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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/20725/2019

AARP/260/2022 du 07.09.2022 sur JTCO/23/2022 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : EXPERTISE;MESURE THÉRAPEUTIQUE INSTITUTIONNELLE
Normes : CP.59; CPP.189
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/20725/2019 AARP/260/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 7 septembre 2022

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, ______, comparant par Me C______, avocate,

appelant,

 

contre le jugement JTCO/23/2022 rendu le 11 février 2022 par le Tribunal correctionnel,

 

et

D______, domicilié c/o Centre éducatif de E______, ______ VS,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 11 février 2022, par lequel le Tribunal correctionnel (ci-après: TCO) l'a acquitté de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 ch. 1 du code pénal suisse [CP]) s'agissant des faits décrits dans l'acte d'accusation du 6 décembre 2021, a déclaré qu'il avait commis les faits constitutifs de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires décrits aux points 1.1.3 et 1.1.4 de la demande pour prévenu irresponsable du 3 juin 2021 en état d'irresponsabilité mais pas ceux décrits aux points 1.1.1, 1.1.2, 1.1.5 et 1.2 et a ordonné qu'il soit soumis à un traitement institutionnel (art. 59 al. 1 CP). Le TCO a également rejeté ses conclusions en indemnisation, tout en laissant les frais à la charge de l'Etat.

A______ entreprend partiellement ce jugement et conclut, sous suite de frais, à son acquittement pour l'intégralité des faits qui lui sont reprochés, à ce qu'il soit renoncé au prononcé d’une mesure à son encontre, à sa mise en liberté immédiate et à son indemnisation pour détention injustifiée en CHF 38'850.-.

b. Par demande de mesure pour prévenu irresponsable du 3 juin 2021, il est encore reproché à A______, alors qu'il était détenu à l'établissement pénitentiaire fermé F______ à Genève, en état d'irresponsabilité, les faits suivants:

-        le 5 juillet 2019, vers 17h25, il a usé de violence à l'encontre d'un médecin et d'agents de détention, en particulier en assénant des coups de poing au médecin qui l'examinait, puis, lors de son transfert en cellule par les agents de détention, en crachant et en se débattant, rendant l'usage de la force nécessaire (point 1.1.3 de la demande pour prévenu irresponsable),

-        le 13 juillet 2019, vers 07h56, il a usé de violence à l'encontre d'agents de détention, en particulier en refusant de retourner dans sa cellule, malgré les injonctions, en assénant un coup de poing au visage d'un gardien, le faisant chuter contre une marche d'escalier et lui provoquant des douleurs aux cervicales, puis en se débattant, causant à une autre gardienne des douleurs aux côtes et à l'épaule gauche, ainsi qu'une ecchymose à l'avant-bras droit (point 1.1.4 de la demande pour prévenu irresponsable).

B. a. Dans la mesure où les agissements retenus à l’encontre de A______ ne sont pas contestés au stade de l'appel, il sera revenu uniquement sur les éléments de la cause utiles à la solution du litige dans la mesure des conclusions de l'appelant. Il sera renvoyé pour le surplus à l'exposé détaillé du jugement entrepris (art. 82 al. 4 du code de procédure pénale [CPP]).

b. A______ a été condamné par jugement de l'Assise criminali di G______ [TI] du 20 septembre 2016, à une peine privative de liberté de sept mois, suspendue au profit d'une mesure institutionnelle en milieu fermé au sens de l'art. 59 al. 3 CP. Dans ce cadre, il a été placé à [l'établissement pénitentiaire] F______ dès le 7 décembre 2016.

Dans le contexte du réexamen de la situation de A______ et de la nécessité de poursuivre la mesure précitée auprès de [l'établissement pénitentiaire] F______, le Dr H______ a mené une expertise psychiatrique, sur mandat des autorités tessinoises. Dans son rapport du 10 janvier 2018, l'expert a indiqué que la mesure institutionnelle en cours était la seule apte à contenir et traiter l'intéressé, qu'elle était sans aucun doute encore nécessaire et qu'elle était la plus appropriée. Il n'envisageait pas d'amélioration à court terme, une amélioration et, partant, une diminution du risque de commission de nouvelles infractions ne pouvant se manifester qu'à moyen ou long terme (années), à condition, entre autres, qu'une pharmacologie optimale puisse être identifiée.

c. Selon un nouveau rapport d'expertise établi le 22 décembre 2020 dans le cadre du suivi de la mesure prononcée par les autorités tessinoises au vu de l'arrivée à échéance de sa durée maximale de cinq ans, le Dr H______ concluait à l'échec de la mesure au sein de [l'établissement pénitentiaire] F______. Les intervenants de cet établissement se montraient pessimistes et impuissants quant à la prise en charge de l'intéressé. La mesure était ainsi inadaptée au cas de A______ et sa poursuite n'avait pas de perspective de succès à la fin de la période. Un placement en milieu fermé était néanmoins nécessaire – que ce soit sur la base du code pénal ou du code civil – pour limiter voire éliminer le risque de commission de nouvelles infractions. Il n'existait par ailleurs, à sa connaissance, aucun autre établissement en Suisse adapté à ce cas complexe, des institutions spécifiques appropriées étant en revanche disponibles en Italie.

d. Dans le cadre de la présente procédure, le Ministère public (MP) a ordonné la mise en œuvre d'une expertise psychiatrique laquelle a donné lieu au rapport du 5 mars 2021 par les Drs I______ et J______.

A teneur de celui-ci, A______ présente un trouble psychiatrique sévère, à savoir une schizophrénie pseudo-psychopathique (F20.8) couplé à une polytoxicomanie actuellement abstinent dans un environnement protégé (F19.1).

La schizophrénie de l'expertisé était caractérisée par de fréquents trouble de comportement hétéro-agressifs et délictueux, ainsi que, notamment, des difficultés relationnelles, une symptomatologie délirante et une désorganisation psychique, un retrait social ou une pauvreté du discours. Sa pathologie n'était que partiellement stabilisée sous traitement neuroleptique bien conduit. Demeurait un potentiel criminogène important en raison des troubles de la perception de la réalité, de l'agressivité, de l'impulsivité et du manque d'empathie. Par ailleurs, l'intéressé était connu depuis la fin de son adolescence pour une dépendance à de multiples substances, notamment le cannabis et avait une certaine appétence pour les benzodiazépines contenues dans sa prescription médicale.

Au moment des faits survenus en juillet 2019, A______ se trouvait dans un état de décompensation psychotique et comportementale. Son rapport à la réalité était grandement altéré, au point qu'il n'avait pas conscience du caractère illicite de ses actes et qu'il n'était pas possible pour lui de faire un choix éclairé, son raisonnement étant envahi par des pensées paralogiques et sa volonté guidée par les convictions délirantes, les hallucinations auditives et la charge anxieuse qui les accompagnaient. Ses capacités volitives étaient abolies. Il se trouvait ainsi en état d'irresponsabilité.

Le risque de récidive violente était élevé, principalement lié à son état mental instable, tant lors de décompensation psychotique qu'en dehors. A______ présentait effectivement des facteurs chronologiques de récidive violente, avec notamment ses antécédents délictueux, son trouble mental grave toujours actif et ses habitudes de consommation de substances multiples. Il présentait en outre des facteurs de risques "futurs", compte tenu de son incapacité fonctionnelle majeure et de sa faible motivation aux soins. Le risque de récidive violente restait également présent en dehors de toute décompensation mentale aigüe, en raison du délire patent facilement résurgent, ainsi que des caractéristiques d'impulsivité et d'intolérance à la frustration liées à sa personnalité dyssociale.

La dangerosité et le risque de récidive de A______ étant directement liés à son état mental, une mesure de soins était susceptible de diminuer ce risque. Cette mesure devait avoir pour objectif de parvenir à maintenir une stabilité psychique, ainsi que l'abstinence aux substances, et de permettre une réadaptation sociale progressive dans un environnement ouvert avec un encadrement médico-social intensif. La mesure thérapeutique institutionnelle en milieu fermé dont bénéficiait l'intéressé depuis trois ans avait permis l'administration de soins médicaux intensifs et continus, ainsi qu'un cadre de vie sécurisant et un maintien obligé de l'abstinence. Si elle n'avait pas empêché les récidives violentes ni les épisodes de décompensation psychotique, elle avait néanmoins permis de les comprendre et de les limiter. Les experts recommandaient ainsi la poursuite de la mesure institutionnelle déjà en place, une mesure institutionnelle en milieu ouvert n'étant pas envisageable à l'heure actuelle au vu de l'appétence de A______ aux toxiques, de son état mental et des caractéristiques dyssociales marquées de sa personnalité.

e. Les autorités judiciaires tessinoises ayant exclu la prolongation de la mesure au-delà de cinq ans, le Tribunal des mesures de contrainte de K______ [TI] a ordonné, par décision du 1er juin 2021, la levée de la mesure thérapeutique institutionnelle à l'encontre de A______ avec effet au 20 septembre 2021 en raison de l'échec constaté de celle-ci. Le Tribunal a fait usage, dans son dispositif, de l'art. 62c al. 5 CP, en annonçant le cas à l'autorité de protection de l'adulte, et en indiquant que la mesure ne serait levée qu'à la condition que ladite autorité prononce une mesure de protection au sens du Code civil.

Suite à cette décision, A______ a été placé en détention pour des motifs de sûreté dans la présente procédure et a été transféré, le 14 septembre 2021, à la Prison de B______, où sa détention a été émaillée de nombreux séjours à l'Unité hospitalière pénitentiaire et psychiatrique.

f. Peu avant son transfert, le directeur adjoint de F______ avait informé le TCO par courriel du 12 septembre 2021 que si A______ devait à nouveau être mis au bénéfice d'une mesure pénale, la direction de l'établissement déclinerait certainement une nouvelle demande de placement "au vu des difficultés observées ces dernières années, de l'importance du travail effectué et de la faible plus-value actuelle à la poursuite du placement".

g. À l'audience de jugement, le conseil de A______ a produit la copie d'un nouveau courrier du directeur adjoint de F______ dans lequel celui-ci réitère sa position et souligne que la prise en charge médicale et pénitentiaire dont a bénéficié A______ à F______ lui a "permis d'évoluer favorablement, malgré des difficultés importantes et une grande souffrance d'être éloigné de son canton d'origine et de ne pouvoir s'exprimer au quotidien dans sa langue maternelle". Cela étant, le séjour de A______ auprès de [l'établissement pénitentiaire] F______ avait permis d'obtenir "la meilleure stabilisation possible bien que des actes d'opposition et parfois de violence, continuent d'émailler régulièrement le quotidien de la prise en charge. N'ayant pas la vocation d'être un lieu de vie sans perspective d'évolution, convaincue que M. A______ bénéficierait d'un placement dans une structure civile spécialisée, la Direction de F______ refuserait une nouvelle demande de placement le concernant".

h. Au vu des conclusions du rapport d'expertise tessinois et du constat que les experts ne s'étaient pas prononcé sur la responsabilité du prévenu en lien avec les faits du 16 mars 2021 visés au point 1.1.5 de la demande du 3 juin 2021, un complément d'expertise a été demandé par le TCO.

Dans son complément du 1er décembre 2021, le Dr I______ a relativisé la conclusion d'échec de la mesure émise par l'expert tessinois. La mesure permettait en effet un cadre, non seulement de vie, mais aussi de soins, qui était rassurant et contenant pour l'intéressé; elle permettait aussi d'éviter tout risque de décompensation mentale et, enfin, la mise en œuvre d'une abstinence aux toxiques. A______ avait accepté la prise orale régulière de médicaments psychotropes, ce qui n'était pas le cas avant l'exécution de la mesure ni à son arrivée à F______. La médication antipsychotique était susceptible d'être améliorée tant sur le plan quantitatif que qualitatif, et ainsi pourrait avoir un effet positif substantiel sur les manifestations cliniques psychotiques persistantes de l'intéressé et sur ses comportements violents.

L'exécution de la mesure institutionnelle en milieu fermé demeurait ainsi adaptée et recommandée au vu des troubles psychiques de l'expertisé. La mise en place d'un traitement antipsychotique en milieu fermé permettait de favoriser la compliance médicamenteuse et des bilans sanguins réguliers, ainsi que d'assurer la poursuite de l'abstinence aux toxiques à long terme. Ces éléments étaient de nature à diminuer le risque de récidive. En cas de stabilisation psychique, l'expertisé pourrait alors passer progressivement à une mesure institutionnelle en milieu ouvert. L'expert recommandait que ladite mesure soit exécutée en Italie au sein de l'un des établissements cités par le Dr H______, « au vu de l'impossibilité juridique et judiciaire de mise en œuvre d'un tel traitement au sein de l'Etablissement pénitentiaire fermé de F______ ». La durée du traitement nécessaire à la diminution du risque de récidive dépendrait essentiellement de l'adhésion de A______ aux soins ainsi que de son évolution, une durée inférieure à cinq ans apparaissant cependant peu réaliste.

i. Entendu lors de l'audience devant le TCO, le Dr I______ a confirmé les conclusions de son rapport d'expertise et de son complément.

Requis de s'exprimer sur les divergences entre ses conclusions et celle de l'expert tessinois, il a indiqué que celles-ci n'étaient pas si divergentes des siennes dans la mesure où son homologue avait préconisé un traitement institutionnel en milieu fermé, nonobstant la mise en exergue de l'échec de la mesure à Genève. La mesure institutionnelle avait eu des effets positifs : le cadre de soins avait permis de diminuer les hospitalisations, A______ avait fini par accepter des règles de vie ainsi que la prise de médicaments. Un autre effet positif résidait dans l'absence de prise de toxiques, ce qui était important dans les troubles schizophréniques, afin d'éviter une décompensation. En ce sens, le traitement institutionnel ne pouvait être considéré comme un échec.

L'évolution du trouble dont souffrait A______ montrait qu'il devrait probablement être institutionnalisé à vie. Une adaptation de sa médication, notamment de la posologie, était susceptible d'avoir un effet positif sur son évolution. Le cas de A______ était complexe, il souffrait d'un trouble schizophrénique extrêmement sévère. Sa situation nécessitait un cadre fermé et sécurisé de manière continue pour lui-même et pour les autres. Un placement civil pourrait être envisagé uniquement à cette condition. L'hôpital de G______ au Tessin ne remplissait pas ces impératifs de sécurité. Il n'existait pas d'institution telle que F______ au Tessin, mais bien en Italie. Il s'agissait d'institutions spécifiques pour des personnes souffrant de troubles psychiatriques et d'addiction, notamment de troubles schizophréniques. Il avait fait état d'une impossibilité de mise en œuvre de la mesure au sein de F______ en raison de la décision des autorités tessinoises et des réserves émises par la direction de l'établissement.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite en application de l'art. 406 al. 1 let. a CPP.

b. Selon son mémoire d'appel, puis sa réplique, A______ persiste dans ses conclusions.

La conclusion du TCO qu'il n'avait pas commis les faits visés aux points 1.1.1, 1.1.2, 1.1.5 et 1.2 aurait dû conduire à son acquittement s'agissant de ces faits et non au simple constat qu'il ne les avait pas commis. Par ailleurs, son état d'irresponsabilité devait également mener à son acquittement pour les faits visés aux points 1.1.3 et 1.1.4, l'acquittement étant selon lui la conséquence de l'art. 19 al. 1 CP.

Le TCO n'avait pas fait état d'éléments tels que la complexité de son cas psychiatrique, laquelle avait été relevée par les deux experts. De l'avis du Dr H______, aucune des mesures prévues aux art. 59ss CP n'était appropriée à sa situation et ne permettait de réduire le risque de récidive. Au contraire, le placement à [l'établissement pénitentiaire] F______ dans un cadre carcéral était délétère. De plus, selon le courrier du directeur adjoint de l'établissement, une nouvelle demande de placement le concernant serait refusée, vu l'absence de perspective d'évolution, ce qui n'avait pas été pris en compte par les premiers juges. Ceux-ci avaient en revanche tenu compte d'une ordonnance pénale du 22 octobre 2021 qui le condamnait à une peine privative de liberté de 70 jours pour violence ou menace contre les autorités ou les fonctionnaires, ce qu'il contestait.

Une mesure institutionnelle ne pouvait être prononcée, alors que les chances de succès de celle-ci étaient nulles selon l'expert tessinois et que, à la lecture de l'expertise genevoise, elle permettrait uniquement de le neutraliser et non de le soigner sur le long terme, ce qui était contraire au but de la loi. En toute hypothèse, aucun établissement en Suisse n'était approprié pour l'accueillir. Il n'était ainsi pas acceptable, puisque contraire à la Convention européenne des droits de l'homme, de le laisser en détention en attente d'une place pour exécuter la mesure institutionnelle ordonnée.

Il concluait à une indemnité de CHF 150.- par jour de détention injustifiée depuis son transfert à B______ le 14 septembre 2021, soit un montant de CHF 38'850.- au jour du mémoire d'appel du 30 mai 2022 et de CHF 45'450.- au jour de sa réplique.

c. Le Ministère public conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris.

d. Le TCO se réfère à son jugement.

D. A______, ressortissant suisse, est né le ______ 1991 à L______ [TI]. Il a quitté l'école à l'âge de 15 ans et n'a jamais été en mesure de travailler en raison de ses troubles psychiatriques. Il perçoit une rente AI à 100% depuis l'âge de 18 ans et est sous curatelle de portée générale. Il s'exprime en italien et ne maîtrise que peu le français.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, A______ a été condamné à six reprises depuis le 12 décembre 2011, les dernières fois:

-        le 20 septembre 2016, par l'"Assise criminali di G______", à une peine privative de liberté de sept mois, à une peine pécuniaire de 10 jours-amende à CHF 10.-, ainsi qu'à une amende de CHF 100.- (exécution de la peine suspendue au profit d'une mesure institutionnelle) pour vol, dommages à la propriété, injure, contravention à l'art. 19a LStup et violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (infraction commise à réitérées reprises),

-        le 21 novembre 2018, par le Ministère public du canton de Genève, à une peine privative de liberté de 180 jours, pour violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires,

-        le 22 octobre 2021, par le Ministère public du canton de Genève, à une peine privative de liberté de 70 jours, pour violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, concernant des faits similaires à ceux faisant l'objet de la présente procédure s'étant déroulés les 14 juin et 27 août 2021 au sein de F______.

E. Me C______, défenseure d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, une heure d'activité de chef d'étude, 31 heures et 35 minutes d'activité de collaborateur et une heure et 15 minutes d'activité de stagiaire, ainsi que CHF 186.16 à titre de débours correspondant aux frais d'interprète et CHF 300.- en lien avec la rédaction d'un rapport médical par [l'hôpital] M______.

En première instance, elle avait été indemnisée à hauteur de 65 heures et 45 minutes.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Selon l'art. 374 CPP, si le prévenu est irresponsable et que la punissabilité au sens de l'art. 19, al. 4, ou 263 CP n'entre pas en ligne de compte, le ministère public demande par écrit au tribunal de première instance de prononcer une mesure au sens des art. 59 à 61, 63, 64, 67, 67b ou 67e CP, sans prononcer le classement de la procédure pour irresponsabilité du prévenu (al. 1). Les dispositions régissant la procédure de première instance sont applicables (al. 2). La rédaction d'un acte d'accusation n'est alors pas nécessaire ni même une appréciation de la qualification juridique des faits (L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Code pénal - Petit commentaire, 2ème éd., Bâle 2016, n. 2, 4 et 9 ad art. 374 CPP et les références). Cette disposition est le reflet de l'art. 19 al. 1 CP, selon lequel l'auteur n'est pas punissable si, au moment d'agir, il ne possédait pas la faculté d'apprécier le caractère illicite de son acte ou de se déterminer d'après cette appréciation.

Le tribunal saisi de la demande ordonne les mesures proposées ou d'autres mesures lorsqu'il considère la participation du prévenu et son irresponsabilité comme établies et qu'il tient ces mesures pour nécessaires, auquel cas le prononcé des mesures est rendu sous la forme d'un jugement (art. 375 al. 1 et 2 CPP). Le juge doit donc au préalable déterminer si les éléments constitutifs objectifs d'une infraction pénale sont réalisés. Si les conditions de l'art. 375 al. 1 sont remplies et que le juge ordonne une mesure, il n'y a pas d'acquittement. En effet, un tel prononcé ne peut être émis qu’en lien avec l’accusation d’avoir fautivement réalisé les éléments constitutifs d’une infraction, accusation qui n’est pas portée dans le cadre de la procédure de l’art. 375 CPP. Le tribunal doit ainsi seulement constater que l'infraction a été commise, sans faute. Dans le dispositif du jugement, le constat de la réalisation non fautive des éléments constitutifs de l’infraction remplace ainsi le verdict de culpabilité et la mesure se substitue à la peine (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, Basler Kommentar Strafprozessordnung Jugendstrafprozessordnung, 2ème éd., Bâle 2014, n. 10 ad art. 375). En revanche, si le tribunal parvient à la conclusion que les éléments constitutifs ne sont pas réalisés, il faut retenir, dans le silence de la loi, que le tribunal doit prononcer l'acquittement de la personne poursuivie, comme il le ferait pour un prévenu responsable (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, op. cit., n. 20 ad art. 375).

2.2. L'appelant fait grief au tribunal de première instance de n'avoir que constaté qu'il n'avait pas commis les faits figurant aux points 1.1.1, 1.1.2, 1.1.5 et 1.2 alors qu'il se justifiait de prononcer son acquittement pour ces faits.

Avec la doctrine citée, la jurisprudence n'ayant pas réglé cette question, il y a lieu de retenir que lorsque le juge parvient à la conclusion que le prévenu irresponsable n'a pas commis les faits reprochés, il devra prononcer un acquittement, par analogie avec un prévenu pleinement responsable. Tel est le cas en l'espèce en ce que le TCO est parvenu à la conclusion que faute d'éléments probants suffisants, il ne pouvait être tenu pour établi que l'appelant avait réalisé les éléments constitutifs des infractions de menace et de violence ou menace contre les autorités ou fonctionnaires en lien avec les faits 1.1.1, 1.1.2, 1.1.5 et 1.2.

Il convient de noter que les faits décrits au point 1.1.5 sont identiques aux faits visés par l'acte d'accusation complémentaire du 6 décembre 2021, lequel présentait ainsi une accusation alternative, suite au constat des experts que la responsabilité de l'appelant était seulement fortement restreinte, étant rappelé qu'il a été acquitté de ces faits.

Au vu de ce qui précède, l'appelant sera acquitté des faits décrits aux points 1.1.1, 1.1.2 et 1.2, en sus de ceux visés par l'acte d'accusation complémentaire (1.3.1 et 1.1.5).

2.3. L'appelant ne saurait en revanche être suivi lorsqu'il estime devoir également être acquitté en raison de son état d'irresponsabilité pour les faits qu'il ne conteste désormais plus avoir commis, visés aux points 1.1.3 et 1.1.4 de la demande de mesure du 3 juin 2021.

En effet, les art. 19 al. 1 CP et 375 CPP ne prévoient pas un acquittement, mais bien le constat que la personne visée a commis une infraction, certes sans verdict de culpabilité en raison de l'irresponsabilité.

Le jugement peut ainsi être confirmé sur ce point.

3. 3.1.1. Selon l'art. 56 al. 1 CP, une mesure doit être ordonnée si une peine seule ne peut écarter le danger que l'auteur commette d'autres infractions (let. a), si l'auteur a besoin d'un traitement ou que la sécurité publique l'exige (let. b) et si les conditions prévues aux art. 59 à 61, 63 ou 64 sont remplies (let. c). Le prononcé d'une mesure suppose en outre que l'atteinte aux droits de la personnalité qui en résulte pour l'auteur ne soit pas disproportionnée au regard de la vraisemblance qu'il commette de nouvelles infractions et de leur gravité (art. 56 al. 2 CP ; ATF 134 IV 121 consid. 3.4.4 p. 131).

3.1.2. Pour ordonner une des mesures prévues aux art. 59 à 61, 63 et 64 CP ou en cas de changement de sanction au sens de l'art. 65 CP, le juge se fonde sur une expertise. Celle-ci se détermine sur la nécessité et les chances de succès d'un traitement, sur la vraisemblance que l'auteur commette d'autres infractions et sur la nature de celles-ci ainsi que sur les possibilités de faire exécuter la mesure (art. 56 al. 3 let. a à c CP).

L'expert se détermine ainsi sur l'ensemble des conditions de fait de la mesure, étant gardé à l'esprit qu'il incombe au juge de dire si une mesure doit être ordonnée et, cas échéant, laquelle. En effet, ce n'est pas à l'expert, mais bien au juge qu'il appartient de résoudre les questions juridiques qui se posent, dans le complexe de faits faisant l'objet de l'expertise (ATF 118 Ia 144 consid. 1c p. 145 ss et les références ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1160/2017 du 17 avril 2018 consid. 2.1 ; 6B_1348/2017 du 22 janvier 2018 consid. 1.1.3 ; 6B_1297/2015 du 22 mars 2017 consid. 3.1 ; 6B_346/2016 du 31 janvier 2017 consid. 3.2 ; 6B_513/2015 du 4 février 2016 consid. 3.4 non publié in ATF 142 IV 56 et les références).

À l'instar des autres moyens de preuve, le juge apprécie librement la force probante d'une expertise ; il n'est pas lié par les conclusions de l'expert (ATF 145 IV 281 consid. 2.5.1 ; 142 IV 49 consid. 2.1.3 ; 141 IV 369 consid. 6.1 et les références). Toutefois, il ne peut s'en écarter que lorsque des circonstances ou des indices importants et bien établis en ébranlent sérieusement la crédibilité. Il est alors tenu de motiver sa décision de ne pas suivre le rapport d'expertise (ATF 142 IV 49 consid. 2.1.3 ; 138 III 193 consid. 4.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_156/2019 du 27 juin 2019 consid. 2.5.1. non publié aux ATF 145 IV 281). Cela est d'autant plus vrai s'agissant des questions dont la réponse demande des connaissances professionnelles particulières (arrêt du Tribunal fédéral 6B_371/2016 du 10 février 2017 consid. 1.1.5).

3.1.3. En vertu de l'art. 56 al. 5 CP, en règle générale, le juge n'ordonne une mesure que si un établissement approprié est à disposition. Cette disposition vise à éviter que le juge n'ordonne une mesure sans s'assurer au préalable de l'existence d'une institution susceptible de l'exécuter. Cette information sera fournie par l'expert, tenu de s'exprimer sur ce point dans son rapport (art. 56 al. 3 let. c CP), ainsi que par les autorités d'exécution. Le juge doit se borner à déterminer si un établissement approprié existe et non que tel ou tel établissement est disposé à accueillir le condamné (arrêt du Tribunal fédéral 6B_395/2021 du 11 mars 2022 consid. 9.4). Le juge ne renoncera à prononcer une mesure thérapeutique institutionnelle que si l'exécution d'une telle mesure est impossible dans l'ensemble de la Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 6B_94/2015 du 24 septembre 2015 consid. 3.1.3).

En raison du manque d'établissement approprié, il est admis que les autorités d'exécution puissent placer, à titre temporaire, un auteur faisant l'objet d'une mesure dans un établissement pénitentiaire, en attendant qu'une place se libère dans un établissement plus adapté au traitement de son trouble ; le délai d'attente variera selon les circonstances (ATF 138 III 593 consid. 8.2 p. 600). Il s'ensuit que le délinquant qui fait l'objet d'une mesure institutionnelle en milieu ouvert pourra être provisoirement placé dans un établissement d'exécution des mesures fermé, en attendant qu'un établissement ouvert puisse l'accueillir (arrêt du Tribunal fédéral 6B_94/2015 du 24 septembre 2015 consid. 3.1.3).

Le seul fait que les thérapeutes à disposition dans l'établissement approprié ne parlent pas la langue maternelle du prévenu n'est pas pertinent. Il incombe aux autorités d'exécution de trouver une solution pour mettre en place la mesure, au besoin en recourant à un interprète ou en trouvant un thérapeute parlant sa langue maternelle (arrêt du Tribunal fédéral 6B_27/2018 du 30 mai 2018 consid. 4.2).

3.2.1. Le prononcé d'une mesure thérapeutique institutionnelle selon l'art. 59 CP suppose un grave trouble mental au moment de l'infraction, lequel doit encore exister lors du jugement. Selon la jurisprudence, toute anomalie mentale du point de vue médical ne suffit pas. Seuls certains états psychopathologiques d'une certaine importance et seules certaines formes relativement lourdes de maladies mentales au sens médical peuvent être qualifiés d'anomalies mentales au sens juridique. En d'autres termes, il faut que la structure mentale de l'intéressé s'écarte manifestement de la moyenne par rapport aux autres sujets de droit, mais plus encore par rapport aux autres criminels. La référence à la gravité du trouble mental ne correspond pas à une description quantitative du dérangement psychique, mais signifie uniquement que le trouble mental doit être significatif sur le plan psychiatrique comme sur le plan juridique (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1167/2018 du 23 janvier 2019 consid. 4.1 et les références citées).

Outre l'exigence d'un grave trouble mental, le prononcé d'un traitement institutionnel selon l'art. 59 al. 1 CP suppose que l'auteur ait commis un crime ou un délit en relation avec ce trouble (let. a) et qu'il soit à prévoir que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec ce dernier (let. b). Le traitement ne peut se limiter à "la simple administration statique et conservatoire des soins", mais doit viser un "impact thérapeutique dynamique". Il doit être suffisamment vraisemblable que celui-ci entraînera, dans les cinq ans de sa durée normale, une réduction nette du risque que l'intéressé commette de nouvelles infractions. La seule possibilité vague d'une diminution du danger ne suffit pas (ATF 141 IV 1 consid. 3.2.4 p. 8 s. ;
134 IV 315 consid. 3.4.1 p. 321 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_130/2018 du 27 juin 2018 consid. 3.1.1 ; 6B_1397/2017 du 26 avril 2018 consid. 1.1.2).

3.2.2. L'autorité d'exécution a la compétence de choisir le lieu d'exécution de la mesure thérapeutique institutionnelle (ATF 142 IV 1 consid. 2.5 p. 10 s.). Cela étant, si un placement en milieu fermé apparaît déjà nécessaire au moment du prononcé du jugement, le juge peut et doit l'indiquer dans les considérants en traitant des conditions de l'art. 59 al. 3 CP (ATF 142 IV 1 consid. 2.4.4 p. 9 et 2.5 p. 10 s.). Dans ces circonstances, il est souhaitable que le tribunal s'exprime dans les considérants de son jugement – mais non dans son dispositif – sur la nécessité d'exécuter la mesure en milieu fermé et recommande une telle modalité d'exécution, de manière non contraignante, à l'autorité d'exécution (ATF 142 IV 1 consid. 2.5 p. 10 s).

3.3.1. En l'espèce, il ressort clairement tant de l'expertise ordonnée par le canton du Tessin du 22 décembre 2020 que de l'expertise genevoise du 5 mars 2021 et son complément du 1er décembre 2021 que le trouble présenté par l'appelant est sévère et nécessite des soins ainsi qu’une prise en charge adéquate, laquelle s'avérera, en tous les cas, compliquée.

Une divergence semble en revanche ressortir de deux expertises s'agissant des chances de succès d'une mesure.

Dans son expertise du 22 décembre 2020, l'expert tessinois a été requis par l'autorité de se prononcer sur l'opportunité de lever la mesure prononcée en 2016 contre l'appelant, au vu de l'arrivée à échéance du délai de cinq ans. La question à laquelle l'expert tessinois devait répondre était ainsi différente, en ce qu'il avait à se prononcer sur la prolongation d'une mesure au-delà du délai de cinq ans, sans avoir connaissance de la présente procédure. Même s'il a en définitive conclu à l'échec de la mesure, l'expert tessinois a souligné la nécessité d'un placement en milieu fermé, que cela soit sur la base du droit civil ou du droit pénal.

L'expert genevois, dans son complément d'expertise du 1er décembre 2021, a pris en compte les conclusions de la dernière expertise tessinoise ainsi que tous les éléments pertinents et est arrivé au résultat qu'une mesure institutionnelle restait indiquée. Une telle mesure avait des chances de succès, avec une adaptation du traitement de l'intéressé, l'expert faisant même état d'une possible amélioration qui permettait le passage de l'expertisé dans une institution en milieu ouvert. Il ressort de ce constat que c'est bien le traitement à fournir à l'expertisé, en milieu institutionnel, qui permettrait de diminuer le risque de récidive, et non sa seule neutralisation liée à son enfermement, comme il le fait valoir dans son mémoire d'appel.

L'expertise genevoise, avec son complément, a pris en compte l'entier des éléments du cas et aucun motif ne permet de s'en écarter. Elle peut ainsi être suivie, en ce qu'elle considère qu'une mesure institutionnelle aurait des chances de diminuer le risque de récidive patent de l'expertisé.

3.3.2. Un établissement approprié existe en Suisse en F______, la problématique linguistique n'étant pas un obstacle au prononcé de la mesure à teneur de la jurisprudence citée ci-avant.

Les experts, tessinois et genevois, ont relevé que F______ était le seul établissement, en Suisse, qui puisse entrer en ligne de compte. Ils ont toutefois écarté cette hypothèse notamment en raison de l'arrivée à échéance du délai de cinq ans fixé par l'autorité judiciaire tessinoise. Or, cette durée maximale ne s'applique pas en présence de nouveaux faits et n'empêche pas le prononcé d'une nouvelle mesure.

En outre, il n'appartient pas à un établissement de faire obstacle à une mesure prononcée par les autorités judiciaires, que l'établissement soit ou non disposé à accueillir le condamné n'étant par ailleurs pas une condition au prononcé d'une mesure. La position exprimée par le directeur de F______ n'a donc pas à être prise en considération à ce stade, étant relevé qu’il n’est pas autorité d’exécution, laquelle est exercée par le Département (art. 5 de la loi d’application du code pénal suisse [LaCP]).

3.3.3. L'appelant fait valoir qu'une mesure civile de protection de l'adulte serait plus indiquée.

Or, le droit pénal est autonome et les mesures pénales sont en principe prioritaires sur des mesures fondées sur le droit administratif ou le droit civil. Le juge pénal doit ainsi ordonner une mesure prévue par le Code pénal si les conditions en sont réalisées. Il n'est pas autorisé à renoncer à une mesure pénale, parce qu'il tient une mesure civile ou administrative plus indiquée dans le cas concret (ATF 92 IV 77 consid. 3 p. 80 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_343/2015 du 2 février 2016 consid. 2.2.3). Toutefois, le juge pénal ne peut pas ignorer les mesures civiles qui servent directement ou indirectement à prévenir les infractions lors du prononcé d'une mesure pénale. Lors de l'examen de la nécessité d'une mesure pénale et en particulier du pronostic légal, il ne peut pas ne pas tenir compte d'une mesure de protection de l'adulte, par exemple un placement à des fins d'assistance, qui a déjà été exécuté. Il doit prendre en considération les mesures non pénales dans la mesure où le danger que la mesure pénale doit combattre n'existe plus ou plus dans la même mesure (arrêts du Tribunal fédéral 6B_343/2015 du 2 février 2016 consid. 2.2.3 et 6B_596/2011 du 19 janvier 2012 consid. 3.4.2).

Ici, aucune mesure civile n'a encore été exécutée, ni même prononcée, de sorte que le risque de récidive ne peut pas être tenu pour annihilé. Il ne sera donc pas renoncé à une mesure pénale pour cette raison.

3.3.4. Les conditions légales de l'art. 59 CP sont remplies et il se justifie ainsi de confirmer le prononcé d'un traitement institutionnel en faveur de l'appelant. De l'avis de l'expert, une telle mesure devrait être effectuée en milieu fermé, à tout le moins dans un premier temps.

Il n'appartient en revanche pas à la CPAR de fixer l'établissement dans lequel cette mesure doit être exécutée, cette décision revenant à l'autorité d'exécution. Il reviendra dès lors au Service d'application des peines et mesures de déterminer l'opportunité d'un retour à F______ ou la possibilité d'exécuter cette mesure en Italie.

Le jugement sera ainsi confirmé sur ce point.

4. Sans prendre de conclusion en lien avec ce grief, A______ conteste avoir été condamné par ordonnance pénale du 22 octobre 2021 à une peine privative de liberté de 70 jours pour violence ou menace contre les autorités ou les fonctionnaires. Cette condamnation ressort pourtant bien de son casier judiciaire, l'ordonnance pénale en question ayant été notifiée le 29 octobre 2021 et n'ayant pas été frappée d'opposition. Cet antécédent est repris dans le présent arrêt, comme l'a fait le TCO, étant précisé que celui-ci n'a, dans tous les cas, eu aucun impact sur l'issue de la procédure, en particulier sur le prononcé de la mesure contestée par l'appelant.

5. Au vu des circonstances et de la situation du prévenu, les frais seront laissés à la charge de l'Etat (art. 419 CPP).

6. 6.1. L'art. 431 al. 2 CPP prévoit qu'en cas de détention provisoire et de détention pour des motifs de sûreté, le prévenu a droit à une indemnité ou à une réparation du tort moral lorsque la détention a excédé la durée autorisée et que la privation de liberté excessive ne peut être imputée sur les sanctions prononcées à raison d'autres infractions.

L'art. 431 CPP ne traite pas de l'imputation de la détention excessive sur les mesures thérapeutiques selon les art. 56 ss CP. La jurisprudence a toutefois admis que la détention provisoire et la détention pour des motifs de sûreté devaient, en principe, être imputées sur les mesures thérapeutiques au sens des art. 56 ss CP, malgré leur durée indéterminée (ATF 141 IV 236).

En cela, une indemnité et une réparation du tort moral pour privation de liberté excessive entrent en ligne de compte seulement s'il devait apparaître postérieurement que la durée totale de la privation de liberté est plus courte dans le cas particulier que celle entraînée par la détention provisoire ou par la détention pour des motifs de sûreté (ATF 145 IV 359 consid. 2.8).

6.2. En l'espèce, compte tenu de la jurisprudence claire à ce propos, la détention pour des motifs de sûretés subie par l'appelant peut être imputée sur la mesure thérapeutique institutionnelle prononcée, laquelle est confirmée en appel, au vu de la durée prévisible de celle-ci.

Ses conclusions en indemnisation seront ainsi rejetées.

7. Les motifs ayant conduit les premiers juges à prononcer, par ordonnance séparée du 11 février 2022, le maintien de l'appelant, en détention pour des motifs de sûreté sont toujours d'actualité, de sorte que la mesure sera reconduite mutatis mutandis (ATF 139 IV 277 consid. 2.2 à 2.3).

8. 8.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. REISER / B. CHAPPUIS [éds], Commentaire romand, Loi fédérale sur la libre circulation des avocats, Bâle 2010, n. 257 ad art. 12). Dans le cadre des mandats d'office, l'État n'indemnise ainsi que les démarches nécessaires à la bonne conduite de la procédure pour la partie qui jouit d'une défense d'office ou de l'assistance judiciaire. Il ne saurait être question d'indemniser toutes les démarches souhaitables ou envisageables. Le mandataire d'office doit en effet gérer son mandat conformément au principe d'économie de procédure (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.22 du 31 octobre 2013 consid. 5.2.3).

L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Des exceptions demeurent possibles, charge à l'avocat de justifier l'ampleur d'opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait.

En principe, le forfait couvre également la rédaction de la déclaration d'appel, qui, sous l'angle de l'exigence de nécessité, peut consister en une simple lettre, n'ayant pas à être motivée (ordonnance de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2014.51 du 21 novembre 2014 consid. 2.1 ; décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.165 du 24 janvier 2014 consid. 4.1.3 et BB.2013.127 du 4 décembre 2013 consid. 4.2 ; AARP/133/2015 du 3 mars 2015).

8.3. En l'occurrence, la rédaction de la déclaration d'appel et les activités sous "étude du dossier" ne seront pas indemnisées en tant que telles mais couvertes par le forfait de 10%.

Les recherches juridiques de l'avocate stagiaire ne seront pas prises en compte, faute de question particulièrement pointue, l'État ne devant pas assumer la charge financière de la formation de l'avocat stagiaire, laquelle incombe à son maître de stage (AARP/147/2016 du 17 mars 2016 consid. 7.3 ; AARP/302/2013 du 14 juin 2013 ; AARP/267/2013 du 7 juin 2013).

Le temps consacré aux conférences avec les médecins traitants de l'appelant sera également écarté, une telle activité à caractère social n'entrant pas dans les prestations prises en charge. De même que les frais en lien avec un rapport médical, apparemment daté du 9 février 2022 selon la facture de [l'hôpital] M______, ne seront pas indemnisées, ce rapport ne se retrouvant pas au dossier.

Enfin, l’activité facturée s’avère trop importante dans un dossier censé connu de l’avocat pour avoir été plaidé en première instance, étant relevé que le mémoire d’appel de 57 pages comprend 2 pages de développement sur la recevabilité, qui était manifeste, et près de 30 pages de résumé de la procédure sans portée, seuls quelques éléments du jugement entrepris étant contestés. La durée de rédaction du mémoire d’appel sera ainsi réduite en conséquence.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 3'977.20 correspondant à 20 heures d'activité au tarif de CHF 150.-/heure, une heure d'activité au tarif de CHF 200.-/heure, plus la majoration forfaitaire de 10%, et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 271.04, ainsi que les frais d'interprète en CHF 186.16.

9. Compte tenu des modifications apportées au jugement entrepris, celui-ci sera intégralement annulé et remplacé par le présent jugement (art. 408 CPP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTCO/23/2022 rendu le 11 février 2022 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/20725/2019.

L'admet très partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 ch. 1 CP) s'agissant des faits décrits aux points 1.1.1, 1.1.2 et 1.2 de la demande pour prévenu irresponsable du 3 juin 2021 et 1.3.1 de l'acte d'accusation complémentaire du 6 décembre 2021.

Déclare que A______ a commis les faits décrits aux points 1.1.3 et 1.1.4 de la demande pour prévenu irresponsable du 3 juin 2021 en état d'irresponsabilité (art. 19 CP et art. 375 al. 1 CPP).

Dit que ces faits sont constitutifs de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 ch. 1 CP).

Ordonne que A______ soit soumis à un traitement institutionnel (art. 59 al. 1 CP).

Ordonne la transmission du présent jugement, des procès-verbaux de l'audience de jugement, du rapport d'expertise psychiatrique du 5 mars 2021 et du rapport d'expertise psychiatrique complémentaire du 1er décembre 2021 au Service de l'application des peines et mesures.

Déboute D______ de ses conclusions civiles (art. 49 CO) et de ses conclusions en indemnité (art. 433 CPP).

Laisse les frais de la procédure à la charge de l'état (art. 419 CPP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 431 al. 2 CPP).

Ordonne le maintien de A______ en détention pour motifs de sûreté.

Prend acte de ce que le Tribunal correctionnel a arrêté à CHF 12'287.45 l'indemnité de procédure de première instance due à Me C______, défenseure d'office de A______ (art. 135 CPP).

Arrête à CHF 3'977.20, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me C______, défenseure d'office, de A______ pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal correctionnel ainsi qu'au Service d'application des peines et mesures.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente :

Gaëlle VAN HOVE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).