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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4261/2022

ATA/1333/2023 du 12.12.2023 sur JTAPI/688/2023 ( LDTR ) , ADMIS

Recours TF déposé le 30.01.2024, 1C_70/2024, A 322950/1
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4261/2022-LDTR ATA/1333/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 décembre 2023

 

dans la cause

 

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC recourant

contre

A______, B______ et C______

représentés par E______ intimés

_________



Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 juin 2023 (JTAPI/688/2023)


EN FAIT

A. a. A______, B______ et C______ (ci-après : les propriétaires) sont copropriétaires de l’immeuble sis ______, rue D______, dans la commune de Genève-Petit-Saconnex (ci-après : l’immeuble) comprenant 72 appartements, soit 158.5 pièces. L’immeuble a été construit dans les années 1950 et est assuré, valeur 2016, pour CHF 12'975'000.-.

L’immeuble de logements est géré par la régie E______ SA (ci‑après : la régie) depuis le 1er juin 2015.

b. L’appartement de deux pièces du 5e étage (ci-après : l’appartement), de 39,9 m2, a été loué du 16 octobre 1992 au 31 janvier 2016 à F______, pour un loyer de CHF 9'600.-/an. Pendant ce bail, les travaux d’entretien suivants ont été effectués (ceux datant d’avant 2004 n’ayant pas pu être établis) :

- en juillet 2004, des travaux de peinture de l’appartement : CHF 1'000.- ;

- en juillet 2005, le remplacement de la batterie de cuisine : CHF 534.- ;

- en octobre 2010, la mise en conformité des installations électriques : CHF 314.- ;

- en octobre 2010, la peinture du hall, de la salle de bain et de la cuisine : CHF 990.- ;

- en août 2014, le remplacement du robinet flotteur et du joint de cloche du WC : CHF 269.-.

c. En février 2016, à la sortie de l’appartement de F______, des travaux pour un montant total de CHF 17'611.10 ont été réalisés :

- Peinture dans tout l’appartement : CHF 7'000.- ;

- Ponçage et imprégnation des parquets et seuils : CHF 1'500.- ;

- Réglage des menuiseries (charnières des portes de communication, des fenêtres, des armoires) : CHF 1'617.- ;

- Réfection des installations électriques (remplacement des plombs par des disjoncteurs, remplacement des prises et interrupteurs par des installations aux normes, remplacement des fils de 1 mm par des fils de 1.6 mm) : CHF 5'474.10 ;

- Remplacement de la vanne thermostatique du radiateur : CHF 502.- ;

- Ré-émaillage de la baignoire et remplacement du lavabo : CHF 1'518.-.

d. Dès le 1er mars 2016, l’appartement a été reloué à un nouveau locataire pour un loyer de CHF 14'700.-/an.

e. La moyenne des loyers dans un immeuble semblable était arrêtée à CHF 9'612.- par an pour un deux pièces dans le quartier Grand-Pré-Vermont selon les statistiques genevoises de mai 2016.

B. a. Par courrier du 9 juin 2021, la régie a informé l’office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF) vouloir équiper l’appartement avec un réfrigérateur, une cuisinière, une hotte et un meuble-lavabo dans la salle-de-bains pour un montant total de CH 4'222.- (appareils et pose TTC compris). Les propriétaires avaient pour objectif d’améliorer l’habitabilité de l’immeuble, construit dans les années 1950, et avaient déjà rénové et transformé douze appartements sur les 72 que comptait l’immeuble selon la procédure APA idoine. Il était prévu de continuer dans ce sens pour les logements qui allaient se libérer dans les années à venir et qui nécessitaient d’importants travaux. Les transformations représentaient des frais très importants, de plus de CHF 100'000.- par logement, ce qui nécessitait de les étaler sur plusieurs années. Pour des questions budgétaires, les propriétaires souhaitaient toutefois uniquement équiper l’appartement précité, récemment libéré et encore en bon état, en attendant de pouvoir le rénover. Les appareils étant mobiles, ils seraient enlevés lors du départ des prochains locataires.

Le loyer des locataires sortants était de CHF 15'300.-/an et donc exclu du blocage de loyer.

Elle demandait la confirmation que les appareils pouvaient être installés dans le logement précité sans demander d’autorisation APA.

b. Sans nouvelle, la régie a relancé l’OCLPF par courrier du 10 août 2021, indiquant que sans réponse de sa part d’ici au 25 août 2021, elle partirait du principe qu’il n’était pas nécessaire de déposer une demande d’APA et installerait les appareils dans l’appartement.

c. Le 25 janvier 2022, un représentant de l’OCLPF s’est rendu sur place et a constaté que l’appartement avait fait l’objet de travaux ces dernières années.

d. Par courrier du 4 avril 2022, l’OCLPF a imparti à la régie un délai au 4 mai 2022 pour faire valoir ses observations et explications éventuelles concernant les travaux exécutés dans ce logement ainsi que l’évolution nominative et financière de l’état locatif, relevant que cette situation était susceptible de constituer une infraction à la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20). À cet égard, toutes mesures et/ou sanction justifiées par la situation demeuraient, en l’état, expressément réservées.

e. Par courrier du 22 avril 2022, la régie a détaillé les travaux faits depuis 2015.

f. Par décision du 8 juillet 2022 (I/8127), le département du territoire (ci-après : DT ou le département) a ordonné aux propriétaires de requérir dans un délai de 30 jours une autorisation de construire visant à régulariser la totalité des travaux entrepris sans autorisation dans l’appartement concerné.

Cette décision n’ayant pas fait l’objet d’un recours, elle est entrée en force.

g. Le 14 octobre 2022, la régie a déposé, au nom et pour les compte des propriétaires, une requête en autorisation de construire en procédure accélérée (APA 1______) visant à régulariser les travaux réalisés en 2016.

Elle contestait que les travaux soient soumis à autorisation, s’agissant de pur entretien, sans amélioration de l’appartement. Le montant des travaux était inférieur à celui de CHF 10'000.-/pièce que l’OCLPF et les régies immobilières avaient appliqué pendant des années.

h. Dans le cadre de l’instruction de la requête, l’OCLPF a émis le 2 novembre 2022 un préavis favorable sous condition que le loyer de l’appartement n’excède pas après travaux son niveau actuel soit CHF 9'600.- par an, soit CHF 4'800.- la pièce par an. Ce loyer serait appliqué pour une durée de trois ans à dater de la remise en location après la fin des travaux (condition n° 2).

i. Par décision du 16 novembre 2022, le département a délivré l’autorisation de construire APA 1______ (régularisation infraction I/8127 – rénovation d’un appartement au 5e étage), dont le chiffre 7 renvoyait au préavis de l’OCLPF précité.

j. Par décision du 2 décembre 2022, le département a ordonné aux propriétaires d’établir dans les 30 jours un nouvel avis de fixation du loyer initial respectant la condition n° 2 du préavis LDTR du 2 novembre 2022 et de rembourser dans ce même délai le trop-perçu aux anciens locataires de l’appartement, soit un montant total de CHF 14'950.-. De plus, au vu de l’infraction commise une amende administrative de CHF 3'000.- leur était infligée. Ce montant tenait compte de la gravité tant objective que subjective de l’infraction commise.

k. Par acte du 15 décembre 2022, les propriétaires, représentés par la régie, ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) contre des deux décisions précitées.

Ils ont conclu à ce qu’il soit dit que les travaux effectués en 2016 dans l’appartement n’étaient pas soumis à autorisation LDTR et qu’en conséquence le préavis de l’OCLPF du 2 novembre 2022 bloquant (rétroactivement) le loyer violait la LDTR, à l’annulation de l’autorisation de construire APA 1______ en ce qu’elle bloquait (rétroactivement) le loyer pendant trois ans dès la relocation après travaux et à l’annulation de la décision du 2 décembre 2022.

l. Par jugement du 20 juin 2023, après un double échange d’écritures, le TAPI a admis le recours.

la. L’appartement de deux pièces, faisant partie de la catégorie des logements pour lesquels règne une pénurie, entrait dans le champ d’application de la LDTR.

lb. Après avoir détaillé notamment la jurisprudence, le TAPI a considéré que les travaux réalisés en 2016 dans l’appartement devaient être considérés comme de purs travaux d’entretien, non soumis à autorisation et a annulé l’APA 2______.

La réfection des parquets (ponçage et imprégnation, remplacement des plinthes noircies), le réglage des menuiseries (charnières des portes de communication, des fenêtres et des armoires), le remplacement à l’identique du plan de travail, la réfection des installations électriques (remplacement des plombs par des disjoncteurs, remplacement des prises et interrupteurs par des installations aux normes, remplacement des fils de 1 mm par des fils de 1.6 m) – déjà mises en conformité en 2010 –, le remplacement d’une vanne de radiateur, le ré-émaillage de la baignoire et le remplacement d’un lavabo abîmé faisaient clairement partie des travaux courants d’entretien d’un appartement, lesquels étaient fréquemment réalisés lors d’un changement de locataire. Il en était de même des travaux de peinture, après un bail de 23 ans, qui permettaient un rafraîchissement de l’appartement.

Les travaux réalisés dans la cuisine et la salle de bain en particulier, même s’ils avaient certainement contribué à donner un aspect neuf à ces pièces, devaient également être considérés comme relevant de l’entretien puisqu’ils n’avaient porté que sur la peinture et le remplacement d’éléments abîmés, sans nouvel agencement ou équipement complémentaire.

Par ailleurs, contrairement à ce que soutenait le département, on ne pouvait parler d’une « réfection complète », ayant eu pour effet d’engendrer « un changement de standing, soit à tout le moins une remise à neuf et au goût du jour » de l’appartement. En effet, à l’exception du lavabo et du plan de travail, les menuiseries, les sols et revêtements muraux (carrelage) ainsi qu’une partie des installations sanitaires (baignoire, wc, évier et robinetterie), bien qu’anciens comme le montraient les photographies produites, avaient été conservés.

Ainsi, aucun des travaux réalisés en 2016 n’avait eu pour conséquence d’améliorer le confort ou la qualité du logement ni, a fortiori, d’en modifier le standing : ils avaient simplement servi à maintenir ledit appartement dans un état conforme à de l’habitation et permettre au nouveau locataire d’entrer dans un appartement propre et correctement entretenu.

Quant à la question du coût des travaux, leur montant s’était élevé à un total de CHF 17'611.10, soit CHF 8'805.55 la pièce, ce qui était inférieur au montant retenu par la jurisprudence pour qualifier les travaux de grande ampleur (arrêt du Tribunal fédéral 1C_323/2014 du 10 octobre 2014). Le montant annuel du loyer avait été porté à CHF 14'700.- (ou CHF 1’225.- par mois) après les travaux, ce qui pouvait paraître élevé par rapport au loyer avant travaux de CHF 9'600.- (ou CHF 800.- par mois). Toutefois, il y avait lieu de relever que le locataire, ayant occupé l’appartement précédemment aux travaux entrepris en janvier 2016, s’acquittait du même loyer depuis son entrée dans les locaux en octobre 1992, soit durant plus de 23 ans. Une hausse du loyer pouvait donc tout à fait se justifier sur la base des règles du CO. Le loyer était certes plus élevé que la moyenne des loyers dans un immeuble semblable, arrêté à CHF 9'612.- par an pour un deux pièces dans le quartier Grand-Pré-Vermont selon les statistiques genevoises de mai 2016, mais il ne pouvait être retenu que ce montant ait été justifié par les travaux réalisés, lesquels, comme indiqué précédemment, n’avaient aucunement changé l’affectation qualitative du logement. Par ailleurs, le montant du loyer avant travaux était déjà supérieur au loyer correspondant aux besoins prépondérants de la population (ci-après : BPP).

S’agissant des travaux d’entretien effectués les années précédentes, il ressortait des clauses particulières du bail et de l’avis de fixation de loyer signés le 23 septembre 1992 que l’appartement avait alors entièrement été remis à neuf par l’ancienne bailleresse, laquelle avait notamment entrepris des travaux de peintures (murs et plafonds) et de parquets. Durant le bail, les recourants avaient démontré avoir remplacé la batterie de cuisine en 2005 (CHF 534.20), refait les peintures en 2004 (détails non connus - CHF 1'000.-) et en 2010 (hall, salle de bain et cuisine pour CHF 990.-) et procédé à la mise en conformité des installations électriques en 2010 (CHF 330.60). En 2014, le robinet flotteur et le joint de cloche avaient été remplacés suite à une fuite sur l’installation de wc (CHF 269.50). La comparaison des photographies de l’appartement en 2016 et en 2022 montrait que le wc, ainsi que le carrelage au sol de la salle de bain avaient également été changés dans l’intervalle. Il ne pouvait donc être retenu, comme le faisait le département, que cet appartement n’avait pas été entretenu.

Dès lors que les travaux entrepris en 2016 n’étaient pas soumis à autorisation, le loyer n’avait pas à être bloqué après travaux. Partant, la décision I/8127 qui ordonnait aux recourants de rétablir une situation conforme au droit en remboursant un trop-perçu de loyer aux anciens locataires et en établissant un nouvel avis de fixation de loyer initial conformément à la condition n° 2 du préavis de l’OCLPF du 2 novembre 2022 repris au chiffre 7 de l’autorisation APA 1______, qui était annulée par le jugement, devait être annulée.

Il en allait de même de l’amende de CHF 3'000.- infligée aux recourants pour ne pas avoir requis une autorisation de construire avant de procéder à la réalisation desdits travaux.

C. a. Par acte du 23 août 2023, le DT a interjeté recours devant la chambre administrative de la cour de justice. Il a conclu à l’annulation du jugement précité et la confirmation de la décision du 16 novembre 2022 (APA 1______) et 2 décembre 2022 (I8127).

Le TAPI avait ignoré le critère du cumul des travaux, plus précisément leur accumulation et les circonstances dans lesquelles ils avaient été réalisés. Il les avait pris séparément, sans intégrer à son analyse deux facteurs importants, à savoir l’incidence sur le loyer ainsi que l’ampleur des travaux effectués. Les loyers avaient été augmentés de 53.13 % suite aux travaux réalisés. Au vu de l’ampleur des travaux, leur incidence directe sur le montant du loyer ne répondait plus aux BPP. La chambre de céans avait déjà écarté, au motif que cela relevait de règles de droit privé, l’argument selon lequel la hausse de loyer serait justifiée par l’occupation des locaux pendant 23 ans. Les seules factures relatives aux travaux effectués entre 1993 et 2016 n’étaient pas suffisantes pour admettre que l’appartement avait été régulièrement entretenu. Les travaux litigieux intervenaient après une absence d’entretien de plusieurs années et démontraient clairement une réfection complète du logement, susceptible d’engendrer un changement de standing, par sa remise à neuf et au goût du jour.

L’incidence des travaux sur le standing de l’appartement était évidente. Ils avaient porté sur toutes les pièces de celui-ci. La répercussion des coûts des travaux sur les locataires démontrait également qu’ils avaient eu un impact sur l’affectation qualitative de l’appartement et avaient amélioré son confort puisque les seuls travaux d’entretien n’étaient pas répercutés sur les locataires. Le TAPI avait relevé à juste titre que le loyer a augmenté davantage que la moyenne des autres locations dans un immeuble semblable.

Les propriétaires avaient procédé à des travaux sans avoir au préalable requis et obtenu une autorisation de construire, ni même avoir consulté le DT en cas de doute sur la nature des travaux prévus. Bien qu’accompagnés par une régie immobilière, professionnelle de l’immobilier, les propriétaires avaient mis l’autorité devant le fait accompli. L’intérêt public protégé, à savoir le maintien d’une certaine politique en matière de parc locatif, était importante et l’augmentation illicite du loyer avait été faite par cupidité, puisqu’elle avait permis la perception de CHF 14'950.- de loyer en trop.

b. Les propriétaires ont conclu au rejet du recours.

Les travaux litigieux consistaient en de l’entretien et n’étaient pas soumis à autorisation LDTR. Ils subissaient, à l’instar de tous les propriétaires et leur régie dans le canton, des jurisprudences compliquées, faites au cas par cas, qui n’avaient jamais été communiquées aux administrés par l’État au cours des 30 dernières années et qui s’étaient durcies de manière inquiétante depuis quelques années. Appliquer les règles injustement excessives d’aujourd’hui à des travaux effectués il y avait des années violait les principes de la légalité et de la proportionnalité. Il était primordial d’appliquer pour le passé les règles raisonnables qui existaient à l’époque et surtout de continuer à appliquer ces règles raisonnables pour le présent et le futur.

Les arguments d’absence d’informations aux administrés sur la notion de travaux d’entretien soumis à autorisation LDTR, de durcissement des règles d’interprétation des travaux d’entretien depuis 2014, d’application rétroactive des règles jurisprudentielles excessives d’aujourd’hui et d’une juste application de la LDTR dans le présent cas quant à la non soumission des travaux à une autorisation seront repris en détail dans la partie en droit du présent arrêt.

c. Dans sa réplique, le département a persisté dans ses conclusions. Les intimés se limitaient à critiquer les échanges intervenus avec le département dans le cadre de l’instruction, relatifs aux propos accusateurs et menaces proférées par ce dernier. Or cela n’était d’aucune pertinence pour l’issue du litige. Les intimés se concentraient sur l’un ou l’autre des critères énumérés par la jurisprudence, sans procéder à une analyse qui comprendrait la combinaison entre le montant des travaux, leur nature et leur temporalité, de même que leur impact sur les loyers, jugée déterminante par le Tribunal fédéral. Le reproche des intimés de l’absence d’informations aux administrés sur la notion de travaux d’entretien soumis à autorisation par le service LDTR ne pouvait être suivie, le Tribunal fédéral ayant rappelé l’utilisation de notions juridiques indéterminées, donnant une certaine latitude de jugement au juge du fait, justifiée par le besoin de pouvoir évaluer chaque cas d’espèce au regard des circonstances. La jurisprudence de la chambre administrative reconnaissait que le critère du coût par pièce ne constituait pas une règle générale. Le département conservait une marge d’appréciation lui permettant de requérir une demande d’autorisation pour des travaux de moins de CHF 10'000.- la pièce.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le département se plaint d’une violation de l’art. 3 al. 1 let. d et al. 2 LDTR dans la mesure où les travaux litigieux devraient être soumis à autorisation.

2.1 Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée dans le cas d'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).

L'autorité chargée d'appliquer la loi dispose d'un pouvoir d'appréciation lorsque la loi lui laisse une certaine marge de manœuvre. Cette dernière peut notamment découler de la liberté de choix entre plusieurs solutions, ou encore de la latitude dont l'autorité dispose au moment d'interpréter des notions juridiques indéterminées contenues dans la loi. Bien que l'interprétation de notions juridiques indéterminées relève du droit, que le juge revoit en principe librement, un tribunal doit néanmoins restreindre sa cognition lorsqu'il résulte de l'interprétation de la loi que le législateur a voulu, par l'utilisation de telles notions, reconnaître à l'autorité de décision une marge de manœuvre que le juge doit respecter, étant précisé que cette marge de manœuvre ne revient pas à limiter le pouvoir d'examen du juge à l'arbitraire (ATF 140 I 201 consid. 6.1 et les références citées).

2.2 Selon l’art. 1 al. 1 let. b LCI, sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé, modifier même partiellement le volume, l'architecture, la couleur, l'implantation, la distribution ou la destination d'une construction ou d'une installation.

L’art. 3 al. 7 LCI prévoit que le département peut traiter par une procédure accélérée les demandes d’autorisation relatives à des travaux soumis à l’art. 1 notamment s’ils portent sur la modification intérieure d’un bâtiment existant ou ne modifient pas l’aspect général de celui-ci (let. b).

2.3 Selon son art. 1 al. 1, la LDTR a pour but de préserver l’habitat et les conditions de vie existants ainsi que le caractère actuel de l’habitat dans les zones visées à son art. 2.

 

À cet effet, et tout en assurant la protection des locataires et des propriétaires d’appartements, elle prévoit notamment l’encouragement à des travaux d’entretien et de rénovation raisonnables et proportionnés des maisons d’habitation (art. 1 al. 2 let. b LDTR).

Plus spécifiquement, la LDTR vise plusieurs objectifs, notamment améliorer la protection des locataires (MGC 1997 64/X 10562), et conserver sur le marché certains types de logements qui répondent à un besoin en raison de leur prix et de leur conception (ATF 116 Ia 401 consid. 9c).

La réglementation qu'elle met en place est conforme au droit fédéral, à la garantie de la propriété et à la liberté économique, y compris dans la mesure où elle prévoit un contrôle des loyers après transformations (ATF 116 Ia 401 consid. 9c ; 111 Ia 401 consid. 9 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_195/2021 du 28 octobre 2021 consid. 5.1.3).

2.4 Selon l’art. 3 al. 1 let. d LDTR, par transformation, on entend notamment tous les travaux qui ont pour objet la rénovation, c’est-à-dire la remise en état, même partielle, de tout ou partie d’une maison d’habitation, en améliorant le confort existant sans modifier la distribution des logements, sous réserve de l'art. 3 al. 2 LDTR.

Selon cette dernière disposition, par travaux d’entretien, non assujettis à la LDTR, il faut entendre les travaux courants d’entretien faisant partie des frais d’exploitation ordinaires d’une maison d’habitation. Les travaux raisonnables d’entretien régulier ne sont pas considérés comme travaux de transformation, pour autant qu’ils n’engendrent pas une amélioration du confort existant.

Le législateur a précisé que les travaux courants d'entretien sont ceux qui sont déjà couverts par les loyers, ou devraient l’être, une partie du loyer étant précisément censée permettre la constitution d’une réserve pour travaux d’entretien (MGC 1999 9/II 1082).

C’est le département, et non l’administré, qui détermine dans chaque cas si des travaux relèvent de l’entretien ou de la transformation. Si des travaux de pur entretien ne nécessitent pas d’autorisation, il incombe toutefois au propriétaire, en cas de doute, de demander l’avis du département et d’effectuer les démarches nécessaires pour agir en conformité de la loi (ATA/694/2016 du 23 août 2016 consid. 7 ; Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, La LDTR : Démolition, transformation, rénovation, changement d'affectation et aliénation : immeubles de logement et appartements : loi genevoise et panorama des autres lois cantonales, 2014, p. 186).

2.5 Une autorisation est nécessaire pour toute transformation ou rénovation. L'autorisation est accordée notamment pour les travaux de rénovation au sens de l'art. 3 al. 1 let. d LDTR (art. 9 al. 1 let. e LDTR).

Le département accorde l’autorisation si les logements transformés répondent, quant à leur genre, leur loyer ou leur prix, aux besoins prépondérants de la population (art. 9 al. 2 LDTR). Il s'agit d'hypothèses alternatives (Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, op.cit., p. 133).

Par besoins prépondérants de la population, il faut entendre les loyers accessibles à la majorité de la population (art. 9 al. 3 LDTR). Selon l’arrêté relatif à la révision des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population du 24 août 2011, en vigueur jusqu’au 14 janvier 2022 (aArLoyers - L 5 20.05), les loyers correspondant aux besoins prépondérants de la population, fondés sur le revenu brut médian des contribuables personnes physiques 2007, étaient compris entre CHF 2'536.- et CHF 3'405.- la pièce par année. À partir du 14 janvier 2022, ces loyers ont été portés à une fourchette allant de CHF 2'627.- à CHF 3'528.- la pièce par année.

Un logement correspond en principe par son genre ou par son loyer aux besoins prépondérants de la population notamment lorsqu'il entre dans la catégorie des appartements dans lesquels règne la pénurie au sens de l'art. 25 LDTR. Selon l'arrêté déterminant les catégories de logements où sévit la pénurie en vue de l'application des art. 25 à 39 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (ArAppart - L 5 20.03) déterminant au moment des faits, comme selon celui actuellement en vigueur, il y a pénurie dans toutes les catégories d'appartements d'une à sept pièces inclusivement.

2.5.1 Pour opérer la distinction entre travaux d'entretien et travaux de transformation, le raisonnement, admis de manière constante par la chambre administrative, se décline en deux temps. Premièrement, il faut examiner, si, de par leur nature, les travaux en cause relèvent de l'entretien ou, au contraire, consistent en des travaux de rénovation, la jurisprudence de la chambre administrative précisant, sur ce point, que des travaux d'entretien sont susceptibles d'aboutir à une rénovation ou à une transformation soumise à la LDTR lorsque, n'ayant pas été exécutés périodiquement ou par rotation tout au long de l'existence de l'immeuble, ou encore parce qu'ils n'ont pas été exécutés du tout pendant de nombreuses années, leur accumulation, même en tenant compte d'une exécution rationnelle commandant un regroupement, leur confère une incidence propre à engendrer un changement de standing de l'immeuble (travaux différés). Secondement, il convient de s'attacher à l'ampleur et, partant, au coût desdits travaux et à leur répercussion sur le montant du loyer, dès lors qu'il pourrait en résulter un changement d'affectation qualitatif des logements (ATA/651/2022 du 23 juin 2022 consid. 7b ; ATA/422/2020 du 30 avril 2020 consid. 6 et les arrêts cités).

2.5.2 Il ressort des travaux législatifs ayant précédé la modification de l'art. 3 al. 1 let. d et al. 2 LDTR adoptée en 1999, que le Grand Conseil désirait, pour tracer une limite précise entre travaux soumis et non soumis à la loi, que soient pris en compte le coût de ces derniers et leur incidence sur les loyers, comme prévu par la jurisprudence (MGC 1999 9/11 1076). Lors du deuxième débat concernant le projet de modification de la LDTR, de nombreux amendements ont été soumis au Grand Conseil, notamment celui de préciser, à l’art. 3 al. 1 let. d LDTR, que devaient être considérés comme travaux de rénovation ceux dont le coût total engendrait une augmentation de loyer de plus de 20% (MGC 1999 9/1 1211). Cet amendement a été rejeté par 48 non contre 46 oui (MGC 1999 10/11 1212 ; ATA/382/2008 du 29 juillet 2008 consid. 2c et l'arrêt cité).

2.5.3 Selon la jurisprudence de la chambre de céans, lorsque le coût des travaux n'est pas susceptible d'entraîner à lui seul une soumission des travaux à la LDTR, c'est la combinaison de ce montant et de son impact sur les loyers qui est jugée déterminante (ATA/651/2022 précité consid. 7b et l'arrêt cité). La distinction entre travaux d'entretien et travaux de transformation peut être délicate à opérer. Le critère de l'accroissement du confort existant est déterminant pour distinguer des travaux de transformation des travaux d'entretien, la LDTR ne devant pas instituer un contrôle général des loyers. Il est toutefois possible de s'en écarter lorsque l'importance des travaux justifie d'assimiler les travaux de rénovation à des travaux de transformation. Selon la jurisprudence, l'exécution de travaux de remise en état auxquels le bailleur est tenu en vertu de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220) ne procure en général pas un confort supplémentaire au locataire par rapport à ce qui est convenu dans le contrat de bail. Il s'agit, au contraire, de la suppression de défauts graves ou de moyenne importance, soit ceux qui empêchent ou restreignent l'usage prévu. À l'inverse, la plupart des gros travaux de rénovation, comme le présume le législateur fédéral, comprennent une part d'accroissement du confort (art. 14 al. 1 de l’ordonnance sur le bail à loyer et le bail à ferme d'habitation et de locaux commerciaux du 9 mai 1990 - OBLF - RS 221.213.11 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_405/2015 du 6 avril 2016 consid. 3.2). Seules les remises en état qui vont au‑delà de ce qui est nécessaire pour assurer le maintien de la chose louée en l'état tombent sous le coup de l'art. 3 al. 1 let. d LDTR. Il n'est pas arbitraire de tenir compte à cet égard des circonstances dans lesquelles les travaux sont accomplis et notamment de leur accumulation en raison d'un défaut d'entretien courant des bâtiments concernés (arrêt du Tribunal fédéral 1C_195/2021 du 28 octobre 2021 consid. 4.1.2 et les références citées). Des travaux isolés, effectués longtemps auparavant, ne démontrent pas la régularité de l'entretien (ATA/651/2022 précité consid. 8a et les références citées).

Le Tribunal fédéral a précisé que le fait de soumettre des travaux à autorisation au sens de la LDTR n'entrave pas la bonne application du droit fédéral, lorsque ceux‑ci vont au-delà des travaux d'entretien courant imposés par le CO (arrêt du Tribunal fédéral 1C_405/2015 précité consid. 3.2).

2.6 L'installation de nouveaux sanitaires, l'agencement d'une cuisine, la mise en conformité de l'installation électrique, la pose de nouveaux revêtements de sols et de parois ainsi que des travaux de peinture et de serrurerie relèvent en principe de l'entretien au regard de leur nature (ATA/40/2010 du 26 janvier 2010 et les références citées). C'est lorsqu'ils sont effectués séparément, et selon les circonstances, que chacun de ces travaux peuvent être qualifiés de travaux d'entretien. Cela ne signifie pas pour autant qu'une rénovation comprenant l'ensemble des travaux devra nécessairement elle aussi être considérée comme étant limitée à des travaux d'entretien (arrêt du Tribunal fédéral 1C_405/2015 du 6 avril 2016 consid. 4.3 ; ATA/651/2022 précité consid. 8a et l'arrêt cité).

Dans l'ATA/334/2014 du 13 mai 2014, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_323/2014 du 10 octobre 2014, la chambre administrative a considéré que devaient être soumis à autorisation des travaux qui avaient pour but de remettre entièrement à neuf un appartement à l'occasion d'un changement de locataire, par la réfection complète des murs, des plafonds, des parquets dans toutes les pièces et des agencements de cuisine, pour un coût de CHF 8'570.- la pièce, étant précisé qu'en l'occurrence, le loyer avant travaux dépassait déjà le montant maximal du loyer correspondant aux besoins prépondérants de la population (Stéphane GRODECKI/Valérie DÉFAGO GAUDIN, La jurisprudence genevoise en matière d’aménagement du territoire et de droit public des constructions rendue en 2014, RDAF 2015 I p. 31).

La chambre administrative a également confirmé que des travaux ayant pour but la remise à neuf d'un appartement à l'occasion d'un changement de locataire par le rafraîchissement des peintures (plafonds, murs, boiseries et radiateurs de toutes les pièces), la réfection de l'ensemble des installations sanitaires (remplacement de la baignoire, du mélangeur de lavabo, de l'évier, de la robinetterie et des divers accessoires), l'installation d'un nouvel agencement de cuisine, le remplacement du carrelage et des faïences, l'installation d'un nouveau système électrique, le ponçage et la vitrification différés des parquets et la pose de vannes thermostatiques, devaient être assimilés à des travaux de rénovation, constat confirmé par le coût des travaux, soit CHF 26'240.- pour un appartement de trois pièces, par leur impact sur le loyer, qui avait augmenté de 54% à la suite de ces derniers, et par le défaut d'entretien régulier de l'appartement (ATA/440/2015 du 12 mai 2015 consid. 10).

De même, elle a retenu que des travaux – exécutés pour un montant de CHF 11'407.- par pièce dans un logement ne correspondant, avant travaux, pas aux besoins prépondérants de la population – comprenant la réfection complète des peintures, papiers peints et parquets, avec la pose de radiateurs, l'installation d'un agencement de cuisine et de nouveaux sanitaires et la mise en conformité des installations électriques, devaient faire l'objet d'une autorisation (ATA/645/2012 du 25 septembre 2012 consid. 11).

Dans un arrêt récent (ATA/422/2020 du 30 avril 2020), la chambre administrative a eu à trancher le cas de travaux exécutés en 2010 dans un appartement de cinq pièces de 90 m2, à l'occasion d'un changement de locataires, portant sur le remplacement de l'agencement de la cuisine, le remplacement de l'équipement électroménager, l'installation d'une nouvelle hotte, la réfection du câblage électrique de la cuisine et du salon, la démolition du pan de la cloison séparant la cuisine du salon, la pose d'un carrelage sur l'existant à la cuisine et à la salle de bains, la pose de faïence sur l'existant à la cuisine et à la salle de bains, le remplacement d'un lavabo, le remplacement du mélangeur et de la batterie de bain ainsi que la coupure, la vidange et la dépose des installations sanitaires en attendant la réfection du carrelage de la salle de bains, la réfection du tube de douche, le rafraîchissement de la peinture ainsi que le ponçage et l'imprégnation du parquet. Ces travaux, dont le coût s’était élevé à CHF 34'254.25, soit CHF 6'850.- par pièce, avaient concerné toutes les pièces de l'appartement. La chambre administrative a retenu que, pris indépendamment les uns des autres, ils relevaient certes de l'entretien courant de l'appartement, mais représentaient ensemble des travaux dont l'ampleur équivalait à des travaux de transformation. Le loyer après travaux était passé à CHF 5'232.- la pièce par an, soit une augmentation de 77.95 %, le faisant changer de catégorie d'appartements locatifs. Quand bien même les travaux entrepris n'apparaissaient pas somptuaires, ils avaient toutefois été suffisants pour que leur coût et leur impact sur le loyer eut entrainé un changement ayant pour conséquence une modification de l'affectation qualitative de l'appartement concerné. De tels travaux étaient dès lors soumis à autorisation.

Dans un arrêt plus récent (ATA/263/2021 du 2 mars 2021 confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_195/2021 du 28 octobre 2021), le coût global des travaux dans un appartement de quatre pièces s'était élevé à CHF 27'340.95, soit CHF 6'835.25 la pièce, ce qui était inférieur au montant retenu par la jurisprudence pour qualifier les travaux de grande ampleur, soit CHF 10'000.-. Le montant mensuel du loyer avait toutefois été porté à CHF 2'800.- (soit CHF 33'600.- par année) après l'exécution des travaux, ce qui était élevé par rapport au loyer avant travaux de CHF 19'200.- (recte par le Tribunal fédéral : CHF 20'920.-). Un tel loyer était plus élevé que la moyenne des loyers dans un immeuble semblable, arrêté à CHF 2’038.- (soit CHF 24'456.- par an) selon les statistiques genevoises. Son augmentation de 75% (recte par le Tribunal fédéral : 60%) ne pouvait ainsi se justifier par la seule référence aux loyers du quartier, ni par le fait qu'il avait été inchangé depuis quatorze ans, ou encore qu'il était, préalablement aux travaux de 2017, supérieur au loyer correspond aux besoins prépondérants de la population.

Dans un arrêt du 22 août 2023 (ATA/870/2023), la chambre de céans a considéré que CHF 39'275.- de travaux (peinture dans l’entier de l’appartement, ponçage et vitrification du parquet, remise en état d’éléments électriques, réglage de portes, armoires et fenêtres, remplacement à l’identique de carrelage et des faïences du WC visiteurs, de la batterie du lavabo, porte‑savon, porte-verre et siège WC) dans un appartement de quatre pièces, occupé par le même locataire pendant 14 ans, ayant fait l’objet de travaux d’entretien pendant cette durée pour un montant de CHF 1’228.- et le loyer ayant subi une hausse de 56% au départ du locataire, était soumis à autorisation s’agissant de travaux d’entretien différés. Le loyer/pièce passait de CHF 4'983.- avant travaux à CHF 7'800.- après travaux, ces derniers représentant CHF 9'818.-/pièce. Un recours est actuellement pendant contre cet arrêt devant le Tribunal fédéral.

2.7 En revanche, la chambre de céans a considéré que n'étaient pas soumis à la LDTR des travaux d'entretien différés ou non dans le temps, dont le coût par pièce était inférieur à CHF 10'000.- (ATA/642/2013 du 1er octobre 2013 ; ATA/40/2010 du 26 janvier 2010; Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, op. cit., p. 193 ss.). Elle a toutefois précisé qu'il ne lui appartenait pas de dicter au département de ne pas requérir de demande d'autorisation de construire pour des travaux de moins de CHF 10'000.- par pièce (ATA/694/2016 précité consid. 6d ; ATA/574/2014 du 29 juillet 2014 ; ATA/334/2014 précité consid. 14).

Le département peut ainsi recourir au critère du coût par pièce des travaux, mais doit le relativiser. En réalité, pour déterminer la qualification de travaux entrepris dans des logements situés dans des bâtiments visés à l'art. 2 LDTR et, partant, la nécessité de demander une autorisation, il convient de prendre en compte la situation dans son ensemble et d'appliquer à celle-ci les différents critères précités, à savoir la nature des travaux, leur ampleur dans leur ensemble, le moment auquel ils interviennent, leur répercussion sur le loyer précédent ou futur et sa conformité aux besoins prépondérants de la population, sans que les travaux entrepris conduisent à un changement d'affectation qualitatif du logement, ainsi que leur rapport avec la valeur de l'immeuble de manière proportionnelle, tout en évaluant dans quelle mesure les travaux effectués permettent raisonnablement et de manière ordinaire de conserver la chose en bon état (ATA/651/2022 précité consid. 8f ; ATA/694/2016 précité consid. 6d).

2.8 Le rapport entre le coût des travaux entrepris et le montant de la valeur de l'assurance de l'immeuble n'est pas décisif à lui seul pour décider de l'assujettissement des travaux à la LDTR (arrêt du Tribunal fédéral 1C_624/2013 du 13 février 2014 consid. 2.7 ; ATA/646/2010 du 21 septembre 2010 consid. 8 et les arrêts cités ; MGC 1999 9/II 1082).

3.             En l’espèce, l’immeuble est sis en 3e zone et est destiné à de l’habitation. Il est soumis à la LDTR (art. 2 al. 1 LDTR), ce que les parties ne contestent pas.

3.1 Le recourant conteste la qualification de travaux d’entretien courant, telle que retenue par le TAPI.

En ce qui concerne la question de l'assujettissement des travaux litigieux à la LDTR, ces derniers ont consisté en des travaux de peinture dans tout l’appartement, le ponçage et l’imprégnation des parquets et seuils, le réglage des menuiseries (charnières des portes de communication, des fenêtres, des armoires), la réfection des installations électriques (remplacement des plombs par des disjoncteurs, remplacement des prises et interrupteurs par des installations aux normes, remplacement des fils de 1 mm par des fils de 1.6 mm), le remplacement de la vanne thermostatique du radiateur, le ré-émaillage de la baignoire ainsi que le remplacement du lavabo.

Les intimés prétendent que les travaux précités seraient par nature de l'entretien, dans la mesure où ils n'auraient apporté aucune amélioration du confort existant de l'appartement. Ils perdent toutefois de vue, à ce stade de l'analyse, que même si, au vu de la jurisprudence précitée, le critère de l'amélioration du confort existant est pertinent, il n'est pas à lui seul décisif pour qualifier les travaux de rénovation ou d'entretien.

Quand bien même les travaux litigieux, pris individuellement, relèveraient de l'entretien courant, ils ont été exécutés de manière regroupée, à l'occasion d'un changement de locataires, et doivent donc être considérés comme de l'entretien différé, les intimés ne prouvant pas à satisfaction de droit qu'ils auraient procédé à des travaux d'entretien réguliers. À teneur du jugement querellé, le deux pièces a été refait à neuf en septembre 1993, date de l’entrée dans l’appartement de l’ancien locataire. La peinture (murs et plafonds) ainsi que les parquets avaient été refaits. On ignore les travaux effectués entre septembre 1992 et 2004, en l’absence de tout document. Entre 2004 et la demande des propriétaires en juin 2021, un total de CHF 3'123.- a été investi dans l’appartement, dont CHF 269,50 suite à une fuite. Sous réserve de cette intervention dans l’appartement suite à un sinistre, aucuns travaux n’ont été entrepris depuis 2010, date à laquelle le hall, la salle de bains et la cuisine ainsi que la mise à jour de l’installation électrique, ont été effectués. Il ne peut être valablement soutenu que le deux pièces ait fait l’objet d’un entretien régulier en l’absence de toute intervention dans ce sens pendant plus de dix ans.

De même, le montant total des travaux entrepris connus, entre 2004 et 2016, soit pendant 12 ans, se monte à CHF 3'107.- représentant CHF 258.- par année. Les travaux litigieux, effectués en 2016, pour un total de CHF 17’616.- non annoncés au département, représentent près de 90 fois l’investissement annuel moyen ou plus de 5 fois l’investissement fait en 12 ans. Il ne peut être valablement soutenu que les propriétaires aient imaginé que lesdits travaux ne soient pas soumis à la LDTR, voire n’aient pas pris le soin de se renseigner sur leur éventuelle soumission à ladite loi.

3.2 Reste à déterminer l'ampleur des travaux et leur répercussion sur le loyer.

Les travaux litigieux ont porté sur la totalité de l'appartement, à plus ou moins grande échelle, ceux-ci ayant par exemple été plus importants dans les sanitaires que dans le séjour. L’augmentation de loyer a été effectuée juste après les travaux, le 1er mars 2016, le loyer passant de CHF 9'600.-/an soit CHF 4'800.- la pièce à CHF 14'700.-/an, soit CHF 7'350.-. L’augmentation du loyer est en conséquence de plus de 53%.

La nature et l'ampleur des travaux sont très similaires à ceux relevées dans l’arrêt du Tribunal fédéral du 13 février 2014 (1C_624/2013) rappelé dans l’arrêt 1C_195/2021 précité, selon lequel les travaux comprenant la réfection complète des sols, des murs et des plafonds, le ponçage et la vitrification des parquets, la réfection des agencements de cuisine et de salle de bain, de la douche et du WC devaient faire l’objet d’une autorisation.

La nature, l'étendue des travaux et les arguments des intimés sont très similaires à ceux relevées l’ATA/870/2023 précité, mais aussi de l’arrêt de la chambre de céans, dûment confirmé par le Tribunal fédéral (1C_195/2021 précité), rappelant que des travaux à moins de CHF 10'000.-/pièce pouvaient être soumis à autorisation, s’agissant dans le cas d’espèce d’une augmentation de loyer de 60%, pour un 4 pièces, passant de CHF 20'920.- avant travaux, soit CHF 5'230.-/pièce à CHF 33'600.- après travaux, soit CHF 8'400.-/pièce, étant rappelé que dans la présente affaire le coût des travaux/pièce est de CHF 8'805.-.

En ce qui concerne la répercussion des travaux sur le loyer, ni la loi ni la jurisprudence n'ont défini de seuil à partir duquel l'augmentation de loyer consécutive à des travaux devrait être considérée comme importante. Le département dispose ainsi d'un certain pouvoir d'appréciation dans l'évaluation de ce critère.

En l'occurrence, le loyer a été augmenté de 53%, hausse que le département a considérée comme importante. Dans la mesure où ce pourcentage constitue, en chiffres absolus, une augmentation de plus de moitié, le raisonnement de l’autorité recourante ne prête pas le flanc à la critique. De plus, ledit pourcentage est bien supérieur au 20% qu'une minorité du Grand Conseil avait proposé comme seuil à partir duquel une augmentation de loyer devait être considérée comme importante (MGC 1999 9/1 1211). Quand bien même cette proposition a été – de peu – refusée, elle donne un bon indice sur la façon d'évaluer la répercussion des travaux sur le loyer.

Dans ces conditions, tant l’ampleur des travaux effectués en 2016 que leurs coûts et la répercussion sur le loyer impliquent que les travaux litigieux ne répondent pas à la définition de « travaux raisonnables d’entretien régulier qui n’ont pas engendré d’amélioration du confort existant » au sens de l’art. 3 al. 2 LDTR. Les critiques formulées par le département contre le jugement du TAPI, singulièrement sur l’analyse de l’entretien régulier de l’appartement sont en conséquence fondées. Les travaux effectués doivent être qualifiés de travaux de rénovation au sens de l’art. 3 al. 1 LDTR et étaient en conséquence soumis à autorisation du département.

Par ailleurs, l’appartement répondant aux BPP, l’art. 9 al. 2 LDTR trouve application. En effet, si certes, son loyer avant travaux était de CHF 9'600.- soit CHF 4'800.-/pièce/an soit supérieur aux loyers correspondant aux BPP, il s’agit d’un deux pièces et relève en conséquence d’une catégorie de logements où sévit la pénurie (Arrêté déterminant les catégories de logements où sévit la pénurie en vue de l’application des art. 25 à 39 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation (ArAppart) du 21 décembre 2022 ; L 5 20.03). L’appartement répond aux BPP (art. 9 al. 3 LDTR).

En conséquence, une autorisation était nécessaire pour les transformations (art. 9 al. 1 LDTR). C’est en conséquence à bon droit (art. 10 ss LDTR) que le département a fixé, comme condition de l’autorisation, le loyer de l’appartement.

4.             Les intimés se plaignent de l'absence d'information sur la notion de travaux d'entretien soumis à autorisation.

En particulier, ils reprochent au département de ne jamais avoir émis de directive fixant des règles « claires » sur la soumission ou non de travaux d'entretien à autorisation de construire. Les arrêts de la chambre de céans – relatifs à la LDTR – étaient certes publiés sur le site du Pouvoir judiciaire, mais étaient trop nombreux et leur résumé très court, avec une impossibilité pour l'administré de comprendre s'il devrait ou non déposer une demande d'autorisation. De plus, jusqu'en 2014 et la sortie d'un ouvrage de doctrine sur la LDTR, les gérants techniques des régies avaient appliqué la règle simplificatrice selon laquelle ils étaient dispensés de déposer une demande d'autorisation si les travaux coûtaient moins de CHF 10'000.- par pièce. Cette règle leur permettait d’intervenir rapidement au départ d’un locataire pour effectuer les travaux nécessaires avant de relouer le logement, et d’effectuer ainsi un travail efficace pour le compte des propriétaires. C'était cette règle qui avait été appliquée au cas d'espèce.

4.1 Ancré à l'art. 9 Cst., et valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 8.1 ; ATA/175/2023 du 28 février 2023 consid. 4b). En particulier, l'administration doit s'abstenir de tout comportement propre à tromper l'administré et ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 8.1 ; ATA/349/2023 du 4 avril 2023 consid. 3.2.3). La protection de la bonne foi ne s'applique pas si l'intéressé connaissait l'inexactitude de l'indication ou aurait pu la connaître en consultant simplement les dispositions légales pertinentes (ATF 135 III 489 consid. 4.4 ; 134 I 199 consid. 1.3.1).

4.2 D'après la jurisprudence, afin d'assurer l'application uniforme de certaines dispositions légales, l'administration peut expliciter l'interprétation qu'elle leur donne dans des directives. Celles-ci n'ont pas force de loi et ne lient ni les administrés, ni les tribunaux, ni même l'administration. Elles ne dispensent pas cette dernière de se prononcer à la lumière des circonstances du cas d'espèce. Par ailleurs, elles ne peuvent sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu'elles sont censées concrétiser. En d'autres termes, à défaut de lacune, elles ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 133 II 305 consid. 8.1 et les arrêts cités).

4.3 En l'espèce, contrairement à un renseignement erroné de l'administration, l'absence d'information n'est pas protégée par le principe de la bonne foi. Les intimés ne peuvent dès lors tirer aucune conséquence juridique d'une prétendue absence d'informations sur la notion de travaux d'entretien soumis à autorisation.

Au demeurant, leur raisonnement ne peut être suivi, compte tenu de ce qui suit.

La LDTR et le règlement d’application de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation du 29 avril 1996 (RDTR - L 5 20.01), à l'instar de toute la législation genevoise, sont publiés sur internet et librement accessibles.

Contrairement à ce que prétendent les intimés, le département n'a aucune obligation d'édicter des directives, étant précisé que ces dernières, le cas échéant, ne le lient pas.

Les critères permettant à l'administré de savoir s'il doit ou non déposer une demande d'autorisation en vue de l'exécution de travaux ont été fixés et rappelés dans l'abondante jurisprudence cantonale développée par la chambre de céans, l'ancien Tribunal administratif et le Tribunal fédéral. Comme l'admettent les intimés, cette jurisprudence est accessible sur le site du Pouvoir judiciaire, sur lequel l'administré peut consulter des arrêts traitant des problématiques de la LDTR remontant jusqu'à 1989. Dès lors, l'administré dispose, lorsqu'il veut entreprendre des travaux, de toutes les informations nécessaires pour agir conformément à la loi.

Par ailleurs, il ne ressort pas de la jurisprudence de la chambre de céans, ni de celle de l'ancien Tribunal administratif, que les juridictions administratives auraient considéré, avant 2016, que des travaux dont le coût est inférieur à CHF 10'000.- par pièce ne seraient systématiquement pas soumis à autorisation. Comme la chambre de céans l'exposera ci-après, le critère du coût par pièce n'est pas absolu et d'autres critères doivent être pris en considération. Les intimés semblent dès lors avoir fait une lecture erronée de la jurisprudence et ne peuvent s'en prévaloir pour justifier leur omission d'avoir déposé une demande d'autorisation.

Au vu de ce qui précède, le grief sera écarté.

5.             Les intimés se plaignent d'un durcissement « incompréhensible » des règles d'interprétation des travaux d'entretien depuis 2014, la pratique du département consistant à soumettre quasi systématiquement des travaux d'entretien à autorisation, ce qui contreviendrait à la jurisprudence applicable.

Comme déjà mentionné dans l’arrêt de la chambre de céans du 22 août 2023, ils perdent toutefois de vue que la LDTR poursuit des intérêts publics évidents, en particulier le maintien dans le parc locatif de suffisamment de logements à prix abordables, ce qui est en soi suffisant pour justifier un éventuel durcissement de la pratique conforme aux principes jurisprudentiels applicables, le Tribunal fédéral ayant par ailleurs relevé que la pratique n'en devenait pas pour autant arbitraire dans son résultat (arrêt du Tribunal fédéral 1C_405/2015 du 6 avril 2016 consid. 4.3).

6.             Les intimés estiment que le fait d'appliquer en 2022, de façon rétroactive, des règles « injustement excessives » à des travaux exécutés en 2016, soit à une période où il n'existait aucune information claire sur la distinction entre les travaux soumis à autorisation et ceux qui n'y était pas, était constitutif d'une violation des principes de la légalité et de la proportionnalité.

Comme déjà mentionné dans l’arrêt du 22 août 2023, la décision litigieuse, soit l'autorisation délivrée, est fondée sur l'art. 3 al. 1 let. d et al. 2 a contrario LDTR, qui sont des bases légales tant matérielles que formelles. Cet article, dans sa teneur actuelle, est entré en vigueur le 16 octobre 1999, de sorte qu'il est pleinement applicable aux faits de la présente cause, qui se sont déroulés en 2016, soit postérieurement. Dès lors, aucune violation du principe de la légalité ou de l'interdiction de la rétroactivité n'entre en considération.

Comme déjà évoqué, les critères permettant à l'administré de savoir s'il doit ou non déposer une demande d'autorisation en vue de l'exécution de travaux ont été fixés par la jurisprudence bien avant 2016 (cf. ATA/261/2001 du 24 avril 2001). Ils ont été largement publiés et n'ont pas été modifiés depuis lors, la multiplication des cas soumis aux juridictions administratives ayant eu pour seul effet une densification de la jurisprudence en la matière. Dès lors, contrairement à ce que prétendent les intimés, la jurisprudence actuelle n'est manifestement pas différente de celle qui était applicable en 2016, de sorte que son application au présent cas est conforme au droit.

Enfin, on ne voit pas en quoi le principe de proportionnalité serait concerné dans le cadre de l'application de l'art. 3 al. 1 let. d et al. 2 LDTR et de la jurisprudence constante y relative, dans la mesure où cette disposition constitue une prescription légale du droit de la construction, applicable à tous les projets de transformation/rénovation.

Le grief sera ainsi écarté.

7.             Les intimés se plaignent d’une mauvaise application de la LDTR dans le cas d’espèce.

7.1 Les intimés relèvent que les régies examinent, en pratique, la nature et le coût des travaux pour estimer si ceux-ci doivent faire l’objet d’une APA ou non, l’OCLPF appliquant le critère de l’évolution du loyer après travaux.

7.1.1 S’agissant de la nature des travaux, ils soutiennent qu’il s’agissait clairement de l’entretien. Déterminer si toutes les pièces avaient fait l’objet de travaux ne serait pas pertinent contrairement aux récents arrêts de la chambre de céans.

Or, si la question de la nature de chacun des travaux effectués peut souffrir de rester indécise, s’agissant en tous les cas, vu leur regroupement, d’entretien différé, la question de savoir si les travaux ont porté sur l’ensemble des pièces est une des circonstances entrant dans l’appréciation globale de la situation, pour déterminer la nature précise des travaux effectués. Rien ne justifie de ne pas examiner cet élément de fait qui contribue à l’examen des travaux effectivement effectués et leur ampleur.

7.1.2 S’agissant du coût des travaux, les intimés allèguent que le montant de CHF 17’611.- pour l’appartement de deux pièces, sur les 158.5 pièces que compte l’immeuble, représentait 10.76 % de la valeur d’assurance de l’immeuble de CHF 12’975'000.- et 10.2 % de la valeur 2022 (méthode A). Le montant des travaux serait également inférieur à la règle des CHF 10'000.‑/pièce (méthode B). La rénovation de l’appartement de deux pièces au 6e étage, identique à celui présentement litigieux au 5e étage, aurait coûté CHF 124'000.‑, soit CHF 62'000.- lors de sa rénovation complète. Ils détaillaient les travaux. Même en retranchant une partie des coûts ayant permis d’améliorer l’appartement, on constaterait que l’entretien complet de l’appartement litigieux aurait représenté un coût total de l’ordre de CHF 100'000.-, soit CHF 50'000.- par pièce. Cela ferait des années que les propriétaires et les régies expliqueraient que la fourchette retenue en pratique par le service LDTR de CHF 10'000.- ne correspondrait plus à la réalité du terrain et qu’elle serait dépassée, ce que l’exemple démontrerait à l’évidence. Ainsi, le coût exposé en 2016 de CHF 8'805.- par pièce serait à ce point inférieur au coût de rénovation qu’à l’évidence il s’agirait de travaux d’entretien très partiels.

Or, même à considérer que les coûts soient inférieurs à la valeur d’assurance, ce motif ne suffirait pas à lui seul, selon la jurisprudence précitée (ATA/646/2010 précité), à admettre que les travaux litigieux auraient consisté en de l'entretien non soumis à autorisation, vu notamment leur ampleur et leur répercussion sur le loyer. Au demeurant, il ressort des travaux préparatoires qu'il n'est pas nécessaire de rapporter le coût global des travaux entrepris à la valeur d’assurance de l’immeuble pour déterminer si lesdits travaux sont ou non soumis à la loi (MGC 1999 9/II 1082).

7.1.3 S’agissant de la répercussion des travaux sur le loyer, les intimés soutiennent que la doctrine précitée distinguait trois cas dans lesquels les travaux étaient assimilables à de la rénovation soumise à autorisation : 1) le coût des travaux était important et le loyer était augmenté au-delà du plafond BPP ; 2) le coût des travaux était important et suffisait à lui seul pour soumettre ces derniers à autorisation ; 3) le coût des travaux n’était pas important mais le loyer était augmenté. Dans un tel cas, ce n’était qu’exceptionnellement que les travaux devaient être soumis à autorisation. Selon les intimés, en l’espèce, il s’agirait d’appliquer la troisième situation étant rappelé que, par principe, les travaux ne seraient pas soumis à autorisation puisque leur coût ne serait pas important et que le loyer avant travaux, déjà supérieurs aux BPP, pourrait être augmenté sur la seule base des règles du CO. Le calcul « Fracheboud-LDTR » montrerait que le loyer après travaux n’aurait pas été calculé en fonction des coûts de ceux-ci puisque selon ce calcul ces travaux justifieraient une hausse de loyer de CHF 909.- /an faisant passer le loyer de CHF 9'600.- par an à CHF 10'509.- par an seulement. Les loyers après travaux de CHF 14'700.- par an auraient été fixés uniquement en fonction des loyers du quartier de l’art. 269a let. a CO. La hausse de 53.13 % ne serait pas étonnante pour deux raisons : 1) le locataire avait vécu 23 ans dans le même appartement avec le même loyer ; le Tribunal fédéral avait retenu qu’en cas de bail de plus de 15 ans, soit de longue durée, le loyer initial augmenté de 44 % par rapport à celui de l’ancien locataire n’était pas présumé abusif ; il appartenait au nouveau locataire de prouver que cette hausse de loyer le serait ; 2) les appartements petits avaient des loyers plus élevés en valeur absolue, soit au m2, que les grands appartements ; les éléments qui coûtaient le plus étaient les cuisines et les sanitaires ; les petits appartements en avaient proportionnellement plus que dans les grands appartements. Le département estimait que tous les travaux suivis d’une hausse de loyer étaient soumis à autorisation LDTR. Selon les intimés, cette façon de faire serait contraire à la loi car elle aurait pour effet de soumettre tous les travaux à un contrôle étatique, en violation du droit constitutionnel de la propriété. En l’espèce, les loyers après travaux auraient été fixés en fonction des loyers du quartier, non en fonction des travaux effectués, comme l’avait à juste titre retenu le TAPI.

Or, cette argumentation n'est pas de nature à remettre en cause l'analyse qui a été effectuée ci-avant. En effet, comme l'a rappelé la chambre de céans à plusieurs reprises, les comparaisons établies dans le cadre de procédures de recours avec les loyers d'autres logements similaires dans un quartier échappent à la compétence de la chambre de céans, dans la mesure où elles ressortissent au droit du bail (art. 269a let. a CO ; ATA/646/2010 précité consid. 9 ; ATA/502/2008 du 30 septembre 2008). De plus, on ne saurait retenir que le loyer du précédent locataire, soit CHF 4’800.- la pièce par an, aurait été artificiellement bas, ce dernier dépassant déjà le maximum de la fourchette correspondant aux besoins prépondérants de la population prévue par l'aArRLoyers.

7.1.4 S’agissant de l’entretien régulier de l’appartement avant 2016, les intimés relèvent que la précédente régie aurait indiqué que son système informatique ne contiendrait des informations que depuis 2004 et qu’elle ne serait plus en possession des factures des travaux de ces immeubles sous gestion avant 2010.

Ces faits ne sont pas contestés. Contrairement à ce que soutiennent les intimés, ils confirment toutefois et comme vu dans les considérants qui précèdent, l’absence d’entretien régulier de l’appartement.

Concernant les travaux de rénovation de l’appartement de deux pièces de même surface au 6e étage, la comparaison des montants des travaux est certes assez éloignée (CHF 115'353.- pour le premier et CHF 17'611.- pour l’appartement litigieux). Toutefois, les intimés ne contestent pas que les travaux du 6e étage étaient une remise en état totale de l’appartement et n’entraient pas dans l’entretien courant. De même, la chambre de céans a indiqué ci‑dessus que la nature de chacun des travaux effectués dans l’appartement litigieux pouvait rester indécise, le problème portant en tous les cas sur la notion de l’entretien « courant », développée dans les considérants qui précèdent.

Le grief sera écarté.

8.             Les intimés détaillent douze arrêts de la chambre de céans et du Tribunal fédéral de 2001 à 2021 ayant soumis des travaux à la LDTR.

8.1 Les intimés considèrent qu’aucun des douze arrêts ne serait similaire au présent cas notamment pour les motifs principaux suivants : la majorité des cas porterait sur des remises à neuf complètes d’un appartement, dont le loyer, avant travaux, serait inférieur au plafond LDTR de l’époque concernée ; qui n’auraient pas subi de travaux d’entretien pendant au minimum 18 ans pour ceux dont le critère serait pris en considération, et dont les travaux s’élèveraient à plus de CHF 47'000.- pour les montants articulés les plus bas.

8.2 En l’espèce, les travaux ne peuvent pas être qualifiés de remise à neuf complète de l’appartement. Cet élément ne suffit toutefois pas pour les considérer comme simples travaux d’entretien au sens strict de l’art. 3 al. 2 LDTR.

De même, l’argument selon lequel « la véritable rénovation améliorant la qualité des appartements soumis à la LDTR serait fixée à CHF 100'000.- par appartement » ne repose sur aucun fondement.

Les intimés font grand cas du ton employé par le service compétent dans sa correspondance, de la brièveté des délais impartis voir des refus « inusuels » de prolonger des délais pour déposer des pièces nécessaires à une autorisation. Si certes l’apparente intransigeance du département dans le présent dossier pour l’octroi d’éventuelles prolongations a nécessité l’intervention de la hiérarchie tant au niveau de l’État que de la société intimée, cette problématique est sans incidence sur l’issue du présent litige.

9.             Les intimés considèrent que c’est à bon droit que le TAPI a retenu que les travaux avaient simplement servi à maintenir l’appartement dans un état conforme à de l’habitation et à permettre aux nouveaux locataires d’entrer dans un appartement propre et correctement entretenu.

9.1 Le bailleur est tenu de délivrer la chose à la date convenue, dans un état approprié à l’usage pour lequel elle a été louée, et de l’entretenir en cet état (art. 256 CO).

Le bail étant un Dauerschuldverhältnis, l’art. 256 al. 1 CO impose au bailleur de garantir aux locataires, tout au long du contrat, un usage conforme à l’état convenu. Le bailleur doit donc entretenir la chose louée (la réparer ; éliminer les défauts : CO 259b ; Commentaire romand ; 2021 ; David LACHAT/François BOHNET, ad. art. 256 n° 5).

De surcroît, comme l’a déjà mentionné le Tribunal fédéral dans des litiges LDTR, lorsqu'une importante hausse de loyer suit les travaux, le bailleur peut difficilement prétendre n'avoir effectué que des travaux d'entretien courant, qu'il n'est en principe pas autorisé à faire supporter au locataire (art. 259a al. 1 let. a, 259b let. b et 269a let. b CO ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_405/2016 consid. 4.3).

9.2 Or, en l’espèce et comme détaillé précédemment, le problème porte sur le caractère différé des travaux d’entretien.

10.         Les intimés se plaignent de la violation de l'art. 10 al. 2 LDTR, le loyer après travaux ne devant, selon eux, pas être bloqué. L’art. 10 al. 2 LDTR serait exemplatif et non exhaustif. Il conviendrait de renoncer à la mesure de blocage dans le cas d’espèce, celle-ci étant disproportionnée compte tenu du fait que le coût des travaux effectués en 2016 ne serait pas élevé, que le loyer avant travaux serait déjà supérieur aux BPP, que ce loyer aurait été augmenté après travaux en parfaite conformité avec le CO, qu’il « se trouvait entrer dans les statistiques des loyers du quartier, que les intimés ne pouvaient pas raisonnablement penser en 2016, au vu de l’absence d’information des casuistiques, que le service LDTR, après des années, appliquerait, à tort, un blocage LDTR rétroactif alors qu’il s’agissait de travaux d’entretien, partiels et enfin, que les propriétaires à l’instar de leur régie étaient soucieux de se conformer à la loi, ce que démontraient les quatorze demandes d’APA déposées, soit pour tous les travaux de rénovation ».

10.1 Lorsqu'il accorde une autorisation en cas de démolition ou de transformation d'un immeuble soumis à la LDTR, le département fixe, comme condition de l'autorisation, le montant maximum des loyers des logements après travaux (art. 10 1ère phr. LDTR), selon le mode de calcul prévu par l'art. 11 LDTR.

Le département renonce à la fixation des loyers et des prix prévue à l'art. 10 al. 1 LDTR lorsque cette mesure apparaît disproportionnée, notamment lorsque les loyers après transformations demeurent peu élevés (art. 10 al. 2 let. a LDTR) ou lorsque les logements à transformer sont des logements de luxe ou que leurs loyers dépassent d’ores et déjà d’au moins deux fois et demie les besoins prépondérants de la population (art. 10 al. 2 let. b LDTR).

L'art. 10 al. 2 LDTR n'énonce que trois cas de figure exemplatifs, de sorte que le département peut renoncer à fixer le loyer dans d'autres circonstances (Emmanuelle GAIDE/Valérie DÉFAGO GAUDIN, op. cit., p. 275 ; ATA/185/2021 du 23 février 2021 consid. 5d et la référence citée).

La chambre administrative a considéré que le département pouvait valablement renoncer à fixer le montant maximal du loyer après travaux lorsque ceux‑ci ont été exécutés 25 ans avant la délivrance de l'autorisation (ATA/185/2021 précité consid. 6).

10.2 L'autorité administrative jouit d'un large pouvoir d'appréciation dans l'octroi de dérogations. Cependant, celles-ci ne peuvent être accordées ni refusées d'une manière arbitraire. Tel est le cas lorsque la décision repose sur une appréciation insoutenable des circonstances et inconciliable avec les règles du droit et de l'équité et se fonde sur des éléments dépourvus de pertinence ou néglige des facteurs décisifs. Quant aux autorités de recours, elles doivent examiner avec retenue les décisions par lesquelles l'administration accorde ou refuse une dérogation. L'intervention des autorités de recours n'est admissible que dans les cas où le département s'est laissé guider par des considérations non fondées objectivement, étrangères au but prévu par la loi ou en contradiction avec elle. Les autorités de recours sont toutefois tenues de contrôler si une situation exceptionnelle justifie l'octroi de ladite dérogation, notamment si celle-ci répond aux buts généraux poursuivis par la loi, qu'elle est commandée par l'intérêt public ou d'autres intérêts privés prépondérants ou encore lorsqu'elle est exigée par le principe de l'égalité de traitement, sans être contraire à un intérêt public (ATA/539/2023 du 23 mai 2023 consid. 4.3 et l'arrêt cité).

10.3 Le principe de la proportionnalité, auquel l'art. 10 al. 2 LDTR se réfère, commande que la mesure étatique soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité) ; en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; ATF 144 I 306 consid. 4.4.1 ; 143 I 403 consid. 5.6.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 140 II 194 consid. 5.8.2).

10.4 Si le loyer avant transformation ou rénovation dépasse le niveau des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population, il est maintenu par le département au même niveau lorsqu’il apparaît qu’il permet économiquement au propriétaire de supporter le coût des travaux sans majoration de loyer (art. 11 al. 3 LDTR).

L'art. 11 al. 3 LDTR a été introduit avec l'adoption du PL 7'752, le 25 mars 1999. Selon les travaux préparatoires, il vise à permettre la rénovation d'immeubles dont les loyers dépassent déjà, avant travaux, le niveau des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population, en autorisant une augmentation desdits loyers, pour autant toutefois que ces derniers aient été précédemment équitablement fixés. (MGC 1999 9/II 1070, p. 1086 ss ; ATA/675/2017 du 20 juin 2017 consid. 8c)

Il appartient au requérant de démontrer, par toutes pièces utiles, que le propriétaire n’est pas en mesure de supporter économiquement le coût des travaux sans majoration de loyer (art. 5 al. 4 RDTR).

10.5 Les loyers et les prix de vente maximaux ainsi fixés sont soumis au contrôle de l’État, pendant une période de cinq à dix ans pour les constructions nouvelles et pendant une période de trois ans pour les immeubles transformés ou rénovés, durée qui peut être portée à cinq ans en cas de transformation lourde (art. 12 LDTR).

Pendant la période de contrôle, les loyers fixés par le département ne peuvent être dépassés (art. 14 al. 1 LDTR).

10.6 En l'espèce, aucune des hypothèses prévues expressément par l'art. 10 al. 2 LDTR n'est réalisée. En effet, les parties ne soutiennent pas, à juste titre, que l'appartement litigieux serait un logement de luxe et le loyer avant travaux n'est pas supérieur de plus de deux fois et demie aux besoins prépondérants de la population. De plus, le loyer après travaux ne saurait être considéré comme peu élevé.

La recourante relève à juste titre que le département peut renoncer à fixer le loyer dans d'autres circonstances que celles énoncées à l'art. 10 al. 2 LDTR. Elle estime que le loyer ne devrait pas être bloqué, une telle mesure violant le principe de proportionnalité, dans la mesure où celui avant travaux était déjà supérieur aux besoins prépondérants de la population et qu'elle ne pouvait pas raisonnablement penser en 2013, vu l'absence d'informations des casuistiques, que le service LDTR appliquerait un blocage rétroactif.

Ces circonstances ne sauraient toutefois justifier une application de l'art. 10 al. 2 LDTR. D'une part, le fait que le loyer avant travaux soit supérieur à celui de loyers correspondant aux besoins prépondérants de la population n'apparaît pas comme une situation exceptionnelle à Genève et constitue une circonstance déjà appréhendée par l'art. 11 al. 3 LDTR. Renoncer à la fixation du loyer pour ce seul motif reviendrait ainsi à appliquer trop fréquemment l'exception prévue par l'art. 10 al. 2 LDTR, ce qui contreviendrait aux nombreux objectifs poursuivis par la loi, en particulier celui consistant à conserver sur le marché des logements qui répondent à un besoin en raison de leur prix.

D'autre part, et comme on l'a vu, les intimés, au même titre que tous les administrés, disposaient de toutes les informations nécessaires, en 2016 déjà, pour agir en conformité de la loi, celle-ci et la jurisprudence pertinente étant librement accessibles. En cas de doute sur la qualification des travaux litigieux, il appartenait à la régie de se renseigner auprès du département, ce que l'on pouvait raisonnablement attendre d'elle vu son statut de professionnelle de l'immobilier, mais qu'elle n'a pas fait, sans raison objective. Il apparaît par ailleurs singulier de se prévaloir d’avoir posé la question d’une éventuelle soumission à une autorisation pour la pose d’un réfrigérateur, d’une cuisinière, d’une hotte de cuisine et d’un meuble lavabo dans la salle de bain pour un total de CHF 4'222.- et de soutenir que les travaux litigieux, pour un montant plus de quatre fois supérieur, portant sur de la peinture, du ponçage, la réfection des installations électriques, le remplacement du lavabo et ré-émaillage de la baignoire notamment, puissent ne pas être soumis à autorisation.

Enfin, le blocage du loyer est apte à conserver, sur le marché, l'appartement à un prix plus abordable qu'il ne le serait en l'absence d'une telle mesure. Contrairement à ce que soutiennent les intimés, une remise en état s’impose, notamment au vu des intérêts des locataires, indûment lésés. Celle-ci est la seule mesure envisageable à cette fin et la recourante ne prétend pas que son exécution l'exposerait à des difficultés financières.

Cette mesure respecte ainsi le principe de proportionnalité.

Ainsi, si certes l’article de loi autorise d’éventuelles autres exceptions par son terme « notamment », le département n’a pas abusé de son pouvoir d’appréciation en considérant que tel n’était pas le cas en l’espèce et était fondé à ne pas renoncer à fixer le montant maximum du loyer de l'appartement après travaux.

10.7 Reste encore à déterminer si l'art. 11 al. 3 LDTR trouve application.

Si le loyer avant rénovation dépasse en l'occurrence le niveau des loyers répondant aux besoins prépondérants de la population, la recourante ne soutient toutefois pas, ni a fortiori ne démontre, qu'un loyer non majoré ne lui permettrait pas économiquement de supporter le coût des travaux. Le département a dès lors maintenu à bon droit le loyer au même niveau que le précédent, en application de l'art. 11 al. 3 LDTR.

Au vu de tout ce qui précède, le grief sera écarté.

11.         Les intimés soutiennent que l'ordre d'établir une formule officielle et de rembourser aux anciens locataires le trop-perçu du loyer violerait le principe de la légalité. La conséquence du blocage rétroactif du loyer visant à rembourser le trop-perçu constituerait une condamnation de nature civile non prévue par la LDTR ni par la LCI. La chambre administrative aurait interprété de façon très extensive l'art. 129 let. e LCI, en ce sens que la remise en état couvrirait aussi l'obligation de rembourser les loyers trop perçus.

11.1 Celui qui contrevient aux dispositions de LDTR est passible des mesures et des sanctions administratives prévues par les art. 129 à 139 LCI et des peines plus élevées prévues par le code pénal suisse, du 21 décembre 1937 (art. 44 al. 1 LDTR).

Parmi les mesures administratives à disposition de l’autorité compétente figure l’ordre de remise en conformité (art. 129 let. e LCI). L’objectif d’une telle mesure est de rétablir une situation conforme au droit (ATA/185/2021 précité consid. 5f).

Selon la jurisprudence constante de la chambre de céans, une mesure visant les loyers, notamment le remboursement du trop-perçu de loyer et l'établissement d'un nouveau bail conforme aux conditions de l'autorisation de construire accordée, constitue une forme de remise en état au sens de l'art. 129 let. e LCI (ATA/185/2021 précité consid. 5f et les arrêts cités ; ATA/531/2012 du 21 août 2012 consid. 7b confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_496/2012 du 12 février 2013).

Le Tribunal fédéral a confirmé la conformité au droit de la jurisprudence précitée. Selon lui, une telle extension jurisprudentielle ne heurte pas le principe de la légalité, dès lors qu'il suffit, pour respecter les exigences qui en découlent, que l'obligation inexécutée ait elle-même une base légale, sans que l'intervention pour le rétablissement de la situation antérieure, qui aurait dû être maintenue si l'administré avait respecté ses devoirs, doive elle-même être expressément mentionnée dans la loi (ATF 111 Ib 213 consid. 6c p. 226; 105 Ib 272 consid. 1c p. 276 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.55/2000 du 13 avril 2000 et les références citées).

La répétition de l'indu (art. 63 al. 1 CO par analogie) fait par ailleurs partie des principes généraux du droit administratif, applicable sans base légale expresse. Dès lors, la restitution de loyers perçus en trop ordonnée par le département ne viole pas le principe de la légalité (arrêt du Tribunal fédéral 1C_250/2010 du 26 août 2010 consid. 3.2 et la référence).

11.2 Dès lors que l'art. 12 LDTR institue un contrôle des loyers après l'exécution des travaux de rénovation, l'obligation faite au propriétaire sous cet aspect inclut celle d'inscrire, dans le contrat de bail concerné, le montant du loyer fixé dans l'autorisation de rénover pendant le contrôle et de rectifier un bail à loyer qui s'en écarterait (arrêts du Tribunal fédéral 1C_184/2013 du 8 janvier 2014 consid. 2.1 ; 1C_496/2012 du 12 février 2013 consid. 3.2.1 ; ATA/260/2014 du 15 avril 2014 consid. 11a et les autres arrêts cités).

Le blocage du loyer peut porter rétroactivement sur la période entre la fin des travaux exécutés illicitement et, en soi, l'entrée en force de l'autorisation de construire obtenue après coup, avec obligation de rembourser le trop-perçu au locataire (ATA/185/2021 précité consid. 5g et la référence citée).

11.3 S'agissant des locataires ayant déjà quitté l'appartement incriminé et qui ont versé un loyer supérieur à celui bloqué après coup, il n'y a pas lieu d'imposer au propriétaire d'établir un nouveau bail corrigé. En revanche, le département est en droit d'ordonner au propriétaire de rembourser le trop-perçu de loyer à ces locataires, l'obligation de restituer le loyer ne valant que pour la durée du contrôle étatique instaurée par la LDTR (ATA/185/2021 précité consid. 5g et les références citées).

La chambre de céans considère que, s'il ne peut être ordonné au bailleur d'établir un nouveau contrat de bail corrigé pour des locataires ayant quitté le logement, la solution est autre s'agissant de la formule de fixation du loyer initial. Celle-ci est nécessaire lors de l'établissement de tout nouveau bail ou de toute modification du montant du loyer. Dès lors qu'elle résulte d'un acte unilatéral du bailleur, le départ des locataires concernés n'empêche aucunement celui-ci d'établir une nouvelle formule, document essentiel puisqu'à même de documenter l'augmentation du loyer de l'appartement en question. La notification, selon les règles du droit du bail, d'une nouvelle formule indiquant le loyer fixé pendant trois ans selon la décision litigieuse est une mesure nécessaire pour le rétablissement d'une situation conforme au droit au sens de l'art. 129 let. e LCI (ATA/185/2021 précité consid. 5g ; ATA/1343/2020 du 22 décembre 2020 consid. 3f et 4).

11.4 En l'occurrence, il est établi que les travaux litigieux étaient soumis à autorisation et que le loyer aurait dû être bloqué en conséquence pendant une période de trois ans après leur exécution.

L'ordre adressé aux intimés d'établir un nouvel avis de fixation du loyer initial et de rembourser le trop-perçu aux anciens locataires est fondé sur ce constat et a pour objectif de rétablir une situation conforme au droit. Au vu de la jurisprudence précitée, cette double mesure, qui découle par ailleurs des art. 10 al. 1, 12 et 14 al. 1 LDTR et du principe général de la répétition de l'indu, est en tous points conforme au principe de la légalité. Il n'y a pas lieu de s'écarter de cette jurisprudence confirmée par la chambre de céans à de nombreuses reprises et par le Tribunal fédéral, faute d'éléments objectifs permettant d'effectuer un tel revirement.

Le grief sera ainsi écarté.

12.         Les intimés contestent le bien-fondé de l'amende qui leur a été infligée. Ils n’avaient commis aucune faute, dans la mesure où ils ne pouvaient raisonnablement penser, en 2016, que l'autorité intimée appliquerait un blocage rétroactif des loyers. Le montant de l'amende était, dans tous les cas, excessif, et le département n'avait pas expliqué comment il l'aurait calculé. Ils bénéficieraient de nombreuses circonstances atténuantes, notamment une absence de volonté de ne pas respecter la LDTR, une absence de cupidité et d'antécédents. Enfin, le montant de l'amende était bien supérieur à celui des amendes infligées pour des cas similaires.

12.1 Selon l'art. 137 al. 1 LCI, est passible d'une amende administrative de CHF 100.- à CHF 150'000.- tout contrevenant à la LCI (let. a), aux règlements et arrêtés édictés en vertu de la LCI (let. b) et aux ordres donnés par le département dans les limites de la LCI et des règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci (let. c). Le montant maximum de l'amende est de CHF 20'000.- lorsqu'une construction, une installation ou tout autre ouvrage a été entrepris sans autorisation mais que les travaux sont conformes aux prescriptions légales (art. 137 al. 2 LCI). Il est tenu compte, dans la fixation du montant de l'amende, du degré de gravité de l'infraction ; constituent notamment des circonstances aggravantes la violation des prescriptions susmentionnées par cupidité, les cas de récidive et l'établissement, par le mandataire professionnellement qualifié, d'une attestation, au sens de l'art. 7 LCI, non conforme à la réalité (art. 137 al. 3 LCI).

12.2 Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. La quotité de la sanction administrative doit ainsi être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/174/2023 du 28 février 2023 consid. 2.1.3 et les arrêts cités).

En vertu de l’art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG – E 4 05), les dispositions de la partie générale du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s’appliquent à titre de droit cantonal supplétif. On doit cependant réserver celles qui concernent exclusivement le juge pénal (ATA/440/2019 du 16 avril 2019 ; ATA/19/2018 du 9 janvier 2018). Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence. Selon la jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi (ATA/174/2023 précité consid. 2.1.4 et les arrêts cités).

L’autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d’une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine), soit tenir compte de la culpabilité de l’auteur et prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/174/2023 précité consid. 2.1.5 et les arrêts cités).

12.3 Selon l'art. 13 CP, quiconque agit sous l'influence d'une appréciation erronée des faits est jugé d'après cette appréciation si elle lui est favorable (al. 1). Quiconque pouvait éviter l'erreur en usant des précautions voulues est punissable pour négligence si la loi réprime son acte comme infraction par négligence (al. 2). Agit sous l'emprise d'une erreur sur les faits celui qui n'a pas connaissance ou qui se base sur une appréciation erronée d'un élément constitutif d'une infraction pénale (ATF 129 IV 238 consid. 3.1 p. 240). L'erreur ne peut conduire à un acquittement que si elle est excusable (Michel DUPUIS/Bernard GELLER/Gilles MONNIER/ Laurent MOREILLON/Christophe PIGUET/Christian BETTEX/Daniel STOLL [éds], Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., n. 18 ad art. 13).

12.4 Selon l’art. 21 CP, intitulé « erreur sur l’illicéité », quiconque ne sait ni ne peut savoir au moment d'agir que son comportement est illicite n'agit pas de manière coupable. Le juge atténue la peine si l'erreur était évitable. Cette disposition implique que l'auteur ait cru à tort que son comportement était licite parce qu'il ignorait que l'acte qu'il commettait était interdit ou punissable et, en outre, qu'il avait eu des raisons suffisantes de se croire en droit d'agir. La réglementation de l'erreur sur l’illicéité est stricte. Elle repose sur l'idée que le sujet de droit doit faire l'effort d'acquérir la connaissance des lois et que son ignorance ne l'absout que dans des circonstances particulières (ATF 129 IV 238 consid. 3.1). Selon la jurisprudence, cette erreur est admise à la double condition que l'auteur a agi en se croyant être en droit de le faire et qu'il avait des « raisons suffisantes » de se tromper. Pour exclure l'erreur, il suffit que l'auteur ait eu le sentiment de faire quelque chose de contraire à ce qui se doit (ATF 104 IV 217 consid. 2) ou qu'il eût dû avoir ce sentiment. Il en va de même s'il a été expressément informé de la situation juridique par l'autorité compétente ou qu'il en a éludé les prescriptions. Lorsque le doute est permis quant à la légalité du comportement, l'auteur doit, dans la règle, s'informer de manière plus précise auprès de l'autorité compétente (ATF 129 IV 6 consid. 4.1 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 6A.54/2006 du 13 février 2007).

12.5 Le département jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour fixer la quotité de l’amende. La chambre de céans ne le censure qu’en cas d’excès ou d’abus. Sont pris en considération la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises dans le respect du principe de proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst. ; ATA/174/2023 du précité consid. 2.1.8 et les arrêts cités).

Doivent être notamment prises en compte au titre de circonstances aggravantes la qualité de mandataire professionnellement qualifié ainsi que celle de professionnel de l'immobilier des recourants (arrêt du Tribunal fédéral 1C_209/2020 du 16 octobre 2020 consid. 2.3.2 ; ATA/706/2022 du 5 juillet 2022 consid. 5 et les références citées, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_468/2022 du 21 avril 2023), le fait de mettre l'autorité devant le fait accompli (ATA/174/2023 précité consid. 2.2.1 et les références citées), le fait d’avoir agi par cupidité, la récidive ainsi que le nombre élevé ou la proportion importante des appartements ou immeubles concernés par la violation de la LDTR. Au titre de circonstances atténuantes, doivent être prises en compte notamment l’absence de volonté délictuelle, une violation de la LDTR sur un appartement ou un immeuble isolé seulement et le fait qu’une réaffectation en logement soit aisée. Il doit être tenu compte de la capacité financière de la personne sanctionnée (ATA/174/2023 précité consid. 2.1.9 et les références citées).

Si les antécédents constituent une circonstance aggravante, l’absence d’antécédents est une circonstance neutre qui n’a pas l’effet de minorer la sanction (ATA/174/2023 précité consid. 2.2.2)

12.6 Une décision viole le principe de l’égalité de traitement garanti par l’art. 8 Cst. lorsqu’elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 145 I 73 consid. 5.1 ; 142 I 195 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_231/2021 du 3 mai 2021 consid. 5.1 ; 2C_538/2020 du 1er décembre 2020 consid. 3.2).

12.7 En l'espèce, les intimés ont exécuté les travaux en cause sans être au bénéfice d'une autorisation, alors que ceux-ci étaient assujettis à la LCI et à la LDTR. Un tel comportement, contraire aux art. 1 al. 1 let. b LCI et 9 LDTR, constitue une infraction réprimée par les art. 137 al. 1 let. a LCI et 44 al. 1 LDTR et peut donc donner lieu au prononcé d'une amende.

Les intimés ne sauraient raisonnablement se prévaloir du fait qu'ils pouvaient, sans demander une autorisation, exécuter les travaux en cause, dans la mesure où, selon leur propre appréciation, il s'agissait de simples travaux d'entretien non soumis à la LDTR. La régie qui les représente ne pouvait ignorer, en tant que professionnelle de l'immobilier, que la distinction entre travaux d'entretien et travaux de transformation était et est toujours délicate à opérer, ni que l'autorité intimée pouvait appliquer un blocage rétroactif des loyers, découlant de la loi et prévu expressément par la jurisprudence depuis l'ATA/774/1999 du 21 décembre 1999 à tous le moins. Dès lors, elle aurait dû prendre renseignement auprès du département, ce d'autant plus que la nature des travaux, leur ampleur et leurs coûts, pour la plupart probablement devisés, ne permettaient de toute évidence pas de retenir qu'il se serait agi de simples travaux d'entretien non soumis à autorisation. En usant des précautions voulues, soit en se renseignant simplement auprès du département, elle aurait pu éviter de commettre les infractions reprochées. Dès lors, son erreur était manifestement évitable, même à considérer qu'elle était persuadée que les travaux n'étaient pas soumis à autorisation. Au vu de ce qui précède, les intimés ont, à tout le moins, agi par négligence et ont ainsi commis une faute. On ne saurait retenir qu'ils ont agi en fonction d'une appréciation erronée des faits. Une erreur sur l'illicéité est tout autant exclue.

L’amende, qui inclut l'infraction à la LCI et à la LDTR, est en conséquence fondée dans son principe.

12.8 En ce qui concerne son montant, l’autorité l’a arrêté à CHF 3'000.-.

Il faut concéder que la décision de l'autorité ne mentionne pas les éléments qui ont été pris en compte dans la fixation du montant dans l'amende, ni a fortiori comment ils ont été pondérés, ce qui est regrettable, une motivation permettant d'apprécier au mieux le raisonnement du département.

Il peut être retenu comme circonstances aggravantes le fait que les intimés ont perçu des loyers contraires à la LDTR, la différence entre le montant du loyer pratiqué et celui autorisé, de l’ordre de 53 %, correspondant par ailleurs, pour la période de contrôle, à plusieurs dizaines de milliers de francs, le fait qu'ils étaient assistés d'une régie, versée dans l'immobilier, et qu’ils ont mis l'autorité devant le fait accompli.

À cela doit s'ajouter le fait que pendant douze années au moins, de 2004 à 2016, seuls des travaux d'entretien pour un montant de CHF 3’107.- ont été exécutés, ce qui est insuffisant.

Les intimés ont ainsi commis une infraction objectivement grave.

Aux circonstances aggravantes précitées s'opposent les circonstances atténuantes dont ils se prévalent , en particulier le fait que la violation de la LDTR n'a porté que sur un appartement, qu'ils ont déposé une demande d'autorisation pour régulariser la situation, qu'ils ont pleinement collaboré après l'ouverture de la procédure administrative et répondu à pleine satisfaction et dans les meilleurs délais aux demandes du département et que les travaux se sont révélés conformes aux prescriptions légales. En revanche, contrairement à ce qu'ils prétendent, l'absence d'antécédents n'est pas une circonstance atténuante, mais une circonstance neutre.

Certaines de ces circonstances doivent être relativisées. En effet, le dépôt d'une demande d'autorisation de construire à la suite d'un ordre du département est une obligation et non une faculté laissée au bon vouloir des administrés. De plus, une bonne collaboration est attendue d'eux, dans la mesure où elle est nécessaire au traitement efficace d'un dossier.

Contrairement à ce que soutiennent les intimés, des amendes bien plus élevées que CHF 1'000.- ont été prononcées. Ainsi, le Tribunal fédéral a confirmé une amende de CHF 10'000.- par arrêt du 3 février 2023 (1C_447/2022) contre un propriétaire ayant rénové sans autorisation un appartement de son immeuble, une amende de CHF 100'000.- le 7 mars 2023 (1C_264/2022) contre un propriétaire ayant rénové plusieurs appartements sans APA retenant la cupidité et la récidive, et pour lesquels il a dû rembourser CHF 212'501.- aux locataires, et une amende de CHF 15'000.- le 21 avril 2023 (1C_468/2022) contre l’architecte d’un propriétaire pour les travaux effectués sans autorisation retenant comme critères notamment sa qualité de professionnel du domaine et de récidiviste.

Le montant de CHF 3'000.- apparaît ainsi modeste et respecte en conséquence le principe de la proportionnalité.

Au vu de tout ce qui précède, le département n'a pas abusé de son large pouvoir d'appréciation en fixant l'amende à CHF 3'000.-, soit à 15% du maximum prévu de CHF 20'000.- (art. 137 al. 2 LCI), les intimés n'exposant au demeurant pas rencontrer de difficultés financières.

En conséquence, le recours du département sera admis, le jugement du TAPI annulé et les décisions du département rétablies.

13.         Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge solidaire des intimés, qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 23 août 2023 par le département du territoire - OAC contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 juin 2023 ;

au fond :

l’admet ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 juin 2023 ;

rétablit les décisions du département des 16 novembre et 2 décembre 2022 ;

met à la charge solidaire de A______, B______ et C______ un émolument de CHF 2'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les 30 jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt au département du territoire - OAC, à E______ SA, mandataire des intimés, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Cédric-Laurent MICHEL, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Valérie LAUBER, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :