Décisions | Chambre pénale de recours
ACPR/279/2025 du 09.04.2025 sur OMP/3819/2025 ( MP ) , REJETE
république et | canton de Genève | |
POUVOIR JUDICIAIRE P/25726/2023 ACPR/279/2025 COUR DE JUSTICE Chambre pénale de recours Arrêt du mercredi 9 avril 2025 |
Entre
A______, représenté par Me B______, avocate,
recourant,
contre la décision rendue le 13 février 2025 par le Ministère public,
et
LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,
intimé.
EN FAIT :
A. Par acte déposé le 24 février 2025, A______ recourt contre la décision du 13 février 2025, notifiée le lendemain, par laquelle le Ministère public a refusé de retirer du dossier les pièces qu'il avait transmises aux parties par efax des 4 et 5 février 2025.
Le recourant conclut, avec suite de frais et dépens chiffrés, au retrait du dossier des pièces en question, à leur conservation à part jusqu'à la clôture définitive de la procédure, puis leur destruction, conformément à l'art. 141 al. 5 CPP.
B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :
a. A______ fait l'objet d'une procédure pénale pour escroquerie, abus de confiance aggravé, fausse communication aux autorités chargées du registre du commerce, faux dans les titres, obtention frauduleuse d'une constatation fausse et violation des art. 118 LEI et 97 al. 1 let. b LCR.
En substance, il lui est reproché d'avoir, par la présentation de faux documents, dont une lettre de confort de C______, avocat à D______ [Royaume-Uni], construit l'apparence d'une situation personnelle aisée (USD 80 millions, dont USD 30 millions en titres et propriétés), notamment l'existence d'une fortune paternelle dont il aurait hérité en 2010, en réalité inexistante. Il aurait également été en mesure de valoriser, vraisemblablement par le truchement de ventes privées de complaisance, des titres de diverses sociétés dont il était l'ultime ayant droit économique, lesquels titres étaient en réalité sans valeur. Il se serait prévalu de ces circonstances fictives de fortune et d'actifs auprès de divers établissements bancaires en Suisse et à l'étranger afin d'obtenir des facilités bancaires sous la forme de crédits hypothécaires et lombards et de garanties bancaires. Nonobstant les mesures de contrôle internes, les établissements bancaires avaient été induits en erreur par le montage sophistiqué mis en place par A______; leur dommage, respectivement l'enrichissement illégitime de l'intéressé, s'élèverait à plusieurs millions de francs suisses.
b.a. Dans le cadre de son instruction, le Ministère public a notamment adressé, le 6 août 2024, une demande d'entraide internationale à l'Angleterre (pièces 391'011 – 391'014). Cette demande avait pour but de faire procéder à l'audition de C______, auteur de la "lettre de confort" susmentionnée et administrateur d'une des sociétés dont A______ était l'ultime ayant droit économique.
b.b. Dans ce contexte, le Ministère public a accordé un délai aux parties pour faire part de leurs éventuelles questions (pièce 610'031).
Dans le délai imparti, A______ a confirmé au Ministère public qu'il levait C______ du secret professionnel à son égard (pièce 610'043) et qu'il n'avait, en l'état, pas de question à lui poser (pièce 610'050).
b.c. La demande d'entraide s'est soldée par un rapport des autorités anglaises du 30 décembre 2024 concluant à l'impossibilité de procéder à l'audition de C______, en raison de son état de santé. Cependant, l'intéressé était d'accord d'être entendu auprès de l'Ambassade de Suisse à Londres et communiquait son adresse e-mail pour toute correspondance ultérieure (pièces 391'046 – 391'047).
b.d. Le 15 janvier 2025, le Ministère public a demandé aux autorités anglaises de transmettre à C______ l'ensemble des questions et documents figurant dans la demande d'entraide, afin que ce dernier y réponde par écrit (pièce 391'048).
b.e. Le 20 suivant, les autorités anglaises ont répondu, qu'au vu du rapport de clôture et de l'accord de C______, le Ministère public pouvait directement s'adresser au prénommé afin de procéder de cette manière ou pour fixer une autre date pour son audition (pièce 391'049).
b.f. Le même jour, le Ministère public est revenu auprès des autorités anglaises, expliquant que, par le passé, il n'était pas parvenu à contacter C______ et demandait à celles-ci de voir si elles pouvaient obtenir, avec l'aide de la police, une détermination de la part de l'intéressé (pièce 391'050).
b.g. Le lendemain, les autorités anglaises ont répondu qu'elles n'estimaient pas proportionné de convoquer un témoin souffrant d'une maladie grave. C______ était à disposition pour être entendu à l'Ambassade de Suisse. En outre, il avait accepté que toute correspondance future lui soit adressée à son adresse électronique personnelle. Les autorités anglaises demandaient au Ministère public d'agir dans ce sens (pièce 391'050.1).
c.a. Par courriel du 21 janvier 2025, le Ministère public a demandé à C______ de bien vouloir expliquer, par écrit et sur une base volontaire, les circonstances dans lesquelles il avait rédigé les lettres des 3 novembre 2020, 17 et 24 mars et 18 mai 2021 (pièces 1'130'041, 1'040'168, 1'040'163, 1'040'170) et comment il avait été convaincu de la réalité des informations y figurant, compte tenu de la situation financière de A______ (pièces 391'051).
c.b. Entre les 24 et 31 janvier 2025 puis les 3 et 4 février 2025, C______ et la greffière du Procureur chargé de l'affaire ont eu des échanges de courriels et téléphoniques (pièces 391'052 – 391'053, 391'107 – 391'108).
c.c. Par courriels du 3 février 2025, C______ a répondu aux questions du Ministère public, avec documents et extraits de liens internet à l'appui – lesquels ont été versés à la procédure – (pièces 391'058 – 391'061 et leurs annexes).
c.d. Par courriel du 4 février 2025, C______ a, après un appel téléphonique avec la greffière du Procureur le matin, précisé les activités de A______ ou de F______ AG – société détenue par ce dernier – et "la substance de la richesse derrière" (pièces 391'108 – 391'109 et leurs annexes).
d. En parallèle, le 24 janvier 2025, le Ministère public a, par avis de prochaine clôture de l'instruction, informé les parties qu'il entendait rendre une ordonnance de classement à l'endroit de A______ concernant les faits – non-paiement de frais bancaires – en lien avec E______ LTD, l'une des parties plaignantes – et l'infraction à la LCR et dresser un acte d'accusation pour le restes.
e. Par efax des 4 et 5 février 2025, le Ministère public a transmis aux parties les correspondances échangées avec C______ (pièces 610'089 – 610'091).
f. A______ a sollicité divers actes d'instruction relatifs à la production de documents par les banques, dont aucun n'est en lien avec les déterminations de C______.
Les échanges intervenus entre le Ministère public et C______ violaient le Deuxième Protocole additionnel à la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 1er février 2005 (RS 0.351.12, ci-après: PA II CEEJ), ainsi que les art. 148 al. 1 et 181 al. 1 cum 158 al. 1 CPP, de sorte que ces preuves étaient inexploitables au sens de l'art. 141 al. 1 CPP. Il a demandé leur retrait du dossier et leur conservation à part jusqu'à la clôture définitive de la procédure, puis leur destruction, conformément à l'art. 141 al. 5 CPP (pièces 610'096 – 610'099).
g. Par ordonnance rendue le 13 février 2025, le Ministère public a classé les faits en lien avec E______ LTD ainsi que l'infraction à la LCR.
h. Par acte d'accusation du même jour, A______ a été renvoyé en jugement devant le Tribunal de correctionnel pour escroquerie par métier (art. 146 CP), tentative d'escroquerie par métier (art. 146 CP cum art. 22 CP), faux renseignements sur des entreprises commerciales (art. 152 CP), faux dans les titres (art. 251 CP), obtention frauduleuse d'une constatation fausse (art. 253 CP) et comportement frauduleux à l'égard des autorités au sens de l'art. 118 LEI.
C. Dans sa décision querellée, le Ministère public a relevé que, s'agissant de la demande d'application de l'art. 141 CPP, le droit de A______ de participer à l'administration des preuves dans le cadre de la demande d'entraide en Angleterre avait été respecté, dans la mesure où il avait été invité à soumettre des questions. À l'issue de ladite demande, les autorités anglaises l'avaient invité [le Ministère public] à entrer directement en contact avec C______. Dans ce contexte, les déterminations écrites et documents que lui avait adressés le prénommé, sur une base volontaire, et concernant des pièces objets de la demande d'entraide, étaient exploitables.
D. a. Dans son recours, A______ soutient que, sur le plan international, la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 mars 1967 (RS 0.351.1, ci-après: CEEJ) et le PA II CEEJ ne prévoyaient pas l'administration de preuves sous la forme d'échanges d'écrits entre l'État requérant et la personne à entendre située à l'étranger. Le recueil transnational de déterminations écrites n'était ainsi pas prévu et l'Angleterre n'y avait pas consenti. Cette dernière avait donné son accord à l'audition de C______, par le Ministère public, à l'Ambassade de Suisse à Londres et non à une "audition informelle" violant les règles internationales applicables.
En outre, les deux conférences téléphoniques de la greffière contrevenaient à l'art. 10 ch. 3 à 6 PA II CEEJ, au vu de l'absence : de consentement donné par l'Angleterre sur cette manière de faire; d'identification du témoin; de la présence d'une autorité judiciaire de la Partie requise; et de la possibilité, pour la personne entendue, d'invoquer son droit à ne pas témoigner.
Par ailleurs, sur le plan national, l'administration desdites preuves violait plusieurs dispositions liées à l'exécution d'une audition en cas d'entraide judiciaire, à savoir les art. 143 al. 1 let. a et b, al. 2, 142 al. 1 et 311 al. 1 CPP, 148 al. 1 let. b et c CPP.
Conformément à l'art. 141 al. 1 CPP, les preuves en question, recueillies en violation des règles fondant le droit à la participation du prévenu, dans le cas présent les art. 148 al. 2 et 145 par renvoi de l'art. 147 al. 4 CPP et 180 al. 1 cum 158 al. 2 CPP, étaient inexploitables. Ainsi, l'art. 141 al. 5 CPP leur était applicable.
b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.
EN DROIT :
1. Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une décision sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP; ATF 143 IV 475 consid. 2.9; arrêt du Tribunal fédéral 1B_485/2021 du 26 novembre 2021 consid. 2.4.3).
2. La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP).
Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.
3. 3.1. La manière dont les preuves doivent être administrées relève du droit de procédure, sous réserve des principes qui découlent directement du droit constitutionnel fédéral et du droit conventionnel; il en va de même de la question de savoir si une preuve recueillie de manière illégale doit ou non être écartée de l'appréciation des preuves (arrêt du Tribunal fédéral 1P.679/2003 du 2 avril 2004 consid. 3.1).
Le droit conventionnel n'exclut ainsi pas, par principe et in abstracto, l'admissibilité d'une preuve recueillie de manière illégale; il postule au contraire d'examiner si l'usage qui en a été fait comme élément de preuve dans le cas particulier a privé l'accusé d'un procès équitable garanti à l'art. 6 § 1 CEDH (arrêts de la CourEDH dans la cause Schenk c. Suisse du 12 juillet 1988, série A no 140, § 46, et dans la cause Khan Sultan c. Royaume-Uni du 12 mai 2000, recueil 2000-V p. 303, § 35).
3.2. Selon la Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale, la partie requise – ici les autorités anglaises – fera exécuter, dans les formes prévues par sa législation, les commissions rogatoires relatives à une affaire pénale qui lui seront adressées par les autorités judiciaires de la Partie requérante – ici le Ministère public genevois – et qui ont pour objet d'accomplir des actes d'instruction ou de communiquer des pièces à conviction, des dossiers ou des documents (art. 3 al. 1 CEEJ).
3.3. Conformément à l'art. 139 al. 1 CPP, les autorités pénales mettent en œuvre tous les moyens de preuve licites qui, selon l'état des connaissances scientifiques et l'expérience, sont propres à établir la vérité.
Les art. 140 et 141 CPP règlent les méthodes interdites d'administration des preuves et l'exploitation des moyens de preuve obtenus illégalement.
Selon l'art. 141 al. 1 CPP, les preuves administrées en violation de l'art. 140 CPP – soit celles obtenues par contrainte, recours à la force, menaces, promesses, tromperie ou moyens susceptibles de restreindre les facultés intellectuelles ou le libre arbitre – ne sont en aucun cas exploitables (1ère phr.). Il en va de même lorsque le présent code dispose qu'une preuve n'est pas exploitable (2ème phr.).
Les preuves qui ont été administrées d'une manière illicite ou en violation de règles de validité par les autorités pénales ne sont pas exploitables, à moins que leur exploitation soit indispensable pour élucider des infractions graves (al. 2).
Les pièces relatives aux moyens de preuves non exploitables doivent être retirées du dossier pénal, conservées à part jusqu'à la clôture définitive de la procédure, puis détruites (al. 5).
3.4. Au stade de l'instruction, la question de la légalité et de l'exploitabilité des moyens de preuve doit en principe être laissée à l'appréciation du juge du fond (art. 339 al. 2 let. d CPP), autorité dont il peut être attendu qu'elle soit en mesure de faire la distinction entre les moyens de preuve licites et ceux qui ne le seraient pas, puis de fonder son appréciation en conséquence (ATF 144 IV 127 consid. 1.3.1; 143 IV 387 consid. 4.4). Cette approche se justifie également au regard du principe "in dubio pro duriore", lequel interdit au ministère public, confronté à des preuves non claires, d'anticiper sur l'appréciation des preuves par le juge du fond (ATF 143 IV 241 consid. 2.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_127/2019 du 9 septembre 2019 consid. 4.1.2 non publié in ATF 145 IV 462).
Cette règle comporte toutefois des exceptions. Tel est le cas lorsque la loi prévoit expressément la restitution immédiate, respectivement la destruction immédiate, des preuves illicites (cf. notamment l'ancien art. 248 dans sa teneur en vigueur au 31 décembre 2023 [RO 2010 1881], art. 271 al. 3, 277 et 289 al. 6 CPP). Il en va de même quand, en vertu de la loi ou de circonstances spécifiques liées au cas d'espèce, le caractère illicite des moyens de preuve s'impose d'emblée (ATF 143 IV 475 consid. 2.7; arrêt du Tribunal fédéral 1B_91/2020 du 4 mars 2020 consid. 2.2).
Un intérêt juridiquement protégé particulièrement important est cependant nécessaire pour conduire à un constat immédiat de ce caractère inexploitable (ATF 144 IV 127 consid. 1.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 7B_859/2023 du 17 juillet 2024 consid. 1.3.2).
3.5. Lorsque l'administration des preuves a lieu à l’étranger par commission rogatoire, l'art. 148 al. 1 CPP prévoit que le droit de participer des parties est satisfait lorsqu'elles peuvent adresser des questions à l'autorité étrangère requise, consulter le procès-verbal de l'administration des preuves effectuée par commission rogatoire et poser par écrit des questions complémentaires. Ainsi, les parties ont, premièrement, le droit d'adresser des questions à la direction de la procédure, à l'intention de l'autorité étrangère requise. En outre, après consultation du procès-verbal de l'administration des preuves exécutée par commission rogatoire, elles peuvent poser des questions complémentaires (Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 1057 ss [ci-après : Message], spéc. 1167).
Le droit de participation actif n'est valable qu'en Suisse. À l'étranger, celui-ci se fait par le biais de requêtes écrites. Les parties peuvent adresser des questions à l'autorité étrangère sollicitée, par le truchement de la direction de la procédure, questions qui seront posées par commission rogatoire internationale (L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Petit commentaire du Code de procédure pénale, Bâle 2016, n. 3-4 ad art. 148).
3.6. En application de l'art. 145 CPP, l'autorité pénale peut, en lieu et place d'une audition ou en complément de celle-ci, inviter le comparant – tel qu'un témoin ou une personne appelée à donner des renseignements – à lui présenter un rapport écrit sur ses constatations. L'autorité ne peut cependant pas obliger une personne à répondre aux questions qu'elle lui a adressées par écrit (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019 n. 1, 2,- 4 et 5 ad art. 145).
Même si ce moyen de preuve peut remplacer l'audition, on ne saurait l'utiliser pour contourner les obligations de l'autorité dans ce contexte. En effet, l'interrogatoire oral est la règle et la présentation de rapports écrits ne doit pas entraîner une restriction des droits des parties, en particulier celui d'assister à l'administration des preuves (art. 147 CPP; arrêts du Tribunal fédéral 6B_663/2014 du 22 décembre 2017 consid. 11.2 et 6B_835/2014 du 8 décembre 2014 consid. 2.2). En tout état de cause, les parties ont le droit de prendre connaissance des réponses et doivent être en mesure de poser ou faire poser des questions complémentaires (ATF 124 V 90 consid. 4b).
Contrairement à l'audition qu'il remplace, le rapport écrit n'est pas soumis à des règles strictes et ne fait pas l'objet d'un procès-verbal (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), op. cit., n. 10 ad art 145).
3.7. En l'espèce, il n'est pas contesté que le Ministère public a adressé une demande d'entraide aux autorités anglaises ayant pour objets l'audition de C______. Dans ce cadre, bien que l'occasion lui en ait été donnée, le recourant n'a formulé aucune question à soumettre à ce témoin.
Le Ministère public ne s'est adressé directement à C______ qu'après que les autorités anglaises, ayant conclu à l'impossibilité d'auditionner ce dernier pour cause de maladie grave, l'y ont incité, ce qui comprenait la possibilité d'obtenir des déterminations écrites de la part du prénommé. Ainsi, à aucun moment, les autorités anglaises ne se sont opposées à une telle manière de procéder ni même n'ont évoqué le fait qu'elle contreviendrait à la législation britannique, l'encourageant au contraire. Dans ces circonstances, il n'apparaît pas d'emblée que les preuves recueillies auprès de la Grande‑Bretagne par le Ministère public, selon ces modalités, seraient illicites, au sens des normes applicables, qu'elles soient de droit anglais ou transnationales (CEEJ, PA II CEEJ).
S'agissant des conversations téléphoniques entre la greffière et C______, il apparaît douteux qu'elles puissent être considérées comme des auditions téléphoniques, au sens de l'art. 10 PA II CEEJ. Cela étant, cette question peut rester indécise, dans la mesure où, même à considérer que tel serait le cas, celles-ci n'apparaissent pas non plus d'emblée illicites au vu du contexte précité.
3.8. On ne voit pas non plus que le caractère illicite de la manière de procéder sus-décrite s'imposerait d'emblée en droit suisse.
En effet, la possibilité de procéder par des rapports écrits est prévue à l'art. 145 CPP et l'absence d'un procès-verbal est inhérente à cette manière de faire, sans que cela ne contrevienne à l'art. 148 al. 1 let. b CPP.
C______ a ainsi produit ses déterminations écrites, sur une base volontaire, sans aucune contrainte de la part du Ministère public, ce que le recourant n'allègue au demeurant aucunement.
De plus, les déterminations litigieuses concernent des documents sur lesquels le prénommé devait précisément être entendu dans le cadre de la commission rogatoire, pour laquelle le recourant a été consulté avant envoi. En outre, à réception, les écrits en question ont été transmis aux parties et occasion leur a été donnée de formuler des réquisitions de preuves complémentaires – dans le cadre du délai d'avis de prochaine clôture que leur a adressé le Ministère public –. Le recourant n'en a formulé aucune en lien avec les déterminations en cause. Il n'a, en particulier, formulé aucune question complémentaire qui aurait dû être posée à C______, alors même que ce dernier n'avait répondu qu'aux deux questions formulées par le Ministère public.
Quant aux conversations téléphoniques entre la greffière et C______, elles n'ont pas été transcrites, de sorte qu'on ne voit pas en quoi ce qui aurait été dit pourrait être incriminant ou retenu contre le recourant. Celui-ci ne le soutient au demeurant pas.
Il résulte des développements qui précèdent que l'on ne saurait considérer que le caractère illicite, et, partant, manifestement inexploitable des preuves litigieuses, s'imposerait d'emblée au regard des normes helvétiques également.
Par ailleurs, le recourant ne fait valoir aucun intérêt juridiquement protégé au constat immédiat du caractère inexploitable des documents visés et ne prétend en particulier pas que soumettre la question de leur légalité au juge du fond le priverait d'un procès équitable.
4. Justifiée, la décision querellée sera donc confirmée et le recours rejeté.
5. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, fixés en totalité à CHF 1'000.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03). L'autorité de recours est en effet tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).
6. Il sera statué sur l'indemnité du défenseur d'office à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :
Rejette le recours.
Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 1'000.-.
Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.
Siégeant :
Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Mesdames Valérie LAUBER et Catherine GAVIN, juges; Monsieur Sandro COLUNI, greffier.
Le greffier : Sandro COLUNI |
| La présidente : Daniela CHIABUDINI |
Voie de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse
(art. 48 al. 1 LTF).
P/25726/2023 | ÉTAT DE FRAIS |
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COUR DE JUSTICE
Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).
Débours (art. 2) | | |
- frais postaux | CHF | 10.00 |
Émoluments généraux (art. 4) | | |
- délivrance de copies (let. a) | CHF | |
- délivrance de copies (let. b) | CHF | |
- état de frais (let. h) | CHF | 75.00 |
Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13) | | |
- décision sur recours (let. c) | CHF | 915.00 |
Total | CHF | 1'000.00 |