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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2856/2013

ATA/882/2014 du 11.11.2014 sur JTAPI/1310/2013 ( PE ) , ADMIS

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR ; CAS DE RIGUEUR ; DÉCISION DE RENVOI ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; LIMITATION DU NOMBRE DES ÉTRANGERS ; POUVOIR D'APPRÉCIATION ; POUVOIR D'EXAMEN ; REGROUPEMENT FAMILIAL ; RESPECT DE LA VIE FAMILIALE
Normes : Cst.29.al.2 ; CEDH.6.al.1 ; CEDH.8.al.1.2 ; OASA.31.al.1 ; LETR.30.al.1.let.b
Résumé : L'art. 8 CEDH protège le droit au respect de la vie privée et familiale qui peut être invoqué lorsqu'une mesure étatique d'éloignement aboutit à la séparation des membres d'une famille. Les relations qu'il vise sont avant tout celles qui existent entre époux, puis entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun. S'agissant des relations entre proches parents, comme celles entre frères et soeurs, sa protection suppose qu'un lien de dépendance particulier lie l'étranger majeur qui requiert la délivrance de l'autorisation de séjour et le parent ayant le droit de résider en Suisse. La disposition peut aussi être invoquée lorsque l'état de dépendance tient non pas dans la personne de l'étranger qui sollicite le droit à une autorisation de séjour, mais dans celle de celui qui bénéficie du droit de présence assuré en Suisse. Si le départ de ce membre de la famille ne peut d'emblée être exigé sans autre, les difficultés qui lui sont liées doivent être intégrées dans la pesée des intérêts destinée à apprécier la proportionnalité du refus de l'autorisation de séjour requise. Une tante qui s'occupe de sa nièce abandonnée par sa mère biologique dès sa naissance peut se prévaloir de l'art. 8 CEDH pour remettre en cause son renvoi de Suisse, du moment qu'elle voue à celle-ci une attention et des soins indispensables à sa résilience et compte tenu des liens affectifs particulièrement étroits qui les unissent, comparables à une relation entre une mère et sa fille.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2856/2013-PE ATA/882/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 11 novembre 2014

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Virginie Jordan, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 décembre 2013 (JTAPI/1310/2013)


EN FAIT

1) Madame A______, née le______ 1978 au Kosovo, pays dont elle est originaire, est arrivée en Suisse, selon ses déclarations à l'office cantonal de la population, devenu l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), le 30 juin 2006.

Elle vivait avec Monsieur B_____ , son frère, ressortissant suisse, et la fille mineure de celui-ci, Mademoiselle C______ , également de nationalité suisse, née le ______ 1996 et abandonnée par sa mère biologique dès sa naissance au Kosovo. Elle s'était déjà auparavant occupée de sa nièce au Kosovo, en l'absence de son père.

2) a. Le 29 mars 2012, Mme A______ a déposé auprès de l'OCPM une demande d'autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité.

Elle travaillait comme femme de ménage dans une entreprise installée à Genève à raison d'environ quinze heures par semaine pour un salaire mensuel brut de CHF 2'000.-. Son frère exerçait le métier de déménageur à plein temps.

b. À l'appui de sa demande, elle a produit des courriers de soutien de son frère et de sa nièce, de Monsieur D______, de Madame E______, enseignante de C______ durant l'année scolaire 2006-2007, et de Monsieur F______, assistant social.

Selon ces courriers, Mme A______ avait quitté le Kosovo et était venue refaire sa vie en Suisse afin de prendre soin de sa nièce, de laquelle elle n'avait pas été séparée plus d'un mois durant quinze ans. Elle n'imaginait pas vivre loin de sa nièce, sans qui sa vie n'avait aucun sens. Son frère et elles étaient les personnes de référence et de contact pour C______ auprès de l'école où elle l'accompagnait et venait la rechercher tous les jours. Elle était devenue une « maman de substitution » pour sa nièce. Elle était une personne honnête, motivée, sincère, travailleuse qui s'était adaptée aux coutumes suisses.

3) Le 8 avril 2012, la police judiciaire genevoise a établi à l'intention du Ministère public un rapport suite à une dénonciation déposée par Madame G______, épouse de M. B______, contre sa belle-soeur pour violation des dispositions légales sur le séjour des étrangers.

4) Le 2 juillet 2012, l'OCPM a octroyé à Mme A______ une autorisation provisoire de prise d'emploi.

5) Le 20 mars 2013, Mme A______ a été entendue par l'OCPM dans le cadre de l'examen de ses conditions de séjour.

Elle était entrée en Suisse deux semaines après l'arrivée de sa nièce C______, à la demande de son frère, afin de s'occuper de celle-ci, et n'était plus retournée au Kosovo.

Elle avait accompli une scolarité primaire et secondaire dans son pays d'origine, s'était occupée de sa mère handicapée, puis de C______ à sa naissance. Elle n'avait jamais travaillé au Kosovo. À Genève, elle faisait des nettoyages de fin de chantier pour le compte de l'entreprise H______ qui l'avait déclarée auprès d'une caisse de compensation et travaillait comme femme de ménage dans une famille. Elle avait des contacts téléphoniques hebdomadaires avec son père, son autre frère, sa soeur et un oncle restés au Kosovo. Sa famille ne pouvait pas l'aider financièrement. Elle était très bien intégrée en Suisse et s'était familiarisée aux us et coutumes de ce pays. Tous ses amis se trouvaient en Suisse. Elle avait appris le français auprès de sa nièce et de ses connaissances.

6) Après son audition par l'OCPM, Mme A______ a produit de nouveaux courriers de soutien émanant de Madame I______, ex-épouse de son frère, de Monsieur J______, concierge de l'immeuble dans lequel elle habitait et de Madame K______.

D'après ces écrits, Mme A______ avait tout quitté, famille et amis, pour aider son frère et sa nièce, laquelle avait beaucoup de peine à s'adapter à son nouvel environnement en Suisse. Elle avait vite appris les bases du français et avait du plaisir à communiquer dans cette langue avec les parents des enfants qui fréquentaient la même école que « sa fille ». Elle était une personne de confiance qui avait gagné en expérience dans ses relations avec son entourage. Elle était impliquée dans la vie genevoise depuis son arrivée en 2006, continuait à s'intégrer en Suisse et avait un travail ainsi qu'une situation sociale et financière stable.

7) Le 25 mars 2013, l'office des poursuites a attesté que Mme A______ ne faisait l'objet d'aucune poursuite ni d'aucun acte de défaut de biens.

8) Le 9 avril 2013, l'Hospice général a indiqué que Mme A______ ne bénéficiait pas de prestations d'aide sociale.

9) Par décision du 31 juillet 2013, l'OCPM a refusé de soumettre avec un préavis favorable à l'office fédéral des migrations (ci-après : l'ODM) le dossier de Mme A______ pour l'octroi d'une autorisation de séjour, a prononcé son renvoi de Suisse et lui a fixé un délai au 30 septembre 2013 pour quitter le territoire.

La durée de son séjour était à relativiser par rapport aux nombreuses années passées dans son pays d'origine. Elle était âgée de 28 ans au moment de son arrivée en Suisse et avait passé toute sa jeunesse et son adolescence au Kosovo. Son intégration professionnelle et sociale n'était pas marquée. Elle n'avait pas créé des attaches profondes et durables avec la Suisse, n'avait pas acquis des connaissances professionnelles ou des qualifications spécifiques dont elle ne pouvait faire usage au Kosovo. Les liens affectifs avec sa nièce ne constituaient pas des éléments déterminants susceptibles de justifier une suite favorable à sa requête.

L'exécution de son renvoi était possible, licite et pouvait être raisonnablement exigible.

10) a. Par acte expédié le 6 septembre 2013, Mme A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI), concluant principalement à son annulation et à la délivrance d'un permis pour cas de rigueur.

Elle se trouvait en Suisse depuis plus de dix ans et n'avait plus aucune attache avec le Kosovo. Elle était intégrée à Genève où se trouvaient toutes ses relations sociales. Elle avait été autorisée à résider et à travailler provisoirement en Suisse depuis 2012. C______ la considérait comme sa « mère », une séparation avec elle n'était pas envisageable.

b. À l'appui de son recours, Mme A______ a produit de nouveaux courriers de soutien de sa nièce et son frère, de Madame L______, une voisine âgée de 86 ans, et de Madame M ______.

Selon ces courriers, Mme A______ avait pris la place de la mère biologique de C______ depuis sa naissance. Elle l'avait élevée, avait tout partagé avec elle et s'était sacrifiée pour elle. Elle l'aidait beaucoup et lui apportait énormément pour l'école et dans sa vie sentimentale. Elle avait tout quitté dans son pays natal, avait pris des risques pour continuer à élever sa nièce et être auprès d'elle. C______  avait toujours compté sur sa tante et la considérait comme sa « mère ». En pleine adolescence, elle avait besoin de sa tante pour franchir cette période importante de sa vie. Mme A______, sa nièce et son frère formaient une famille grâce aux liens qui les unissaient. Son renvoi au Kosovo menaçait l'équilibre et l'avenir de C______.

Elle était bien intégrée en Suisse, était toujours prête à rendre service, était appréciée de ses voisins et parlait le français. Elle n'avait pas eu recours à l'aide sociale.

11) Le 7 novembre 2013, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

S'occuper d'un enfant ne constituait pas un motif pertinent susceptible de justifier la venue en Suisse pour des raisons humanitaires. Le cas d'extrême gravité devait être réalisé dans la personne du requérant et non d'un tiers. Il ne s'étendait pas au regroupement familial non couvert par la loi. Il ne pouvait pas être invoqué pour une tante souhaitant vivre en Suisse aux côtés de sa nièce. Aucun rapport de dépendance particulière n'existait entre elle et sa nièce, en raison notamment d'un handicap ou d'une maladie grave. Ni son âge, ni la durée de son séjour en Suisse, voire les inconvénients d'ordre social et professionnel au Kosovo ne constituaient des circonstances particulières justifiant une autorisation de séjour dérogeant aux mesures de limitation.

12) Le 3 décembre 2013, le TAPI a auditionné les parties et M. B______ au cours d'une audience de comparution personnelle et d'enquêtes.

a. Mme A______ maintenait les termes de son recours. Sa nièce était en deuxième année à l'école des arts appliqués à Genève. Après le mariage de son frère, elle avait cohabité avec lui, son épouse et C______ dans un même appartement. Mme G______ ne s'occupait pas de C______. Suite à un accident, son frère avait été licencié par son employeur et percevait désormais des indemnités de l'assurance-chômage. Elle avait entrepris les démarches auprès de l'OCPM suite à la dénonciation de sa belle-soeur. Elle travaillait comme nettoyeuse à 50 % et gagnait CHF 2'000.- bruts par mois. Même si son frère s'occupait de sa fille, celle-ci avait besoin d'elle. C______ était venue en Suisse au moment où son père avait obtenu un titre de séjour.

b. D'après la représentante de l'OCPM, l'office maintenait sa décision.

c. Selon M. B______, C______ était arrivée en Suisse en 2005, à l'époque où il était marié avec Mme I______ qui était d'accord avec ce projet. Sa fille s'était installée définitivement en Suisse en 2006. Sa soeur était arrivée juste après elle. Ils avaient habité, sa soeur, son épouse, sa fille et lui-même pendant environ deux ans sous le même toit. Mme G______ n'avait jamais aimé sa fille. Il travaillait sur appel et percevait des indemnités journalières de l'assurance-chômage depuis janvier 2013. Il avait gardé des séquelles de son accident, mais possédait une pleine capacité de travail. Il s'occupait de sa fille et leurs relations étaient bonnes. Il retournait au Kosovo avec elle une fois par année pour les vacances, sa soeur restant à Genève. C______ n'avait aucun souci de santé, suivait une scolarité normale et était pleine de projets pour son avenir. Sa soeur était comme une « mère » pour elle. Grâce à elle, sa fille allait bien. Sa soeur était bien intégrée en Suisse, il l'avait fait venir uniquement pour s'occuper de C______.

13) Par jugement du 3 décembre 2013, le TAPI a rejeté le recours de Mme A______.

Elle ne satisfaisait pas aux conditions requises pour la reconnaissance d'un cas de rigueur. Son intégration socio-professionnelle n'était pas particulièrement réussie. Elle n'avait pas acquis des connaissances professionnelles ou des qualifications spécifiques ne pouvant pas être mises en pratique au Kosovo. Son intégration sociale ne dépassait pas ce qui était ordinairement attendu après une durée de séjour comparable à la sienne. Son comportement n'était pas irréprochable, puisqu'elle avait contrevenu aux prescriptions de la police des étrangers en séjournant clandestinement en Suisse. De retour au Kosovo, ses difficultés d'ordre financier ou personnel n'étaient pas plus graves que celles des autres compatriotes contraints de retourner vivre dans leurs pays d'origine.

Elle avait certes tissé des liens très forts avec C______, mais elle n'était que la tante de celle-ci. Sa nièce vivait depuis huit ans auprès de son père qui prenait soin d'elle. Elle ne faisait pas partie du noyau familial de M. B______. Aucun lien de dépendance particulier entre elle et sa nièce en raison d'un handicap ou d'une maladie grave n'existait. Les relations entre elle et C______ pouvaient être maintenues à travers des visites touristiques réciproques.

L'exécution de son renvoi vers le Kosovo était possible, licite et pouvait être raisonnablement exigible.

14) Le 19 décembre 2013, Mme A______ a été mise au bénéfice de l'assistance juridique.

15) a. Par acte expédié le 17 janvier 2014, Mme A______ a recouru contre le jugement du TAPI auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant préalablement à une audience de comparution personnelle des parties, à l'audition de C______, à l'octroi d'un délai pour présenter une liste de témoins et à ce qu'elle soit autorisée à compléter ses écritures. Sur le fond, elle a conclu à l'annulation de la décision et à l'octroi d'un « permis de rigueur » et, subsidiairement, à ce que la cause soit renvoyée au TAPI pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Le TAPI avait violé son droit d'être entendu en refusant d'ordonner l'audition de C______.

Elle apportait à C______ la figure maternelle qui lui manquait pour son éducation. Le lien qui l'unissait à sa nièce se confondait en réalité avec une relation entre une mère et sa fille. C______ avait besoin d'une figure maternelle pour son équilibre. La communauté de vie entre elle, son frère et sa nièce présentait une stabilité et une intensité suffisante pour pouvoir être assimilée à une famille. Elle participait financièrement aux dépenses de la famille A______ grâce à son revenu. Elle était en bonne santé. Elle n'envisageait pas de retourner au Kosovo, son noyau familial se trouvant désormais en Suisse.

b. À l'appui de son recours, elle a produit de nouveaux courriers de soutien de sa nièce et de la doctoresse N______, pédiatre de C______ .

D'après ces écrits, Mme A______ était la figure maternelle indispensable au bien-être de C______. Elle jouait un rôle essentiel dans son éducation et son départ était une grande perte pour sa nièce. C______ avait besoin de sa tante et n'imaginait pas se séparer d'elle. Elle avait passé son enfance sans connaître sa mère biologique. Elle avait eu tout l'amour nécessaire pour son développement harmonieux auprès de sa tante.

16) Le 23 janvier 2014, le TAPI a transmis son dossier sans formuler d'observations.

17) Le 20 février 2014, l'OCPM a conclu au rejet du recours, reprenant en substance ses précédents arguments.

18) Le 25 avril 2014, le Ministère public a classé la procédure pénale ouverte contre Mme A______ pour séjour illégal en Suisse et exercice d'une activité lucrative sans être au bénéfice d'une autorisation de travail.

Elle était venue en Suisse pour aider son frère à élever sa fille C______ . Les revenus réalisés comme femme de ménage étaient dévolus à financer ses besoins de première nécessité et ceux de sa nièce. Elle avait certes séjourné et travaillé illicitement en Suisse, mais sa culpabilité et les conséquences de ses actes étaient de peu d'importance et permettaient de renoncer à toute sanction pénale.

19) Le 9 mai 2014, Mme A______ a requis de l'OCPM de reconsidérer sa décision du 31 juillet 2013.

Elle considérait C______ comme sa propre « fille » et souhaitait continuer à s'occuper d'elle. Sa nièce avait besoin de cette présence « maternelle ». Elle était autonome financièrement.

20) Le 15 mai 2014, l'OCPM a rendu une décision de non-entrée en matière suite à la demande de Mme A______.

Celle-ci n'avait apporté aucun fait nouveau susceptible de modifier sa décision.

21) Le 30 juin 2014, le juge délégué a auditionné les parties et C______ .

a. Mme A______ a confirmé les termes de son recours. Une entreprise avait promis de l'engager à condition de présenter une autorisation de séjour valable.

b. La représentante de l'OCPM a persisté dans les conclusions de l'office.

c. Selon C______ , elle était promue en troisième année de l'école des arts appliqués. Elle avait toujours grandi avec sa tante et la considérait comme sa propre « mère ». Elle avait vécu avec elle au Kosovo. Elle était venue à Genève au début de sa quatrième année scolaire et Mme A______ était arrivée quinze jours plus tard. Son père venait la voir au Kosovo pendant les vacances. À Genève, ils avaient tous habité ensemble. Elle avait eu très peu de contacts avec sa mère biologique. Celle-ci habitait au Kosovo et ne s'était pas occupée d'elle. Elle l'avait abandonnée dès sa naissance. Elle l'avait revue, mais avait eu l'impression de la déranger dans sa vie. Il n'y avait aucun sentiment entre elles. Elle avait préféré arrêter toute relation. Elle avait habité seule avec sa tante pendant plusieurs années au Kosovo et avait toujours besoin d'elle, même à sa majorité. Sa tante était son référent féminin avec qui elle partageait des confidences. Celle-ci était très bien intégrée à Genève, connaissait la ville, y avait des amis et se débrouillait bien en français. Elle ne savait pas à quoi s'attendre si sa tante devait être renvoyée au Kosovo.

d. Le juge délégué a fixé à Mme A______ un délai de trente jours pour produire des écritures après enquêtes.

22) Le 29 septembre 2014, Mme A______ a persisté dans ses conclusions.

Une entreprise s'était engagée à l'employer pour un salaire mensuel brut de CHF 3'600.- en cas d'obtention d'une autorisation de séjour.

Pour le surplus, elle a repris ses arguments antérieurs.

23) Le 30 septembre 2014, le juge délégué a transmis à l'OCPM les conclusions après enquêtes de Mme A______ et a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Dans un grief de nature formelle, la recourante reproche au TAPI d'avoir violé son droit d'être entendu en refusant d'auditionner C______ et de lui octroyer un délai pour déposer une liste de témoins.

a. Tel que garanti par les art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), qui n'a pas de portée différente dans ce contexte, le droit d'être entendu comprend, notamment, le droit pour l'intéressé de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.2 p. 157 ; 137 I 195 consid. 2.3.1 p. 197 ; 136 I 265 consid. 3.2 p. 272 ; 135 II 286 consid. 5.1 p. 293 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_136/2014 du 22 juillet 2014 consid. 3.1 et 6B_123/2013 du 10 juin 2013 consid. 1.1 ; ATA/702/2014 du 2 septembre 2014).

b. Une décision entreprise pour violation du droit d'être entendu n'est pas nulle, mais annulable (arrêt du Tribunal Fédéral 2P.207/2001 du 12 novembre 2001 consid. 5a). Toutefois, la violation du droit d'être entendu est réparable devant l'instance de recours si celle-ci jouit du même pouvoir d'examen des questions litigieuses que l'autorité intimée (ATF 138 I 97 consid. 4.1.6.1 p. 103 ; 137 I 195 consid. 2.3.2 p. 197 ; 133 I 201 consid. 2.2 p. 204 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_572/2011 du 3 avril 2012 consid. 2.1 ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 8C_104/2010 du 20 septembre 2010 consid. 3.2 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 et 1C_104/2010 du 29 avril 2010 consid. 2.1 ; ATA/724/2014 du 9 septembre 2014 ; ATA/572/2014 du 29 juillet 2014) et si l'examen de ces questions ne relève pas de l'opportunité, car l'autorité de recours ne peut alors substituer son pouvoir d'examen à celui de l'autorité de première instance (arrêt du Tribunal fédéral 2P.30/2003 du 2 juin 2003 consid. 2.4 ; ATA/73/2005 du 15 février 2005 ; ATA/703/2002 du 19 novembre 2002 ; ATA/609/2001du 2 octobre 2001 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 2011, p. 323 n. 2.2.7.4).

c. En l'espèce, la chambre de céans dispose d'un même pouvoir d'examen que le TAPI en fait et en droit. La recourante a réitéré devant elle la demande d'audition de C______ à laquelle celle-ci a procédé au cours d'une audience contradictoire de comparution personnelle durant laquelle la recourante a eu l'occasion non seulement de s'exprimer et de poser des questions au témoin, mais encore de produire ses écritures après enquêtes.

Au vu de ce qui précède, pour autant qu'il y ait eu violation du droit d'être entendu de la recourante, celle-ci a été réparée par-devant la chambre de céans. Son grief sera ainsi écarté.

d. Par ailleurs, la chambre de céans ne fera pas droit à la requête de la recourante de déposer une liste de témoins dont l'audition, qui, du reste, n'a pas été formellement sollicitée, n'est pas en mesure d'apporter des éléments supplémentaires pour juger le litige, dès lors que la procédure contient plusieurs courriers de soutien qui la renseignent utilement.

3) Le litige porte sur le refus de l'OCPM de transmettre avec un préavis favorable à l'ODM le dossier de la recourante en vue de l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité.

4) Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, celle-ci ne connaît pas de l'opportunité d'une décision prise en matière de police des étrangers, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario).

5) La recourante reproche au TAPI d'avoir violé les dispositions applicables à l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité.

6) a. Aux termes de l'art. 30 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20), il est possible de déroger aux conditions d'admission d'un étranger en Suisse pour tenir compte d'un cas individuel d'extrême gravité.

b. À teneur de l'art. 31 al. 1 de l'ordonnance fédérale relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA -RS 142.201), afin d'apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse par le requérant (let. b), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière ainsi que de la volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l'état de santé (let. f) et des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g).

Cette disposition comprend une liste exemplative de critères à prendre en considération pour la reconnaissance de cas individuels d'une extrême gravité.

c. La jurisprudence développée au sujet des cas de rigueur selon le droit en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007 (art. 13f de l'ancienne ordonnance sur les étrangers [aOLE]) est toujours d'actualité pour les cas d'extrême gravité qui leur ont succédé (ATF 136 I 254 consid. 5.3.1 p. 262). Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEtr et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4 p. 207; ATA/770/2014 du 30 septembre 2014 ; ATA/703/2014 du 2 septembre 2014 ; ATA/531/2010 du 4 avril 2010). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 137 II 345 consid. 3.2.1 p. 348).

d. Pour admettre l'existence d'un cas d'extrême gravité, il est nécessaire que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela signifie que ses conditions de vie et d'existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue, c'est-à-dire que le refus de soustraire l'intéressé à la règlementation ordinaire d'admission comporte pour lui de graves conséquences. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il y soit bien intégré socialement et professionnellement et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité ; il faut encore que sa relation avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que l'intéressé a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 124 II 110 consid. 3 p. 113 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-6628/2007 du 23 juillet 2009 consid. 5.2 ; ATA/648/2009 du 8 décembre 2009 ; Alain WURZBURGER, La jurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de police des étrangers, RDAF 1997 I 267 ss). Son intégration professionnelle doit en outre être exceptionnelle ; le requérant possède des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ; ou alors son ascension professionnelle est si remarquable qu'elle justifierait une exception aux mesures de limitation (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; ATA/770/2014 précité ; ATA/703/2014 précité ; ATA/36/2013 du 22 janvier 2013 ; ATA/720/2011 du 22 novembre 2011 ; ATA/639/2011 du 11 octobre 2011 ; ATA/774/2010 du 9 novembre 2010).

7) En l'espèce, il est constant que la situation de la recourante ne satisfait pas aux exigences jurisprudentielles en matière de dérogation aux mesures de limitation. La durée de son séjour de huit ans en Suisse est relativement courte et la profession de femme de ménage ou de nettoyeuse industrielle qu'elle exerce n'atteint pas un niveau de qualification exceptionnelle. Son intégration sociale liée à l'apprentissage du français en autodidacte ou aux bonnes relations qu'elle entretient avec son voisinage, ses amis et ses connaissances n'est pas non plus d'une intensité telle qu'il ne pourrait pas être exigé qu'elle retourne vivre dans son pays d'origine, où elle a passé plus de vingt-huit ans.

Par ailleurs, la recourante n'allègue pas avoir acquis des connaissances spécifiques dont elle ne pourrait faire usage qu'en Suisse. Elle affirme en outre être en bonne santé. Le fait d'être exposé à des dificultés d'ordre financier ou personnel de retour au Kosovo n'est pas non plus suffisant pour lui reconnaître un cas individuel d'extrême gravité.

Sous l'angle de l'application de l'art. 31 OASA, c'est par conséquent à bon droit que le TAPI a confirmé la décision de l'OCPM refusant de soumettre à l'ODM avec un préavis favorable la demande de la recourante d'une autorisation de séjour pour cas individuel d'extrême gravité.

Le grief sera ainsi écarté.

8) La recourante invoque également une violation du droit au regroupement familial garanti par l'art. 8 CEDH.

a. L'art. 8 CEDH protège le droit au respect de la vie privée et familiale. Il permet de prétendre à la délivrance d'une autorisation de séjour et de remettre ainsi en cause le renvoi dans son principe. En effet, un étranger peut, selon les circonstances, se prévaloir du droit au respect de sa vie privée et familiale pour s'opposer à une éventuelle séparation de sa famille. Encore faut-il, pour pouvoir invoquer cette disposition, que la relation entre l'étranger et la personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse soit étroite et effective (ATF 130 II 281 consid. 3.1 p. 285 ; 129 II 193 consid. 5.3.1 p. 211 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_338/2008 du 22 août 2008 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral E-3377/2011 du 23 février 2012 consid. 3.3 ; ATA/556/2014 du 17 juillet 2014). Ce qui est déterminant, sous l'angle de l'art. 8 § 1 CEDH, est la réalité et le caractère effectif des liens qu'un étranger a tissé avec le membre de sa famille qui bénéficie d'un droit de résider en Suisse (ATF 135 I 143 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_644/2012 du 17 août 2012 consid. 2.4) au moment où le droit est invoqué, quand bien même, par définition, des liens familiaux particulièrement forts impliquent un rapport humain d'une certaine intensité, qui ne peut s'épanouir que par l'écoulement du temps (ATF 140 I 145 consid. 4.2 p. 149).

b. Les relations visées par l'art. 8 CEDH sont avant tout celles qui existent entre époux ainsi que les relations entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (ATF 127 II 60 consid. 1d/aa p. 65 ; ATF 120 Ib 257 consid. 1d p. 260 ss ; ATA/209/2011 du 3 mai 2011). S'agissant d'autres relations entre proches parents, comme celles entre frères et soeurs, la protection de l'art. 8 CEDH suppose qu'un lien de dépendance particulier lie l'étranger majeur qui requiert la délivrance de l'autorisation de séjour et le parent ayant le droit de résider en Suisse en raison, par exemple, d'un handicap - physique ou mental - ou d'une maladie grave. Tel est le cas en présence d'un besoin d'une attention et de soins que seuls les proches parents sont en mesure de prodiguer. Cette règle vaut sans conteste lorsque la personne dépendante est l'étranger qui invoque l'art. 8 CEDH (ATF 129 II 11 consid. 2 p. 13 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_537/2012 du 8 juin 2012 consid. 3.2 ; 2D_139/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.3 ; ATA/720/2014 du 9 septembre 2014).

La jurisprudence est en revanche incertaine sur la possibilité d'invoquer cette disposition conventionnelle lorsque l'état de dépendance tient non pas dans la personne de l'étranger qui sollicite le droit à une autorisation de séjour, mais dans celle de celui qui bénéficie du droit de présence assuré en Suisse. Alors qu'il avait parfois admis cette possibilité lors de l'examen de l'art. 8 § 1 CEDH en lien avec les conditions d'obtention d'un permis humanitaire (arrêts du Tribunal fédéral 2A.76/2007 du 12 juin 2007 consid. 5.1 ; 2A.627/2006 du 28 novembre 2006 consid. 4.2.1 ; 2A.92/2007 du 21 juin 2006 consid. 4.3), le Tribunal fédéral a tranché dans le sens contraire, sans se référer à ces précédents dans une autre affaire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_451/2007 du 22 janvier 2008 consid. 2.2).

c. Le droit au respect de la vie familiale consacré à l'art. 8 CEDH ne peut être invoqué que si une mesure étatique d'éloignement aboutit à la séparation des membres d'une famille (arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme Moustaquin c/ Belgique du 18 février 1991 § 35). Il n'y a pas de violation du droit au respect de la vie familiale si l'on peut attendre des membres de la famille qu'ils réalisent leur vie de famille à l'étranger ; l'art. 8 CEDH n'est pas a priori violé si le membre de la famille jouissant d'un droit de présence en Suisse peut quitter ce pays sans difficultés avec l'étranger auquel a été refusée une autorisation de séjour. En revanche, si le départ du membre de la famille pouvant rester en Suisse ne peut d'emblée être exigé sans autre, il convient de procéder à la pesée des intérêts prévue par l'art. 8 § 2 CEDH (ATF 135 I 153 consid. 2.1 p. 155). Celle-ci suppose de prendre en compte l'ensemble des circonstances et de mettre en balance l'intérêt privé à l'obtention d'un titre de séjour et l'intérêt public à son refus (ATF 122 II 1 consid. 2 p. 6 ; arrêt 2C_2/2009 du 23 avril 2009 consid. 3.1).

En ce qui concerne l'intérêt public, il faut retenir que la Suisse mène une politique restrictive en matière de séjour des étrangers, pour assurer un rapport équilibré entre l'effectif de la population suisse et celui de la population étrangère résidante, ainsi que pour améliorer la situation du marché du travail et assurer un équilibre optimal en matière d'emploi. Ces buts sont légitimes au regard de
l'art. 8 § 2 CEDH (arrêt du Tribunal fédéral 2C_723/2008 du 24 novembre 2008 consid. 4.1). S'agissant de l'intérêt privé, il y a notamment lieu d'examiner si l'on peut exiger des membres de la famille titulaires d'un droit de présence assuré en Suisse qu'ils suivent l'étranger dont l'autorisation de séjour est refusée. Pour trancher cette question, l'autorité ne doit pas statuer en fonction des convenances personnelles des intéressés, mais prendre objectivement en considération leur situation personnelle et l'ensemble des circonstances (ATF 122 II 1 consid. 2 p. 6). Lorsque le départ à l'étranger s'avère possible « sans difficultés », le refus d'une autorisation de séjour ne porte en principe pas atteinte à la vie familiale protégée par l'art. 8 CEDH, puisque celle-ci peut être vécue sans problème à l'étranger ; une pesée complète des intérêts devient ainsi superflue (ATF 122 II 289 consid. 3b p. 297). Toutefois, la question de l'exigibilité du départ à l'étranger ne peut généralement pas être résolue de manière tranchée, par l'affirmative ou la négative. Lorsque, sans être inexigible, le départ ne va pas sans certaines difficultés, celles-ci doivent être intégrées dans la pesée des intérêts destinée à apprécier la proportionnalité du refus de l'autorisation de séjour requise (arrêt du Tribunal fédéral 2A.212/2004 du 10 décembre 2004 consid. 3.2).

d. Une personne possède le droit de résider durablement en Suisse si elle a la nationalité suisse, une autorisation d'établissement ou un droit certain à une autorisation de séjour (ATF 135 I 143 consid. 1.3.1 p. 145 ss ; 130 II 281 consid. 3.1 p. 285 ; 129 II 193 consid. 5.3.1 p. 211 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_19/2014 du 2 octobre 2014 consid. 4 et 2C_537/2012 précité consid. 3.2).

9) a. En l'espèce, le regroupement familial en cause ne concerne pas des parents en ligne directe, mais des parents proches, soit un frère et sa soeur, une tante et sa nièce. À ce titre, la protection de la vie privée et familiale n'est susceptible de s'appliquer qu'en présence d'un lien de dépendance particulier. La recourante soutient qu'en raison des liens qui l'unissent avec sa nièce depuis sa naissance, celle-ci pourrait être gravement perturbée par leur séparation au point que son avenir professionnel et son équilibre psychique seraient compromis. Elle invoque implicitement un lien de dépendance particulier avec sa nièce. L'état de dépendance invoqué tient ainsi non pas dans la personne de la recourante, mais dans celle de sa nièce. Il convient dès lors d'intégrer dans la pesée des intérêts destinée à apprécier la proportionnalité du refus de l'autorisation de séjour requise par la recourante les difficultés auxquelles seraient confrontées C______ obligée de suivre sa tante au Kosovo, notamment en relation avec son développement harmonieux en pleine adolescence ainsi qu'à son avenir social et professionnel.

b. De façon concordante, tous les témoignages versés dans la procédure confirment les liens particuliers qui unissent la recourante à sa nièce. Ils les comparent à une relation entre une mère et sa fille.

Du point de vue affectif, le dossier fait apparaître un lien particulièrement intense entre C______ et sa tante. Dès sa naissance, la recourante s'est occupée de sa nièce et l'a accompagnée depuis plus de dix-sept ans. Elles ne se sont jamais quittées pour une période de plus d'un mois. Depuis l'adolescence de C______ , sa tante est sa confidente, jouant le rôle d'une mère de substitution. Par ailleurs, la recourante s'est investie dans la formation de sa nièce, dès sa tendre enfance en allant la chercher quotidiennement à l'école et, dès son adolescence, en lui prodiguant des conseils quant à son avenir professionnel et à son équilibre sentimental. La chambre de céans, qui a entendu les parties et C______ , a acquis l'intime conviction que, hormis les questions d'ordre biologique, le lien qui unit la recourante à sa nièce relève d'une relation de « mère et fille ».

c. Le TAPI ne conteste pas que la recourante entretient une relation effective particulièrement étroite avec sa nièce. Il considère en revanche que la recourante a tissé des liens très forts avec C______. Cependant, il estime que cette relation ne permet pas à la tante de bénéficier d'un regroupement familial avec sa nièce, le père de C______ étant à même d'assurer seule la prise en charge de sa fille. Cette affirmation doit néanmoins être nuancée.

d. D'après les constatations de la chambre de céans lors de l'audience de comparution personnelle du 30 juin 2014, la relation entre la tante et sa nièce, peut, par analogie, être assimilée à une relation entre une mère et une fille, indispensable à l'équilibre psychique et le développement harmonieux de C______. Le renvoi de la recourante priverait C______ d'une figure maternelle et d'une confidente dont elle a besoin au moment où elle se prépare à entrer dans l'âge adulte. Il romprait l'équilibre dans son évolution alors qu'il lui faut une stabilité affective, sentimentale et financière pour terminer sa formation de styliste à l'école des arts appliqués. Les difficultés qui seraient ainsi liées à l'exigibilité du départ de C______ de Suisse pour suivre sa tante au Kosovo sont, dans le cas d'espèce, valablement opposables à l'intérêt public de politique migratoire susmentionnée que la présence de la recourante en Suisse ne menace pas. Le lien de dépendance particulier entre C______ et sa tante s'exprime ici dans l'attention et les soins que la recourante voue à sa nièce et qui sont indispensables à sa résilience suite à son abandon précoce dès sa naissance par sa mère biologique.

e. Du point de vue économique, il ressort également de la procédure que la recourante contribue aux besoins essentiels d'existence de sa nièce et à l'acquisition de son matériel scolaire, grâce à son travail de femme de ménage et de nettoyeuse industrielle. Ce complément financier est en outre essentiel à l'équilibre économique de ce que plusieurs courriers figurant au dossier qualifient de famille grâce aux liens qui unissent la recourante, son frère et sa nièce.

Au vu de ce qui précède, la recourante peut se prévaloir de l'art. 8 CEDH pour remettre en cause son renvoi de Suisse, étant rappelé que la nièce qui est Suissesse jouit du droit de résider durablement en Suisse et que la jurisprudence en la matière ne cite le handicap physique et mental ainsi que la maladie grave qu'à titre d'exemples de lien de dépendance particulier.

f. Ainsi, compte tenu des liens affectifs particulièrement étroits qui unissent C______ à sa tante, comparables à une relation entre une mère et sa fille, le dossier de Mme A______ aurait dû être transmis avec un préavis favorable à l'ODM en vue de l'obtention d'un permis de séjour, les conditions d'un regroupement familial au sens de l'art. 8 CEDH étant remplies.

10) Partant, le recours de Mme A______ sera admis. Le jugement du TAPI du 3 décembre 2013, de même que la décision de l'OCPM du 31 juillet 2013 seront annulés et le dossier sera renvoyé à l'autorité cantonale pour une nouvelle décision dans le sens des considérants.

11) Vu l'issue du recours, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à la recourante (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 17 janvier 2014 par Madame A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 décembre 2013 ;

au fond :

l'admet ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 3 décembre 2013 ;

annule la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 31 juillet 2013 ;

renvoie la cause à l'office cantonal de la population et des migrations pour une nouvelle décision dans le sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à Madame A______ une indemnité de procédure de CHF 1'000.- ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Virginie Jordan, avocate de la recourante, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'à l'office fédéral des migrations.

Siégeants : M. Thélin, président, MM. Verniory et Pagan, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.