projet s'écarte du plan, pour autant que l'IUS et l'ID soient respectés et, dans la mesure où la mise au point technique du dossier ou un autre motif d'intérêt général, notamment la construction de logements supplémentaires, le justifie. Il en va de même pour la réalisation des éléments d'équipement de base visés à l'al. 3 let. c LGZD.

Selon l'art. 3 al. 6 LGZD, sont réputés conformes au PLQ au sens de l'al. 5 les projets de construction prévoyant des implantations différentes de bâtiments, places extérieures ou garages souterrains à construire, mais respectant les aires d'implantation visées à l'al. 1, let. a et e, ou prévoyant des accès aux places de parcage et aux garages souterrains différents de ceux pouvant figurer sur le plan mais situées dans les secteurs d'accès aux places de parcage et aux garages souterrains. Il en va de même des modifications des espaces libres jouxtant l'implantation des bâtiments et compris à l'intérieur de l'aire d'implantation.

D'après l'art. 3 al. 7 LGZD, est réputée de peu d'importance et constitutive d'un motif d'intérêt général ou technique au sens de l'al. 5, justifiant que le projet de construction s'écarte d'un PLQ, la diminution du nombre de places de parcage pour tenir compte d'écarts des projets de construction par rapport au plan ou d'éventuelles modifications du règlement relatif aux places de stationnement sur fonds privés du 16 décembre 2015, en particulier des ratios de stationnement en matière de logements d'utilité publique, survenues postérieurement à l'adoption de ce plan.

17.         L'art. 3 al. 5 phr. 2 LGZD a fait l'objet de plusieurs modifications législatives, en particulier la suppression de l'adverbe « légèrement » après le verbe « s'écarte ».

Avant cette modification, entrée en vigueur le 29 mai 2004 et découlant du PL n° 8'920, ladite disposition, alors ancrée à l'art. 3 al. 4 aLGZD, avait la teneur suivante : « Les projets de construction établis selon les normes d'une zone de développement doivent être conformes aux PLQ adoptés en application de l'art. 2. Toutefois, lors du contrôle de conformité des requêtes en autorisation de construire avec le PLQ, le département peut admettre que le projet s'écarte légèrement du plan dans la mesure où la mise au point technique du dossier ou un autre motif d'intérêt général le justifie. Il en va de même pour la réalisation des éléments d'équipement de base visés à l'al. 2, let. c ». Cette teneur remontait à l'adoption du - alors - nouvel art. 3 LGZD, entré en vigueur le 26 novembre 1987.

À la suite de cette modification législative supprimant l'adverbe « légèrement » de l'ancien art. 3 al. 4 aLGZD, l'ancien Tribunal administratif - dont la jurisprudence est reprise par la chambre de céans - a jugé que cela ne modifiait pas fondamentalement la marge d'appréciation laissée au département, précisant que l'ancien art. 3 al. 4 aLGZD, dans sa teneur entrée en vigueur le 29 mai 2004, devait s'interpréter de façon à ne pas vider le PLQ de sa substance. En acceptant par le biais d'une autorisation de construire une modification importante du PLQ, la procédure d'adoption des plans d'affectation, telle que prévue par le droit fédéral de l'aménagement du territoire, ne serait pas respectée. En conséquence, seules des modifications peu importantes, remplissant en outre les autres conditions prévues dans ladite teneur de l'ancien art. 3 al. 4 aLGZD, pouvaient être autorisées, ce qui correspondait d'ailleurs à la volonté du législateur (ATA/315/2015 du 31 mars 2015 consid. 5d ; ATA/39/2014 du 21 janvier 2014 consid. 9a ; ATA/463/2011 du 26 juillet 2011 consid. 6b ; ATA/505/2007 du 9 octobre 2007 consid. 7c).

Selon la jurisprudence antérieure au 29 mai 2004, le déplacement d'un bâtiment d'un mètre correspondait à une telle modification mineure (ATA M. du 12 janvier 1993), ainsi que la création d'un parking souterrain en raison de l'intérêt public prépondérant à assurer une circulation fluide et offrir aux habitants des immeubles concernés la possibilité de se parquer (ATA DÉPARTEMENTP du 3 octobre 1990). Une emprise supplémentaire de 100 m2 de parking souterrain n'a pas été considérée comme une modification mineure, mais comme un changement admissible (ATA/559/2000 du 14 septembre 2000). L'agrandissement de 159 m2 de la surface d'un attique a été considéré comme une dérogation mineure (ATA/298/2001 du 8 mai 2001).

Après la suppression de l'adverbe « légèrement » de la disposition correspondant à l'actuel art. 3 al. 5 LGZD, la chambre administrative a considéré que constituaient des modifications mineures, notamment, le changement d'implantation d'un parking souterrain, ainsi que le changement d'accès en résultant (ATA/463/2011 du 26 juillet 2011), la création d'un étage supplémentaire comportant deux logements et induisant un dépassement du gabarit prévu par le PLQ de 2,70 dans le cadre de la réalisation d'une construction à haut standard énergétique (ATA/583/2010 du 31 août 2010), un écart de SBP de 3 % qualifié de peu important compte tenu de la SBP totale du projet en cause (ATA/505/2007 du 9 octobre 2007), ce dernier arrêt soulignant que la mesure technique des SBP revêtait un caractère imprécis, l'expérience ayant montré que des différences de quelques pour-cent n'étaient pas inhabituelles en raison de la complexité des mesures. Un projet comportant un attique de 51,50 m2 affecté à une cuisine, un séjour et une véranda non chauffée et n'excédant pas les 10 % de SBP supplémentaires autorisés en application du bonus Minergie a été considéré comme une modification mineure du PLQ (ATA/55/2012 du 24 janvier 2012). Dans un arrêt ultérieur (ATA/315/2015 du 31 mars 2015), confirmé par le Tribunal fédéral (arrêt 1C_249/2015 du 15 avril 2016), la chambre administrative a considéré comme mineures les modifications apportées au PLQ et admises par le département, à savoir le déplacement de cinq places de parc, la transformation de six logements traversants en non traversants, la création de rez-de-chaussée « morts » entraînant le rehaussement de 1,40 m des bâtiments - sans toutefois que ceux-ci ne dépassent l'altitude maximale prévue par le plan - et enfin, le changement de place de la conduite de désenfumage.

En revanche, n'ont pas été admises comme telles l'affectation du rez-de-chaussée à du logement, en lieu et place d'activités administratives ou commerciales et la privatisation d'un jardin alors que le PLQ le destinait au public (ATA/705/2012 du 16 octobre 2012), une augmentation de 40 % des SBP dans le cas d'une construction de gabarit R + 7 au lieu de R + 5 prévu par le PLQ (ATA/39/2014 du 21 janvier 2014) ou encore une emprise supplémentaire de 100 m2 de parking souterrain. Cette dernière modification a en revanche été considérée comme un changement admissible en l'espèce vu les circonstances particulières du cas (ATA/559/2000 du 14 septembre 2000). Dans un arrêt plus récent (ATA/1461/2017 du 31 octobre 2017), la chambre administrative a confirmé l'annulation de l'autorisation de construire des logements temporaires destinés à l'accueil de migrants sur la commune d'Onex, car cette autorisation renfermait un projet spatial tout à fait distinct de celui contenu dans le PLQ existant (consid. 4), de sorte que les divergences entre celui-ci et ledit projet ne pouvaient être qualifiées de mineures au sens de la jurisprudence relative à l'art. 3 al. 5 LGZD.

18.         Pour déterminer si l'on est en présence d'une dérogation mineure, il sera rappelé qu'une modification ne saurait être appréciée uniquement pour elle-même, indépendamment du contexte dans lequel elle s'inscrit. En effet, c'est d'abord l'échelle du PLQ dans son ensemble, et celle des différentes constructions qui y sont prévues, qui donnent la mesure véritable d'une modification (JTAPI/142/2014 du 30 janvier 2014 confirmé par ATA/1017/2014 du 16 décembre 2014).

19.         En l'espèce, il y a lieu de constater que, contrairement à l'avis des intimées, le projet querellé n'est pas, ce que relève le département, conforme au PLQ des Vergers, dans la mesure où ce plan ne prévoit pas d'emprise pour l'implantation du bâtiment litigieux sur la parcelle concernée, définie comme un espace libre au sens de l'art. 3 al. 1 let. b LGZD.

Il ressort en effet des pièces du dossier que l'Esplanade des Récréations, qui traverse dans sa longueur le quartier des Vergers, est une zone piétonne aménagée en place publique. Elle forme une sorte de « couloir » central entre les bâtiments disposés tout autour. Selon le plan du PLQ, aucune construction ni équipement public n'y est prévu, si ce n'est les accès piétons aux parkings souterrains, des stationnements pour vélos et les écopoints. En revanche, il est prévu d'arboriser la zone et d'y aménager plusieurs espaces de jeux. Le descriptif général des travaux des espaces publics précise à cet égard que l'Esplanade des Récréations, outre d'être un important lieu de passage, constitue également un espace de détente, confirmant ainsi la vocation de cet espace à être un lieu de rencontre, de jeu et de détente pour l'ensemble des habitants du quartier. Le tribunal relève à cet égard que s'il est admis que les autorités ont voulu laisser une certaine flexibilité aux habitants dans l'aménagement public de leur quartier, l'implantation d'un bâtiment commercial ne correspond de toute évidence pas à la vocation des espaces libres, qui par définition ne sont pas censés accueillir de bâtiments. Dans le projet des espaces publics, seuls des usages de type récréatifs (se promener, jouer, se reposer, rencontrer, faire du vélo, pratiquer des activités sportives, de jardinage et agricoles, etc.) sont d'ailleurs envisagés pour la zone concernée.

Il en résulte que le projet querellé, malgré qu'il soit issu d'une démarche participative, n'est pas conforme au PLQ en vigueur. Le fait que les préavis des instances spécialisées consultées soient tous favorables ne change rien à ce constat, mais soulève la question de savoir si le département pouvait délivrer l'autorisation litigieuse aux seuls motifs de l'intérêt public du projet et du caractère provisoire de l'autorisation.

20.         En l'occurrence, dans son préavis du 3 février 2020, l'office de l'urbanisme, instance compétente en la matière, a considéré que la réalisation de cet équipement de quartier répondait à un tel intérêt dans la mesure où il favorise une agriculture locale à travers un commerce participatif et solidaire et permet de contribuer à l'animation de l'Esplanade des Récréations.

Comme le relève cette instance, le projet vise en effet à offrir une certaine visibilité à l'agriculture locale, tout en permettant de préserver au mieux l'environnement. Le modèle de SPP, qui tend vers un approvisionnement local et écologiquement responsable, répond ainsi manifestement à un intérêt public.

21.         Reste à examiner l'autre condition posée par l'art. 3 al. 5 LGZD, selon laquelle la modification doit être peu importante.

22.         En l'espèce, comme rappelé supra, le projet prévoit la construction d'un bâtiment commercial de près de 550 m2 sur un espace public dédié, selon la volonté exprimée dans le plan et précisée dans le projet des espaces publics, à des activités récréatives de détente et de rencontre. Une telle dérogation au PLQ ne peut être considérée comme mineure. En effet, le projet querellé a un impact incontestable sur l'image urbanistique du quartier retenu en modifiant l'affectation de la zone concernée (espace libre vs espace constructible). Il intervient également dans le choix d'un équilibre entre activités, logements et équipements publics, clairement défini dans le plan et qui touche la vie du quartier et de ses habitants.

C'est le lieu de rappeler qu'environ 10'000 m2 de surface ont été prévues dans les rez-de-chaussée des immeubles pour accueillir les activités commerciales, sociales et culturelles du quartier. Il ressort par ailleurs du projet des espaces publics qu'il a également été prévu de réserver, au pied des façades des bâtiments concernés, de larges espaces pour permettre le prolongement des activités implantées au rez-de chaussée des immeubles (terrasses de café, jeux d'enfants en relation avec la crèche, etc.). C'est dire que le quartier a été largement pourvu de surfaces dédiées permettant d'accueillir le futur SPP, lequel devait d'ailleurs initialement prendre place dans l'une des arcades du quartier. Le fait que les locaux aient été réattribués à un commerce généraliste (Migros) et qu'il ne resterait plus d'arcade suffisamment grande dans le quartier pour permettre le développement du SPP ne saurait à cet égard justifier la construction de surfaces commerciales supplémentaires - hors du périmètre d'implantation des constructions - en dérogation au PLQ, ce d'autant que le quartier est aujourd'hui déjà pourvu de commerces de détails.

De plus, ce projet est également de nature à occasionner des nuisances, notamment en terme de trafic (qu'il soit motorisé ou non) et de sécurité, dès lors qu'il est implanté au centre d'une zone piétonne.

23.         Il découle de ce qui précède que la dérogation au PLQ consacrée par le projet ne peut être acceptée comme étant constitutive d'une modification mineure au sens de l'art. 3 al. 5 LGZD et de la jurisprudence susmentionnée.

24.         Les parties intimées se prévalent encore du caractère provisoire du projet pour justifier la dérogation au PLQ.

25.         S'agissant de la notion de "provisoire", le Tribunal administratif, devenu depuis lors la chambre adminsitrative, a notamment considéré qu'un projet pouvait être qualifié de « provisoire » pour autant que cumulativement, la construction projetée ait un caractère urgent, qu'elle puisse être enlevée facilement et qu'un terme à son existence soit prévu, précisant qu'un terme de trois ans dès l'échéance des travaux était adéquat (ATA/367/2003 du 13 mai 2003). Dans une autre affaire plus récente, le tribunal a considéré qu'une autorisation de construire des logements modulaires d'urgence temporaires pour migrants délivrée pour une durée de dix ans était difficilement compatible avec la notion de provisoire (JTAPI/368/2017 du 7 avril 2017, confirmé par l'ATA/1461/2017 du 31 octobre 2017).

26.         En l'occurrence, si effectivement l'autorisation de construire est limitée à une durée provisoire de cinq ans (au lieu des dix initialement demandés et acceptés par le Conseil d'État), l'aménagement projeté, lui, est prévu pour durer, puisque l'intention des parties concernées est, à terme, de modifier le PLQ afin de pérenniser le SPP si l'expérience est concluante. Dans ces circonstances, l'argument tenant au caractère provisoire du projet n'est pas pertinent.

27.         Au vu des considérations qui précèdent, force est de constater que le département a violé l'art. 3 al. 5 LGZD en octroyant l'autorisation querellée, le processus démocratique qui accompagne l'adoption d'un PLQ et sa modification ayant été contourné.

28.         Partant, le recours sera admis et l'autorisation annulée, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs, dans la mesure de leur recevabilité, avancés par les recourants.

29.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement genevois sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative (RFPA - E 5 10.03), les intimées, qui succombent, seront condamnées conjointement et solidairement au paiement d'un émolument s'élevant à CHF 900.-.

L'avance de frais de CHF 900.- effectuée par les recourants lors du dépôt du recours leur sera restituée.

30.         Les recourants n'étant pas représentés dans le cadre de la présente procédure, il ne sera pas alloué de dépens.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 22 juillet 2020 par Mesdames Maria Margarida et Lina Maria PIÇARRA TEIXEIRA, Monsieur Olivier MARGUET, Madame Mirella et Monsieur Salvatore CARROZZO CARLUCCIO, Madame Sonia et Monsieur Roland MCCOMISH, Madame Sandra et Monsieur Zahir OUENNOUGHI, Monsieur Marcos LORENZO, Monsieur Manuel Agostinho OLIVEIRA PEREIRA, Madame Letizia LUONGO et Madame Audrey HELFENSTEIN contre la décision du département du territoire du 23 juin 2020 ;

2.             l'admet ;

3.             annule l'autorisation DD 113'218 du 23 juin 2020 ;

4.             met à la charge de la COMMUNE DE MEYRIN et de FONDATION QUALITÉ DE VIE DE QUARTIER, prises conjointement et solidairement, un émolument de CHF 900.- ;

5.             ordonne la restitution aux recourants de l'avance de frais ;

6.             dit qu'il n'est pas alloué de dépens ;

7.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST, présidente, Saskia RICHARDET VOLPI et Diane SCHASCA, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

Le greffier