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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/497/2023

ACJC/1530/2025 du 24.10.2025 sur JTPH/291/2024 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/497/2023 ACJC/1530/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU VENDREDI 24 OCTOBRE 2025

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ [ZH], appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 12 novembre 2024 (JTPH/291/2024), représentée par Me B______, avocate,

et

C______, succursale de D______, sise ______ [GE], intimée, représentée par
Mes Manuel ISLER et Frédéric GABUS, avocats, BMG AVOCATS, avenue de Champel 8C, case postale 385, 1211 Genève 12.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/291/2024 du 12 novembre 2024, notifié le 13 novembre 2024 à A______, le Tribunal des prud'hommes (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure ordinaire, a déclaré recevable la demande formée le 27 juin 2023 par A______ contre [la banque] C______ (cf. infra consid. C.a) (ch. 1 du dispositif), déclaré irrecevables les déterminations de C______ figurant au chapitre IV de sa duplique du 9 avril 2024 sur les déterminations de A______ dans ses déterminations du 1er mars 2024 (ch. 2), débouté A______ de toutes ses prétentions (ch. 3), débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 4), arrêté les frais de la procédure à 2'615 fr., mis à la charge de A______ et compensés partiellement avec l'avance de frais de 2'155 fr. effectuée par A______, qui reste acquise à l'Etat de Genève (ch. 5, 6 et 7), condamné A______ à verser 460 fr. aux Services financiers du pouvoir judiciaire (ch. 8), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 9) et débouté les parties de toute autre conclusion (ch. 10).

B.            a. Par acte expédié le 13 décembre 2024 au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a formé appel contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation des chiffres 3 à 10 de son dispositif.

Elle a conclu, avec suite de frais judiciaires et dépens, sur les points encore litigieux en appel, à ce que la Cour condamne C______ à lui verser le montant net de 34'698 fr. 01 avec intérêts à 5% l'an dès le 1er mai 2022 et le montant brut de 173'997 fr. 25 avec intérêts moratoires à 5% l'an dès le 1er mai 2022.

Dans le corps de son acte, elle a précisé que le montant brut de 173'997 fr. 25 se subdivisait en 143'997 fr. 25 à titre d'indemnité issue du plan social de C______ et de 30'000 fr. au titre de rémunération variable (bonus).

Sa conclusion en paiement de 34'698 fr. 01 nets comprenait 20'000 fr. au titre de frais de formation découlant du plan social de C______, 5'000 fr. au titre d'indemnité pour tort moral et 9'698 fr. 01 au titre d'honoraires d'avocats avant procès.

b. Dans sa réponse, C______ a conclu, avec suite de frais judiciaires et dépens, à la confirmation du jugement querellé et au déboutement de A______ de toutes ses conclusions.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions.

d. Elles ont été informées par courrier du greffe du 11 juillet 2025 de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les éléments pertinents suivants résultent de la procédure :

a. C______ (SUISSE) est une société de droit suisse dont le but était l'exploitation d'une banque. Ses actifs et passifs ont été repris par C______, société anonyme de droit français, d’après un contrat de fusion du 18 février et 25 février 2025 ainsi que du bilan du 31 décembre 2024. L’activité de C______ (SUISSE) a cessé à la suite de la fusion par émigration. C______ (SUISSE) n’est cependant pas encore radiée du registre du commerce, dans l’attente de l’obtention de l’autorisation des administrations fiscales fédérale et cantonale. Cette fusion ayant eu lieu postérieurement au jugement querellé, il sera fait référence, par souci de simplification, à C______ (SUISSE) dans le cadre du présent arrêt.

b. C______ est une société française, dont le siège se situe à Paris (France). Elle est la société mère de l'ensemble des filiales de C______ à travers le monde.

c. C______/E______ (FRANCE) est une société ayant son siège à Paris (France). Elle dispose d'une succursale à Zurich soit C______, SUCCURSALE DE ZURICH (ci-après : C______/E______ (SUISSE)).

d. Par contrat de durée indéterminée du 21 avril 2008, A______ a été engagée par C______/E______ (FRANCE) (ci-après : le « contrat de travail français »).

Des relations contractuelles entre les parties

e. En 2016, A______ a participé au programme de mobilité internationale de C______. Dans ce cadre, son contrat de travail français a été transféré de C______/E______ (FRANCE) à C______.

Par contrat à durée indéterminée du 24 août 2016 (ci-après : le « contrat de travail suisse »), A______ a été engagée en tant que Compliance Officer - Financial Security CIB au sein de C______/E______ (SUISSE) à compter du 1er octobre 2016. La date du début des relations contractuelles a cependant été repoussée au 1er novembre 2016, par avenant au contrat de travail suisse du 15 septembre 2016, signé le 31 octobre 2016 par A______. Le contrat précisait notamment qu'en raison de la mobilité interne depuis la France dont bénéficiait A______, elle était exemptée de toute période d'essai en Suisse.

Le 1er janvier 2018, elle a été promue Head of Compliance de C______/E______ (SUISSE) et, en décembre 2018, en tant que membre de la direction.

Son salaire annuel brut s'élevait à 130'000 fr., payable en treize mensualités de 10'000 fr., qui ont par la suite été portées à 11'450 fr.

f. Le 23 septembre 2016, C______ a fait parvenir à A______ un courrier (ci-après : la « lettre de confort »), contresigné par A______ le 18 octobre 2016. La lettre de confort se référait à la mobilité de A______ à Zurich et avait comme objectif de « décrire les conséquences de ce transfert de contrat sur [le contrat de travail français] ».

Sous la section « SUSPENSION DU CONTRAT », la lettre de confort précisait qu'à compter du 1er novembre 2016 et durant la durée du contrat de travail suisse, le contrat de travail français serait suspendu, ce qui aurait comme conséquence que A______ n'exécuterait plus aucune fonction pour le compte de C______.
La durée prévisionnelle de la suspension du contrat était d'environ 3 ans, étant précisé que cette durée n'était mentionnée qu'à titre indicatif, mais qu'elle ne pouvait être prolongée au-delà de 5 ans.

Sous la section « FIN DE LA MISSON POUR [C______ (SUISSE)] », il était précisé qu’« à la date à laquelle [le contrat de travail suisse] prendra[it] fin, la période de suspension [du contrat de travail français] prendra[it] fin également ». C______ s'engageait alors à réaffecter A______ en son sein et à lui proposer, dans la mesure des postes disponibles, une réintégration en France dans son entité d'origine, ou le cas échéant une autre entité de C______ en France, dans un poste aussi comparable que possible à celui qu'elle occupait au sein de C______ et en tenant compte de sa classification et de son expérience.

g. C______ (SUISSE) allègue qu'il existait un accord entre C______ (SUISSE) et C______/E______ (SUISSE) pour couvrir les prestations effectuées par les employés de C______ (SUISSE) au bénéfice de C______/E______ (SUISSE).

Entendue comme témoin devant le Tribunal à ce sujet, F______, employée de C______ (SUISSE) depuis 1995 et ancienne responsable des ressources humaines, a expliqué que le salaire et les charges de A______ étaient payés par C______ (SUISSE), puis refacturés à C______/E______ (SUISSE).

h. Il ressort ce qui suit des échanges entre les parties ayant précédé la signature du contrat de travail suisse ainsi que de la lettre de confort:

h.a Par courriel du 27 juillet 2016, dont A______ a été mise en copie, une collaboratrice de C______ (SUISSE) a confirmé à F______ l'engagement de A______ auprès de C______ (SUISSE). La collaboratrice précisait qu'il était nécessaire d'établir un contrat de travail suisse pour A______, en raison des contraintes administratives imposées par le canton de Zurich, ainsi qu'une lettre de confort.

Par courriel du 29 juillet 2016, F______ a sollicité auprès de différents collaborateurs que le nécessaire soit fait afin que A______ puisse recevoir une lettre de confort lui permettant un possible retour au sein de son entité d'origine ou une future mobilité, dans la mesure où les autorités zurichoises ne permettaient pas la mise en œuvre d'un contrat d'expatriation standard. Il était ainsi nécessaire d'établir d'une part, un contrat de travail suisse, et d'autre part, que C______ s'engage à réintégrer A______ à terme, dans l'éventualité d'une nouvelle affectation à l'international. A ce courriel était jointe une pièce intitulée «Exception Request Form», laquelle précisait que A______ serait détachée à Zurich pour une période de trois ans ("Assignment Length 3 years") et qu'il n'avait pas été possible d'obtenir l'accord des autorités suisses.

Par courriel du 1er août 2016, un collaborateur de C______ , s'exprimant au sujet de la mobilité de A______, a précisé qu'il était nécessaire de déroger à la pratique habituelle du groupe relative aux mobilités internationales en suspendant le contrat de travail français de A______. La mobilité dont celle-ci bénéficierait ne s'inscrivait ainsi ni dans le cadre d'une mobilité « local to local » (impliquant une démission de sa part), ni d'une expatriation (impliquant le maintien du contrat de travail français et aucun contrat local). Ce même collaborateur a confirmé, par courriel du 2 août 2016 adressé notamment à F______, la validation de la demande d'exception afin de suspendre le contrat de travail français de A______ (de sorte que celle-ci ne devrait pas démissionner de son contrat de travail français) et l'établissement d'un contrat de travail suisse.

h.b Par courriel du 16 août 2016, F______ a transmis à A______, en se référant à un entretien téléphonique ayant eu lieu entre celles-ci, le contrat de travail suisse.

h.c Par courriel du 25 août 2016, A______, se référant à une conversation téléphonique ayant eu lieu avec une collaboratrice de C______, a sollicité que la lettre de confort lui soit remise, en lien avec sa mobilité à Zurich. Elle a également demandé si la suspension de son contrat de travail français avait comme conséquence la suspension de son affiliation à la sécurité sociale française.

Par retour de courriel du 26 août 2016, la collaboratrice a précisé à A______ que la suspension de son contrat de travail français avait les mêmes conséquences que les congés sabbatiques, de sorte que son affiliation à la sécurité sociale française n'était pas maintenue.

i. Par courriel du 1er novembre 2019 adressé aux ressources humaines de C______ (SUISSE), intitulé « lettre de détachement, reconduction tacite », A______ a sollicité la confirmation du renouvellement tacite de la suspension de son contrat de travail français durant les deux années suivantes.

Par courriel du 18 novembre 2019, F______ s'est déclarée favorable à la prolongation sollicitée, en rappelant que les autorités zurichoises n'acceptaient pas les contrats d'expatriation classiques de C______, raison pour laquelle un contrat de travail suisse avait été signé « en combinaison » avec la lettre de confort. En réponse à son courriel, G______, membre des ressources humaines de C______, a demandé la confirmation de ce que A______ resterait encore deux années supplémentaires en Suisse. F______ a alors demandé à H______, ancien responsable de la sécurité financière de C______ (SUISSE) à Genève et supérieur hiérarchique de A______, actuellement responsable compliance pour la succursale londonienne de C______, de confirmer que A______ resterait
« encore pour [deux] ans en Suisse », en précisant que dans le cadre d'une future mobilité en amont de ces deux années, la lettre de confort prendrait fin et que A______ bénéficierait, par exemple, d'une nouvelle expatriation sur la base de son contrat de travail français ou d'un retour en France. Ces courriels ont été transférés par H______ à A______ le jour-même.

Par courriel du 19 novembre 2019, H______, se référant à une conversation ayant eu lieu avec A______ à ce sujet, a précisé qu'il n'avait pas d'objection pour étendre le « mandat » de celle-ci pour une durée de deux ans.

j. Le 20 novembre 2019, A______ a sollicité auprès des ressources humaines de C______ la confirmation de ce qu'elle continuerait à percevoir une participation aux résultats de C______ en se référant à la suspension de son contrat de travail français. Par courriel du 16 décembre 2019, elle a confirmé être « détachée de [C______] auprès de [C______ (SUISSE)], et non détachée de C______/E______ [France] », en précisant que sa « démission de C______/E______ [France] était […] une condition pour pouvoir entrer dans les effectifs de [C______], avant [son] détachement en Suisse ».

k. Il ressort ce qui suit de l'interrogatoire des parties et des déclarations des témoins par-devant le Tribunal concernant le processus d'établissement des contrats précités:

k.a A______ a déclaré qu'avant sa mobilité, C______ lui avait proposé de signer un contrat d'expatriation standard. Elle avait par la suite été informée par les ressources humaines de C______ (SUISSE) qu'il n'était pas possible de procéder de la sorte en raison des règles en vigueur dans le canton de Zurich. Elle n'avait pas pu réfléchir aux conséquences de la signature de son contrat de travail suisse, qui était un contrat de travail local. Elle n’avait été informée qu’au moment de la signature de son contrat de travail suisse que son contrat de travail français serait suspendu, sans que cela ne signifie selon elle que sa mobilité ait été limitée à trois, respectivement cinq ans. Selon elle, la lette de confort avait comme objectif de conserver le lien avec C______ et de lui permettre, si elle le souhaitait, de retourner dans son entité d'origine, soit C______/E______ (FRANCE). Elle n'avait pas compris que son poste consistait en une mission temporaire; il s'agissait pour elle d'une position pérenne. Elle a soutenu que la lettre de confort ne définissait pas la durée d'une mission, mais uniquement la durée de la suspension du contrat de travail français. Elle n'avait pas réfléchi au contenu de la lettre de confort, dans la mesure où elle avait signé le contrat de travail suisse de durée indéterminée. Les discussions intervenues en 2019 ne concernaient que la prolongation de son contrat de travail français, dans la mesure où elle ignorait ce qu'elle allait faire après son poste à Zurich. Elle ne se rappelait pas pourquoi elle avait sollicité le renouvellement de sa lettre de confort auprès des ressources humaines de C______ (SUISSE) et non pas de C______.

Les représentantes de C______ (SUISSE) ont précisé qu'elles n'avaient pas été personnellement impliquées dans les discussions ayant eu lieu en 2016. C______ (SUISSE) a expliqué qu'il existait, au sein du groupe C______, une politique de mobilité appelée la « politique d'expatriation ». Il s'agissait de détacher, pour une durée limitée, un collaborateur d'une entité du groupe vers une autre entité à l'étranger, ce qui lui permettrait de garder le lien avec son entité d'origine. Il existait aussi une autre possibilité appelée « local to local »: dans ce cas, le collaborateur démissionnait de l'entité dans laquelle il travaillait et était engagé dans l'entité d'accueil à l'étranger. Concernant A______, il avait été question dès le début d'un contrat d'expatriation, et non pas de la variante « local to local ». Selon C______ (SUISSE), A______ avait conscience des conditions d'expatriation au moment de la signature de la lettre de confort. C______ (SUISSE) ignorait si la procédure résumant la politique d'expatriation avait été remise à A______, étant précisé qu'elle se situait sur l'intranet du groupe. Il n'était pas possible, pour des raisons de politique interne, de faire signer à A______ un contrat à durée déterminée en Suisse pour plus d'une année. C______ (SUISSE) avait conscience qu'il s'agissait d'une mission limitée à laquelle il convenait de mettre fin, de sorte que le contrat de travail suisse pouvait facilement être résilié à la fin des trois ans ou des cinq ans de suspension du contrat de travail français. C______ (SUISSE) a affirmé avoir souvent répété à A______ que son affectation prendrait fin à l’issue de sa mission en Suisse. En cas de détachement, les employés continuaient à recevoir des intéressements et participations de l'entité qui les avait détachés, ce qui n'était pas le cas de A______.

k.b C______ (SUISSE), H______ et F______ ont confirmé qu'il n'était pas possible, en raison des contraintes administratives du canton de Zurich, de faire bénéficier A______ d'une expatriation standard, raison pour laquelle une procédure d'exception avait été mise en place. I______, ancien directeur des ressources humaines de C______ (SUISSE) du 1er septembre 2017 au 31 août 2023 et depuis responsable mondial du respect du code de conduite/des personnes au sein du département des ressources humaines de C______, a quant à lui expliqué qu'un contrat d'expatriation aurait été trop coûteux à mettre en place en raison de la législation zurichoise. Il a toutefois précisé que postérieurement au départ de A______, la législation zurichoise avait changé, de sorte qu'il était possible d'établir de véritables contrats d'expatriation pour les employés en mobilité. Sans la mise en œuvre de la procédure d’exception, A______ n’aurait pas pu bénéficier de la mobilité.

C______ (SUISSE), I______, H______ et F______ ont expliqué que la lettre de confort suspendait le contrat de travail français afin de conserver la possibilité pour A______ de retrouver un poste à Paris ou ailleurs au sein de C______. Selon eux, le contrat de travail français pouvait être suspendu pendant cinq ans au maximum, avec comme conséquence l'expiration du contrat de travail suisse à la fin de la suspension du contrat de travail français, de sorte que le contrat de travail français prendrait de nouveau effet à ce moment. I______ a précisé que le contrat de travail suisse était lié à la lettre de confort, l'un n'allant pas sans l'autre.

F______ a déclaré que A______ avait été déçue de ne pas avoir de contrat d'expatriation et n'envisageait pas un contrat
« local to local » sans lettre de confort, car elle souhaitait garder un lien avec la France ou pouvoir aller ailleurs à l'étranger. En 2016, A______ n'avait pas comme objectif de rester en Suisse; il s'agissait d'une étape dans sa carrière professionnelle. C'était A______ qui avait entamé les discussions en 2019 pour prolonger sa lettre de confort; il était possible qu'elle ait informé A______ que sa lettre de confort arrivait à échéance.

En lien avec le courriel du 19 novembre 2019, H______ a confirmé avoir eu une discussion avec A______ au sujet de la prolongation de sa lettre de confort et de sa mission en Suisse. D'après ses souvenirs, les ressources humaines avaient prolongé la lettre de confort de A______ avec son accord.

Des candidatures de A______

l. En septembre 2020, H______ a transmis, avec l'accord de A______, le courriel suivant à G______ :

« Dans le prolongement de nos échanges concernant le succession plan, et comme convenu, je me suis entretenu avec A______ de ses aspirations quant à son évolution. A______ m'a confirmé son souhait de mobilité, idéalement dans le courant de l'année prochaine. Sa priorité serait de pouvoir capitaliser sur son expérience de manager senior au sein de la Fonction […] en élargissant son périmètre d'action et en accroissant le nombre de personne sous sa responsabilité. Ce choix m'apparaît pertinent et […] je considère que A______ en est largement capable. En matière géographique, […] A______ est assez ouverte et se positionnera à l'aune de la qualité des opportunités potentielles proposées. [A noter qu'] A______ n'exclut pas de rester en Suisse en fonction d'éventuelles opportunités locales [lesquelles sont] toutefois assez contraintes en raison du contexte particulier ».

Devant le Tribunal, A______ a expliqué avoir été informée par H______, à la suite d'un entretien d'évaluation, qu'elle pourrait élargir ses responsabilités dans un avenir proche. La question de « l'après » devenait récurrente, il s'agissait de son évolution professionnelle. Elle avait expliqué à H______ qu'elle était prête à évoluer au sein de C______ et qu'elle était ouverte à d'autres postes, dans la mesure où elle n'avait pas prévu de rester indéfiniment à son poste actuel.

H______ a expliqué avoir eu plusieurs discussions avec A______ sur la fin de sa mission en Suisse, notamment dans le cadre du programme de mobilité; elle lui avait alors fait part de sa volonté de changer de fonction et de trouver des nouvelles opportunités professionnelles. Il avait discuté avec elle de son évolution, l'idée étant d'augmenter ses responsabilités au sein du groupe. Il avait envoyé le courriel de septembre 2020 à G______ afin d'aider A______ dans ses démarches pour trouver un poste. Les opportunités d'emploi locales étaient rares en Suisse, le temps étant plutôt à la diminution de l'activité commerciale, raison pour laquelle il s'était référé au « contexte particulier ».

m. Le 19 janvier 2021, A______ a transmis sa candidature pour le poste de Head of Company Engagement au sein de C______ (SUISSE). Sa candidature n'a toutefois pas été retenue.

Entendue devant le Tribunal, elle a expliqué que ce poste constituait une bonne opportunité pour elle d'élargir son périmètre d'activité.

F______ a déclaré que A______ avait exclu l'hypothèse d'une évolution professionnelle à l'étranger, qu'elle ne souhaitait pas retourner à Paris et qu'elle voulait rester en Suisse. Elle ne souhaitait pas un poste du même niveau dans une autre fonction, mais évoluer dans une fonction supérieure et avoir un impact sur la stratégie de C______ (SUISSE).

Selon J______, directeur de C______/E______ (SUISSE), A______ avait l'impression d'avoir réalisé ce qu'elle devait au niveau de la structure compliance de C______/E______ (SUISSE). Sa mission avait consisté en la mise en place et en l'amélioration de la structure compliance de C______/E______ (SUISSE). Il avait appris indirectement qu'elle cherchait d'autres opportunités, sans qu'elle ne l'en informe directement et ne connaissait pas les détails de ses candidatures. Il ignorait si A______ avait connaissance que son temps de travail en Suisse était limité et ne connaissait pas ses conditions contractuelles, dans la mesure où il n'était pas son responsable hiérarchique.

n. Au mois de mai 2021, A______ a activé l'outil de mobilité de C______. Dans ce cadre, elle a contacté, en septembre 2021, K______, directrice générale de C______ (SUISSE), qui l'a redirigée vers les ressources humaines de Zurich. Elle n'a par ailleurs pas été retenue pour une mobilité en Irlande.

Devant le Tribunal, elle a expliqué avoir été mise en relation avec des responsables de C______ pour l'Irlande par l'intermédiaire de sa supérieure hiérarchique en France, dans la mesure où elle avait un double rattachement.

Selon I______, A______ s'était adressée à K______ afin de trouver une possibilité pour rester en Suisse, dans la mesure où la suspension de son contrat de travail français arrivait à son terme prochainement et qu'elle devrait retourner à Paris.

De la fin des relations contractuelle entre les parties

o. Le 11 août 2021, un entretien de carrière a eu lieu entre F______ et A______, durant lequel celle-ci a expliqué être arrivée au bout de sa fonction, n'avoir plus de motivation ni de stimulation, et exprimé le souhait d'occuper un autre poste dans trois mois, tout en précisant qu'elle souhaitait rester à Zurich pour des raisons personnelles.

p. Le 13 août 2021, A______ a eu un entretien avec G______, durant lequel A______ a partagé son souhait de ne pas retourner en France à l'issue de sa mission en Suisse.

q. A______ a bénéficié d'un congé sans solde du 6 au 30 septembre 2021. Durant cette période, elle a été remplacée ad interim par L______.

r.a Par courrier du 24 septembre 2021 (ci-après : le « courrier du 24 septembre 2021 ») intitulé « FIN D'AFFECTATION », C______ a informé A______ de la fin de son affectation en Suisse pour le 31 octobre 2021, et lui a notifié son rapatriement à compter du 1er novembre 2021.

A______ a accusé réception de ce courrier et de son contenu par courriel du 6 octobre 2021 adressé à G______. Elle a confirmé son souhait de poursuivre sa carrière au sein de C______ (SUISSE), conformément aux discussions intervenues en août 2021, et a précisé que de futures discussions devaient avoir lieu à ce sujet avec F______.

Un entretien a eu lieu le même jour avec F______, durant lequel A______ a réitéré son souhait de poursuivre sa carrière au sein de C______ (SUISSE) et de ne pas retourner en France. Elle a prié F______ de la maintenir informée des opportunités d’emploi potentielles à Zurich.

r.b F______ a informé le 7 octobre 2021 A______ qu'un poste de RISK ORM (Operational Risk Manager) s'ouvrait à Zurich et l’a priée de l'informer rapidement si ce poste devait l’intéresser. A______ a décliné cette proposition.

Entendue devant le Tribunal, A______ a déclaré que ce poste se situait dans la catégorie C, d’après les informations transmises par F______, soit une catégorie inférieure que le poste qu'elle occupait de catégorie D, mais qu'elle pourrait éventuellement conserver sa rémunération. Pour A______, cet élément n'était cependant pas certain. Elle avait refusé le poste en raison de la manière dont il lui avait été présenté (incertitude sur la conservation ou non de la rémunération, poste éventuellement déjà repourvu).

C______ (SUISSE) a affirmé que le poste en question se situait également en catégorie D, soit le même niveau que A______, tout en précisant que la question de la rémunération d'un poste était une question qui était évoquée après un ou deux entretiens. Il était ainsi inhabituel que la question de la rémunération ait été abordée avec A______ en amont.

F______ a confirmé que le poste se trouvait en catégorie D, tout en précisant que les salaires n'étaient pas nécessairement identiques au sein des mêmes catégories. Elle avait informé A______ que son salaire ne diminuerait pas si elle postulait à ce poste, sans pouvoir lui promettre une augmentation de salaire. A______ avait cependant décliné la proposition, au motif qu'elle cherchait une fonction au bénéfice d'un lien hiérarchique direct vers le comité exécutif. La personne occupant actuellement ce poste se trouvait dans la catégorie D.

r.c Deux nouveaux entretiens ont eu lieu entre F______ et A______ les 11 et 13 octobre 2021. D'autres réunions ont eu lieu entre le 14 et le 24 octobre 2021.

Par courriel du 15 octobre 2021 adressé à F______, A______, se référant à une réunion ayant eu lieu la même semaine, a expliqué qu'elle ne comprenait pas les raisons pour lesquelles il lui avait été demandé de démissionner de son poste. Elle a précisé que son contrat de travail suisse était de durée indéterminée. Si elle avait activé l'outil mobilité du groupe, il n'avait cependant pas été question qu'elle démissionne de son poste actuel au 1er novembre 2021. Son contrat de travail suisse n'était pas limité ou subordonné à d'autres arrangements parallèles avec C______ . Si C______ (SUISSE) ne souhaitait pas poursuivre la collaboration, il lui appartenait de mettre fin aux relations de travail découlant du contrat de travail suisse.

r.d Lors d'une réunion du 25 octobre 2021, F______ a transmis à A______ une proposition de convention selon laquelle C______ (SUISSE) mettait fin à son contrat de travail suisse avec effet au 28 février 2022, dans la mesure où son affectation en Suisse avait pris fin, de sorte qu'elle était réintégrée au sein des effectifs de C______ . Le courrier faisait notamment référence à la « mission » à Zurich de A______ et à sa volonté de poursuivre sa carrière au sein de C______ (SUISSE), tout en précisant que C______ (SUISSE) ne disposait d'aucun poste correspondant à ses attentes à lui proposer. C______ (SUISSE) prenait acte du refus de A______ de rejoindre C______ dans le cadre de son contrat de travail français et l'enjoignait à effectuer les démarches nécessaires afin de finaliser la fin de ses rapports de travail auprès de cette entité afin de bénéficier du préavis contractuel du contrat de travail suisse. C______ (SUISSE) s'engageait par ailleurs à verser 22'500 fr. bruts au titre d'indemnité à bien plaire, à la condition que son préavis ne soit pas suspendu ou reporté.

Par courriel du 26 octobre 2021, A______ a sollicité un délai afin de prendre connaissance de la convention précitée et précisé qu’elle se sentait sous « pression », alors qu'elle n'avait pas pu discuter du contenu de la convention. Elle a réitéré que son contrat de travail suisse était de durée indéterminée, de sorte qu'elle ne comprenait pas les raisons pour lesquelles il lui était demandé de démissionner.

A______ n'a pas donné suite à la proposition d'accord précitée.

r.e A______ s'est retrouvée en incapacité totale de travailler du 27 octobre 2021 au 30 novembre 2021.

r.f Par courrier remis en mains propres le 1er décembre 2021 (ci-après :
le « courrier de licenciement »), C______ (SUISSE) a licencié A______ avec effet au 30 avril 2022. Le courrier de licenciement précisait notamment ce qui suit : « [Le terme du contrat de travail suisse] correspond […] au terme de votre affectation, et, partant, de votre mission en Suisse ». A______ a été immédiatement libérée de son obligation de travailler.

s. Trois certificats de travail ont été remis à A______ les 8 mars 2022,
30 avril 2022 et 7 mars 2023.

t. Le 12 septembre 2022, C______ a licencié A______ pour faute grave, dans la mesure où celle-ci ne s’était pas présentée à son poste de travail depuis le 2 mai 2022 et alors que son contrat de travail suisse avait pris fin et que la suspension de son contrat de travail français était arrivée à échéance.

u. A compter du 8 novembre 2021, les tâches du cahier des charges de A______ ont été ajoutées à celles de L______.

Le 16 novembre 2021, L______ a été nommé comme nouveau chef de « C______/E______ COMPLIANCE », en remplacement de A______. Il a continué à exercer en parallèle sa fonction de « KYC CIB & WM » à C______/E______ (SUISSE) .

v. Il ressort ce qui suit de l'interrogatoire des parties et des déclarations des témoins devant le Tribunal concernant la fin des rapports de travail entre les parties:

v.a A______ a déclaré avoir eu quatre réunions avec F______ au sujet de sa situation, entrecoupées d'échanges de courriels avec celle-ci. F______ lui aurait expliqué qu'elle devait quitter son poste, que son poste était supprimé et qu'elle devait démissionner, ce qui l'avait surprise, car elle n’en comprenait pas les raisons. Elle avait entamé des discussions avec F______ pour sortir de cette situation et trouver un accord pour la séparation des parties. Elle n'avait toutefois pas participé à l'élaboration du projet de convention du 25 octobre 2021 et F______ lui aurait dit que si elle ne signait pas la convention, elle serait licenciée.

C______ (SUISSE) a expliqué avoir été informée à partir de 2020, soit peu après le renouvellement de la mission en Suisse pour deux ans supplémentaires, de la volonté de A______ de trouver un autre poste au sein du groupe, la destination demeurant ouverte. Il était clair pour C______ (SUISSE) que A______ devait retourner en France à l'issue de sa mission, tout comme il était clair qu'elle ne souhaitait pas poursuivre dans sa fonction de Head of Compliance C______/E______ (SUISSE) , raison pour laquelle il fallait chercher son remplaçant.

v.b F______ a déclaré avoir eu avec A______ des discussions sur les conséquences de la fin de la lettre de confort dès l'établissement de celle-ci en 2016, lors de son renouvellement en 2019, et à plusieurs reprises en 2021, puis de manière fixe ou spontanée dans le cadre des recherches effectuées par A______ pour sa mobilité. Elle avait informé A______ que celle-ci devait démissionner de C______ si elle souhaitait rester en Suisse et avait eu plusieurs entretiens les mois de septembre et octobre 2021 à ce sujet avec cette dernière. Il était obligatoire de démissionner après les trois ou cinq années de suspension afin que C______ puisse notamment établir des décomptes de participation. Il était possible de démissionner du poste à Paris et de poursuivre son travail en Suisse si toutes les parties étaient d'accord sur ce point. A______ avait la possibilité de retrouver un poste au département compliance en France, à défaut de quoi elle devait démissionner de C______ .

I______ a expliqué que A______ aurait dû démissionner de son poste auprès de C______ si elle ne souhaitait pas y retourner, à défaut de quoi elle serait licenciée par C______ .

H______ a confirmé avoir discuté, courant 2021, avec A______ de ce qu'elle devrait retourner à Paris si elle ne trouvait pas de poste en Suisse.

De la restructuration de C______ (SUISSE)

w. Le 28 novembre 2019, C______ (SUISSE) a décidé de mettre en place une procédure de licenciement collectif. Un plan social (ci-après : le « plan social ») est entré en vigueur à cet égard à compter du 30 janvier 2020 jusqu'au 30 janvier 2022.

L'article 2 du plan social prévoyait qu'il était applicable à tous les collaborateurs de C______ (SUISSE) employés sur les sites de Genève, Bâle, Lugano et Zurich au bénéfice d'un contrat de travail de durée indéterminée avec C______ (SUISSE) et dont les rapports de travail feraient l'objet d'une résiliation pour motifs économiques dans le cadre de la restructuration à la suite d'une annonce préalable avant la date de fin du plan social. L'article 2.3 précisait notamment que le plan social ne s'appliquait pas aux rapports de travail qui prendraient automatiquement fin à l'expiration de la durée initialement convenue pendant la durée de validité du plan social, sans que C______ (SUISSE) ne les résilie (contrat de durée déterminée ou contrat de durée maximale).

L'article 4.1, relatif au programme d'aide à la formation, précisait que les collaborateurs éligibles pouvaient bénéficier d'une aide à la formation pour un montant total maximum de 20'000 fr.

L'article 5, relatif à l'indemnité pour collaborateurs éligibles de moins de 58 ans, prévoyait une indemnité de départ correspondant à un multiple, déterminé en fonction de l'âge et de l'ancienneté de chaque collaborateur, du salaire déterminant brut.

w.a Lors d'une réunion « O______ conformité » du 19 octobre 2021, à laquelle A______ a participé, C______ (SUISSE) a annoncé la suppression de trois postes dans ses bureaux situés à Genève. En parallèle, il a été précisé que le plan de développement de la banque se situait à Zurich et que dans ce contexte, un poste serait ouvert dès le 20 octobre 2021, de sorte que les personnes intéressées étaient invitées à déposer leur candidature.

w.b A______ a saisi la commission paritaire du plan social au mois de décembre 2021. Par courriel du 8 décembre 2021 adressé à différents collaborateurs de C______ (SUISSE), M______, membre de l'association [des employés de banque] N______, a soutenu que le plan social était applicable à A______, ce que I______ a contesté. Il a rappelé que la mission en Suisse de A______ avait pris fin et qu'elle avait exprimé à plusieurs reprises le souhait de quitter le poste qu'elle occupait.

w.c A______ a produit plusieurs organigrammes de C______ (SUISSE) et allègue que ceux-ci reflèteraient la diminution du personnel intervenue dans son groupe, passant de 16 à 14 employés, ce que C______ (SUISSE) conteste. Celle-ci soutient que les organigrammes ne seraient pas complets, dans la mesure où ils mentionnent uniquement les postes à responsabilités, sans le détail complet des équipes.

Devant le Tribunal, A______ a expliqué que le département compliance comportait plus de collaborateurs que ceux présents sur les organigrammes, mais qu'elle ignorait combien, les collaborateurs non mentionnés occupant des fonctions hiérarchiquement inférieures à la sienne.

w.d A______ allègue avoir été licenciée pour des motifs économiques, de sorte qu'elle aurait dû bénéficier du plan social. Elle soutient que ses fonctions auraient été intégrées au poste de L______ – qui exerçait ainsi deux fonctions différentes – de sorte que son poste aurait été en réalité supprimé. Se référant à une annonce d'emploi sur le réseau social LinkedIn, elle allègue que C______ (SUISSE) aurait eu la volonté d'engager un nouveau collaborateur d'un niveau « junior », afin d'épauler L______, dans la mesure où celui-ci devait réaliser les tâches de deux cahiers des charges différents. Elle soutient également qu’elle aurait dû bénéficier de la somme nette de 20'000 fr. à titre de frais de formation afin de trouver un nouvel emploi, étant précisé qu'elle avait déjà dépensé 8'701 fr. 90 à ce titre.

Entendue devant le Tribunal, C______ (SUISSE) a rappelé que bien que A______ ait signé un contrat de travail avec celle-ci, elle travaillait en réalité au sein de C______/E______ (SUISSE) . C______/E______ (SUISSE) , qui était une succursale de C______ , n'était cependant pas concernée par le plan social de C______ (SUISSE). Plus généralement, les employés en mission d'expatriation n'étaient pas concernés par le plan social, dans la mesure où ils bénéficiaient d'un autre poste, comme A______. Un poste était supprimé lorsque le titulaire du poste recevait une notification à ce sujet, ce qui n'était pas le cas du poste de A______, celle-ci ayant simplement été remplacée par L______. Le motif de licenciement de A______ était la fin de sa mission, et non pas la restructuration de C______ (SUISSE).

w.e F______ et I______ ont affirmé que C______/E______ (SUISSE) n'était pas concernée par le plan social.

F______ a expliqué qu'elle avait procédé aux licenciements des employés concernés par le plan social à Zurich et à Bâle, étant précisé qu'environ cinq personnes avaient été concernées à Zurich, A______ n'en faisant pas partie. Aucune personne en expatriation ou au bénéfice d'une lettre de confort n'avait bénéficié du plan social. C______/E______ (SUISSE) se trouvait en pleine croissance, passant d'environ 55 et 60 employés au moment de l'arrivée de A______ à 72 employés à son départ.

I______ a déclaré qu'aucun poste à Zurich n'avait été impacté par le licenciement collectif, mais uniquement les postes de C______ (SUISSE) à Genève.

H______ a déclaré qu'il avait procédé à la sélection de L______, lequel avait ajouté à sa fonction les responsabilités de A______. Ce choix était intervenu dans le contexte de la demande de changement de poste de A______ et de la fin de sa lettre de confort.

De la rémunération variable

x. Selon l'article 2701 du statut du personnel de C______ (SUISSE) (ci-après : le « statut du personnel »), la rémunération des collaborateurs était constituée d'une rémunération fixe et d'une rémunération variable. Selon l'art. 2706, intitulé « rémunération variable (bonus) », le bonus ne constituait pas un droit et n'était ni contractuel ni garanti, mais fixé discrétionnairement, en application de la politique de C______ . Il s'agissait d'une gratification au sens de l'art. 322d CO et la direction générale appréciait librement, chaque année et pour chaque employé, si l'octroi d'un bonus se justifiait. Le paiement d'un bonus pour une année donnée, voire durant plusieurs années, ne conférait aucun droit pour l'avenir, chaque paiement étant opéré de manière discrétionnaire, sans que cela ait pour effet de « contractualiser » le bonus (qu'il s'agisse de son principe ou de son montant). Il n'existait par ailleurs aucun droit à un paiement prorata temporis. Un collaborateur dont la résiliation des rapports de travail était notifiée avant la date de versement des bonus, que celui-ci ait fait l'objet d'une annonce ou non et quelle que soit la partie qui avait donné le congé et son motif, ne pouvait en aucun cas prétendre à recevoir un bonus, tant pour l'exercice écoulé que pour l'année en cours.

x.a La part de rémunération variable perçue par A______ s'est élevée à 1'298 fr. en 2017, 18'000 fr. en 2018 et 30'000 fr. versés de 2019 à 2021. Ces montants étaient versés au mois de mars de chaque année. Il était précisé sur chaque bulletin de paie ce qui suit : « Part variable ni garantie, ni contractuelle. Sans engagement de la banque pour le futur ».

x.b Entendue devant le Tribunal, C______ (SUISSE) a expliqué qu'elle n'utilisait pas de formules spécifiques pour calculer les bonus, ceux-ci étant discrétionnaires et dépendant d'éléments d'évaluation subjectifs et objectifs, à savoir les performances annuelles, les objectifs fixés et le comportement.

D. a. Par demande déposée en conciliation le 13 janvier 2023, déclarée non conciliée le 13 mars 2023 et introduite devant le Tribunal le 27 juin 2023, A______ a conclu, avec suite de frais judiciaires et dépens, à ce que C______ (SUISSE) soit condamnée à lui verser 34'698 fr.01 fr. nets avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2022 ainsi que 180'785 fr. 95 bruts avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juin 2023.

Dans le corps de son acte, elle a précisé que le montant de 180'785 fr. 95 se subdivisait en 143'997 fr. 25, à titre d'indemnité découlant de l'article 5 du plan social, qui auraient dû lui être versés à compter du 1er juillet 2022, 30'000 fr. au titre de rémunération variable et 6'788 fr. 70 de prime d'attribution découlant du plan « Group Sustainability and Incentive Scheme », ce montant portant intérêts à 5% l'an à compter du 1er juin 2023.

La conclusion en paiement de 34'698 fr. 01 nets comprenait 20'000 fr. à titre de frais de formation découlant du plan social, 5'000 fr. à titre d'indemnité pour tort moral et 9'698 fr. 01 à titre d'honoraires d'avocats avant procès. Dans ses considérants, A______ a fait partir le point de départ des intérêts à compter de la fin des rapports de travail, soit le 1er mai 2022.

A______ a notamment soutenu que C______ (SUISSE) avait confirmé la durée indéterminée des rapports de travail liant les parties par attestations des 25 mai 2021 et 5 octobre 2021 (pièce 43 app.). Ces attestations – établies à la demande de A______ et visant, pour l'attestation du 25 mai 2021, à soutenir A______ dans ses recherches de logement – précisaient que A______ était au bénéfice d'un contrat à durée indéterminée et non résilié depuis le 1er novembre 2016 auprès de C______ (SUISSE).

b. Dans sa réponse du 13 novembre 2023, C______ (SUISSE) a conclu, sur les points encore litigieux à ce stade, au déboutement de A______ de toutes ses conclusions.

Dans le corps de son acte, elle a notamment soutenu que la durée maximale de la mission à Zurich de A______ était de cinq ans, conformément aux indications découlant de la lettre de confort et aux nombreux rappels de C______ (SUISSE) à ce sujet. Si A______ ne souhaitait pas retourner en France à l'issue de sa mission, il lui appartenait de trouver une nouvelle mobilité en accord avec C______ .

c. Le 1er mars 2024, A______ a déposé des déterminations sur la réponse de C______ (SUISSE) et a formé des allégués complémentaires, accompagnés de pièces nouvelles.

Elle a notamment produit une pièce de laquelle il ressort qu'elle avait, en juillet 2020, été admise sur la liste des candidats pour l'élection du personnel de C______ (SUISSE), les conditions d'éligibilité précisant que seuls les collaborateurs au bénéfice d'un contrat à durée indéterminée pouvaient se porter candidat et voter (pièces 53 et 54 app.).

d. Le 9 avril 2024, C______ (SUISSE) s'est déterminée sur les allégués complémentaires de A______ et a formé de nouvelles allégations accompagnées de pièces nouvelles. Dans son chapitre IV, C______ (SUISSE) s'est déterminée sur les déterminations du 1er mars 2024 de A______.

e. Le 23 avril 2024, A______ s'est déterminée sur les allégués nouvellement formulés par C______ (SUISSE) le 9 avril 2024.

f. Les parties et les témoins, dont les déclarations ont été reproduites dans la mesure utile, supra, ont été entendus aux audiences des 28 mai, 15 juillet, 27 août et 3 septembre 2024, à l'issue de quoi les parties ont plaidé, persistant dans leurs conclusions, et ont été informées par le Tribunal de ce que la cause était gardée à juger.

E. Dans son jugement, le Tribunal a tout d'abord déclaré irrecevables les déterminations effectuées sous le chapitre IV de l'écriture déposée le 9 avril 2024 par C______ (SUISSE).

Le Tribunal a considéré que A______ était parfaitement informée de la durée limitée à maximum cinq ans de sa mobilité en Suisse, nonobstant le libellé de son contrat de travail suisse à durée « indéterminée », et de ce qu'elle devrait à terme retourner en France ou bénéficier d'une nouvelle mobilité en accord avec C______ . Ceci était corroboré par les témoignages des différents témoins, lesquels avaient tous confirmé que la lettre de confort avait été associée à la conclusion du contrat de travail suisse de A______, afin qu'elle ait la possibilité de retourner travailler à Paris au terme de la durée maximale de cinq ans en Suisse. Le fait qu'elle ait cherché un nouveau poste dès la fin de l'année 2020 tendait également à démontrer qu'elle avait conscience que son détachement se terminerait à la fin de l'année 2021, ce qui était confirmé par les témoins I______ et H______.

A______ avait par ailleurs échoué à apporter la preuve que son licenciement aurait eu lieu pour des motifs économiques. L'annonce du 19 octobre 2021 du
« O______ Conformité » ne mentionnait que la suppression de trois postes à Genève, et non pas à Zurich, où se trouvait au contraire le plan de développement de C______ (SUISSE). D'après le témoignage de J______, le poste de A______ avait évolué avec les structures compliance mises en place par la prénommée. Dès lors, le fait que L______ occupe à présent deux fonctions simultanément ne signifiait pas que le poste de A______ avait été supprimé. L'argument du licenciement économique était par ailleurs contredit par la volonté de C______ (SUISSE) de trouver un autre poste pour A______ (Risk ORM), d'une classification similaire au poste qu'elle occupait et avec un salaire probablement identique, que A______ avait cependant décliné.

Le licenciement de A______ correspondait à la volonté des parties, à savoir une mobilité en Suisse d'une durée maximale de cinq ans couplée à une suspension du contrat de travail français et assortie d'une garantie de pouvoir réintégrer un poste similaire à Paris à la fin de la mission en Suisse. A______ ne remplissait ainsi pas les conditions pour bénéficier de l'indemnité prévue à l'article 5 du plan social, et elle ne pouvait pas non plus percevoir le programme d'aide à la formation découlant de son article 4.

Concernant le bonus, celui-ci a été qualifié de gratification facultative et discrétionnaire par le Tribunal (absence de paiement pendant des décennies, paiements systématiquement assortis d'une réserve). A______ n'avait par ailleurs pas réussi à démontrer en quoi la réserve du caractère facultatif aurait été vide de sens. Aussi, conformément à l'article 2706 du règlement du personnel, le contrat de travail ayant été résilié préalablement au paiement du bonus, celle-ci ne pouvait prétendre à son versement.

S'il n'était pas contesté que la fin des rapports de travail ait pu causer une certaine anxiété chez A______, aucun acte illicite ne pouvait être reproché à C______ (SUISSE), qui n'avait qu'exécuté la volonté des parties en mettant un terme au contrat de travail suisse. A supposer qu'un acte illicite ait été commis, aucune faute ne pouvait être reprochée à C______ (SUISSE), qui avait proposé un poste alternatif à A______, avec un salaire probablement identique au sien et qui lui aurait permis de rester en Suisse. Quoi qu'il en soit, même à supposer qu'une atteinte ait eu lieu, elle n'était dans tous les cas pas suffisamment grave, objectivement et subjectivement, pour admettre la réalisation du seuil de souffrance nécessaire à l'octroi d'une indemnité.

Les frais d'avocats avant procès n'étaient ni nécessaires ni adéquats. Le dossier n'apparaissait pas d'une complexité particulière justifiant l'intervention de plusieurs avocats pour une durée de consultation excédant 24 heures: A______ avait connaissance du motif de résiliation de son contrat de travail suisse et ne nécessitait pas plusieurs heures de conseil juridique pour réclamer son certificat de travail. Le Tribunal a par ailleurs relevé que A______ était au bénéfice de nombreuses années d'expérience dans le domaine compliance/juridique, de sorte qu'elle bénéficiait d'une expérience suffisante pour entreprendre seule les démarches précitées.

EN DROIT

1.             1.1 Le jugement entrepris ayant été communiqué aux parties avant le 1er janvier 2025, la présente procédure d'appel demeure régie par l'ancien droit de procédure (art. 404 al. 1 et 405 al. 1 CPC), sous réserve des dispositions d'application immédiate énumérées à l'art. 407f CPC.

1.2 Le jugement attaqué constitue une décision finale rendue dans une cause patrimoniale dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure était supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

1.3 Interjeté dans le délai et la forme prévus par la loi (art. 130, 131, 142, 143 et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.4 La valeur litigieuse étant supérieure à 30'000 fr., la procédure ordinaire s'applique, de même que les maximes des débats et de disposition (art. 55,
58 al. 1 et 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC a contrario).

1.5 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par les juges de première instance et vérifie si ceux-ci pouvaient admettre les faits qu'ils ont retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3).

2.             L'appelante a modifié ses conclusions en appel, en changeant le point de départ des intérêts de ses conclusions en paiement et en réduisant le montant de l'une d'elles.

2.1 La Cour examine d'office la recevabilité des conclusions nouvelles en appel (art. 60 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_395/2017 du 11 octobre 2018 consid. 4.3). Si la modification n’est pas recevable, l’instance d’appel statuera sur les conclusions précédentes de l’appelant, à moins qu’elles n’aient été retirées (Bastons Bulletti, Petit commentaire, Code de procédure civile, 2020, n. 20 ad art. 317 CPC).

La modification de la demande implique un changement des conclusions et/ou du complexe de faits qui les fonde, c’est à dire une modification de l’objet du litige (Bastons Bulletti, op. cit., n. 16 ad. art. 317 CPC). Selon l'art. 317 al. 2 CPC, la demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 CPC sont remplies (let. a) et si la modification repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux (let. b). L'art. 227 al. 1 CPC autorise la modification de la demande si la prétention nouvelle ou modifiée relève de la même procédure et présente un lien de connexité avec la dernière prétention ou, à défaut d'un tel lien, si la partie adverse consent à la modification de la demande.

Une réduction des conclusions ne constitue pas une modification de la demande au sens de l'art. 317 al. 2 CPC, mais un retrait partiel de cette demande admissible en tout temps (arrêts du Tribunal fédéral 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.2.1; 5A_184/2013 du 26 avril 2013 consid. 3.2).

2.2 En l'espèce, en première instance, l'appelante a conclu à ce que le Tribunal condamne l'intimée à lui verser la somme de 34'698 fr. 01 nets avec intérêts à 5% l’an à compter du 1er juillet 2022. En appel, elle a modifié le point de départ des intérêts, les faisant courir à compter du 1er mai 2022. Cette modification ne saurait toutefois être interprétée comme une modification des conclusions d'appel au sens de l'art. 317 al. 2 CPC, dans la mesure où une erreur de plume s'est manifestement glissée dans le résumé des conclusions de l’appelante au sein de sa demande en paiement. En effet, il ressort d'une lecture attentive des considérations en droit de la demande en paiement que l’appelante a systématiquement fait courir les intérêts à 5% l'an à compter du 1er mai 2022 sur les prétentions concernées. Partant, la conclusion en paiement de l'appelante relative au montant de 34'698 fr. 01 nets avec intérêts à 5% l’an à compter du 1er mai 2022 sera déclarée recevable.

L’appelante était par ailleurs fondée à réduire sa conclusion en paiement de 180'785 fr. 95 à 173'997 fr. 25 bruts, dès lors qu’elle a renoncé à ses prétentions découlant de la prime d'attribution du « Group Sustainability and Incentive Scheme ». Il en ira toutefois autrement concernant la modification relative au point de départ des intérêts, l'appelante n'expliquant pas les raisons pour lesquelles elle a commencé à faire courir ceux-ci au 1er mai 2022 en appel, au lieu du 1er juin 2023 en première instance. Elle ne fonde par ailleurs pas cette modification sur des faits ou moyens de preuve nouveaux. Partant, cette modification sera déclarée irrecevable, de sorte que la Cour statuera sur la conclusion telle que formulée par l'appelante devant le Tribunal et réduite devant la Cour, soit 173'997 fr. 25 bruts avec intérêts à 5% l’an à compter du 1er juin 2023.

3. L'appelante reproche au Tribunal d'avoir procédé à une constatation inexacte des faits sur plusieurs points. Celle-ci a été modifiée et complétée de manière à y intégrer les faits pertinents pour l'issue du litige.

4. 4.1 L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir erré dans l'application des principes découlant de l'art. 18 CO. Elle soutient que la lettre de confort avait uniquement comme objectif de suspendre son contrat de travail français pendant une durée maximale de cinq ans, sans que cela ne porte à conséquence sur la fin de son contrat de travail suisse. La lettre de confort lui permettait ainsi de conserver une certaine sécurité de l'emploi ainsi qu’un lien avec la mobilité internationale. Ceci était notamment corroboré par le fait qu’elle avait elle-même entamé des démarches afin de prolonger la validité de la lettre de confort en 2019, alors qu'elle arrivait au terme de sa première période de trois ans de suspension. Il n'était ainsi pas question de reconduire son contrat de travail suisse à ce moment, mais simplement de prolonger la suspension de son contrat de travail français. Concernant ses recherches d’emploi, elles avaient eu lieu dans l’objectif d’évoluer professionnellement, mais non pas en préparation de la fin de son contrat de travail suisse. Son poste avait par ailleurs été supprimé, dans la mesure où ses tâches avaient été ajoutées au cahier des charges de L______. Au bénéfice d'un contrat de travail suisse à durée indéterminée à Zurich, elle remplissait les conditions pour percevoir l'indemnité découlant du plan social, son licenciement étant intervenu pour des motifs économiques.

4.1.1 Par le contrat individuel de travail, le travailleur s'engage, pour une durée déterminée ou indéterminée, à travailler au service de l'employeur et celui-ci à payer un salaire fixé d'après le temps ou le travail fourni (art. 319 al. 1 CO). Les éléments caractéristiques de ce contrat sont une prestation de travail, un rapport de subordination, un élément de durée et une rémunération
(arrêts du Tribunal fédéral 4A_117/2024 du 21 août 2024 consid. 4.2; 4A_53/2021 du 21 septembre 2021 consid. 5.1.3; 4A_64/2020 du 6 août 2020 consid. 6.1).

4.1.2 La qualification juridique d'un contrat se base sur le contenu de celui-ci (ATF 144 III 43 consid. 3.3). Dans une première étape, il s'agit de déterminer le contenu du contrat en recherchant la réelle et commune intention des parties (art. 18 al. 1 CO). Si une telle intention ne peut être constatée, le contenu du contrat doit être interprété selon le principe de la confiance (ATF 145 III 365 consid. 3.2.1; 144 III 43 consid. 3.3; 140 III 134 consid. 3.2).

La jurisprudence prévoit à cet égard que le juge doit tout d'abord s'efforcer de déterminer la commune et réelle intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO;
ATF 144 III 93 consid. 5.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_431/2019 du 27 février 2020 consid. 5.1). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté – écrites ou orales –, mais aussi le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat, des projets de contrat, de la correspondance échangée ou encore de l'attitude des parties après la conclusion du contrat, établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 140 III 86 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_152/2017 du 2 novembre 2017 consid. 4.1).

Ce n'est que si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties – parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes – ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat – ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves –, qu'il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_431/2019 du 27 février 2020 consid. 5.1).

Subsidiairement, si l'interprétation selon le principe de la confiance ne permet pas de dégager le sens de clauses ambiguës, celles-ci sont à interpréter en défaveur de celui qui les a rédigées, en vertu de la règle « in dubio contra stipulatorem »
(ATF 133 III 61 consid. 2.2.2.3; 122 III 118 consid. 2a).

4.1.3 Le plan social est une convention par laquelle l'employeur et les travailleurs fixent les moyens d'éviter les licenciements, d'en limiter le nombre ou d'en atténuer les conséquences (art. 335h al. 1 CO). Il fait partie des mesures destinées à protéger le travailleur en cas de licenciements collectifs (ATF 133 III 213 consid. 4.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_74/2018 du 28 juin 2018 consid. 6.4).

4.2
4.2.1 Il convient, dans un premier temps, de procéder à l’interprétation subjective de la volonté des parties et de déterminer si celles-ci s’étaient mises d’accord sur la limitation, d’une durée de cinq ans, du contrat de travail suisse de l’appelante.

4.2.1.1 Comme il découle des témoignages de F______ et de H______ ainsi que des échanges de courriels de 2016 ayant précédé l’engagement de l’appelante, le montage contractuel nécessaire pour permettre la mobilité de l'appelante a dû être mis en place en raison de la législation zurichoise, qui ne permettait pas à l'intimée d'établir un contrat d'expatriation classique, ce dont l'appelante a par ailleurs confirmé avoir été informée en amont de sa mobilité en 2016. Certes, le témoin I______ a expliqué qu'un contrat d'expatriation standard aurait été trop onéreux à mettre en place; il a toutefois également fait le lien avec la législation zurichoise, en précisant qu'il avait par la suite été possible d'établir des contrats d'expatriation standard pour les employés en raison d'un changement de loi. Son témoignage n'est ainsi pas de nature à remettre en cause les raisons pour lesquelles l'appelante n'a pas pu bénéficier d'un contrat d'expatriation standard, mais d'une procédure d'exception. Quant à l'affirmation de l'intimée selon laquelle il n'était pas possible de faire signer un contrat à durée déterminée pour une durée supérieure à une année, elle ne signifie pas encore que les parties se soient accordées sur une durée indéterminée du contrat de travail suisse, comme ceci sera examiné ci-après.

Il n'est pas contesté que le transfert de l’appelante à Zurich a eu lieu dans le cadre du programme de mobilité de C______ . Ce premier élément constitue déjà, en lui-même, un indice concernant la volonté des parties de limiter dans le temps la présence de l'appelante en Suisse. Il est renforcé par l'existence parallèle du contrat de travail suisse et de la lettre de confort, suspendant son contrat de travail français. L'on peine en effet à comprendre les raisons pour lesquelles la lettre de confort aurait été établie si la mobilité en Suisse n'était pas limitée dans le temps. La lettre de confort – contresignée par ailleurs par l'appelante antérieurement à sa prise de fonction – est sans équivoque quant à son contenu: elle précise expressément qu'elle a pour objectif de décrire les conséquences du « transfert » de l'appelante en Suisse et se réfère expressément à la « mission » de celle-ci dans ce pays. La suspension de son contrat de travail français était ainsi limitée à une durée maximale de cinq ans, et il était clairement précisé qu'à la date à laquelle le contrat de travail suisse prendrait fin, la période de suspension du contrat de travail français prendrait fin également. L'objectif de la lettre de confort était ainsi de garantir à l'appelante une position à des conditions équivalentes lors de son retour auprès de C______ , à l'issue de sa mission en Suisse. L'interdépendance entre le contrat de travail suisse et le contrat de travail français a donc été établie dès le départ, en 2016.

Les allégations de l'appelante selon lesquelles elle n'aurait pas eu le temps de réfléchir aux conséquences de la signature de son contrat de travail suisse et de la lettre de confort, ne convainquent pas. Il ressort en effet que celle-ci a été dès le départ informée, en 2016, des raisons pour lesquelles un contrat de travail suisse et une lettre de confort devaient être établis, étant relevé qu'elle avait elle-même réclamé la lettre de confort par courriel du 25 août 2016.

La connaissance, par l'appelante, de la limitation temporelle de sa mobilité en Suisse ressort également des échanges intervenus en 2019, lors desquels la prénommée a demandé la confirmation de la prolongation, pour une durée de deux ans, de la lettre de confort. Les différents échanges intervenus entre les collaborateurs des ressources humaines concernés les 18 et 19 novembre 2019 – qui font expressément référence à la prolongation de la mobilité en Suisse de l'appelante pour une durée maximale de deux ans – lui ont par ailleurs été transférés le 19 novembre 2019 par H______. L'appelante aurait à tout le moins dû être interpellée par les termes employés notamment par F______, H______ et G______, si elle pensait, comme elle le soutient, que la prolongation de la durée de la lettre de confort ne concernait que son contrat de travail français, sans conséquence sur la fin de son contrat de travail suisse.

Les témoins I______, H______ et F______ ont par ailleurs confirmé la lecture conjointe qu’il convenait de donner au contrat de travail suisse et à la lettre de confort, en ce sens que le contrat de travail suisse expirait à la fin de la durée de la suspension du contrat de travail français.

L'impact de la lettre de confort sur le contrat de travail suisse est finalement confirmé par le courrier du 24 septembre 2021 intitulé « fin d'affectation » de C______ . En effet, à la lecture de ce courrier, le contrat de travail suisse de l'appelante prenait fin le 31 octobre 2021, tandis que son contrat de travail français prenait à nouveau effet au 1er novembre 2021. Il en découle que le contrat de travail suisse et la lettre de confort étaient intrinsèquement liés. L'appelante a par ailleurs confirmé, par courriel du 6 octobre 2021, avoir pris connaissance du contenu de ce courrier, sans le contester s'agissant de la limitation temporelle de son contrat suisse.

A toutes fins utiles, la Cour précisera que les attestations des 25 mai 2021 et 5 octobre 2021 (pièce 43 app.), ou encore le fait que l’appelante ait été admise à se présenter à l'élection du personnel de C______ (SUISSE), n’ont aucune conséquence sur ce qui précède. Il ne ressort en effet pas des documents fournis par l’appelante que les collaborateurs en mobilité n’auraient pas la possibilité de se présenter à l’élection du personnel. Quant aux attestations des 25 mai et 5 octobre 2021, celles-ci ont été établies à l’attention de tiers, à la demande de l’appelante, afin de faciliter une recherche de logement pour celle-ci. Ces attestations n’apportent dès lors aucun renseignement sur la commune et réelle intention des parties quant à la durée du contrat de travail suisse.

4.2.1.2 Il n'est pas contesté que l'appelante a effectué des démarches, dès 2020, afin d'évoluer dans sa carrière professionnelle, dans la mesure où elle estimait être arrivée au bout de sa fonction.

S'il est vrai que les témoins H______, F______, I______ et J______ ont confirmé la volonté de l'appelante de demeurer à Zurich et d'évoluer professionnellement sans faire de lien avec la fin prochaine de son contrat de travail suisse, il n'en demeure pas moins que F______ et H______ ont expliqué avoir eu plusieurs discussions avec l'appelante sur la fin de sa mission en Suisse ainsi que ses futures perspectives d'emploi, dès 2016 pour la première et courant 2021 pour le second. Au demeurant, l'appelante a elle-même admis avoir eu une discussion en août 2021 avec G______, lors de laquelle elle avait manifesté le souhait de ne « pas revenir en France à l'issue de sa mission en Suisse », ce qui est corroboré par le courriel de l’appelante, également adressé à G______, du 6 octobre 2021.

Ainsi, nonobstant le courriel du 15 octobre 2021 de l'appelante (cf. consid. C.r.c supra) – rédigé après plusieurs entretiens ayant eu lieu avec les ressources humaines et qui est contradictoire avec le contenu de son courriel du 6 octobre 2021 – le Tribunal a correctement interprété le comportement de l'appelante, dont il ressortait que celle-ci cherchait à évoluer professionnellement en prévision de la fin de sa mission à Zurich.

Dès lors, l’appelante, consciente que la fin de ses rapports de travail à Zurich approchait, a souhaité évoluer professionnellement au sein de l’intimée, alternativement de C______ , sans que ces entités n'aient toutefois pu lui proposer un poste qui correspondait à ses attentes (comme, par exemple, le poste de RISK ORM).

4.2.1.3 Au regard de ce qui précède, il découle de l'interprétation subjective de la volonté des parties que celles-ci s'étaient accordées dès le début de leur relation contractuelle en 2016 sur une limitation du contrat de travail suisse de l’appelante à une durée maximale de cinq ans, ceci nonobstant l'intitulé du contrat de travail suisse à durée « indéterminée ».

Il n’y a dès lors pas lieu de procéder à une interprétation objective, ni à une interprétation « in dubio contra stipulatorem » des documents contractuels, ces interprétations étant subsidiaires.

4.2.2 Il convient à présent d'examiner si l'appelante aurait dû percevoir les indemnités découlant de l'article 4 (indemnité pour frais de formation) et 5 (indemnité pour les collaborateurs éligibles de moins de 58 ans) découlant du plan social de l’intimée.

Selon son article 2.3, le plan social ne s’appliquait pas aux rapports de travail qui prenaient automatiquement fin à l'expiration de la durée initialement convenue pendant la durée de validité du plan social. Or, comme vu précédemment, il était prévu que le contrat de travail suisse de l'appelante prenne fin à l'issue de sa mission en Suisse, soit le 31 octobre 2021. Son licenciement n'a dès lors pas eu lieu pour des motifs économiques, comme le soutient l’appelante, mais en raison de son refus de quitter son poste à l’issue de sa mobilité en Suisse. Le contrat de travail suisse de l'appelante n'était ainsi pas concerné par le plan social de l’intimée, de sorte qu'elle ne peut prétendre au versement des différentes indemnités qu’il prévoyait.

La Cour relève encore, à titre superfétatoire, que C______/E______ (SUISSE) n'était pas concernée par le plan social, comme cela ressort du texte même du plan social ainsi que des déclarations des témoins I______ et F______. Certes, l'appelante était liée contractuellement à l’intimée – ceci pour des raisons administratives, comme vu supra consid. 4.2.1.1 –; sa fonction s’exerçait toutefois au sein de C______/E______ (SUISSE) . L’appelante n’a d'ailleurs pas réussi à prouver la baisse d’effectif alléguée au sein de C______/E______ (SUISSE) , celle-ci ayant elle-même expliqué que les organigrammes fournis ne reflétaient pas la composition exacte des employés de l’entité.

Partant, c'est à juste titre que le Tribunal a considéré que l'appelante ne remplissait pas les conditions pour percevoir les indemnités prévues par les articles 4 et 5 du plan social, de sorte qu'elle devait être déboutée de ses prétentions à ce titre.

5. 5.1 L'appelante fait grief au Tribunal de ne pas lui avoir alloué la somme de 30'000 fr. à titre de part variable.

5.1.1 Le droit suisse ne contient aucune disposition qui traite spécifiquement du bonus, lequel peut consister dans le versement d'une somme d'argent ou encore dans la remise d'actions ou d'options (ATF 141 III 407 consid. 4.1). Il faut donc déterminer dans chaque cas, par interprétation des manifestations de volonté des parties lors de la conclusion du contrat ou de leur comportement ultérieur au cours des rapports de travail (accord par actes concluants, c'est-à-dire tacite), s'il s'agit d'un élément du salaire (art. 322 s. CO) ou d'une gratification (art. 322d CO) (ATF 142 III 381 consid. 2.1 et 2.2).

5.1.2 Le salaire est la rémunération que l'employeur est tenu de payer à l'employé pour le temps ou le travail que celui-ci a consacré à son service, et qui est fixé soit directement par contrat individuel, soit indirectement par un contrat-type de travail ou par une convention collective (art. 322 al. 1 CO).

5.1.3 S'agissant des bonus, le Tribunal fédéral distingue les trois cas suivants: (1) le salaire variable, (2) la gratification à laquelle l'employé a droit et (3) la gratification à laquelle il n'a pas droit (arrêts du Tribunal fédéral 4A_327/2019 du 1er mai 2020 consid. 3.1; 4A_230/2019 du 20 septembre 2019 consid. 3). L'employeur peut subordonner le droit à la gratification à des conditions, notamment à la présence de l'employé dans l'entreprise au moment de son versement, ou à l'absence de résiliation du contrat (arrêts du Tribunal fédéral 4A_158/2019 du 26 février 2020 consid. 4; 4A_651/2017 du 4 avril 2018 consid. 3.3).

5.1.3.1 Il n'y a pas de droit à la gratification lorsque, par contrat, les parties ont réservé tant le principe que le montant du bonus; il s'agit alors d'une gratification facultative; le bonus n'est pas convenu et l'employé n'y a pas droit, sous réserve de l'exception découlant de la nature de la gratification (principe de l'accessoriété). De même, lorsque le bonus a été versé d'année en année avec la réserve de son caractère facultatif, il n'y a en principe pas d'accord tacite: il s'agit d'une gratification qui n'est pas due (arrêts du Tribunal fédéral 4A_463/2017 du 4 mai 2018 consid. 3.1.3.2).

Toutefois, il a été admis par exception que, en dépit de la réserve (sur le principe et sur le montant), un engagement tacite peut se déduire du paiement répété de la gratification pendant des décennies (jahrzehntelang), lorsque l'employeur n'a jamais fait usage de la réserve émise, alors même qu'il aurait eu des motifs de l'invoquer, tels qu'une mauvaise marche des affaires ou de mauvaises prestations de certains collaborateurs lorsqu'il l'a versée: il s'agit alors d'une gratification à laquelle l'employé a droit (ATF 129 III 276 consid. 2.3).

Il en va de même lorsque la réserve du caractère facultatif n'est qu'une formule vide de sens (c'est-à-dire une clause de style sans portée) et qu'en vertu du principe de la confiance, il y a lieu d'admettre que l'employeur montre par son comportement qu'il se sent obligé de verser un bonus (arrêt du Tribunal fédéral 4A_327/2019 du 1er mai 2020 consid. 3.1.3.2).

5.1.3.2 Lorsque l'employeur a réservé le caractère facultatif du bonus, dans son principe et dans son montant (cas no3), et que l'employé n'a donc pas un droit contractuel au versement du bonus (qui est une gratification), il faut encore examiner si le bonus a un caractère accessoire par rapport au salaire de base. La gratification, qui doit rester un élément accessoire du salaire de base, ne peut aller au-delà d'un certain pourcentage de ce salaire de base convenu (ATF 141 III 407 consid. 4.3.2; 139 III 155 consid. 5.3; 129 III 276 consid. 2.1).

Le critère de l'accessoriété, en vertu duquel le bonus doit être requalifié en salaire, ne s'applique toutefois que pour les salaires modestes et les salaires moyens à supérieurs. Pour les très hauts revenus, le Tribunal fédéral a considéré que le principe de la liberté contractuelle doit primer, car il n'y a pas dans ce cas de besoin de protection du travailleur qui justifierait une requalification du bonus ou d'une part du bonus en salaire en vertu du principe de l'accessoriété
(ATF 141 III 407 consid. 4.3.2 et 5.3.1). Le bonus est donc une gratification facultative à laquelle l'employé n'a pas droit.

Le Tribunal fédéral a fixé le seuil du très haut revenu à un montant équivalent à cinq fois le salaire médian suisse dans le secteur privé (arrêts du Tribunal fédéral 4A_506/2023 du 19 février 2025 consid. 5.1; 4A_463/2017 du 4 mai 2018 consid. 3.1.4.2). Il résulte des données mises à disposition sur le site internet de l'Office fédéral de la statistique que le salaire médian suisse (secteur privé) était de 6'361 fr. en 2020 et de 6'510 fr. en 2022.

5.2 L'appelante soutient que la réserve du caractère facultatif du versement du bonus aurait été une formule vide de sens. Elle échoue cependant, comme relevé par le Tribunal, à apporter la preuve de cet élément. Il n'est en effet pas suffisant que l'intimée lui ait versé, durant trois années consécutives, en réservant systématiquement le caractère facultatif du bonus, le même montant, pour en déduire que l’intimée se sentait obligée à son égard.

Par ailleurs, il ressort du statut du personnel – dont l'application aux rapports contractuels de l'appelante n'est pas contestée – que le bonus était entièrement discrétionnaire, tant dans son principe que dans son montant. Or, l'appelante, qui supporte le fardeau de la preuve sur ce point, n'a pas démontré comment le bonus aurait pu être objectivement déterminé. Elle ne soutient en particulier pas que le bonus était déterminé en fonction d'une proportion précise du résultat de l'intimée, ni que ses performances individuelles étaient mesurées de manière purement quantitative en fonction d'objectifs prédéfinis. L'octroi de la rémunération variable dépendait ainsi de l'appréciation de l'employeur, à tout le moins partiellement.

Faute d'être objectivement déterminable, la rémunération variable ne constitue pas un élément du salaire.

Ainsi, c'est à juste titre que le Tribunal a qualifié de gratification facultative et discrétionnaire le bonus versé durant les rapports de travail par l’intimée à l’appelante.

L’intimée n’ayant pas l'obligation de verser un bonus à l’appelante, le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

6. 6.1 L'appelante fait grief au Tribunal de ne pas lui avoir alloué d'indemnité pour tort moral, qu'elle a chiffrée à 5'000 fr. nets. Elle soutient avoir vécu une forte pression et un grand stress au moment de la fin de ses rapports de travail, de sorte qu’elle s’était retrouvée en arrêt maladie du 27 octobre au 30 novembre 2021. L’intimée s’était par la suite comportée de manière chicanière envers elle, en refusant de lui transmettre les motifs de son congé, en tardant à lui remettre son certificat de travail et en ne lui transmettant que partiellement son dossier personnel, en 2023 seulement.

6.1.1 L'art. 328 al. 1 CO impose à l'employeur de protéger et respecter, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il doit en particulier manifester les égards voulus pour sa santé, veiller au maintien de la moralité et veiller à ce que le travailleur ne soit pas harcelé sexuellement.

En cas de violation de l'art. 328 al. 1 CO, l'employé peut prétendre à une indemnité pour tort moral aux conditions de l'art. 49 al. 1 CO. Selon cette disposition, celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d'argent à titre de réparation morale, pour autant que la gravité de l'atteinte le justifie et que l'auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement. N'importe quelle atteinte ne justifie pas une indemnité (ATF 125 III 70 consid. 3a); l'atteinte doit revêtir une certaine gravité objective et être ressentie par la victime, subjectivement, comme une souffrance morale suffisamment forte pour qu'il apparaisse légitime de s'adresser au juge afin d'obtenir réparation (arrêts du Tribunal fédéral 4A_2020 du 1er décembre 2020 consid. 3.2; 4A_159/2016 du 1er décembre 2016 consid. 4.1; 4A_714/2014 du 22 mai 2015 consid. 2.2).

L'atteinte objectivement grave doit être ressentie par la victime comme une souffrance morale, à défaut de quoi aucune indemnisation ne peut lui être accordée. Comme chaque être humain ne réagit pas de la même manière à une atteinte portée à son intégrité psychique, le juge doit se déterminer à l'aune de l'attitude d'une personne ni trop sensible, ni particulièrement résistante. Pour que le juge puisse se faire une image précise de l'origine et de l'effet de l'atteinte illicite, le lésé doit alléguer et prouver les circonstances objectives desquelles on peut inférer la grave souffrance subjective qu'il ressent, malgré la difficulté de la preuve dans le domaine des sentiments (ATF 125 III 70 consid. 3a; 120 II 97 consid. 2b). La gravité de l'atteinte à la personnalité suppose en tout cas une atteinte extraordinaire, dont l'intensité dépasse l'émoi ou le souci habituel, de telle sorte qu'elle peut fonder une prétention particulière contre son auteur, alors que la vie exige de chacun qu'il tolère de petites contrariétés (arrêt du Tribunal fédéral 6B_400/2008 du 7 octobre 2008 consid. 6.1).

6.1.2 Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour déterminer si les circonstances d'espèce justifient une indemnité pour tort moral dans le cas particulier (ATF 129 III 715 consid. 4.4; 137 III 303 consid. 2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_159/2016 du 1er décembre 2016 consid. 4.1).

6.2 En l'espèce, aucune atteinte à la personnalité de l’appelante ne peut être reprochée à l’intimée au moment de la fin des rapports de travail. L’appelante a en effet participé à plusieurs discussions en amont de la fin de ses rapports de travail, tant avec les ressources humaines de l’intimée que les ressources humaines de C______ . Elle ne saurait donc prétendre avoir été mise sous « pression » par l’intimée à ce sujet, ce d’autant plus que les parties s’étaient accordées sur la durée limitée à cinq ans de son contrat de travail suisse. Il sera par ailleurs relevé que l'intimée a apporté son soutien à l'appelante dans ses démarches visant à retrouver un nouvel emploi. H______ a ainsi rédigé un courriel à l'attention de G______ afin de soutenir l'appelante dans son évolution professionnelle en septembre 2020. De même, F______ a proposé à l'appelante le poste de Risk ORM, en lui confirmant qu’elle pourrait conserver sa rémunération. En outre, l'appelante aurait pu, si elle l'avait souhaité, retrouver un poste équivalent auprès de C______ , comme prévu dans le cadre de la lettre de confort.

Le fait qu’un certain laps de temps se soit écoulé jusqu'à la remise du certificat de travail de l’appelante et de son dossier personnel ne constitue pas une atteinte illicite à sa personnalité. Il sera par ailleurs rappelé que le premier certificat de travail lui a été remis le 1er mars 2022, soit avant la fin des rapports de travail le 30 avril 2022. Concernant les motifs de son licenciement, ceux-ci étaient connus de l’appelante, à savoir la fin de son contrat de travail suisse, de sorte que l’on ne saurait reprocher à l’intimée d’avoir refusé de les lui communiquer.

Le grief de l'appelante sera donc écarté, et le jugement entrepris confirmé sur ce point.

7. L'appelante reproche au Tribunal de ne pas lui avoir accordé une indemnité pour ses frais et honoraires d'avocat encourus avant l’introduction de la procédure en première instance.

7.1 Les frais d'avocat avant le procès civil sont en règle générale inclus dans les dépens prévus par l'art. 95 al. 3 CPC, de sorte qu'ils ne peuvent pas être réclamés dans une action civile séparée ou ultérieure qui serait fondée sur le droit civil fédéral (ATF 139 III 190 consid. 4.2 et 4.4). Les frais d'avocat pré-contentieux liés à un différend contractuel ou à des mesures visant à réparer un préjudice peuvent, dans certaines circonstances, constituer une partie du préjudice à réparer en vertu du droit matériel (arrêt du Tribunal fédéral 4A_501/2021 du 2 février 2022 consid. 9.2.2). Ils ne peuvent qu'exceptionnellement être réclamés séparément en tant que dommage, en motivant spécialement le fait qu'ils ont été occasionnés de manière illicite par la partie adverse (arrêts du Tribunal fédéral 4A_501/2021 du 2 février 2022 consid. 9.2.2; 4A_148/2016 du 30 août 2016 consid. 2.4).

7.2 En l'espèce, il ressort des considérants qui précèdent que l'intimée n'a pas violé ses obligations contractuelles, de sorte qu'elle ne saurait être tenue de rembourser quelque frais que ce soit à l'appelante.

Par conséquent, c'est à juste titre que le Tribunal n'a pas donné suite à la prétention de l'appelante. Le jugement entrepris sera donc également confirmé sur ce point.

8. Au regard de ce qui précède, l’appelante succombe concernant l’entièreté de ses prétentions.

9. 9.1 L'appel étant infondé, il n'y a pas lieu de revoir les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC a contrario). Les chiffres du dispositif du jugement entrepris y afférents seront donc confirmés.

9.2 Au regard de la valeur litigieuse supérieure à 50'000 fr., il y a lieu de percevoir des frais judiciaires pour la procédure d'appel (art. 114 let. c cum 116 al. 1 CPC
a contrario; art. 19 al. 3 let. c LaCC; art. 71 RTFMC). Les frais de l'appel seront arrêtés à 1'750 fr., mis à la charge de l'appelante, qui succombe, et compensés avec l'avance du même montant fournie par celui-ci, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 106 al. 1 CPC et 111 al. 1 aCPC cum 407f CPC a contrario).

Il n'y a pas de dépens pour la représentation en justice dans les causes soumises à la juridiction des prud'hommes (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :


A la forme
:

Déclare recevable l'appel formé le 13 décembre 2024 par A______ contre le jugement JTPH/291/2024 rendu par le Tribunal des prud'hommes le 12 novembre 2024 dans la cause C/497/2023.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres ou contraires conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1’750 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance de frais opérée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Stéphanie MUSY, présidente; Madame Nadia FAVRE, Monsieur
Valery BRAGAR, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.