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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1368/2000

ATA/609/2001 du 02.10.2001 ( CM ) , ADMIS

Descripteurs : CM

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

du 2octobre 2001

 

 

 

 

 

dans la cause

 

 

Madame M. G.

représentée par Me Maurizio Locciola, avocat

 

 

 

contre

 

 

 

 

CONSEIL ADMINISTRATIF DE LA COMMUNE X

représenté par Me François Bellanger, avocat



EN FAIT

 

 

1. Madame M. G. est employée en qualité d'agente municipale par la commune X depuis le 4 janvier 1984. Elle est soumise au statut du personnel de la commune (ci-après : le statut).

 

2. Le 20 mars 2000, M. Ph. D., chef de service de la recourante, a adressé un rapport à Mme Y, maire de la commune, dans lequel il dénonçait Mme G., pour avoir mentionné 45 minutes au titre d'heures supplémentaires effectuées le samedi 11 mars alors que rien n'empêchait l'intéressée de terminer son service à 16 h. comme prévu.

 

M. D. avait vu partir l'intéressée de la mairie à 16 h. 30 et elle avait majoré cette demi-heure supplémentaire de 50 %, selon l'article 56 alinéa 2 du statut, pour indiquer 45 minutes qui ne lui étaient pas dues.

 

Enfin, elle s'était absentée de 9 h. à 11 h. le 13 mars pour se rendre à un enterrement sans en avoir reçu l'autorisation.

 

3. M. D. a eu un entretien le 17 mars 2000 avec Mme G..

 

4. Par décision du 11 avril 2000, le Conseil administratif de la commune, sous la plume de Mme Y, en sa qualité de maire, a adressé un blâme à Mme G. en raison des deux manquements précités.

 

5. Par courrier recommandé du 9 mai 2000, Mme G. a recouru auprès du Conseil administratif contre cette décision, prise par une autorité incompétente selon le statut et en violation de son droit d'être entendue. En tout état, elle en contestait le fondement. Cette décision devait être considérée comme nulle.

 

6. Par courrier recommandé du 11 avril (recte 15 mai 2000), également sous la plume de Mme Y, le blâme du 11 avril 2000 a été annulé après constatation que la procédure prévue par les articles 37 et 39 du statut n'avait pas été respectée. Mme G. était priée de prendre contact avec M. Z, secrétaire général de la commune, en vue d'une rencontre.

 

7. Le 9 juin 2000, Mme Y et MM. Z et D. se sont entretenus avec Mme G..

 

8. Par décision du 21 juin 2000, Mme Y, agissant en qualité de conseillère administrative déléguée, a adressé un blâme à Mme G. toujours en raison des mêmes faits. Ce courrier a été remis à l'intéressée en mains propres le 29 juin 2000. Ce blâme était justifié par une violation de l'obligation de diligence (art. 13 à 15 du statut).

 

9. Par acte posté le 27 juillet 2000, Mme G. a recouru auprès du Conseil administratif contre cette décision en concluant préalablement à la récusation de Mme Y.

 

Au fond, Mme G. a conclu à l'annulation de la décision du 21 juin 2000.

 

10. D'août à octobre 2000, M. Z et son adjointe, Mme B...., ont procédé à diverses auditions, de manière non contradictoire et sans en informer Mme G., aux fins d'établir les faits sur lesquels la sanction était fondée.

 

Ces auditions ont été protocolées et signées par les personnes intéressées.

 

11. Madame G. a été convoquée également, pour être entendue par Mme Y, mais elle a décliné cette invitation, son état de santé ne lui permettant pas de se présenter.

 

12. Enfin, par décision du 21 novembre 2000, adressée sous pli recommandé au conseil de Mme G., le Conseil administratif sous la plume de M. D., maire, a confirmé le blâme prononcé.

 

Cette décision mentionnait le fait qu'elle était susceptible de recours au Tribunal administratif dans les trente jours suivant sa notification.

 

13. Par acte posté le 22 décembre 2000, Mme G. a saisi le Tribunal administratif d'un recours contre ladite décision en reprenant son argumentation et en concluant à l'annulation du blâme qui constituait une sanction disproportionnée.

 

Son droit d'être entendu n'avait pas été respecté puisque l'audition des témoins s'était faite ne manière non contradictoire.

 

L'autorité qui avait statué n'était pas composée correctement car Mme Y aurait dû se récuser, ayant déjà connu de l'affaire dans une autre qualité.

Enfin, les faits constatés l'avaient été de manière inexacte et incomplète. La décision attaquée devait être annulée.

 

14. La commune X a conclu au rejet du recours dans la mesure où il était recevable.

 

15. Le 27 avril 2001, les parties ont été entendues en audience de comparution personnelle.

 

A cette occasion, Mme Y, qui représentait la commune, a déclaré qu'elle avait assisté à la séance du Conseil administratif mais n'avait pas participé au vote ayant abouti au blâme prononcé le 21 novembre 2000 même si la décision ne mentionnait pas qu'elle s'était abstenue.

 

16. Lors d'une audience d'enquêtes du 1er juin 2001, le tribunal de céans a entendu Mmes M. B., C. N. ainsi que MM. F. F., employé de la M., et Ph. D.. Au terme de ces auditions, la recourante a sollicité un délai pour se déterminer après enquêtes.

 

Réplique et duplique ont ainsi été autorisées.

 

17. Les faits reprochés à Mme G. sont les suivants :

 

a) Le 11 mars 2000, soit un samedi, Mme G. travaillait. Depuis l'inauguration de ... à ..., des bouchons se forment régulièrement les samedis en début d'après-midi. Aussi a-t-il été convenu entre les agents de la sécurité municipale X et la M. que l'agent de service le jour en question et un employé de M. régleraient la circulation à la sortie du stop de l'avenue de M. sur la rue L..

aa) Ce jour-ci, M. D. a effectué une surveillance pour vérifier si Mme G. respectait son horaire de travail. Il se trouvait dans le secteur de ... dès 14h45. A 15h15, il n'avait toujours pas vu Mme G.. Il a fait une course dans un commerce du quartier et il est revenu à 15h45 pour constater que la circulation était fluide et que Mme G. n'était pas sur place. A 16h25, il a observé un véhicule de service conduit par Mme G. qui se dirigeait vers la mairie.

 

De plus, ce jour-ci, Mme G. devait terminer son travail à 16h00. Or, elle avait inscrit la fin de son service à 16h30 sur le registre d'activités.

 

bb) Mme G. a indiqué dans son recours que ce jour-ci, elle a pris son service de l'après-midi à 13h00. A 15h05, elle s'est rendue dans le secteur ... pour contrôler le trafic, conformément aux ordres reçus. Elle a demandé à M. F. de l'assister au carrefour ....

 

Au vu des bouchons qui commençaient à se former, ils ont tous deux décidé de faire la circulation. A 16h05, le trafic étant devenu plus fluide, Mme G. a indiqué à M. F. qu'il n'était plus nécessaire de rester sur place. Elle est retournée en compagnie de M. F. au ... où ils ont pris une consommation. Peu après, Mme G. a regagné le poste à 16h25 au volant de sa voiture de service. Elle a rangé ses affaires, classé les contraventions de la journée, soit vingt-et-une amendes d'ordre et deux avertissements, puis a inscrit la fin de son service à 16h30.

 

cc) Le 30 octobre 2000, M. F. a été contacté par téléphone par M. Z, et un compte-rendu de cette conversation a été établi le 31 octobre 2000, que M. F. a signé. Il fait apparaître que M. F. et Mme G. ont quitté le secteur ... entre 15h30 et 15h45 au plus tard et certainement pas à 16h05.

 

Entendu comme témoin lors de l'audience du 1er juin 2001, M. F. a indiqué que le jour en question, il avait réglé la circulation avec Mme G. pendant quinze à vingt minutes sans pouvoir déterminer dans quelle tranche horaire. Il terminait lui-même son travail à 17h00. Il était allé boire quelque chose avec Mme G. avant la fin de son travail et il était certain d'avoir quitté le restaurant à 16h10, la pause ayant duré dix minutes ou un quart d'heure au plus. Il a affirmé avoir quitté le carrefour avant 16h00, soit plus près de 16h00 que de 15h30, et cela malgré le procès-verbal du 31 octobre 2000 relatant la conversation téléphonique précitée.

 

dd) Quant à M. D., entendu lors de la même audience, il a confirmé son rapport initial. Il a ajouté qu'il appartenait à l'agent de la police réglant la circulation d'apprécier en fonction du trafic si sa présence était nécessaire. Pendant les heures où il se trouvait lui-même sur place, il n'y avait pas beaucoup de trafic et la présence d'un agent n'était pas nécessaire. Il avait réagi en constatant que Mme G. avait noté 45 minutes supplémentaires (30 minutes de 16 h. à 16 h. 30 majorées de 50 % selon l'article 56 alinéa 2 du statut, soit 45 minutes au total) que rien ne justifiait. Enfin, il a admis qu'il était toléré que les agents prennent une pause le matin et l'après-midi, de dix à vingt minutes pour chaque demi-journée.

 

b) Le second grief adressé à Mme G. porte sur son absence du 13 mars 2000 de 09h00 à 11h00 pour se rendre à l'enterrement de son ex beau-père sans avoir obtenu l'autorisation nécessaire de s'absenter.

 

aa) Dans son recours, Mme G. a fait valoir qu'elle avait appris le jeudi 9 mars le décès de son ex beau-père. Elle avait aussitôt téléphoné à la mairie. Elle avait demandé à parler à Mme B., remplaçante de M. Z, aux fins de savoir si elle pouvait s'absenter pour ce service funèbre. MM. D. et Z étaient absents à ce moment. Mme G. affirme que Mme B. lui a indiqué qu'elle ferait le nécessaire.

 

Lors de sa prise de service le 13 mars au matin, Mme G. dit avoir informé sa supérieure directe, soit Mme N., sous-brigadière, qu'elle entendait se rendre à cet ensevelissement et il ne lui a pas été fait interdiction de s'absenter. Mme G. a indiqué à Mme N. que ces deux heures pourraient être retenues sur ses heures de compensation.

 

Mme G. s'était donc absentée à 09h00 et elle était de retour à 11h00, comme l'atteste la fiche de service. Aucun reproche ne lui a été adressé à ce sujet avant le 20 mars.

 

Il est établi et non contesté que le jour où Mme G. a contacté Mme B., MM. Z et D. étaient absents.

 

bb) Mme B. a confirmé le 1er juin 2001 avoir reçu un appel de Mme G., laquelle souhaitait savoir si elle était autorisée, selon le statut, à prendre congé pour se rendre à l'ensevelissement de son ex beau-père. Mme B. lui a répondu que le statut du personnel ne prévoyait pas un congé payé mais que le congé lui serait certainement accordé par son supérieur hiérarchique, éventuellement en compensation d'heures supplémentaires.

 

Mme B. n'était pas habilitée à autoriser Mme G. à prendre ces heures de congé; en aucun cas, elle n'avait donné une autorisation en ce sens. C'est ce qu'elle a déclaré le 16 août 2000 et confirmé lors de son audition par le tribunal le 1er juin 2001. Mme B. a admis cependant qu'au cours de ce téléphone avec Mme G., elle avait indiqué à celle-ci qu'elle-même parlerait de sa demande à M. Z, ce qu'elle avait fait. M. Z lui avait alors répondu qu'il appartenait au service concerné de régler la situation.

 

cc) Quant à Mme N., elle a déclaré le 23 octobre 2000, puis le 1er juin 2001 lors de son audition par le tribunal de céans, qu'elle n'avait en aucun cas été approchée par Mme G. pour savoir si celle-ci pouvait prendre congé et se rendre à cet enterrement. C'est en consultant le registre de service, sur lequel il était écrit "09h00 à 11h00, enterrement" qu'elle avait appris l'absence de sa collaboratrice ce jour-là. D'après ce registre, Mme N. avait elle-même commencé le 13 mars son travail à 06h45. Elle était d'abord allée à l'extérieur pour revenir au bureau à 08h40, (étant précisé qu'elle portait le matricule No .., celui de Mme G. étant le No .., seuls ces matricules figurant sur le registre de service). A ce moment, elle avait vu Mme G., qui ne lui avait rien demandé. Elle n'avait pas vu le mari de Mme G. venir la chercher à 09h00. A 12h00, Mmes N., G. ainsi que deux autres agentes (portant les matricules Nos .. et ..) avaient terminé leur service. Elle-même s'était rendue de 10h30 à 11h45 avec le matricule No .. à la rue de L.. Elle n'avait jamais dit à Mme G. qu'elle allait téléphoner à M. Z et ne voyait pas pourquoi elle aurait déclaré cela puisqu'elle ignorait le décès de l'ex beau-père de Mme G..

La procédure qu'aurait dû suivre Mme G. était simple : en apprenant qu'elle devait se rendre à un enterrement, il lui suffisait de contacter l'un ou l'autre des sous-brigadiers, c'est-à-dire M. M. ou elle-même, et aucun incident ne se serait produit.

 

18. a. S'exprimant sur les auditions de témoins du 1er juin 2001, Mme G. a relevé les faits suivants :

 

- M. F. avait confirmé avoir réglé la circulation avec elle jusqu'aux alentours de 16 heures, puis être allé boire un café avec elle durant 10 à 15 minutes; cette pause était comprise dans l'horaire de travail des agents, selon M. D.;

 

- Mme N. l'aurait autorisée à se rendre à l'enterrement si celle-ci le lui avait demandé;

 

- Mme B. avait été contactée par Mme G. au sujet de l'enterrement et elle lui avait promis d'en parler à M. Z, ce qu'elle avait fait. Mme G. pensait ainsi de bonne foi être excusée.

 

b. Ainsi, la recourante a conclu à l'annulation de la décision entreprise aux motifs que :

 

- la composition du Conseil administratif ayant pris la décision attaquée était incorrecte. En effet, Mme Y aurait dû se récuser, ayant déjà connu de l'affaire en sa qualité de conseillère administrative déléguée au personnel;

 

- les faits sur lesquels l'autorité s'était fondée pour prendre sa décision avaient été constatés de manière inexacte et incomplète.

 

19. Sur la base des témoignages recueillis par le tribunal de céans, le Conseil administratif de la commune X a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision entreprise.

 

S'agissant de la composition du Conseil administratif, il a rappelé que le Tribunal fédéral lui-même reconnaissait une différence de régime légal pour la récusation entre les membres des tribunaux et ceux des autorités administratives. En tout état, Mme Y s'était abstenue de voter comme elle l'avait déclaré en comparution personnelle, de sorte que ce grief devait être rejeté.

 

20. La cause a été gardée à juger.

 

 

EN DROIT

 

1. Le Tribunal administratif est l'autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 56 A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05).

 

Cependant, le recours au Tribunal administratif n'est recevable que dans la mesure où une disposition légale, réglementaire ou statutaire spéciale le prévoit contre les décisions concernant le statut et les rapports de service des fonctionnaires et autres membres du personnel des communes (art 56 B al. 4 let. a LOJ).

 

2. Le statut énonce les droits et obligations des employés et fonctionnaires municipaux. Au chapitre 4, intitulé "responsabilité disciplinaire et sanctions", il prévoit notamment les voies de recours en fonction de la gravité desdites sanctions.

 

L'autorité disciplinaire est le Conseil administratif (art. 36); les sanctions disciplinaires, énoncées à l'article 37, sont:

 

a) prononcées par le chef de service :

 

- l'avertissement;

 

b) prononcées par le conseiller administratif

responsable :

- le blâme;

- la mise à pied jusqu'à sept jours avec

suppression de traitement;

 

c) prononcées par le Conseil administratif :

 

- les six sanctions les plus graves, allant jusqu'à

la révocation (art. 37).

 

L'avertissement, le blâme et la mise pied jusqu'à sept jours avec suppression de traitement sont prononcées après que le fonctionnaire intéressé a été entendu par le chef de service, respectivement par le conseiller administratif responsable, sur les faits qui lui sont reprochés (art. 39).

 

Lorsqu'il s'avère qu'un fonctionnaire est passible d'une des sanctions dont le prononcé relève de la compétence du Conseil administratif, celui-ci ouvre une enquête administrative qu'il confie à un de ses membres, assisté du secrétaire général ou d'un fonctionnaire désigné par le Conseil administratif.

 

L'ouverture de l'enquête est notifiée par écrit à l'intéressé avec indication des motifs.

 

Celui-ci est également informé qu'il peut se faire assister par un conseil de son choix lors de ses auditions dans le cadre de la procédure d'enquête (art. 40).

 

Au terme de l'enquête, le Conseil administratif communique le dossier à l'intéressé et lui notifie le prononcé disciplinaire avec indication des motifs, ainsi que des moyens et voies de recours (art. 41).

 

Le recours doit être adressé, en cas d'avertissement, au conseiller administratif responsable du chef de service qui a prononcé la sanction; au Conseil administratif pour le blâme et la mise à pied jusqu'à sept jours avec suppression de traitement et enfin au Tribunal administratif pour les autres sanctions. Le recours a effet suspensif (art. 42).

 

Le délai de recours est de trente jours selon l'article 43 du statut.

 

3. Selon l'article 86 A de la loi sur l'administration des communes du 13 avril 1984 (LAC - B 6 05), modifié le ler janvier 2000, le recours au Tribunal administratif est ouvert contre les décisions d'une autorité communale en matière de mesures disciplinaires prises envers un membre du personnel communal, en matière de certificat de travail, de résiliation des rapports de service, de mise à la retraite anticipée et d'application de l'article 5, alinéa 1 de la loi fédérale du 24 mars 1995 sur l'égalité entre femmes et hommes.

 

L'alinéa 4 de cette disposition est réservé. Il est ainsi libellé : Le statut du personnel peut également instituer une instance de recours spéciale pour connaître des litiges visés aux alinéas 1 et 3. Il peut déclarer définitives les décisions de cette instance, pour autant que cette dernière présente les caractéristiques d'un tribunal indépendant et impartial; à défaut, ses décisions sont susceptibles de recours au Tribunal administratif.

 

4. A teneur de l'article 42 lit b) du statut de la Commune X, le fonctionnaire peut recourir contre la sanction qui lui est infligée. Pour le blâme, l'autorité de recours est le Conseil administratif.

 

5. En l'espèce, Mme G. étant fonctionnaire de la commune X, la LAC est applicable au litige l'opposant aux autorités de cette dernière.

 

6. Il convient donc de déterminer si le blâme est une mesure disciplinaire au sens de l'article 86 A alinéa 1 LAC.

 

Constitué par des sanctions ayant un caractère répressif, le droit disciplinaire a pour but d'assurer le respect des obligations de service en tant que l'intérêt de l'administration l'exige (P. MOOR, Droit administratif, vol. 3, p. 241, Staempfli, Berne, 1992). Les sanctions ou mesures disciplinaires sont tous les actes ayant pour but de sanctionner le comportement irrégulier des agents publics, des membres des autorités, des usagers d'établissements publics et des personnes soumises à une surveillance particulière dans le cadre d'activités les associant à l'exécution d'un service public et qui font l'objet d'un régime juridique particulier comprenant des règles de comportement spécifiques (B. KNAPP, Précis de droit administratif, pp. 365-366, HELBING & LICHTENHAHN, Bâle, 1991; V. MONTANI et C. BARDE, La jurisprudence du Tribunal administratif relative au droit disciplinaire in RDAF 1996, pp. 345 ss).

 

Le blâme infligé à la recourante, dont la finalité est de sanctionner son comportement préjudiciable au bon fonctionnement de l'administration, est ainsi constitutif d'une sanction disciplinaire ou d'une mesure disciplinaire.

 

7. Reste à déterminer si le Conseil administratif, autorité de recours spéciale instituée par l'article 42 lit b du statut, présente les caractéristiques d'un tribunal indépendant et impartial, comme le requiert l'article 86 alinéa 4 LAC.

 

8. Est un tribunal indépendant et impartial un organe juridictionnel compétent, disposant d'un pouvoir d'examen effectif, statuant à bref délai et selon une procédure contradictoire respectant le droit d'être entendu (ATF 116 Ia 295, 299).

 

Il doit s'agir en outre d'une autorité dont l'indépendance, notamment à l'égard de l'exécutif et des parties, ainsi que l'impartialité, sont favorisées par des règles relatives au statut personnel de ses membres et à la procédure qu'elle doit suivre pour rendre ses décisions (A. AUER, G. MALINVERNI, M. HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. II, p. 574, Staempfli, Berne, 2000; ATF 123 II 511, 517; ACEDH Engel du 8 juin 1976, série A, no 22, 27-28, § 68; ACEDH Campbell et Fell du 28 juin 1984, série A, nl 80, 40, § 80; ACEDH Findlay du 25 février 1997, rec. 1997-I 263, § 77).

 

Ainsi a-t-il été jugé par le Tribunal fédéral qu'un gouvernement cantonal statuant en instance unique n'a pas la qualité d'une juridiction indépendante et impartiale (ATF 120 Ia 19, 28). De même, le recours hiérarchique au Conseil d'Etat n'offre pas au justiciable les garanties d'indépendance prévues par l'article 30 alinéa 1 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999, entrée en vigueur le ler janvier 2000 (CF - RS 101) correspondant à l'art. 58 aCst, et par l'article 6 paragraphe 1 CEDH; en effet, le gouvernement cantonal statue sur des recours dirigés contre des décisions d'autorités qui lui sont subordonnées, voire de l'un de ses membres, de sorte que le chef de département dont la décision est attaquée est juge et partie dans sa propre cause aux yeux de l'administré (ATF 115 Ia 183, 187).

 

Enfin, l'impartialité du juge doit être subjective et objective; selon la terminologie de la Cour européenne, "justice must not only be done : it must also be seen to be done" (AUER; MALINVERNI et HOTTELIER, op. cit. p. 579;

ACEDH Incal du 9 juin 1998; ATF 38 I 95).

 

9. Au vu des exigences précitées, le Conseil administratif de la commune X ne réunit pas les conditions nécessaires pour être qualifié de tribunal indépendant et impartial :

 

- le Conseil administratif est un exécutif communal qui statue en instance unique;

 

- il est l'autorité hiérarchique de Mme G.;

- la jurisprudence précitée relative au recours hiérarchique au Conseil d'Etat est ainsi applicable mutatis mutandis;

 

- la procédure qu'il a suivie ne garantit pas le droit d'être entendu;

 

- l'impartialité objective n'est pas respectée par la décision qu'il a rendue le 20 novembre 2000 puisque celle-ci donne à penser que Mme Y y a pris part, cette décision n'indiquant pas que la conseillère administrative déléguée s'est abstenue de voter, ainsi qu'elle l'a déclaré en audience de comparution personnelle.

 

10. En conséquence, la voie du recours au Tribunal administratif doit être ouverte pour contester ce blâme, comme l'a fait Mme G. en se fiant d'ailleurs à la voie de droit figurant au pied de la décision attaquée. Ainsi, interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56 A al. 1 LOJ; 86 A al. 1 et 4 LAC; art. 63 al. 1 let. a LPA).

11. En premier lieu, Mme G. fait grief à l'autorité administrative d'avoir violé son droit d'être entendue dans le cadre de la décision entreprise.

 

12. Le blâme constitue une décision au sens des articles 1 et 4 LPA, prise par une autorité administrative au sens de l'article 5 lettre f LPA. Les règles de procédure découlant de cette loi sont en conséquence applicables.

 

13. a. Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 126 V 130 consid. 2b p. 131/132).

 

Tel qu'il est garanti par l'article 29 alinéa 2 Cst, le droit d'être entendu comprend notamment le droit de consulter le dossier (ATF 125 I 257 consid. 3b p. 260), de participer à l'administration des preuves et de se déterminer, avant le prononcé de la décision, sur les faits pertinents (ATF 124 I 49 consid. 3a p. 51). Les parties ont ainsi le droit de participer à l'audition des témoins (art. 42 al. 1 LPA).

 

14. En l'espèce, les autorités communales ... ont procédé à l'audition de Mmes B. et N. et de MM. M., D. et F. sans que Mme G. ne soit présente. En l'absence d'un intérêt prépondérant dont la protection exigerait que ces auditions se déroulent hors la présence des parties, l'autorité administrative a contrevenu à l'article 42 al. 1 LPA. Le droit d'être entendu de la recourante n'a ainsi pas été respecté.

 

15. Cependant, cette violation peut être réparée devant l'instance supérieure, si cette dernière possède un plein pouvoir d'examen (B. KNAPP, Précis de droit administratif, Bâle, 1991, p.142; ATA M. du 12 septembre 1990 et les ATF cités; ATA D. du 2 mars 1999; ATA Z. du 9 novembre 1999; ATA F.A. du 13 février 2001) et si la possibilité de recourir est propre à effacer les conséquences de cette violation (SJ 1992, p. 528).

Dans le cas présent, le tribunal de céans a le même pouvoir d'examen que l'autorité intimée. Il a procédé à l'audition des témoins en présence de Mme G. et celle-ci a eu l'occasion de faire valoir ses arguments; la violation du droit d'être entendu a ainsi été réparée devant lui.

 

16. Mme G. fait également grief à l'autorité administrative d'avoir été composée irrégulièrement lors de l'adoption de la décision attaquée, ce que l'intimé conteste.

 

Ce grief n'a pas à être examiné plus avant, au vu des considérations précitées sur l'absence d'impartialité objective du Conseil administratif.

17. Mme G. reproche de plus aux autorités administratives d'avoir procédé à une constatation inexacte et incomplète des faits pertinents pour fonder sa décision.

 

La constatation des faits est incomplète lorsque toutes les circonstances de faits et les moyens de preuves déterminants pour la décision n'ont pas été pris en compte par l'autorité inférieure. Elle est inexacte lorsque l'autorité a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces (B. BOVAY, Procédure administrative, Lausanne, août 2000, pp. 395 et 396).

 

a. Inscription de 45 minutes supplémentaires non

justifiées

 

A teneur du témoignage de M. F. recueilli par le tribunal de céans, la recourante a réglé le trafic jusque peu avant 16 heures, puisqu'elle est allée boire un café avec M. F. pendant 10 à 15 minutes jusqu'à 16h10, pause autorisée et comprise dans l'horaire de travail, selon les dires de M. D.. Ce dernier a par ailleurs affirmé avoir vu Mme G. rentrer au bureau à 16h25 et quitter la mairie à 16 h. 30. La recourante a indiqué avoir effectué des tâches administratives à la mairie dans cet intervalle.

 

Cette version, qui diffère de celle présentée lors des auditions faites par les autorités administratives communales, doit être préférée du fait qu'elle a été recueillie de manière contradictoire par le tribunal de céans.

 

La recourante n'a ainsi fourni aucune explication crédible concernant son activité entre 16h10 et 16h30. Même s'il était établi qu'elle a effectué des tâches administratives durant ce laps de temps, elle pouvait exécuter celles-ci le lundi, pendant son horaire de travail normal, ces activités ne revêtant aucune urgence.

 

Ainsi, Mme G. était-elle autorisée à inscrire non pas 45 minutes comme elle l'a fait mais 15 minutes de travail supplémentaire soit 10 minutes de pause incluses dans son horaire de travail majoré de 50% en application de l'article 56 alinéa 2 du statut selon lequel les heures supplémentaires "donnent droit à une indemnité supplémentaire qui est égale aux 50% du prix de l'heure et aux 100% pour les heures effectuées de 22h00 à 06h00 ainsi que les dimanches et jours fériés".

 

b. Absence de la recourante pour assister à l'enterrement de son ex-beau-père

 

Les déclarations concordantes de Mmes B. et N. permettent de constater que Mme G. n'a pas obtenu l'autorisation de se rendre à l'enterrement, faute de l'avoir demandée à ses supérieurs hiérarchiques compétents. En effet, Mme B., à laquelle elle s'est adressée, n'était pas habilitée à lui donner une telle autorisation, et la recourante ne l'a pas demandée à Mme N., sa supérieure hiérarchique, qu'elle dit avoir croisée au bureau le matin même. Enfin, Mme G. ne pouvait être certaine de l'accord de M. Z. Or, il faut considérer le mobile honorable de la recourante, justifiant une absence de 2 heures, et le trouble dans lequel elle a pu se trouver à l'occasion d'un deuil pour admettre que, dans ces circonstances, toutes les procédures usuelles ne soient pas respectées, pendant un week-end de surcroît. Malgré cela, Mme G. pouvait de bonne foi penser qu'elle était excusée, Mme B. ayant parlé de cette question à M. Z, ainsi que celle-ci l'a confirmé.

 

18. Mme G. conteste que les faits qui lui sont reprochés constituent des violations du devoir de fonction, susceptible d'être sanctionnées.

 

a. Aux termes de l'article 13 du statut, les fonctionnaires sont tenus au respect des intérêts de la commune et doivent s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice. L'article 15 précise notamment qu'ils doivent remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence, respecter leurs horaires de travail, se conformer aux instructions de leurs supérieurs et en exécuter les ordres avec conscience et discernement.

 

b. En inscrivant le 11 mars 30 minutes supplémentaires non justifiées par les besoins du service et en s'absentant de son travail le 13 mars pendant deux heures sans en avoir formellement reçu l'autorisation, Mme G. a violé son devoir de fidélité et de diligence au sens des dispositions précitées. Dès lors, le comportement fautif de Mme G. est établi et mérite d'être sanctionné.

 

19. Enfin, Mme G. estime que le blâme prononcé

à son encontre constitue une sanction disproportionnée au

regard des faits retenus à sa charge.

 

Force est d'admettre avec la recourante que les deux fautes précitées sont en effet, bénignes.

 

Mme G. n'ayant aucun antécédent, le tribunal de céans estime que l'autorité intimée a mésusé de son large pouvoir d'appréciation en prononçant un blâme, une sanction quelconque ne se justifiant pas (ATF 123 I 112, consid. 4 e p. 121; 122 V 236 consid. 4 e/bb p. 246).

 

20. Au vu de ce qui précède, le recours sera admis. Il ne sera pas perçu d'émolument. Une indemnité de procédure de CHF 2'000.- sera allouée à la recourante à charge du Conseil administratif de la commune X.

 

PAR CES MOTIFS

le Tribunal administratif

à la forme :

 

déclare recevable le recours interjeté le 22 décembre 2000 par Madame M. G. contre la décision du Conseil administratif de la commune X du 21 novembre 2000;

 

au fond :

 

l'admet;

 

annule la décision attaquée;

 

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument;

 

alloue à la recourante à charge du Conseil administratif de la commune X une indemnité de procédure de CHF 2'000.-;

 

communique le présent arrêt à Me Maurizio Locciola, avocat de la recourante, ainsi qu'à Me François Bellanger, avocat de l'intimé.

 


Siégeants : M. Thélin, président, MM. Paychère et Schucani, Mmes Bonnefemme-Hurni et Bovy, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

le secrétaire-juriste : le président :

 

O. Bindschedler P. Thélin

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :

 

Mme M. Oranci