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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/3260/2025

ACPR/865/2025 du 22.10.2025 sur OMP/21203/2025 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : RESTITUTION DU DÉLAI;OPPOSITION TARDIVE
Normes : CPP.94; CPP.396.al1

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/3260/2025 ACPR/865/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 22 octobre 2025

 

Entre

A______, domicilié ______, agissant en personne,

recourant,

 

contre l’ordonnance de refus de restitution de délai rendue le 2 septembre 2025 par le Ministère public,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 12 septembre 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 2 précédent, notifiée le 6 suivant, par laquelle le Ministère public a refusé la restitution du délai d'opposition à l'ordonnance pénale qu'il avait requise.

Le recourant conclut à l’annulation de cette décision, à l’octroi de la restitution du délai d'opposition et à la recevabilité de son opposition à l’ordonnance pénale du 30 avril 2025.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 11 décembre 2024, A______ a été entendu en qualité de prévenu par la police, pour avoir, à Genève, à tout le moins le 27 novembre 2024, mis son véhicule automobile à disposition de son employé, alors que ce dernier n'était pas titulaire d'un permis de conduire valable, ce qu'il savait ou aurait dû savoir s'il avait prêté l'attention commandée par les circonstances, et que la plaque avant n'était pas apposée sur la voiture conformément aux prescriptions.

Il lui était également reproché d'avoir, à Genève, entre à tout le moins le 17 et le 27 novembre 2024, circulé au volant de son automobile alors que la plaque avant n'était pas apposée conformément aux prescriptions.

Il a admis les faits, tout en les minimisant.

b. Par ordonnance pénale du 30 avril 2025, le Ministère public a déclaré A______ coupable de mise à disposition d’un véhicule à une personne non titulaire du permis de conduire (art. 95 al. 1 let. e LCR), de conduite d'un véhicule ne répondant pas aux prescriptions (art. 93 al. 2 let. a LCR) et de mise à disposition d'un véhicule ne répondant pas aux prescriptions (art. 93 al. 2 let. b LCR) pour les faits susmentionnés et l'a condamné, en page 3, à une peine pécuniaire de 45 jours-amende, à CHF 250.- l'unité, ainsi qu’à une amende de CHF 160.-.

Cette ordonnance mentionnait expressément, en page 4, les voies de droit et le délai de recours ainsi que les dispositions applicables en la matière.

c. À teneur du suivi postal, le pli recommandé contenant dite ordonnance a été envoyé le 7 mai 2025 à A______, avisé pour retrait le lendemain, et distribué au guichet le 10 suivant.

d. Par pli recommandé expédié le 21 mai 2025, A______ a formé opposition à l'ordonnance pénale précitée.

e. Le 28 mai 2025, le Ministère public a conclu à l’irrecevabilité de l'opposition pour cause de tardivité et transmis la cause au Tribunal de police.

f. Interpellé par le Tribunal de police, A______ a expliqué qu'il avait, de bonne foi, pensé que le délai pour former opposition se comptait en jours ouvrables et non pas en "jours calendaires".

g. Dans son ordonnance du 23 juillet 2025, le Tribunal de police a retenu que l’ordonnance pénale avait valablement été notifiée le 10 mai 2025. Partant, le délai pour former opposition arrivait à échéance le 20 mai 2025, de sorte qu’expédiée le 21 mai 2025, l’opposition avait été faite après l’expiration du délai de 10 jours et n’était donc pas valable. Partant, l'ordonnance pénale était assimilée à un jugement entré en force.

Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours.

h. Par pli expédié le 11 août 2025, A______ a sollicité la restitution du délai d’opposition, au sens de l’art. 94 al. 1 CPP, au motif qu’il s’était trompé dans le calcul du délai d’opposition, pensant, de bonne foi, que celui-ci se comptait en jours ouvrables – comme dans son pays d’origine –. De plus, il n’avait pas compris tout de suite « le montant de la peine » et avait agi sans tarder lorsqu’il avait saisi qu’elle s’élevait à CHF 11'250.- et non pas à CHF 250.-. Son opposition devait donc être déclarée recevable.

i. Selon l'extrait du casier judiciaire suisse figurant au dossier, A______ a été condamné à deux reprises (20 janvier 2020 et 24 juin 2021), par ordonnance pénale du Ministère public genevois, principalement pour des infractions à la loi fédérale sur la circulation routière.

C. Dans sa décision querellée, le Ministère public retient que les conditions d'une restitution de délai n'étaient pas réunies en l'absence d'empêchement non fautif. Les motifs invoqués par le prévenu – soit qu'il ignorait que le délai d’opposition ne se calculait pas en jours ouvrables et qu'il n’avait découvert le montant exact de la peine pécuniaire que le 20 mai 2025, en se rendant au Service des contraventions –, n'étaient pas de nature à justifier une restitution du délai d'opposition. Partant, l'empêchement de respecter le délai d'opposition était dû à une faute de sa part.

D. a. À l’appui de son recours, A______ considère remplir les conditions d'une restitution de délai. Il persiste dans ses précédentes explications. L’ordonnance pénale mentionnait un délai de 10 jours, sans préciser s’il s’agissait de "jours calendaires" ou ouvrables. Il avait cru de bonne foi qu’il s’agissait de jours ouvrables. De nationalité étrangère et ne maîtrisant pas le "français juridique", il n’avait pas saisi tout de suite la portée exacte de l’ordonnance pénale et surtout le montant indiqué, ce qui avait retardé sa réaction. Enfin, la décision entreprise le privait de faire valoir ses arguments sur le fond de l’affaire [à savoir que la sanction prononcée était, selon lui, disproportionnée] et violait ainsi son droit d’être entendu.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant reproche au Ministère public de ne pas lui avoir restitué le délai d'opposition.

3.1. Selon l'art. 94 CPP, une partie peut demander la restitution d'un délai imparti pour accomplir un acte de procédure si elle a été empêchée de l'observer et si elle est de ce fait exposée à un préjudice important et irréparable. Elle doit toutefois rendre vraisemblable que le défaut n'est imputable à aucune faute de sa part (al. 1).

3.2. La demande de restitution du délai doit être présentée dans les 30 jours qui suivent la fin de l'empêchement allégué (art. 94 al. 2 CPP).

3.3. La restitution de délai ne peut intervenir que lorsqu'un événement, par exemple une maladie ou un accident, met la partie objectivement ou subjectivement dans l'impossibilité d'agir par elle-même ou de charger une tierce personne d'agir en son nom dans le délai (arrêts du Tribunal fédéral 6B_401/2019 du 1er juillet 2019 consid. 2.3; 6B_365/2016 du 29 juillet 2016 consid. 2.1). Elle ne doit être accordée qu'en cas d'absence claire de faute. Il est ainsi exigé qu'il ait été absolument impossible à la personne concernée de respecter le délai ou de charger un tiers de faire le nécessaire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_125/2011 du 7 juillet 2011 consid. 1).

Par empêchement non fautif, il faut comprendre toute circonstance qui aurait empêché une partie consciencieuse d’agir dans le délai fixé (ACPR/196/2014 du 8 avril 2014). Il s'agit non seulement de l’impossibilité objective, comme la force majeure, mais également l’impossibilité subjective due à des circonstances personnelles ou à l’erreur due au comportement d'une autorité (Y. JEANNERET/ A. KUHN/ C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 10 ad art. 94 CPP; ATF 96 II 262 consid. 1a).

3.4. En l'espèce, il est constant – et non contesté – que le recourant a formé opposition après l'échéance du délai légal.

La question du respect du délai de 30 jours prévu par l'art. 94 CPP pour le dépôt de la requête en restitution de délai pourra rester ouverte, dite requête devant être rejetée pour les raisons qui suivent.

Le recourant explique avoir cru – de bonne foi – agir dans le délai d’opposition, ayant adressé son courrier dans les 10 jours ouvrables après réception de l'ordonnance pénale. De plus, ne maîtrisant pas le "français juridique", il n'avait saisi le montant exact de la peine pécuniaire que tardivement.

Les motifs invoqués pour justifier son empêchement ne peuvent toutefois être considérés comme non fautifs.

Le recourant ne saurait en effet se réfugier derrière une prétendue absence d'informations des autorités pénales, tant en lien avec le calcul du délai de recours qu'avec la sanction prononcée, pour obtenir une restitution de délai. Les voies de droit et le délai de recours ainsi que les dispositions applicables en la matière étaient détaillés en quatrième page de l'ordonnance pénale du 30 avril 2025. Il en allait de même des peines prononcées, clairement indiquées en troisième page de cette décision, étant observé que l'intéressé avait déjà fait l'objet de deux condamnations par voie d'ordonnance pénale du Ministère public, en 2020 et 2021, de sorte que ce n'était pas la première fois qu'il était confronté à ce type de décision. Sa situation personnelle ne l'empêchait donc pas d'en comprendre la portée. En tout état, il pouvait, en cas de doute à ce sujet, consulter un avocat.

Ainsi, ses explications ne sont ni propres ni suffisantes à établir qu'il aurait été empêché sans sa faute, ni objectivement ni subjectivement, dans les 10 jours suivant la notification de l'ordonnance pénale, de former opposition à celle-ci ou de charger une personne de le faire pour son compte.

Le recourant n'invoque finalement aucun empêchement non fautif qui l’aurait, conformément aux principes juridiques et jurisprudentiels sus-rappelés, empêché, en raison d'un événement l'ayant objectivement ou subjectivement mis dans l'impossibilité d'agir par lui-même ou par l'intermédiaire d'une tierce personne, de former opposition dans le délai légal.

Il ne saurait dès lors y avoir place pour une quelconque restitution de délai, étant souligné qu'une application stricte des règles de procédure, notamment en matière de délais, s'impose pour des raisons d'égalité de droit et ne relève pas d'un formalisme excessif (ATF 149 IV 196 consid. 1.1; 149 IV 97 consid. 2.1).

Enfin, il n'appartient pas ici à la Chambre de céans de se prononcer sur les griefs au fond du recourant. On ne voit pas non plus en quoi l'ordonnance querellée violerait le droit d'être entendu du recourant, qui a pu faire valoir ses arguments, sur la restitution du délai devant le Ministère public, étant relevé qu'il n'est dans ce cadre pas entré sur le fond.

4. Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée et le recours rejeté.

5. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 800.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 800.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, à A______ et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Madame Valérie LAUBER et Monsieur Vincent DELALOYE, juges; Madame Arbenita VESELI, greffière.

 

La greffière :

Arbenita VESELI

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).


 

P/3260/2025

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

715.00

Total

CHF

800.00