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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/12161/2024

ACPR/398/2024 du 29.05.2024 sur OTMC/1545/2024 ( TMC ) , REFUS

Descripteurs : DÉTENTION PROVISOIRE;RISQUE DE COLLUSION;RISQUE DE FUITE
Normes : CPP.221.al1.leta; CPP.221.al1.letb; CP.187; CP.188; CP.190; CP.196

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/12161/2024 ACPR/398/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 29 mai 2024

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, représenté par Me C______, avocat,

recourant,

 

contre l'ordonnance de mise en détention provisoire rendue le 19 mai 2024 par le Tribunal des mesures de contrainte,

 

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève - case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 21 mai 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 19 mai 2024, notifiée à l'audience du même jour, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a ordonné sa mise en détention provisoire jusqu'au 17 août 2024.

Le recourant conclut, préalablement, à ce qu'il soit ordonné à la police et/ou au Ministère public de produire les renseignements de police et/ou le casier judiciaire de la plaignante et, principalement, à l'annulation de l'ordonnance précitée et à sa mise en liberté immédiate, le cas échant assortie de mesures de substitution qu'il énumère.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 16 mai 2024 en début de soirée, D______, née le ______ 1995, de nationalité espagnole et sa demi-sœur (même mère) E______, née le ______ 2006, se sont présentées au poste de police des F______ pour dénoncer des actes d'ordre sexuel de la part de leur beau-père, A______, né le ______ 1971.

D______ a indiqué avoir, entre ses 13 et 19 ans, à l'exception de deux pauses, alors qu'elle était partie faire des études en Espagne puis tombée enceinte d'un tiers, avoir dû entretenir avec son beau-père et à son initiative, des relations vaginales complètes, sans préservatif, outre dû lui faire des fellations et subir des cunnilingus. C'était pour elle comme un jeu. Elle était vierge lors du premier rapport.

E______, entendue le 17 mai 2024 selon le protocole NICHD, a déclaré avoir le souvenir que lorsqu'elle avait environ 3 ans, son beau-père, alors qu'elle jouait avec un plateau comportant des instruments médicaux, tels une seringue, avait posé son sexe dessus. Il lui semblait avoir joué avec. Ses souvenirs étaient toutefois vagues. Alors qu'elle avait 12 ou 13 ans, sa mère l'avait surprise en train de regarder un film pornographique, l'avait grondée et en avait parlé à son beau-père. Celui-ci était venu dans sa chambre, en souriant, s'était couché à côté d'elle et l'avait rassurée en lui disant que tout le monde faisait ça. Il lui avait demandé si elle se masturbait. Elle lui avait répondu par la négative et il lui avait expliqué ce que c'était. À partir de ce moment-là, il s'était montré plus proche d'elle, mettait ses mains sur sa taille, essayait de lui toucher les fesses et de l'embrasser, mais elle le repoussait toujours. Elle avait subi des attouchements sexuels de la part de A______ entre ses 13 ans et 14 ans et demi. Ce dernier profitait du fait que sa mère avait commencé à travailler de nuit pour venir dans sa chambre et lui faire des choses qu'il n'avait jamais faites auparavant, à savoir des bisous sur la joue quand elle était dans son lit. Il était arrivé plusieurs fois, qu'alors qu'elle l'accompagnait faire des ménages dans un cabinet médical, qu'il s'asseyât sur une table et qu'elle lui auscultât les oreilles. Il lui touchait alors la taille, les fesses et lui faisait des bisous sur la bouche. Une fois, elle lui avait dit d'arrêter et qu'elle irait le dire à sa mère et il avait cessé. Il avait essayé de lui toucher le sexe par-dessus les habits mais elle lui avait dit d'arrêter. Elle essayait toujours d'esquiver ses bisous, de le repousser ou de bouger lorsqu'il touchait ses fesses.

b. G______, mère des deux plaignantes et épouse de A______, a longuement été entendue par la police le 17 mai 2024.

c. Devant la police, A______ a dit tout le mal qu'il pensait du comportement de D______, qui avait 13 ans lorsqu'il était arrivé au sein de sa famille. Elle n'avait pas fini le cycle d'orientation, était tombée enceinte à 17 ans, avait de mauvaises fréquentations et fumait de la marijuana. Elle pensait à tort que c'était lui qui l'avait chassée de la maison. Elle n'avait plus d'endroit où aller depuis sa rupture avec son petit copain. La famille pensait qu'elle se prostituait. D______ n'avait plus le droit de voir sa propre fille depuis trois ans.

Il ne l'avait jamais violée ni n'avait touché sa fille adoptive E______. D______ devait avoir influencé E______ pour qu'elle dise qu'il lui avait fait des attouchements. Celle-ci devait mal vivre le fait qu'il soit strict, notamment avec l'école.

Il avait eu deux filles avec la mère de D______ et de E______, H______ et I______, alors qu'il avait décidé de ne plus boire et de se concentrer sur sa famille. Il vivait avec son épouse, E______ et leurs deux filles communes dont il était très proche.

d. A______ a été mis en prévention par le Ministère public le 18 mai 2024 des chefs d'actes d'ordre sexuel avec des mineurs (art. 187 CP), d'actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes (art. 188 CP), de viol (art. 190 CP) et de tentative d'actes d'ordre sexuel avec des mineurs contre rémunération (art. 196 CP), pour avoir, à des dates indéterminées à tout le moins entre 2008 et 2020, à Genève, commis des actes d'ordres sexuel sur D______ et sur E______.

A______ a contesté ces faits. D______ devait avoir subi une mauvaise influence de son ex-copain et E______ devait avoir été influencée par sa sœur D______.

e. S'agissant de sa situation personnelle, A______ fait des ménages et est "homme à tout faire" chez une personne âgée. Son revenu mensuel net s'élève à CHF 3'700.-. Il est au bénéfice d'un permis d'établissement (permis C). Son fils, âgé de 26 ans, qui est handicapé, vit en Colombie, de même que son ex-épouse, avec laquelle il a "beaucoup de contacts" via Whatsapp. Le recourant a vécu dans ce pays jusqu'à ses 33 ans, avant d'aller s'installer en Espagne pour des raisons économiques. Il y est resté pendant deux ans, puis est venu en Suisse.

C. Dans la décision querellée, le TMC retient, outre l'existence de charges suffisantes et graves, les besoins de l'instruction, qui ne faisait que commencer et devait notamment comprendre l'audition des membres de la famille et de l'entourage du prévenu, de la psychologue de E______, ainsi que l'extraction du contenu du téléphone de l'intéressé.

Le risque de fuite était concret, vu la nationalité [colombienne] du prévenu. Il existait un risque de collusion avec les parties plaignantes et l'entourage familial. Le risque de réitération ne pouvait pas être exclu, dès lors que le prévenu partageait le domicile familial avec ses deux filles H______ et I______ du même âge que celui des deux plaignantes au moment des actes dénoncés.

Aucune mesure de substitution n'était susceptible d'atteindre les mêmes buts que la détention au vu de ces risques.

D. a. À l'appui de son recours, A______ fait valoir que la crédibilité de D______ était problématique, car elle avait tout intérêt à mentir pour récupérer son permis de séjour, ce qui était notoire pour les personnes ayant un statut de victimes d'infractions graves. Si elle revêtait ce statut, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant serait possiblement plus enclin à lui rendre au moins partiellement la garde de son enfant. L'existence de mentions dans les renseignements de police ou le casier judiciaire de D______ avaient une influence évidente sur la crédibilité de celle-ci dont la mère avait déclaré ne pas savoir qui croire. D______ et E______ avaient une forte animosité à son encontre. Toutes deux étaient venues déposer plainte ensemble, ce qui indiquait qu'il était probable que D______ ait incité sa petite sœur à "inventer toute cette histoire". Il ne voyait pas en quoi les déclarations des deux plaignantes étaient plus crédibles que les siennes, lui qui n'avait jamais eu affaire à la justice, ne s'était aucunement contredit et avait pleinement collaboré.

Au vu de la faiblesse des preuves, il était disproportionné de le priver de la possibilité de travailler auprès de son employeuse et de subvenir aux besoins de sa famille.

Rien n'indiquait concrètement qu'il aurait réellement la volonté d'exercer une quelconque influence sur les parties plaignantes. Il proposait de vivre chez son employeuse avec une interdiction absolue de contact avec les membres de sa famille. Il n'aurait aucun intérêt à enfreindre de telles mesures de substitution, dans la mesure où, pour l'instant, rien ne l'incriminait à part les déclarations des deux sœurs, lesquelles appelleraient immédiatement la police s'il cherchait à les contacter.

Le Ministère public n'avait, dans sa demande, à juste titre, pas retenu de risque de réitération. Il était évident que l'interdiction de contact, une assignation résidence chez son employeuse et une interdiction d'approcher la résidence de la famille écarterait un tel risque, d'autant plus qu'il n'avait aucun antécédent judiciaire.

Enfin, il n'avait aucune raison de fuir, dans la mesure où il était titulaire d'un permis d'établissement et qu'il avait toute sa famille et sa vie ici. De plus, les preuves à son encontre étaient faibles et il était disposé à fournir des sûretés, d'un montant de CHF 10'000.- ou plus. En cas de condamnation, il préférerait pragmatiquement le relatif confort d'une cellule Suisse à celui d'une prison étrangère.

Il était donc inopportun de le placer en détention.

b. Le TMC maintient les termes de son ordonnance.

c. Le Ministère public conclut au rejet du recours, faisant siennes les considérations de l'ordonnance attaquée.

Sans préjuger de leur véracité, les récits des plaignantes apparaissaient originaux, mesurés et précis et rien n'indiquait qu'elles auraient pu s'exprimer dans la perspective de bénéfices étrangers à la procédure ou dans le but de nuire au prévenu.

d. Dans sa brève réplique, A______ relève que le Ministère public n'avait toujours pas produit les renseignements de police et/ou le casier judiciaire de D______, dont la consommation de drogue était par ailleurs avérée sur la base du dossier.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant sollicite l'apport au dossier des renseignements de police et du casier judiciaire de l'une des plaignantes.

Ceci n'est toutefois pas l'objet du litige qui est circonscrit à l'ordonnance de mise en détention provisoire du TMC.

Cette conclusion est irrecevable.

3.             Le recourant conteste l'existence de charges suffisantes.

3.1.       Pour qu'une personne soit placée en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, il doit exister à son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, susceptibles de fonder de forts soupçons d'avoir commis une infraction (art. 221 al. 1 CPP). L'intensité de ces charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables. Au contraire du juge du fond, le juge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge ni à apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2).

3.2.       En l'espèce, le recourant est prévenu d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 CP), d'actes d'ordre sexuel avec des personnes dépendantes (art. 188 CP), de viol (art. 190 CP) et de tentative d'actes d'ordre sexuel avec des mineurs contre rémunération (art. 196 CP) en lien avec des agissements commis sur ses deux belles-filles durant leur adolescence. Les déclarations cohérentes des deux plaignantes paraissent en l'état crédibles, même si le recourant conteste en bloc sa mise en cause. Partant, il existe à ce stade des soupçons suffisants de la commission de ces infractions. S'agissant notamment de crimes (art. 10 al. 2 CP), la première condition visée à l'art. 221 al. 1 CP est réalisée.

4.             Le recourant conteste l'existence d'un risque de collusion et propose, s'il devait être retenu, des mesures de substitution à la détention provisoire.

4.1.       Conformément à l'art. 221 al. 1 let. b CPP, la détention provisoire ne peut être ordonnée que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit et qu'il y a sérieusement lieu de craindre qu'il compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuve. Pour retenir l'existence d'un risque de collusion, l'autorité doit démontrer que les circonstances particulières du cas d'espèce font apparaître un danger concret et sérieux de manœuvres propres à entraver la manifestation de la vérité, en indiquant, au moins dans les grandes lignes et sous réserve des opérations à conserver secrètes, quels actes d'instruction doivent être encore effectués et en quoi la libération du prévenu en compromettrait l'accomplissement. Dans cet examen, entrent en ligne de compte les caractéristiques personnelles du détenu, son rôle dans l'infraction ainsi que ses relations avec les personnes qui l'accusent. Entrent aussi en considération la nature et l'importance des déclarations, respectivement des moyens de preuve susceptibles d'être menacés, la gravité des infractions en cause et le stade de la procédure. Plus l'instruction se trouve à un stade avancé et les faits sont établis avec précision, plus les exigences relatives à la preuve de l'existence d'un risque de collusion sont élevées (ATF 137 IV 122 consid. 4.2; 132 I 21 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_577/2020 du 2 décembre 2020 consid. 3.1).

4.2.       Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention, par exemple la fourniture de sûretés (al. 2 let. a), la saisie des documents d'identité et autres documents officiels (al. 2 let. b), l'assignation à résidence ou l'interdiction de se rendre dans un certain lieu ou un certain immeuble (al. 2 let. c), l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif (al. 2 let. d), d'avoir un travail régulier (al. 2 let. e), de se soumettre à un traitement médical ou à des contrôles (al. 2 let. f) et l'interdiction d'entretenir des relations avec certaines personnes (al. 2 let. g). La liste des mesures de substitution énoncée à l'art. 237 CPP n'est pas exhaustive (arrêt du Tribunal fédéral 1B_654/2011 du 7 décembre 2011 consid. 4.2).

4.3.       Une interdiction d'approcher peut dans certains cas suffire à prévenir le risque de collusion. Tel est notamment le cas lorsque les déclarations à charge émanent de la victime elle-même (cf. ATF 137 IV 122 consid. 4.3 p. 128 et 6.4), puisque l'on peut attendre de celle-ci qu'elle signale spontanément et immédiatement à l'autorité toute tentative de prise de contact ou d'intimidation (arrêt du Tribunal fédéral 1B_172/2015 du 28 mai 2015 consid. 4.2.).

4.4.       L'interdiction d'entrer en contact au sens de l'art. 237 al. 2 let. g CPP ne peut en principe porter que sur des personnes déterminées (arrêts 1B_485/2019 du 12 novembre 2019 consid. 3.4.2; 1B_121/2019 du 8 avril 2019 consid. 4.4).

4.5.       En l'espèce, le TMC a retenu un risque de collusion à l'égard des deux parties plaignantes et de l'entourage familial.

Un tel risque de collusion est très élevé, en particulier à cette phase de l'instruction qui ne fait que débuter. Avant son arrestation, le recourant vivait notamment avec E______ et son épouse, mère des deux plaignantes. Or, le recourant conteste les faits et a exprimé longuement tout le mal qu'il pensait de sa belle-fille D______ et de l'influence que celle-ci aurait sur sa sœur E______, d'où leurs mensonges à son sujet. Dans ce contexte, le risque est très grand que, libéré, le recourant ne reprenne contact avec les deux plaignantes et leur entourage et ne cherche à modifier leurs souvenirs. Or, il est probable que les deux plaignantes soient entendues devant le Ministère public, D______ étant âgée de 28 ans et E______ de bientôt 18 ans, de même que leur mère. Il n'est de plus pas exclu que les deux filles mineures du recourant le soient également selon le protocole NICHD.

En l'occurrence, la mesure de substitution proposée par le recourant, sous la forme d'une interdiction d'entrer en contact avec les parties plaignantes et toutes autres personnes concernées par la présente procédure, est insuffisante au regard de la nature et de l'intensité du risque de collusion constaté. Une telle mesure paraît en outre particulièrement difficile à contrôler, compte tenu du nombre des personnes potentiellement concernées, et ne permet pas, en l'état, de pallier le risque d'atteinte à la recherche de la vérité.

5.             Le recourant conteste tout risque de fuite et propose, s'il devait être retenu, le versement d'une caution de CHF 10'000.- "ou plus" et de ses documents d'identité.

5.1.       Conformément à l'art. 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire peut être ordonnée s'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite. Selon la jurisprudence, le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier le placement ou le maintien en détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 145 IV 503 consid. 2.2; 143 IV 160 consid. 4.3).

5.2.       À teneur de l'art. 238 CPP, le tribunal peut, s'il y a danger de fuite, astreindre le prévenu au versement d'une somme d'argent afin de garantir qu'il se présentera aux actes de procédure et se soumettra à l'exécution d'une sanction privative de liberté (al.1). Le montant des sûretés dépend de la gravité des actes reprochés au prévenu et de sa situation personnelle (al. 2).

5.3.       En l'espèce, le recourant est de nationalité colombienne et titulaire d'un permis C. Il a vécu en Colombie jusqu'à ses 33 ans. Son fils âgé de 26 ans et son ex-épouse, avec laquelle il est en contact régulier, vivent en Colombie. Il y conserve donc des attaches. Ainsi et quand bien même son épouse et ses deux filles biologiques vivent en Suisse et où il y exerce un emploi d'"homme à tout faire", un départ en Colombie n'est pas totalement exclu au vu de la peine-menace et de la peine concrètement encourue.

Le versement d'une caution de CHF 10'000.- "ou plus", la saisie de son passeport ainsi que de son permis d'établissement et une assignation à résidence chez son employeuse n'apparaissent pas suffisants pour pallier efficacement le risque qu'il se soustraie à la justice.

C'est donc à bon droit que le TMC a retenu un risque de fuite et qu'aucune mesure de substitution, notamment celles proposées par le recourant, n'était apte à le pallier.

6. Au vu des risques retenus, point n'est besoin d'examiner si s'y ajoute un risque de réitération (Tribunal fédéral 7B_188/2024 du 12 mars 2024 consid. 6.3.1).

6.             Le recours s'avère ainsi infondé et doit être rejeté.

7. Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

8. Le recourant plaide au bénéfice d'une défense d'office.

8.1. Selon la jurisprudence, le mandat de défense d'office conféré à l'avocat du prévenu pour la procédure principale ne s'étend pas aux procédures de recours contre les décisions prises par la direction de la procédure en matière de détention avant jugement, dans la mesure où l'exigence des chances de succès de telles démarches peut être opposée au détenu dans ce cadre, même si cette question ne peut être examinée qu'avec une certaine retenue. La désignation d'un conseil d'office pour la procédure pénale principale n'est pas un blanc-seing pour introduire des recours aux frais de l'État, notamment contre des décisions de détention provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 1B_516/2020 du 3 novembre 2020 consid. 5.1).

8.2. En l'occurrence, quand bien même le recourant succombe, on peut admettre que l'exercice de ce premier recours ne procède pas d'un abus.

L'indemnité du défenseur d'office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Corinne CHAPPUIS BUGNON et Valérie LAUBER, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/12161/2024

ÉTAT DE FRAIS

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

 

 

Total

CHF

900.00