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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/801/2025

ATAS/646/2025 du 29.08.2025 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/801/2025 ATAS/646/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 août 2025

Chambre 9

 

En la cause

A______

recourante

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. A______ (ci-après : l’assurée), née le ______1970, est mariée à B______. Ils résident au chemin C______, à Thônex, depuis le 15 novembre 2016. Leur fille D______, née le ______ 1990, est mère de trois enfants : E______, né le ______ 2011, F______, né le ______ 2014 et G______ , né le ______ 2023.

b. Selon le registre de l’office cantonal de la population et des migrations
(ci-après : OCPM), D______ et ses enfants résident avec ses parents au chemin C______, à Thônex, depuis le 8 mai 2022.

c. A______ est au bénéfice de prestations complémentaires cantonales (PCC) et fédérales (PCF) depuis le 1er janvier 2015.

B. a. Le 21 octobre 2024, le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) a initié une révision périodique. Selon les informations de l’OCPM, l’assurée partageait son logement avec sa fille D______ et les trois enfants de celle-ci.

b. Par courrier du 12 novembre 2024, l’assurée a informé le SPC que sa fille et les trois enfants de celle-ci vivaient actuellement chez eux. Ils étaient à la recherche d’un logement et devraient déménager prochainement. Sa fille ne travaillait pas et était à l’hospice général. Elle les aidait pour leurs rendez-vous médicaux et les tâches administratives.

c. Par décision du 9 janvier 2025, le SPC a recalculé le droit aux prestations à la suite de la révision du dossier. Le recalcul laissait apparaître un trop perçu de CHF 23’718.- pour la période du 1er juin 2022 au 31 janvier 2025.

Selon le plan de calcul annexé à la décision, le loyer était pris en compte à hauteur de CHF 7'816.-, soit (CHF 22'008.- [loyer net] + CHF 1'440.- [charges]) / [6 x 2]).

d. Le 22 janvier 2025, l’assurée a formé opposition à cette décision. À la suite de sa séparation, sa fille, D______, était revenue vivre chez ses parents. Elle n’avait plus de revenus et ne pouvait pas payer de loyer. En contrepartie, elle s’occupait d’eux, en particulier de leurs rendez-vous médicaux, de leurs factures, de leurs affaires administratives et de l’entretien de la maison. À son arrivée à Genève en 2022, elle s’était rendue avec sa fille au guichet du SPC pour déposer des documents concernant les frais de maladie et expliquer la situation. On leur avait répondu que cela serait « notifié dans le dossier et que c’était bon ». Il ne s’agissait pas d’une sous-location et elle ne percevait aucun loyer, si bien que sa situation financière restait inchangée.

Elle n’avait pas les moyens de rembourser la somme demandée et sollicitait une remise.

e. Par décision sur opposition du 7 février 2025, le SPC a partiellement admis l’opposition. La dette initiale de CHF 23'718.- était ramenée à CHF 22'288.-. Sa fille n’avait partagé le logement qu’avec ses deux premiers enfants jusqu’au 10 avril 2023, l’enfant G______ étant née à cette date. Elle ne pouvait donc être prise en compte dans le loyer proportionnel qu’à partir du 1er mai 2023. La question de la remise serait examinée dès l’entrée en force de la décision.

C. a. Par acte du 6 mars 2025, l’assurée a recouru devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales) contre cette décision, concluant à son annulation. À titre préalable, elle a sollicité la suspension de la procédure dans l’attente d’une décision sur la question de la remise.

Sa fille était devenue une proche aidante. Dès son arrivée à Genève, elles s’étaient renseignées sur cette situation et on leur avait répondu que « tout était en ordre ». Si elle comprenait que le logement de sa fille devait être pris en compte dans les calculs, elle contestait la prise en compte, dans le calcul du loyer, de ses
petits-enfants en bas âge, qui partageait une seule chambre avec leur mère dans son logement de quatre pièces.

b. Par réponse du 31 mars 2025, le SPC a conclu au rejet du recours. Le demande de remise était prématurée. Son dossier ne contenait aucune trace d’une annonce de sa cohabitation avec sa fille et ses petits-enfants avant la révision périodique de son dossier initiée le 21 octobre 2024.

c. La recourante n’a pas répliqué dans le délai imparti à cet effet.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA).

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de restitution du montant de CHF 22'288.-, correspondant aux prestations complémentaires fédérales et cantonales versées à tort entre le 1er juin 2022 et le 31 janvier 2025.

2.1 Des modifications législatives et réglementaires sont entrées en vigueur au 1er janvier 2021 dans le cadre de la Réforme des PC (LPC, modification du 22 mars 2019, RO 2020 585, FF 2016 7249 ; OPC-AVS/AI [ordonnance du 15 janvier 1971 sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité - RS 831.301], modification du 29 janvier 2020, RO 2020 599).

2.2 Du point de vue temporel, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire, le droit applicable est déterminé par les règles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et les références ; ATF 136 V 24 consid. 4.3 ; ATF 130 V 445 consid. 1 et les références ; ATF 129 V 1 consid. 1.2 et les références).

Conformément à l’al. 1 des dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019, l’ancien droit reste applicable trois ans à compter de l’entrée en vigueur de cette modification aux bénéficiaires de prestations complémentaires pour lesquels la réforme des PC entraîne, dans son ensemble, une diminution de la prestation complémentaire annuelle ou la perte du droit à la prestation complémentaire annuelle.

2.3 En l'occurrence, dans la mesure où le recours porte sur le droit aux prestations complémentaires, du 1er juin 2022 au 31 janvier 2025, d’une assurée qui en bénéficiait jusqu’alors, le litige reste soumis à l'ancien droit s’agissant de la période du 1er juin 2022 au 31 décembre 2023, l’intimé ayant constaté que le calcul du droit aux prestations en application de la réforme de la loi était défavorable à l’intéressée. En revanche, le nouveau droit s’applique s’agissant de la période du 1er janvier 2024 au 31 janvier 2025.

3.              

3.1 En vertu de l'art. 25 al. 1 1ère phr. LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. Selon l'art. 25 al. 2 1ère phr. LPGA (dans sa teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2021), le droit de demander la restitution s'éteint trois ans après le moment où l'institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation.

À teneur de l’art. 24 LPCC, les prestations cantonales indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile (al. 1). Le règlement fixe la procédure de la demande de remise ainsi que les conditions de la situation difficile (al. 2).

3.2 L'obligation de restituer suppose que soient remplies les conditions d'une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) ou d'une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) de la décision – formelle ou non – par laquelle les prestations en cause ont été allouées (ATF 142 V 259 consid. 3.2 et les références ; 138 V 426
consid. 5.2.1 et les références ; 130 V 318 consid. 5.2 et les références).

Selon l'art. 53 al. 1 LPGA, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si l'assuré ou l'assureur découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient pas être produits auparavant. Cela vaut aussi lorsque les prestations ont été accordées sans avoir fait l'objet d'une décision formelle mais que leur versement a acquis force de chose décidée (ATF 130 V 380 consid. 2.1 ; 129 V 110 consid. 1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_793/2023 du 5 décembre 2024 consid. 4.4 et la référence).

S'agissant des délais applicables en matière de révision, l'art. 53 al. 1 LPGA n'en prévoit pas. En vertu du renvoi prévu par l'art. 55 al. 1 LPGA, sont déterminants les délais applicables à la révision de décisions rendues sur recours par une autorité soumise à la loi fédérale sur la procédure administrative du
20 décembre 1968 (PA - RS 172.021). Ainsi, conformément à l'art. 67 al. 1 PA, un délai (de péremption) relatif de 90 jours dès la découverte du motif de révision s'applique, en plus d'un délai absolu de 10 ans dès la notification de la décision administrative ou de la décision sur opposition (ATF 148 V 277 consid. 4.3 ;
143 V 105 consid. 2.1 ; 140 V 514 consid. 3.3).

3.3 La demande de remise ne peut être traitée que si la décision de restitution est entrée en force (arrêt du Tribunal fédéral 9C 211/2009 du 26 février 2010).

3.4 Selon l’art. 9 al. 1 LPC, le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

Sont notamment reconnues comme dépenses, pour les personnes vivant à domicile, le loyer d’un appartement et les frais accessoires y relatifs (art. 10 al. 1 let. b LPC).

L’art. 10 LPC définit les dépenses reconnues et fixe notamment le montant maximal reconnu pour le loyer d'un appartement.

3.5 Sur le plan cantonal, ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes qui remplissent les conditions de l’art. 2 LPCC et dont le revenu annuel déterminant n'atteint pas le revenu minimum cantonal d'aide sociale applicable (art. 4 LPCC).

Le montant annuel de la prestation complémentaire cantonale correspond à la part des dépenses reconnues qui excède le revenu annuel déterminant de l'intéressé (art. 15 al. 1 LPCC).

Selon l’art. 36F LPCC, les dépenses reconnues sont celles énumérées par l'art. 10 LPC et ses dispositions d'exécution, à l'exclusion des montants suivants : le montant destiné à la couverture des besoins vitaux est remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d'aide sociale défini à l'art. 36B (let. a) ; le loyer ainsi que les charges sont fixés par règlement du Conseil d’État (let. b).

3.6 Sous le titre marginal « partage obligatoire du loyer », l’art. 16c OPC-AVS/AI prévoit que lorsque des appartements ou des maisons familiales sont aussi occupés par des personnes non comprises dans le calcul des PC, le loyer doit être réparti entre toutes les personnes. Les parts de loyer des personnes non comprises dans le calcul des PC ne sont pas prises en compte lors du calcul de la prestation complémentaire annuelle (al. 1). En principe, le montant du loyer est réparti à parts égales entre toutes les personnes (al. 2).

3.7 Selon la jurisprudence rendue avant l'entrée en vigueur de l'art. 16c
OPC-AVS/AI au 1er janvier 1998, la pratique administrative selon laquelle le montant total du loyer des appartements loués en commun par plusieurs personnes devait être, en règle générale, réparti à parts égales entre chacune de ces personnes - indépendamment du point de savoir au nom de laquelle le contrat de bail avait été conclu et qui payait le loyer - devait être suivie (arrêt du TFA du 15 juillet 1974, in RCC 1974 p. 510). Il s'agissait cependant d'une règle générale, à laquelle il était possible de déroger dans des situations particulières, une exception à la répartition du montant du loyer à parts égales ne devant être admise qu'avec prudence pour éviter le risque d'abus. Une telle situation pouvait se présenter lorsque l'intéressé avait des motifs valables de supporter à lui seul le loyer, bien qu'il partageât l'appartement avec un tiers, et de ne demander aucune participation de la part de celui-ci au loyer; ces motifs pouvaient être d'ordre juridique
(p. ex. une obligation d'entretien), mais aussi d'ordre moral (p. ex. la contrepartie de services rendus gratuitement). La jurisprudence avait ainsi admis une dérogation au partage du loyer dans le cas où la bénéficiaire des prestations complémentaires vivait avec son petit-fils âgé d'un peu plus de six mois au moment où elle l'avait accueilli chez elle. Selon le Tribunal fédéral, il ne pouvait être raisonnablement question d'une location commune d'un appartement, voire d'un rapport de location payant entre l'assurée et son petit-fils (arrêt du Tribunal fédéral P 21/90 du 16 novembre 1990). Ce cas a conduit à l'adaptation du ch. 3023 des Directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (DPC), édictées par l'OFAS, dans leur version en vigueur à partir du 1 er janvier 1992 (jusqu'au 31 décembre 1997).  

L'art. 16c al. 1 OPC-AVS/AI, introduit le 1er janvier 1998, a été adopté pour ancrer dans la réglementation d'exécution les principes de la pratique administrative en matière de répartition du loyer. Toutefois, selon cette disposition, la répartition du loyer ne présuppose pas que l'appartement ou la maison familiale soit loué en commun ; il suffit que les personnes vivent ensemble (ménage commun). Dans l'ATF 127 V 10, le Tribunal fédéral des assurances a qualifié l'art. 16c OPC-AVS/AI de conforme à la loi, puisque son but était d'empêcher le financement indirect par les prestations complémentaires de personnes non comprises dans le calcul des PC. Selon la lettre de cette disposition, le terme « aussi occupés par » justifie à lui seul déjà un partage du loyer, indépendamment du point de savoir si le logement est loué en commun (arrêt du Tribunal fédéral 9C_326/2022 du 23 novembre 2022 consid. 3.2 et les arrêts cités ; VSI 2001 p. 236).  

Le Tribunal fédéral a néanmoins considéré que même après l'entrée en vigueur de l'art. 16c OPC-AVS/AI, la vie commune sous le même toit ne conduit pas dans tous les cas à la répartition du loyer. D'une part, selon la lettre de cette disposition, le partage ne doit être effectué que si les personnes qui vivent sous le même toit ne sont pas incluses dans le calcul des PC. D'autre part, la jurisprudence rendue jusque-là en matière de répartition du loyer n'a pas perdu toute sa signification, de sorte que des exceptions restent possibles. Notamment, le fait que la cohabitation est dictée par un devoir (d'entretien) juridique ou moral peut conduire à une autre répartition du loyer, voire - exceptionnellement - à une renonciation à toute répartition du loyer. La jurisprudence rendue sous l'ancien droit reste d'actualité sous l'empire de l'art. 16c OPC-AVS/AI (ATF 142 V 299 consid. 3.2.1; arrêts du Tribunal fédéral 8C_6/2025 du 7 mai 2025 consid. 4.2.3 ; 9C_153/2022 du 26 avril 2023 consid. 7.2.2; 9C_326/2022 du 23 novembre 2022 consid. 3.2.1).  

3.8 La chambre de céans a considéré qu'une bénéficiaire de prestations n'avait pas un devoir moral envers sa fille majeure et sa petite-fille qui partageaient son logement, dès lors que la fille pouvait s'adresser, en dernier ressort, à l'hospice pour subvenir à son entretien et à celui de sa fille (ATAS/1396/2012 du
21 novembre 2012). Elle a nié un devoir d’entretien ainsi qu’un devoir moral pour une mère âgée de plus de 85 ans qui avait hébergé son fils majeur, dans la mesure où ce dernier aurait pu demander à l’hospice de payer une participation à son loyer ; elle n’a pas retenu des circonstances particulières autorisant une dérogation à la règle générale du partage à parts égales du loyer, étant donné que le soutien apporté par le fils, même s’il rendait de nombreux services à sa mère et qu’il permettait ainsi de diminuer considérablement les coûts sociaux, ne dépassait pas ce qui pouvait être attendu des proches partageant le même logement et qu’il ne pouvait donc pas être considéré que le fils avait fourni une contreprestation, correspondant à sa part de loyer, sous forme de prestations en nature (ATAS/620/2018 du 29 juin 2018 consid. 9).

3.9 Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. aussi ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références).

Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 142 V 435 consid. 1 et les références ; ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

4.             En l’occurrence, il n’est pas contesté que la créance en restitution n’est pas périmée. L’intimé a procédé au recalcul des prestations de la recourante dès le 1er juin 2022, sur la base des informations reçues de l’OCPM en octobre 2024, soit le fait que l’appartement sis au chemin C______, à Thônex, était également occupé par la fille de la recourante et ses trois petits-enfants. Or, dans les décisions de prestations antérieures, soit en particulier celle du 1er avril 2022, l’intimé avait procédé aux calculs de prestations en tenant compte d’un appartement occupé par le seul couple, sur la base des indications fournies par la recourante dans sa demande de prestations. Cet élément constitue ainsi un fait nouveau pertinent justifiant la révision des décisions entrées en force.

Il convient donc d’examiner le bien-fondé de la décision de restitution.

Devant la chambre de céans, la recourante ne conteste pas que sa fille, et les deux premiers enfants de celle-ci, résident à son domicile depuis le 8 mai 2022. La troisième enfant de sa fille y réside également depuis sa naissance le 10 avril 2023. Or, conformément aux considérants qui précèdent, lorsque plusieurs personnes occupent le même foyer ou font ménage commun, il y a lieu de partager à parts égales le loyer à prendre en compte dans le calcul du droit aux prestations complémentaires. Cette règle vise à empêcher le financement indirect de personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires. Or, il n’est pas contesté que la fille de l’assurée, et les trois enfants de celle-ci, ne sont pas compris dans ledit calcul. Peu importe à cet égard qu’ils contribuent effectivement ou non au paiement du loyer, la prise en compte d’un loyer proportionnel n’étant pas conditionnée aux ressources des personnes non comprises dans le calcul des prestations. Le principe du partage du loyer n’est partant pas contestable, les prestations complémentaires n’ayant pas pour fonction de subvenir aux besoins de personnes non bénéficiaires de prestations complémentaires (ou bénéficiant d’un droit propre aux prestations).

Reste à déterminer s’il existe des circonstances particulières justifiant de déroger à la règle de la répartition du loyer par tête, étant rappelé qu'une dérogation ne doit être admise qu'avec prudence.

En l’occurrence, il n’est pas contesté que la recourante n’a aucune obligation d'entretien, ni devoir moral, envers sa fille majeure et ses petits-enfants, aussi louable que puisse être le partage de son logement avec eux. S’ajoute à cela qu’aucun élément au dossier ne permet de retenir qu'un des membres du foyer utiliserait le logement de manière prépondérante à la part qui lui est imputée dans la répartition par tête. La recourante indique certes occuper une chambre avec son mari, alors que sa fille, et ses trois enfants, en occupent une (seule) autre. Les pièces au dossier confirment au demeurant que l’appartement en question est composé de quatre pièces. Ce seul allégué ne suffit toutefois pas à démontrer que la recourante et son mari occuperaient, à eux seuls, la plus grande partie de l’appartement au sens de la jurisprudence précitée, étant précisé que la recourante ne soutient pas que les différents occupant auraient convenu d’une répartition particulière des locaux (ATF 105 V 271). Enfin, la recourante fait valoir que sa fille les aiderait pour leurs rendez-vous médicaux et les tâches administratives. Or, un tel soutien ne dépasse pas ce qui peut être attendu de proches partageant le même logement (cf. ATAS/620/2018 du 29 juin 2018 consid. 9). Il ne peut ainsi être considéré que la fille de la recourante a fourni une contreprestation, correspondant à sa part de loyer, sous forme de prestations en nature.

La recourante se prévaut enfin d’une discussion au guichet du SPC avec un représentant de celui-ci, qui lui aurait indiqué que « c’était bon ». Pour autant que, par cet argument, la recourante se plaigne d’une violation du droit à la protection de sa bonne foi, ce qui n’est pas d’emblée évident, il y a lieu d’écarter ce grief. Outre que la recourante ne fournit aucune précision quant au renseignement obtenu et les informations transmises à l’intimé par la recourante à cette occasion, celle-ci n’a pas allégué avoir pris des dispositions auxquelles elle ne saurait renoncer sans subir de préjudice. Par ailleurs, et comme on le verra, la question de sa bonne foi sera examinée dans le cadre de l’examen de la remise de l’obligation de restituer.

Aussi, rien ne s’oppose à la division du loyer de l’assurée par le nombre de personnes occupant le logement. Sur la base des données de l’OCPM, que la recourante ne conteste pas, il convient de retenir que, du 1er juin 2022 au 30 avril 2023, l’appartement était occupé par cinq personnes (soit la recourante, B______, D______, E______ et F______) et que du 1er mai 2023 au 31 janvier 2025, il était occupé par six personnes (soit la recourante, B______, D______, E______, F______ et G______). Or, en pareilles circonstances, et conformément aux dispositions précitées, le loyer effectif, dont il n’est pas contesté qu’il n’atteint pas le montant maximal reconnu pour des personnes vivant en communauté d’habitation (cf. art. 10 al. 1ter LPC), est réparti à parts égales entre toutes les personnes, soit cinq, puis six, au total. La recourante ne conteste, enfin, pas le montant du loyer de CHF 23’448.- (charges comprises) présenté au SPC.

C’est partant à juste titre que le SPC a tenu compte d’un loyer de CHF 9'379.20 pour la période du 1er juin 2022 au 30 avril 2023 (CHF 23’448.- / 5 x 2) et d’un loyer de CHF 7'816.- pour la période du 1er mai 2023 au 31 janvier 2025 (CHF 23’448.- / 6 x 2), en lieu et place du loyer de CHF 15'000.- retenu dans la décision initiale. Il convient donc de confirmer la décision entreprise, en tant qu’elle réclame le montant de CHF 22'288.- à titre de prestations complémentaires fédérales et cantonales perçues à tort pour cette période.

Le recours doit ainsi être rejeté.

S’agissant des allégations de la recourante quant à sa bonne foi et au fait qu’elle n’est pas en mesure de rembourser cette somme, elles seront examinées dans le cadre de la demande de remise qui, en tant que telle, doit être traitée par le SPC après l’entrée en force du présent arrêt. La demande de suspension de la cause dans l’attente de la décision sur la remise sera partant rejetée et la cause transmise à l’intimé pour raison de compétence.

5.             Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et transmis à l’intimé dans le sens des considérants.

La procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 

 

******


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Transmet la cause au SPC pour examen de la demande de remise de l’obligation de restituer.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Sylvie CARDINAUX

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le