Skip to main content

Décisions | Chambre pénale de recours

1 resultats
P/23931/2022

ACPR/281/2024 du 23.04.2024 sur ONMMP/678/2024 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : ORDONNANCE DE NON-ENTRÉE EN MATIÈRE;DÉTENU;AVOCAT;FOUILLE;PERQUISITION DE DOCUMENTS ET ENREGISTREMENTS
Normes : CPP.310; CP.312; CPP.235; CP.85; CP.84; CPP.136

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/23931/2022 ACPR/281/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 23 avril 2024

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, représenté par Me C______, avocat,

recourant,

 

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 13 février 2024 par le Ministère public,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,- case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 26 février 2024, A______ recourt contre l'ordonnance du 13 février 2024, notifiée le 15 suivant, par laquelle le Ministère public a refusé d'entrer en matière sur sa plainte pénale – visant les trois gardiens de la prison de B______ ayant opéré une fouille de sa cellule le 7 septembre 2022 – et a rejeté sa demande d'assistance judiciaire.

Il sollicite, préalablement, à être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite pour la procédure de recours, subsidiairement à l'octroi d'une indemnité pour ses frais de défense, la transmission du dossier à la Chambre de céans et son audition. Sur le fond, il conclut à l'annulation de l'ordonnance susmentionnée et au renvoi de la cause au Ministère public pour ouverture d'une instruction et mise en œuvre des réquisitions de preuves qu'il a formulées, et à ce qu'il soit ordonné à cette autorité de le mettre au bénéfice de l'assistance juridique gratuite et de nommer à cette fin Me C______, avocat, à compter du jour de sa demande, soit le 9 novembre 2022.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. A______ est détenu à la prison de B______ depuis septembre 2019, dans le cadre de la procédure P/1______/2019 instruite par le procureur D______, qui porte notamment sur des infractions d'assassinat, violation de domicile, brigandage aggravé, vol, atteinte à la paix des morts, contrainte, séquestration et enlèvement, et tentative d'extorsion et de chantage.

b. A______ a, à de nombreuses reprises, dont certaines fois en agissant en personne, mis en cause la manière dont l'instruction était menée. Il a, entre autres, formé plusieurs requêtes de récusations du procureur D______, toutes rejetées (ACPR/539/2021 du 17 août 2021, ACPR/540/2022 du 10 août 2022, ACPR/190/2023 du 15 mars 2023 et ACPR/310/2023 du 4 mai 2023).

c.a. Le 9 novembre 2022, A______ a déposé plainte pour abus d'autorité contre des gardiens de B______, dont il ignorait à ce stade l'identité, en exposant ce qui suit :

En raison de la procédure dont il faisait l'objet, il conservait de nombreux documents confidentiels dans sa cellule, notamment des pièces de procédure, des courriers d'avocats et des notes manuscrites consignées dans un petit carnet bleu et sur un bloc-notes.

Le 7 septembre 2022, trois gardiens avaient procédé à une fouille de ses affaires. Ils étaient repartis en emportant près de 500 pages de documents, sans qu'il puisse identifier lesquelles avec exactitude. Figuraient toutefois parmi elles son carnet bleu, lequel contenait des informations couvertes par le secret professionnel de l'avocat, divers courriers, dont certains à/de ses avocats, un bloc de papier contenant des brouillons de courriers destinés à ces derniers ou aux autorités pénales, des notes manuscrites, une liste de quelque 4'000 contacts ainsi qu'une copie de la sauvegarde de ceux-ci transmises par son ancien avocat, un tableau de messages WhatsApp et un procès-verbal d'audition dans une procédure française. Vu la nature des documents disparus et le fait que les affaires de son codétenu, E______, n'avaient pas été touchées, il avait rapidement suspecté le Procureur D______ d'être à l'origine de cette fouille, puisque tel avait été le cas d'une fouille similaire, exécutée en octobre 2019 et s'étant soldée par la saisie de vêtements.

Alerté, son conseil avait immédiatement écrit au directeur de la prison – qui avait affirmé, dans un courrier du 21 septembre 2022, qu'il s'agissait d'une fouille "aléatoire" – pour l'inviter à restituer les documents et dresser un inventaire de ceux qui auraient été saisis. Lorsqu'ils lui avaient été rendus, deux jours plus tard, il avait constaté qu'une enveloppe d'un courrier adressé par son avocat avait été ouverte; ils avaient par ailleurs manifestement été consultés, puisqu'ils étaient dans le désordre, et qu'il avait retrouvé les quelque 3'000 pages de documents relatifs à la procédure laissés dans sa cellule sens dessus dessous, certains traînant sur le sol.

La saisie de ses documents confidentiels par des gardiens, qui avaient agi sans motif et sans base légale, était grave et disproportionnée, les intéressés ayant manifestement outrepassé leurs pouvoirs et agi dans le but de lui nuire, se rendant ainsi coupable d'abus d'autorité.

c.b. À l'appui de sa plainte, A______ a requis la saisie immédiate de l'ensemble des éventuelles images de vidéosurveillance encore disponibles, notamment celles du couloir menant à sa cellule, de manière à identifier les gardiens ayant participé à la fouille; la saisie de l'intégralité des échanges et notes internes de la prison de B______ au sujet de cette fouille; sa propre audition, de même que celle de E______, du directeur de B______ et de l'ensemble des personnes impliquées dans la décision de procéder à la fouille.

c.c. A______ a requis l'assistance judiciaire, en mettant en avant la gravité des faits dénoncés, sa position de vulnérabilité, en tant que détenu opposé à des agents de l'État, et son indigence manifeste.

d. À réception, le Ministère public a transmis la plainte et ses annexes à l'Inspection générale des services (IGS), pour complément d'information, en se référant à l'art. 309 al. 2 CPP.

d.a. Sur la base du rapport d'incident – qui n'en mentionne pas les motifs – rédigé le 7 septembre 2022 par K______, gardien principal de la brigade d'intervention et de surveillance (ci-après BIS), l'IGS a déterminé que la fouille avait été effectuée sur ordre du gardien-chef adjoint G______, en présence des agents de détention H______ et I______.

À teneur de ce document, tous les effets personnels des détenus, de même que les matelas, avaient été passés aux rayons X, les boiseries contrôlées et démontées dans la mesure du possible et la partie électrique contrôlée. Des feuilles manuscrites avec des numéros de téléphone, ainsi que des adresses, avaient été trouvées.

d.b. Compte tenu du délai de deux mois écoulé entre les événements et la plainte, aucune image issue des caméras de vidéosurveillance n'avait été sauvegardée, que ce soit celles du 7 septembre 2022 à proximité de la cellule ou celles ayant pu filmer, deux jours plus tard, la restitution de ses affaires à A______.

d.c. Entendu par l'IGS le 8 juin 2023, en présence de son avocate, A______ a confirmé les termes de sa plainte.

Avant que ne débute la fouille, lui-même et son codétenu avaient été déplacés dans une petite salle de sport à l'étage, de sorte qu'ils n'avaient pas vu ce qui se passait. Il connaissait de vue les trois gardiens qui avaient procédé à la fouille et s'entendait bien avec eux, de sorte qu'il était certain qu'ils avaient agi sur ordre. Il pensait que la fouille incriminée était orientée et devait être mise en lien avec la prolongation de sa détention, que le Ministère public devait requérir quelques jours plus tard. Les précédentes fouilles dont il avait fait l'objet étaient en effet toutes intervenues à la veille d'une audience. Par ailleurs, les affaires de son codétenu n'avaient pas été fouillées et les traces usuelles du démontage de structure – sciure ou poussière de béton – faisaient défaut.

En revenant dans sa cellule, il avait notamment constaté que l'ensemble de ses documents, qui se trouvaient rangés au même endroit, avait été fouillé et que des enveloppes, certaines émanant d'avocats, avaient été ouvertes. Les gardiens semblaient avoir sélectionné les documents, comme si leurs recherches étaient orientées. Il ignorait dans quelles conditions les 500 pièces manquantes avaient été saisies, ni si elles avaient été scannées ou copiées. Elles lui avaient été restituées deux jours plus tard, dans le réfectoire où il travaillait, par le gardien J______, accompagné d'un collègue. Ceux-ci lui avaient brièvement ouvert sa cellule pour qu'il puisse les y poser, ce qui ne lui avait pas laissé le temps de vérifier que tout lui avait été rendu. Un instant plus tard, J______ était revenu en disant avoir oublié des documents dans la pile et avait repris ce que lui-même avait vu être des photocopies de papiers saisis. Comme les gardiens paraissaient mal à l'aise et évitaient le dialogue, il n'avait pu les questionner sur la fouille et la saisie. En compilant ce qui lui avait été rendu, il avait constaté que trois ou quatre pages manquaient, soit à tout le moins un courrier d'avocat contenant une sauvegarde de ses messages WhatsApp, de même qu'un bloc de feuilles de brouillons manuscrits de courriers destinés à ses avocats et aux autorités pénales.

Il avait compris par la suite que le procureur D______ avait reçu en tous cas copie de certains de ses écrits, car il les avait mentionnés notamment dans une prise de position sur l'un de ses propres recours. Le magistrat avait ainsi certainement agi pour les mêmes motifs que précédemment, soit pour dissimuler des preuves à décharge.

d.d. Entendu par l'IGS le 20 juin 2023, J______ a expliqué avoir reçu, le matin du 7 septembre 2022, un appel du procureur D______ l'informant qu'à teneur des écoutes de ses conversations téléphoniques, A______ pourrait détenir un téléphone portable dans sa cellule.

Il avait immédiatement demandé à G______ d'organiser la fouille complète de la cellule. Celle-ci avait duré environ une heure. La procédure voulait que la cellule soit entièrement démontée et toutes les affaires des détenus fouillées et passés aux rayons X. Comme il n'y avait pas assisté, il ne pouvait garantir que cela se soit passé de la sorte. G______ l'avait ensuite contacté pour lui dire qu'aucun téléphone n'avait été retrouvé, mais que les gardiens avaient pris l'initiative de saisir divers documents, notamment 400 pages de contacts personnels de A______ et diverses notes sur un bloc de papier et dans un carnet bleu. Lui-même les avait parcourus afin d'avoir un minimum d'informations à communiquer au procureur, et pouvait confirmer qu'il n'y avait aucune correspondance d'avocat ou document officiel relatif à une procédure pénale parmi eux, hormis une planche photographique provenant d'une procédure française; les autres personnes qui auraient pu consulter les documents étaient les agents qui avaient procédé à la fouille, G______ et son collègue de bureau. Il avait ensuite écrit au procureur D______ pour savoir ce qu'il convenait d'en faire, étant précisé que, pour sa part, il les considérait sans utilité, du fait qu'ils ne contrevenaient pas au règlement et au fonctionnement de la prison. N'ayant pas eu de réponse, il les avait immédiatement rendus, à réception de la lettre de l'avocat de A______ exigeant leur restitution, après avoir effectué un certain nombre de photocopies, au cas où le procureur se manifesterait. A______ était alors occupé au nettoyage; il avait feuilleté la fourre qui lui avait été remise, notamment à la recherche de son calepin, et s'était plaint de la manière dont la fouille s'était déroulée, notamment du désordre dans lequel ses affaires avaient été laissées. Alors qu'il s'éloignait, lui-même avait réalisé qu'il avait laissé les photocopies qu'il avait faites dans la pile des documents restitués et était retourné vers A______ pour les récupérer. Le 12 septembre 2022, étant toujours sans nouvelles du procureur D______, il avait détruit les photocopies dans un broyeur.

J______ a précisé qu'à l'époque, il était fréquent que des documents soient saisis dans les cellules à l'initiatives des gardiens. Quelques semaines après les événements litigieux, la procédure avait toutefois été modifiée et une directive avait été émise, selon laquelle le rapport d'incident devait désormais mentionner le motif de la fouille, le nom de son commanditaire et la liste des documents saisis.

d.e. G______ a déclaré à l'IGS ne pas se rappeler que J______ lui aurait donné des raisons particulières à la fouille. Il avait demandé à K______ d'y procéder avec son équipe, mais n'y avait pas assisté ni ne s'était occupé de ses suites administratives. Il n'avait donc aucune idée de ce qui avait été saisi ou non, ni de ce qui avait été fait des documents ensuite. Il n'avait eu aucun contact avec le procureur D______ et ne voyait pas pourquoi ce dernier lui aurait demandé de saisir certains documents, notamment des courriers d'avocat.

De manière générale, étaient recherchés, lors des fouilles, des armes, des téléphones, des cartes SIM, des stupéfiants et des documents écrits qui seraient susceptibles de porter préjudice au fonctionnement de la prison. Les documents d'avocat ou liés à des procédures n'étaient jamais saisis, les enveloppes restaient fermées et le courrier n'était pas lu. Lorsqu'une fouille était terminée et du matériel saisi, le gardien-chef adjoint qui l'avait ordonnée se voyait remettre ce dernier ainsi que le rapport d'incident. Il photocopiait les documents, photographiait les objets, les scannait, y compris le rapport d'incident et, en fin de journée, envoyait le tout à la direction. Le matériel saisi et les rapports d'incidents originaux étaient quant à eux déposés dans les pelles à courrier des responsables des différents secteurs. Il n'avait pas de raison de penser que cette procédure n'aurait pas été suivie dans le cas présent.

Il a confirmé que, depuis la fouille litigieuse, les rapports d'incident contenaient davantage d'informations, notamment les motifs, s'il y en avait, de la fouille.

d.f. K______ a expliqué que G______ lui avait demandé d'organiser une fouille extraordinaire de la cellule de A______. Il ne se rappelait pas de son but, mais de manière générale, les fouilles visaient la recherche de matériel prohibé. Il était responsable de son bon déroulement et y avait assisté, dès lors qu'il avait rédigé le rapport y relatif. Il n'en gardait toutefois pas de souvenir particulier, pouvant effectuer jusqu'à quatre fouilles par jour. Dans la mesure où, lors d'une fouille cellulaire, les affaires des détenus étaient déposées dans le couloir, il avait attendu que A______ et E______ quittent l'unité pour débuter le travail. La cellule comportait énormément d'affaires personnelles, de sorte qu'il avait dû demander de l'aide à quelques collègues de l'étage. Tout avait été fouillé, soit aux rayons X, soit à la main. Il avait procédé lui-même au démontage des boiseries, avec ses collaborateurs. Il y avait de nombreux documents dans la cellule, notamment des lettres d'avocat, ainsi que des numéros de téléphones inscrits sur des feuilles de brouillon. Il les avait rapidement feuilletés en les lisant en diagonale, afin de faire la distinction entre la correspondance d'avocat, qu'il n'avait ni lue ni saisie, et les documents pouvant porter préjudice au fonctionnement de la prison. Il avait ainsi vérifié brièvement l'intérieur des enveloppes ouvertes d'avocat, afin de s'assurer qu'aucune arme ou de la drogue n'y soit pas dissimulée – ce qui arrivait de temps en temps – et mis de côté ce qu'il imaginait être intéressant. Il procédait ainsi lors de chaque fouille, saisissant entre autres les numéros de téléphone et les documents susceptibles de contenir des messages particuliers, sur lesquels ne figurait pas de tampon de validation du greffe. De mémoire, tel était le cas des adresses et numéros de téléphone contenus dans un dossier trouvé dans la cellule de A______, qui ne comportait pas de tampon du greffe et qu'il avait saisi, après en avoir référé à G______, de même que la planche photographique, qui lui avait paru "tendancieuse". Il ignorait ce qu'il en était advenu après leur transmission à ses supérieurs.

C. Dans son ordonnance querellée, le Ministère public a retenu que la fouille de la cellule de A______ et la consultation des courriers d'avocat ouverts étaient légitimes, puisque commandées par la nécessité de vérifier qu'ils ne contenaient pas d'éléments susceptibles de porter préjudice au fonctionnement de la prison. Elle était également proportionnée, les courriers d'avocat n'ayant été ni saisis, ni lus, et les autres pièces ayant été rapidement restituées, une fois le constat posé qu'elles ne contenaient pas d'informations problématiques. Dans ce contexte, les actes des gardiens ne prêtaient pas le flanc à la critique. Il n'existait ainsi pas de soupçons d'abus d'autorité, les actes d'enquêtes sollicités par l'intéressé étant soit impossibles à mettre en œuvre, soit sans pertinence pour l'issue de la procédure.

D. a. Dans son recours, A______ fait valoir que l'ampleur et le résultat des investigations déléguées à l'IGS dépassaient le stade des simples vérifications, de sorte que le Ministère public ne pouvait plus rendre une ordonnance de non-entrée en matière. Celle-ci, le privant de son droit d'être confronté aux personnes auditionnées et de requérir des actes d'instruction, en particulier l'audition de témoins supplémentaires, devait être annulée, pour ce motif déjà.

Sur le fond, il n'existait aucune base légale autorisant les gardiens à saisir les documents des personnes détenues, le règlement sur le régime intérieur de la prison se limitant à prévoir une inspection des locaux. En toute hypothèse, l'ampleur des actes auxquels les mis en cause avaient procédé (fouille, saisie, consultation, tri et photocopie de pièces) n'était manifestement pas dictée par des impératifs de sécurité – ce d'autant qu'il s'agissait de trouver un téléphone –, s'apparentait davantage à une perquisition et à un séquestre, soit à des mesures de contrainte qu'il appartenait au Ministère public, et non aux agents de détention, de décider, et était disproportionnée. Enfin, les mis en cause admettant avoir "parcouru" la correspondance, le Ministère public ne pouvait se satisfaire de leurs dénégations pour déterminer s'ils les avaient ou non lus, et devait ouvrir une instruction pénale pour éclaircir les faits.

Ses propres inquiétudes et la crédibilité de ses allégations avaient été confirmées par les investigations de l'IGS; le fait que la direction de la prison ait prétendu que la fouille était "aléatoire", ce qui était faux, l'absence de trace de l'appel du procureur au dossier de la P/1______/2019, la saisie d'à tout le moins un document de procédure – soit la planche photographique – et la destruction – alléguée mais non prouvée – des photocopies au sein de la prison, étaient ainsi autant d'éléments qui auraient dû conduire à l'ouverture d'une enquête.

À cet égard, aucune suite n'avait été donnée à ses demandes visant la saisie et le versement à la procédure des échanges et notes internes de la prison au sujet des événements dénoncés; l'audition du directeur de B______ et de l'ensemble des personnes impliquées dans la décision de procéder à la fouille, y compris le procureur D______.

Le refus de lui accorder l'assistance juridique était enfin infondé, dès lors qu'était en cause une infraction grave, commise par des agents de l'État au détriment d'une personne particulièrement vulnérable.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner du plaignant qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant sollicite la transmission du dossier de la procédure à la Chambre de céans et son audition par cette dernière.

La première conclusion est cependant sans objet, dès lors que le dossier a été remis à la Chambre de céans dès l'annonce du recours.

La seconde sera également rejetée, le recours faisant l'objet d'une procédure écrite (art. 397 al. 1 CPP), les débats ayant une nature potestative (art. 390 al. 5 CPP) et l'art. 29 al. 2 Cst. ne conférant pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3).

4. Le recourant estime que les actes délégués par le Ministère public à l'IGS sont d'une ampleur telle qu'il n'était plus possible de rendre une ordonnance de non-entrée en matière sans violer son droit d'être entendu.

4.1. Conformément à l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s’il ressort de la dénonciation, du rapport de police ou – même si l'art. 310 al. 1 CPP ne le mentionne pas – de la plainte que les éléments constitutifs d'une infraction ou les conditions de l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis.

En revanche, si une instruction est ouverte au sens de l'art. 309 CPP, elle doit être clôturée formellement (art. 318 al. 1 CPP), de sorte qu'une ordonnance de non-entrée en matière ne peut plus être rendue (arrêts du Tribunal fédéral 6B_89/2022 du 2 juin 2022 consid. 2.2 et 1B_67/2012 du 29 mai 2012 consid. 2.1).

4.2. Le terme "immédiatement" ne signifie pas que le ministère public ne peut pas, sans pour autant ouvrir d'instruction, procéder à certaines vérifications et mettre en œuvre, pour ce faire, diverses mesures d'investigation, telle que l'audition des lésés et suspects par la police (art. 206 al. 1 et 306 al. 2 let. b cum art. 309 al. 2 CPP; arrêts du Tribunal fédéral 7B_2/2022 du 24 octobre 2023 consid. 2.1.1 et 6B_875/2018 du 15 novembre 2018 consid. 2.2.1), afin de décider de la suite qu'il convient de donner à la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 6B_290/2020 du 17 juillet 2020 consid. 2.2.).

Durant cette phase préalable, le droit de participer à l'administration des preuves ne s'applique en principe pas (art. 147 al. 1 CPP a contrario). Avant de rendre une ordonnance de non-entrée en matière, le procureur n'a donc pas à interpeller les parties ni n'a l'obligation de leur fixer un délai pour présenter d'éventuelles réquisitions de preuve, l'art. 318 CPP n'étant pas applicable dans ce cas. Le droit d'être entendu des parties est en effet assuré, le cas échéant, dans le cadre de la procédure de recours, qui leur permet de faire valoir tous leurs griefs auprès d'une autorité disposant d'une pleine cognition en fait et en droit (cf. art. 391 al. 1 et 393 al. 2 CPP; ATF 143 IV 397 consid. 3.3.2; 140 IV 172 consid. 1.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1096/2018 du 25 janvier 2019 consid. 2.2).

Le fait pour le ministère public de rendre une ordonnance de non-entrée en matière, alors que les circonstances permettent de considérer qu'une instruction a été ouverte, est donc en principe sans incidence et il ne se justifie pas d'annuler la décision pour ce seul motif, même si certains actes exécutés par le ministère public sont de ceux qui doivent être exécutés après l'ouverture d'une instruction (arrêts du Tribunal fédéral 6B_425/2022 du 15 février 2023 consid. 4.1.1 et 6B_962/2013 du 1er mai 2014 consid. 2).

4.3. En l'espèce, le mandat confié par le Ministère public à l'IGS mentionnait expressément l'art. 309 al. 2 CPP, lui permettant de renvoyer à la police, pour complément d’enquête, les rapports et les dénonciations qui n’établissent pas clairement les soupçons retenus. L'audition du recourant et des principaux protagonistes ayant organisé la fouille et procédé au tri des documents litigieux s'inscrit dans ce contexte et ne paraît pas avoir dépassé cette limite.

Dans ces circonstances, il y a lieu d'admettre que la procédure n'a pas dépassé la phase des premières investigations, ce qui permettait au Ministère public de rendre une ordonnance de non-entrée en matière et, partant, le dispensait d'interpeller ou d'entendre le recourant et de donner suite à ses réquisitions de preuve.

Pour le surplus, le recourant a pu faire valoir devant la Chambre de céans les arguments qu'il estimait pertinents.

Son droit d'être entendu a ainsi été pleinement respecté.

Son recours sera, partant, rejeté sur ce point.

5. Le recourant considère que les conditions d'une non-entrée en matière ne sont pas réalisées et que la fouille de sa cellule, le tri de ses documents et la saisie de certains d'entre eux réunit manifestement les éléments constitutifs de l'abus d'autorité.

5.1. L'art. 310 al. 1 let. a CPP doit être appliqué dans le respect de l'adage in dubio pro duriore, qui découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et art. 2 al. 2 CPP en relation avec les art. 319 al. 1 et 324 al. 1 CPP; ATF 138 IV 86 consid. 4.2) et signifie qu'en principe, un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions de la poursuite pénale ne sont pas remplies. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un certain pouvoir d'appréciation. La procédure doit se poursuivre lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou lorsque les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'une infraction grave. En effet, en cas de doute s'agissant de la situation factuelle ou juridique, ce n'est pas à l'autorité d'instruction ou d'accusation mais au juge matériellement compétent qu'il appartient de trancher (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1; 138 IV 86 consid. 4.1.2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_77/2021 du 6 mai 2021 consid. 2.2).

5.2. L'art. 312 CP sanctionne les membres d'une autorité et les fonctionnaires qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, ou dans le dessein de nuire à autrui, abusent des pouvoirs de leur charge

Cette disposition protège, d'une part, l'intérêt de l'État à disposer de fonctionnaires loyaux qui utilisent les pouvoirs qui leur ont été conférés en ayant conscience de leur devoir et, d'autre part, l'intérêt des citoyens à ne pas être exposés à un déploiement de puissance étatique incontrôlé et arbitraire. L'incrimination pénale doit être interprétée restrictivement, compte tenu de la formule très générale qui définit l'acte litigieux. L'auteur n'abuse ainsi de son autorité que lorsqu'il use de manière illicite des pouvoirs qu'il détient de sa charge, c'est-à-dire lorsqu'il décide ou contraint en vertu de sa charge officielle dans un cas où il ne lui était pas permis de le faire. L'infraction peut aussi être réalisée lorsque l'auteur poursuit un but légitime, mais recourt pour l'atteindre à des moyens disproportionnés (ATF 127 IV 209 consid. 1a/aa et b et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1351/2017 du 18 avril 2018 consid. 4.2).

Sur le plan subjectif, l'infraction suppose un comportement intentionnel, au moins sous la forme du dol éventuel, ainsi qu'un dessein spécial, qui peut se présenter sous deux formes alternatives, soit le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite ou le dessein de nuire à autrui (arrêt du Tribunal fédéral 6B_699/2011 du 26 janvier 2012 consid. 1.1).

L'auteur nuit à autrui dès qu'il utilise des moyens excessifs, même s'il poursuit un but légitime. Le motif pour lequel l'auteur agit est ainsi sans pertinence sur l'intention, mais a trait à l'examen de la culpabilité (arrêts du Tribunal fédéral 6B_579/2015 du 7 septembre 2015 consid. 2.2.1 et 6B_699/2011 du 26 janvier 2012 consid. 1.3.3).

5.3.1. Droit constitutionnel non écrit, la liberté personnelle garantit, de manière générale, toutes les libertés correspondant à une manifestation élémentaire de la personne humaine et tend, notamment, à la protection de la sphère intime et du secret de la correspondance. Cette protection équivaut, sur ce dernier point, à celles découlant des art. 8 et 6 par. 3 let. c CEDH, dans la mesure où cette dernière disposition assure à l'accusé le droit de conférer librement avec son avocat (ATF 117 Ia 341 consid. 4; 109 Ia 146 consid. 6a; 102 Ia 516 consid. 3b).

À l'instar de tout autre droit fondamental, la liberté personnelle n'a pas une valeur absolue. Conformément à l'art. 36 Cst., elle peut être limitée, si la restriction repose sur une base légale, qui, en cas d'atteinte grave, doit être prévue dans une loi au sens formel (al. 1), si elle est justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui (al. 2) et si elle respecte le principe de la proportionnalité (al. 3), sans violer l'essence du droit en question (al. 4; ATF 137 I 167 consid. 3.6; 136 I 197 consid. 4.4.4; 134 I 214 consid. 5.4).

5.3.2. S'agissant de la base légale nécessaire en cas de restriction de la liberté découlant de la détention, la jurisprudence considère que, lorsque les causes et la durée de la privation de la liberté sont prévues dans une loi au sens formel, les restrictions à la liberté personnelle des détenus qui découlent des conditions de détention peuvent figurer dans une loi au sens matériel, à savoir un règlement de prison, car ces personnes sont liées à l'État par un rapport de droit spécial. Le règlement de prison doit satisfaire à des exigences minimales de clarté et de précision, afin d'assurer aux détenus une protection suffisante contre l'arbitraire ou d'autres violations de leurs droits fondamentaux (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1179/2015 du 4 août 2016 consid. 5.2).

La détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté sont réglées par les art. 220 ss CPP, qui déterminent les conditions où une telle privation de liberté peut être ordonnée ainsi que la procédure qui doit être suivie. L'art. 235 al. 1 CPP prévoit en particulier que la liberté des prévenus en détention ne peut être restreinte que dans la mesure requise par le but de la détention et par le respect de l'ordre et de la sécurité dans l'établissement. Il constitue une base légale suffisante pour ce faire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1179/2015 du 4 août 2016 consid. 5.3).

5.3.3. Pour respecter le principe de la proportionnalité, la restriction ne doit pas aller au-delà de ce qui est nécessaire au but de l'incarcération et au fonctionnement de l'établissement de détention. Chaque atteinte aux droits liés à la liberté personnelle doit donc faire l'objet d'une pesée d'intérêts dans le cadre de laquelle l'autorité doit tenir compte de l'ensemble des circonstances, soit en particulier des buts de la détention (prévention des risques de fuite, de collusion ou de réitération), des impératifs de sécurité de l'établissement pénitentiaire, de la durée de l'incarcération et de la situation personnelle du prévenu (ATF 149 I 161 consid. 2.1; 145 I 318 consid. 2.1.).

5.4.1. Selon l'art. 85 al. 1 CP, les effets personnels et le logement du détenu peuvent être inspectés pour des raisons d'ordre et de sécurité de l'établissement.

L'art. 46 du règlement sur le régime intérieur de la prison et le statut des personnes incarcérées (RRIP – F 1 50.04) reprend cette prescription, en prévoyant que la direction de la prison peut ordonner en tout temps des fouilles corporelles et une inspection des locaux.

L'interprétation de ces dispositions doit se faire en tenant compte des règles pénitentiaires européennes adoptées en 2006 par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe, ainsi que du commentaire de celles-ci établi par le Comité européen de la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (ATF 141 I 141 consid. 6.3.3).

D'après ce commentaire, il est notamment admis que les détenus individuels, en particulier ceux soumis à des restrictions de sécurité moyennes ou maximales, fassent l'objet de fouilles régulières en vue de s'assurer qu'ils ne portent pas d'objets pouvant servir lors de tentatives d'évasion, à blesser d'autres personnes, se blesser eux-mêmes, ou d'objets non autorisés tels que les drogues illicites. Il précise que l'intensité de ces fouilles doit varier en fonction des situations. Elles ne devraient toutefois pas être employées lorsqu'elles ne présentent aucune utilité et ne devraient jamais être utilisées comme une forme de sanction (cf. Commentaire, p. 81 s.).

5.4.2. L'art. 40 al. 3 RRIP autorise le contrôle du courrier expédié et reçu par les détenus. Ce dernier peut également être contrôlé par le directeur de la prison.

Le principe d'un contrôle de la correspondance en détention n'est remis en cause ni par la jurisprudence, ni par la doctrine. Le caractère admissible de cette ingérence doit cependant s'apprécier en fonction des exigences normales et raisonnables de la détention. La défense de l'ordre public et la prévention des infractions pénales, par exemple, peuvent justifier des ingérences plus amples à l'égard d'un détenu que d'une personne en liberté (ATF 149 I 161 consid. 2.3; 145 I 318 consid. 2.1 et 2.5).

Ainsi, bien que l'art. 84 al. 4 CP interdise l'examen du contenu de la correspondance et des écrits de l'avocat, les autorités pénitentiaires peuvent néanmoins ouvrir la lettre d'un avocat à un détenu si elles ont des motifs plausibles de penser qu'il y figure un élément illicite non révélé par les moyens normaux de détection. Elles ne doivent cependant que la décacheter, sans la lire. Il y a lieu de fournir des garanties appropriées pour en empêcher la lecture, par exemple l'ouverture de l'enveloppe en présence du détenu (arrêts de la CEDH Laurent c. France du 24 août 2018 § 44 et Campbell c. Royaume-Uni du 25 mars 1992 § 48).

5.5. En ce qui concerne le devoir de fonction, c'est le droit cantonal qui détermine, pour les agents publics cantonaux, s'il existe un devoir de fonction et quelle en est l'étendue (ATF 121 IV 207 consid. 2a).

À Genève, l'art. 7 al. 1 let. a de la loi sur l'organisation des établissements et le statut du personnel pénitentiaires (LOPP – F 1 50) confie au personnel pénitentiaire le soin d'assurer les tâches de surveillance interne et externe, de maintien de l'ordre, de conduite et de sécurité intérieure au sein des établissements.

5.6. En l'espèce, la fouille de la cellule du recourant a certes été initiée à la demande du Ministère public, qui soupçonnait l'intéressé de détenir un téléphone portable, soit un objet interdit.

Le processus de fouille de la cellule décrit par J______ et K______ (déplacement des affaires des détenus dans le couloir, vérification de celles-ci aux rayons X ou à la main, démontage des boiseries) ne paraît pas poser de problème particulier et n'est pas spécifiquement remis en cause par le recourant.

Ce dernier conteste le droit des agents de détention d'inspecter les documents en sa possession et d'en saisir une partie. L'on ne voit toutefois guère que les agents de détention puissent mener à bien leur mission sans procéder à un contrôle – même bref – du contenu des enveloppes, y compris celles émanant du conseil du détenu ou destinées à celui-ci. Si tel n'était pas le cas, il suffirait en effet à la personne concernée de placer n'importe quel document ou objet prohibé dans une enveloppe portant le cachet ou l'adresse de son avocat pour le soustraire à la fouille.

Dans le cas présent, rien n'indique que les personnes concernées, qu'elles soient identifiées ou non, et qu'elles aient été entendues par l'IGS ou non, soient allées au-delà de ce qui était nécessaire à ce tri.

Même si les art. 85 al. 1 CP et 46 RRIP ne le précisent pas, il résulte bien évidemment du but de ces dispositions que le droit des gardiens de procéder à une fouille des cellules et des effets personnels des détenus s'étend à une saisie des éléments problématiques retrouvés, sans pour autant que cela constitue un cas d'application des art.  246ss CPP relatifs aux perquisitions ordonnées dans le cadre de l'enquête préliminaire.

À cet égard, K______ a soutenu qu'aucune correspondance entre le recourant et ses avocats ne figurait au nombre des pièces emportées.

L'on ne voit pas quels actes d'enquête seraient susceptibles de mettre à mal ces dénégations. Le recourant n'explique en particulier pas ce qui pourrait être tiré à ce propos d'éventuels échanges et notes internes à la prison à ce sujet – si tant est qu'ils existent – ni de l'audition du directeur de l'établissement ou du procureur ayant requis la fouille, ceux-ci n'y ayant pas assisté. Il est par ailleurs douteux que les deux agents de détention présents, avec K______, lors de la fouille, ou encore le collègue de bureau de J______, qui n'ont pas été auditionnés, soient à même de se rappeler d'un événement remontant à plus d'une année et qui ne présentait rien d'inhabituel.

K______ a en outre expliqué avoir agi comme lors de chaque fouille à laquelle il participait, saisissant, entre autres, les numéros de téléphones et les documents susceptibles de contenir des messages particuliers sur lesquels ne figurait pas de tampon de validation du greffe. Dans la mesure où l'on ne peut d'emblée exclure que de telles pièces – y compris une planche photographique émanant de la police française et n'ayant, partant, a priori rien à voir avec le recourant – puissent concerner la sécurité de la prison ou de tiers, ou soient de nature à compromettre l'enquête en cours (tentatives d'évasion, projets de nouvelles infractions, contacts avec des complices demeurés à l'extérieur, etc.), une telle saisie répond à un intérêt public supérieur à celui du détenu au secret de sa correspondance et est proportionnée.

Quand bien même on ne peut que regretter qu'aucun inventaire des documents saisis et restitués n'ait été dressé, il n'est désormais plus possible d'établir la réalité des accusations du recourant, selon lequel trois ou quatre pages, sur les 500 saisies, manquaient.

Enfin, J______ n'a pas évoqué l'existence de scans et a affirmé avoir détruit les photocopies qu'il avait faites. Or, aucun indice ne permet de penser qu'il ne dirait pas la vérité sur ces points.

Il résulte de ce qui précède que les éléments constitutifs de l'infraction d'abus d'autorité ne sont manifestement pas réalisés et qu'aucun acte d'enquête ne serait à même de renforcer les soupçons du recourant.

Partant, la décision de non-entrée en matière rendue par le Ministère public ne prête pas le flanc à la critique.

6. Le recourant estime que le Ministère public a rejeté, à tort, sa demande d'assistance judiciaire gratuite.

6.1. Conformément à l'art. 136 al. 1 CPP dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2023, l'assistance judiciaire est accordée, entièrement ou partiellement, la partie plaignante pour lui permettre de faire valoir ses prétentions civiles, à la condition qu'elle soit indigente (let. a) et que l'action civile ne paraisse pas vouée à l'échec (let. b).

Lorsqu'une collectivité publique assume une responsabilité exclusive de toute action directe contre l'agent auteur de l’acte illicite présumé, la victime n’a pas de prétention civile à faire valoir contre ce dernier, mais contre l’État, de sorte qu'exercer l’action civile par adhésion à la procédure pénale est exclu, et qu'une telle action doit en principe être considérée comme vouée à l’échec au sens de cette disposition (ATF 138 IV 86 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 1B_355/2012 du 12 octobre 2012 consid. 4).

La jurisprudence reconnaît néanmoins dans certains cas à la partie plaignante le droit d'obtenir l'assistance judiciaire, lorsque les actes dénoncés sont susceptibles de tomber sous le coup des dispositions prohibant les actes de torture et les traitements inhumains ou dégradants (art. 3 et 13 CEDH, 7 Pacte ONU II, 10 al. 3 Cst. et 13 de la Convention des Nations Unies du 10 décembre 1984 contre la torture et autres


peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants [RS 0.105]; cf. ATF
138 IV 86 consid. 3.1.1; arrêts du Tribunal fédéral 1B_561/2019 du 12 février 2020 consid. 2.2 et 1B_729/2012 du 28 mai 2013 consid. 2.1 et arrêts cités).

Pour que tel soit le cas, le traitement dénoncé doit en principe être intentionnel et atteindre un minimum de gravité. L'appréciation de ce minimum dépend de l'ensemble des circonstances de la cause, notamment de la durée du traitement et de ses effets physiques ou mentaux, du sexe, de l'âge et de l'état de santé de la victime (ATF 139 I 272 consid. 4). Un traitement atteint le seuil requis et doit être qualifié de dégradant s'il est de nature à créer des sentiments de peur, d'angoisse et d'infériorité propres à humilier ou à avilir la victime, de façon à briser sa résistance physique ou morale ou à la conduire à agir contre sa volonté ou sa conscience. Il y a également traitement dégradant, au sens large, si l'humiliation ou l'avilissement a pour but, non d'amener la victime à agir d'une certaine manière, mais de la punir (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_307/2019 du 13 novembre 2019 consid. 4.1 non publié aux ATF 146 IV 76, 6B_1135/2018 du 21 février 2019 consid. 1.2.1 et 1B_771/2012 du 20 août 2013 consid. 1.2.2).

L'atteinte de ce seuil de gravité a, entre autres, été niée lorsque le plaignant allègue avoir été empêché de téléphoner à son avocat durant quelques jours et donc de faire valoir ses droits dans le cadre de la procédure disciplinaire ayant conduit à sa consignation dans sa cellule (arrêt du Tribunal fédéral 1B_522/2020 du 11 janvier 2021), se plaint d'une violation de domicile du fait que des agents de police se sont introduits dans son appartement en son absence (arrêt du Tribunal fédéral 1B_559/2012 du 4 décembre 2012), ou encore fait grief à la police de l'avoir saisi au collet quelques instants (arrêt du Tribunal fédéral 1B_70/2011 du 11 mai 2011).

6.2. En l'espèce, le recourant ne prétend pas que la fouille en cause constituerait un acte de violence et qu'elle aurait eu pour but de l'humilier, pas plus qu'il ne décrit de sentiment de peur, d'angoisse ou d'infériorité. Le seul fait que l'infraction invoquée soit, au vu de la peine menace prévue par l'art. 312 CP, un crime (art. 10 al. 2 CP) et qu'elle serait intervenue dans un établissement pénitentiaire à l'encontre d'un détenu, ne suffit pas à lui seul pour remplir les conditions susmentionnées.

C'est donc à juste titre que le Ministère public a refusé de lui allouer l'assistance juridique gratuite pour la procédure résultant de sa plainte.

7. L'ordonnance querellée sera, par conséquent, entièrement confirmée.

8. Le recourant sollicite l'assistance judiciaire gratuite pour la procédure de recours, conformément à l'art. 136 al. 3 CPP, entré en vigueur le 1er janvier 2024.

8.1. À teneur de l'art. 136 al. 1 let. a CPP, la direction de la procédure accorde entièrement ou partiellement, sur demande, l'assistance judiciaire gratuite à la partie plaignante, pour faire valoir ses prétentions civiles, si elle ne dispose pas de ressources suffisantes et que l'action civile ne paraît pas vouée à l'échec.

Cette disposition est désormais complétée par une let. b, qui formalise la jurisprudence exposée sous ch. 6.1. ci-dessus, et qui prévoit que l'assistance judiciaire gratuite peut également être accordée à la victime, pour lui permettre de faire aboutir sa plainte pénale, si elle ne dispose pas des ressources suffisantes et que l'action pénale ne paraît pas vouée à l'échec.

On entend par victime le lésé qui, du fait de l'infraction, a subi une atteinte directe à son intégrité physique, psychique ou sexuelle (art. 116 al. 1 CPP).

8.2. Dans le cas présent, l'on ne saurait considérer, au vu des faits dénoncés, le recourant comme une victime au sens de l'art. 116 CPP. Il ne peut dès lors bénéficier du changement de loi intervenu le 1er janvier 2024.

Faute de prétentions civiles, il ne remplit pas non plus les conditions de l'art. 136 al. 1 let. a CPP.

L'assistance judiciaire ne peut donc lui être allouée pour la procédure de recours.

9. Le recourant, qui succombe, sera dès lors condamné aux frais de la procédure de recours, fixés en totalité à CHF 800.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).

Une indemnité pour ses frais d'avocat fondée sur l'art. 433 CPP lui sera refusée, faute de réalisation des conditions de cette disposition (obtenir gain de cause ou voir le prévenu astreint aux frais en vertu de l'art. 426 al. 2 CPP).

Le refus d'octroi de l'assistance juridique gratuite est rendu sans frais (art. 20 RAJ).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Rejette la demande d'assistance judiciaire.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 800.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/23931/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

715.00

Total

CHF

800.00