Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/1191/2021 du 25.11.2021 ( OCPM ) , REJETE
REJETE par ATA/435/2022
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 25 novembre 2021
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dans la cause
Monsieur A______
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS
1. Ressortissant sénégalais né le ______ 1986, Monsieur A______ a déposé une demande de permis de séjour pour formation dans son pays d’origine. Il souhaitait étudier auprès de l’Université de Genève (ci-après : UNIGE) et visait une maîtrise universitaire en droit.
2. Selon son curriculum vitae, il a effectué des études de droit à l’Université B______ à Dakar et y a obtenu une maîtrise dans ce domaine.
De langue maternelle française, il domine l’anglais, à l’oral et à l’écrit, ainsi que l’espagnol, à l’écrit.
3. M. A______ est entré en Suisse le 15 septembre 2010 et, le 24 du même mois, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) lui a délivré une autorisation de séjour pour formation, qui a été régulièrement renouvelée.
4. Le 18 septembre 2013, M. A______ a obtenu une maîtrise universitaire en droit, délivrée par l’UNIGE.
5. Le 25 juin 2014, l’UNIGE lui a décerné un certificat de droit transnational.
6. L’intéressé a été immatriculé au programme de doctorat en droit à la faculté de droit, sciences criminelles et administration publique de l’Université de Lausanne (ci-après : UNIL) au semestre de printemps 2016.
7. Le 10 mai 2016, il a sollicité le renouvellement de son autorisation de séjour.
8. Par pli du 19 janvier 2017, l’OCPM lui a fait part de son intention de refuser de donner une suite favorable à sa requête et de prononcer son renvoi de Suisse. Il avait obtenu une maîtrise universitaire en droit, ainsi qu’un certificat de droit transnational et était exmatriculé de l’UNIGE depuis le 5 août 2014. Le but de son séjour pouvait ainsi être considéré comme atteint. Un délai lui a été accordé pour faire valoir son droit d’être entendu.
9. Le 6 avril 2017, l’OCPM, après avoir pris connaissances des observations de l’intéressé, formulées le 17 février précédent, l’a informé qu’il renonçait à mettre à exécution son intention de ne pas renouveler son autorisation de séjour. Toutefois, dans la mesure où son projet de doctorat n’était pas mentionné initialement et que la durée prévue de ses études excéderait huit ans, il soumettrait avec un préavis favorable son dossier au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), dont la décision était réservée.
10. Le 26 juillet 2017, le SEM a fait part à M. A______ de son intention de refuser de donner son approbation à la prolongation de son autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse. En effet, il ne disposait pas des moyens financiers nécessaires. Un délai lui a été accordé pour se déterminer à ce sujet.
11. Le 19 septembre 2017, le SEM, après avoir pris connaissance des déterminations de l’intéressé, a approuvé la prolongation de son autorisation de séjour pour une durée de six mois.
12. Le 31 juillet 2018, l’OCPM a fait part à l’intéressé qu’il était disposé à donner une suite favorable à sa demande de renouvellement d’autorisation de séjour, sollicitée le 10 mars précédent, sous réserve de l’approbation du SEM.
13. Le 9 octobre 2018, le SEM a approuvé une ultime prolongation de son autorisation de séjour pour une durée d’un an. Aucun renouvellement ne lui serait accordé, même si sa thèse n’était pas terminée à cette échéance. En ce cas, il devrait la finir à l’étranger.
14. Le 25 octobre 2019, il a derechef sollicité le renouvellement de son autorisation de séjour.
15. Le 3 décembre 2019, l’OCPM a informé le précité qu’il était disposé à donner une suite favorable à sa requête, sous réserve de l’approbation du SEM.
16. Le 19 décembre 2019, le SEM l’a informé de son intention de refuser la prolongation de son permis de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse. Un délai lui a été accordé pour faire valoir son droit d’être entendu.
17. Par décision du 4 mars 2021, le SEM a refusé de prolonger son autorisation de séjour et lui a imparti un délai de départ de huit semaines à compter de l’entrée en force de sa décision.
Le but initial de son séjour en Suisse avait été atteint par l’obtention de sa maîtrise. Il avait néanmoins continué sa formation par un certificat de droit transnational. À aucun moment lors du dépôt de sa demande d’autorisation de séjour, il n’avait fait mention d’un doctorat. La question d’un éventuel abus et d’une tentative d’éluder les prescriptions sur le séjour des étrangers pouvait se poser. De plus, le 21 août 2017, ses directeurs de thèse avaient relevé que celle-ci devrait s’achever dans un délai de deux ans. Il avait été averti que son autorisation de séjour pour études ne serait pas prolongée, même si sa thèse n’était pas achevée. Enfin, aux intérêts personnels de l’intéressé s’opposait l’intérêt public.
Cette décision n’a pas été attaquée devant le Tribunal administratif fédéral.
18. Par pli du 12 février 2021, reçu par l’OCPM le 17 février suivant, M. A______ a déposé une demande d’autorisation de séjour pour cas de rigueur.
Il s’est prévalu de son excellente intégration, de son respect de l’ordre juridique, de l’impossibilité de sa réintégration au Sénégal, de son indépendance financière, ainsi que de son absence de dépendance à l’aide sociale.
Il a notamment produit une attestation établie le 10 janvier 2020 par les Prof. D______ et E______ de l’UNIL, à teneur de laquelle sa thèse se concentrait sur les problèmes de protection de la vie privée liée aux archives privées et publiques, prioritairement sous l’angle du droit suisse.
19. Le 19 avril 2021, l’OCPM lui a fait part de son intention de refuser d’accéder à sa requête. Un délai lui a été accordé pour faire valoir son droit d’être entendu.
20. Par pli du 20 mai 2021, le précité a transmis ses déterminations à l’OCPM.
21. Par décision du 1er juin 2021, l’OCPM a refusé de soumettre son dossier au SEM avec un préavis positif afin qu’il lui délivre une autorisation de séjour pour cas de rigueur.
Cette autorité lui avait notifié une décision négative, le 4 mars précédent. En outre, il ne remplissait pas les critères relatifs à un cas individuel d’extrême gravité. La durée de son séjour en Suisse, qu’il avait passé au bénéfice d’un permis de séjour pour études, devait être relativisée pour la reconnaissance d’un cas de rigueur. De plus, il n’avait pas démontré une intégration socioculturelle particulièrement remarquable. Celle-ci correspondait au comportement ordinaire qui pouvait être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Il n’avait pas fait état d’une situation familiale justifiant une exemption des mesures de limitation, ni de graves problèmes de santé nécessitant, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales d’urgence indisponibles dans son pays d’origine. Il n’avait pas non plus établi qu’un retour au Sénégal entraînerait de graves conséquences sur sa situation personnelle, indépendamment des circonstances générales affectant l’ensemble de la population restée sur place. En conclusion, il était le seul artisan de sa situation, puisqu’il ne s’était pas conformé à la décision de renvoi du SEM.
22. Par acte du 2 juillet 2021, M. A______ a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) à l’encontre de cette décision en concluant à ce que l’OCPM lui délivre une autorisation de séjour pour cas d’extrême gravité, le tout sous suite de frais et dépens.
L’OCPM avait violé son droit d’être entendu en ce sens qu’il n’expliquait pas pour quelle raison son intégration socioculturelle faisait défaut.
Ainsi qu’il ressortait d’attestations annexées, il séjournait en Suisse depuis plus de dix ans et y était parfaitement intégré, en particulier dans la vie estudiantine et politique genevoise. Il s’était également constitué un large réseau d’amis depuis sa venue en Suisse. À côté de ses études, il avait également travaillé de manière continue, si bien qu’il avait toujours été indépendant financièrement. Il avait fait siennes les valeurs helvétiques, tant dans sa vie privée que dans sa vie professionnelle. Il faisait preuve d’une intégration socioculturelle particulièrement remarquable.
Il était en train de terminer sa thèse relative à la « protection de la vie privée et des données personnelles durant le cycle de vie de l’information en droit public et privé » auprès de l’UNIL. Il avait ainsi collaboré de très près avec les milieux de l’archivage en Suisse et s’était créé un large réseau professionnel dans son milieu d’expertise. Il contribuait à l’amélioration et à l’analyse de l’ordre juridique grâce à son expertise dans le domaine de la protection des données. Ses recherches et les connaissances qu’il avait acquises profitaient à la Suisse. En revanche, elles étaient totalement inutilisables dans son pays d’origine. Seule la poursuite de son séjour en Suisse lui permettrait de mettre à profit ses compétences professionnelles. Il ambitionnait de créer une plate-forme blockchain de consortium destinée à recueillir de façon anonyme les informations fournies par les lanceurs d’alertes. Ce projet s’inscrivait dans la continuité de sa thèse. La protection des lanceurs d’alertes était encore lacunaire en Suisse. Son projet ne pourrait pas se réaliser au Sénégal, où ses connaissances seraient inutilisables. En d’autres termes, ses connaissances étaient à ce point spécifiques qu’il ne pourrait les utiliser dans son pays d’origine.
Il résidait depuis dix ans en Suisse, sans interruption, de sorte qu’il remplissait la condition d’une durée de présence en Suisse très longue.
Il n’entretenait plus aucun contact avec le Sénégal. Il avait quitté le foyer familial à dix-huit ans, avait perdu tout contact avec son père et n’y disposait d’aucun réseau social. Un renvoi dans son pays entraînerait de graves conséquences sur sa situation personnelle. En conséquences, ses possibilités de réintégration étaient quasi-nulles.
Selon l’art. 21 al. 3 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), les diplômés des hautes écoles suisses étaient admis provisoirement au terme de leurs études pour une durée de six mois afin de leur permettre de trouver un emploi qualifié. Il découlait ainsi d’une interprétation téléologique de la loi que celle-ci avait également pour but d’offrir la possibilité à des étudiants étrangers hautement qualifiés d’une haute école suisse de mettre à profit leurs compétences acquises, respectivement d’offrir à la Suisse un retour sur investissement. Il serait prochainement titulaire d’un doctorat en droit portant sur la protection des données et, donc hautement qualifié dans un domaine très spécifique. Il était ainsi dans l’intérêt de la Suisse de lui octroyer un titre de séjour.
23. Dans ses observations du 6 septembre 2021, l’OCPM a proposé le rejet du recours.
24. Il ressort des pièces du dossier que le recourant n’a jamais émargé à l’Hospice général et que son casier judiciaire ne comporte aucune inscription.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).
2. Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).
3. Le recourant se plaint d’une violation de son droit d’être entendu, sous l’angle d’un défaut de motivation de la décision attaquée.
4. Le droit d’être entendu implique pour l’autorité, l’obligation de motiver sa décision (ATF 138 I 232 consid. 5.1). De surcroît, l’art. 46 al. 1 LPA fait obligation aux autorités administratives de rendre des décisions motivées. Selon la jurisprudence, l’obligation de motiver n’impose pas à l’autorité d’exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1.). Il suffit, au regard de ce droit, qu’elle mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l’ont guidé et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que les intéressés puissent se rendre compte de la portée de celle-ci et de la déférer à l’instance supérieure en connaissance de cause (ATF 142 II 154 consid. 4.2). La portée de l’obligation de motiver dépend des circonstances concrètes, telles que la nature de la procédure, la complexité des questions de fait ou de droit, ainsi que la gravité de l’atteinte portée à la situation juridique des parties. Dès lors que l’on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l’autorité, le droit à une décision motivée est respecté, même si la motivation présentée est erronée. En outre, la motivation peut être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 IV consid. 3.2.1). Il n’y a ainsi violation du droit d’être entendu que si l’autorité ne satisfait pas à son devoir minimum d’examiner les problèmes pertinents (ATF 134 I 83 consid. 4.1).
Sa violation peut néanmoins être réparée devant l'instance de recours si celle-ci jouit du même pouvoir d'examen des questions litigieuses que l'autorité intimée et si l'examen de ces questions ne relève pas de l'opportunité, car l'autorité de recours ne peut alors substituer son pouvoir d'examen à celui de l'autorité de première instance (arrêt du Tribunal fédéral 2C_341/2016 du 3 octobre 2016 consid. 3.1 et les arrêts cités).
5. En l’espèce, le recourant reproche à l’OCPM de ne pas avoir expliqué pour quelle raison il considère que son intégration socioculturelle fait, selon lui, défaut.
Certes, la décision litigieuse se révèle, succincte sur ce point, mais elle demeure parfaitement claire et ne nécessite pas de plus amples développements. Elle mentionne les bases légales applicables en l’espèce, soit les art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA, ainsi que les motifs de refus. Ces éléments ont d’ailleurs permis au recourant, juriste de formation et doctorant en droit, de motiver son recours de manière complète et, en particulier, d’y exposer de manière approfondie pour quelle raison il estime que son intégration en Suisse est particulièrement réussie. Dès lors, il n’a subi aucun préjudice procédural. En tout état de cause, à supposer qu’un défaut de motivation puisse être imputé à l’autorité intimée, il a pu être réparé devant le tribunal et le renvoi de la cause à l’OCPM constituerait une vaine formalité.
Partant, le grief doit être rejeté.
6. Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.
Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3).
7. Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b).
8. Le recourant conteste le refus de l’OCPM de transmettre son dossier au SEM avec un préavis favorable, afin qu’il lui délivre une autorisation de séjour pour cas de rigueur.
9. L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.
L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration de la personne requérante sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g).
Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené une personne étrangère à séjourner illégalement en Suisse (SEM, Directives et commentaires, Domaine des étrangers, 2013, état au 1er janvier 2021 [ci-après : directives SEM] ch. 5.6.10 ; ATA/340/2020 du 7 avril 2020 consid. 8a).
10. L’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d’origine, mais implique qu’il se trouve personnellement dans une situation si grave qu’on ne peut exiger de sa part qu’il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l’ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d’une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d’exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n’exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d’un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3).
La question n’est donc pas de savoir s’il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d’examiner si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises. Le Tribunal fédéral a déjà relevé que la réintégration dans le pays d'origine n'est pas déjà fortement compromise parce que l'étranger n'y retrouvera pas de travail dans le domaine d'activité qui était le sien en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2015 précité consid. 5.2.1 et 5.2.2).
11. Il ressort de la formulation de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, qui est rédigé en la forme potestative, que l’étranger n’a aucun droit à l’octroi d’une dérogation aux conditions d’admission pour cas individuel d’une extrême gravité et, partant, à l’octroi (respectivement au renouvellement ou à la prolongation) d’une autorisation de séjour fondée sur cette disposition (ATF 138 II 393 consid. 3.1). Aussi, conformément à la pratique et à la jurisprudence constantes en la matière les conditions mises à la reconnaissance d’une situation d’extrême gravité doivent être appréciées de manière restrictive.
12. Il est nécessaire que l’étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela signifie que ses conditions de vie et d’existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue, autrement dit qu’une décision négative prise à son endroit comporte pour lui de graves conséquences. Lors de l’appréciation d’un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce. La reconnaissance d’une situation d’extrême gravité n’implique pas forcément que la présence de l’étranger en Suisse constitue l’unique moyen pour échapper à une situation de détresse. Par ailleurs, le fait que l’étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu’il s’y soit bien intégré (au plan professionnel et social) et que son comportement n’ait pas fait l’objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas individuel d’extrême gravité ; encore faut-il que la relation de l’intéressé avec la Suisse soit si étroite qu’on ne puisse exiger de lui qu’il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d’origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4478/2016 du 29 janvier 2018 consid. 4.5 et références citées).
Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, l’intéressé possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).
S’agissant de l’intégration professionnelle, elle doit revêtir un caractère exceptionnel au point de justifier, à elle seule, l’octroi d’une autorisation de séjour en dérogation aux conditions d’admission. Le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les utiliser dans son pays d’origine, ou il doit avoir réalisé une ascension professionnelle remarquable, circonstances susceptibles de justifier à certaines conditions l’octroi d’un permis humanitaire (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.4).
La durée totale du séjour constitue un critère important de reconnaissance d’un cas de rigueur. Il importe cependant de rappeler que selon la jurisprudence applicable en la matière, le simple fait pour un étranger de séjourner en Suisse pendant de longues années ne permet pas d’admettre un cas personnel d’une extrême gravité. En outre, la durée d’un séjour illégal, ainsi qu’un séjour précaire ne doivent normalement pas être pris en considération ou alors seulement dans une mesure très restreinte (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4145/2017 du 10 octobre 2018 consid. 5.1 et les références citées). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012).
Cela étant, il ne faut enfin pas perdre de vue qu’il est parfaitement normal qu’une personne, ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers, s’y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l’une des langues nationales. Aussi, les relations d’amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l’étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d’une situation d’extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3).
13. En l’espèce, au vu de l’examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, le tribunal considère que le recourant ne satisfait pas aux conditions strictes requises pour bénéficier d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur.
Il est arrivé en Suisse en septembre 2010. Il séjourne ainsi dans notre pays depuis plus de onze ans, ce qui représente une longue durée. Toutefois, celle-ci doit être relativisée, compte tenu du caractère nécessairement temporaire des autorisations de séjour pour formation, au bénéfice desquelles il a toujours résidé en Suisse (ATA/408/2021 du 13 avril 2021 consid. 8). Par ailleurs, il fait l’objet d’une décision de renvoi prononcée par le SEM le 4 mars 2021, qui est actuellement définitive et exécutoire, puisqu’il ne l’a pas contestée.
L’intéressé se prévaut d’une intégration particulièrement poussée. Les lettres de recommandation d’amis et de collègues font état de ses qualités personnelles et les attestations qu’il a produites démontrent qu’il a tissé un réseau social et qu’il s’est investi dans des associations sportives (F______, G______), politiques et humanitaires (H______ et I______). Enfin, il est de langue maternelle française. Cela étant, il ne peut se prévaloir, par rapport à la moyenne des étrangers qui ont passé autant d’années que lui en Suisse - d’une intégration socio-culturelle exceptionnelle. En effet, il est parfaitement normal qu’une personne ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers s’y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l’une des langues nationales. Aussi, les relations d’amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l’étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d’une situation d’extrême gravité (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4478/2016 du 29 janvier 2018 consid. 5.3). En tout état, le recourant ne peut se prévaloir d’une intégration sociale intense au sens de la jurisprudence. L’intégration sociale du recourant ne permet ainsi pas, à elle seule, de retenir l’existence d’un cas de rigueur.
Au vu des études qu’il a suivies en Suisse, le recourant peut se prévaloir d’un très bon parcours professionnel. Il a certes acquis des connaissances juridiques qui doivent, pour certaines d’entre elles, être considérées comme spécifiques à l’ordre juridique helvétique. En effet, il a obtenu une maîtrise en droit suisse auprès de l’UNIGE et sa thèse se concentre sur les problèmes de protection de la vie privée liée aux archives privées et publiques, prioritairement sous l’angle du droit suisse. Toutefois, il a également axé sa formation sur le droit international, puisqu’il a obtenu un diplôme de droit transnational auprès de l’UNIGE. En outre, il dispose d’une maîtrise en droit obtenue dans son pays d’origine. Dès lors, c’est à tort qu’il soutient que les connaissances acquises en Suisse se révèlent à ce point spécifiques qu’il soit aucunement en mesure de les utiliser dans son pays. De surcroît, le fait qu’il ne puisse pas retrouver un emploi dans le domaine juridique spécifique qui fait l’objet de sa thèse ne permet pas de retenir que sa réintégration au Sénégal se révèle fortement compromise. Enfin, il a choisi ces spécificités en sachant qu’au terme de ses études il devrait quitter la Suisse et retourner dans son pays.
Le recourant se prévaut du fait qu’il a toujours été indépendant financièrement et qu’il n’a jamais bénéficié des prestations de l’Hospice général. Par ailleurs, son casier judiciaire ne comporte aucune inscription. Or, le fait de ne pas dépendre de l'aide sociale, de ne pas avoir de dettes et de ne pas avoir été condamné pénalement constitue un comportement ordinaire qui peut être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Il ne s'agit pas là de circonstances exceptionnelles permettant à elles seules de retenir l'existence d'une intégration particulièrement marquée susceptibles de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur (JTAPI/1143/2021 du 15 novembre 2021 consid. 21).
Né en 1986, le recourant est arrivé en Suisse à l’âge de 24 ans. C’est dire qu’il a passé dans son pays, non seulement son enfance, mais surtout son adolescence, période cruciale pour la formation de la personnalité. Il en connaît les us et coutumes et en maîtrise la langue, puisqu’il est francophone. En outre, il ne se prévaut d’aucun problème de santé.
Enfin, l’art. 21 al. 3 LEI, dont il se prévaut dans son recours, ne lui est d’aucun secours. En effet, l’art. 21 LEI fait partie des dispositions concernant l’admission en vue de l’exercice d’une activité lucrative, lesquelles sont régies aux art. 18 à 26a LEI. Or, l’intéressé sollicite une autorisation de séjour pour cas de rigueur et non un permis de travail.
Au vu de ces circonstances prises dans leur ensemble, la situation du recourant ne remplit pas les conditions très strictes permettant d’admettre l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, comme l’a retenu à juste titre l’OCPM, qui n’a pas mésusé de son large pouvoir d’appréciation en refusant de transmettre son dossier au SEM avec un préavis positif. Il ne peut dès lors prétendre à l’octroi d’une autorisation de séjour pour rester en Suisse.
14. Ne reposant sur aucun motif valable, le recours doit être rejeté.
15. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).
16. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 2 juillet 2021 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 1er juin 2021 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Sophie CORNIOLEY BERGER
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.
Genève, le |
| La greffière |