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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/1344/2020

AARP/237/2023 du 07.07.2023 sur JTDP/121/2023 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 08.09.2023, 6B_1048/2023
Descripteurs : LÉSION CORPORELLE GRAVE;NÉGLIGENCE;ACCIDENT DE LA CIRCULATION
Normes : CP.125.al1; CP.125.al2; LCR
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/1344/2020 AARP/237/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 26 juin 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, comparant par Me B______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/121/2023 rendu le 31 janvier 2023 par le Tribunal de police,

 

et

C______, partie plaignante, comparant par Me Pascal JUNOD, avocat, rue de la Rôtisserie 6, case postale 3763, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 31 janvier 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de lésions corporelles graves par négligence (art. 125 al. 1 et 2 du code pénal [CP]) et l'a condamné à une peine pécuniaire de 120 jours-amende à CHF 30.- l'unité avec un sursis de trois ans, ainsi qu'à une amende de CHF 500.- à titre de sanction immédiate, renvoyant C______ à agir par la voie civile et condamnant A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 963.-, émolument complémentaire de jugement en CHF 600.- en sus.

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant principalement à son acquittement, frais à charge de l'État. Subsidiairement, il conclut à ce que l'infraction de lésions corporelles graves par négligence soit requalifiée en lésions corporelles simples par négligence avec le prononcé d'une peine pécuniaire clémente, avec sursis, tenant compte de la violation du principe de célérité, et sans amende à titre de sanction immédiate.

b. Selon l'ordonnance pénale du 25 février 2021, il est reproché à A______ d'avoir, le 5 septembre 2019, aux alentours de 17h25, sur la rue de l'Athénée, à Genève, en direction du boulevard des Tranchées, alors qu'il circulait au volant de son véhicule automobile, omis de respecter le signal "Cédez le passage" qui régissait à ce moment-là le carrefour, puis heurté, avec l'avant de son véhicule, le côté droit du motocycliste C______ qui circulait sur la voie de droite du même boulevard, en direction de la place Edouard-Claparède, le faisant chuter et le blessant grièvement à la jambe et au pied droit, C______ ayant subi de graves lésions attestées par constats médicaux.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a.a. Le 5 septembre 2019, jour du jeûne genevois, a eu lieu un choc entre le véhicule conduit par A______ et le motocycle conduit par C______.

Le rapport de renseignements retient que l'automobiliste, s'engageant dans le carrefour, n'a pas respecté le panneau "Cédez le passage". Deux témoins directs avaient été entendus et avaient confirmé le déroulement des faits. La route était alors sèche et la visibilité normale.

a.b. C______ a été grièvement blessé dans l'accident. Après avoir reçu les premiers soins de la part d'une infirmière qui se trouvait fortuitement sur les lieux, il a été transporté d'urgence à l'Hôpital.

a.c. Selon les certificats médicaux versés à la procédure, C______ a subi un dégantage du pied droit et de la jambe droite ainsi que dix fractures au niveau du pied et du tibia, étant précisé qu'il a dû être opéré à trois reprises, est resté hospitalisé durant plusieurs semaines, et que la question de l'amputation s'est posée.

Les séquelles liées à l'accident, en particulier les douleurs invalidantes, persisteront à vie, raison pour laquelle son cas a été mis sous réserve au niveau de l'assurance, d'autant plus que son état de santé n'est pas encore stabilisé. Le pied droit ayant par ailleurs désormais une pointure de plus, l'intéressé est contraint d'acheter deux paires de chaussures à chaque nouvel achat. En outre, son genou gauche a présenté des douleurs et des épanchements en raison d'une surcompensation due aux blessures de son membre inférieur droit, alors que cette jambe n'avait jamais connu de tel diagnostic auparavant ; une intervention a donc été nécessaire pour ce côté aussi.

a.d. C______ a exposé devant le premier juge qu'il avait toujours de grandes difficultés à marcher, souffrait de crampes durant la nuit et n'avait pas pu reprendre d'activité lucrative ni sportive, la question de son invalidité à long terme étant réservée par le médecins, dans l'attente d'une stabilisation de son état de santé. Il n'avait en revanche entrepris aucun suivi psychologique.

b.a. A l'endroit des faits, le boulevard des Tranchées comporte plusieurs voies de circulation dans le sens alors utilisé par C______ et forme un carrefour avec la rue de l'Athénée sur laquelle circulait A______.

b.b. Le jour de l'accident, des travaux modifiaient la configuration du carrefour, délimités par des bornes verticales blanches et rouges. Les feux qui régissaient habituellement la circulation étaient hors service, de sorte que des feux clignotants et un panneau "Cédez le passage" régissaient la rue de l'Athénée sur le carrefour.

b.c. Des croquis ainsi que des photographies de l'accident, établis par la police, ont été versés au dossier.

À teneur des images, il y avait très peu de circulation le jour des faits, seuls quelques véhicules avaient été entravés dans leur course en raison de l'accident. Les parties ont au surplus confirmé le point de choc reporté sur le croquis, lequel se situe à la hauteur de la voie de droite du boulevard des Tranchées.

c. A______ admet avoir vu les feux clignotants et ne pas s'être arrêté au "Cédez le passage". Roulant à faible vitesse, il affirme que des voitures se trouvant sur sa gauche, soit sur la voie de circulation de droite du boulevard des Tranchées, s'étaient arrêtées pour le laisser passer. Il en déduisait qu'elles avaient dû appliquer la priorité de droite alors que normalement c'était à lui de s'arrêter. Il s'était donc avancé doucement et la moto l'avait heurté sans qu'il ait eu le temps de la voir. Selon lui, la moto s'était déplacée de la voie d'extrême gauche à la voie d'extrême droite au moment de l'impact. Il supposait que la moto avait remonté la file des véhicules arrêtés par la gauche et qu'elle ne l'avait pas vu au moment où elle s'était rabattue. Il était vraiment désolé pour C______, mais n'était pas responsable de cet accident. Il était chauffeur de taxi et faisait attention lorsqu'il conduisait.

Au Ministère public (MP), il a précisé que sa vision avait été gênée par des voitures à l'arrêt sur le côté droit du boulevard. Celles-ci avaient quitté les lieux après l'accident et avant l'arrivée de la police.

d. C______ pour sa part explique qu'il circulait sur la voie de droite du boulevard des Tranchées. Il avait la priorité. Une fois engagé dans l'intersection, il avait aperçu au dernier moment un véhicule 4x4 blanc survenir sur sa droite et n'avait pu l'éviter. L'avant de la voiture avait heurté le côté droit de son motocycle et son pied avait été écrasé entre le pare-chocs et le moteur de la moto. Son talon ainsi qu'une grande partie de la peau de son cou-de-pied avaient été arrachés. Une artère avait été sectionnée et du sang en jaillissait. Par ailleurs, le carter d'huile de la moto ayant été également endommagé, de l'huile bouillante s'était déversée dans les plaies. Une infirmière s'était arrêtée et lui avait prodigué les premiers soins pour faire cesser l'hémorragie.

Devant le MP, il a souligné qu'au moment des faits, il était seul sur la route avec A______, car c'était le jeûne genevois. En revanche, il y avait eu du monde après l'accident. Il a indiqué pour la première fois que des voitures étaient stationnées à l'arrêt à sa droite de sorte que cela avait "bouché [la] vue à tous les deux", puis sur question qu'elles étaient "à l'arrêt sur la voie de droite du boulevard". Il a confirmé que le croquis dessiné par le prévenu, situant les véhicules gênants, était correct et en a dressé un autre, plus précis. Il contestait cependant que des voitures s'étaient arrêtées pour laisser passer A______. Lui-même n'avait fait aucun dépassement.

Finalement, à la dernière audience devant le MP, il est revenu sur ses déclarations, affirmant qu'il n'y avait pas de voitures stationnées sur le trottoir. Il était tombé sur la tête et, sonné, avait vu des voitures, raison pour laquelle il avait déclaré qu'elles étaient stationnées sur la droite.

e. Plusieurs témoins ont été entendus par le MP.

D______, témoin automobiliste circulant sur la rue de l'Athénée dans la direction opposée à celle de A______, a vu la moto arriver de sa droite à moins de 50 km/h, ainsi que la voiture qui remontait la rue de l'Athénée. Aucun des conducteurs n'avait ralenti et l'automobiliste ne s'était pas arrêté au "Cédez le passage". Il avait voulu klaxonner mais n'en avait pas eu le temps. Interrogé à trois reprises par la défense, il n'y avait pas, selon lui, de voiture qui fût stationnée le long du trottoir du boulevard. Il trouvait au contraire qu'il y avait une bonne visibilité de sorte que l'accident aurait pu être évité, ce d'autant plus que les conducteurs ne roulaient pas à vive allure. Il y avait très peu de circulation ce jour-là, aucune voiture ne devançait A______ et il n'y avait pas d'autre véhicule qui se serait arrêté pour le laisser passer. Selon son souvenir, la moto roulait seule sur le milieu gauche de la voie de droite.

E______, témoin cycliste circulant également dans la direction opposée à celle de A______, a indiqué que la moto, qui roulait à une vitesse adaptée sur la voie de droite du boulevard, avait été percutée par le côté gauche de la voiture. La moto n'avait pu éviter la collision. Il ne se rappelait pas si des voitures étaient stationnées sur le trottoir droit du boulevard, ni si d'autres véhicules circulaient dans la même direction que la victime au moment de l'accident.

Le Dr F______ suivait déjà C______ en qualité de chirurgien orthopédique avant l'accident. Il a confirmé que son patient aurait des séquelles à long terme ainsi que des limitations fonctionnelles. Il s'agissait d'un traumatisme à très haute énergie, soit qui lésait non seulement les os mais écrasait aussi les tissus mous. Le choc entre le véhicule et la jambe en était la cause. Théoriquement, le pronostic vital aurait pu être engagé sans l'intervention fortuite de l'infirmière mais lui-même ne pouvait le confirmer, n'ayant pas été présent. Enfin, l'intimé ne souffrait d'aucune fragilité dans son membre inférieur droit avant l'accident ; les conséquences de l'accident auraient été les mêmes en faisant abstraction du problème orthopédique pour lequel il était suivi depuis 2015.

G______, appointé de police, a souligné que la position de la moto et l'emplacement des dégâts confirmaient que la moto venait latéralement et non pas d'un angle suggérant un changement de voie. Il ne se rappelait plus si des voitures pouvaient être garées à la droite du boulevard. En tout état, l'automobiliste n'avait pas respecté le "Cédez le passage" et si des voitures s'étaient arrêtées pour le laisser passer, il aurait dû s'engager avec toute la prudence nécessaire ce qu'il n'avait manifestement pas fait au vu de l'accident.

H______ a confirmé les déclarations de son collègue, G______. Dans l'hypothèse où des voitures se seraient arrêtées pour le laisser passer, l'automobiliste avait l'obligation de vérifier qu'aucun véhicule ne vînt depuis le boulevard avant de traverser l'intersection. En revanche, la personne qui circulait sur cette route principale savait qu'elle était prioritaire mais devait faire attention, en présence des feux clignotants. Au vu du choc, les véhicules ne devaient pas rouler à une vitesse très élevée ; néanmoins, les blessures de C______ étaient graves et les ambulanciers étaient pressés de le conduire à l'Hôpital même s'ils jugeaient que son pronostic vital n'était pas engagé.

f. Par courrier du 1er décembre 2021, la procureure en charge de la procédure a refusé au Conseil de A______ une quatrième demande de prolongation du délai pour formuler des réquisitions de preuve.

C. a.a. En appel, A______ a intégralement persisté dans ses précédentes déclarations, précisant qu'il n'avait pas vu C______, mais qu'il avait déduit, après le choc, que celui-ci avait remonté les voitures à l'arrêt par leur gauche.

a.b. Par la voix de son Conseil, A______ plaide et persiste dans ses conclusions. Le premier juge avait occulté que la présence des véhicules précédant la moto et qui s'était arrêtées pour le laisser passer était établie dans le dossier. L'intimé l'avait également confirmé dans ses déclarations, quoiqu'il avait indiqué qu'elles fussent stationnées. Cependant, cette précision ne résistait pas à l'examen, puisqu'à teneur des photographies il n'y avait aucune place de stationnement. Cette révélation était néanmoins intéressante à plus d'un titre : non seulement l'intimé confirmait qu'il y avait des voitures sur sa droite, mais aussi, considérant qu'elles étaient stationnées et non arrêtées aux fins de laisser passer un autre véhicule, il admettait implicitement les avoir dépassées par la gauche. Or, en circulant en direction de Plainpalais, l'intimé s'était nécessairement déplacé sur toutes les voies. Certes, les témoins ne se rappelaient pas si des voitures étaient présentes, mais aucun n'avait affirmé qu'il n'y en avait pas. Dans le doute, sa version devait être retenue. Ainsi, il fallait admettre que C______ avait remonté la file et avait commis une infraction alors qu'il aurait dû rester à sa place. Un automobiliste non prioritaire n'avait pas à compter sur l'imprévisible. En application du principe de la confiance, aucune imprévoyance coupable ne pouvait donc être reprochée à l'appelant. Subsidiairement, la Cour devait requalifier l'infraction en lésions corporelles simples par négligence, la victime souffrant d'un état préexistant pour avoir subi plusieurs opérations à la jambe droite, de sorte qu'il y avait un doute insurmontable quant aux conséquences de l'accident. Quant à la fixation de la peine, il fallait tenir compte de la violation du principe de célérité. Enfin, l'appelant n'avait aucun antécédent et n'avait commis aucune infraction depuis les faits, de sorte qu'une amende à titre de sanction immédiate n'était pas justifiée.

b.a. C______ a également confirmé ses dernières déclarations. Le jour des faits, il n'y avait rien sur sa droite. Après l'accident, il avait perdu connaissance. La dernière image qu'il gardait avant l'impact était celle d'une grosse voiture blanche qui lui fonçait dessus.

S'il n'avait plus subi de nouvelle opération, son état médical s'était néanmoins aggravé. Il ne pouvait plus marcher correctement sans que son pied ne gonflât. Il n'était bien ni assis ni debout. Tout juste à la retraite le jour de l'accident, il devait justement commencer une activité accessoire pour compléter sa faible rente. En raison de son statut, il ne bénéficiait d'aucune prestation pour compenser cette incapacité. Il avait travaillé toute sa vie pour pouvoir profiter de sa retraite et voyager. Ses projets avaient été réduits à néant.

b.b. Par la voix de son Conseil, il a conclu au rejet de l'appel. La thèse de l'appelant ne tenait pas la route. Les déclarations des témoins, l'analyse des policiers et l'emplacement des dégâts matériels confirmaient que l'automobiliste était rentré dans la moto et non l'inverse. Certes, l'intimé était revenu sur ses déclarations s'agissant de la présence de véhicules stationnés, mais les lieux ne laissaient aucune place pour un stationnement et il fallait admettre qu'il s'était trompé, ce qui n'était pas surprenant au vu du choc important et de la gravité des lésions. Par ailleurs, c'était le jour du jeûne genevois, le trafic n'était pas important, les photos en témoignaient. Il ne faisait aucun sens que des voitures s'arrêtassent pour laisser passer un véhicule non prioritaire. L'assureur-même de l'automobiliste avait considéré que celui-ci était en tort et avait commencé à indemniser la victime en l'absence de tout jugement, fait suffisamment exceptionnel pour être souligné. Les propos de l'appelant étaient choquants en tant qu'il insinuait que les lésions ne seraient pas si graves en raison d'un prétendu état préexistant. Le pied de C______ avait été complètement écrasé et la question de l'amputation s'était longuement posée. Son pronostic vital aurait pu être engagé sans l'intervention miraculeuse de l'infirmière. Il avait subi de nombreuses opérations et semaines d'hospitalisation ; malgré cela, un rétablissement complet du pied était inenvisageable. En sus de l'impact sur son état de santé et son bien-être, l'intimé avait été privé de ses projets de retraite et d'un revenu accessoire sur lequel il comptait. Partant, le dommage de l'intimé était considérable. Toutefois, il ne pouvait encore être définitivement chiffré.

c. Le MP dont la présence n'était pas nécessaire n'a pas comparu. Il avait conclu au rejet de l'appel.

D. A______, de nationalité suisse, est né le ______ 1973 à I______, en Algérie. Il est marié et père de trois enfants, dont des jumeaux nés en 2013 – issus d'un premier mariage – et une fille née en 2020. Il vit actuellement avec son épouse, sa fille et sa belle-fille âgée de 12 ans et subvient à leurs besoins. Il travaille en qualité de chauffeur de taxi indépendant à 70%, en raison de problèmes de santé. Il perçoit à ce titre un revenu mensuel d'environ CHF 4'150.-. A l'exception des allocations familiales, il ne perçoit pas d'indemnité sociale. Son épouse ne travaille pas. Son loyer s'élève à CHF 2'500.- et il bénéficie de subsides pour les assurances-maladies. Il n'a pas de fortune, mais des dettes de quelques CHF 150'000.-.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, il n'a pas d'antécédent.

E. Me B______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 4h20 d'activité de chef d'étude, hors débats d'appel, lesquels ont duré 1h10.

En première instance, il a été indemnisé pour 26 heures d'activité.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1.1. La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.), 14 par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH), ainsi que son corollaire, le principe "in dubio pro reo", concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large. Elle signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective. Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence au principe "in dubio pro reo", celui-ci n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 145 IV 154 consid. 1.1).

2.1.2. L'art. 125 al. 1 et 2 CP réprime le comportement de celui qui, par négligence, aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé. Elle suppose la réalisation de trois conditions : une négligence, une atteinte à l'intégrité physique et un lien de causalité naturelle et adéquate entre ces deux éléments.

2.1.2.1. La négligence est l'imprévoyance coupable commise par celui qui, ne se rendant pas compte des conséquences de son acte, agit sans user des précautions commandées par les circonstances et sa situation personnelle (art. 12 al. 3 CP).

Deux conditions doivent être remplies pour qu'il y ait négligence. En premier lieu, il faut que l'auteur viole les règles de la prudence, c'est-à-dire le devoir général de diligence institué par la loi pénale, qui interdit de mettre en danger les biens d'autrui pénalement protégés contre les atteintes involontaires. Un comportement dépassant les limites du risque admissible viole le devoir de prudence s'il apparaît qu'au moment des faits, son auteur aurait dû, compte tenu de ses connaissances et de ses capacités, se rendre compte de la mise en danger d'autrui. Pour déterminer le contenu du devoir de prudence, il faut donc se demander si une personne raisonnable, dans la même situation et avec les mêmes aptitudes que l'auteur, aurait pu prévoir, dans les grandes lignes, le déroulement des événements et, le cas échéant, quelles mesures elle pouvait prendre pour éviter la survenance du résultat dommageable. Lorsque des prescriptions légales ou administratives ont été édictées dans un but de prévention des accidents, ou lorsque des règles analogues émanant d'associations spécialisées sont généralement reconnues, leur violation fait présumer la violation du devoir général de prudence. La violation des devoirs de la prudence peut aussi être déduite des principes généraux, si aucune règle spéciale de sécurité n'a été violée. En second lieu, la violation du devoir de prudence doit être fautive, c'est-à-dire qu'il faut pouvoir reprocher à l'auteur une inattention ou un manque d'effort blâmable (ATF 145 IV 154 consid. 2.1 ; 133 IV 158 consid. 5.1). Les lésions corporelles par négligence constituent une infraction de résultat, qui suppose en général une action, mais qui, conformément à l'art. 11 al. 1 CP, peut aussi être réalisée par le fait d'un comportement passif contraire à une obligation d'agir.

2.1.2.2. Une lésion corporelle est grave notamment lorsqu'aura été mutilé le corps d'une personne, un de ses membres ou un de ses organes importants ou aura été causé une incapacité de travail, une infirmité permanente, ou que la victime aura été défigurée d'une façon grave et permanente (art. 122 al. 2 CP), ou encore lorsqu'une personne aura subi toute autre atteinte grave à l'intégrité corporelle ou à la santé physique ou mentale (al. 3).

Sont considérés comme des membres importants au sens de l'art. 122 al. 2 CP avant tout les extrémités, soit les bras et les jambes, ainsi que les mains et les pieds (M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER, Basler Kommentar Strafrecht II : Art. 111-392 StGB, 2e édition, Bâle 2007, n. 11 ad art. 122 ; A. DONATSCH, Strafrecht III : Delikte gegen den Einzelnen, 9e édition, Zurich/Bâle/Genève 2008, p. 39). Un organe ou un membre important est inutilisable lorsque ses fonctions de base sont atteintes de manière significative. Une atteinte légère ne suffit en revanche pas, même lorsqu'elle est durable et qu'il ne peut y être remédié (ATF 129 IV 1 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_405/2012 du 7 janvier 2013 consid. 3.2.1 et 6B_26/2011 du 20 juin 2011 consid. 2.4.1).

La clause générale (al. 3) a pour but d'englober les cas de lésions du corps humain ou de maladies, qui ne sont pas cités par l'art. 122 CP, mais qui entraînent néanmoins des conséquences graves sous la forme de plusieurs mois d'hospitalisation, de longues et graves souffrances ou de nombreux mois d'incapacité de travail (ATF 124 IV 53 consid. 2). Afin de déterminer si la lésion est grave, il faut procéder à une appréciation globale : plusieurs atteintes, dont chacune d'elles est insuffisante en soi, peuvent contribuer à former un tout constituant une lésion grave. Il faut tenir compte d'une combinaison de critères liés à l'importance des souffrances endurées, à la complexité et à la longueur du traitement (multiplicité d'interventions chirurgicales, etc.), à la durée de la guérison, respectivement de l'arrêt de travail, ou encore à l'impact sur la qualité de vie en général (arrêt du Tribunal fédéral 6B_422/2019 du 5 juin 2019 consid. 5.1).

2.1.3. En matière de circulation routière, le principe de la confiance est déduit de l'art. 26 al. 1 de la loi fédérale sur la circulation routière (LCR) qui prévoit que chacun doit se comporter de manière à ne pas gêner ni mettre en danger ceux qui utilisent la route conformément aux règles établies (ATF 120 IV 252 consid. 2d/aa). Ce principe permet à l'usager, qui se comporte réglementairement, d'attendre des autres usagers, aussi longtemps que des circonstances particulières ne doivent pas l'en dissuader, qu'ils se comportent également de manière conforme aux règles de la circulation, c'est-à-dire ne le gênent pas ni ne le mettent en danger (ATF 125 IV 83 consid. 2b ; ATF 118 IV 277 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_959/2016 du 6 juillet 2017 consid. 2.2). Seul celui qui s'est comporté réglementairement peut invoquer le principe de la confiance. Celui qui viole des règles de la circulation et crée ainsi une situation confuse ou dangereuse ne peut pas attendre des autres qu'ils parent à ce danger par une attention accrue. Cette limitation n'est cependant plus applicable lorsque la question de savoir si l'usager a violé une règle de la circulation dépend précisément de la possibilité qu'il a d'invoquer le principe de la confiance, en d'autres termes, si et dans quelle mesure il pouvait se fonder sur le comportement de l'autre usager (ATF 125 IV 83 consid. 2b ; ATF 120 IV 252 consid. 2d/aa ; ATF 143 IV 500 consid. 1.2.4).

Le conducteur débiteur de la priorité peut se prévaloir du principe de la confiance. Si le trafic lui permet de s'engager sans gêner un véhicule prioritaire, on ne peut lui reprocher aucune violation du droit de priorité s'il entrave malgré tout la progression du prioritaire en raison du comportement imprévisible de ce dernier (ATF 120 IV 252 consid. 2d/aa ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_959/2016 du 6 juillet 2017 consid. 2.2). Dans l'optique d'une règle de priorité claire, on ne peut toutefois admettre facilement que le débiteur de la priorité n'a pas à compter avec le passage, respectivement l'entrave d'un prioritaire (ATF 143 IV 500 consid. 1.2.4 ;
ATF 120 IV 252 consid. 2d/aa ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_631/2018 du 24 octobre 2018 consid. 1.2 ; 6B_959/2016 du 6 juillet 2017 consid. 2.2).

2.1.3. L'art. 27 al. 1 LCR impose aux usagers de la route de se conformer aux signes et aux marques. Ceux-ci ne sont obligatoires que s'ils sont clairs et que leur portée est aisément reconnaissable (ATF 127 IV 229 consid. 2c.aa ; 106 IV 138 consid. 3).

À teneur de l'art. 14 de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière (OCR), celui qui est tenu d'accorder la priorité ne doit pas gêner dans sa marche le conducteur bénéficiaire de la priorité. Il réduira sa vitesse à temps et, s'il doit attendre, s'arrêtera avant le début de l'intersection. L'arrêt s'impose, en particulier dès que le non-prioritaire constatera qu'il ne pourrait pas libérer la route prioritaire avant l'arrivée du prioritaire et ce, avec une marge de sécurité suffisante et si la situation n'est pas claire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_299/2011 du 1er septembre 2011 et les références = JdT 2011 I 323 consid. 3.2). Le bénéficiaire de la priorité est gêné dans sa marche au sens de cette disposition, lorsqu'il doit modifier brusquement sa manière de conduire, par exemple parce qu'il est soudain contraint de freiner, d'accélérer ou de faire une manœuvre d'évitement sur l'intersection, voire peu avant ou peu après celle-ci, sans qu'il importe de savoir si une collision survient ou non (ATF 114 IV 146 ss ; 143 IV 500 consid. 1.2.1 ; 6B_263/2009 du 14 juillet 2009 = JdT 2009 I 536 consid. 1.1.2).

L'art. 36 al. 2 de l'ordonnance sur la signalisation routière (OSR) prévoit que le signal "Cédez le passage" oblige le conducteur à accorder la priorité aux véhicules circulant sur la route dont il s'approche (ATF 143 IV 500 consid. 1.2.1).

Enfin, l'art. 68 al. 6 OSR dispose que le feu jaune clignotant (art. 70, al. 1) incite les conducteurs à faire preuve d’une prudence particulière.

2.2. En l'espèce, les parties ne s'entendent pas sur les circonstances entourant l'accident. L'appelant ne conteste pas que les feux régissant l'intersection étaient en phase jaune clignotante et qu'il avait un signal l'exhortant à céder le passage. Il maintient cependant que des voitures se seraient arrêtées sur la route principale afin de le laisser passer, quand bien même il n'avait pas la priorité, et qu'elles lui auraient également masqué la visibilité. Selon lui, l'intimé a dû remonter la file de véhicules par la gauche pour les dépasser, ce qui faisait de lui le fautif.

Cette version ne saurait être suivie. Elle est contredite non seulement par les déclarations de l'intimé, mais également par les déclarations claires des témoins directs des faits, D______ et E______. Ces derniers affirment avoir vu l'intimé circuler à une vitesse adaptée sur la voie de droite du boulevard helvétique. Il n'y avait pas d'autres véhicules présents, en particulier aucun véhicule ne s'était arrêté pour laisser passer l'appelant. La visibilité était bonne et cet accident aurait pu être évité. Ces derniers, qui arrivaient juste en face du lieu du choc, disposaient d'une bonne vision sur les lieux, ne connaissaient pas la version des deux parties au moment de leur témoignage et n'avaient aucun intérêt à privilégier l'une par rapport à l'autre. Par ailleurs, de l'avis professionnel des policiers, au vu du point de choc et de la position des dégâts, la moto circulait latéralement et ne venait pas d'un angle qui suggérât un changement de voie, ce qui achève d'anéantir la théorie de l'appelant. Le fait que l'intimé ait affirmé devant le MP avoir vu des véhicules stationnés sur sa droite avant de revenir sur ses déclarations est sans préjudice de ce qui précède. En effet, la configuration des lieux à teneur des photographies ne laisse aucune place pour un stationnement et il est possible que l'intimé, choqué, ait pu se tromper. La présence d'autres voitures sur la droite – qu'elles soient stationnées ou à l'arrêt pour céder le passage à l'appelant – n'est en outre corroborée par aucun autre élément au dossier. Il peut également être relevé qu'au vu de l'accident survenu, d'éventuels véhicules à l'arrêt sur la route auraient été entravés dans la poursuite de leur course et que leurs conducteurs auraient porté secours à l'intimé. En tout état, les règles de priorité applicables dans le cas d'espèce étaient claires, réputées connues de tout conducteur, a fortiori de l'appelant qui est chauffeur de taxi. Aussi, même dans l'hypothèse où des voitures prioritaires se seraient arrêtées pour le laisser passer, il lui appartenait de rester vigilant et de s'assurer qu'il puisse effectivement s'engager dans le carrefour sans danger, ce qu'il n'a pas fait vu la survenance de l'accident. L'appelant savait au demeurant qu'en présence de feux clignotants il devait redoubler de prudence. Au vu de ce qui précède, la CPAR a acquis la conviction que l'appelant, par une imprévoyance coupable ou par inattention, n'a pas observé les règles de priorité, causant fautivement l'accident.

Le lien de causalité naturel et adéquat est manifestement donné entre la négligence de l'appelant et les lésions corporelles subies par l'intimé, dont la matérialité est établie. En effet, son comportement était propre, selon le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, à causer un accident.

Ces lésions doivent être qualifiées de graves. En effet, l'intimé a subi un dégantage du pied et de la jambe droite, ainsi que dix fractures. Son talon a été arraché. Les conséquences de cet accident sont lourdes et perdurent encore, quatre ans après les faits, de même que les limitations fonctionnelles et les douleurs dont se plaint l'intimé, lequel n'est pas à l'abri d'une aggravation de son état de santé (directement ou indirectement liée auxdites lésions), ni d'une nouvelle opération. Malgré les nombreuses interventions et semaines d'hospitalisation, il demeure handicapé, ne peut plus travailler, et est lourdement et durablement impacté dans son bien-être. Selon son médecin, il gardera des séquelles à vie.

C'est en vain que l'appelant oppose un prétendu état préexistant. En effet, le Dr F______ a formellement déclaré que les lésions n'étaient dues qu'à l'accident et que la situation et son évolution seraient les mêmes, abstraction faite de la problématique orthopédique pour laquelle l'intimé avait été suivi avant les faits.

Au vu de ce qui précède, le verdict de condamnation pour lésions corporelles graves par négligence sera confirmé.

3. 3.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Celle-ci doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1), ainsi que l'effet de la peine sur son avenir. L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

3.1.2. Les art. 5 CPP et 29 al. 1 Cst. garantissent notamment à toute personne le droit à ce que sa cause soit traitée dans un délai raisonnable. Ces dispositions consacrent le principe de la célérité et prohibent le retard injustifié à statuer. L'autorité viole cette garantie lorsqu'elle ne rend pas une décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans le délai que la nature de l'affaire et les circonstances font apparaître comme raisonnable (ATF 143 IV 373 consid. 1.3.1 ; cf.
ATF 130 I 312 consid. 5.1). Comme on ne peut pas exiger de l'autorité pénale qu'elle s'occupe constamment d'une seule et unique affaire, il est inévitable qu'une procédure comporte quelques temps morts. Lorsqu'aucun d'eux n'est d'une durée vraiment choquante, c'est l'appréciation d'ensemble qui prévaut ; des périodes d'activités intenses peuvent donc compenser le fait que le dossier a été laissé momentanément de côté en raison d'autres affaires. Le principe de la célérité peut être violé même si les autorités pénales n'ont commis aucune faute ; elles ne sauraient exciper des insuffisances de l'organisation judiciaire (ATF 130 IV 54 consid. 3.3.3).

3.1.3. Aux termes de l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits.

Selon l'art. 42 al. 4 CP, le juge peut prononcer, en plus du sursis, une amende selon l'art. 106 CP. Celle-ci entre en ligne de compte en matière de délinquance de masse, lorsque le juge souhaite prononcer une peine privative de liberté ou pécuniaire avec sursis, mais qu'une sanction soit néanmoins perceptible pour le condamné, dans un but de prévention spéciale (ATF 135 IV 188 consid. 3.3. ; 134 IV 60 consid. 7.3.1). La sanction ferme accompagnant la sanction avec sursis doit contribuer, dans l'optique de la prévention tant générale que spéciale, à renforcer le potentiel coercitif de la peine avec sursis. Cette forme d'admonestation adressée au condamné - ainsi qu'à tous - doit attirer son attention sur le sérieux de la situation en le sensibilisant à ce qui l'attend s'il ne s'amende pas. La combinaison prévue à l'art. 42 al. 4 CP constitue un "sursis qualitativement partiel" (ATF 134 IV 60 consid. 7.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_835/2018 du 8 novembre 2018 consid. 3.2).

La peine prononcée avec sursis reste prépondérante, alors que l'amende est d'importance secondaire (ATF 134 IV 1 consid. 4.5.2.). Cette combinaison de peines ne doit pas conduire à une aggravation de la peine globale ou permettre une peine supplémentaire. Les peines combinées, dans leur somme totale, doivent être adaptées à la faute. L'adéquation entre la culpabilité et la sanction peut justifier d'adapter la peine principale en considération de la peine accessoire (ATF 134 IV 53 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_952/2016 du 29 août 2017 consid. 3.1).

3.2. En l'espèce, la faute commise par l'appelant relève d'une infraction par négligence, mais son inattention, coupable, est grave. Les conséquences ont été importantes pour la victime, qui demeure fortement limitée dans sa mobilité et son bien-être.

Il a agi au mépris des règles de la circulation routière, en négligeant des règles élémentaires de prudence, par légèreté et inadvertance.

L'appelant persiste en outre à nier toute culpabilité et tente de rejeter la responsabilité de l'accident sur l'intimé. Sa prise de conscience n'est pas même entamée, même s'il a exprimé ses regrets quant à la situation de l'intimé.

Sa situation personnelle n'explique pas ses agissements. Il n'a aucun antécédent judiciaire, ce qui a un effet neutre sur la peine.

Une violation du principe de célérité ne sera pas retenue. S'il s'est, certes, écoulé un certain temps entre l'instruction, le renvoi en accusation (1er décembre 2021) et l'audience devant le TP (31 janvier 2023), ce délai s'explique avant tout tant par la pandémie de COVID-19 que par les nombreuses demandes de prolongation de délai et/ou report de l'appelant.

Au vu de ce qui précède, la peine pécuniaire de 120 jours-amende à CHF 30.- l'unité sanctionne adéquatement le comportement de l'appelant et est adaptée à sa situation financière, de sorte qu'elle sera confirmée.

Les conditions du sursis étant réalisées, le délai d'épreuve fixé à trois ans sera également confirmé.

Compte tenu des potentielles conséquences administratives auxquelles s'expose l'appelant en sa qualité de chauffeur de taxi, la CPAR estime que la sanction prononcée est suffisante pour atteindre les objectifs de prévention spéciale. Partant, il sera renoncé à infliger à l'appelant une amende à titre de sanction immédiate.

L'appel étant très partiellement admis, le dispositif sera réformé dans le sens de ce qui précède.

4. 4.1. Selon l'art. 428 al. 1, première phrase, CPP, les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé. Selon l'al. 3, si l'autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l'autorité inférieure.

4.2. En l'espèce, l'appelant n'a obtenu gain de cause que sur la seule question de l'amende. Partant, il se justifie de le condamner aux 3/4 des frais de la procédure d'appel, comprenant un émolument de CHF 1'200.-, le solde étant laissé à la charge de l'État.

En revanche, il n'y a pas lieu de revoir la répartition des frais de première instance, seul un quart de l'émolument complémentaire de jugement en CHF 600.- sera laissé à la charge de l'État.

5. Le dommage de C______ demeurant réservé, ce dernier sera renvoyé à agir par la voie civile.

6. Considéré globalement, l'état de frais produit par Me B______, défenseur d'office de l'appelant, satisfait les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale. Il convient de le compléter de 1h10 pour la durée de l'audience.

Sa rémunération sera partant arrêtée à CHF 1'378.15 correspondant à 5h30 heures d'activité au tarif de CHF 200.-/heure plus une vacation à CHF 75.-, la majoration forfaitaire de 10% et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 93.15.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement rendu le 31 janvier 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/1344/2020.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de lésions corporelles graves par négligence (art. 125 al. 1 et 2 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 120 jours-amende.

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans.

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine.

Renvoie C______ à agir par la voie civile.

Prend acte de ce que l'indemnité de procédure de première instance due à Me B______, défenseur d'office de A______, a été fixée à CHF 7'181.45.

Prend acte de ce que A______ a été condamné aux frais de première instance arrêtés à CHF 963.-.

Condamne A______ aux trois quarts de l'émolument complémentaire de jugement en CHF  600.- et laisse le solde à la charge de l'État.

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'455.-, comprenant un émolument de jugement en CHF 1'200.- et met trois quarts de ces frais, soit CHF 1'091.25 à la charge de A______ et laisse le solde de ces frais à la charge de l'État.

Arrête à CHF 1'378.15, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseur d'office de A______ pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police et à l'Office cantonal des véhicules.

 

La greffière :

Lylia BERTSCHY

 

La présidente :

Catherine GAVIN

e.r. Pierre BUNGENER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de Police :

CHF

1'563.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

120.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

60.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'200.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'455.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'018.00